Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-09-27
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 27 septembre 1908 27 septembre 1908
Description : 1908/09/27 (N14079). 1908/09/27 (N14079).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7570967t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
N° 14979. — 5 U.) *î7, cmQ ~VTMjn<~ ~~-~y~-~~
Mtwmehe UJ, beptembre 1908.— h* 14U79
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8'I!P-- -
Lfi XIX'SIECLE
,.;J -.., - -
AUX BUREAUX DU JOURNAL
14, rue du Mail, Paris.
fit chez MM. LiAGRANGE, CERF eta-
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TRIBUNE LIBRE
Les socialistes italiens
Décidément, dans F .« In-
ternationale ouvrière », la
barre passe à droite.
Après l'offensive, somme
toute heureuse, des réformjs
tes allemands, que leurs ad-
versaires n'ont même pas ose menacer
l'éviction, les réformistes italiens vien-
nent de remporter une victoire éclatan-
te — et peut-être sans précédent dans
l'histoire du ocialisme i international.
Dans Florence, la ville des fleurs et
départs, où, sous la présidence du vieux
militant Andréa Costa, les socialistes
italiens tenaient leur congrès annuel. la
direction a été enlevée, ouvertement,
complètement, sans restriction, par les
« opportunistes ». Les réformistes de-
viennent les maîtres officiellement. Leur
chef, Turati, qu'un moment Victor Em-
manuel III faillit appeler au ministère,
devient le leader, et le journal du parti,
l'Avanti, passe de nouveau sous la di-
rection de Bissolati, à qui on l'avait
enlevée précédemment.
Le vaincu, c'est Enrico Ferri, le Be-
bel italien ; il n'a pas attendu, d'ail-
leurs, l'heure de sa défaite pour l'enre-
gistrer officiellement. Il n'assistait pas
au congrès et loin de la bataille, dans
les républiques sud-américaines, il est
allé chercher un public vierge à qui
fournir la bonne doctrine. En Italie,
son parti désemparé n'existe pour ainsi
dire plus. Le socialisme italien est uni-
fié dans la modération. Cela signifie-
t-il qu'il groupe toutes les énergies pro-
létariennes ? Loin de là. Déjà, l'on
annonce des formations de combat, en
dehors des cadres et de l'organisation
du parti socialiste. Mais il est douteux
que Turati ait jamais espéré grouper
autour de lui l'universalité des mili-
tants italiens et qu'il ait pensé qu'un
congrès suffisait pour unir ce qui est
naturellement discordant, assimiler les
disparates et confondre les inassimila-
bles. Il est des chimères dont la pour-
suite mène aux précipices. Turati ne
semble pas être l'homme de ce sport
La cause déterminante du succès des
modérés, c'est l'appui que leur donne
la Confédération générale du Travail.
Les syndicalistes italiens, en effet, sont
partisans d'une action législative et
modérée — ils seraient comparables,
somme toute, aux syndicalistes français
à la manière de Keufer. Leurs orateurs,
Ricola et Chiesa, ont été écoutés atten-
tivement. Ils ont « consenti » à s'enten-
dre avec le parti socialiste en des ter-
mes qui marquent beaucoup plus la ré-
signation que l'enthousiasme.
« La C. G. T., ont-ils dit, ne prétend
nullement supprimer le socialisme. Elle
a une mission exclusivement économi-
que et doit se tourner vers les partis
pour exercer sa politique. L'aide du
parti lui est indispensable ; s'il n'y
avait pas de parti socialiste, il lui fau-
drait recourir à un autre parti qui ne
contrariât pas son action de classe ».
Mais, d'autre part, en dehors de la
bonne volonté de la C. G. T. à l'égard
du réformisme, le succès de cette opi-
nion est dû à l'habileté de Turati. 1
Ce « leader » a su faire voir et sen-
tir aux socialistes italiens qu'une atté-
nuation dans la forme des revendica-
tions sociales n'était pas une abolition
de l'idéal socialiste. Dans tous les pays,
les socialistes tiennent, pour des rai-
sons pratiques, matérielles, électorales,
comme; pour des raisons théoriques, à
n'être pas confondus avec l'aile gauche
du radicalisme. La peur du « confusion-
nisme » arrête bien des socialistes dans
la voie du modérantisme ou du réfor-
misme. On doit tenir compte, en tous
lieux, de cette crainte, chez les socialis-
tes réformistes, d'être pris pour des
radicaux-socialistes, et l'on conçoit
-qu'ils redoutent de perdre une légitime
influence sur leurs homogènes, en pa-
raissant « extérieurs » ou « étrangers »
au parti.
Aussi, Turati, qui répudie d'une part
« la conception absolue, hargneuse, qui
veut que le prolétariat soit toujours en
colère contre tout le monde », repousse
également le confusionnisme, « qui se
canalise dans le parti - démocratique,
eui prône le solidarisme social, le désir
général de l'harmonie, qui veut que des
ententes soient toujours possibles et de-
mande que la classe ouvrière remette
aux philanthropes éclairés des autres
classes la défense de ses intérêts ».
Turati ne veut ni de ceci ni de cela :
« Tous les partis, dit-il, sont nos adver-
saires, mais des ententes partielles et
Hefe conjonctions temporaires sont pos-
sibles H.. Il est partisan du Bloc inter-
mittent. - ,
Et le congrès, se ralliant à là voix do
chef habile, a voté la motion de concen-
tration socialiste. C'est la manifesta-
ion l.a plus catégorique du désir; de
rompre définitivement avec les violents.
On désavoue « l'opposition perpétuel-
le », la grève générale comme moyen
politique d'un usage normal, en un mot
le syndicalisme révolutionnaire.
On proclame la légitimité de l'effort
en vue d'obtenir les réformes avanta-
geuses au prolétariat. Et l'on énumère
une liste de réformes réclamées où les
lois sociales voisinent avec les lois poli-
tiques (suffrage universel) et les lois de
laïcité (école primaire).
Les socialistes italiens et le proléta-
riat syndiqué, en très grande majorité,
en même temps, apportent leur appoint
au réformisme. L'Allemagne est travail-
lée, aux yeux des « purs »r - du mênie
mal. En France, il est douteux que dans
l'opinion socialiste, les réformistes ne
soient pas la majorité. (Cela n'est pas
douteux si l'on compte ceux des socia-
listes « en marge », pour employer l'ex-
pression de Jaurès.)
En réalité, si l'on pense en outre à
l'esprit pratique et peu révolutionnaire
des Belges et des Anglais, on voit que
l'Internationale — qui l'eût dit ? — a
une tendance à « opportuniser ». ta
majorité des adhérents y supporte avec
humeur des concessions à l'esprit anar-
chiste. Il ne faut pas être grand pro-
phète pour prévoir l'heure prochaine
où le conflit des anarchistes révolution-
naires et des socialistes se Dosera théo-
riquement. Et ce sera un chapitre d'his-
toire ancienne réimprimé sur papier
neuf.
Albert MILHAUD.
LA POLITIQUE
TOUT A FAIRE
Notre très distingué confrè-
re, M, Léon Bailby consacre
l'éditorial de l'Intransigeant à
l'abominable catastrophe du
La Touche-Trévitte.
« Rien à faire », conclut-il,
pour remédier à l'intolérable état de cho-
s 3 que révèle ce nouveau désastre. Le ré-
gime parlementatire, selon lui2 étouffera
nécessairement ce scandale.
Que notre honorable adversaire (qui
n'a jamais cessé d'affirmer avec autant
de loyauté que de talent, ses opinions
nationalistes) ait une telle conception du
régime parlementaire, cela n'a rien qui
puisse surprendre.
Mais que la majorité radicale s'effor-
ce, par la veulerie de son attitude, de lui
donner raison, c'est ce que nous ne sau-
rions admettre.
En ce qui nous concerne, nous n'ac-
cepterons jamais que l'oubli se fasse au-
tour d'événements aussi douloureux, et
que le silence enveloppe les causes —
toutes les causes — de telles catastro-
pheS.
Notre patriotisme n'est pas fait de ma-
nifestations théâtrales et - de déclama-
tions pompeuses. Il s'applique à ce que
la défense nationale soit assurée inté-
gralement et intègrement par ceux qui
ont le redoutable honneur de la prépa-
rer. Il exige que toutes les forces mises
à son service par le pays, en hommes, en
matériel et en argent, ne soient pas cri-
minellement dilapidées par l'ümpéritie
des uns et la vénalité des autres
L'anarchie intégrale de l'administra-
tion de la marine, dénoncée, précisée par
le rapport de M. Monis, est non seule-
ment un scandale public, mais un péril
national.
Des sanctions s',imposeht. Quels que
soient les coupables, il faut les frapper.
Car ce qui finirait par étonner, ce ne
sont pas quelques actes isolés de révolte
et d'indiscipline parmi les CNivtiers des
arsenaux et les équipages de la flotte,
c'est la confiance que pourraient conser-
ver ces hommes dans une alllinistrabion
qui n'est qu'Anarchie intégrale.
Rendant compte de la visite de M.
Thomson à Toulon, le Temps constate
l'admirable héroïsme de ces marins du
La Touche-Tréville qui, décimés, mutilés
par l'impéritie- de l'administration de la
marine, ne trouvent qu'un cri- : « Vive la
France ». Il relate également l'attitude
impressionnante des ouvriers des arse-
naux qui, sur le passage du ministre de
la République, « s'arrêtèrent respectueu-
sement pour former la haie. Tï
Voilà les hommes qu'un pessimisme
tendancieux nous représentait, hier én-
core, comme des. révoltés et des révolu-
tionnaires.
Quand donc cesserons-nous, "dans l'in-
térêt misérable des querelles de partis, de
vilipender ces vertus héroïques des hum-
bles, qui, mieux que l'atroce égoïsme-de
CéthiÏns privilégiés, sont l'honneur et lai
force de notre pays 1,
A ces hommes, le gouvernement -de la
République doit autre chose que gefi di-
.cours funèbres, et mieux que des encoura-
gements hypocrites.
La réparation que nous devons exiger
pour toutes ces victimes héroïques de
l'administration de la marine, c'est le
châtiment exemplaire des coupables
quels qu'ils soient.
Si l'on veut que la nation reste sourde
aux excitations abominables de Fantipa-
triotisme, il-faut que les jeunes hommes
qu'elle confie aux armées cessent d'être
nourris avec des viandes pourries, vêtus
avec des habillements défectueux, armés
avec un matériel mal façonné.
Le Parlement, sous peine de faillir au
plus impérieux de ses devoirs, doit por-
ter le fer rouge sur cette anarchie inté-
grale des bureaux de la marine et sur la
plaie rongeante des grands fournisseurs.
M. Thomson déclare que «( l'attitude
de la population maritime toulonnaise,
si digne malgré tant de malheurs, mérite
tous éloges. »
Il serait à souhaiter que l'on' put en
dire autant de la sienne,, et de celle de
son administration..-
LES ON-DIT
1 NOTRE AGENDA
'AuiourdN'hui samedi i
, Lever du soleil à 5 h. 53; couches à 5 h.
49 minutes.
1 — Courses au Tremblay.)
Maujaniana.
Il rencontre au hasard de ses prome-
nades dans sa circonscription, un vieux
militant de ses Comités qui répond froi-
dement à son salut.
— « Allons, mon vieil ami, lui dit-il,
nous n'allons pas nous bouder, j'espè-
,re.Il y a si longtemps que nous servons
la République ensemble.
— « Oh ! pardon, interrompt l'autre
sèchement, ne confondons pas ceux qui
la servent et ceux qui s'en servent 1 »
AUTREFOIS
Rappel du ,27 septembre 1908. — Rece-
vant un groupe de républicains, à Pornic,
Edgar Quinet prononce un discours, dans
lequel il s'étonne que la République fran-
çaise, acceptée par le monde entier, ait en-
core des ennemis. en France.
Une note officieuse annonce qu'on ne
poursuit plus personne pour le seul fait
d'avoir porté un uniforme sous la Commu-
ne, et qu'en outre, sur 18.000 dossiers, con-
cernant des individus non détenus, 9,000
ont été écartés par refus d'informer. De
l'aveu même du gouvernement, dix-huit
mois après la Commune, il y a donc en-
core neuf mille prévenus à faire passer de-
vant les conseils de guerre.
A une rèception intime à l'Elysée, le
prince Or lof f fait connaître un mot du
tsar Alexandre. A propos de l'entrevue de
Berlin, le tsar a déclaré que. « l'empereur
de Russie ne se serait pas rendu à une
entrevue dont le but eût été hostile à la
France. »
On recommence à répandre le bruit que
le maréchal Bazaine sera-il malade : phlé-
bite et fièvre nerveuse intermittente.
Un industriel a proposé à la Ville, de
prendre à son vompte' la construction et
l'entretien des bancs des voies pUbliques,
à condition d'être autorisé à les couvrir
d'affiches stables sur le siège el siir le
dossier.
Quelques Alsaciens-Lorrains, au moment
de quitter leur pays, n'ont pas voulu que
les corps de leurs parents morts, restas-
sent en terre annexée à l'Allemagne. Ils
les ont fait exhumer et 'transporter dans
des cimetières français. --.
Votre langue.
Nous avions déjà les cartomancien-
nes, les lignes de la main, le spiritisme,
la graphologie les physionomistes pour
nous prédire l'avenir. Maintenant nous
avons un nouvel art : « La destinée d'a-
près la langue ». Une langue longue
indique que vous aurez une haute si-
tuation : une étroite, la déveine ; une
courte et large, que vous serez très ai-
mé ; une longue et large, que vous
voyagerez etc.
Votre langue mesdames 1
1 ^HII» IIIP fin
Les Associations
de Pères de famille
La;épublique veut, dans toutes ses éco-
les, un enseignement laïque. Le personnel
enseignant, en majorité composé de libres
penseurs, est tout disposé à donner cet en-
seignement à rios enfants ; mais les cléri-
caux, qui ne désarment jamais, savent cha-
que jour susciter quelque obstacle à la bon-
ne volonté de nos professeurs et institu-
teurs, quelque difficulté à l'application des
lois de la Hépublique. La création de l'As-
sociation des Pères de famille pour surveil-
ler l'éducation des enfants nous en fournit
une nouvelle preuve.
Le titre peut tromper et laisser croire que
quelques pères de famille bien intentionnés
ont décidé de se réunir pour surveiller l'en-
seignement et l'éducation donnés aux en-
fants, compléter, au besoin, cet enseigne-
ment, et faciliter ainsi la tâche si ardue du
professeur ou de l'instituteur ; tout autre
est le but à atteindre, il est utile de le dé-
masquer ne serait-ce que pour montrer une
fois de. plus combien l'esprit clérical est ex-
pert pour couvrir d'une belie étiquette toute
mauvaise marchandise. » • < t-
L'Association cléricale des Pères de fa-
mille commence à fonctionner un peu dans
chaque commune, elle reçoit son mot d'or-
dre du curé, et a pour mission d'entraver
le plus possible l'enseignement purement
laïque que la plupart de nQS instituteurs
ont te bon esprit de donner aux enfants
elle a la prétention de surveiller les livres
distribués et se permet de formuler des
plaintes contre les maîtres qui interprètent
l'histoire d'après le bon sens et enseignent
à la jeune génération des idées de progrès
et de justice. Son but, en un mot, est de dé-
courager notre personnel enseignant en lui
suseftant de nombreux ennuis, de nom-
breux tracas.
Nous espérons qu'il suffit de démasquer
cette nouvelle manœuvre des cléricaux
pour en rendre les conséquences nulles. Les
pouvoirs publics ont le devoir, non seule-
ment de jeter au panier les plaintes trop
intéressées des membres de l'Association,
mais encore de faire comprendre à nos ins-
tituteurs qu'ils sont dans la bonne voie en
donnant à nos enfants un enseignement pu-
rement laïque et que les plaintes de ce gen-
re, formulées contre eux, prouvent simple-
ment qu'ils méritent des éloges de leurs
chefs.
ACTION LAÏQUE
- -
Le gouvernement a, paraît-il, résolu d'af-
firmer, dès la rentrée des Chambres, son
désir de répondre par une action énergique
aux menées incessantes des cléricaux.
Si telle est bien sa résolution, nous ne
saurions trop l'en louer.
Il est certain qu'il importe d'obtenir sans
délai de la majorité républicaine le vote des
projets sur la fréquentation scolaire et sur
la protection de l'école laïque.
Par la même occasion, la majorité répu-
blicaine tiendra certainement à se rensei-
gner sur l'exécution de la loi sur les con-
grégations, et à demander au gouvernement
des explications précises sur la mansué-
tude dont il a été fait preuve à l'égard d'un
grand nombre d'ordres religieux, qui de-
vraient à l'heure actuelle être définitivement
dispersés.
Sur cette importante question, qui préoc-
cupe tous les militants de l'action laïque,
pourra venir se greffer la question des
prêts inusités consentis, paraît-il, aux con-
grégations par le Crédit Foncier de France,
et des facilités insoupçonnées qu'elles ont
rencontrées auprès de cet établissement de
crédit public, contrôlé par l'Etat.
Le cléricalisme reprend l'offensive et veut
la lutte. Il l'aura.
——————————— ,
SATISFAITS
Le gouvernement se déclare satisfait de
la réponse de l'Allemagne et continue à
garder secret le document, dont la traduc-
tion seute nous donnerait la base d'une
discussion sérieuse.
Jusqu'à présent, on nous demande d'a-
voir confiance dans la satisfaction éprouvée
par M. Pichon à la lecture de la réponse
de M. de Bulow.
Evidemment, nous serions enchantés de
partager l'optimisme offkie), mais derrière
les demi-informations, nous apercevons
deux réalités qui marquent le refus de l'Al-
lemagne d'entrer dans les vues des gouver-
nements français et espagnol.
L'Allemagne intervient pour s'interposer
entre la France et l'Espagne, d'une part,
Moulay Hafid de l'autre.,
De quelque prose habile que s'enveloppe
l'inhibition germanique, elle n'en est pas
moins manifeste.
1° Il ne faut pas imposer à Moulay Hafid
le désaveu de la guerre sainte ;
2° Il ne faut pas demander une indemnité
de frais de guerre excessive au sultan, et il
ne faut pas le presser d'acquitter sa dette.
Telles sont les restrictions de M. de Bû-
low. La question de savoir si ces restric-
tions sont sages n'est point à examiner ici,
pour l'heure. Le fait de se heurter à ces ré-
serves, qu'on n'attendait pas, ne peut pour-
tant pas être considéré comme de nature
à fournir une satisfaction particulière au
Quai d'Orsay.
Et, en attendant de plus amples rensei-
gnements, nous ajournerons le moment de
nous déclarer « satisfaits à à notre tour,
n'en voyant pas encore l'occasion.
Espérons que la publication de la note
in-extenso nous ramènera dans les rangs
des optimistes.
4» ———————————
Les Assises Maçonniques
LES mm DE IL
Au Grand Orient de France
Les séances d'hier ont été consacrées à
la discussion de la coopération, laquelle a
donné lieu à un très intéressant débat au
cours duquel la création'd'un crédit coopé-
ratif a été envisagée comme devant aider
au mouvement de coopération au point de
vue de la production. La question a été,
conformément à la procédure habituelle,
renvoyée à l'étude des loges. *
Le conseil de l'ordre a procédé à l'élec-
tion de son bureau. Ont été élus : prési-
dent M. Lafferre, député de l'Hérault, pré-
sident sortant ; vice-présidents MM. Sin-
cholle et Morin ; secrétaires MM. Cource-
net et Félicien Paris ; garde du sceau M.
Jourde, député de Bordeaux.
n nT aura pas de séance ce matin au
convent. A la séance du soir, le discours de
clôture sera prononcé par M. Chauvin, dé-
puté de Seine-et-Marne.
Un Banquet clôturera définitivement les
travaux du convent de 1908.
La grande loge de France
Dans sa réunion d'avant-hier, les délé-
gués au convent de la Grande Loge de
France (rite écossais) ont élu président,
pendant la durée des travaux, M. François
Bonnardot, avocat, qui exerça les fonctions
de gpand-maitre de 1900 à 1903. ,
A l'unanimité, le convent a ratifié ensuite
les accords rédigés par-les « garants - d'a-
mitié » avec le Grand OrIent. de France
pour régler la situation respective des deux
obédiences, en cé qui concerne les candi-
dats refusés de part, et d'autre et l'exécution
dés .décisions de*' iusticemaçonniqùs: :
Le convent de la Grande Loge de France
se terminera dimanche matin, par un ban-
quet auquel le Grand Orient sera repré-
senté, ce qui n'avait pas eu lieu l'année
dernière.
FUNÉRAILLES NATIONALES
La Ciliiimte FiTitit-Mlt'1
La cérémonie. —. Les allocutions. - L'Incident Ferrero-
Thomson. — On retrouve un nouveau cadavre.
Les obsèques des quatorze matelots vic-
times de la catastrophe, ont eu lieu hier
jeudi à Toulon. Les dépêches suivantes
notent, heure par heure, les incidents de
Atte triste et émouvante cérémonie :
Avant le départ du cortège
Toulon, 25 septembre.
Dès sept heures et demie, les prolonges
d'artillerie ornées d'écussons tricolores en-
tourés de crêpe, les roues et les bords en-
veloppés de drap noir quittent l'arsenal.
Elles sont attelées de six mulets. Chaque
prolonge portera sept cercueils, quatre sur
la plateforme. trois an-d~s~ I.e mulfle-
sont montés par des artilleurs.
Des marécîbaux-des-logis commandent
l'escorte.
Le temps est pluvieux et triste.
Déjà, tous les édifices publics ont leur
pavillon en berne. Il en est de même pour
tous les bateaux en rade, les navires de
l'escadré, les torpilleurs, les contre-torpil-
leurs et les bâtiments de commerce.
Les prolonges d'artillerie traversent la
ville, se dirigeant sur l'hôpital de la ma-
rine et entrent dans la cour de cet établis-
sement.
La foule, malgré la pluie, commence à
grossir. Les délégations de groupes civils,
de sociétés et de comités divers, arrivent
pour se joindre au cortège des autoriés.
Les rues Henri-Pastoureau, Nationale,Hip-
polyte-Duprat. le boulevard de Strasbourg,
la place de l'Intendance sont noires de
monde, que le mauvais temps ne rebute
pas. Les matelots de l'école de canonnage,
ayant à leur rubans les noms de la Cou-
ronne, du La Touche-Tréville et du Po-
thuau, arrivent à leur tour ; ils paraissent
très tristes.
A huit heures et demie, la foule est si
dense, qu'on ne peut arriver aux portes de
l'hôpital.
Les funérailles commenceront à neuf
heures.
L'absoute
Toulon. 25 septembre.
L'absoute est donnée à 9 h. 10 dans l'hô-
pital de la marine par le clergé de l'église
Saint-Louis au complet, devant toutes les
autorités réunies.
M. Thomson en habit, et sa suite ont
alors quitté la place d'Armes -et sous la
pluie se sont rendus à pied à l'hôpital où,
dans la grande cour, devant les prolonges
sur lesquelles avaient été déposés les cer-
cueils et aussi devant un dôme formé par
de larges pavillons tricolores fournis par
les navires, le curé de l'église Saint-Louis
a donné l'absoute.
Composition du cortège
Toulon, 25 septembre.
A neuf heures un quart le cortège se
forme et les Oharsi funèbres sortent Ide
l'hôpital maritime. M. Thomson conduit le
deuil derrière quelques parents des décé-
dés. Après le ministre et son officier d'or-
donnance viennent toutes les autorités ci-
viles, maritimes, militaires, etc.
Devant les cercueils avaient pris place
les délégations des troupes, les porteurs
de couronnes, les porteurs de poêles et les
porteurs de drapeaux des sociétés civiles,
notamment de l'Association de sauvetage et
des prud hommes pêcheurs.
Derrière le ministre, se tenaient entre
autres : les amiraux Marquis, Krantz,
Faubournet de Montferrand,. Gigon, etc.,
les généraux Radiguet représentant le gé-
néral Picquart, Bertrand, Vimard, les dé-
putés Louis Martin, Henri Michel, Ferrero,
MM. Raux, préfet du Var, le maire et son
conseil municipal, des délégations de Mar-
seille, des délégations des municipalités
voisines.
Une foule énorme se tenait sur tout le
parcours.
Le parcours
Toulon, 25 septembre.
Le cortège parcourt la rue Henri-Pastou-
reau, le boulevard de Strasbourg, la place
Notre-Dame et le boulevard du Cimetière,
sous la pluie et devant une haie de spec-
tateurs rangés tout le long du parcours. Les
tambours et les clairons font entendre des
sonneries et des batteries funèbres et ces-
sent lorsque la musique du 4' d'infanterie
coloniale se met à jouer, notamment la
marche de Chopin. On arrive à dix heures
au rond-point du cimetière central où la
foule est difficilement contenue par une
compagnie du 11' de ligne. Les prolonges
d'artillerie s'arrêtent. On met sur les cer-
cueils des infortunées victimes des gerbes
de fleurs, tandis que les porteurs de cou-
ronnes se rangent tout autour. Une estrade
drapée de noir a été installée pour les ora-
teurs.
Dans l'assistance on remarque encore le
général Gossot, directeur de l'artillerie, ar-
rivé ce matin pour enquêter, l'amiral Ley-
gue, préfet maritime de Lorient le contre-
amiral Chocheprat.
LES DISCOURS
.Le ministre de la marine prend le pre-
mier la parole ; voici son allocution ;
Discours de M. Thomson
En exprimant le séniimenfc de profonde et
fraternelle affection qui a envafii la grande
famille maritime à la nouvelle de la catastrJ-
phe du La Touche-Tréville, j'ai tenu à apportera
notre Ecole de canonnage, encore une foiô si
rudement frappée, et aux malheureuses vicvi-
mes.du devoir simplement et fermement accom-
pli, l'hommage suprême du gouvernement de
la République et du pays tout entier.
Ici même, au lendemain de l'une de ces dures
épreuves qui hélas ! ne sont point épargnées
à notre marine nationale, je constatais devant
vous que de tels coups, de si cruelles émotions
rendaient singulièrement pénible le labeur quo-
tidien.
On Se demandait, quand de si épouvantables
accidents se répétaient, ce que valait l'effort de
chaque jour, le travail constant, la perpétuelle
recherche d'améliorations et de- progrès;
• çe- n'était- -pas - aii; ;i«OHient" • où nos ma-
rins donnaient à 4-ous dé si hautes leçons d'é-
nergie, de sang-froid et de dévouement, où avec
le plus noble esprit de sacrifice, on les voyait
chaque jour accepter la lutte non plus seule-
ment avec les éléments, mais avec ces forces
brutales que la science tente d'asservir pour
accroître nos moyens d'action et de combat
que 1 on pouvait se laisser effleurer par Je dé
oouragement. Ce Gévouement, ce sang-froid hé-
J'oïqu, oet esprit de sacrifice, nous les avoiï
retrouvés, messieurs, dans le drame d'hier. L'ex-
plosion se produisit, la tourelle est jonchée de
cadavres et présente le plus affreux spectacle.
Son plafond enlevé à la hauteur de la hune
vient Joudemcnt basculer sur le pont et retombe
a à JH a nier. Cependant aucune panique n'est
constatée, aucune hésitation n'a lieu. Immédia-
tement, les mesures de secours aux blesséS.
d'extinction de l'incendie sont organisées. Le
personnel tout entier lait preuve du calme le
plus admirable et ainsi cette. fois encore nous
pouvons dire que le sinistre et lugubre tableau
de mort a ^ooimo tHnmïïi'é par le mâle et
tranquille courage des survivants et par des
actes Où, a continué à s'affirmer la générosité
de notre rœ
Celte attÜtlde e nos marins, Messieurs, nous'
trace notre devoir : nous devons nous appli-
quer a arracher son secret à la meurtrière ca.
tastrophe. Nous devons: avec plus de ténacité
que jamais, continuer nos efforts pour amélio-
rer le matériel naval, accroître la solidité des
organes, étudier tous les dispositifs de sûreté
destinés à empêcher le retour de pareils acci-
oonts.
Nous devons nous attacher à perfectionner
chaque jour davantage les armes, les instru.
ments de défense que nous confions à notre
armée de mer et de leur côté les chefs de cette
armée, ces officiers à la science, à 1 initiative
hardie desquels chacun 'rend hommage mène.
ront à bien 1 ,œuvre qu'ils ont entreprise. Ils
poursuivront l'entraînement méthodique de nos
équipages et réaliseront les progrès qui s'im-
posent, en appliquant ces règles minutieuses.
précises, bien connues de tous et qui veulent
être strictement obéies.
Permettez-moi, Messieurs, -au nom du go,,"
verneiii-ent de la République, d'adresser l'expres.
sion respectueuse de notre sympathie profonde
et J'assurance de toute notre sollicitude aux
familles de ces victirqes tombées au champ
ulionneur.
EUes ne seront pas oubliées, j'en prends le
ferme engagement. Puissent-elles trouver une
atténuation à leur chagrin dans cette pensée
que le pays pleure aujourd'hui ces glorieux i
morts qui ont succombé dans l'accomplissemenl
de la grande tâche patriotique 1
Discours de l'amiral Marquis , -
M. l'amiral Marquis, dit ;
Comment ne pas se sentir pénétré de pitié et
de chagrin, à la vue des-restes de ces quatorze
jeunes marins fauchés par la mort au début
de leur carrière ?
L'apprentissage de notre métier est semé de
dangers qui l'ennoblissent, mais après les ru-
des leçons de l'aveugle destin, nous devons
nous efforcer d'en conjurer les coups.
Aussi mes camarades officiers, olficiers ma-
riniers et matelots, ne nous laissons pas effleu-
rer par le découragement et imitant J'héroïquo
attitude de l'équipage du La Touchc-TréviUe, qui
ne s'est pas laissé abattre par la terrible ca-
tastrophe, restons calmes, redoublons de vigi-
lance et travaillons plus que jamais à conser-
ver la confiance que le pays a mise en nous.
Discours du commandant Dariens
Après l'amiral Marquis, le capitaine de
vaisseau Dariens, commandant l'école de
canonnage s'exprime ainsi :
L'accomplissement d'une tâche lourde de te.
ponsabililés pour un chef se trouve considéra-
blement allégée lorsqu'elle se uéroule dans l'at-
mosphère de confiance sans bornes et de cal-
me abnégation qui, depuis trois quarts de siè-
cle bientôt, font l'orgueil et la force de l'Ecole
de canonnage.
C'est pour cela aussi que nous pleurons plus
amèrement la disparition de ceux qui, comme
leurs camarades, il y a un mois. ont été frap-
pés au poste de combat.
Après le douloureux événement du 12 août,
nos tirs avaient repris avec l'entrain merveil-
leux auquel il fallait s'attendre, et si le souve-
nir ému de notre récent chagrin restait tou-
jours, hélas ! gravé dans nos cœurs en deuil,
nul_neût pu trouver la trace de la calastrophe
dans l'activité généreuse déployée par nos ap-
prentis dans leurs exercices. -
Nos braves gens de Bretagne et de .Norman.
die, solidement trempés dès leur plus jeune
âge par la lutte constante avec les éléments,
ont appris à connaître leurs caprices chan-
geant et à les accepter comme ceux d'une force
de la nature aveugle devant Jaauelle il faut
combattre sans cesse mais non désarmer.
Pêcheurs d'Islande et de Terre-Neuve ou de
Groix, aux prises avec la mer immense, quel-
quefois clémente, le plus souvent cruelle, ils
ont su de bonne heure qu'il importe de sur-
veiller sans cesse les forces matériel!es, tou-
jours prêtes à se déchaîner contre ceux qui pré-
tendent les discipliner. C'est une telle éducation
qui leur a donné ces cœurs valeureux, qu'au-
cune épreuve ne saurait abattre ; je le dis bien -
haut, non pas rour répéter une vérité devenue
presque un lieu commun, mais parce qu'il im-
porte de faire luire dans la brume de nos tris- t
tesses l'étoile consolatrice. Aucune marine ri.'
vale ne possède à' coup sûr des équipages plus
éprouvés et plus vaillants aue les nôtrl's-
Discours du maire de Toulon
M. Escartefigue, maire de Toulon, dit :
Un jour vjen. u. où ces dates rapprochées du
12 août et du 22 septembre 1908 se fondront
dans le souvenir attendri de tous ceux qui vé-
curent ces heures douloureuses. (Pour nous.
Messieurs, au nom de la ville de Toulon, nous
ne pouvons qu'associer dans une même pensée
de pitié ces jeunes gens arrachés en pleine
jeunesse dans l'accomplissement du devoir.
Discours de M. Ferrero, député
M. Ferrero, député, a dit <-
La population maritime que j'ai l'honneur de
repré'senter à la Chambre aime passionnément
la France et ses braves marins. Chaque lois
que la marine supporte un nouveau deuil, elle
est émue profondément. Sa douleur est sincère
quand elle voit de pauvres jeunes gens enle-
vés brutalement à l'affection de leurs familles.
C'est avec stupeur aussi qu'elle assiste à ces
catastrophes successives qu'un mauvais génie
semble réserver à la cité toulonnaise. Et, il son
affliction, se mêle quelque ôolère, en songeant
qu'on ne sait pas prévenir le retour trop fré-
quent de terribles accidents, toujours identi-
ques.
Messieurs, je ne veux pas récriminer ni accu-
ser personne ici. Qu'il me soit permis cepen-
dant de dire combien il est affreux de voir tant
de victimes d'engins destructeurs, dont le rôle
est de protéger le pays des attaques dé l'en-. >
nemi et non de semer la mort parmi ceux qui
préparent la défense nationale. -
Qu'il me soit permis de dire quçtoacsl
précautions n'ont pas été-prises, qu'il y a peut--
être une redoutable ignorance de certains phé-
nomènes, que la perfection dans cet ari de lfc
guerre dont on est si fier n'a pas été atteinte,
et que les leçons du passé auraient dû êw
écoutt.
Mtwmehe UJ, beptembre 1908.— h* 14U79
.- ---- -. + -.-.:..s.,
8'I!P-- -
Lfi XIX'SIECLE
,.;J -.., - -
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fit chez MM. LiAGRANGE, CERF eta-
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> -
TRIBUNE LIBRE
Les socialistes italiens
Décidément, dans F .« In-
ternationale ouvrière », la
barre passe à droite.
Après l'offensive, somme
toute heureuse, des réformjs
tes allemands, que leurs ad-
versaires n'ont même pas ose menacer
l'éviction, les réformistes italiens vien-
nent de remporter une victoire éclatan-
te — et peut-être sans précédent dans
l'histoire du ocialisme i international.
Dans Florence, la ville des fleurs et
départs, où, sous la présidence du vieux
militant Andréa Costa, les socialistes
italiens tenaient leur congrès annuel. la
direction a été enlevée, ouvertement,
complètement, sans restriction, par les
« opportunistes ». Les réformistes de-
viennent les maîtres officiellement. Leur
chef, Turati, qu'un moment Victor Em-
manuel III faillit appeler au ministère,
devient le leader, et le journal du parti,
l'Avanti, passe de nouveau sous la di-
rection de Bissolati, à qui on l'avait
enlevée précédemment.
Le vaincu, c'est Enrico Ferri, le Be-
bel italien ; il n'a pas attendu, d'ail-
leurs, l'heure de sa défaite pour l'enre-
gistrer officiellement. Il n'assistait pas
au congrès et loin de la bataille, dans
les républiques sud-américaines, il est
allé chercher un public vierge à qui
fournir la bonne doctrine. En Italie,
son parti désemparé n'existe pour ainsi
dire plus. Le socialisme italien est uni-
fié dans la modération. Cela signifie-
t-il qu'il groupe toutes les énergies pro-
létariennes ? Loin de là. Déjà, l'on
annonce des formations de combat, en
dehors des cadres et de l'organisation
du parti socialiste. Mais il est douteux
que Turati ait jamais espéré grouper
autour de lui l'universalité des mili-
tants italiens et qu'il ait pensé qu'un
congrès suffisait pour unir ce qui est
naturellement discordant, assimiler les
disparates et confondre les inassimila-
bles. Il est des chimères dont la pour-
suite mène aux précipices. Turati ne
semble pas être l'homme de ce sport
La cause déterminante du succès des
modérés, c'est l'appui que leur donne
la Confédération générale du Travail.
Les syndicalistes italiens, en effet, sont
partisans d'une action législative et
modérée — ils seraient comparables,
somme toute, aux syndicalistes français
à la manière de Keufer. Leurs orateurs,
Ricola et Chiesa, ont été écoutés atten-
tivement. Ils ont « consenti » à s'enten-
dre avec le parti socialiste en des ter-
mes qui marquent beaucoup plus la ré-
signation que l'enthousiasme.
« La C. G. T., ont-ils dit, ne prétend
nullement supprimer le socialisme. Elle
a une mission exclusivement économi-
que et doit se tourner vers les partis
pour exercer sa politique. L'aide du
parti lui est indispensable ; s'il n'y
avait pas de parti socialiste, il lui fau-
drait recourir à un autre parti qui ne
contrariât pas son action de classe ».
Mais, d'autre part, en dehors de la
bonne volonté de la C. G. T. à l'égard
du réformisme, le succès de cette opi-
nion est dû à l'habileté de Turati. 1
Ce « leader » a su faire voir et sen-
tir aux socialistes italiens qu'une atté-
nuation dans la forme des revendica-
tions sociales n'était pas une abolition
de l'idéal socialiste. Dans tous les pays,
les socialistes tiennent, pour des rai-
sons pratiques, matérielles, électorales,
comme; pour des raisons théoriques, à
n'être pas confondus avec l'aile gauche
du radicalisme. La peur du « confusion-
nisme » arrête bien des socialistes dans
la voie du modérantisme ou du réfor-
misme. On doit tenir compte, en tous
lieux, de cette crainte, chez les socialis-
tes réformistes, d'être pris pour des
radicaux-socialistes, et l'on conçoit
-qu'ils redoutent de perdre une légitime
influence sur leurs homogènes, en pa-
raissant « extérieurs » ou « étrangers »
au parti.
Aussi, Turati, qui répudie d'une part
« la conception absolue, hargneuse, qui
veut que le prolétariat soit toujours en
colère contre tout le monde », repousse
également le confusionnisme, « qui se
canalise dans le parti - démocratique,
eui prône le solidarisme social, le désir
général de l'harmonie, qui veut que des
ententes soient toujours possibles et de-
mande que la classe ouvrière remette
aux philanthropes éclairés des autres
classes la défense de ses intérêts ».
Turati ne veut ni de ceci ni de cela :
« Tous les partis, dit-il, sont nos adver-
saires, mais des ententes partielles et
Hefe conjonctions temporaires sont pos-
sibles H.. Il est partisan du Bloc inter-
mittent. - ,
Et le congrès, se ralliant à là voix do
chef habile, a voté la motion de concen-
tration socialiste. C'est la manifesta-
ion l.a plus catégorique du désir; de
rompre définitivement avec les violents.
On désavoue « l'opposition perpétuel-
le », la grève générale comme moyen
politique d'un usage normal, en un mot
le syndicalisme révolutionnaire.
On proclame la légitimité de l'effort
en vue d'obtenir les réformes avanta-
geuses au prolétariat. Et l'on énumère
une liste de réformes réclamées où les
lois sociales voisinent avec les lois poli-
tiques (suffrage universel) et les lois de
laïcité (école primaire).
Les socialistes italiens et le proléta-
riat syndiqué, en très grande majorité,
en même temps, apportent leur appoint
au réformisme. L'Allemagne est travail-
lée, aux yeux des « purs »r - du mênie
mal. En France, il est douteux que dans
l'opinion socialiste, les réformistes ne
soient pas la majorité. (Cela n'est pas
douteux si l'on compte ceux des socia-
listes « en marge », pour employer l'ex-
pression de Jaurès.)
En réalité, si l'on pense en outre à
l'esprit pratique et peu révolutionnaire
des Belges et des Anglais, on voit que
l'Internationale — qui l'eût dit ? — a
une tendance à « opportuniser ». ta
majorité des adhérents y supporte avec
humeur des concessions à l'esprit anar-
chiste. Il ne faut pas être grand pro-
phète pour prévoir l'heure prochaine
où le conflit des anarchistes révolution-
naires et des socialistes se Dosera théo-
riquement. Et ce sera un chapitre d'his-
toire ancienne réimprimé sur papier
neuf.
Albert MILHAUD.
LA POLITIQUE
TOUT A FAIRE
Notre très distingué confrè-
re, M, Léon Bailby consacre
l'éditorial de l'Intransigeant à
l'abominable catastrophe du
La Touche-Trévitte.
« Rien à faire », conclut-il,
pour remédier à l'intolérable état de cho-
s 3 que révèle ce nouveau désastre. Le ré-
gime parlementatire, selon lui2 étouffera
nécessairement ce scandale.
Que notre honorable adversaire (qui
n'a jamais cessé d'affirmer avec autant
de loyauté que de talent, ses opinions
nationalistes) ait une telle conception du
régime parlementaire, cela n'a rien qui
puisse surprendre.
Mais que la majorité radicale s'effor-
ce, par la veulerie de son attitude, de lui
donner raison, c'est ce que nous ne sau-
rions admettre.
En ce qui nous concerne, nous n'ac-
cepterons jamais que l'oubli se fasse au-
tour d'événements aussi douloureux, et
que le silence enveloppe les causes —
toutes les causes — de telles catastro-
pheS.
Notre patriotisme n'est pas fait de ma-
nifestations théâtrales et - de déclama-
tions pompeuses. Il s'applique à ce que
la défense nationale soit assurée inté-
gralement et intègrement par ceux qui
ont le redoutable honneur de la prépa-
rer. Il exige que toutes les forces mises
à son service par le pays, en hommes, en
matériel et en argent, ne soient pas cri-
minellement dilapidées par l'ümpéritie
des uns et la vénalité des autres
L'anarchie intégrale de l'administra-
tion de la marine, dénoncée, précisée par
le rapport de M. Monis, est non seule-
ment un scandale public, mais un péril
national.
Des sanctions s',imposeht. Quels que
soient les coupables, il faut les frapper.
Car ce qui finirait par étonner, ce ne
sont pas quelques actes isolés de révolte
et d'indiscipline parmi les CNivtiers des
arsenaux et les équipages de la flotte,
c'est la confiance que pourraient conser-
ver ces hommes dans une alllinistrabion
qui n'est qu'Anarchie intégrale.
Rendant compte de la visite de M.
Thomson à Toulon, le Temps constate
l'admirable héroïsme de ces marins du
La Touche-Tréville qui, décimés, mutilés
par l'impéritie- de l'administration de la
marine, ne trouvent qu'un cri- : « Vive la
France ». Il relate également l'attitude
impressionnante des ouvriers des arse-
naux qui, sur le passage du ministre de
la République, « s'arrêtèrent respectueu-
sement pour former la haie. Tï
Voilà les hommes qu'un pessimisme
tendancieux nous représentait, hier én-
core, comme des. révoltés et des révolu-
tionnaires.
Quand donc cesserons-nous, "dans l'in-
térêt misérable des querelles de partis, de
vilipender ces vertus héroïques des hum-
bles, qui, mieux que l'atroce égoïsme-de
CéthiÏns privilégiés, sont l'honneur et lai
force de notre pays 1,
A ces hommes, le gouvernement -de la
République doit autre chose que gefi di-
.cours funèbres, et mieux que des encoura-
gements hypocrites.
La réparation que nous devons exiger
pour toutes ces victimes héroïques de
l'administration de la marine, c'est le
châtiment exemplaire des coupables
quels qu'ils soient.
Si l'on veut que la nation reste sourde
aux excitations abominables de Fantipa-
triotisme, il-faut que les jeunes hommes
qu'elle confie aux armées cessent d'être
nourris avec des viandes pourries, vêtus
avec des habillements défectueux, armés
avec un matériel mal façonné.
Le Parlement, sous peine de faillir au
plus impérieux de ses devoirs, doit por-
ter le fer rouge sur cette anarchie inté-
grale des bureaux de la marine et sur la
plaie rongeante des grands fournisseurs.
M. Thomson déclare que «( l'attitude
de la population maritime toulonnaise,
si digne malgré tant de malheurs, mérite
tous éloges. »
Il serait à souhaiter que l'on' put en
dire autant de la sienne,, et de celle de
son administration..-
LES ON-DIT
1 NOTRE AGENDA
'AuiourdN'hui samedi i
, Lever du soleil à 5 h. 53; couches à 5 h.
49 minutes.
1 — Courses au Tremblay.)
Maujaniana.
Il rencontre au hasard de ses prome-
nades dans sa circonscription, un vieux
militant de ses Comités qui répond froi-
dement à son salut.
— « Allons, mon vieil ami, lui dit-il,
nous n'allons pas nous bouder, j'espè-
,re.Il y a si longtemps que nous servons
la République ensemble.
— « Oh ! pardon, interrompt l'autre
sèchement, ne confondons pas ceux qui
la servent et ceux qui s'en servent 1 »
AUTREFOIS
Rappel du ,27 septembre 1908. — Rece-
vant un groupe de républicains, à Pornic,
Edgar Quinet prononce un discours, dans
lequel il s'étonne que la République fran-
çaise, acceptée par le monde entier, ait en-
core des ennemis. en France.
Une note officieuse annonce qu'on ne
poursuit plus personne pour le seul fait
d'avoir porté un uniforme sous la Commu-
ne, et qu'en outre, sur 18.000 dossiers, con-
cernant des individus non détenus, 9,000
ont été écartés par refus d'informer. De
l'aveu même du gouvernement, dix-huit
mois après la Commune, il y a donc en-
core neuf mille prévenus à faire passer de-
vant les conseils de guerre.
A une rèception intime à l'Elysée, le
prince Or lof f fait connaître un mot du
tsar Alexandre. A propos de l'entrevue de
Berlin, le tsar a déclaré que. « l'empereur
de Russie ne se serait pas rendu à une
entrevue dont le but eût été hostile à la
France. »
On recommence à répandre le bruit que
le maréchal Bazaine sera-il malade : phlé-
bite et fièvre nerveuse intermittente.
Un industriel a proposé à la Ville, de
prendre à son vompte' la construction et
l'entretien des bancs des voies pUbliques,
à condition d'être autorisé à les couvrir
d'affiches stables sur le siège el siir le
dossier.
Quelques Alsaciens-Lorrains, au moment
de quitter leur pays, n'ont pas voulu que
les corps de leurs parents morts, restas-
sent en terre annexée à l'Allemagne. Ils
les ont fait exhumer et 'transporter dans
des cimetières français. --.
Votre langue.
Nous avions déjà les cartomancien-
nes, les lignes de la main, le spiritisme,
la graphologie les physionomistes pour
nous prédire l'avenir. Maintenant nous
avons un nouvel art : « La destinée d'a-
près la langue ». Une langue longue
indique que vous aurez une haute si-
tuation : une étroite, la déveine ; une
courte et large, que vous serez très ai-
mé ; une longue et large, que vous
voyagerez etc.
Votre langue mesdames 1
1 ^HII» IIIP fin
Les Associations
de Pères de famille
La;épublique veut, dans toutes ses éco-
les, un enseignement laïque. Le personnel
enseignant, en majorité composé de libres
penseurs, est tout disposé à donner cet en-
seignement à rios enfants ; mais les cléri-
caux, qui ne désarment jamais, savent cha-
que jour susciter quelque obstacle à la bon-
ne volonté de nos professeurs et institu-
teurs, quelque difficulté à l'application des
lois de la Hépublique. La création de l'As-
sociation des Pères de famille pour surveil-
ler l'éducation des enfants nous en fournit
une nouvelle preuve.
Le titre peut tromper et laisser croire que
quelques pères de famille bien intentionnés
ont décidé de se réunir pour surveiller l'en-
seignement et l'éducation donnés aux en-
fants, compléter, au besoin, cet enseigne-
ment, et faciliter ainsi la tâche si ardue du
professeur ou de l'instituteur ; tout autre
est le but à atteindre, il est utile de le dé-
masquer ne serait-ce que pour montrer une
fois de. plus combien l'esprit clérical est ex-
pert pour couvrir d'une belie étiquette toute
mauvaise marchandise. » • < t-
L'Association cléricale des Pères de fa-
mille commence à fonctionner un peu dans
chaque commune, elle reçoit son mot d'or-
dre du curé, et a pour mission d'entraver
le plus possible l'enseignement purement
laïque que la plupart de nQS instituteurs
ont te bon esprit de donner aux enfants
elle a la prétention de surveiller les livres
distribués et se permet de formuler des
plaintes contre les maîtres qui interprètent
l'histoire d'après le bon sens et enseignent
à la jeune génération des idées de progrès
et de justice. Son but, en un mot, est de dé-
courager notre personnel enseignant en lui
suseftant de nombreux ennuis, de nom-
breux tracas.
Nous espérons qu'il suffit de démasquer
cette nouvelle manœuvre des cléricaux
pour en rendre les conséquences nulles. Les
pouvoirs publics ont le devoir, non seule-
ment de jeter au panier les plaintes trop
intéressées des membres de l'Association,
mais encore de faire comprendre à nos ins-
tituteurs qu'ils sont dans la bonne voie en
donnant à nos enfants un enseignement pu-
rement laïque et que les plaintes de ce gen-
re, formulées contre eux, prouvent simple-
ment qu'ils méritent des éloges de leurs
chefs.
ACTION LAÏQUE
- -
Le gouvernement a, paraît-il, résolu d'af-
firmer, dès la rentrée des Chambres, son
désir de répondre par une action énergique
aux menées incessantes des cléricaux.
Si telle est bien sa résolution, nous ne
saurions trop l'en louer.
Il est certain qu'il importe d'obtenir sans
délai de la majorité républicaine le vote des
projets sur la fréquentation scolaire et sur
la protection de l'école laïque.
Par la même occasion, la majorité répu-
blicaine tiendra certainement à se rensei-
gner sur l'exécution de la loi sur les con-
grégations, et à demander au gouvernement
des explications précises sur la mansué-
tude dont il a été fait preuve à l'égard d'un
grand nombre d'ordres religieux, qui de-
vraient à l'heure actuelle être définitivement
dispersés.
Sur cette importante question, qui préoc-
cupe tous les militants de l'action laïque,
pourra venir se greffer la question des
prêts inusités consentis, paraît-il, aux con-
grégations par le Crédit Foncier de France,
et des facilités insoupçonnées qu'elles ont
rencontrées auprès de cet établissement de
crédit public, contrôlé par l'Etat.
Le cléricalisme reprend l'offensive et veut
la lutte. Il l'aura.
——————————— ,
SATISFAITS
Le gouvernement se déclare satisfait de
la réponse de l'Allemagne et continue à
garder secret le document, dont la traduc-
tion seute nous donnerait la base d'une
discussion sérieuse.
Jusqu'à présent, on nous demande d'a-
voir confiance dans la satisfaction éprouvée
par M. Pichon à la lecture de la réponse
de M. de Bulow.
Evidemment, nous serions enchantés de
partager l'optimisme offkie), mais derrière
les demi-informations, nous apercevons
deux réalités qui marquent le refus de l'Al-
lemagne d'entrer dans les vues des gouver-
nements français et espagnol.
L'Allemagne intervient pour s'interposer
entre la France et l'Espagne, d'une part,
Moulay Hafid de l'autre.,
De quelque prose habile que s'enveloppe
l'inhibition germanique, elle n'en est pas
moins manifeste.
1° Il ne faut pas imposer à Moulay Hafid
le désaveu de la guerre sainte ;
2° Il ne faut pas demander une indemnité
de frais de guerre excessive au sultan, et il
ne faut pas le presser d'acquitter sa dette.
Telles sont les restrictions de M. de Bû-
low. La question de savoir si ces restric-
tions sont sages n'est point à examiner ici,
pour l'heure. Le fait de se heurter à ces ré-
serves, qu'on n'attendait pas, ne peut pour-
tant pas être considéré comme de nature
à fournir une satisfaction particulière au
Quai d'Orsay.
Et, en attendant de plus amples rensei-
gnements, nous ajournerons le moment de
nous déclarer « satisfaits à à notre tour,
n'en voyant pas encore l'occasion.
Espérons que la publication de la note
in-extenso nous ramènera dans les rangs
des optimistes.
4» ———————————
Les Assises Maçonniques
LES mm DE IL
Au Grand Orient de France
Les séances d'hier ont été consacrées à
la discussion de la coopération, laquelle a
donné lieu à un très intéressant débat au
cours duquel la création'd'un crédit coopé-
ratif a été envisagée comme devant aider
au mouvement de coopération au point de
vue de la production. La question a été,
conformément à la procédure habituelle,
renvoyée à l'étude des loges. *
Le conseil de l'ordre a procédé à l'élec-
tion de son bureau. Ont été élus : prési-
dent M. Lafferre, député de l'Hérault, pré-
sident sortant ; vice-présidents MM. Sin-
cholle et Morin ; secrétaires MM. Cource-
net et Félicien Paris ; garde du sceau M.
Jourde, député de Bordeaux.
n nT aura pas de séance ce matin au
convent. A la séance du soir, le discours de
clôture sera prononcé par M. Chauvin, dé-
puté de Seine-et-Marne.
Un Banquet clôturera définitivement les
travaux du convent de 1908.
La grande loge de France
Dans sa réunion d'avant-hier, les délé-
gués au convent de la Grande Loge de
France (rite écossais) ont élu président,
pendant la durée des travaux, M. François
Bonnardot, avocat, qui exerça les fonctions
de gpand-maitre de 1900 à 1903. ,
A l'unanimité, le convent a ratifié ensuite
les accords rédigés par-les « garants - d'a-
mitié » avec le Grand OrIent. de France
pour régler la situation respective des deux
obédiences, en cé qui concerne les candi-
dats refusés de part, et d'autre et l'exécution
dés .décisions de*' iusticemaçonniqùs: :
Le convent de la Grande Loge de France
se terminera dimanche matin, par un ban-
quet auquel le Grand Orient sera repré-
senté, ce qui n'avait pas eu lieu l'année
dernière.
FUNÉRAILLES NATIONALES
La Ciliiimte FiTitit-Mlt'1
La cérémonie. —. Les allocutions. - L'Incident Ferrero-
Thomson. — On retrouve un nouveau cadavre.
Les obsèques des quatorze matelots vic-
times de la catastrophe, ont eu lieu hier
jeudi à Toulon. Les dépêches suivantes
notent, heure par heure, les incidents de
Atte triste et émouvante cérémonie :
Avant le départ du cortège
Toulon, 25 septembre.
Dès sept heures et demie, les prolonges
d'artillerie ornées d'écussons tricolores en-
tourés de crêpe, les roues et les bords en-
veloppés de drap noir quittent l'arsenal.
Elles sont attelées de six mulets. Chaque
prolonge portera sept cercueils, quatre sur
la plateforme. trois an-d~s~ I.e mulfle-
sont montés par des artilleurs.
Des marécîbaux-des-logis commandent
l'escorte.
Le temps est pluvieux et triste.
Déjà, tous les édifices publics ont leur
pavillon en berne. Il en est de même pour
tous les bateaux en rade, les navires de
l'escadré, les torpilleurs, les contre-torpil-
leurs et les bâtiments de commerce.
Les prolonges d'artillerie traversent la
ville, se dirigeant sur l'hôpital de la ma-
rine et entrent dans la cour de cet établis-
sement.
La foule, malgré la pluie, commence à
grossir. Les délégations de groupes civils,
de sociétés et de comités divers, arrivent
pour se joindre au cortège des autoriés.
Les rues Henri-Pastoureau, Nationale,Hip-
polyte-Duprat. le boulevard de Strasbourg,
la place de l'Intendance sont noires de
monde, que le mauvais temps ne rebute
pas. Les matelots de l'école de canonnage,
ayant à leur rubans les noms de la Cou-
ronne, du La Touche-Tréville et du Po-
thuau, arrivent à leur tour ; ils paraissent
très tristes.
A huit heures et demie, la foule est si
dense, qu'on ne peut arriver aux portes de
l'hôpital.
Les funérailles commenceront à neuf
heures.
L'absoute
Toulon. 25 septembre.
L'absoute est donnée à 9 h. 10 dans l'hô-
pital de la marine par le clergé de l'église
Saint-Louis au complet, devant toutes les
autorités réunies.
M. Thomson en habit, et sa suite ont
alors quitté la place d'Armes -et sous la
pluie se sont rendus à pied à l'hôpital où,
dans la grande cour, devant les prolonges
sur lesquelles avaient été déposés les cer-
cueils et aussi devant un dôme formé par
de larges pavillons tricolores fournis par
les navires, le curé de l'église Saint-Louis
a donné l'absoute.
Composition du cortège
Toulon, 25 septembre.
A neuf heures un quart le cortège se
forme et les Oharsi funèbres sortent Ide
l'hôpital maritime. M. Thomson conduit le
deuil derrière quelques parents des décé-
dés. Après le ministre et son officier d'or-
donnance viennent toutes les autorités ci-
viles, maritimes, militaires, etc.
Devant les cercueils avaient pris place
les délégations des troupes, les porteurs
de couronnes, les porteurs de poêles et les
porteurs de drapeaux des sociétés civiles,
notamment de l'Association de sauvetage et
des prud hommes pêcheurs.
Derrière le ministre, se tenaient entre
autres : les amiraux Marquis, Krantz,
Faubournet de Montferrand,. Gigon, etc.,
les généraux Radiguet représentant le gé-
néral Picquart, Bertrand, Vimard, les dé-
putés Louis Martin, Henri Michel, Ferrero,
MM. Raux, préfet du Var, le maire et son
conseil municipal, des délégations de Mar-
seille, des délégations des municipalités
voisines.
Une foule énorme se tenait sur tout le
parcours.
Le parcours
Toulon, 25 septembre.
Le cortège parcourt la rue Henri-Pastou-
reau, le boulevard de Strasbourg, la place
Notre-Dame et le boulevard du Cimetière,
sous la pluie et devant une haie de spec-
tateurs rangés tout le long du parcours. Les
tambours et les clairons font entendre des
sonneries et des batteries funèbres et ces-
sent lorsque la musique du 4' d'infanterie
coloniale se met à jouer, notamment la
marche de Chopin. On arrive à dix heures
au rond-point du cimetière central où la
foule est difficilement contenue par une
compagnie du 11' de ligne. Les prolonges
d'artillerie s'arrêtent. On met sur les cer-
cueils des infortunées victimes des gerbes
de fleurs, tandis que les porteurs de cou-
ronnes se rangent tout autour. Une estrade
drapée de noir a été installée pour les ora-
teurs.
Dans l'assistance on remarque encore le
général Gossot, directeur de l'artillerie, ar-
rivé ce matin pour enquêter, l'amiral Ley-
gue, préfet maritime de Lorient le contre-
amiral Chocheprat.
LES DISCOURS
.Le ministre de la marine prend le pre-
mier la parole ; voici son allocution ;
Discours de M. Thomson
En exprimant le séniimenfc de profonde et
fraternelle affection qui a envafii la grande
famille maritime à la nouvelle de la catastrJ-
phe du La Touche-Tréville, j'ai tenu à apportera
notre Ecole de canonnage, encore une foiô si
rudement frappée, et aux malheureuses vicvi-
mes.du devoir simplement et fermement accom-
pli, l'hommage suprême du gouvernement de
la République et du pays tout entier.
Ici même, au lendemain de l'une de ces dures
épreuves qui hélas ! ne sont point épargnées
à notre marine nationale, je constatais devant
vous que de tels coups, de si cruelles émotions
rendaient singulièrement pénible le labeur quo-
tidien.
On Se demandait, quand de si épouvantables
accidents se répétaient, ce que valait l'effort de
chaque jour, le travail constant, la perpétuelle
recherche d'améliorations et de- progrès;
• çe- n'était- -pas - aii; ;i«OHient" • où nos ma-
rins donnaient à 4-ous dé si hautes leçons d'é-
nergie, de sang-froid et de dévouement, où avec
le plus noble esprit de sacrifice, on les voyait
chaque jour accepter la lutte non plus seule-
ment avec les éléments, mais avec ces forces
brutales que la science tente d'asservir pour
accroître nos moyens d'action et de combat
que 1 on pouvait se laisser effleurer par Je dé
oouragement. Ce Gévouement, ce sang-froid hé-
J'oïqu, oet esprit de sacrifice, nous les avoiï
retrouvés, messieurs, dans le drame d'hier. L'ex-
plosion se produisit, la tourelle est jonchée de
cadavres et présente le plus affreux spectacle.
Son plafond enlevé à la hauteur de la hune
vient Joudemcnt basculer sur le pont et retombe
a à JH a nier. Cependant aucune panique n'est
constatée, aucune hésitation n'a lieu. Immédia-
tement, les mesures de secours aux blesséS.
d'extinction de l'incendie sont organisées. Le
personnel tout entier lait preuve du calme le
plus admirable et ainsi cette. fois encore nous
pouvons dire que le sinistre et lugubre tableau
de mort a ^ooimo tHnmïïi'é par le mâle et
tranquille courage des survivants et par des
actes Où, a continué à s'affirmer la générosité
de notre rœ
Celte attÜtlde e nos marins, Messieurs, nous'
trace notre devoir : nous devons nous appli-
quer a arracher son secret à la meurtrière ca.
tastrophe. Nous devons: avec plus de ténacité
que jamais, continuer nos efforts pour amélio-
rer le matériel naval, accroître la solidité des
organes, étudier tous les dispositifs de sûreté
destinés à empêcher le retour de pareils acci-
oonts.
Nous devons nous attacher à perfectionner
chaque jour davantage les armes, les instru.
ments de défense que nous confions à notre
armée de mer et de leur côté les chefs de cette
armée, ces officiers à la science, à 1 initiative
hardie desquels chacun 'rend hommage mène.
ront à bien 1 ,œuvre qu'ils ont entreprise. Ils
poursuivront l'entraînement méthodique de nos
équipages et réaliseront les progrès qui s'im-
posent, en appliquant ces règles minutieuses.
précises, bien connues de tous et qui veulent
être strictement obéies.
Permettez-moi, Messieurs, -au nom du go,,"
verneiii-ent de la République, d'adresser l'expres.
sion respectueuse de notre sympathie profonde
et J'assurance de toute notre sollicitude aux
familles de ces victirqes tombées au champ
ulionneur.
EUes ne seront pas oubliées, j'en prends le
ferme engagement. Puissent-elles trouver une
atténuation à leur chagrin dans cette pensée
que le pays pleure aujourd'hui ces glorieux i
morts qui ont succombé dans l'accomplissemenl
de la grande tâche patriotique 1
Discours de l'amiral Marquis , -
M. l'amiral Marquis, dit ;
Comment ne pas se sentir pénétré de pitié et
de chagrin, à la vue des-restes de ces quatorze
jeunes marins fauchés par la mort au début
de leur carrière ?
L'apprentissage de notre métier est semé de
dangers qui l'ennoblissent, mais après les ru-
des leçons de l'aveugle destin, nous devons
nous efforcer d'en conjurer les coups.
Aussi mes camarades officiers, olficiers ma-
riniers et matelots, ne nous laissons pas effleu-
rer par le découragement et imitant J'héroïquo
attitude de l'équipage du La Touchc-TréviUe, qui
ne s'est pas laissé abattre par la terrible ca-
tastrophe, restons calmes, redoublons de vigi-
lance et travaillons plus que jamais à conser-
ver la confiance que le pays a mise en nous.
Discours du commandant Dariens
Après l'amiral Marquis, le capitaine de
vaisseau Dariens, commandant l'école de
canonnage s'exprime ainsi :
L'accomplissement d'une tâche lourde de te.
ponsabililés pour un chef se trouve considéra-
blement allégée lorsqu'elle se uéroule dans l'at-
mosphère de confiance sans bornes et de cal-
me abnégation qui, depuis trois quarts de siè-
cle bientôt, font l'orgueil et la force de l'Ecole
de canonnage.
C'est pour cela aussi que nous pleurons plus
amèrement la disparition de ceux qui, comme
leurs camarades, il y a un mois. ont été frap-
pés au poste de combat.
Après le douloureux événement du 12 août,
nos tirs avaient repris avec l'entrain merveil-
leux auquel il fallait s'attendre, et si le souve-
nir ému de notre récent chagrin restait tou-
jours, hélas ! gravé dans nos cœurs en deuil,
nul_neût pu trouver la trace de la calastrophe
dans l'activité généreuse déployée par nos ap-
prentis dans leurs exercices. -
Nos braves gens de Bretagne et de .Norman.
die, solidement trempés dès leur plus jeune
âge par la lutte constante avec les éléments,
ont appris à connaître leurs caprices chan-
geant et à les accepter comme ceux d'une force
de la nature aveugle devant Jaauelle il faut
combattre sans cesse mais non désarmer.
Pêcheurs d'Islande et de Terre-Neuve ou de
Groix, aux prises avec la mer immense, quel-
quefois clémente, le plus souvent cruelle, ils
ont su de bonne heure qu'il importe de sur-
veiller sans cesse les forces matériel!es, tou-
jours prêtes à se déchaîner contre ceux qui pré-
tendent les discipliner. C'est une telle éducation
qui leur a donné ces cœurs valeureux, qu'au-
cune épreuve ne saurait abattre ; je le dis bien -
haut, non pas rour répéter une vérité devenue
presque un lieu commun, mais parce qu'il im-
porte de faire luire dans la brume de nos tris- t
tesses l'étoile consolatrice. Aucune marine ri.'
vale ne possède à' coup sûr des équipages plus
éprouvés et plus vaillants aue les nôtrl's-
Discours du maire de Toulon
M. Escartefigue, maire de Toulon, dit :
Un jour vjen. u. où ces dates rapprochées du
12 août et du 22 septembre 1908 se fondront
dans le souvenir attendri de tous ceux qui vé-
curent ces heures douloureuses. (Pour nous.
Messieurs, au nom de la ville de Toulon, nous
ne pouvons qu'associer dans une même pensée
de pitié ces jeunes gens arrachés en pleine
jeunesse dans l'accomplissement du devoir.
Discours de M. Ferrero, député
M. Ferrero, député, a dit <-
La population maritime que j'ai l'honneur de
repré'senter à la Chambre aime passionnément
la France et ses braves marins. Chaque lois
que la marine supporte un nouveau deuil, elle
est émue profondément. Sa douleur est sincère
quand elle voit de pauvres jeunes gens enle-
vés brutalement à l'affection de leurs familles.
C'est avec stupeur aussi qu'elle assiste à ces
catastrophes successives qu'un mauvais génie
semble réserver à la cité toulonnaise. Et, il son
affliction, se mêle quelque ôolère, en songeant
qu'on ne sait pas prévenir le retour trop fré-
quent de terribles accidents, toujours identi-
ques.
Messieurs, je ne veux pas récriminer ni accu-
ser personne ici. Qu'il me soit permis cepen-
dant de dire combien il est affreux de voir tant
de victimes d'engins destructeurs, dont le rôle
est de protéger le pays des attaques dé l'en-. >
nemi et non de semer la mort parmi ceux qui
préparent la défense nationale. -
Qu'il me soit permis de dire quçtoacsl
précautions n'ont pas été-prises, qu'il y a peut--
être une redoutable ignorance de certains phé-
nomènes, que la perfection dans cet ari de lfc
guerre dont on est si fier n'a pas été atteinte,
et que les leçons du passé auraient dû êw
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