Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-08-26
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 26 août 1908 26 août 1908
Description : 1908/08/26 (N14047). 1908/08/26 (N14047).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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W 14047.— 8 Fructidor An t lè C9tï*«i *>B WCMBRO
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ercredi 88 Août 1908: — NT 14047.
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- ANNONCE9
4CX BUREAUX DU JOUUAIt
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TRIBUNE LIBRE
0 - 0
Le parti radical -
J 1
Je l'ai montré ici-même, la
politique de M. Clemenceau
n'a pas seulement exclu les
socialistes de la majorité ré-
publicaine, elle a divisé,
dissocié le parti radical.
Une fraction, importante, je le recon-
nais, soutient avec quelque conviction
le gouvernement : c'est celle qu'autre-
fois raillait le président du conseil,
celle qui se pare, devant le suffrage
universel, de l'étiquette radicale, mais
estime, au fond, que le mot radical est
« bien radical ».
C'est celle dont M. Clemenceau disait
avec ironie -qu'elle recherchait une cir-
conlocution aussi vague que possible
pour se définir, et qui s'arrêtait à la for
mule des « partisans de la défense ré-
publicaine par l'application des réfor-
mes procédant de l'esprit de la Révolu-
tion française ».
Encore que cette « défense républicai-
ne » ne soit, à cette heure, qu'une du-
perie ; car les modérés du radicalisme
s'aveuglent étrangement s'ils ne saper
çoivent pasqu'ils vont être les premières
victimes de leur attitude. Les modérés
progressistes se préparent, en effet, a
s'emparer de leurs sièges et ils ont d'au-
tant plus de chances d'y réussir que la
faveur gouvernementale les y aide et que
ce sont leurs propres principes qui
triomphent en ce moment.
Les nationalistes eux-mêmes trouvent
leur compte dans la politique actuelle :
« Il Wy a plus de nationalistes », di-
sait aa jour M. Clemenceau à un hono-
rable sénateur républicain qui s'inquié-
tait de l'orientation du gouvernement.
fie président du conseil entendait par
T'à, sans doute, que sa politique abou-
tissait, en réalité, à l'absorption à peu
près complète du nationalisme.
En fait, la majorité parlementaire est
essentiellement tonnée-des radicaux mo-
dérés, des républicains de l'Alliance, des
progressistes et du fameux groupe de
la défense nationale, dit de Courbevoie.
Je me hâte, certes, de reconnaître
qu'il y a aussi des socialistes indépen-
dants, des radicaux de gauche et même
des radicaux-socialistes qui votent par-
fois avec le gouvernement ; mais per-
sonne ne me contredira si j'affirme que
c'est, pour beaucoup, sans enthousias"
me et non sans de sérieuses appréhen-
sions.
M. Combes, au conseil général de la
Charente-Inférieure, l'a très justement
indiqué : notre parti traverse une véri-
table crise intérieure. C'est du dénoue-
ment de cette crise que dépend l'avenir
même de la République.
La parole si autorisée de l'ancien pré-
sident du conseil aura sa répercussion
dans tout le pays républicain et, en far
osant écarter par la majorité du conseil
général qu'il préside, une adresse de fé-
licitations au gouvernement, M. Combes
a montré la voie à suivre aux radicaux
et radicaux-socialistes de France qui
doivent, prochainement, se réunir en
congrès.
Si, d'ailleurs, il fallait un autre argu-
tnent pour convaincre nos amis, il leur
suffirait de lire les organes modérés et
conservateurs. En prenant parti contre
M. Combes, le Temps, par exemple,
prend non moins nettement parti pour
M. Clemenceau, et l'ardeur avec laquelle
le grand organe progressiste s'attache
à défendre le ministère, montre claire-
ment leur devoir aux membres du futur
congrès. *
A Dijon, au mois d'octobre, vont se
'décider les destinées mêmes du parti ra-
'dical : ou il acceptera de désormais se
confondre avec les groupements politi-
ques qui vont de l'Alliance Carnot à la
fédération progressiste et à certains élé-
ments libéraux-nationalistes, ou il enten
dra redevenir lui-même °t faire retour
à sa politique. traditionnelle, qui est
celle du Bloc républicain.
Le double danger, en effet, qui, à
cette heure, menace le parti radical,
c'est, d'un côté, le sophisme de ceux
qui tendent à lui dénier une existence
propre, une doctrine, un programme, et
s'efforcent de le rendre responsable de
théories qu'il repousse, répudie, com-
bat, telle celles de la Confédération gé-
nérale du travail. De l'autre côté, le pé-
ril, pour lui, est qu'il se laisse, de dé-
faillance en défaillance, glisser dans
les bras des partis de conservation, de
Tésistance et de réaction.
Le parti radical et radical-socialiste
cloit donc, tout d'abord, être lui-même,
affirmer sa vie propre, et montrer que
son programme suffit à répondre .aux as-
pirations générales, de notre démo-
cratie. - -
: Bien mieux que je ne saurais le faire
trfoi-mêD-¡e,- d'autres- avant moi, et les
plus autorisés, Léon Bourgeois, Ferdi-
nand Buisson, ont traduit cette pensée.
Le parti radical a un but, a dit le
premier, il veut organiser politiquement
et socialement la société, selon les lois
de la raison et de la justice ; il a une
méthode, c'est celle de la nature : l'évo-
lution ; il a une morale, une philoso-
phie : la solidarité ; il a une doctrine
politique : la doctrine républicaine ; il a
enfin une doctrine sociale : l'association.
« Il est né de la rencontre de deux forces
devenues libres pour toujours : la raison
qui cherche la vérité, la conscience qui
cherche le droit. il ne saurait s'arrêter
tant qu'il naura pas atteint le but et
réalisé le dernier terme de son pro-
gramme : la justice sociale. »
Oui, comme le parti socialiste, le par
ti radical veut la République sociale, la
justice sociale, et leur collaboration, à
ce point de vue, s'impose : chacun d'eux
conserve évidemment la responsabilité
de sa doctrine, de son idéal, ae son pro-
gramme, et ce n'est que la mauvaise foi
de leurs communs adversaires qui peut
s'appliquer à créer des confusions et des
équivoques, que leur loyauté réciproqué
écarte également.
- Mais le parti radical, ainsi que Buis-
son l'a clairement exposé dans son livre
sur la politique radicale, se distingue à
la fois des doctrinaires de gauche et de
droite. Il diffère des groupes révolution-
naires par la méthode, puisqu'il entend
procéder par voie d'évolution, par la
doctrine, puisqu'il s'interdit de procla-
mer d'avance l'établissement intégral
id'un nouveau régime générai de la pro-
priété et puisque, dans le régime d'asso-
ciation qu'il préconise, il voit l'origine de,
la société et le fondement de la patrie,
à ses yeux, intangible.
Mais il diffère non moins des groupes
conservateurs ou modérés qui s'obsti-
nent à vouloir limiter l'action économi-
que et se refusent à toucher « à l'ordre
social, c'est-à-dire aux intérêts de cer-
taines classes protégés par certaines
institutions ».
Par là- même, l'orientation du parti
radical doit se maintenir vers la gauche
et, suivant l'expression dont se servait
M. Clemenceau en 1902, il ne peut vou-
loir exclure de l'action gouvernementale
une fraction, si avancée soit-elle, du
parti républicain.
D'où sa doctrine nécessaire, fonda-
mentale du Bloc, à laquelle il doit reve-
nir. C'est le « Bloc républicain » qu'en
ses prochaines assises, il devra tendre
à reconstituer.
Et la vérité qu'il importera de placer,
en quelque sorte, au frontispice du pro-
chain congrès, c'est que l'accord peut
se faire avec les socialistes pour réaliser
le programme radical, mais que l'accord
entre radicaux, progressistes et modérés
ne pourrait se faire qu'au prix de l'abdi-
cation et de la faillite du parti radical.
Paul BOURÉLY,
Député de IMrdèchfl.
LA POUTIQUE
-
EN MAURITANIE ET AILLEURS
On devine aisément le lien
qui rattache aux affaires ma-
rocaines les incidents signa-
lés ces jours-ci en Mauritanie.
Cette fois encore des morts
et des blessés restent sur le
terrain. La soif et la désertion déciment
l'une de nos petites colonnes expédi-
tionnaires. Les agressions des Maures
deviennent plus hardies et plus fré-
quentes
Ces farouches habitants des régions
icomprises entre le Sénégal et le Maroc,
féroces comme les Touaregs, pillards et
fanatiques, sont rattachés au pays
d'Abd el Aziz et d'Hafid par le réseau
serré des influences maraboutiques.
Dans tous les temps, ils ont été hosti-
les à notre domination et aujourd'hui
ils semblent faire rage contre nos trou-
pes quand ils peuvent les surprendre
isolées, hofsr de la portée d'un proche
secours,
Il n'est pas possible que les hommes
compétents qui se sont succédé au gou-
vernement général de l'Afrique fran-
çaise, M. Roume d'abord, M. Merlaud-
Ponty ensuite, n'aient pas signalé *au
gouvernement la répercussion éventuel-
le, facile à prévoir, des événements ma-
rocains jusqu'aux frontières du Soudan,
Au moment même où la prudence
commandait de surveiller attentivement
nos colonies peuplées par des musul-
mans, le gouvernement les a impru-
demmenf dégarnies.
Pour éviter lé-départ ostensible des
; trou pes empruntées aux garnisons mé-
tropolitaines, c'est en Algérie et dans
l'Afrique occidentale française que le
corps expéditionnaire de Casablanca$
'été partieHement recruté,
L'émsotion publique que l'on redou-
tait de voir se maarifester à l'embarque-
ment de troupes métropolitaines pour
lIe Maroc a été évitée. Le gouvernement
:a donc obtenu plusieurs mois de répit.
j^Éujeurd'feui, il se trouve réduit à la
éfensi\'e -aux frontières de l'Algérie
loranaase et du Séffégal.
Ici et la le déchaînement des passions
musulmanes s'est donné libre cours. Il
est temps de rendre aux gouverneurs
responsables d'Alger et de Dakar les
forces militaires utiles pour assurer la *-
sécurité de leurs frontières.
Les puissants amis d'Abd el Aziz
(nous exposeront-ils encore longtemps à'
de nouvelles complications coloniales ?
Il serait temps de penser au rétablis-
sement de la sécurité et de l'ordre, com-
promis depuis un an dans nos posses-
sions extérieures*
LES ON-MT
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui mardi i
Lever du soleil à 5 h. 7; coucher à 6 bè
55 minutes.
- Courses plates à Dieppe (prix d'Am-
phitrite).
Maujanlana
Un de nos plus aimables diplomates,
qui a longtemps vécu en Orient, lui ra-
contait le cérémonial de diverses cours.
Ainsi il lui disait qu'en Perse au mo-
ment de l'ouverture du Conseil de gou-
vernement le protocole voulait que le
shah donnât son pied à baiser aux mi-
nistres.. -
— « Ah ! vraiment ? fit Adolphe rê-
veur, mais alors si le shah donne son
pied à baiser aux ministres, que fait-il
donc baiser aux sous-secrétaires d"E-
tat.? ».
AUTREFOIS
Le Rappel. du26 août 1872. —Le gouver-
nement Ment dé signer un décret qui dis-
sout le Conseil municipal de Saint-Denis.
.cette mesure a été prise à la suite d'un dé-
saccord survenu dans le sein du Conseil
municipal, désaccord qui a déterminé la re-
-traite d'une minorité de 13 conseillers sur
vingt-sept.
M. Thiers a visité les avisos à vapeur le
Faon et le Cuvier.
On annônce que, sur l'avis des méde-
cins, Henri Boche fort, dont la gastralgie
siest considérablement aggravée, a dû
changer de prison. Du^ château d'Oléron,.
l'auteur- de la Lanterne a été transféré à
Saint-Martin de Ri.
C'est hier que le fameux nageur John-
Son a dû traverser à la nage le détroit du
pas de Calais, sous Vescorie du bateau à
vapeur le Palmerston.
L'inauguration du monument êtevé à ta
mémoire des instituteurs Leroy, Poulette
et Debadeaux, dénoncés par un Français et
fusillés par les Prussiens à Pasly, a eu
lieu, vendredi à Vécole normale de Laon,
en présence des autorités, locales.
M. Benedetti a été élu membre" du con-
seil général de la Corse pour le. canton de
Piedicorte di Gaggio.
Le café.
Il existe à la Bibliothèque 'de la Fa-
culté de Médecine une thèse datée de
1695 qui tend à démontrer que l'habi-
4ude du café rend les « hommes inha-
biles à procréer et les femmes à conce-
voir »-
Nous en recommandons la lecture à
l'honorable.
Un médecin disait un jour, à ce sujet,
à Fonte nelle que le café était un poison
lent : « Je m'en aperçois bien, répondit
le spirituel académicien, car j'en
prends depuis sôixante-dix-huit ans ! »
Ouverture des boutiques.
Au XIVe siècle, les boutiques s'ou-
vraient à Paris à quatre heures du ma-
tin. Le roi se levait à dix heures du
matin et se couchait à huit heures. Les
temps sont changés.
Un pari d'Edouard VII.
Au sortir d'un club, Edouard VII,
alors prince de Galles, accompagné
d'un jeune lord, parcourait une rue de
Londres. Comme il traversait la chaus-
sée pour gagner l'autre, le prince de
Galles s'arrêta tout d'un coup et fit la
pari qu'en suivant la rue l'un d'un
côté, l'autre de l'autre, ce serait lui qui
rencontrerait le plus grand nombre de
chats sur son chemin : «Et ajouta-t-ilje
vous laisse, lord le choix du côté ». En
effet, quand les parieurs furent arrivés
à l'autre bout, il se trouva que le prin-
ce de Galles avait rencontré neuf chats
et son compagnon pas un seul.'
— J'étais bierKcertain, dit alors le ga-
gnant, que vous choisiriez le côté de
l'ombre comme étant le plus agréablo
par cette excessive chaleur. Or. sachez,
mon ami. que les chats préfèrent tou-
jours le côté du soliI.
Le cuisinier « Misère ».
Le prince de Bulow, chancelier de
l'empire allemand, a un cuisinier qui
répond au nom de Misère. Il est vrai
que Misère n'est qu'un surnom qui a
été donné au cuisinier par l'empereur
Guillaume. ,.
Voici, dans quelles circonstances :
Lorsque M. de Bulow, diplomate en
Italie, fM* appelé au ministère des affai-
res étrangères, il fit venir son cuisinier
français et l'informa qu'il allait quitter
Rome pour Berlin, mais que sa future
demeure ainsi que sa cuisine géraient
plus petites que celles du palais Carra..
relli. -
« Voulez-vous nous suivre ? » lui de-
manda le prince. Le cuisinier demandai
une demi-heure de réflexion et, ce1
temps écoulé, revint et dit avec no-
blesse : « J'accepte. Il serait indigne
de quitter de bons majtres quand ils
tombent dans la misère. » ,
Voilà l'origine du fameux surnom-
Folie de vitesse.
Champlort disait en 1792 : « qu'il ne
.croirait à la souveraineté du peuple gue
lorsque les cabriolets iraient au pas ».
Que dirait-il en présence des cent;
vingt à l'heure de nos modernes autos ?
Illusions.
lie maréohal de Turenne disait : « Les
ijeunes filles s'imaginent que les hom-
mes mariés caressent sans cesse leurs
femmes, de même que les momies se
! figurent que les gens de guerre ont tou-
jours l'épée à la main.
Cependant j'ai fait quelquefois dix
campagnes sans même tirer l'épée.
Quant au reste. »
mmmmmwm imw ■■ ^—»
LA BÊTE HUMAINE <
Beaucoup de Méridionaux ont des goûts
bizarres. *
La vue d'un cheval perdant ses intestins,
celle d'un taureau lardé de coups de lan-
ces ou celle d'un toréador étripé leur pro-
cure une sensation exquise et leur donne
ce « frisson rf qui sert de réactif aux bla-
sés.
Eh bien ! il parait que ce joli et ragoû-
tant. spectacle ne leur suffit pas.
A Marseille, des amateurs d'émotions iné-
rdites ont voulu organiser des combats entre
des tigres et des taureaux.
Ces deux ahimaux, mis en présence, ont
tenu à donner une leçon à la bête humaine,
'et ont fe'usé de se dévorer.
Les spectateurs ont hué ces quadrupèdes
intelligents et n'ont pas compris un mot de
'la leçon qu'on menait de leur infliger. -
H ne reste plus à la bête humaine d'au-
,tre ressource que de s'éventrer en face des
•tigres et des taureaux civilisés.
Nous parions mille bouillabaisses contre
:deux piments qu'il ne se trouvera pas d'a-
mateurs pour donner cette leçon de bestia-
lité à un brave tigre et à un pacifique tau-
reau ! C. - -
———————————— »
CARNET DU LIBRE PENSEUR
Il faut en finir
avec Lourdes
-
Les cléricaux ont donné, cette année, un
éclat tout particulier à ce qu'ils appellent
le « pèlerinage national » de Lourdes.
Il y avait deux raisons à cela, la pre-
mière, qui fut le prétexte ; fêter le cin-
quantenaire des fameuses apparitions de
la vierge à la petite Bernadette Soubirous;
la seconde, qui fut la raison réelle : faire
la nique aux républicains, aux libres pen-
seurs qui n'ont pas encore eu le courage de
fermer, pour des raisons légales, et aussi
pour des raisons de salubrité, la basilique
de Lourdes.
De nombreux prélats. des régiments en-
tiers de curés et toute une armée de gens
bien pensants, en tout 75.000 personnes,
dit-on, se sont échelonnées en procession
interminable autour de la petite ville, ac-
clamant leur Dieu et le suppliant, lui qui
s'obstine dans sa suprême indillérence. de
sauver Rome et la France-
A cette occasion, la partie miracles n'a
pas été négligée, comme on le pense bien.
Voici, tels qu'ils sont mentionnés par les
journaux cléricaux, ceux qui ont été an-
• Turitcerj dr ta fouie des pàicrins Z
Mlle Lefeuvre, de Mantendy (Mayenne) ,
âgée de vingt-sept ans, atteinte depuis mai
1907 de tuberculose certifiée par deux mé-
decins, était arrivée couchée à Lourdes le
20 août. Aujourd'hui, après avoir été trem-
pée dans la piscine, elle s'est levée, toute
trace du mal disparue.
Emilie Lucron, onze ans, infirme, sentit
hier, vers une heure, des douleurs très vi-
ves ; depuis, elle marche normalement.
William Breton, vingt-sept ans, à la suite
de coups de corne d'un taureau, avait eu la
clavicule droite, brisée, la zone cubitale
droite anesthésiée et le ventre ouvert (d'où
une fistule à l'intestin). En sortant de la
piscine aujourd'hui, il a pu manger, sa lis-
Ktùle guérie ; après la procession, il put al-
longer devant les médecins son bras ma-
lade soudainement redevenu .'normal. +
Si le nombre des miracles accomplis par
N.-D. de Lourdes n'est pas considérable, il
vaut, en revanche par la qualité : guérison
radicale d'une tuberculose, d'une paralysie
et d'une fistule.
Les gens qui ont la foi ne se demandent
pas comment, en deux jours, la tubercu-
lose, qui est une affection constitutionnel-
le dont on connaît les ravages peut être
guérie, et comment surtout cette guérison
peut être constatée et affirmée, ils ne se de-
mandent pas davantage comment une fis-
tule à l'intestin peut disparaître entière-
ment, si elle a d'ailleurs jamais existé chez
le sujet traité, et par quel moyen on a pu
vérifier sa disparition totale.
Non, la foi ne s'embarrasse pas des
« pourquoi » et des « comment » et les
gens qui la possèdent n'ont même pas la
curiosité qui vient tout naturellement à
l'esprit de l'entant.
Plus les choses qui font l'objet de celle
foi sont absurdes et plus la croyance en
elles est robuste.
Il faut plaindre les troupeaux d'êtres hu-
mains. que l'on traîne à Lourdes parce
qyHts ne sont coupables que de bêtise ;
mais on ne saurait avoir la moindre indul-
gence pour les comédiens --qui s'en font les
bergers et qui, eux, ne sont pa dupes du
rôle qu'ils jouent.
C'est pouquoi, cette malsaine comédie
[ayant assez duré, il faut en finir avec les
.pélerinages de Lpurdes; -
Et le meilleur moyen d'en finir serait la
transformation de la fameuse piscine mira-
culeuse et de ses dépendances en station
psychotérapique exGloUée. 'l"lar l'Etat. -
PG
LA GUERRE AU MAROC
La proclamation de Moulay Hafifl
La réunion des notables à Tanger. — Une visite au miuistrOf
de France. — Moulay Ha/id est proclamé sultan. ,
l L'enthousiasme de la population. -
Tanger, 24 août.
Sous la pression des tribus des territoi-
res voisins de Tanger qui menaçaient la
ville, si Hafid n'était pas proclamé sultan,
les notables marocains de Tanger se sont
réunis à la Mosquée, afin de discuter les
termes de la proclamation.
El Menebbi, ancien ministre de la guer-
re, qui fut remplacé dans cet emploi par
.Si el Guebbas et qui est le protégé politi-
que de l'Angleterre, était présent à la réu-
nion comme représentant officieux de Mou-
lay Hafid, qui lui avait déjà confié les fonc-
tions de ministre des affaires étrangères.
El Menebbi, sur-le conseil de la légation
anglaise. demanda aux assistants d'atten-
dre quelques jours pour faire la proclama-
lion, afin qu'Abd el Aziz eût le temps d'ac-
complir l'acte d'abdication prévu et es-
comiptê.
Les dignitaires anarocains tangérois in-
sistèrent pour remplir immédiatement le
cérémonial de la proclamation. Il fut con-
venu qu'El Menebbi, ainsi qu'El Guebbas,
représentants actuels d'Abd el Aziz à Tan-
ger. iraient rendre visite à M. Regnault,
ministre de France, pour demander' l'au-
torisation de proclamer immédiatement
Moulav Hafid.
Cette démarche faite uniquement auprès
du ministre de France, aura un ralentisse-
ment considérable dans l'esprit des indi-
gènes. -
Tous les anciens fonctionnaires d'Abd el
Aziz conservent leurs fonctions.
La réunion des notables
Tanger, 23 août.
La réunion des notables a été tenue à la
Mosquée, à 3 h. 25 ; les notables y assis-
taient. On tomba d'accord sur ce point que
la situation était critique, les tribus des
environs menaçant d'attaquer la ville.
On discuta la déclaration à faire et les
formes de la proclamation pour éviter le
imoindre trouble. - - --
El Menebbi, ancien ministre de la guerre,
qui reparaît ainsi au premier plan, déclara
¡au'il s'était engagé à réclamer la procla-
mation dans les trois jours, afin de rendre
la situation moiins pénjble pour Abd el
Aziz.
L'accord se fit sur les points suivants :
1°. Arrêter toute tentative de troubles ;
2° empêcher que des représailles ne soient
exercées contre les adversaires de la veille;
3° - laisser tous les agents du sultan dans
leurs fonctions.
El Menebbi se rendit chez El Guebbas,
l'assurant, au nom de Moulay Hafid, que
sa sécurité n'était pas menacée, et qu'il
serait même agréable au nouveau s'ultan
qu'il conservât sa charge. La réconciliation
,se fit aussitôt, tous deux sortirent ensem-
ble et se rendirent chez El Torrè-s.
El Guebbas voulait différer la proclama-
tion d'Hafid. El Torrès déclara qu'afin d'é-
viter des troubles, il fallait la faire immé-
diatement. Afin de trancher le différend, ils
décidèrent de porter la question devant le
ministre de France.
El Menebbi et El Guebbas allèrent à la
légation de France. Ils demandèrent au mi-
nistre s'il voyait un inconvénient à la pro-
clamation de Moulay Hafid.
M. Regnault, touché de cette marque de
déférence et de confiance, remercia El Me-
nebbi: et El Guebbas de leur démarche.
Les deux ministres retournèrent à la Mos-
quée où la proclamation fut faite parmi les
cris enthousiastes des assistants.
La ioie des habitants est générale ; on
fait partir des pétards et on tire des coups
ide feu ; des cris sont poussés, mais on ne
isisnale aucun trouble.
Quelques éohopes juives seules sont fer-
mées. On commence à commenter le pre-
mier acte accompli par les représentants
du sultan, qui a été un acte d'amitié en-
vers le ministre de France.
Chez le ministre de France
Tanger. 24 août.
Voici la façon dont El Guebbas et El Me-
nebbi entretinrent. le ministre de France
de la réunion des notables :
Il était cinq heures et demie lorsqu'ils:
vinrent à la légation. Ils mirent M. Re-
gnault au courant/de la situation en ville
el aux environs..
Ils firent connaître que les notables sa-
taient réunis pour examiner l'opportunité
qu'il y aurait à procéder aujourd'hui à la
proclamation de Moulay Hafid ou à la dé-
férer. El Guebbas et El Menebbi assurè-
rent au ministre que l'ordre et la sécurité
ne seraient pas troublés et qu'aucune re-
drésaille ne serait exercée contre les agents
d'Abd el Aziz.
M. Padilla, chargé d'affaires d Espagne,
assistait à l'entretien.
M. Regnault remercia El Guebbas et El
Menebbi de la démarche officieuse et ami-
cale faite auprès de lui. Il déclara qu'il
n'avait pas à intervenir dans la question
dynastique qui concernait la politique inté-
rieure du pays.
Il prit acte des assurances données en
ce qui touche la sécurité des colonies étran-
gères et le maintien de l'ordre qui devront,
en toute circonstance, être assurés.
Les deux délégués, ayant manifesté à NI.
Padilla l'intention qu'ils avaient d'aller à
la légation d'Espagne porter le même avis,
M. Padilla les remercia en s'associant en
même temps entièrement aux déclarations
de M. Regnault.
C'est alors que les délégués revinrent à
la Mosquée- et que des salves furent tirées.
Les seules manifestations ont été celles-
ci : 300 indigènes hurlèrent de joie devant
la légation allemande, tandis qu'une tren-
taine d'Allemands affectaient, au café, de
boire du Champagne et de se réjouir
bruyamment. : -
l, Explosion de joie
j ,N : — ,,: Londres, 24 août-
On mande de Tanger au Times, le 23
noüt :
A signaler, cet incident relatif à la pro-
clamation de Moulay Hafid à Tanger ».
Cette proclamation excita un immense
enthousiasme ; la foule conserva cepeD-f:J
dant un grand calme et acclama même les j
équipages des navires de guerre français?
et espagnols qui passaient dans les rues./
Les vieilles querelles ont été oubliées. Et
; Menebbi. ex-ministre de la guerre, et EI
Guebbas. ministre actuel de ce départe-,
ment, qui avaient été pendant longtemps:
des ennemis irréconciliables, se sont ren-
dus ensemble, on le sait, à la légation dar
France pour annoncer la nouvelle au mh.
nistre français.
Les télégrammes officiels
Un télégramme de M. Regnault, ministre
de France à Tanger, annonce que la pro-
clamation de Moulay Hand a eu lieu hier IX
,-T.e¡r, saws incident factieux to'ouui l:
Européens.
M. Regnault s'est borné à prendre acta
de cette proclamation et de l'assurance..
donnée par El Menebbi et les autres parti-)
sans de Moulay Hafid que l'ordre ne serait;
pas troublé et que les * Européens ne se,..
raient pas molestés.
Un télégramme du général LyaUtey.
transmis par le général Bàilloud, annoncer :
qu'un groupe de 150 cavaliers environ, ap-.
parteoant à la harka, s'est avancé hierac
soir, vers 5 heures et demie' de Tazzou-
,
guert jusqu'à huit kilomètres de Bou-Denite
Un petit avant-poste de 15 spahis, qui;
occtwait la route de Tazzouguert, s'est re-.'
plié sans coups de fusil en gardant le oQu.
tact.
- Une reconnaissance, composée d'un esc.a,.;'"
drorî de soahis-sahariens, -d'une compagnie
montée et de deux compagnies de tirail-
leurs. s'est portée comme soutien de notre
avant-poste ; mais à son approche, les ca-
vaiiers marocains se sont dispersés et oai
disparu vers Touzzouguert.
Le général d'Amade télégraphie qu'Abd,
.p.l Aziz se trouve à Settat avec les membres
du maghzen. Les populations du M'zab -•
sont très surexcitées contre les Beni Mesot
kin et des tribus voisines de ta Chaouïa;*'
Jesaualles ont -dépouillé al lait, prnnierSL.
les indigènes des contingents chaouïa qui
[rentraient dans leur tribu.
Abandonné de tous les siens -
Casablanca, 24 août. -
Les autorités indigènes sont méconten-
tes. Moulay Lamin dit qu'Abd el Aziz est-
son plus mauvais neveu. Il le rend rès- ';
oonsable du massacre de nombreux mu-
sulmans par suite de sa volonté d'installer
les Européens dans le. Maroc. La popula-
tion est indifférente. Le général d'Amade::,
a pris ses précautions. Il a détaché des/ !
troupes des postes pour former une bar-i
rière au sud de Ben-Hamed et de Settat
afin de séparer les tribus pillardes de cel-
les Qui seraient pillées.
Dans le désastre d'Abd el Aziz, Mohaau*
med bel Lanbi a été fait prisonnier.
Nouvelles des mehallas
Tanger, 24 août.
La mehalla d'Omrani, renforcée du con*
tingent de Bou-Aouda et forte de mille fan-
tassins et de 500 cavaliers, est arrivée a
Tanger. Elle campera dans les environs-
Fez. 19 août. — Les nouvelles de la me-
halla de Glaoui et de Si-Aïssa sont mau.
vaises. On annonce de nombreuses défec-
tions. Un canon a été perdu.
Dans le Sud-Oranais
Alger, Zi août. ;
Le général Bailloud a quitté Alger allant
à Colomb-Bèchar où les troupes continuent
à se concentrer.
Le général Lyautey, qui se trouve 6 ;
Oran, va rejoindre le général Bailloud,
Les événements du Maroc
et la presse étrangère
Journaux anglais
Londres, 24 août.
Dans un article intitulé « La Révolution
au Maroc », le Standard- dit ; ,
Jusqu'à ce jour, Moulay Hafid n'a pas
montré une grande prédilection pour la po*,
litique que les puissances se sont enga-,
gées à suivre. La solution du problème
marocain ne peut être avancée par de nou-'
veaux troubles internationaux ; elle dépen-
dra, dans une large mesure, de la ligne'
de conduite qu'adoptera Moulay Hatid et
si son rival est effectivement écrasé, peut-
être deviendra-t-il enclin à modifier sa mé*
fiance raffinée envers l'intervention espa*
gnole et française.
Du Times, sur la situation au Maroc : i
Il est inutile de dire que l'attitude de la
France sera fermement .appuyée par la
Grande-Bretagne et nous pensons qu'il est
peu vraisemblable que cette attitude ren-
oontre une sérieuse opposition de qui que
ce soit.
Moulav Hafid trouvera les puissances'
prêtes à le reconnaître comme sultan aw.
Maroc, mais seulement quand il aura ac-
ouis le soutien certain du peuple marocain:
tout entier.
Les relations des signataires européens
de l'Acte d'Algésiras sont établies avec l€!
souverain, non avec l'individu. Jusqu'à C0
aue le Maroc ait atteint l'unanimité qu'on!:
peut attendre de lui sur la question ù.
savoir auel individu sera le sultan, il est
■non de choses à faire d'autre que de pren-
dre patience et d'avoir confiance dans l'a-
venir.
Du Mominq Fési ?
Moulay Hàfid, ayant créé un mouvement 1
oui s'inspire de la haine contre les Euro-',
péens, peut se trouver empêché d'adoptée,
une attitude modérée et conciliante.
ftn tout cas, il est du devoir de l'Angle;.
terre d'accorder, dans ces circonstances;-
son sculign cordial à la France qui, ave«
W 14047.— 8 Fructidor An t lè C9tï*«i *>B WCMBRO
;-C_- 'n. - :-; - ,. - - .-; .-
.,
ercredi 88 Août 1908: — NT 14047.
T 1J F £ I AY1IA T QOf JJfbtfu1 JT LfJJ!i"
- ANNONCE9
4CX BUREAUX DU JOUUAIt
14, me du Mail, Paris.
Bi chez MM. LAGRANGE. CERF et Ch
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TRIBUNE LIBRE
0 - 0
Le parti radical -
J 1
Je l'ai montré ici-même, la
politique de M. Clemenceau
n'a pas seulement exclu les
socialistes de la majorité ré-
publicaine, elle a divisé,
dissocié le parti radical.
Une fraction, importante, je le recon-
nais, soutient avec quelque conviction
le gouvernement : c'est celle qu'autre-
fois raillait le président du conseil,
celle qui se pare, devant le suffrage
universel, de l'étiquette radicale, mais
estime, au fond, que le mot radical est
« bien radical ».
C'est celle dont M. Clemenceau disait
avec ironie -qu'elle recherchait une cir-
conlocution aussi vague que possible
pour se définir, et qui s'arrêtait à la for
mule des « partisans de la défense ré-
publicaine par l'application des réfor-
mes procédant de l'esprit de la Révolu-
tion française ».
Encore que cette « défense républicai-
ne » ne soit, à cette heure, qu'une du-
perie ; car les modérés du radicalisme
s'aveuglent étrangement s'ils ne saper
çoivent pasqu'ils vont être les premières
victimes de leur attitude. Les modérés
progressistes se préparent, en effet, a
s'emparer de leurs sièges et ils ont d'au-
tant plus de chances d'y réussir que la
faveur gouvernementale les y aide et que
ce sont leurs propres principes qui
triomphent en ce moment.
Les nationalistes eux-mêmes trouvent
leur compte dans la politique actuelle :
« Il Wy a plus de nationalistes », di-
sait aa jour M. Clemenceau à un hono-
rable sénateur républicain qui s'inquié-
tait de l'orientation du gouvernement.
fie président du conseil entendait par
T'à, sans doute, que sa politique abou-
tissait, en réalité, à l'absorption à peu
près complète du nationalisme.
En fait, la majorité parlementaire est
essentiellement tonnée-des radicaux mo-
dérés, des républicains de l'Alliance, des
progressistes et du fameux groupe de
la défense nationale, dit de Courbevoie.
Je me hâte, certes, de reconnaître
qu'il y a aussi des socialistes indépen-
dants, des radicaux de gauche et même
des radicaux-socialistes qui votent par-
fois avec le gouvernement ; mais per-
sonne ne me contredira si j'affirme que
c'est, pour beaucoup, sans enthousias"
me et non sans de sérieuses appréhen-
sions.
M. Combes, au conseil général de la
Charente-Inférieure, l'a très justement
indiqué : notre parti traverse une véri-
table crise intérieure. C'est du dénoue-
ment de cette crise que dépend l'avenir
même de la République.
La parole si autorisée de l'ancien pré-
sident du conseil aura sa répercussion
dans tout le pays républicain et, en far
osant écarter par la majorité du conseil
général qu'il préside, une adresse de fé-
licitations au gouvernement, M. Combes
a montré la voie à suivre aux radicaux
et radicaux-socialistes de France qui
doivent, prochainement, se réunir en
congrès.
Si, d'ailleurs, il fallait un autre argu-
tnent pour convaincre nos amis, il leur
suffirait de lire les organes modérés et
conservateurs. En prenant parti contre
M. Combes, le Temps, par exemple,
prend non moins nettement parti pour
M. Clemenceau, et l'ardeur avec laquelle
le grand organe progressiste s'attache
à défendre le ministère, montre claire-
ment leur devoir aux membres du futur
congrès. *
A Dijon, au mois d'octobre, vont se
'décider les destinées mêmes du parti ra-
'dical : ou il acceptera de désormais se
confondre avec les groupements politi-
ques qui vont de l'Alliance Carnot à la
fédération progressiste et à certains élé-
ments libéraux-nationalistes, ou il enten
dra redevenir lui-même °t faire retour
à sa politique. traditionnelle, qui est
celle du Bloc républicain.
Le double danger, en effet, qui, à
cette heure, menace le parti radical,
c'est, d'un côté, le sophisme de ceux
qui tendent à lui dénier une existence
propre, une doctrine, un programme, et
s'efforcent de le rendre responsable de
théories qu'il repousse, répudie, com-
bat, telle celles de la Confédération gé-
nérale du travail. De l'autre côté, le pé-
ril, pour lui, est qu'il se laisse, de dé-
faillance en défaillance, glisser dans
les bras des partis de conservation, de
Tésistance et de réaction.
Le parti radical et radical-socialiste
cloit donc, tout d'abord, être lui-même,
affirmer sa vie propre, et montrer que
son programme suffit à répondre .aux as-
pirations générales, de notre démo-
cratie. - -
: Bien mieux que je ne saurais le faire
trfoi-mêD-¡e,- d'autres- avant moi, et les
plus autorisés, Léon Bourgeois, Ferdi-
nand Buisson, ont traduit cette pensée.
Le parti radical a un but, a dit le
premier, il veut organiser politiquement
et socialement la société, selon les lois
de la raison et de la justice ; il a une
méthode, c'est celle de la nature : l'évo-
lution ; il a une morale, une philoso-
phie : la solidarité ; il a une doctrine
politique : la doctrine républicaine ; il a
enfin une doctrine sociale : l'association.
« Il est né de la rencontre de deux forces
devenues libres pour toujours : la raison
qui cherche la vérité, la conscience qui
cherche le droit. il ne saurait s'arrêter
tant qu'il naura pas atteint le but et
réalisé le dernier terme de son pro-
gramme : la justice sociale. »
Oui, comme le parti socialiste, le par
ti radical veut la République sociale, la
justice sociale, et leur collaboration, à
ce point de vue, s'impose : chacun d'eux
conserve évidemment la responsabilité
de sa doctrine, de son idéal, ae son pro-
gramme, et ce n'est que la mauvaise foi
de leurs communs adversaires qui peut
s'appliquer à créer des confusions et des
équivoques, que leur loyauté réciproqué
écarte également.
- Mais le parti radical, ainsi que Buis-
son l'a clairement exposé dans son livre
sur la politique radicale, se distingue à
la fois des doctrinaires de gauche et de
droite. Il diffère des groupes révolution-
naires par la méthode, puisqu'il entend
procéder par voie d'évolution, par la
doctrine, puisqu'il s'interdit de procla-
mer d'avance l'établissement intégral
id'un nouveau régime générai de la pro-
priété et puisque, dans le régime d'asso-
ciation qu'il préconise, il voit l'origine de,
la société et le fondement de la patrie,
à ses yeux, intangible.
Mais il diffère non moins des groupes
conservateurs ou modérés qui s'obsti-
nent à vouloir limiter l'action économi-
que et se refusent à toucher « à l'ordre
social, c'est-à-dire aux intérêts de cer-
taines classes protégés par certaines
institutions ».
Par là- même, l'orientation du parti
radical doit se maintenir vers la gauche
et, suivant l'expression dont se servait
M. Clemenceau en 1902, il ne peut vou-
loir exclure de l'action gouvernementale
une fraction, si avancée soit-elle, du
parti républicain.
D'où sa doctrine nécessaire, fonda-
mentale du Bloc, à laquelle il doit reve-
nir. C'est le « Bloc républicain » qu'en
ses prochaines assises, il devra tendre
à reconstituer.
Et la vérité qu'il importera de placer,
en quelque sorte, au frontispice du pro-
chain congrès, c'est que l'accord peut
se faire avec les socialistes pour réaliser
le programme radical, mais que l'accord
entre radicaux, progressistes et modérés
ne pourrait se faire qu'au prix de l'abdi-
cation et de la faillite du parti radical.
Paul BOURÉLY,
Député de IMrdèchfl.
LA POUTIQUE
-
EN MAURITANIE ET AILLEURS
On devine aisément le lien
qui rattache aux affaires ma-
rocaines les incidents signa-
lés ces jours-ci en Mauritanie.
Cette fois encore des morts
et des blessés restent sur le
terrain. La soif et la désertion déciment
l'une de nos petites colonnes expédi-
tionnaires. Les agressions des Maures
deviennent plus hardies et plus fré-
quentes
Ces farouches habitants des régions
icomprises entre le Sénégal et le Maroc,
féroces comme les Touaregs, pillards et
fanatiques, sont rattachés au pays
d'Abd el Aziz et d'Hafid par le réseau
serré des influences maraboutiques.
Dans tous les temps, ils ont été hosti-
les à notre domination et aujourd'hui
ils semblent faire rage contre nos trou-
pes quand ils peuvent les surprendre
isolées, hofsr de la portée d'un proche
secours,
Il n'est pas possible que les hommes
compétents qui se sont succédé au gou-
vernement général de l'Afrique fran-
çaise, M. Roume d'abord, M. Merlaud-
Ponty ensuite, n'aient pas signalé *au
gouvernement la répercussion éventuel-
le, facile à prévoir, des événements ma-
rocains jusqu'aux frontières du Soudan,
Au moment même où la prudence
commandait de surveiller attentivement
nos colonies peuplées par des musul-
mans, le gouvernement les a impru-
demmenf dégarnies.
Pour éviter lé-départ ostensible des
; trou pes empruntées aux garnisons mé-
tropolitaines, c'est en Algérie et dans
l'Afrique occidentale française que le
corps expéditionnaire de Casablanca$
'été partieHement recruté,
L'émsotion publique que l'on redou-
tait de voir se maarifester à l'embarque-
ment de troupes métropolitaines pour
lIe Maroc a été évitée. Le gouvernement
:a donc obtenu plusieurs mois de répit.
j^Éujeurd'feui, il se trouve réduit à la
éfensi\'e -aux frontières de l'Algérie
loranaase et du Séffégal.
Ici et la le déchaînement des passions
musulmanes s'est donné libre cours. Il
est temps de rendre aux gouverneurs
responsables d'Alger et de Dakar les
forces militaires utiles pour assurer la *-
sécurité de leurs frontières.
Les puissants amis d'Abd el Aziz
(nous exposeront-ils encore longtemps à'
de nouvelles complications coloniales ?
Il serait temps de penser au rétablis-
sement de la sécurité et de l'ordre, com-
promis depuis un an dans nos posses-
sions extérieures*
LES ON-MT
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui mardi i
Lever du soleil à 5 h. 7; coucher à 6 bè
55 minutes.
- Courses plates à Dieppe (prix d'Am-
phitrite).
Maujanlana
Un de nos plus aimables diplomates,
qui a longtemps vécu en Orient, lui ra-
contait le cérémonial de diverses cours.
Ainsi il lui disait qu'en Perse au mo-
ment de l'ouverture du Conseil de gou-
vernement le protocole voulait que le
shah donnât son pied à baiser aux mi-
nistres.. -
— « Ah ! vraiment ? fit Adolphe rê-
veur, mais alors si le shah donne son
pied à baiser aux ministres, que fait-il
donc baiser aux sous-secrétaires d"E-
tat.? ».
AUTREFOIS
Le Rappel. du26 août 1872. —Le gouver-
nement Ment dé signer un décret qui dis-
sout le Conseil municipal de Saint-Denis.
.cette mesure a été prise à la suite d'un dé-
saccord survenu dans le sein du Conseil
municipal, désaccord qui a déterminé la re-
-traite d'une minorité de 13 conseillers sur
vingt-sept.
M. Thiers a visité les avisos à vapeur le
Faon et le Cuvier.
On annônce que, sur l'avis des méde-
cins, Henri Boche fort, dont la gastralgie
siest considérablement aggravée, a dû
changer de prison. Du^ château d'Oléron,.
l'auteur- de la Lanterne a été transféré à
Saint-Martin de Ri.
C'est hier que le fameux nageur John-
Son a dû traverser à la nage le détroit du
pas de Calais, sous Vescorie du bateau à
vapeur le Palmerston.
L'inauguration du monument êtevé à ta
mémoire des instituteurs Leroy, Poulette
et Debadeaux, dénoncés par un Français et
fusillés par les Prussiens à Pasly, a eu
lieu, vendredi à Vécole normale de Laon,
en présence des autorités, locales.
M. Benedetti a été élu membre" du con-
seil général de la Corse pour le. canton de
Piedicorte di Gaggio.
Le café.
Il existe à la Bibliothèque 'de la Fa-
culté de Médecine une thèse datée de
1695 qui tend à démontrer que l'habi-
4ude du café rend les « hommes inha-
biles à procréer et les femmes à conce-
voir »-
Nous en recommandons la lecture à
l'honorable.
Un médecin disait un jour, à ce sujet,
à Fonte nelle que le café était un poison
lent : « Je m'en aperçois bien, répondit
le spirituel académicien, car j'en
prends depuis sôixante-dix-huit ans ! »
Ouverture des boutiques.
Au XIVe siècle, les boutiques s'ou-
vraient à Paris à quatre heures du ma-
tin. Le roi se levait à dix heures du
matin et se couchait à huit heures. Les
temps sont changés.
Un pari d'Edouard VII.
Au sortir d'un club, Edouard VII,
alors prince de Galles, accompagné
d'un jeune lord, parcourait une rue de
Londres. Comme il traversait la chaus-
sée pour gagner l'autre, le prince de
Galles s'arrêta tout d'un coup et fit la
pari qu'en suivant la rue l'un d'un
côté, l'autre de l'autre, ce serait lui qui
rencontrerait le plus grand nombre de
chats sur son chemin : «Et ajouta-t-ilje
vous laisse, lord le choix du côté ». En
effet, quand les parieurs furent arrivés
à l'autre bout, il se trouva que le prin-
ce de Galles avait rencontré neuf chats
et son compagnon pas un seul.'
— J'étais bierKcertain, dit alors le ga-
gnant, que vous choisiriez le côté de
l'ombre comme étant le plus agréablo
par cette excessive chaleur. Or. sachez,
mon ami. que les chats préfèrent tou-
jours le côté du soliI.
Le cuisinier « Misère ».
Le prince de Bulow, chancelier de
l'empire allemand, a un cuisinier qui
répond au nom de Misère. Il est vrai
que Misère n'est qu'un surnom qui a
été donné au cuisinier par l'empereur
Guillaume. ,.
Voici, dans quelles circonstances :
Lorsque M. de Bulow, diplomate en
Italie, fM* appelé au ministère des affai-
res étrangères, il fit venir son cuisinier
français et l'informa qu'il allait quitter
Rome pour Berlin, mais que sa future
demeure ainsi que sa cuisine géraient
plus petites que celles du palais Carra..
relli. -
« Voulez-vous nous suivre ? » lui de-
manda le prince. Le cuisinier demandai
une demi-heure de réflexion et, ce1
temps écoulé, revint et dit avec no-
blesse : « J'accepte. Il serait indigne
de quitter de bons majtres quand ils
tombent dans la misère. » ,
Voilà l'origine du fameux surnom-
Folie de vitesse.
Champlort disait en 1792 : « qu'il ne
.croirait à la souveraineté du peuple gue
lorsque les cabriolets iraient au pas ».
Que dirait-il en présence des cent;
vingt à l'heure de nos modernes autos ?
Illusions.
lie maréohal de Turenne disait : « Les
ijeunes filles s'imaginent que les hom-
mes mariés caressent sans cesse leurs
femmes, de même que les momies se
! figurent que les gens de guerre ont tou-
jours l'épée à la main.
Cependant j'ai fait quelquefois dix
campagnes sans même tirer l'épée.
Quant au reste. »
mmmmmwm imw ■■ ^—»
LA BÊTE HUMAINE <
Beaucoup de Méridionaux ont des goûts
bizarres. *
La vue d'un cheval perdant ses intestins,
celle d'un taureau lardé de coups de lan-
ces ou celle d'un toréador étripé leur pro-
cure une sensation exquise et leur donne
ce « frisson rf qui sert de réactif aux bla-
sés.
Eh bien ! il parait que ce joli et ragoû-
tant. spectacle ne leur suffit pas.
A Marseille, des amateurs d'émotions iné-
rdites ont voulu organiser des combats entre
des tigres et des taureaux.
Ces deux ahimaux, mis en présence, ont
tenu à donner une leçon à la bête humaine,
'et ont fe'usé de se dévorer.
Les spectateurs ont hué ces quadrupèdes
intelligents et n'ont pas compris un mot de
'la leçon qu'on menait de leur infliger. -
H ne reste plus à la bête humaine d'au-
,tre ressource que de s'éventrer en face des
•tigres et des taureaux civilisés.
Nous parions mille bouillabaisses contre
:deux piments qu'il ne se trouvera pas d'a-
mateurs pour donner cette leçon de bestia-
lité à un brave tigre et à un pacifique tau-
reau ! C. - -
———————————— »
CARNET DU LIBRE PENSEUR
Il faut en finir
avec Lourdes
-
Les cléricaux ont donné, cette année, un
éclat tout particulier à ce qu'ils appellent
le « pèlerinage national » de Lourdes.
Il y avait deux raisons à cela, la pre-
mière, qui fut le prétexte ; fêter le cin-
quantenaire des fameuses apparitions de
la vierge à la petite Bernadette Soubirous;
la seconde, qui fut la raison réelle : faire
la nique aux républicains, aux libres pen-
seurs qui n'ont pas encore eu le courage de
fermer, pour des raisons légales, et aussi
pour des raisons de salubrité, la basilique
de Lourdes.
De nombreux prélats. des régiments en-
tiers de curés et toute une armée de gens
bien pensants, en tout 75.000 personnes,
dit-on, se sont échelonnées en procession
interminable autour de la petite ville, ac-
clamant leur Dieu et le suppliant, lui qui
s'obstine dans sa suprême indillérence. de
sauver Rome et la France-
A cette occasion, la partie miracles n'a
pas été négligée, comme on le pense bien.
Voici, tels qu'ils sont mentionnés par les
journaux cléricaux, ceux qui ont été an-
• Turitcerj dr ta fouie des pàicrins Z
Mlle Lefeuvre, de Mantendy (Mayenne) ,
âgée de vingt-sept ans, atteinte depuis mai
1907 de tuberculose certifiée par deux mé-
decins, était arrivée couchée à Lourdes le
20 août. Aujourd'hui, après avoir été trem-
pée dans la piscine, elle s'est levée, toute
trace du mal disparue.
Emilie Lucron, onze ans, infirme, sentit
hier, vers une heure, des douleurs très vi-
ves ; depuis, elle marche normalement.
William Breton, vingt-sept ans, à la suite
de coups de corne d'un taureau, avait eu la
clavicule droite, brisée, la zone cubitale
droite anesthésiée et le ventre ouvert (d'où
une fistule à l'intestin). En sortant de la
piscine aujourd'hui, il a pu manger, sa lis-
Ktùle guérie ; après la procession, il put al-
longer devant les médecins son bras ma-
lade soudainement redevenu .'normal. +
Si le nombre des miracles accomplis par
N.-D. de Lourdes n'est pas considérable, il
vaut, en revanche par la qualité : guérison
radicale d'une tuberculose, d'une paralysie
et d'une fistule.
Les gens qui ont la foi ne se demandent
pas comment, en deux jours, la tubercu-
lose, qui est une affection constitutionnel-
le dont on connaît les ravages peut être
guérie, et comment surtout cette guérison
peut être constatée et affirmée, ils ne se de-
mandent pas davantage comment une fis-
tule à l'intestin peut disparaître entière-
ment, si elle a d'ailleurs jamais existé chez
le sujet traité, et par quel moyen on a pu
vérifier sa disparition totale.
Non, la foi ne s'embarrasse pas des
« pourquoi » et des « comment » et les
gens qui la possèdent n'ont même pas la
curiosité qui vient tout naturellement à
l'esprit de l'entant.
Plus les choses qui font l'objet de celle
foi sont absurdes et plus la croyance en
elles est robuste.
Il faut plaindre les troupeaux d'êtres hu-
mains. que l'on traîne à Lourdes parce
qyHts ne sont coupables que de bêtise ;
mais on ne saurait avoir la moindre indul-
gence pour les comédiens --qui s'en font les
bergers et qui, eux, ne sont pa dupes du
rôle qu'ils jouent.
C'est pouquoi, cette malsaine comédie
[ayant assez duré, il faut en finir avec les
.pélerinages de Lpurdes; -
Et le meilleur moyen d'en finir serait la
transformation de la fameuse piscine mira-
culeuse et de ses dépendances en station
psychotérapique exGloUée. 'l"lar l'Etat. -
PG
LA GUERRE AU MAROC
La proclamation de Moulay Hafifl
La réunion des notables à Tanger. — Une visite au miuistrOf
de France. — Moulay Ha/id est proclamé sultan. ,
l L'enthousiasme de la population. -
Tanger, 24 août.
Sous la pression des tribus des territoi-
res voisins de Tanger qui menaçaient la
ville, si Hafid n'était pas proclamé sultan,
les notables marocains de Tanger se sont
réunis à la Mosquée, afin de discuter les
termes de la proclamation.
El Menebbi, ancien ministre de la guer-
re, qui fut remplacé dans cet emploi par
.Si el Guebbas et qui est le protégé politi-
que de l'Angleterre, était présent à la réu-
nion comme représentant officieux de Mou-
lay Hafid, qui lui avait déjà confié les fonc-
tions de ministre des affaires étrangères.
El Menebbi, sur-le conseil de la légation
anglaise. demanda aux assistants d'atten-
dre quelques jours pour faire la proclama-
lion, afin qu'Abd el Aziz eût le temps d'ac-
complir l'acte d'abdication prévu et es-
comiptê.
Les dignitaires anarocains tangérois in-
sistèrent pour remplir immédiatement le
cérémonial de la proclamation. Il fut con-
venu qu'El Menebbi, ainsi qu'El Guebbas,
représentants actuels d'Abd el Aziz à Tan-
ger. iraient rendre visite à M. Regnault,
ministre de France, pour demander' l'au-
torisation de proclamer immédiatement
Moulav Hafid.
Cette démarche faite uniquement auprès
du ministre de France, aura un ralentisse-
ment considérable dans l'esprit des indi-
gènes. -
Tous les anciens fonctionnaires d'Abd el
Aziz conservent leurs fonctions.
La réunion des notables
Tanger, 23 août.
La réunion des notables a été tenue à la
Mosquée, à 3 h. 25 ; les notables y assis-
taient. On tomba d'accord sur ce point que
la situation était critique, les tribus des
environs menaçant d'attaquer la ville.
On discuta la déclaration à faire et les
formes de la proclamation pour éviter le
imoindre trouble. - - --
El Menebbi, ancien ministre de la guerre,
qui reparaît ainsi au premier plan, déclara
¡au'il s'était engagé à réclamer la procla-
mation dans les trois jours, afin de rendre
la situation moiins pénjble pour Abd el
Aziz.
L'accord se fit sur les points suivants :
1°. Arrêter toute tentative de troubles ;
2° empêcher que des représailles ne soient
exercées contre les adversaires de la veille;
3° - laisser tous les agents du sultan dans
leurs fonctions.
El Menebbi se rendit chez El Guebbas,
l'assurant, au nom de Moulay Hafid, que
sa sécurité n'était pas menacée, et qu'il
serait même agréable au nouveau s'ultan
qu'il conservât sa charge. La réconciliation
,se fit aussitôt, tous deux sortirent ensem-
ble et se rendirent chez El Torrè-s.
El Guebbas voulait différer la proclama-
tion d'Hafid. El Torrès déclara qu'afin d'é-
viter des troubles, il fallait la faire immé-
diatement. Afin de trancher le différend, ils
décidèrent de porter la question devant le
ministre de France.
El Menebbi et El Guebbas allèrent à la
légation de France. Ils demandèrent au mi-
nistre s'il voyait un inconvénient à la pro-
clamation de Moulay Hafid.
M. Regnault, touché de cette marque de
déférence et de confiance, remercia El Me-
nebbi: et El Guebbas de leur démarche.
Les deux ministres retournèrent à la Mos-
quée où la proclamation fut faite parmi les
cris enthousiastes des assistants.
La ioie des habitants est générale ; on
fait partir des pétards et on tire des coups
ide feu ; des cris sont poussés, mais on ne
isisnale aucun trouble.
Quelques éohopes juives seules sont fer-
mées. On commence à commenter le pre-
mier acte accompli par les représentants
du sultan, qui a été un acte d'amitié en-
vers le ministre de France.
Chez le ministre de France
Tanger. 24 août.
Voici la façon dont El Guebbas et El Me-
nebbi entretinrent. le ministre de France
de la réunion des notables :
Il était cinq heures et demie lorsqu'ils:
vinrent à la légation. Ils mirent M. Re-
gnault au courant/de la situation en ville
el aux environs..
Ils firent connaître que les notables sa-
taient réunis pour examiner l'opportunité
qu'il y aurait à procéder aujourd'hui à la
proclamation de Moulay Hafid ou à la dé-
férer. El Guebbas et El Menebbi assurè-
rent au ministre que l'ordre et la sécurité
ne seraient pas troublés et qu'aucune re-
drésaille ne serait exercée contre les agents
d'Abd el Aziz.
M. Padilla, chargé d'affaires d Espagne,
assistait à l'entretien.
M. Regnault remercia El Guebbas et El
Menebbi de la démarche officieuse et ami-
cale faite auprès de lui. Il déclara qu'il
n'avait pas à intervenir dans la question
dynastique qui concernait la politique inté-
rieure du pays.
Il prit acte des assurances données en
ce qui touche la sécurité des colonies étran-
gères et le maintien de l'ordre qui devront,
en toute circonstance, être assurés.
Les deux délégués, ayant manifesté à NI.
Padilla l'intention qu'ils avaient d'aller à
la légation d'Espagne porter le même avis,
M. Padilla les remercia en s'associant en
même temps entièrement aux déclarations
de M. Regnault.
C'est alors que les délégués revinrent à
la Mosquée- et que des salves furent tirées.
Les seules manifestations ont été celles-
ci : 300 indigènes hurlèrent de joie devant
la légation allemande, tandis qu'une tren-
taine d'Allemands affectaient, au café, de
boire du Champagne et de se réjouir
bruyamment. : -
l, Explosion de joie
j ,N : — ,,: Londres, 24 août-
On mande de Tanger au Times, le 23
noüt :
A signaler, cet incident relatif à la pro-
clamation de Moulay Hafid à Tanger ».
Cette proclamation excita un immense
enthousiasme ; la foule conserva cepeD-f:J
dant un grand calme et acclama même les j
équipages des navires de guerre français?
et espagnols qui passaient dans les rues./
Les vieilles querelles ont été oubliées. Et
; Menebbi. ex-ministre de la guerre, et EI
Guebbas. ministre actuel de ce départe-,
ment, qui avaient été pendant longtemps:
des ennemis irréconciliables, se sont ren-
dus ensemble, on le sait, à la légation dar
France pour annoncer la nouvelle au mh.
nistre français.
Les télégrammes officiels
Un télégramme de M. Regnault, ministre
de France à Tanger, annonce que la pro-
clamation de Moulay Hand a eu lieu hier IX
,-T.e¡r, saws incident factieux to'ouui l:
Européens.
M. Regnault s'est borné à prendre acta
de cette proclamation et de l'assurance..
donnée par El Menebbi et les autres parti-)
sans de Moulay Hafid que l'ordre ne serait;
pas troublé et que les * Européens ne se,..
raient pas molestés.
Un télégramme du général LyaUtey.
transmis par le général Bàilloud, annoncer :
qu'un groupe de 150 cavaliers environ, ap-.
parteoant à la harka, s'est avancé hierac
soir, vers 5 heures et demie' de Tazzou-
,
guert jusqu'à huit kilomètres de Bou-Denite
Un petit avant-poste de 15 spahis, qui;
occtwait la route de Tazzouguert, s'est re-.'
plié sans coups de fusil en gardant le oQu.
tact.
- Une reconnaissance, composée d'un esc.a,.;'"
drorî de soahis-sahariens, -d'une compagnie
montée et de deux compagnies de tirail-
leurs. s'est portée comme soutien de notre
avant-poste ; mais à son approche, les ca-
vaiiers marocains se sont dispersés et oai
disparu vers Touzzouguert.
Le général d'Amade télégraphie qu'Abd,
.p.l Aziz se trouve à Settat avec les membres
du maghzen. Les populations du M'zab -•
sont très surexcitées contre les Beni Mesot
kin et des tribus voisines de ta Chaouïa;*'
Jesaualles ont -dépouillé al lait, prnnierSL.
les indigènes des contingents chaouïa qui
[rentraient dans leur tribu.
Abandonné de tous les siens -
Casablanca, 24 août. -
Les autorités indigènes sont méconten-
tes. Moulay Lamin dit qu'Abd el Aziz est-
son plus mauvais neveu. Il le rend rès- ';
oonsable du massacre de nombreux mu-
sulmans par suite de sa volonté d'installer
les Européens dans le. Maroc. La popula-
tion est indifférente. Le général d'Amade::,
a pris ses précautions. Il a détaché des/ !
troupes des postes pour former une bar-i
rière au sud de Ben-Hamed et de Settat
afin de séparer les tribus pillardes de cel-
les Qui seraient pillées.
Dans le désastre d'Abd el Aziz, Mohaau*
med bel Lanbi a été fait prisonnier.
Nouvelles des mehallas
Tanger, 24 août.
La mehalla d'Omrani, renforcée du con*
tingent de Bou-Aouda et forte de mille fan-
tassins et de 500 cavaliers, est arrivée a
Tanger. Elle campera dans les environs-
Fez. 19 août. — Les nouvelles de la me-
halla de Glaoui et de Si-Aïssa sont mau.
vaises. On annonce de nombreuses défec-
tions. Un canon a été perdu.
Dans le Sud-Oranais
Alger, Zi août. ;
Le général Bailloud a quitté Alger allant
à Colomb-Bèchar où les troupes continuent
à se concentrer.
Le général Lyautey, qui se trouve 6 ;
Oran, va rejoindre le général Bailloud,
Les événements du Maroc
et la presse étrangère
Journaux anglais
Londres, 24 août.
Dans un article intitulé « La Révolution
au Maroc », le Standard- dit ; ,
Jusqu'à ce jour, Moulay Hafid n'a pas
montré une grande prédilection pour la po*,
litique que les puissances se sont enga-,
gées à suivre. La solution du problème
marocain ne peut être avancée par de nou-'
veaux troubles internationaux ; elle dépen-
dra, dans une large mesure, de la ligne'
de conduite qu'adoptera Moulay Hatid et
si son rival est effectivement écrasé, peut-
être deviendra-t-il enclin à modifier sa mé*
fiance raffinée envers l'intervention espa*
gnole et française.
Du Times, sur la situation au Maroc : i
Il est inutile de dire que l'attitude de la
France sera fermement .appuyée par la
Grande-Bretagne et nous pensons qu'il est
peu vraisemblable que cette attitude ren-
oontre une sérieuse opposition de qui que
ce soit.
Moulav Hafid trouvera les puissances'
prêtes à le reconnaître comme sultan aw.
Maroc, mais seulement quand il aura ac-
ouis le soutien certain du peuple marocain:
tout entier.
Les relations des signataires européens
de l'Acte d'Algésiras sont établies avec l€!
souverain, non avec l'individu. Jusqu'à C0
aue le Maroc ait atteint l'unanimité qu'on!:
peut attendre de lui sur la question ù.
savoir auel individu sera le sultan, il est
■non de choses à faire d'autre que de pren-
dre patience et d'avoir confiance dans l'a-
venir.
Du Mominq Fési ?
Moulay Hàfid, ayant créé un mouvement 1
oui s'inspire de la haine contre les Euro-',
péens, peut se trouver empêché d'adoptée,
une attitude modérée et conciliante.
ftn tout cas, il est du devoir de l'Angle;.
terre d'accorder, dans ces circonstances;-
son sculign cordial à la France qui, ave«
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