Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-11-25
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 25 novembre 1908 25 novembre 1908
Description : 1908/11/25 (N14138). 1908/11/25 (N14138).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7571025p
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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K'iéiss:—4 Primaire An 117J * cttNQ CENTIl'.I LE NUMERO
- W"- H
Mercredi 23 Novembre 1908. — H114138
LE XIX" SIECLE
ANNONCES ,
AUX BUREAUX DU JOURSAL
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TRIBUNE LIBRE :
Politique de Gribouille
Gribouille, pour ne pas se
mouiller, se jetait à l'eau ;
la majorité républicaine ris-
que fort de se noyer, sous
prétexte d'éviter l'orage.
Sans doute, le temps me-
nace..
Quelques-uns — qui s'imaginent mê-
me avoir entendu les premiers coups de
foudre, et qui ne se sentent pas en sé-
curité au Palais-Bourbon,. — cherchent,
en hâte, un abri plus sûr au Luxem-
bourg.
A en juger par ce qui se passe en
ce moment, on peut supposer que les
deux tiers de la Chambre, s'ils y pou-
vaient trouver place, se réfugieraient
avec empressement au Sénat.
On annonce, en tous cas, qu'environ
soixante de nos collègues solliciteront,
en janvier prochain, les suffrages des
électeurs sénatoriaux.
Parmi eux, plusieurs ne comptent
même pas une législature. C'est là un
fait grave, inquiétant, sans précédent.
Il faut avoir la loyauté, le courage d'en
démêler les causes, d'en dégager les
leçons.
La Chambre élue en 1906 aura bien-
tôt parcouru les trois quarts de sa car-
rière. Qu'a-t-elle fait ? Rien.
Elle a suivi, séduite, charmée, fasci-
née, la sirène gouvernementale qui J'en-
traîne aux abîmes.
Et voilà pourquoi quelques-uns se
hâtent d'embarquer pour le Sénat.
Ce n'est pas la raison unique : la
plus forte est assurément que la dis-
proportion est énorme entre les avan-
tages" et les charges des deux assem-
blées : les sénateurs sont élus pour
neuf ans, les députés ne le sont que
pour quatre ; les sénateurs n'ont à sa-
tisfaire qu'un collège électoral res-
treint, placé sous l'action directe des
préfets ; les députés sont responsables
devant le suffrage universel ; les frais
d'élection sénatoriale sont des plus mi-
nimes, les frais d'élection législative de
plus en plus lourds. -
Il y va du salut même du régime par-
lementaire d'accomplir la réforme élec-
torale, de rétablir l'équilibre entre le
suffrage restreint et le suffrage univer-
sel.
Le mal présent, que révèle l'exode en
masse des hôtes du Palais-Bourbon au
Luxembourg, réside dans- la désaffec-
tion réciproque des députés et élec-
teurs.
Ce mal vient d'une politique qui dé-
moralise, à la fois, les élus et le corps
électoral.
- Il n'y a plus, aujourd'hui, ni pro-
grammes, ni doctrines, ni partis, ou
plutôt ils se mêlent et se confondent
dans un véritable chaos.
La raison d'être du régime républi-
cain est dans l'opposition des idées,
dans le choc des opinions, d'où jaillis-
sent lumière et progrès.
Il ne s'agit pas seulement d'opposi-
tion dynastique : en Amérique et en
Suisse, il n'y a que des républicains ;
et cependant deux grands partis s'y dis-
putent la direction des affaires. C'est
la loi des démocraties. En France, le
gouvernement de M. Clemenceau tend
de plus en plus à paralyser l'effort dé-
mocratique par la confusion, l'imbro-
glio des partis.
Nous en sommes là que le ministère
est d'étiquette radicale-socialiste et
que ce sont les modérés et les progres-
sistes qui se réclament le plus haute-
ment de lui.
Un exemple fera, mieux que tous les
raisonnements, éclater cette vérité.
Dans les Vosges, deux listes de can-
didats aénat sont dès maintenant en
présence.
L'une est formée de MM. Méline,
Boucher et d'Alsace ; l'autre de MM.
Fleurant et Mathis, députés, auxquels
s'est adjoint un conseiller général.
L'une est progressiste ; l'autre radi-
cale. Toutes, les deux se réclament de
la politique du gouvernement.
Dimanche dernier, à Epinal, l'hono-
rable M. Méline a prononcé un grand
discours. Je déclare, tout d'abord,
qu'un homme comme M. Méline a sa
J'hee marquée au Parlement, et je se-
rais volontiers, si elle était applicable,
partisan de la représentation propor-
tionnelle, pour conserver, dans les
Chambres, les hommes de grande valeur
de tous les par-tis.
Mais il n'en reste pas moins qu'en
dehors du point de vue économique, M.
Méline demeure le représentant le plus
autorisé de la politique progressiste'
opposée à la politique de notre parti.
Or, c'est sous l'égide même du prési-
dent du conseil qu'il s'est délibérément
placé, dimanche dernier*
Il s'est réclamé" à plusieurs repri-
ses, des discours, des actes du chef du
gouvernement. Il s'est mis du même
côté que lui de la barricade. Il s'est
approprié le discours de Rennes ; il
s'est rallié au langage de M. Clemen-
ceau. ,'
Que va-t-il rester à dire aux candi-
dats de la liste radicale qui sont, eux
aussi, des soutiens du gouvernement ?
Equivoque, confusion, incohérence.
Qu'y pourraient comprendre le suffra-
ge restreint et le suffrage universel ?
Et, encore, sont-ce, dans les Vosges,
des radicaux modérés qui s'opposent
aux répuMi&a***# progressistes ; si c'é-
taient des radicaux-socialistes, il serait
plus déconcertant encore de voir les
deux listes communier dans le même
amour du gouvernement.
Or, c'est là qu'est, pour la majorité
de gauche, le grave péril qui la mena-
ce : elle s'abandonne au ministère, le
suit dans une politique équivoque qui,
pêle-mêle, enchevêtre les programmes
et les partis, si bien qu'aux élections
générales prochaines les plus doulou-
reuses surprises peuvent résulter de
ces lamentables confusions.
Si le parti radical et radical-socia-
liste ne sait pas se ressaisir et redeve-
nir lui-même il finira par se'fondre, en
quelque sorte, dans un bloc immense
et hétérogène, par y perdre sa vie pro-
pre et par disparaître.
Sous prétexte d'échapper à des dan-
gers imaginaires, il aura fait, comme
Gribouille, qui, pour éviter la pluie, se
jetait à l'eau. ,
Paul BOURÉIY,
Député de Z'Arddclht.
■——i krnrnmmmm— »i i < ■ ■ ■
LA POLITIQUE
MELINE ET CLEMENCEAU
M. Méline fait preuve d'un
beau courage. Il ose, après
dix ans, reparaître pour glori-
fier une politique — la sienne
— que le pays républicain n'a
cessé de condamner.
Après avoir gouverné deux ans durant,
2a République avec le concours de toutes
les droites et pour leur plus grand pro-
fit, M. Méline, aujourd'hui, s'improvise
juge et,condamne les ministères qui ont
succédé à son administration néfaste. Il
fallait s'y attendre et si cette manière
n'est pas dépourvue d'audace, du moins
ne manque-t-elle pas de logique. Le père
o'u bloc de droite ne pouvait admettre la
politique du bloc de gauche. Pour justi-
fier ses compromissions et ses intrigues
avec les adversaires de la République, il
proteste contre les « adversaires de la
société » et s'indigne de la présence au
banc des ministres de deux d'entre eux,
Briand et Viviani, « d'autant plus re-
doutables, dat-il, que leur valeur person-
nelle et leur talent sont indiscutables. »
Mais où il se console, c'est en consta-
tant que M. Clemenceau a adopté sa
« manière » et ses tendances. Il a adres-
sé au président du conseil quelques élo-
ges, en passant, qui ne manquent point
de saveur. Quand il s'agit du « salut de
la société » et d'une commune politique
.d'entente avec la réaction, on peut ou-
blier vraiment les polémiques anciennes
et les campagnes où le directeur ¡le,
l'Aurdre malmenait le ministère qui'
poursuivit Zola.
Evidemment, la politique ae M. Cle-
menceau est bien faite pour ravir M.
Méline. Depuis douze ans, personne n'a-
vait osé faire une réaction aussi vigou-
reuse que celle qu'a voulu opérer M. le
président du conseil. L'ancien rédacteur
du « Bloc » éclairé de lumières soudai-
nes depuis qu'il est au pouvoir, la juge
nécessaire,et n'attribue à personne la ca-
pacité de la mieux réussir que lui. M.
Méline a la modestie de lui concéder la
primauté. D'ailleurs, l'ancien président
du conseil parfois, en fermant les yeux
s'imagine — ses hommes étant au pou-
voir, ses procédés étant essentiellement
usités — qu'il gouverne encore sous le
pseudonyme de Clemenceau.
On le savait, mais il a tenu à le décla-
rer 'lui-même, afin qu'il n'y eut p!us de
doute possible et pour que ses amis com-
prissent leur devoir et connussent leur
chef nouveau.
Avec une satisfaction' visible, il a ré-
pris à son compte la formule de Cle-
menceau sur «. la république ouverte n et
de « plus d'ennemis à droite, ïï - V
Ainsi les "deu^.ûtièures "ont ptr praïfc
quer un loyal échange ; M. Méline a
;.don la formule d'action, M, Clmen."
eau, a fourni — il y exœlle — le eit-
notiv oratoire.
C'est un prêté pour un rendu.
LES ON-DIT
- NOTRE AGENDA
Aujourd'hui mardi.
Lever du soleil, à 7 h. 24 ; coucher, à
4 h. 9.
Courses à Enghien.
Maujantana. *
Il s'entretenait des candidatures à
l'Académie française avec M. Briand.
Il se montrait aimable, empressé, flat-
teur. Tout à coup, à brûle-pourpoint, il
dit au garde des sceaux :
— « C'est vous qui devriez vous pré-
senter, monsieur le ministre ».
- « Ah ! ma foi non ! »
« Et pourquoi ? »
— « Parce que j'estime que je suis
encore trop jeune, sans bagage littérai-
re suffisant. L'Académie, d'ailleurs,
m'apparaît un peu comme un cOÙron-
nement. comme une fin de carrière.
(après un silence et souriant). tenez,
c'est vous qui devriez vous présenter ! »
AUTREFOIS
Rappel du 25 novembre 1872. — Trente-
deux membres du conseil municipal de Pa-
ris envoient une adresse à M. Thiers pour
le féliciter d'avoir proclamé dans son Mes-
sage la nécessité de consolider la Repu-
blique, et pour Im demander de permettre
au pays de se prononcer.
M. l'hiers a encore été entendu par la
commission Kerdrel. Il a renouvelé ses
déclarations énergiquement républicaines
de la veille. L'avis général est qu'une rup-
ture est imminente entre le président de
la "République et les monarchistes de l'as-
semblée. -
Au. cours df, la réception qui a eu lieu
l'autre soir à la présidence, M. Thiers a
raillé les projets de triumvirat militaire des
réactionnaires. Il a manifesté l'intention
de persévérer dans la voie républicaine
qu'il s'est tracée. Sa confiance dans l'ai-
mée et dans le pays est complète.
La publication du journal radical La Ré-
surr-ection, qui paraissait depuis deux
jours. est interdite.
Les eaux de la Seine marquaient !Iiei
plus de cinq mètres à l'éliage du Pont-
Royal.
Une enquête va être ouverte sur le pro-
jet d'établissement d'un réseau de « elle-
mins de fer à traction par chevaux » dans
Paris.
Le jock?y Bloss, qui gagna, deux fois le
Grand Prix de Paris et cinq fois le Derby
d'Epsom, vient de mourir des suites d'une
chute faritQ. à Chantilly en dressant un des
chevaux du duc d'Aumale.
Madame Bèche
Après Mme La Pierre, voici Mme Bê-
che, dont le mari fut dans « la musique
de Louis XV. ». Et contrairement à
maintes et maintes femmes de son
temps, cette Mme Bêche — ce qui la
distinguait des autres — s'obstina tou-
jours à ne point. tromper son mari.
D'où cette chanson que rimait « un
grand seigneur » éconduit, mais sans
rancune. Elle est aussi rare que le sont
les couplets sur Mme La Pierre.
Qu'il est heureux, notre ami Bêche.
Ah ! qu'il possède un joli bien !
Moulin, four, pressoir, chasse et pêche,
A son fief il ne manque rien.
C'est là que le trop heureux Etelie,
Comblé des faveurs du destin,
Vit content et bêche, bêche,
Vit content et bêche son jardin.
Sous deux jolis rochers d'albâtre,
L'amour aiguise tous ses traits.
Une butte en amphithéâtre
Couronne un vallon toujours frais
C'est là que le trop. etc.
Un galant bosquet, de son ombre,
Couvre un joli petit château,
Dont l'entrée est étroite et sombre :
Mais l'amour y tient son flambeau 1
C'est là que le trop. etc.
Une pompe à simple sculpture
Dont Famour conduit le travail,
Fait jaillir une source pure
Dans une conque de corail.
C'est là que puise l'ami BêChe
Pour arroser, soir et matin,
Le terrain qu'il bêche, bêche, bêcher
Le terrain qu'il bêche en son jardin.
Mais ce jardin du règne Flore,
Où brille la rose at le lys,
On ne l'a vu produire encore
Que des fleurs et jamais de fruits:
Redouble d'ardeur, ami Bêche, -
Il faut que Pomone ait son tour =
Force coups de bêche, bêche, bêche,
Force coups de bêche, nuit et jour S
Je n'ai qu'ébauché la peinture
Des beautés du petit château. ;
Que j'en ferais, d'àprès nature,
Un fidèle et charmant tableau !
Mais l'amour ne permet qu'à Bêche
L'accès de ce réduit divin
Et lui seul en bêche, bêche, bêche
Et lui seul en bêche le jardin 1
Aveu dépouillé d'artifice
Louis XIV aimait beaucoup le comte
de Gramont qui était fort âgé - c'est
ce même comte de Grarnont dont Ha-
milton — son beau-frère je crois —
nous a raconté les aventures célèbres
dans ces fameux mémoires qui sont un
chef-d'œuvre de malice et d'élégante
espièglerie.
Un jour que Louis XIV avait rencon-
tré l'évéque de Senlis, il lui demanda :
« quel âge avez-vous donc, Monsei-
gneur ? — Peut être plus de. quatre-
vingts ,ans' sire, répondit-il ; d'ailleurs,
,rien de plus facile à connaître, je dois
avoir le même âge que. le comte de
Gramont car "nous avons étudié en-
semble au même collège I, '*
Quelques- jours après; te :teârd voo-
Hut-.que.J.e xoj.el'Q.saf le eoÜi vc.: ,-
>
- Eh bien. de Gramont,. lui diHÙ'rch
votidrlez-vous toujours ca-
■ elisî votre âge, comme les jolies fem-
Lmes 1 Diantre à quoi sert tant de co-
quetterie ? Je le connais votre âge ! J'en
fus hier instruit par un témoin irrécu-
sable :- c'est l'évtque de Senlis, votre
camarde, avec qui vous avez étudié e
semble au même collège.
— Pardonnez-moi, sire, riposta de
Gramont, mais l'évéque de Senlis n'ac-
cuse pas juste ; parce que ni lui ni moi,
n'avons jamais étudié ! a
Les paroles et les actes
LA REACTION
M. Clemenceau - naguère 1 - nous di-
sait :
« La réaction déchaînée sëiM. Ecoulez les
conversations, lisez les journaux, il n'est
question que de réprimer, de poursuivre, de
condamner. On ne peut plus, tolérer que.
etc. » Chacun Huit la plirase au gré de ses
antipathies.
« Depuis qu'il - est au pouvoir. « le - parti ré-
publicain vit dans la crainte des idées qui
l'y ont porté. Etre républicain sous l'Em-
pire était facile : il suffisait de parler ou
d'écrire. La République proclamée it fallait
agir : on ne l'a pas osé. »
M. Clemenceau nous disait aussi :
« Quand on a ruiné les croyances d'un peu-
ple, quand on lui a prêché la révolte contre
ses maîtres venus de Dieu., quand on lui
a soufflé l'esprit d'indépendance et de li-
berté, quand on lui a promis le droit, la
justice, el quand, séduit par cette promes-
se, enivré de cette espérance, il a fait table
rase du passé pour tenter la grande aven-
ture, il n'est plus pos-sible de le laisser en
chemin, sous prétexte qu'on a des doutes
ou qu'on est fatigué.
Vous avez parlé au peuple de, droit, et
maintenant il veut tout son droit. Au nom
de quelle autorité prétendez-vous lui faire
sa part, au nom de qui direz-vous : non ? »
Et M. Clemenceau nous disait encore :
« Je veux que l'histoire ne se répète pas
toujours. Il n'en est pas moins vrai que
l'état d'opinion créée, par la politique oppor-
tuniste, se raidit de plus en plus dans une
,ivei,iflie résistance aux revendications légi-
times de l'esprit socialiste.
La réaction déchainée par les républi-
cains les balayera déshonorés pour se ré-
fugier dans la force brutale, s'ils ne se
hâtent de lui barrer la route quand il en
est temps encore. »
Ja veux que J'histoire ne se répète pas
toujours, disait excellemment M. Clemen-
('cau. Et Clemenceau s'empresse de recom-
mencer Dupuy.
Alas ! poor Jorick !
■ ■■■
L'avortement
des Retraites ouvrières
Toute la réaction et les progressistes -
ainsi nommés parce qu'ils tournent le dos
au progrès — escomptent l'échec des re-
traites ouvrières.
Les députés ont eu beau les voter, il y
a trois ans, les électeurs ont eu bedu les
réclamer, une fois encore, en 1906 ; MM.
Cuvinot, Poirrier et tutti quanti n'en veu-
lent absolument pas. La commission séna-
toriale s'est livrée à de si audacieuses ma-
nifestations rétrogrades, que les vrais ré-
publicains ne peuvent plus s'attarder en
pareille société.
Cela ne signifie pas que la partie soit
perdue. Il nous reste encore la prochaine
intervention à la tribune de M. Monis —
et qu'il a annoncée lui-même. Il nous reste
aussi l'espoir d'une action décisive de M.
le ministre du travail. Pour couper court
à toutes les manœuvres, M. Viviani doit,
sans tarder, demander l'urgence pour ia
discussion de son projet par le Sénat.
Mais on ne saurait plus, sans péril pour
une réforme démocratique, ajourner cette
nécessaire décision.
.———————————— ———————————.
CARNET DU LIBRE PENSEUR
Les prêtres sont chassés
des écoles romaines
La présence, à la tête de la municipalité
de Rome, d'un maire l'adiical, libre penseur
et franc-maçon, n'est pas un des plus min-
ces soucis dont s'allectc le Vatican dans
sa lutte contre l'idée républicaine et contre
l'esprit critique de la science ; d'autant
que le maflre en question vit en très bonne
intelligence avec le Quirinal et que le roi
d'Italie en personne le tient en très haute
estime et ne s'en tache nullement
Une des récentes décisions prises par la
municipalité romaine vnent de jeter l'épou-
vante dans l'entourage de Pie X, où l'on
crie sur tous les tons à l'abomination de
la désolation. La décision en question sup-
prime l'enseignement religieux dans tes
écoles-primaires de la ville de Rome. Oui,
c'est comme j'ai l'honneur de vous l'ap-
prendre, amis lecteurs, l'enseignement re-
ligieux cesse de faire partie du program-
me officiel dans les écoles de la « Ville
éternelle » où les enfants du peuple vont
puiser leur modeste instruction. Nul scan-
dale, aux yeux de l'Eglise, ne saurait dé-
passer celui-là.
Le règlement qui vient d'être adopté, et
qui parie le nom de son auteur, M. Rava,
donne aux pères de famille le droit de con-
fier renseignement religieux à des maires
choisis par eux, sous deux conditions : ia
première, que les professeurs de catéchisme
aient le diplôme d'instituteur, la seconde
que leur choix soit approuvé par le con-
seil provincial. Ces deux conditions rem-
plies, le maire al tenu à l'obligation d'ou-
vrir les locaux scolaires aux maîtres du
catéchisme
Ce n'est pas, comme on le voit, l'idéal
de la, ncttlralilé en matière scolaire; mais
c'est un acheminement vers la séparation
de l'école et de l'Eglise. -
Des conflits naîtront, des. difficultés S.
ront créées par le clergé, qui ne sauraient
manquer' de fendre, nêcessa'Íl'es.' à. brève,
éçliéanee, des mesures plus radicales. 7
Ce: qui s'est produit -en- France sel
dulm à RomC.L'estentidlel [jue l'OJ¡ ait.
commencé par '-chasser le ln.(tre de l'école
N'est-ce pas un signe des temps que ceite
dégringolade de l'influence religieuse clans
la çifj mémiJ dos papes e, - Pi G*
QUESTIONS MILITAIRES
Avancite et Gaspillage!
Décidément cette excellente sœur
« l'artillerie » est admirable d'audace.
Elle mène le bluff « de la supériorité de
son matériel par la façon de le mettre
;en valeur .» avec une maestria incompa-
rable.
Le Parlement, noyé dans cette équi-
voque « des batteries qui sont plus for-
ites parce qu'elles sont moins fortes »,
s'en va à la dérive. Espérons que cette
nouvelle crue nationaliste l'entraînera
sur le rivage où il reprendra pied.
Jetons nous-même un rayon de lu-
mière sur la mentalité de ce milieu dé-
bordant- « l'artillerie » et essayons de
faire comprendre « le bluff ». Tâchons
de prouver que cette nouvelle organi-
sation de l'artillerie cache comme tou-
tes les conceptions antérieurement réa-
lisées dans la famille, des besoins et des
appétits au moins exagérés.
De Bange, de 1875 à 1878, créa huit
modèles de bouches à feu dont six sont
encore en service et les deux autres, en
maintes circonstances regrettées. Le
remplacement de ces deux-là créa la né-
cessité d'une artillerie lourde. De Bange
fut mis dans l'obligation de quitter l'ar-
mée avec le grade de côlon el.
De Bange avait, majheureusement
pour ltij,Malis les veines, du sang d'in-
génieur : la place n'est pas dan-s un
régiment, disait-il ! — 'Et ses détrac-
teurs de lui répondre : l'invention n'est
pas le monopole des ingénieurs, mais
le monopole des artiPeurs ! — L'his-
toire ne dit pas s'il s'agit des artilleurs
à pied bu des artilleurs à cheval ?
L'invention c'était la mine. d'avan-
cement, à exploiter ; voilà ce qu'ils
voyaient de plus clair. ,
De Bange disparu, de petits syndicats
se constituèrent dans le milieu poly-
technicien avec les fils à papa de mar-
que, pour l'exploitation de la mine. Jus-
qu'à l'avènement du canon-progrès les
résultats de l'exploitation furent peu
brillants, de Bange avait vraiment trop
prélevé, il leur fallut pour vivre mettre
jen valeur ties maigres filons qui "lui
avaient échappé. Mais ils creusèrent la
mine !
L'opinion publique réclamait, paraît-
il. la réfection du matériel d'artillerie ;
il lui fallait coûte que coûte, des ca-
nons à tir rapide. Elle a lieu aujour-
d'hui d'être satisfaite ; on lui en a don-
né des petits, des gros et des moyens 1
Ce fut l'ère des. vaches grasses. —
Sous la réserve - expresse de s'adorer
mutuellement, de se défendre envers et
contre tous, de se. pousser respective-
ment aux plus hauts grades de la hié-
rarchie, les syndiqués se partagèrent la
mine en pleine prospérité.
Les plus cotés eurent l'invention d'un
canon. tout entier ; les autres, selon l'or-
dre de leur influence, obtinrent l'in-
vention d'une partie de canon seulement
ou bien de projectiles, de systèmes de
pointage, de lunettes, de roues, de ti-
mons et de crochets d'attelage. Tout ré-
iOOmment, l'un d'entre eux, très b-erë
apparenté, reçut mission de trouver unf
paratonnerre pour batteries de campa-
gne. Enfin, en se poussa, au ministère
de la guerre et dans les commissions
de réceptions, pour faire -de a places
aux syndiqués, officieusement chargée
de la mise en valeur de l'exploitation.
Petit à petit, le syndicat s'affirma elj
songea à régulariser sa situation. Il de-*,
vint l'Inspection des Fabrications. Celle-
ci accoucha aussitôt de l'Inspection du
matériel de 75.
Sur toutes ces brillantes inventions,
le marchand de ferraille a aujourd'hui
prélevé sa large part, mais les syndi-
quas ont été comblés de .'(îroix et der
grades ; ils sont tous officiers sifpéi
rieurs, généraux ou en passe de le de-
venir. Tout en restant artilleurs, ils s&
sont élevés dans la hiérarchie comme
ingénieurs ; demain, ils commanderont
des corps d'armée.
Une autre conséquence de l'exploita-
tion de la mine, peu importante, il esl
vrai, per des opérateurs plus qu'en-,
thousiastes, fut le gaspillage des crédita
alloués pour organiser la défense na-
tionale. Malgré qu'on eut beaucoup;,
d'argent à dépenser, on n'en eut jamais
assez pour le grand nombre prévu d'in-«,
ventions à exploiter ; les approvision-
nements de la réserve de guerre de ce
fait furent sacrifiés.
Mais, l'artillerie française jouit pré-
sentement d'un matériel incomparable ;
c'est la première artillerie du monde.,
Elle possède notamment un canon de
montagne admirable, en fdeux pièces.,
C'est le canop-voyageur ; il passe et
repasse la Méditerranée. Les artilleurs
d'Afrique et ceux des Alpes, probable-
ment par modestie, se renvoient l'hon-
neur de l'employer. -
Elle dispose d'un c?non de campa-
gne qui n'a pas son équivalent. C'est
son meilleur ouvrage ; néanmoins, cer-
tains esprits chagrins le préféreraient
moins lourd et plus solide. Pour en'
doter les batteries à cheval, on. cherche
à f alléger en. limant les écrous.
Elle détient le record, en Europe,
pour l'artillerie lourde, avec un canon
à la ferraille et un autre qui aura beau-
coup de peine à ne pas y aller.
Enfin, elle jouit d'un canon de cote
superbe, mais qui ne fonctionne pas.
Quand on défend les côtes devant le
ministre, c'est avec un vieux 240 da
Bange.
Cette bonne besogne n'a guère coûté
que' 95 millions chaque année à la Fran-
ce et cela depuis vingt ans ; c'est pro-
bablement pour en consacrer la valeur
que le Parlement se dispose à ratifier.
la nouvelle conception de « l'artillerie ».
l'absurde et ridicule batterie à 4 pièces
la batterie tout en cadres.
Vraiment ce sont messieurs les syn-
diqués qui ont raison, la, mine de. pa..
îriotisme est inépuisable 1 ¡
A LA CHAMBRE
L'avancement dans les Postes, - M. Charles Dumont dénonce
la pratique des notes secrètes. — M. Simyan déclare
ne pas connaître cet abus. — Les promesses
du sous-secrétaire d'Etat.
M. Brisson préside la séance du matin.
La Chambre continue l'examen du bud
get des postes.
M. Benazet expose les desiderata des re
ceveurs et receveuses des postes. M. d(
Folleville défend les revendications de
sous-agents.
M. Chautard, rapporteur, en' réponse t.
:une intervention de M. Ch. Deloncle, an
nonce qu'un crédit nouveau permetra dr
relever certains traitements de petits em-
ployés.
M. Bedouce sollicite la continuation des
améliorations commencées pour divers ser-
vices : outillage, wagons postaux, trans-
formation des bureaux de poste trop sou-
vent installés en de déplorables conditions
d'hygiène, substitution du, système de )a
conversation taxée à l'ahonnement forfai-
taire, pour les communications téléphoni-
ques.
— Un projet de loi est déposé visant ce
dernier point, a répondu M. Simyan, la pa-
role est à la Chambre ; quant aux autres,
le budget en discussion fait beaucoup plus
que ceux des précédentes années.
M. Bedouce a demandé au sous-secrétai-
re d'Etat -de maintenir au personnel les
garanties qui lui sont acquises. -
Il a terminé par l'éloge des agents qui,
blessés dans la catastrophe de Grisoller,
refusèrent de quitter le wagon-poste avant
d'avoir recueilli et mis en place toutes les
dépêches. -
M. Simyan, en quelques mots, et la
Chambre, par ses vifs applaudissements, se
sont associés à ces félicitations.
M. Rabier préside la séance de l'après-
midi.
LA CRISE DES TELEPHONES
M. Chastenet réclame l'abaissement des
tarifs téléphoniques.
M. Chdstenct. - Le prix d'abonnement au
téléphone' en France est' plus é'cvâ qu'tn aucun
ullLte pays. Il serait indispensable, de le ré-
duire dans .J.e. commun: jnlérèL du commerce,
de l'industrie et du public.
ment d'opérer cde: réducliop J cçt. engage-
ment n'a pas encore été téntf. -
Celle réforme s'impose absolument, en vue
rn(va' i,-. l'amélioration du service téléphoni-
que dr.:.r.t rorganisaUon, en France. est infé-
rieure- a rd de tocs les t\UI,fl pa.ys du mor.de.
D'autre part, il' importe que le tfouvememeni
appuie auprès du Parlement la création du
chèque posta].
M. Simyan répond aux orateurs qui se
sent fait entendre dans la discussion géné-
rale.
M. Simyan. —Au début de mes observations,
je tiens a donner à la Chambre une nouvelle,
qui, j'espère, lui donnera satisfaction.
Un des multiples reconstruits hâtivement al-
la suite do l'incondie de J'hôtel central des iélé-
phones nous sera livré dans deux jours et lo
second le rr décembre.
Nous pourrons ainsi, quinze à vingt ioui-9
plus tôt que nous ne l'avions espéré, rendre A
8.000 ou 9.060 des abonnés atteints par la. ca-
tastrophe le service dont ils ont été priyLJ.
LA DEPENSE DE L'ADMINISTRATION
Le sous-secrétaire d'Etat promet l'amé-
lioration du sort lies receveurs et receveur
ses et des retraites des sous-agents, re.
tension de. l'indemnité de bicyclette.
La situation dee wagons-poste, est .excellente,
avec la mise en service de 56 wagons nou-
veaux de 14 mètres.
L'assaiiiisse/nenL des bureaux se peursuit ac-
tivement. il y a, a Paris, 20 bureaux qui sont
absolument aménagés, et ils sont prëfs à rece-
voir: toutes les extensions possibles. -
L'echniniilraction a trait* avec une eenlpa-
gnie pour le ncl loyodes bureaux trois eu
quatre fois par an.
Au point, da vue du service fciL'graph;qu?.
nous n'avons P:l- à nous en plaindre. C'est un
des meilleurs de l'Europe
Pour le service .îèU'ijlKvninue, il va falloir
faire un tr<-\s eliort. Tnut Je monde est
d'accord oour arriver à la conversation taxf;
le plus tôt possible. Mais, au nreatabie, il faut
avoir les bureaux et les installations nécessai-
res. Un nouveau projet, qui comporte un cré-
dit de 105 millions, a été préparé. Gc crédit
devra être mis à la disposition de l'adminis-
dratioii.
L'abaissemont des taxes téJép?)onlqi;o.3 è!tt.' 1W ,
à la réforme de la conversation taxée.
DISCOURS DE Mi CHARLES DUMONT.
M. Charles Dumont intervient, à ce mo-
ment, PO)J!' diriger. linValfaquè assez viys
contre l'admiïïistrât'lon M. Simyan. Il re-
proche au- sous-sen:ôtrfire\ d'état de n'avoir. ■
pas su se tenir au système d'avancement
qu'il avait inauguré :
sonnel et lui ?
lAi foneUoriuCiU'es disent qu'après avoir n,*
♦
K'iéiss:—4 Primaire An 117J * cttNQ CENTIl'.I LE NUMERO
- W"- H
Mercredi 23 Novembre 1908. — H114138
LE XIX" SIECLE
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FONDATEUR: EDMOND ABOUT
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ADMINISTRATION : 53, RUE DU CHATEAU-D'EAU. - PARIS
TÉLÉPHONE 438.14
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
TRIBUNE LIBRE :
Politique de Gribouille
Gribouille, pour ne pas se
mouiller, se jetait à l'eau ;
la majorité républicaine ris-
que fort de se noyer, sous
prétexte d'éviter l'orage.
Sans doute, le temps me-
nace..
Quelques-uns — qui s'imaginent mê-
me avoir entendu les premiers coups de
foudre, et qui ne se sentent pas en sé-
curité au Palais-Bourbon,. — cherchent,
en hâte, un abri plus sûr au Luxem-
bourg.
A en juger par ce qui se passe en
ce moment, on peut supposer que les
deux tiers de la Chambre, s'ils y pou-
vaient trouver place, se réfugieraient
avec empressement au Sénat.
On annonce, en tous cas, qu'environ
soixante de nos collègues solliciteront,
en janvier prochain, les suffrages des
électeurs sénatoriaux.
Parmi eux, plusieurs ne comptent
même pas une législature. C'est là un
fait grave, inquiétant, sans précédent.
Il faut avoir la loyauté, le courage d'en
démêler les causes, d'en dégager les
leçons.
La Chambre élue en 1906 aura bien-
tôt parcouru les trois quarts de sa car-
rière. Qu'a-t-elle fait ? Rien.
Elle a suivi, séduite, charmée, fasci-
née, la sirène gouvernementale qui J'en-
traîne aux abîmes.
Et voilà pourquoi quelques-uns se
hâtent d'embarquer pour le Sénat.
Ce n'est pas la raison unique : la
plus forte est assurément que la dis-
proportion est énorme entre les avan-
tages" et les charges des deux assem-
blées : les sénateurs sont élus pour
neuf ans, les députés ne le sont que
pour quatre ; les sénateurs n'ont à sa-
tisfaire qu'un collège électoral res-
treint, placé sous l'action directe des
préfets ; les députés sont responsables
devant le suffrage universel ; les frais
d'élection sénatoriale sont des plus mi-
nimes, les frais d'élection législative de
plus en plus lourds. -
Il y va du salut même du régime par-
lementaire d'accomplir la réforme élec-
torale, de rétablir l'équilibre entre le
suffrage restreint et le suffrage univer-
sel.
Le mal présent, que révèle l'exode en
masse des hôtes du Palais-Bourbon au
Luxembourg, réside dans- la désaffec-
tion réciproque des députés et élec-
teurs.
Ce mal vient d'une politique qui dé-
moralise, à la fois, les élus et le corps
électoral.
- Il n'y a plus, aujourd'hui, ni pro-
grammes, ni doctrines, ni partis, ou
plutôt ils se mêlent et se confondent
dans un véritable chaos.
La raison d'être du régime républi-
cain est dans l'opposition des idées,
dans le choc des opinions, d'où jaillis-
sent lumière et progrès.
Il ne s'agit pas seulement d'opposi-
tion dynastique : en Amérique et en
Suisse, il n'y a que des républicains ;
et cependant deux grands partis s'y dis-
putent la direction des affaires. C'est
la loi des démocraties. En France, le
gouvernement de M. Clemenceau tend
de plus en plus à paralyser l'effort dé-
mocratique par la confusion, l'imbro-
glio des partis.
Nous en sommes là que le ministère
est d'étiquette radicale-socialiste et
que ce sont les modérés et les progres-
sistes qui se réclament le plus haute-
ment de lui.
Un exemple fera, mieux que tous les
raisonnements, éclater cette vérité.
Dans les Vosges, deux listes de can-
didats aénat sont dès maintenant en
présence.
L'une est formée de MM. Méline,
Boucher et d'Alsace ; l'autre de MM.
Fleurant et Mathis, députés, auxquels
s'est adjoint un conseiller général.
L'une est progressiste ; l'autre radi-
cale. Toutes, les deux se réclament de
la politique du gouvernement.
Dimanche dernier, à Epinal, l'hono-
rable M. Méline a prononcé un grand
discours. Je déclare, tout d'abord,
qu'un homme comme M. Méline a sa
J'hee marquée au Parlement, et je se-
rais volontiers, si elle était applicable,
partisan de la représentation propor-
tionnelle, pour conserver, dans les
Chambres, les hommes de grande valeur
de tous les par-tis.
Mais il n'en reste pas moins qu'en
dehors du point de vue économique, M.
Méline demeure le représentant le plus
autorisé de la politique progressiste'
opposée à la politique de notre parti.
Or, c'est sous l'égide même du prési-
dent du conseil qu'il s'est délibérément
placé, dimanche dernier*
Il s'est réclamé" à plusieurs repri-
ses, des discours, des actes du chef du
gouvernement. Il s'est mis du même
côté que lui de la barricade. Il s'est
approprié le discours de Rennes ; il
s'est rallié au langage de M. Clemen-
ceau. ,'
Que va-t-il rester à dire aux candi-
dats de la liste radicale qui sont, eux
aussi, des soutiens du gouvernement ?
Equivoque, confusion, incohérence.
Qu'y pourraient comprendre le suffra-
ge restreint et le suffrage universel ?
Et, encore, sont-ce, dans les Vosges,
des radicaux modérés qui s'opposent
aux répuMi&a***# progressistes ; si c'é-
taient des radicaux-socialistes, il serait
plus déconcertant encore de voir les
deux listes communier dans le même
amour du gouvernement.
Or, c'est là qu'est, pour la majorité
de gauche, le grave péril qui la mena-
ce : elle s'abandonne au ministère, le
suit dans une politique équivoque qui,
pêle-mêle, enchevêtre les programmes
et les partis, si bien qu'aux élections
générales prochaines les plus doulou-
reuses surprises peuvent résulter de
ces lamentables confusions.
Si le parti radical et radical-socia-
liste ne sait pas se ressaisir et redeve-
nir lui-même il finira par se'fondre, en
quelque sorte, dans un bloc immense
et hétérogène, par y perdre sa vie pro-
pre et par disparaître.
Sous prétexte d'échapper à des dan-
gers imaginaires, il aura fait, comme
Gribouille, qui, pour éviter la pluie, se
jetait à l'eau. ,
Paul BOURÉIY,
Député de Z'Arddclht.
■——i krnrnmmmm— »i i < ■ ■ ■
LA POLITIQUE
MELINE ET CLEMENCEAU
M. Méline fait preuve d'un
beau courage. Il ose, après
dix ans, reparaître pour glori-
fier une politique — la sienne
— que le pays républicain n'a
cessé de condamner.
Après avoir gouverné deux ans durant,
2a République avec le concours de toutes
les droites et pour leur plus grand pro-
fit, M. Méline, aujourd'hui, s'improvise
juge et,condamne les ministères qui ont
succédé à son administration néfaste. Il
fallait s'y attendre et si cette manière
n'est pas dépourvue d'audace, du moins
ne manque-t-elle pas de logique. Le père
o'u bloc de droite ne pouvait admettre la
politique du bloc de gauche. Pour justi-
fier ses compromissions et ses intrigues
avec les adversaires de la République, il
proteste contre les « adversaires de la
société » et s'indigne de la présence au
banc des ministres de deux d'entre eux,
Briand et Viviani, « d'autant plus re-
doutables, dat-il, que leur valeur person-
nelle et leur talent sont indiscutables. »
Mais où il se console, c'est en consta-
tant que M. Clemenceau a adopté sa
« manière » et ses tendances. Il a adres-
sé au président du conseil quelques élo-
ges, en passant, qui ne manquent point
de saveur. Quand il s'agit du « salut de
la société » et d'une commune politique
.d'entente avec la réaction, on peut ou-
blier vraiment les polémiques anciennes
et les campagnes où le directeur ¡le,
l'Aurdre malmenait le ministère qui'
poursuivit Zola.
Evidemment, la politique ae M. Cle-
menceau est bien faite pour ravir M.
Méline. Depuis douze ans, personne n'a-
vait osé faire une réaction aussi vigou-
reuse que celle qu'a voulu opérer M. le
président du conseil. L'ancien rédacteur
du « Bloc » éclairé de lumières soudai-
nes depuis qu'il est au pouvoir, la juge
nécessaire,et n'attribue à personne la ca-
pacité de la mieux réussir que lui. M.
Méline a la modestie de lui concéder la
primauté. D'ailleurs, l'ancien président
du conseil parfois, en fermant les yeux
s'imagine — ses hommes étant au pou-
voir, ses procédés étant essentiellement
usités — qu'il gouverne encore sous le
pseudonyme de Clemenceau.
On le savait, mais il a tenu à le décla-
rer 'lui-même, afin qu'il n'y eut p!us de
doute possible et pour que ses amis com-
prissent leur devoir et connussent leur
chef nouveau.
Avec une satisfaction' visible, il a ré-
pris à son compte la formule de Cle-
menceau sur «. la république ouverte n et
de « plus d'ennemis à droite, ïï - V
Ainsi les "deu^.ûtièures "ont ptr praïfc
quer un loyal échange ; M. Méline a
;.don la formule d'action, M, Clmen."
eau, a fourni — il y exœlle — le eit-
notiv oratoire.
C'est un prêté pour un rendu.
LES ON-DIT
- NOTRE AGENDA
Aujourd'hui mardi.
Lever du soleil, à 7 h. 24 ; coucher, à
4 h. 9.
Courses à Enghien.
Maujantana. *
Il s'entretenait des candidatures à
l'Académie française avec M. Briand.
Il se montrait aimable, empressé, flat-
teur. Tout à coup, à brûle-pourpoint, il
dit au garde des sceaux :
— « C'est vous qui devriez vous pré-
senter, monsieur le ministre ».
- « Ah ! ma foi non ! »
« Et pourquoi ? »
— « Parce que j'estime que je suis
encore trop jeune, sans bagage littérai-
re suffisant. L'Académie, d'ailleurs,
m'apparaît un peu comme un cOÙron-
nement. comme une fin de carrière.
(après un silence et souriant). tenez,
c'est vous qui devriez vous présenter ! »
AUTREFOIS
Rappel du 25 novembre 1872. — Trente-
deux membres du conseil municipal de Pa-
ris envoient une adresse à M. Thiers pour
le féliciter d'avoir proclamé dans son Mes-
sage la nécessité de consolider la Repu-
blique, et pour Im demander de permettre
au pays de se prononcer.
M. l'hiers a encore été entendu par la
commission Kerdrel. Il a renouvelé ses
déclarations énergiquement républicaines
de la veille. L'avis général est qu'une rup-
ture est imminente entre le président de
la "République et les monarchistes de l'as-
semblée. -
Au. cours df, la réception qui a eu lieu
l'autre soir à la présidence, M. Thiers a
raillé les projets de triumvirat militaire des
réactionnaires. Il a manifesté l'intention
de persévérer dans la voie républicaine
qu'il s'est tracée. Sa confiance dans l'ai-
mée et dans le pays est complète.
La publication du journal radical La Ré-
surr-ection, qui paraissait depuis deux
jours. est interdite.
Les eaux de la Seine marquaient !Iiei
plus de cinq mètres à l'éliage du Pont-
Royal.
Une enquête va être ouverte sur le pro-
jet d'établissement d'un réseau de « elle-
mins de fer à traction par chevaux » dans
Paris.
Le jock?y Bloss, qui gagna, deux fois le
Grand Prix de Paris et cinq fois le Derby
d'Epsom, vient de mourir des suites d'une
chute faritQ. à Chantilly en dressant un des
chevaux du duc d'Aumale.
Madame Bèche
Après Mme La Pierre, voici Mme Bê-
che, dont le mari fut dans « la musique
de Louis XV. ». Et contrairement à
maintes et maintes femmes de son
temps, cette Mme Bêche — ce qui la
distinguait des autres — s'obstina tou-
jours à ne point. tromper son mari.
D'où cette chanson que rimait « un
grand seigneur » éconduit, mais sans
rancune. Elle est aussi rare que le sont
les couplets sur Mme La Pierre.
Qu'il est heureux, notre ami Bêche.
Ah ! qu'il possède un joli bien !
Moulin, four, pressoir, chasse et pêche,
A son fief il ne manque rien.
C'est là que le trop heureux Etelie,
Comblé des faveurs du destin,
Vit content et bêche, bêche,
Vit content et bêche son jardin.
Sous deux jolis rochers d'albâtre,
L'amour aiguise tous ses traits.
Une butte en amphithéâtre
Couronne un vallon toujours frais
C'est là que le trop. etc.
Un galant bosquet, de son ombre,
Couvre un joli petit château,
Dont l'entrée est étroite et sombre :
Mais l'amour y tient son flambeau 1
C'est là que le trop. etc.
Une pompe à simple sculpture
Dont Famour conduit le travail,
Fait jaillir une source pure
Dans une conque de corail.
C'est là que puise l'ami BêChe
Pour arroser, soir et matin,
Le terrain qu'il bêche, bêche, bêcher
Le terrain qu'il bêche en son jardin.
Mais ce jardin du règne Flore,
Où brille la rose at le lys,
On ne l'a vu produire encore
Que des fleurs et jamais de fruits:
Redouble d'ardeur, ami Bêche, -
Il faut que Pomone ait son tour =
Force coups de bêche, bêche, bêche,
Force coups de bêche, nuit et jour S
Je n'ai qu'ébauché la peinture
Des beautés du petit château. ;
Que j'en ferais, d'àprès nature,
Un fidèle et charmant tableau !
Mais l'amour ne permet qu'à Bêche
L'accès de ce réduit divin
Et lui seul en bêche, bêche, bêche
Et lui seul en bêche le jardin 1
Aveu dépouillé d'artifice
Louis XIV aimait beaucoup le comte
de Gramont qui était fort âgé - c'est
ce même comte de Grarnont dont Ha-
milton — son beau-frère je crois —
nous a raconté les aventures célèbres
dans ces fameux mémoires qui sont un
chef-d'œuvre de malice et d'élégante
espièglerie.
Un jour que Louis XIV avait rencon-
tré l'évéque de Senlis, il lui demanda :
« quel âge avez-vous donc, Monsei-
gneur ? — Peut être plus de. quatre-
vingts ,ans' sire, répondit-il ; d'ailleurs,
,rien de plus facile à connaître, je dois
avoir le même âge que. le comte de
Gramont car "nous avons étudié en-
semble au même collège I, '*
Quelques- jours après; te :teârd voo-
Hut-.que.J.e xoj.el'Q.saf le eoÜi vc.: ,-
>
- Eh bien. de Gramont,. lui diHÙ'rch
votidrlez-vous toujours ca-
■ elisî votre âge, comme les jolies fem-
Lmes 1 Diantre à quoi sert tant de co-
quetterie ? Je le connais votre âge ! J'en
fus hier instruit par un témoin irrécu-
sable :- c'est l'évtque de Senlis, votre
camarde, avec qui vous avez étudié e
semble au même collège.
— Pardonnez-moi, sire, riposta de
Gramont, mais l'évéque de Senlis n'ac-
cuse pas juste ; parce que ni lui ni moi,
n'avons jamais étudié ! a
Les paroles et les actes
LA REACTION
M. Clemenceau - naguère 1 - nous di-
sait :
« La réaction déchaînée sëiM. Ecoulez les
conversations, lisez les journaux, il n'est
question que de réprimer, de poursuivre, de
condamner. On ne peut plus, tolérer que.
etc. » Chacun Huit la plirase au gré de ses
antipathies.
« Depuis qu'il - est au pouvoir. « le - parti ré-
publicain vit dans la crainte des idées qui
l'y ont porté. Etre républicain sous l'Em-
pire était facile : il suffisait de parler ou
d'écrire. La République proclamée it fallait
agir : on ne l'a pas osé. »
M. Clemenceau nous disait aussi :
« Quand on a ruiné les croyances d'un peu-
ple, quand on lui a prêché la révolte contre
ses maîtres venus de Dieu., quand on lui
a soufflé l'esprit d'indépendance et de li-
berté, quand on lui a promis le droit, la
justice, el quand, séduit par cette promes-
se, enivré de cette espérance, il a fait table
rase du passé pour tenter la grande aven-
ture, il n'est plus pos-sible de le laisser en
chemin, sous prétexte qu'on a des doutes
ou qu'on est fatigué.
Vous avez parlé au peuple de, droit, et
maintenant il veut tout son droit. Au nom
de quelle autorité prétendez-vous lui faire
sa part, au nom de qui direz-vous : non ? »
Et M. Clemenceau nous disait encore :
« Je veux que l'histoire ne se répète pas
toujours. Il n'en est pas moins vrai que
l'état d'opinion créée, par la politique oppor-
tuniste, se raidit de plus en plus dans une
,ivei,iflie résistance aux revendications légi-
times de l'esprit socialiste.
La réaction déchainée par les républi-
cains les balayera déshonorés pour se ré-
fugier dans la force brutale, s'ils ne se
hâtent de lui barrer la route quand il en
est temps encore. »
Ja veux que J'histoire ne se répète pas
toujours, disait excellemment M. Clemen-
('cau. Et Clemenceau s'empresse de recom-
mencer Dupuy.
Alas ! poor Jorick !
■ ■■■
L'avortement
des Retraites ouvrières
Toute la réaction et les progressistes -
ainsi nommés parce qu'ils tournent le dos
au progrès — escomptent l'échec des re-
traites ouvrières.
Les députés ont eu beau les voter, il y
a trois ans, les électeurs ont eu bedu les
réclamer, une fois encore, en 1906 ; MM.
Cuvinot, Poirrier et tutti quanti n'en veu-
lent absolument pas. La commission séna-
toriale s'est livrée à de si audacieuses ma-
nifestations rétrogrades, que les vrais ré-
publicains ne peuvent plus s'attarder en
pareille société.
Cela ne signifie pas que la partie soit
perdue. Il nous reste encore la prochaine
intervention à la tribune de M. Monis —
et qu'il a annoncée lui-même. Il nous reste
aussi l'espoir d'une action décisive de M.
le ministre du travail. Pour couper court
à toutes les manœuvres, M. Viviani doit,
sans tarder, demander l'urgence pour ia
discussion de son projet par le Sénat.
Mais on ne saurait plus, sans péril pour
une réforme démocratique, ajourner cette
nécessaire décision.
.———————————— ———————————.
CARNET DU LIBRE PENSEUR
Les prêtres sont chassés
des écoles romaines
La présence, à la tête de la municipalité
de Rome, d'un maire l'adiical, libre penseur
et franc-maçon, n'est pas un des plus min-
ces soucis dont s'allectc le Vatican dans
sa lutte contre l'idée républicaine et contre
l'esprit critique de la science ; d'autant
que le maflre en question vit en très bonne
intelligence avec le Quirinal et que le roi
d'Italie en personne le tient en très haute
estime et ne s'en tache nullement
Une des récentes décisions prises par la
municipalité romaine vnent de jeter l'épou-
vante dans l'entourage de Pie X, où l'on
crie sur tous les tons à l'abomination de
la désolation. La décision en question sup-
prime l'enseignement religieux dans tes
écoles-primaires de la ville de Rome. Oui,
c'est comme j'ai l'honneur de vous l'ap-
prendre, amis lecteurs, l'enseignement re-
ligieux cesse de faire partie du program-
me officiel dans les écoles de la « Ville
éternelle » où les enfants du peuple vont
puiser leur modeste instruction. Nul scan-
dale, aux yeux de l'Eglise, ne saurait dé-
passer celui-là.
Le règlement qui vient d'être adopté, et
qui parie le nom de son auteur, M. Rava,
donne aux pères de famille le droit de con-
fier renseignement religieux à des maires
choisis par eux, sous deux conditions : ia
première, que les professeurs de catéchisme
aient le diplôme d'instituteur, la seconde
que leur choix soit approuvé par le con-
seil provincial. Ces deux conditions rem-
plies, le maire al tenu à l'obligation d'ou-
vrir les locaux scolaires aux maîtres du
catéchisme
Ce n'est pas, comme on le voit, l'idéal
de la, ncttlralilé en matière scolaire; mais
c'est un acheminement vers la séparation
de l'école et de l'Eglise. -
Des conflits naîtront, des. difficultés S.
ront créées par le clergé, qui ne sauraient
manquer' de fendre, nêcessa'Íl'es.' à. brève,
éçliéanee, des mesures plus radicales. 7
Ce: qui s'est produit -en- France sel
dulm à RomC.L'estentidlel [jue l'OJ¡ ait.
commencé par '-chasser le ln.(tre de l'école
N'est-ce pas un signe des temps que ceite
dégringolade de l'influence religieuse clans
la çifj mémiJ dos papes e, - Pi G*
QUESTIONS MILITAIRES
Avancite et Gaspillage!
Décidément cette excellente sœur
« l'artillerie » est admirable d'audace.
Elle mène le bluff « de la supériorité de
son matériel par la façon de le mettre
;en valeur .» avec une maestria incompa-
rable.
Le Parlement, noyé dans cette équi-
voque « des batteries qui sont plus for-
ites parce qu'elles sont moins fortes »,
s'en va à la dérive. Espérons que cette
nouvelle crue nationaliste l'entraînera
sur le rivage où il reprendra pied.
Jetons nous-même un rayon de lu-
mière sur la mentalité de ce milieu dé-
bordant- « l'artillerie » et essayons de
faire comprendre « le bluff ». Tâchons
de prouver que cette nouvelle organi-
sation de l'artillerie cache comme tou-
tes les conceptions antérieurement réa-
lisées dans la famille, des besoins et des
appétits au moins exagérés.
De Bange, de 1875 à 1878, créa huit
modèles de bouches à feu dont six sont
encore en service et les deux autres, en
maintes circonstances regrettées. Le
remplacement de ces deux-là créa la né-
cessité d'une artillerie lourde. De Bange
fut mis dans l'obligation de quitter l'ar-
mée avec le grade de côlon el.
De Bange avait, majheureusement
pour ltij,Malis les veines, du sang d'in-
génieur : la place n'est pas dan-s un
régiment, disait-il ! — 'Et ses détrac-
teurs de lui répondre : l'invention n'est
pas le monopole des ingénieurs, mais
le monopole des artiPeurs ! — L'his-
toire ne dit pas s'il s'agit des artilleurs
à pied bu des artilleurs à cheval ?
L'invention c'était la mine. d'avan-
cement, à exploiter ; voilà ce qu'ils
voyaient de plus clair. ,
De Bange disparu, de petits syndicats
se constituèrent dans le milieu poly-
technicien avec les fils à papa de mar-
que, pour l'exploitation de la mine. Jus-
qu'à l'avènement du canon-progrès les
résultats de l'exploitation furent peu
brillants, de Bange avait vraiment trop
prélevé, il leur fallut pour vivre mettre
jen valeur ties maigres filons qui "lui
avaient échappé. Mais ils creusèrent la
mine !
L'opinion publique réclamait, paraît-
il. la réfection du matériel d'artillerie ;
il lui fallait coûte que coûte, des ca-
nons à tir rapide. Elle a lieu aujour-
d'hui d'être satisfaite ; on lui en a don-
né des petits, des gros et des moyens 1
Ce fut l'ère des. vaches grasses. —
Sous la réserve - expresse de s'adorer
mutuellement, de se défendre envers et
contre tous, de se. pousser respective-
ment aux plus hauts grades de la hié-
rarchie, les syndiqués se partagèrent la
mine en pleine prospérité.
Les plus cotés eurent l'invention d'un
canon. tout entier ; les autres, selon l'or-
dre de leur influence, obtinrent l'in-
vention d'une partie de canon seulement
ou bien de projectiles, de systèmes de
pointage, de lunettes, de roues, de ti-
mons et de crochets d'attelage. Tout ré-
iOOmment, l'un d'entre eux, très b-erë
apparenté, reçut mission de trouver unf
paratonnerre pour batteries de campa-
gne. Enfin, en se poussa, au ministère
de la guerre et dans les commissions
de réceptions, pour faire -de a places
aux syndiqués, officieusement chargée
de la mise en valeur de l'exploitation.
Petit à petit, le syndicat s'affirma elj
songea à régulariser sa situation. Il de-*,
vint l'Inspection des Fabrications. Celle-
ci accoucha aussitôt de l'Inspection du
matériel de 75.
Sur toutes ces brillantes inventions,
le marchand de ferraille a aujourd'hui
prélevé sa large part, mais les syndi-
quas ont été comblés de .'(îroix et der
grades ; ils sont tous officiers sifpéi
rieurs, généraux ou en passe de le de-
venir. Tout en restant artilleurs, ils s&
sont élevés dans la hiérarchie comme
ingénieurs ; demain, ils commanderont
des corps d'armée.
Une autre conséquence de l'exploita-
tion de la mine, peu importante, il esl
vrai, per des opérateurs plus qu'en-,
thousiastes, fut le gaspillage des crédita
alloués pour organiser la défense na-
tionale. Malgré qu'on eut beaucoup;,
d'argent à dépenser, on n'en eut jamais
assez pour le grand nombre prévu d'in-«,
ventions à exploiter ; les approvision-
nements de la réserve de guerre de ce
fait furent sacrifiés.
Mais, l'artillerie française jouit pré-
sentement d'un matériel incomparable ;
c'est la première artillerie du monde.,
Elle possède notamment un canon de
montagne admirable, en fdeux pièces.,
C'est le canop-voyageur ; il passe et
repasse la Méditerranée. Les artilleurs
d'Afrique et ceux des Alpes, probable-
ment par modestie, se renvoient l'hon-
neur de l'employer. -
Elle dispose d'un c?non de campa-
gne qui n'a pas son équivalent. C'est
son meilleur ouvrage ; néanmoins, cer-
tains esprits chagrins le préféreraient
moins lourd et plus solide. Pour en'
doter les batteries à cheval, on. cherche
à f alléger en. limant les écrous.
Elle détient le record, en Europe,
pour l'artillerie lourde, avec un canon
à la ferraille et un autre qui aura beau-
coup de peine à ne pas y aller.
Enfin, elle jouit d'un canon de cote
superbe, mais qui ne fonctionne pas.
Quand on défend les côtes devant le
ministre, c'est avec un vieux 240 da
Bange.
Cette bonne besogne n'a guère coûté
que' 95 millions chaque année à la Fran-
ce et cela depuis vingt ans ; c'est pro-
bablement pour en consacrer la valeur
que le Parlement se dispose à ratifier.
la nouvelle conception de « l'artillerie ».
l'absurde et ridicule batterie à 4 pièces
la batterie tout en cadres.
Vraiment ce sont messieurs les syn-
diqués qui ont raison, la, mine de. pa..
îriotisme est inépuisable 1 ¡
A LA CHAMBRE
L'avancement dans les Postes, - M. Charles Dumont dénonce
la pratique des notes secrètes. — M. Simyan déclare
ne pas connaître cet abus. — Les promesses
du sous-secrétaire d'Etat.
M. Brisson préside la séance du matin.
La Chambre continue l'examen du bud
get des postes.
M. Benazet expose les desiderata des re
ceveurs et receveuses des postes. M. d(
Folleville défend les revendications de
sous-agents.
M. Chautard, rapporteur, en' réponse t.
:une intervention de M. Ch. Deloncle, an
nonce qu'un crédit nouveau permetra dr
relever certains traitements de petits em-
ployés.
M. Bedouce sollicite la continuation des
améliorations commencées pour divers ser-
vices : outillage, wagons postaux, trans-
formation des bureaux de poste trop sou-
vent installés en de déplorables conditions
d'hygiène, substitution du, système de )a
conversation taxée à l'ahonnement forfai-
taire, pour les communications téléphoni-
ques.
— Un projet de loi est déposé visant ce
dernier point, a répondu M. Simyan, la pa-
role est à la Chambre ; quant aux autres,
le budget en discussion fait beaucoup plus
que ceux des précédentes années.
M. Bedouce a demandé au sous-secrétai-
re d'Etat -de maintenir au personnel les
garanties qui lui sont acquises. -
Il a terminé par l'éloge des agents qui,
blessés dans la catastrophe de Grisoller,
refusèrent de quitter le wagon-poste avant
d'avoir recueilli et mis en place toutes les
dépêches. -
M. Simyan, en quelques mots, et la
Chambre, par ses vifs applaudissements, se
sont associés à ces félicitations.
M. Rabier préside la séance de l'après-
midi.
LA CRISE DES TELEPHONES
M. Chastenet réclame l'abaissement des
tarifs téléphoniques.
M. Chdstenct. - Le prix d'abonnement au
téléphone' en France est' plus é'cvâ qu'tn aucun
ullLte pays. Il serait indispensable, de le ré-
duire dans .J.e. commun: jnlérèL du commerce,
de l'industrie et du public.
ment d'opérer cde: réducliop J cçt. engage-
ment n'a pas encore été téntf. -
Celle réforme s'impose absolument, en vue
rn(va' i,-. l'amélioration du service téléphoni-
que dr.:.r.t rorganisaUon, en France. est infé-
rieure- a rd de tocs les t\UI,fl pa.ys du mor.de.
D'autre part, il' importe que le tfouvememeni
appuie auprès du Parlement la création du
chèque posta].
M. Simyan répond aux orateurs qui se
sent fait entendre dans la discussion géné-
rale.
M. Simyan. —Au début de mes observations,
je tiens a donner à la Chambre une nouvelle,
qui, j'espère, lui donnera satisfaction.
Un des multiples reconstruits hâtivement al-
la suite do l'incondie de J'hôtel central des iélé-
phones nous sera livré dans deux jours et lo
second le rr décembre.
Nous pourrons ainsi, quinze à vingt ioui-9
plus tôt que nous ne l'avions espéré, rendre A
8.000 ou 9.060 des abonnés atteints par la. ca-
tastrophe le service dont ils ont été priyLJ.
LA DEPENSE DE L'ADMINISTRATION
Le sous-secrétaire d'Etat promet l'amé-
lioration du sort lies receveurs et receveur
ses et des retraites des sous-agents, re.
tension de. l'indemnité de bicyclette.
La situation dee wagons-poste, est .excellente,
avec la mise en service de 56 wagons nou-
veaux de 14 mètres.
L'assaiiiisse/nenL des bureaux se peursuit ac-
tivement. il y a, a Paris, 20 bureaux qui sont
absolument aménagés, et ils sont prëfs à rece-
voir: toutes les extensions possibles. -
L'echniniilraction a trait* avec une eenlpa-
gnie pour le ncl loyodes bureaux trois eu
quatre fois par an.
Au point, da vue du service fciL'graph;qu?.
nous n'avons P:l- à nous en plaindre. C'est un
des meilleurs de l'Europe
Pour le service .îèU'ijlKvninue, il va falloir
faire un tr<-\s eliort. Tnut Je monde est
d'accord oour arriver à la conversation taxf;
le plus tôt possible. Mais, au nreatabie, il faut
avoir les bureaux et les installations nécessai-
res. Un nouveau projet, qui comporte un cré-
dit de 105 millions, a été préparé. Gc crédit
devra être mis à la disposition de l'adminis-
dratioii.
L'abaissemont des taxes téJép?)onlqi;o.3 è!tt.' 1W ,
à la réforme de la conversation taxée.
DISCOURS DE Mi CHARLES DUMONT.
M. Charles Dumont intervient, à ce mo-
ment, PO)J!' diriger. linValfaquè assez viys
contre l'admiïïistrât'lon M. Simyan. Il re-
proche au- sous-sen:ôtrfire\ d'état de n'avoir. ■
pas su se tenir au système d'avancement
qu'il avait inauguré :
sonnel et lui ?
lAi foneUoriuCiU'es disent qu'après avoir n,*
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