Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-11-20
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 20 novembre 1908 20 novembre 1908
Description : 1908/11/20 (N14133). 1908/11/20 (N14133).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7571020m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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Vendredi 20 Novembre 1908* — H* 1A133~—
- * ANNONCES -
AUX BUREAUX DU JOURMAli
14, rue du Mail, Paria.
fit chez MM. LAGRANGE, CERF etO-
f, place fit Je Bourse, 6
AdrcfM Télégraphique : 2F.IX* SIÈCLE— PaM8
s. •:'• ABONNEaCEIVTS „ V
': ¿ , v- *>' - 1 v y:
i * trois mois six moSa ua m'-
« - - .- M M, ;.. --..
PûrtS..i-rrrr» * * 8 ILi 14 fol 28 fi.t,
Départements H 12 r. * Il f/'
Union Postale 16 f. §3
* - ':
- Les abonnements sont reçus sans irait t
dans tous les Bureaux de Poste
< »
REDACTION : 53, RUE DU CHATEAU-D'EAU. - PARIS
k TÉLÉPHONE 438.14 '-
Il Mir i 2 tans îi util, ig lit XoJaarin : TtUptoM 143-92
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FONDATEUR : EDMOND ABOUT,
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ADMINISTRATION : 53, RUE DU CHATEAU-D'EAU. PARIS
y TÉLÉPHONE 438.14 v
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Adresser lettres et mandats à rAdminittriiSMtr > - ! ,- ,.
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, ..) TRIBUNE LIBRE .,
LES SOUS-PRÉFETS
J ,
Une fois de plus, la Cham-
bre des députés s'est occu-
pée des sous-préfets et, au
cours de la discussion du
budget de l'intérieur, M.)
Paul Constans en ayant de-
mariaè la suppression, c'est par neuf
voix de majorité seulement que le cré-
dit destiné à lés payer fut maintenu.
J'ai été de ceux qui ont voté pour le
maintien du crédit et je veux m'en ex-
pliquer.
Il ne faut pas croire, tout d'abord,
que si la majorité s'était prononcée
pour la diminution ou la suppression
du crédit, il y aurait eu quelque chose
de changé et que tous les sous-préfets,
ou certains sous-préfets seulement, sui-
vant le cas, auraient eu, dès lé lende-
main, à préparer leurs malles, pour
quitter au ': 31 décembre prochain leurs
sous-préfectures.
Non, rien n'aurait été changé, tous
les sous-préfets seraient tranquillement
restés en leurs cabinets, continuant,
comme par le passé, à y dormir ou à y
travailler, suivant leur tempérament.
Réduire, en effet, le crédit affecté à
leur payer des appointements, sans
dire, en même temps, quelles seront les
sous-préfectures supprimées, sans spé-
cifier à quelles autres sous-préfectures
seront rattachées les communes des dis-
parues, ne signifie rien, puisque le mi-
nistre lui-même n'a pouvoir, ni qualité,
pour procéder à cette refonte nécessaire
et que, seule, une loi peut y pourvoir.
Au lieu d'être payés seulement avec
les crédits budgétaires, les-sous-préfets
auraient été forcés d'attendre, pour
toucher la totalité de leurs émoluments.,
le vote de crédits supplémentaires qui
nous auraient été demandés dans le
courant de l'année et que nous n'au-
rions pu refuser. Etait-ce bien utile ?
Dans les premières années de l'exer-
cice de mon mandat de député, je me
suis laissé -aller à la facilité de ce ges-
te, je trouvais très crâne d'affirmer
ainsi contre le gouvernement ma volon-
té de voir réformer notre système admi-
nistratif. Je pensais alors que cette vo-
lonté ainsi affirmée par Uili) majorité
très nette devait, dès le jour même,
apporter un. commencement d'exécution
à' une réforme nécessaire.' Mais je n'ai
.1iftS 'tardé à me rendre compte de l'inu-
tilité de pareille manifestation et, en y
réfléchissant mieux,' j'ai compris tout
ce qu'elle avait de vain.
Par la voie budgétaire, on ne peut-,
tout faire, et c'est heureux. ,
Supposons, par exemple, que la
Chambre ait voté la suppression totale:
des crédits des sous-préfectures, sup-i
posons, et c'est bien une supposition
toute gratuite, que le Sénat ait suivi la
Chambre, nous nous trouvions en pré-
sence de ce fait brutal, qu'il y avait
encore des sous-préfets, des employés
de sous-préfets, et plus d'argent pour
les payer. ,
Tant pis, me dira-t-on, ce sont ôe;
fonctionnaires inutiles, ils n'ont qu'à
s'en aller. C'est la solution simpliste.
Les faits la rendent plus compliquée
et moins facile à résoudre ; les lois et
règlements d'administration publia
ajoutent aux faits.
D'abord, de quel droit jetterait-on en
dehors de l'administration non seule-
ment les sous-préfets, mais tout le per-
sonnel des sous-préfectures ? Certains
de ces fonctionnaires touchent à l'âge
de la retraite, d'autres n'ont que leur
paiement pour vivre, ils n'en ont pas
moins femme et enfants.
Et alors que les républicains deman-
dent que l'employé, l'ouvrier soient
protégés contre le renvoi brusque de
remployeur, son patron, alors que
J'Etat a déjà la mission de veiller à ce
que les faibles ne soient pas trop vio-
lentés par les forts, nous lui donne-
rions brusquement le droit d'abuser de
sa souveraineté pour se séparer bruta-
lement de ses collaborateurs les plus
directs que nous lui dirions de jeter à
la rue !
Ne voir que le sous-préfet et négliger
ceux qui vivent à côté de lui, tous ces
collaborateurs modestes et mal payés
qui n'apparaissent pas, mais qui exis-
tent tout de même, c'est vouloir se ren-
dre plus facile l'injustice à commettre,
elle n'en reste pas moins urW injuste.
Avant donc de supprimer toutes les
sous-préfectures, ou partie seulement
des sous-préfectures il faudrait régler
le sort des. sous-préfets et du petit per-
sonnel dés s-préfectures. :
, f H, à côté de, ces faits, il y a autre
chose encore. Dé par de multiples lois
ou règlements, les sous-préfets sont
chargés de certaines formalités, et peu-
tent seuls y procéder ; ils ont une cer-
'-'' — - <%
taine compétence administrative,. ils ont
des attributions diverses.
S'ils sont supprimés, qui va remplir
leurs fonctions ? Qui visera certaines
pièces indispensables aux contribua-
bles ? Qui convoquera les conseils d'ar-
rondissement ?. Que deviendront même
les conseils d'arrondissement ? Qui sera
chargé de constituer les dossiers admi-
nistratifs, de convoquer les commissions
cantonales d assistance, les conseils
d'hygiène ? Qui veillera à l'application
si difficile de ces lois sociales nouvel-
les ? Qui nommera certains membres
des bureaux de bienfaisance, des com-
missions d'assistance communales, les
délégués à la revision des listes électo-
rales ? Qui autorisera les transports de
corps de commune à commune ? -
Et que sais-je encore ? Il faudrait
toute une colonne du journal pour énu-
mérer ce qui incombe aux sous-préfets,
de par la loi, et ce qui ne peut être
fait que par eux, tant qu'une loi nou-
velle n'aura pas chargé d'autres fonc-
tionnaires" de lés remplacer.
Tout cela démontre, jusqu'à l'éviden-
ce, qu'on ne peut supprimer les sous-
préfets par voie budgétaire et qu'il faut
une étude approfondie, une réforme
d'ensemble de notre système adminis-
tratif pour y arriver.
Et, dans les cadres d'un article, nous
ne pouvons envisager et cette réforme
et ses répercussions bonnes ou mauvai-
ses. ,., -
Du reste, rien né presse ; comme
tant d'autres, la réforme administrative
dort d'un bon sommeil et M. Clemen-
ceau n'a très certainement pas encore
décidé des grands principes qu'il en-
tendait y faire triompher. Comme pour
les conseils de préfecture, plusieurs so-
lutions se présentent à son esprit pri-
mesautier, et il n'ose indiquer celle qui,
aujourd'hui, lui paraît la meilleure, car
l'expérience lui a appris que demain,
une autre lui semblerait avoir toutes,
les qualités de la première, et d'autres
encore. , •
- Dormez donc en paix, employés des
sous-préfectures et sous-préfets : rien
ne menace votre paisible existence.
Marcel IUBGMËR,
- Député de l'Allier
LA POLITIQUE
LA POLITIQUE DU CHANCELIER
-
M. de Biilow l'emporte. Il
reste debout, il sort vainqueur.
de l'entrevue de Potsdam.
L'empereur qui n'a osé le bri-
ser, a dompté ses nerfs et son
orgueil, compris que le fossé
s'élargissait — qui le séparait de son
peuple. Déjà, d'aucuns réclamaient son
abdication. Il est des symptômes aux-
quels Guillaume II ne s'est pas trompé.
Le chancelier a confié le résultat de
l'entrevue historique à sa confidente, la
Gazette de Cologne. Avec une suprême
habileté, il prend à son compte la pro-
messe d'activer une évolution du régime
constitutionnel. Lui, qui disait naguère :
« Nous n'avons pas un vrai parlementa-
sme, et c'est un grand bonheur »1. chan-
L.: aujourd'hui la palinodie.
I L'officieuse Gazette,qui sait son secret,
annonce des changements prochains sous
une forme discrète « Le droit public
d'un pays moderne ne peut pas se pétri-
fier. » Si nous voulons connaître la pen-
sée de fond du chancelier, sous l'influen-
ce des événements récents, retenons que
ce droit public « doit être mis en accord,
très prudemment et sans secousse, avec
la mentalité, du peuple et les exigences
de la vie. »
Ceci est, à' proprement parler, l'annon-
ce d'une ère nouvelle. La brève commu-
nication d'hier ne le faisait pas espérer.
Le mécontentement général à l'annonce
des maigres concessions de l'empereur a
obligé le chanceliÍer à promettre au pu-
blic les satisfactions prochaines que,
sauf catastrophe, on ne pouvait pas lui
refuser.
Bismarck avait accordé le suffrage
universel à l'Allemagne à son heure,
Biilow concède un parlementarisme in-
dispensable, au moment opportun. -
C'est fort habile et sage. S'il a fait rê-
vera l'empereur d'une résistance obstd-
hée, il a rendu service à la famille impé-
ria"e et à l'emplire; il s'acquiert en même
temps un prestige rare. L'affaire bien
menée montre un homme d'Etat.
— — :
LES ON-DIT
*
.:.
NOTRE AGENDA : <
Aujourd'hui jeudi :
Lever du soleil à 7 h. 17 ; coucher à 4 h.
14 minutes.
— Matinées ; Comédie-Française, Cdéon,
Gaîté-Lyrique, Porte-Saint-Martin, Châte-
let, Déjazet, Trente Ans de théâtre (salle
Wagram), Parisiana, Albambra, Nouveau-
Cirque, Cirque Rancy.
; — Gourses à AuteuiL
Maujanlana, -
Il voulut soumettre au grand Pan,
deux contes en vers de sa composition.
Il commença par lire le premier, mais
au moment où Il tirait le second de son
portefeuille..
— « Inutile, interrompt vivement le
grand Pan, j'aime mieux l'autre. »
Madame La Pierre-,
-: Une certaine Mme Là Pierre fut. une
jolie femme d'entre les plus jolies fem-
mes de notre si curieux - et si déli-
cieux — dix-huitième siècle.
Mme La Pierre ! le nom n'est, point
poétique, certainement ! « Oh J disait-
elle, un jour, il serait impossible de
faire quelques agréables coupiets sur
niOl 1 » » ,,. .,.-..,'
— « Madame, répondit l'avocat géné-
ral Séguier, vous les aurez demain.»-
Et le lendemain, il lui envoyait cette
ingénieuse chanson, qu'il est rarissime
de rencontrer aujourd'hui :
Le petit dieu qu'on aime et qu'on révère
Pour nous tenter, nous offre vos attraits ;
II nous séduit et vous, êtes la pierre:
Dont il se sert pour aiguiser ses traits.
On trouve en vous une pierre aimantée
Qui nous retient sans cesse à vos genoux,
Heureux qui peut d'une main assurée
Faire, avec vous d'une pierre deux coups 1
■ Non ! non ! jamaiè quoiqu'on dise et qu'on fasse
Ne jetterai la pierre à mon voisin ;
Mais je voudrais qu'amour me fit la grâce
De la jeter souvent dans mon jardin.
J'en pourrais faire une pierre de touche
Pour vous prouver que mon cœur est constant ;
En l'approchant tant soit peu de ma bouche
Je connaîtrais le plus doux sentiment.
Presque toujours, sur la pierre d'attente
.:EJ resterais sans trop vous ennuyer,
Si je croyais qu'à ma voix gémissante
Votre cœur dût, de temps en temps, céder,
Mais vos yeux sont une pierre infernale
Qui brûle tout sans vouloir rien guérir,
Et bien plus que la philosophale
Donne l'espoir sans jamais le remplir 1
On voit souvent la pierre herborisée
Faire à nos yeux un séduisant effet,
Mais j'aime mieux celle qui, bien frappée,
Tire du feu de. mon petit briquet. ,
Je la préfère à la plus belle agate,
A la topaze, au saphir, au diamant,
Mais je crains bien que celle qui me flatte "t.
Ne soit pour, moi, pierre d'échappement ? *
AUTREFOIS
Rappel du 20 novembre 1872. - La poli-,
Mque basée sur la conjonction des deux
centres- centre droit et centre gauche -
à été battue hier à l'Assemblée, où cette po-
litique. a trouvé contre elle, d'une part. les
républicains, d'autre part, les monarchis-
tes. Le parti républicain dit que l'Assem-
blée ne peut avoir de' majorité, et réclame
la dissolution.
Les chiens qui pendant la guerre avaient
- pour les raisons que l'on sait, — dispa-
ru de Paris, sont revenus. Ils étaient 68.000
en 1868, ils sont aujourd'hui près de 70.000.
Mort de « l'homme aux rats », c'était un
modèle connu dans les ateliers de sculp-
teurs ; quand la. pose ne marchait pas, il
allttft sur les places faire évoluer une dou-
zaine de rats d'égout qu'il avait dressés. Il
était fort connu des badauds.
A l'Opéra, on a commencé les répétitions
de la Coupe du roi de Thulé, dont la pre-
mière aura lieu en février.
Cauloiserie-
Un conseiller au Parlement d'Aix, qui
aimait assez à figurer dans des mystifi-
cations, rencontra, au moment de son
arrivée à Paris, l'abbé de. Latteignant,
son ami, qui, enchanté de le voir et ne
voulant pas le quitter de la journée, lui
proposa de le mener passer la soirée
chez des dames de sa connaissance, où
il serait fort bien accueilli. Le conseil-
ler voulut s'excuser sur ce qu'il était
en habit de voyage, qu'il ne connaissait
point ces dames et qu'elles lui feraient
sans doute, beaucoup de questions aux-
quelles il ne se souciait pas de répon-
dre. « Qu'à cela ne tienne, lui dit l'ab-
bé, je te présenterai comme sourd-muet
de naissance, ayant d'abord reçu une
bonne éducation et jouant tous les jeux
de société ; ainsi tu pourras te mettre à
ton aise, et tu seras bien sûr qu'on ne
te fatiguera pas de questions. » Le
conseiller, trouvant l'idée plaisante, par-
tit avec l'abbé, fut présenté aux dames
comme il avait été convenu et joua si
parfaitement son rôle, qu'elles en fu-
rent complètement dupes. On lui pro-
posa par signes une partie de reversis ;
les dames badinent smr le sourd-muet,
et parfois si librement, que le conseiller
se mord les lèvres pour ne pas rire. En-
fin, à force de se contraindre, il ne peut
retenir un bruit malsain. L'abbé s'écrie
alors : « Je vous demande pardon, mes-
dames, mais comme il est sourd, il a
cru que l'autre était muet. » A ce mot,
le conseiller part d'un éclat de rire, sau-
te sur son chapeau, s'esquive et court
encore.
L,e prix d'une conversation
Le poète Malherbe, qui avait d'assez
bonnes rentes, se piquait d'une sage
économie. Un soir, comme il sortait de
l'hôtel Bellegarde, après souper, et qu'n
regagnait son logis avec son valet qui
lui portait le flambeau, il rencontra M.
de Saint-Paul, un des beaux esprits de
ce temps-là, qui l'arrèta et. se prit à lui
débiter quelques nouvelles de peu d'im-
portance. Après lui avoir accordé un
instant d'attention, Malherbe interrom-
pit brusquement le causeur, en lui di-
sant : « ,Adieu; monsieur, vous me fai-
tes brûler pour cinq sous de flambeau,
et ce que vous me dites ne vaut pas
un denier. »
L'AFFAIRE DE L'OUENZA
MM. Jonnart, Schneider et Cie, s'étant
rendu Compte que leur projet de convention
risquait fort d'être mis en échec par la
Chambre, ont prudemment battu en re-
traite.
Mais il ne faudrait pas que ce soit le
gouvernement lui-même qui leur préparât
une revanche.
1.1 Or, le conseil des ministres a, parait-il,
autorisé hier le dépôt de deux projets de
loi qui, sous une modeste apparence, ne
sont rien moins qu'une tentative de réor-
ganisation complète du régime des mines.
Le nouveau régime préconisé tendrait à
considérer l'exécution des voies publiques
comme l'accessoire d'une concession.
La concession pouvant être accordée par
un simple décret, l'établissement d'une li-
gne de chemin de fer pourrait s'en suivre
sans examen et sans autorisation du Par-
lement.
On voit la conclusion : un simple décret
permettrait — grâce à la modification légis-
lative proposée — de concéder le chemin
de fer de l'Ouenza en plus de la mine, à
MM. Schneider, Crupp et Cie.
C'est d'un cynisme admirable.
Seulement, il faudra bie-n discuter les
projets die loi. Nous veillerons à ce que le
débat ait toute* 'l'ampleur indispensable.
—:
Une heureuse initiative
M. Cruppi, ministre du commerce et de
l'industrie, vient d'adresser au président de
la République un rapport en vue de l'insti-
tution d'un Comité de législation commer-
ciale.
Voici l'exposé des motifs :
L'utilité de modifier la législation commer-
ciale pour la mettre en harmonie avec les be-I
soins du commerce et les progrès de 1 industrie
se manifeste chaque jour davantage. Mais ce
travail de revision soulève des questions com-
plexes o* variées dont l'étude exige la connais-
sance approfondie de la théorie comme de la
pratique du droit commercial. Aussi, m'a-t-il
paru nécessaire de faire appel à la collabora-
tion d'un nombre limité de personnes spéciali-
sées dans ces matières. C'est ainsi que je suis
amené à vous proposer la création près du mi-
nistre du commerce et de l'industrie d'un comité
qui serait chargé d'examiner les questions rela-
tives à la législation commerciale. .!
Ce comité donnerait tout d abord son avis ;
sur les projets et propositions de loi intéres-
sont le commerce et l'industrie ; il pourrait, en
outre, être coasulte sur toutes les oifficultés
dont son département est saisi à l'occasion de
l'application des lois existantes ; il étudierai*,
enfin, la question de savoir s'il ne conviendrait
pas de procéder à un travail de coordination
des lois commerciales en vigueur en vue do les
incorporer au code de commerce pour faciliter
les recherches des intéressés et l'œuvre de la
justice consulaire.
M. Cruppi se-prodigue de la façon la plus
louable en initiatives heureuses depuis son
entrée au ministère du commerce, et nous
ne -saurions trop l'en féliciter.
Mais la réfaction de rapports et de pro-
jets de loi ne doit pas suffire à l'activité du
ministre du commerce. Il importe qu'il! ob-
tienne des solutions.
Son excellent projet de loi sur les a.tta-
cihés commerciaux sommeille dans les car-
tons depuis six mois.
Nous comptons qu'il saura l'en faire sor-
tir.
CARNET DU LIBRE PENSEUR
.---
A propos de la mort
d'un anticlérical repenti
,-- r
Les journaux cléricaux du Midi exultent.
Il vient de leur tomber du ciel une aubaine
inattendue.
Un avoué du liquidateur des congréga-
tions de Castres vient de mourir à l'âge de
quarante et un ans, et voici en quels ter-
mes, un organe bien pensant fait part à ses
lecteurs de la fin édifiante de cet « anticlé-
rical forcené ».
Dès qu'il comprit la gravité de son mal, il fit
appeler un vicaire de sa paroisse et, trois jours
ava-nt sa mort, dans la plénitude de ses facul-
tés. il reçut tous les sacrements de l'Eglise. Dès,
ce moment, la visite du prêtre lui devint aussi.
nécessaire que celle du médecin et, avant de lui
donner congé, il priait avec lui. Du reste, on
peut dire qu'il ne cessait de prier et ne trouvait
de diversions à sa souffrance physique et mo-
rale que dans la récitation du chapelet et la
tendresse de sa mère.
Avant de recevoir le saint Viatique, il écrivit
le billet suivant, avec recommandation d'en as-
surer la publicité :
« Je regrette le mal que j'ai pu faire à l'E-
glise comme avoué du liquidateur.
a Castres, ce 6 novembre 1908. »
(Suit la signature).
En tenant le fait pour exact, que prouve-l-
il ? Ceci ; Ott que le moribond n'avait plus
la conscience de ses actes, et dans ce cas la
victoire des cléricaux est maigre, ou qu'il
avait sa pleine connaissance, et alors, il
faut admettre : ou qu'il s'agissait d'un hy-
pocrite ou que son pauvre cerveau avait
manqué de la force nécessaire pour s'af-
franchir.
Ce ne sont pas là des exemples rares.
Nombreux sont encore les esprits qui ne
sont que superficiellement émancipés, et à
qui la raison fait soudain défant quand ar-
rive pour eux l'heure de la dissociation fi-
nale des éléments qui composent l'être pen-
sant. ,
Cela prouve que l'empreinte religieuse a
créé dans l'honnne une tare atavique puis-
sante dont la disparition ne saurait être
l'œuvre d'une seule génération.
Nous n'avons jamais prétendu le contrai-
re. — P. G,
P. S. — Le Peuple Français nous deman-
de de lui faire connaître la source où nous
avons pwisé les propos que nous avons pré-
tés au pape au sujet de la guerre. Nous dé-
férons. volontiers au désir- de notre con-
frère. Celte nouvelle a été publiée par l'a
gence La Presse Associée. •
Nous avons même attendu plusieurs
J'ours avant de la reproduire, et ce n'ë&i
qu'après avoir constaté qu'elle n'avait éft
l'objet d'aucun démenti,' que-nous Vavtms
signalée il nos lecteurs.
Nous n'avons pas l'habitude d'itwenler
,les nouvelles que nous publions.
<- - UNE CONSULTATION
US •" - «Lffi DEVAIfi U IR.S*.i
.., "- ;. Il .- --.- --. r w.
- , r - ,
M* Jacques Bonzon, dont une fois encore nous
avons éprouvé la particulière bienveillance,
nous communique la consultation juridique sui-
vante, que nous soumettons à nos lecteurs afin
de mieux éclairer la passionnante affaire
Klier, qu'ils ont lue dans nos colonnes-:
La législation relative aux aliénés est
sans cesse combattue, depuis de nombreu-
ses années, et sans cesse magistrature et
police l'exploitent à leur guise. Excellente
à sa date (30 juin 1838), la loi sur les alié-
nés, qui apportait enfin quelques garanties
à la liberté individuelle, trop souvent me-
nacée par les internements qu'il est devenu
banal de comparer aux » lettres de ca-
chet », cette loi, dont plus de vingt propo-
sitions et projets parlementaires ont de-
mandé le remaniement, n'a subi aucune
retouche. Et notre besoin moderne de ga-
ranties contre l'arbitraire politique et mê--
me contre l'erreur judiciaire, ne trouve
plus, dans le texte élastique, vieux mainte-
nant de soixante-dix ans, une protection
suffisante. Les scandales auxquels cette 'oi
a donné- naissance sont maintenant trop
nombreux. Certes, beaucoup, la plupart
même des internements se trouvent justi-
fiés par l'insanité intellectuelle de malheu-
reux dont le cabanon devient le suprême
asile. Mais on peut redire ici, en la modi-
fiant à peine, la phrase de La Bruyèr-e et
que l'internement d'un homme raisonnable
est l'effroi de tous les honnêtes gens.
Car enfin, Les mots ne doivent pas nous
duper. Internement ou arrestation, accu-
sation de crime ou suspicion de démence,
c'est toujours la liberté qui est ravie, la sé-
curité et la dignité de l'existence qui est
brisée.
Nous avons péniblement acquis quelques
fragiles défenses contre l'arrestation arbi-
traire.
Il faut enfin que nous en acquérions de
semblables contre l'internement, encore
soumis à la volonté omnipotente et irres-
ponsable d'un policier ou d'un juge. Il suf-
fit à celui-ci de nommer un expert, prompt
à comprendre ses désirs, pour qu'un, non-
lieu intervienne, qui en principe, bénéfi-
ciant à l'inculpé, ne peut être frappé d'ap-
pel, et qu'administrativement sans recours
préalablement possible devant aucune ju-
ridiction, sans débat, sans défense, l'hom-
me qui réclame trop - bruyamment justice,
1
la femme qui se plaint d'une iniquité, &i.
voie murer dans la maison des fous, prus*
silencieuse même que la « Maison - desi
morts » et dont nul Dostoïewsky n'a pui
écrire les souvenirs.
, Les garanties nécessaires sont pourtant
aisées à établir. Qu'on assimile l'interne-
ment à l'arrestation. Qu'on voie en lui les-
senliel et non l'accessoire, non pas seule-1
ment Ta maladie qui le motive, mais la JK
berté qu'il fait perdre. Qu'on accor-do donc!
obligatoirement à tout internable un défen-
seur pouvant apporter à la justice, les élé-
ments d'une saine appréciation, nonsenl.
ment de l'état, mais aussi de la ccndiuont
du prétendu malade,_d.e son entourage, dà
l'intérêt véritable et sincère, qui lui est por,
té, ou bien, au contraire, des embûches qui
lui sont teiidues.
Qu'enfin dans les huit jours au plus tar
le tribunal décide, après débats et ftuditiOJf
du défenseur, que l'internement doit être
maintenu ou refusé.
Il suffira, pour éditer une publicité le plus
souvent fâcheuse à l'intéressé et à sa fa;
mille, que la procédure protectrice de sa IiJ
berté, se passe en Chambre du conseil à
huis clos. On accordera, en outre, que t'hv
ternement provisoire, sera permis dans îesÉ
cas particulièrement graves, où la vie d'un?
malade comme celle d'autrui. est mise enr
danger par sa fureur. Mais dans les huitf
jours, la justice contradictoirement sqjsieJ!
devra statuer sur cet internement, le ma in 2
tenir ou le supprimer.
Et ainsi, des erreurs se commettraient
encore, car toute justice, étant humaine, est
faillible ; mais il sera moins facile qu'au-,
jourd'hui, d'employer contre les récalci-
trants qui osent réclamer justice, le hon-,
teux procédé de la mise au tombeau.
Une comparaison est ici particulièrement
frappante. Quand il s'agit d'interdire lln:
aliéné, de lui enlever la disposition de ses
biens, alors le tribunal délibère, soigneuse-'
ment, entend le prétendu dément, et ne lei
frappe d'interdiction, qu'après un bUe. Ek bien. qu'on traite aussi prudem-
ment l'aliéné le plus misérable. La justice
soi-disant démocratique, doit protéger la
personne plus encore crue la fortune.
- lacunes BONZON..-
Jacques BONZON.
-. Avocat à la cour.
L du 1 ti ,mort.
A la Chambre. — M. Jaurès prononce un grand discours contre
; les exécutions capitales. - Il déclare que la solidarité !**
humaine s'étend même au criminel.—Paroles 4
évangéliques de l'abbé. Lemire.
;.p. -
Le débat sur la peine de mort, qui a con-
tinué hier après-midi, sous, la présidence
de M. Henri Brisson, a été marqué par un
important discours de M. Jaurès, en faveur
de l'abolition de la peine de mort. Cette ha-
rangue enflammée, nourrie de documents,
,et qui rappelait les meilleurs jours de l'o-
rateur socialiste, n'a pas manqué d'avoir
une considérable influence sur l'assemblée.
'Peut-être quelques-unes des tenaces résis-
tances que rencontre le projet gouverne-
mental s'en trouveront-elles ébranlées.
Tout. d'abord, M. Puech, président de !a
commission, répond au discours prononcé
mercredi dernier par M. Briand, et dans le-
quel le garde des sceaux l'avait mis en
cause :
La statistique distribuée lors de la dernière
séance par M. le garde des sceaux fait elle-
même ressortir une recrudescence de la grande
criminalité dans les cinq dernières années, car
il ne faut pas se laisser Jrompcr. par des moyen-
nes.
Que la criminalité augmente, cela ne fait au-
cun doute, mais qu'importe, diront nos contra-
dicteurs, il n'y a entre la recrudescence des cri-
mes et le maintien ou la suppression de la
peine de mort aucune relation de cause à effet.
• Je reconnais que les statistiques ne fournis-
sent à oet égard aucun argument décisif, soit
pour, soit contre, mais ne pouvons-nous tirer
un argument très for. de ce fait qu'après la
suppression de la peine de mort pour les cri-
mes de faux monnayeurs, en 1832, le nombre de
ces crimes en trois ans a doublé, en dix ans a
triplé, et ne semble-t-il pas qu'il y ait là vrai-
ment une relation de cause à effet ? (Très bien
Très bien ! sur divers bancs.) -
EV à une époque plus récente le dépôt des
propositions et projets abolitionnistes.
M. Varenne. — Et voire vote !
M. le président de la commission. - N'a-t-il
pas fait passer le nombre des condamnations
capital.es qui avant 1906 était en moyenne de
16, à20 en 1906, à 41 en 1907 et à 39 pour les
trois-premiers trimestres de 1908 ?
Je sais bien que les partisans de la suppres-
sion de la peine de mort prétendent qu il y a
là un effet de réaction de la part du jury con-
tre les -tendances abolitionnistes ; n'est-il pas
plus juste de dire que si le jury condamne plus
à mort, c'est qu'il a à juger plus d.e brigands
de profession ? Pour nous, il y a là des indi-
cations qui ont un caractère de certitude mo-
rale qui nous suffit. (Très bien ! Très bien Il
Il est très joli de prétendre que lorsque la
partie saine et laborieuse du pays adüp.e une
opinion, il est de notre devoir de la combattre.
M. le garde des sceaux. — Je n'ai jamais dit
cela 1
M. Joseph Reinach. — Nous n'appar'enons
sans doute pas à la partie saine du pays 1
M. le président de la commission. — Oublie-
t-on que dans des pays démocratiques comme
fa Sdlsse, la question qui nous occupe a été
kanchée par voie de référendum ? Je com-
prends qu'on résiste à l'opiniûn pour défendre
un innocent, pour défendre l'équité, mais ici,
pour qui et pour quoi irions-nous à l'encontre
de sentiments qui Sonr les nôtres ? (Très bien r
Très bien ! sur divers ooncs.),
AI. Ferdinand Buisson. — Le.peuple demande
le maintien de la peine de mort à cause de So-
leilland *' et M. le rapporteur lui-même a déclaré
qu'il -n'aurait pas. prononcé la peine de mort
contre Soleilland. (Applaudissements à gauche.)
M. le président de la commission. - Pour-
quoi irions-nous défendre contre lopinion pu-
blique des hommes qui l'êpant la terreur
dans des régions entières, dont la profession
est de voler et d'assassiner, qui font subîr il ief
vieillards les plus atroces supplices 1
UN3 OBSERVATION DU GARDE Dra
1 SCEAUX >
M. Briand réplique, avec sa vigueur or*
dinaire, à M. Puech :
M. Briand, garde des sceaux. — J ai ieeonmi
l'augmentation inquiétante des mcurUfs qui
n'entraînent pas la peine de mort, et monu~
que c'étaient là des crimes de circonstance, :¡¡;
plupart crimes de l'alcoolisme, se
dans les grandes villes, et en raison de la misa
à la podéc de toutes les mains ues urines ¡)),..:ur
trières,
On a reproché au gouvernement d'avoir été
abolilionniste. Ceite responsabilité, vous la i>ar-
tagez avec lui, puisqu'on 19CC» vous iui refin
siez les crédits nécessaires à l'exécution de la
loi.
DISCOURS DE M. JAURES ,
M. Jaurès commence alors le discours,
auquel nous venons de faire aFusion, et qur*
est écouté avec l'attention la plus soutenue.!
M. Jaurès. — Il n'y a pas parité entre le va-..
gue des statistiques tiraillées de pari et d'autre
et la ceititude effroyable de la peine qu'on veue,
main'en ir.
Les partisans de la peine de mort veulent
faire pression sur notre esprit en nous accJ.:
blant sous une sorte de dogme de lai alite qiAlf
ne permet pas le relèvement dtm êtrn I:::it
tombé. Cette doctrine est ab&o.t~j.::n' :,mu'vjr,
d'une part à celle du christianisme, faile d'hu^
milité et de oontiance. de l'autre a celle de la'
Révolution.
J'ai le droit de m'étonner que des chn'uons,-'
exposés aux mêmes chutes et capables des mê-
mes relèvements, osent dire à d'autres nommes
qu'ils ne sont plus que des pourriture cy
qu'il n'y a qu'à les retrancher du nombre des
vivants. (Applaudissements et protestations Cil
sens divers.)
(A l'abbé Lemire, qui interrompt). - Voir»
isolement. mon cher collègue, ne lait qu- souli-
gner la gravité de ce procès. ,'
Quand I j'ai invoqué cette doctrine oevatV, M.
Barrés, il y a quelques mois, il m'a -
qûTl y xivait comme deux - hommes en m. Je
comprends cette distinction chez M. liaiiès*
qui ne voit dans le sentiment chrétien qu'un®'
impression se rattachant il l'ensemble de la
tradition nationale. Mais ceux qui se liatfent
d'être de vrais chrétiens, je me demande com-
ment ils peuvent admettre cette disHnciicn Si
l'homme, si flétri qu'il soit, est capable jus-
qu'au bout de relèvement, je me demande qUd!A
comédie joue donc l'aumônier des deenières prit-
res qui accompagne le condamné à l'échafüud.
(Applaudissements à l'extrôme-gauche.)
M, Barrés. — Nous reconnaissons ;,J, Jaurès,
quand il tient ce langage : il s'appellc Mgr \!y-
riel dans Victor Hugo. mirOS,), Mais si l'on- vaÊ
jusqu'au bout, ce prêtre-là voudra tlrr¡yhtr le
criminel non seulement à l'échaiaud. mais 4.
bagne. -.
J'avais cru, moi, m'adresser ici à un -- puùJiq
de légistes.
Il y a deux rôles distincts : - etui du prêtre
qui absout le passé, celui du bourreau qui Tait;
justice. (Applaudissements sur. divers J.anc.s.} -
M. Jaurès. — "M. Barrés et ici le docteur de'
l'Eglise. (Rires.) Mais je puis bien dire qlÙ,ntN
le christianisme comme il le comprend et la'
justice telle qu'il la pratique, il y a cornradie,
lion.. • - - ','
Et si je me tourne mainten. ant vers e-eux quI
se réclament de la Révolution, je leur dciriaîv!'»
de ne pas abandonner l'humanitarisme id'ak
dont leurs pères se sont inspirés. -
M. Jaurès soutient qu'en Angleterre, D\l;
la peine de mort existe, les crimes sont
aussi nombreux qu'en France. Il fait en-
..,;:.," '::: _c
CIIVQ ^EJfTlMES ,LE':'- IVtHMJGItO -
- , - -. - p
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Vendredi 20 Novembre 1908* — H* 1A133~—
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, ..) TRIBUNE LIBRE .,
LES SOUS-PRÉFETS
J ,
Une fois de plus, la Cham-
bre des députés s'est occu-
pée des sous-préfets et, au
cours de la discussion du
budget de l'intérieur, M.)
Paul Constans en ayant de-
mariaè la suppression, c'est par neuf
voix de majorité seulement que le cré-
dit destiné à lés payer fut maintenu.
J'ai été de ceux qui ont voté pour le
maintien du crédit et je veux m'en ex-
pliquer.
Il ne faut pas croire, tout d'abord,
que si la majorité s'était prononcée
pour la diminution ou la suppression
du crédit, il y aurait eu quelque chose
de changé et que tous les sous-préfets,
ou certains sous-préfets seulement, sui-
vant le cas, auraient eu, dès lé lende-
main, à préparer leurs malles, pour
quitter au ': 31 décembre prochain leurs
sous-préfectures.
Non, rien n'aurait été changé, tous
les sous-préfets seraient tranquillement
restés en leurs cabinets, continuant,
comme par le passé, à y dormir ou à y
travailler, suivant leur tempérament.
Réduire, en effet, le crédit affecté à
leur payer des appointements, sans
dire, en même temps, quelles seront les
sous-préfectures supprimées, sans spé-
cifier à quelles autres sous-préfectures
seront rattachées les communes des dis-
parues, ne signifie rien, puisque le mi-
nistre lui-même n'a pouvoir, ni qualité,
pour procéder à cette refonte nécessaire
et que, seule, une loi peut y pourvoir.
Au lieu d'être payés seulement avec
les crédits budgétaires, les-sous-préfets
auraient été forcés d'attendre, pour
toucher la totalité de leurs émoluments.,
le vote de crédits supplémentaires qui
nous auraient été demandés dans le
courant de l'année et que nous n'au-
rions pu refuser. Etait-ce bien utile ?
Dans les premières années de l'exer-
cice de mon mandat de député, je me
suis laissé -aller à la facilité de ce ges-
te, je trouvais très crâne d'affirmer
ainsi contre le gouvernement ma volon-
té de voir réformer notre système admi-
nistratif. Je pensais alors que cette vo-
lonté ainsi affirmée par Uili) majorité
très nette devait, dès le jour même,
apporter un. commencement d'exécution
à' une réforme nécessaire.' Mais je n'ai
.1iftS 'tardé à me rendre compte de l'inu-
tilité de pareille manifestation et, en y
réfléchissant mieux,' j'ai compris tout
ce qu'elle avait de vain.
Par la voie budgétaire, on ne peut-,
tout faire, et c'est heureux. ,
Supposons, par exemple, que la
Chambre ait voté la suppression totale:
des crédits des sous-préfectures, sup-i
posons, et c'est bien une supposition
toute gratuite, que le Sénat ait suivi la
Chambre, nous nous trouvions en pré-
sence de ce fait brutal, qu'il y avait
encore des sous-préfets, des employés
de sous-préfets, et plus d'argent pour
les payer. ,
Tant pis, me dira-t-on, ce sont ôe;
fonctionnaires inutiles, ils n'ont qu'à
s'en aller. C'est la solution simpliste.
Les faits la rendent plus compliquée
et moins facile à résoudre ; les lois et
règlements d'administration publia
ajoutent aux faits.
D'abord, de quel droit jetterait-on en
dehors de l'administration non seule-
ment les sous-préfets, mais tout le per-
sonnel des sous-préfectures ? Certains
de ces fonctionnaires touchent à l'âge
de la retraite, d'autres n'ont que leur
paiement pour vivre, ils n'en ont pas
moins femme et enfants.
Et alors que les républicains deman-
dent que l'employé, l'ouvrier soient
protégés contre le renvoi brusque de
remployeur, son patron, alors que
J'Etat a déjà la mission de veiller à ce
que les faibles ne soient pas trop vio-
lentés par les forts, nous lui donne-
rions brusquement le droit d'abuser de
sa souveraineté pour se séparer bruta-
lement de ses collaborateurs les plus
directs que nous lui dirions de jeter à
la rue !
Ne voir que le sous-préfet et négliger
ceux qui vivent à côté de lui, tous ces
collaborateurs modestes et mal payés
qui n'apparaissent pas, mais qui exis-
tent tout de même, c'est vouloir se ren-
dre plus facile l'injustice à commettre,
elle n'en reste pas moins urW injuste.
Avant donc de supprimer toutes les
sous-préfectures, ou partie seulement
des sous-préfectures il faudrait régler
le sort des. sous-préfets et du petit per-
sonnel dés s-préfectures. :
, f H, à côté de, ces faits, il y a autre
chose encore. Dé par de multiples lois
ou règlements, les sous-préfets sont
chargés de certaines formalités, et peu-
tent seuls y procéder ; ils ont une cer-
'-'' — - <%
taine compétence administrative,. ils ont
des attributions diverses.
S'ils sont supprimés, qui va remplir
leurs fonctions ? Qui visera certaines
pièces indispensables aux contribua-
bles ? Qui convoquera les conseils d'ar-
rondissement ?. Que deviendront même
les conseils d'arrondissement ? Qui sera
chargé de constituer les dossiers admi-
nistratifs, de convoquer les commissions
cantonales d assistance, les conseils
d'hygiène ? Qui veillera à l'application
si difficile de ces lois sociales nouvel-
les ? Qui nommera certains membres
des bureaux de bienfaisance, des com-
missions d'assistance communales, les
délégués à la revision des listes électo-
rales ? Qui autorisera les transports de
corps de commune à commune ? -
Et que sais-je encore ? Il faudrait
toute une colonne du journal pour énu-
mérer ce qui incombe aux sous-préfets,
de par la loi, et ce qui ne peut être
fait que par eux, tant qu'une loi nou-
velle n'aura pas chargé d'autres fonc-
tionnaires" de lés remplacer.
Tout cela démontre, jusqu'à l'éviden-
ce, qu'on ne peut supprimer les sous-
préfets par voie budgétaire et qu'il faut
une étude approfondie, une réforme
d'ensemble de notre système adminis-
tratif pour y arriver.
Et, dans les cadres d'un article, nous
ne pouvons envisager et cette réforme
et ses répercussions bonnes ou mauvai-
ses. ,., -
Du reste, rien né presse ; comme
tant d'autres, la réforme administrative
dort d'un bon sommeil et M. Clemen-
ceau n'a très certainement pas encore
décidé des grands principes qu'il en-
tendait y faire triompher. Comme pour
les conseils de préfecture, plusieurs so-
lutions se présentent à son esprit pri-
mesautier, et il n'ose indiquer celle qui,
aujourd'hui, lui paraît la meilleure, car
l'expérience lui a appris que demain,
une autre lui semblerait avoir toutes,
les qualités de la première, et d'autres
encore. , •
- Dormez donc en paix, employés des
sous-préfectures et sous-préfets : rien
ne menace votre paisible existence.
Marcel IUBGMËR,
- Député de l'Allier
LA POLITIQUE
LA POLITIQUE DU CHANCELIER
-
M. de Biilow l'emporte. Il
reste debout, il sort vainqueur.
de l'entrevue de Potsdam.
L'empereur qui n'a osé le bri-
ser, a dompté ses nerfs et son
orgueil, compris que le fossé
s'élargissait — qui le séparait de son
peuple. Déjà, d'aucuns réclamaient son
abdication. Il est des symptômes aux-
quels Guillaume II ne s'est pas trompé.
Le chancelier a confié le résultat de
l'entrevue historique à sa confidente, la
Gazette de Cologne. Avec une suprême
habileté, il prend à son compte la pro-
messe d'activer une évolution du régime
constitutionnel. Lui, qui disait naguère :
« Nous n'avons pas un vrai parlementa-
sme, et c'est un grand bonheur »1. chan-
L.: aujourd'hui la palinodie.
I L'officieuse Gazette,qui sait son secret,
annonce des changements prochains sous
une forme discrète « Le droit public
d'un pays moderne ne peut pas se pétri-
fier. » Si nous voulons connaître la pen-
sée de fond du chancelier, sous l'influen-
ce des événements récents, retenons que
ce droit public « doit être mis en accord,
très prudemment et sans secousse, avec
la mentalité, du peuple et les exigences
de la vie. »
Ceci est, à' proprement parler, l'annon-
ce d'une ère nouvelle. La brève commu-
nication d'hier ne le faisait pas espérer.
Le mécontentement général à l'annonce
des maigres concessions de l'empereur a
obligé le chanceliÍer à promettre au pu-
blic les satisfactions prochaines que,
sauf catastrophe, on ne pouvait pas lui
refuser.
Bismarck avait accordé le suffrage
universel à l'Allemagne à son heure,
Biilow concède un parlementarisme in-
dispensable, au moment opportun. -
C'est fort habile et sage. S'il a fait rê-
vera l'empereur d'une résistance obstd-
hée, il a rendu service à la famille impé-
ria"e et à l'emplire; il s'acquiert en même
temps un prestige rare. L'affaire bien
menée montre un homme d'Etat.
— — :
LES ON-DIT
*
.:.
NOTRE AGENDA : <
Aujourd'hui jeudi :
Lever du soleil à 7 h. 17 ; coucher à 4 h.
14 minutes.
— Matinées ; Comédie-Française, Cdéon,
Gaîté-Lyrique, Porte-Saint-Martin, Châte-
let, Déjazet, Trente Ans de théâtre (salle
Wagram), Parisiana, Albambra, Nouveau-
Cirque, Cirque Rancy.
; — Gourses à AuteuiL
Maujanlana, -
Il voulut soumettre au grand Pan,
deux contes en vers de sa composition.
Il commença par lire le premier, mais
au moment où Il tirait le second de son
portefeuille..
— « Inutile, interrompt vivement le
grand Pan, j'aime mieux l'autre. »
Madame La Pierre-,
-: Une certaine Mme Là Pierre fut. une
jolie femme d'entre les plus jolies fem-
mes de notre si curieux - et si déli-
cieux — dix-huitième siècle.
Mme La Pierre ! le nom n'est, point
poétique, certainement ! « Oh J disait-
elle, un jour, il serait impossible de
faire quelques agréables coupiets sur
niOl 1 » » ,,. .,.-..,'
— « Madame, répondit l'avocat géné-
ral Séguier, vous les aurez demain.»-
Et le lendemain, il lui envoyait cette
ingénieuse chanson, qu'il est rarissime
de rencontrer aujourd'hui :
Le petit dieu qu'on aime et qu'on révère
Pour nous tenter, nous offre vos attraits ;
II nous séduit et vous, êtes la pierre:
Dont il se sert pour aiguiser ses traits.
On trouve en vous une pierre aimantée
Qui nous retient sans cesse à vos genoux,
Heureux qui peut d'une main assurée
Faire, avec vous d'une pierre deux coups 1
■ Non ! non ! jamaiè quoiqu'on dise et qu'on fasse
Ne jetterai la pierre à mon voisin ;
Mais je voudrais qu'amour me fit la grâce
De la jeter souvent dans mon jardin.
J'en pourrais faire une pierre de touche
Pour vous prouver que mon cœur est constant ;
En l'approchant tant soit peu de ma bouche
Je connaîtrais le plus doux sentiment.
Presque toujours, sur la pierre d'attente
.:EJ resterais sans trop vous ennuyer,
Si je croyais qu'à ma voix gémissante
Votre cœur dût, de temps en temps, céder,
Mais vos yeux sont une pierre infernale
Qui brûle tout sans vouloir rien guérir,
Et bien plus que la philosophale
Donne l'espoir sans jamais le remplir 1
On voit souvent la pierre herborisée
Faire à nos yeux un séduisant effet,
Mais j'aime mieux celle qui, bien frappée,
Tire du feu de. mon petit briquet. ,
Je la préfère à la plus belle agate,
A la topaze, au saphir, au diamant,
Mais je crains bien que celle qui me flatte "t.
Ne soit pour, moi, pierre d'échappement ? *
AUTREFOIS
Rappel du 20 novembre 1872. - La poli-,
Mque basée sur la conjonction des deux
centres- centre droit et centre gauche -
à été battue hier à l'Assemblée, où cette po-
litique. a trouvé contre elle, d'une part. les
républicains, d'autre part, les monarchis-
tes. Le parti républicain dit que l'Assem-
blée ne peut avoir de' majorité, et réclame
la dissolution.
Les chiens qui pendant la guerre avaient
- pour les raisons que l'on sait, — dispa-
ru de Paris, sont revenus. Ils étaient 68.000
en 1868, ils sont aujourd'hui près de 70.000.
Mort de « l'homme aux rats », c'était un
modèle connu dans les ateliers de sculp-
teurs ; quand la. pose ne marchait pas, il
allttft sur les places faire évoluer une dou-
zaine de rats d'égout qu'il avait dressés. Il
était fort connu des badauds.
A l'Opéra, on a commencé les répétitions
de la Coupe du roi de Thulé, dont la pre-
mière aura lieu en février.
Cauloiserie-
Un conseiller au Parlement d'Aix, qui
aimait assez à figurer dans des mystifi-
cations, rencontra, au moment de son
arrivée à Paris, l'abbé de. Latteignant,
son ami, qui, enchanté de le voir et ne
voulant pas le quitter de la journée, lui
proposa de le mener passer la soirée
chez des dames de sa connaissance, où
il serait fort bien accueilli. Le conseil-
ler voulut s'excuser sur ce qu'il était
en habit de voyage, qu'il ne connaissait
point ces dames et qu'elles lui feraient
sans doute, beaucoup de questions aux-
quelles il ne se souciait pas de répon-
dre. « Qu'à cela ne tienne, lui dit l'ab-
bé, je te présenterai comme sourd-muet
de naissance, ayant d'abord reçu une
bonne éducation et jouant tous les jeux
de société ; ainsi tu pourras te mettre à
ton aise, et tu seras bien sûr qu'on ne
te fatiguera pas de questions. » Le
conseiller, trouvant l'idée plaisante, par-
tit avec l'abbé, fut présenté aux dames
comme il avait été convenu et joua si
parfaitement son rôle, qu'elles en fu-
rent complètement dupes. On lui pro-
posa par signes une partie de reversis ;
les dames badinent smr le sourd-muet,
et parfois si librement, que le conseiller
se mord les lèvres pour ne pas rire. En-
fin, à force de se contraindre, il ne peut
retenir un bruit malsain. L'abbé s'écrie
alors : « Je vous demande pardon, mes-
dames, mais comme il est sourd, il a
cru que l'autre était muet. » A ce mot,
le conseiller part d'un éclat de rire, sau-
te sur son chapeau, s'esquive et court
encore.
L,e prix d'une conversation
Le poète Malherbe, qui avait d'assez
bonnes rentes, se piquait d'une sage
économie. Un soir, comme il sortait de
l'hôtel Bellegarde, après souper, et qu'n
regagnait son logis avec son valet qui
lui portait le flambeau, il rencontra M.
de Saint-Paul, un des beaux esprits de
ce temps-là, qui l'arrèta et. se prit à lui
débiter quelques nouvelles de peu d'im-
portance. Après lui avoir accordé un
instant d'attention, Malherbe interrom-
pit brusquement le causeur, en lui di-
sant : « ,Adieu; monsieur, vous me fai-
tes brûler pour cinq sous de flambeau,
et ce que vous me dites ne vaut pas
un denier. »
L'AFFAIRE DE L'OUENZA
MM. Jonnart, Schneider et Cie, s'étant
rendu Compte que leur projet de convention
risquait fort d'être mis en échec par la
Chambre, ont prudemment battu en re-
traite.
Mais il ne faudrait pas que ce soit le
gouvernement lui-même qui leur préparât
une revanche.
1.1 Or, le conseil des ministres a, parait-il,
autorisé hier le dépôt de deux projets de
loi qui, sous une modeste apparence, ne
sont rien moins qu'une tentative de réor-
ganisation complète du régime des mines.
Le nouveau régime préconisé tendrait à
considérer l'exécution des voies publiques
comme l'accessoire d'une concession.
La concession pouvant être accordée par
un simple décret, l'établissement d'une li-
gne de chemin de fer pourrait s'en suivre
sans examen et sans autorisation du Par-
lement.
On voit la conclusion : un simple décret
permettrait — grâce à la modification légis-
lative proposée — de concéder le chemin
de fer de l'Ouenza en plus de la mine, à
MM. Schneider, Crupp et Cie.
C'est d'un cynisme admirable.
Seulement, il faudra bie-n discuter les
projets die loi. Nous veillerons à ce que le
débat ait toute* 'l'ampleur indispensable.
—:
Une heureuse initiative
M. Cruppi, ministre du commerce et de
l'industrie, vient d'adresser au président de
la République un rapport en vue de l'insti-
tution d'un Comité de législation commer-
ciale.
Voici l'exposé des motifs :
L'utilité de modifier la législation commer-
ciale pour la mettre en harmonie avec les be-I
soins du commerce et les progrès de 1 industrie
se manifeste chaque jour davantage. Mais ce
travail de revision soulève des questions com-
plexes o* variées dont l'étude exige la connais-
sance approfondie de la théorie comme de la
pratique du droit commercial. Aussi, m'a-t-il
paru nécessaire de faire appel à la collabora-
tion d'un nombre limité de personnes spéciali-
sées dans ces matières. C'est ainsi que je suis
amené à vous proposer la création près du mi-
nistre du commerce et de l'industrie d'un comité
qui serait chargé d'examiner les questions rela-
tives à la législation commerciale. .!
Ce comité donnerait tout d abord son avis ;
sur les projets et propositions de loi intéres-
sont le commerce et l'industrie ; il pourrait, en
outre, être coasulte sur toutes les oifficultés
dont son département est saisi à l'occasion de
l'application des lois existantes ; il étudierai*,
enfin, la question de savoir s'il ne conviendrait
pas de procéder à un travail de coordination
des lois commerciales en vigueur en vue do les
incorporer au code de commerce pour faciliter
les recherches des intéressés et l'œuvre de la
justice consulaire.
M. Cruppi se-prodigue de la façon la plus
louable en initiatives heureuses depuis son
entrée au ministère du commerce, et nous
ne -saurions trop l'en féliciter.
Mais la réfaction de rapports et de pro-
jets de loi ne doit pas suffire à l'activité du
ministre du commerce. Il importe qu'il! ob-
tienne des solutions.
Son excellent projet de loi sur les a.tta-
cihés commerciaux sommeille dans les car-
tons depuis six mois.
Nous comptons qu'il saura l'en faire sor-
tir.
CARNET DU LIBRE PENSEUR
.---
A propos de la mort
d'un anticlérical repenti
,-- r
Les journaux cléricaux du Midi exultent.
Il vient de leur tomber du ciel une aubaine
inattendue.
Un avoué du liquidateur des congréga-
tions de Castres vient de mourir à l'âge de
quarante et un ans, et voici en quels ter-
mes, un organe bien pensant fait part à ses
lecteurs de la fin édifiante de cet « anticlé-
rical forcené ».
Dès qu'il comprit la gravité de son mal, il fit
appeler un vicaire de sa paroisse et, trois jours
ava-nt sa mort, dans la plénitude de ses facul-
tés. il reçut tous les sacrements de l'Eglise. Dès,
ce moment, la visite du prêtre lui devint aussi.
nécessaire que celle du médecin et, avant de lui
donner congé, il priait avec lui. Du reste, on
peut dire qu'il ne cessait de prier et ne trouvait
de diversions à sa souffrance physique et mo-
rale que dans la récitation du chapelet et la
tendresse de sa mère.
Avant de recevoir le saint Viatique, il écrivit
le billet suivant, avec recommandation d'en as-
surer la publicité :
« Je regrette le mal que j'ai pu faire à l'E-
glise comme avoué du liquidateur.
a Castres, ce 6 novembre 1908. »
(Suit la signature).
En tenant le fait pour exact, que prouve-l-
il ? Ceci ; Ott que le moribond n'avait plus
la conscience de ses actes, et dans ce cas la
victoire des cléricaux est maigre, ou qu'il
avait sa pleine connaissance, et alors, il
faut admettre : ou qu'il s'agissait d'un hy-
pocrite ou que son pauvre cerveau avait
manqué de la force nécessaire pour s'af-
franchir.
Ce ne sont pas là des exemples rares.
Nombreux sont encore les esprits qui ne
sont que superficiellement émancipés, et à
qui la raison fait soudain défant quand ar-
rive pour eux l'heure de la dissociation fi-
nale des éléments qui composent l'être pen-
sant. ,
Cela prouve que l'empreinte religieuse a
créé dans l'honnne une tare atavique puis-
sante dont la disparition ne saurait être
l'œuvre d'une seule génération.
Nous n'avons jamais prétendu le contrai-
re. — P. G,
P. S. — Le Peuple Français nous deman-
de de lui faire connaître la source où nous
avons pwisé les propos que nous avons pré-
tés au pape au sujet de la guerre. Nous dé-
férons. volontiers au désir- de notre con-
frère. Celte nouvelle a été publiée par l'a
gence La Presse Associée. •
Nous avons même attendu plusieurs
J'ours avant de la reproduire, et ce n'ë&i
qu'après avoir constaté qu'elle n'avait éft
l'objet d'aucun démenti,' que-nous Vavtms
signalée il nos lecteurs.
Nous n'avons pas l'habitude d'itwenler
,les nouvelles que nous publions.
<- - UNE CONSULTATION
US •" - «Lffi DEVAIfi U IR.S*.i
.., "- ;. Il .- --.- --. r w.
- , r - ,
M* Jacques Bonzon, dont une fois encore nous
avons éprouvé la particulière bienveillance,
nous communique la consultation juridique sui-
vante, que nous soumettons à nos lecteurs afin
de mieux éclairer la passionnante affaire
Klier, qu'ils ont lue dans nos colonnes-:
La législation relative aux aliénés est
sans cesse combattue, depuis de nombreu-
ses années, et sans cesse magistrature et
police l'exploitent à leur guise. Excellente
à sa date (30 juin 1838), la loi sur les alié-
nés, qui apportait enfin quelques garanties
à la liberté individuelle, trop souvent me-
nacée par les internements qu'il est devenu
banal de comparer aux » lettres de ca-
chet », cette loi, dont plus de vingt propo-
sitions et projets parlementaires ont de-
mandé le remaniement, n'a subi aucune
retouche. Et notre besoin moderne de ga-
ranties contre l'arbitraire politique et mê--
me contre l'erreur judiciaire, ne trouve
plus, dans le texte élastique, vieux mainte-
nant de soixante-dix ans, une protection
suffisante. Les scandales auxquels cette 'oi
a donné- naissance sont maintenant trop
nombreux. Certes, beaucoup, la plupart
même des internements se trouvent justi-
fiés par l'insanité intellectuelle de malheu-
reux dont le cabanon devient le suprême
asile. Mais on peut redire ici, en la modi-
fiant à peine, la phrase de La Bruyèr-e et
que l'internement d'un homme raisonnable
est l'effroi de tous les honnêtes gens.
Car enfin, Les mots ne doivent pas nous
duper. Internement ou arrestation, accu-
sation de crime ou suspicion de démence,
c'est toujours la liberté qui est ravie, la sé-
curité et la dignité de l'existence qui est
brisée.
Nous avons péniblement acquis quelques
fragiles défenses contre l'arrestation arbi-
traire.
Il faut enfin que nous en acquérions de
semblables contre l'internement, encore
soumis à la volonté omnipotente et irres-
ponsable d'un policier ou d'un juge. Il suf-
fit à celui-ci de nommer un expert, prompt
à comprendre ses désirs, pour qu'un, non-
lieu intervienne, qui en principe, bénéfi-
ciant à l'inculpé, ne peut être frappé d'ap-
pel, et qu'administrativement sans recours
préalablement possible devant aucune ju-
ridiction, sans débat, sans défense, l'hom-
me qui réclame trop - bruyamment justice,
1
la femme qui se plaint d'une iniquité, &i.
voie murer dans la maison des fous, prus*
silencieuse même que la « Maison - desi
morts » et dont nul Dostoïewsky n'a pui
écrire les souvenirs.
, Les garanties nécessaires sont pourtant
aisées à établir. Qu'on assimile l'interne-
ment à l'arrestation. Qu'on voie en lui les-
senliel et non l'accessoire, non pas seule-1
ment Ta maladie qui le motive, mais la JK
berté qu'il fait perdre. Qu'on accor-do donc!
obligatoirement à tout internable un défen-
seur pouvant apporter à la justice, les élé-
ments d'une saine appréciation, nonsenl.
ment de l'état, mais aussi de la ccndiuont
du prétendu malade,_d.e son entourage, dà
l'intérêt véritable et sincère, qui lui est por,
té, ou bien, au contraire, des embûches qui
lui sont teiidues.
Qu'enfin dans les huit jours au plus tar
le tribunal décide, après débats et ftuditiOJf
du défenseur, que l'internement doit être
maintenu ou refusé.
Il suffira, pour éditer une publicité le plus
souvent fâcheuse à l'intéressé et à sa fa;
mille, que la procédure protectrice de sa IiJ
berté, se passe en Chambre du conseil à
huis clos. On accordera, en outre, que t'hv
ternement provisoire, sera permis dans îesÉ
cas particulièrement graves, où la vie d'un?
malade comme celle d'autrui. est mise enr
danger par sa fureur. Mais dans les huitf
jours, la justice contradictoirement sqjsieJ!
devra statuer sur cet internement, le ma in 2
tenir ou le supprimer.
Et ainsi, des erreurs se commettraient
encore, car toute justice, étant humaine, est
faillible ; mais il sera moins facile qu'au-,
jourd'hui, d'employer contre les récalci-
trants qui osent réclamer justice, le hon-,
teux procédé de la mise au tombeau.
Une comparaison est ici particulièrement
frappante. Quand il s'agit d'interdire lln:
aliéné, de lui enlever la disposition de ses
biens, alors le tribunal délibère, soigneuse-'
ment, entend le prétendu dément, et ne lei
frappe d'interdiction, qu'après un
ment l'aliéné le plus misérable. La justice
soi-disant démocratique, doit protéger la
personne plus encore crue la fortune.
- lacunes BONZON..-
Jacques BONZON.
-. Avocat à la cour.
L du 1 ti ,mort.
A la Chambre. — M. Jaurès prononce un grand discours contre
; les exécutions capitales. - Il déclare que la solidarité !**
humaine s'étend même au criminel.—Paroles 4
évangéliques de l'abbé. Lemire.
;.p. -
Le débat sur la peine de mort, qui a con-
tinué hier après-midi, sous, la présidence
de M. Henri Brisson, a été marqué par un
important discours de M. Jaurès, en faveur
de l'abolition de la peine de mort. Cette ha-
rangue enflammée, nourrie de documents,
,et qui rappelait les meilleurs jours de l'o-
rateur socialiste, n'a pas manqué d'avoir
une considérable influence sur l'assemblée.
'Peut-être quelques-unes des tenaces résis-
tances que rencontre le projet gouverne-
mental s'en trouveront-elles ébranlées.
Tout. d'abord, M. Puech, président de !a
commission, répond au discours prononcé
mercredi dernier par M. Briand, et dans le-
quel le garde des sceaux l'avait mis en
cause :
La statistique distribuée lors de la dernière
séance par M. le garde des sceaux fait elle-
même ressortir une recrudescence de la grande
criminalité dans les cinq dernières années, car
il ne faut pas se laisser Jrompcr. par des moyen-
nes.
Que la criminalité augmente, cela ne fait au-
cun doute, mais qu'importe, diront nos contra-
dicteurs, il n'y a entre la recrudescence des cri-
mes et le maintien ou la suppression de la
peine de mort aucune relation de cause à effet.
• Je reconnais que les statistiques ne fournis-
sent à oet égard aucun argument décisif, soit
pour, soit contre, mais ne pouvons-nous tirer
un argument très for. de ce fait qu'après la
suppression de la peine de mort pour les cri-
mes de faux monnayeurs, en 1832, le nombre de
ces crimes en trois ans a doublé, en dix ans a
triplé, et ne semble-t-il pas qu'il y ait là vrai-
ment une relation de cause à effet ? (Très bien
Très bien ! sur divers bancs.) -
EV à une époque plus récente le dépôt des
propositions et projets abolitionnistes.
M. Varenne. — Et voire vote !
M. le président de la commission. - N'a-t-il
pas fait passer le nombre des condamnations
capital.es qui avant 1906 était en moyenne de
16, à20 en 1906, à 41 en 1907 et à 39 pour les
trois-premiers trimestres de 1908 ?
Je sais bien que les partisans de la suppres-
sion de la peine de mort prétendent qu il y a
là un effet de réaction de la part du jury con-
tre les -tendances abolitionnistes ; n'est-il pas
plus juste de dire que si le jury condamne plus
à mort, c'est qu'il a à juger plus d.e brigands
de profession ? Pour nous, il y a là des indi-
cations qui ont un caractère de certitude mo-
rale qui nous suffit. (Très bien ! Très bien Il
Il est très joli de prétendre que lorsque la
partie saine et laborieuse du pays adüp.e une
opinion, il est de notre devoir de la combattre.
M. le garde des sceaux. — Je n'ai jamais dit
cela 1
M. Joseph Reinach. — Nous n'appar'enons
sans doute pas à la partie saine du pays 1
M. le président de la commission. — Oublie-
t-on que dans des pays démocratiques comme
fa Sdlsse, la question qui nous occupe a été
kanchée par voie de référendum ? Je com-
prends qu'on résiste à l'opiniûn pour défendre
un innocent, pour défendre l'équité, mais ici,
pour qui et pour quoi irions-nous à l'encontre
de sentiments qui Sonr les nôtres ? (Très bien r
Très bien ! sur divers ooncs.),
AI. Ferdinand Buisson. — Le.peuple demande
le maintien de la peine de mort à cause de So-
leilland *' et M. le rapporteur lui-même a déclaré
qu'il -n'aurait pas. prononcé la peine de mort
contre Soleilland. (Applaudissements à gauche.)
M. le président de la commission. - Pour-
quoi irions-nous défendre contre lopinion pu-
blique des hommes qui l'êpant la terreur
dans des régions entières, dont la profession
est de voler et d'assassiner, qui font subîr il ief
vieillards les plus atroces supplices 1
UN3 OBSERVATION DU GARDE Dra
1 SCEAUX >
M. Briand réplique, avec sa vigueur or*
dinaire, à M. Puech :
M. Briand, garde des sceaux. — J ai ieeonmi
l'augmentation inquiétante des mcurUfs qui
n'entraînent pas la peine de mort, et monu~
que c'étaient là des crimes de circonstance, :¡¡;
plupart crimes de l'alcoolisme, se
dans les grandes villes, et en raison de la misa
à la podéc de toutes les mains ues urines ¡)),..:ur
trières,
On a reproché au gouvernement d'avoir été
abolilionniste. Ceite responsabilité, vous la i>ar-
tagez avec lui, puisqu'on 19CC» vous iui refin
siez les crédits nécessaires à l'exécution de la
loi.
DISCOURS DE M. JAURES ,
M. Jaurès commence alors le discours,
auquel nous venons de faire aFusion, et qur*
est écouté avec l'attention la plus soutenue.!
M. Jaurès. — Il n'y a pas parité entre le va-..
gue des statistiques tiraillées de pari et d'autre
et la ceititude effroyable de la peine qu'on veue,
main'en ir.
Les partisans de la peine de mort veulent
faire pression sur notre esprit en nous accJ.:
blant sous une sorte de dogme de lai alite qiAlf
ne permet pas le relèvement dtm êtrn I:::it
tombé. Cette doctrine est ab&o.t~j.::n' :,mu'vjr,
d'une part à celle du christianisme, faile d'hu^
milité et de oontiance. de l'autre a celle de la'
Révolution.
J'ai le droit de m'étonner que des chn'uons,-'
exposés aux mêmes chutes et capables des mê-
mes relèvements, osent dire à d'autres nommes
qu'ils ne sont plus que des pourriture cy
qu'il n'y a qu'à les retrancher du nombre des
vivants. (Applaudissements et protestations Cil
sens divers.)
(A l'abbé Lemire, qui interrompt). - Voir»
isolement. mon cher collègue, ne lait qu- souli-
gner la gravité de ce procès. ,'
Quand I j'ai invoqué cette doctrine oevatV, M.
Barrés, il y a quelques mois, il m'a -
qûTl y xivait comme deux - hommes en m. Je
comprends cette distinction chez M. liaiiès*
qui ne voit dans le sentiment chrétien qu'un®'
impression se rattachant il l'ensemble de la
tradition nationale. Mais ceux qui se liatfent
d'être de vrais chrétiens, je me demande com-
ment ils peuvent admettre cette disHnciicn Si
l'homme, si flétri qu'il soit, est capable jus-
qu'au bout de relèvement, je me demande qUd!A
comédie joue donc l'aumônier des deenières prit-
res qui accompagne le condamné à l'échafüud.
(Applaudissements à l'extrôme-gauche.)
M, Barrés. — Nous reconnaissons ;,J, Jaurès,
quand il tient ce langage : il s'appellc Mgr \!y-
riel dans Victor Hugo. mirOS,), Mais si l'on- vaÊ
jusqu'au bout, ce prêtre-là voudra tlrr¡yhtr le
criminel non seulement à l'échaiaud. mais 4.
bagne. -.
J'avais cru, moi, m'adresser ici à un -- puùJiq
de légistes.
Il y a deux rôles distincts : - etui du prêtre
qui absout le passé, celui du bourreau qui Tait;
justice. (Applaudissements sur. divers J.anc.s.} -
M. Jaurès. — "M. Barrés et ici le docteur de'
l'Eglise. (Rires.) Mais je puis bien dire qlÙ,ntN
le christianisme comme il le comprend et la'
justice telle qu'il la pratique, il y a cornradie,
lion.. • - - ','
Et si je me tourne mainten. ant vers e-eux quI
se réclament de la Révolution, je leur dciriaîv!'»
de ne pas abandonner l'humanitarisme id'ak
dont leurs pères se sont inspirés. -
M. Jaurès soutient qu'en Angleterre, D\l;
la peine de mort existe, les crimes sont
aussi nombreux qu'en France. Il fait en-
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