Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1907-02-19
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 19 février 1907 19 février 1907
Description : 1907/02/19 (N13493). 1907/02/19 (N13493).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7570567f
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 29/04/2013
Uo 13493. 30 Pluviôse An 118*
CKVQ cEsnrtMti» t,«5vxtnttorÉîo
Mardi 19 Février 1907. - No 13493?
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Le liste citait,,
Cherchez-vous un travail facile et ré-
munérateur ? Je vais vous raconter com-
ment un de mes amis a gagné cent sous
sans risquer de méningite et sans pren-
dre de suée.
Samedi, par les couloirs des Cham-
bres, des ministères et des journaux,
soufflait je ne sais quel vent de panique,
avec la rage énervante du mistral sur
la Canebière. Dans les corridors dont je
parle, presque tout le monde s'affolait,
les hommes politiques et les journa-
listes sont des gens si impressionna-
foies !
Dans un groupe où l'on se preoecu-
pait du sort des ministres, quelqu'un,
plus nerveux 1peut-être que ses voisins,
s'écria :
- Peuple, on te trompe. Je parie la
.thune : tout à l'heure, nous allons trou-
ver dans la sixième colonne de la der-
- nière heure du Temps cette nouvelle en
une Jigne :: -,
Nous croyons savoir que M. Brrand est
démtssiomklire, ,'
Le camarade à qui je faisais allusion
plus haut était un des rares, à n'avoir
-pas perdu la tête : ,
— Tu paries la thune ? dit-il d'une
xoix - calme. Tenu.
Le Temps parut. Il ne contenait pas
ta ligne annoncée par les oiseaux de
oiaùvàis augure. Mon ami n'avait plus
AU 'à passer à la caisse.
J'ai raconté cette anecdote, parce
qu'elle est édifiante, et parce qu'elle
ilousapprend le prix du sang-froid dans
les heures de crainte et d'agitation. Ti-
rons de cette histoire une leçon de sa-
gesse, et ne nous perdons pas dans l'im-
broglio des incidents ministériels — im-
broglio qui doit être dénoué pas plus
lard que demain.
., ***
M. Briand a la coquetterie, légitime
'd'ailleurs, de faire reconnaître s« loi, la
4oi de Séparation, par le clergé. L'Eglise
a cédé un peu, très peu — un-!)eu enfin,
8 la persuasion du ministre des cultes.
Les évêques acceptent de s'entendre
avec les préfets, sur la location des édi-
fices cultuels. M. de Selves, préfet de la
Seine, notamment, est entré en graves
pourparlers avec l'archevêque.
Pendant ce temps, le ministre des
cultes soumettait à ses collègues les pro-
jets des baux qui pourraient être si-
gnes.
Je ..drupasque M. Clemenceau
ivoyait d'un osil particulièrement favo-
rable les « tractations » entre les ex-
préfets violets et les préfets proprement
dits ; quant aux baux, le président du
conseil trouvait peut-être qu'ils ber-
naient le propriétaire, l'Etat, au profit
:du locataire, le curé. Quoiqu'il en soit,
lM. Clemenceau ne voulut pas mettre
itout de suite au panier les projets de
fcaux rédigés et calligraphiés par son
icollaborateur des cultes.
Mais en rentrant dans ses apparte-
ments, le président du conseil put lire
iwn ordre du jour voté par les groupes
radicaux-socialistes de la Seine. Le gou-
"vernement y était invité à ne plus con-
sentir à l'Eglise aucune de ces conces-
sions qui ne servent qu'à encourager les
iexigences des cléricaux.
Ah ! ne me brouillez pas avec la République
dit M. Clemenceau à M. Briand, la pre-
mière fois qu'il le revit. Puisque baux
lil y a, faites-moi des baux. Je les ac-
cepte d'avance, à condition qu'ils ne
m' exposent point à des reproches de la
part de mes vieux frères d'armes du ra-
incansme.
Le ministre des cultes est trop fin
pour ne pas comprendre et apprécier le
sentiment de son chef de file. Il est trop
lénergique pour se rebuter en face d'une
ïîifficulté d?écriture. Que diable ! Il n'est
pas le premier gérant de propriété qui
ait eu à louer à un curé et qui se soit
itiré de l'affaire au mieux de ses fer-
mages.
, Et M. Briand rédige, biffe, recotii-
Imener, rature encore des projets de
baux, toujours des projets de baux. Pro-
blème : trouver une formule en même
jlemps sévère et libérale. Ne choquons
point la Libre-Pensée et n'effarouchons
point la Soutane. La tâche est rude,
faut-il croire '; car, dans cnacun des
projets où M. Briand prociïgue son In-
géniosité, il y a un rien, un souffle, un
irien, qui empêche M. Clemenceau de
(souscrire de bon cœur au bail préparé
par Son ministre.
0\If.
Déjà des députés inquiétés dans leur
Sollicitude pour le ministère, se propo-
sent d interpeller. Afin de s'assurer que
: le cabinet Clemenceau n'est pas mort,
ils s'entetent à le faire parler. Ce n'est
pas ce qui gênera des ministres dont
tfeux ou trois sont de grands orateurs.
.on croit généralement que le cabinet
se cassera ou se raccommodera tout 'à
faif au conseil des ministres de deamUu.
Les interpellateurs pourraient donc,
dans un cas comme dans l'autre, se dis-
penser de monter à la tribune. S'ils
persistent à interroger MM. Clemenceau
et Briancf, ceux-ci pourront répondre 1
: — Il y avait peut-être de la division
dans léquipage et une fissure: dans la
coque du bateau. Mais rien ne rappro-
che les hommes mieux qu'un danger
couru en commun ; nous avons été vite
d'accord pour aveugler la voie d'eau, et
nous n'avons jamais navigué plus sûre-
ment ni plu$cordialement qu'après ceffe
alerte.
HUGUES DESTREM
LES ON - DIT
if CHOSES A NOTER
La Guerre de 70 racontée
ear 1-e Rappel » est loin d'être
terminée, bien que, selon l'or-
dre de ces éphémérides, le
traité de paix soit à la veille
d'être adopté par FAssemMée
de Bordeaux.Mais le drame ne serait
pas complet si l'on n'y joignait le récit
de la Commune, car la Commune en fait
partie intégrante. A quelques semaines
d'intervalles, la Commune succède au
siège de Paris "èt «contre l'âme réelle du
peuple vilipendé, trompé, décidé à ven-
ger Paris de ceux qui avaient émaaeulé
la Défense ; décidé à barrer le chemin
à la réaction, à préserver la République,
puisqu'il n'était plus possible, pour le
moment, de reprendre la lutte contre
l'étranger. ,-
Dans l'un de nos récents numéros de
« la Guerre '», le sens d'une note relative
à la réunion des gardes nationaux tenue
au Tivoli Vaux-Hall a dû échapper à
ceux de nos lecteurs. qui sont trop jeu-
nes pour avoir assisté aux événements.
On décida, dans cette réunion, la nomi-
nation d'un délégué par compagnie, et
ce fut la naissance du Comité central qui
fit la Commune.
On l'a vu, la Commune ne date pas
du 18 mars 1871, elle est réclamée, pro-
clamée par beaucoup de bataillons, le
31 octobre 1870 ; son sens alors est ce-
lui-ci : résistance à outrance à l'étranger,
pouvoirs de contrôle remis aux délégués
de la Ville de Paris pour l'organisation
de cette résistance aux Allemands. Et
c'est, pendant tout le siège, un malen-
tendu persistant entre un gouvernement
dit de Défense nationale qui, comme
Paul Meurice le disait dans notre nu-
méro d'hier, jï n'a rien défendu du tout,
ni Paris, ni la province, ni la Républi-
que, ni la patrie, ni notre enceinte, ni no-
tre bourse », et le peuple qui exigeait
qu'on fit, pour la défense effective, les
sacrifices nécessaires.
Et ainsi le rôle du grand parti répu-
blicain se dessine avec clarté dans ces
pages en raccourci le peuple républi-
cain n'a pas voulu la guerre, a été hos-
tile à l'entreprise de cette campagne qui
n'avait d'autre but que de refaire une po-
pularité à l'Empire. La guerre engagée,
le peuple républicain n'a voulu la clore
qu'après une résistance effective, qui
écarterait les catastrophes ; la paix hon-
teuse conclue malgré lui, le peuple s'est
"'1",.1.a. nmif In ripe; Mrnitr. tli- la
République que les réactionnaires de
l'Assemblée de Bordeaux méconnais-
saient.
L'expose que nous donnons ici -des
sentiments du parti républicain est si
profondément exact, que, pendant plu-
sieurs années après la Commune, le thè-
me principal aesractionnaires contre la
République, sera ïï d'avoir inutilement
prolongé la résistance et rendu ainsi;
plus dures les conditions de paix. On Bo-
napartistes et royalistes ont passé dix
ans à nous chanter cette antienne, jus-
qu'au jour où ils se sont brusquement
mués en « patriotes » exaspérés.
Il résulte de ce qui précède que THef-
véisme est, âu monde, la théorie la plus
opposée à toute l'histoire, à. toutes les
tendances, à tous les espoirs du parti ré-
publicain.
LA GUERRE DE 1870
Racontée par le f apper »
Numéro du 20 Février 1871
La journée. « Les Prussiens, mal-
gré l'armistice, s'amusent à jouer les
conquérants à nos portes. M. Rllprecht,
assesseur de régence, vient d'être nom-
mé sous-préfet de l'arrondissement de
Saint-Denis. »
Protestafion de gardes nationaux. =
« On assure que le gouvernement se se-
rait engagé, pour obtenir une prolonga-
tion de l'armistice, à laisser défiler dans
Paris les troupes allemandes..
Le 125e bataillon, qui a déjà protesté
contre la capitulation, proteste énergi-
quement contre ce nouvel outrage.
« Il somme le gouvernement de 'dé-
clarer si ce bruit est ou non fondé," »
Le cas du général Ducrot. — « Le Mo-
niteur officiel de Versailles du 15 dé-
ment l'assertion d'un journal qui avait
annonce que M. de Bismarck réclamait
le général Ducrot comme étant son pri-
sonnier de guerre en rupture 'd'hon-
neur, et aurait même (déclaré ne pas
vouloir aller plus avant dans les négo-
ciations de l'armistice si M. Ducrot n'é-
tait remis aux Prussiens.. a
Garibaldi et son armée. :¡,;;; « Garilml-
di en quittant la France a adressé à ses
vaillants compagnons d'armes 'de l'ar-
mée des Vosges la proclamation que
voici : '-
« Bordeaux, 13 février 1871. Xux bra-
ves de l'armée des Vosges. En retour-
nant dans vos foyers, racontez à vos fa-
milles les. travaux, les fatigues et les
combats que nous avons soutenus en-
semble -pour la sainte cause de la Ré;.
publique, Dites-leur surtout que vous
aviez un chef qui vous aimait comme
ses propres enfants et qui était- fier de
votre bravoure. Au revoir dans des cir-
constances meilleures. =- Signé :: GA-
RIBALDI. » , F -
LES MËMOIRES DE Mme DE BOIGNE -
Bien qu'expurgés, san fc doute, par
les soins pieux de M. Nicoullaud, héri-
tier moral du dernier marquis d'Os-
mond, les Mémoires de la comtesse de
Boigne promettent de faire quelque ta-
page et beaucoup de grandes familles
craignent les coups de griffe posthumes
de cette terrible femme, qui mourut
presque centenaire et connut le second
Empire après avoir vécu à la cour de
Marie-Antoinette.
Mariée à dix-sept ans au général Le-
borgne dit de Boigne, ex-généralissime
de l'armée des Mahrattes dans les In-
des, qui avait rapporté de là-bas une
fortune colossale, ciïe ne tarda guère à
se séparer de lui. ,"
Il avait 47 ans et elle dix-sept. Elle
dicta les termes du contrat, qui lui as-
surait, à elle et aux siens, près de cent
mille livres de rente. Au bout dë dix
mois, le général ramena sa femme au
marquis d'Osmond. « Gardez-là- dit-il,
je ne sais.qu'en faire, c'est un démon. »
Il persista, du reste, chevaîeresquement
à servir une royale pension à celle qui
portait son nom ; elle l'en récompensa
en le traitant dans ses Mémoires de
vieux militaire fatigué.
Au suplus, de toutes les personnali-
tés :de l'ancien régime, de la Restaura-
tion et de la cour de Louis-Philippe,
qu'elle rencontra, Mme de Boigne a fait
une vaste hécatombe. Deux ou trois à
peine échappèrent à ses coups, Mme
Récamier, la reine Amélie, par exem-
ple.
Nous reviendrons sur cette piquante
exécution de l'aristocratie française par
une impitoyable douairière, dont on
connaît la longue intimité apec le chan-
celier Pasquier.
ACADÉMICIEN « ARTISTE POÈTE M
Si M. Maurice Donnay, le nouvel aca-
démicien, jetait un regard en arrière,
se souviendrait-il (ce n'est pas sûr.)
des vers qu'en parcourant une exposi-
tion de peinture, i} improvisa, devant
un tableau représentant une Parisienne,
il va environ dix-huit ans ! Il les écri-
vit sur une feuille,de carnet,, les accro-
cha au tableau. Et vers et tableau furent
vendus ensemble ! '-.:..:. I:.(s,.
Voici le poème :
Corps délicat et savoureux, *
Sous ses dehors verts de fruit aigre,
D'une maigreur de fausse maigre,
Sans éminences. mais sans creux ;
Quarq.nle-six à la ceinture,
Moins de cent livres comme poids ;
Et pour sa main aux frêles doigts.
Juste cinq et quart de pointure.
C'est cette femme que Paris,
Comme un parfum charmant distille.
La femme complexe et subtile,
Fauvette, tigresse, souris.
C'est signé : « Maurice DONAY, àrïis-
te-poète, 49, rue La Bruyère ; poésies
pour pastels, gouaches, sanguines,
aquarelles et tableaux à l'huile ».
Heureux temps du Chat Noir !. ,'<-
_;j.rw..1.- t¡-:c.t
EN 1414. DÊja'
A ceux qui croient la fâcheuse grippe
une maladie moderne, nous dédions ce
passage cueilli dans les registres du
Parlement ; ils verront que nos pères
n'étaient pas épargnés par cette dia-
blesse de maladie, qui fait tant de vic-
times en ce moment >
An 1114. -
Le luncly5 mars n'a pas esté plaidoyô,
ne n'avait' aucun advocat, ni procureur, ni
parties, par le palais, pour ; une monlte
griève maladie- qui généralement. courait
par Paris, par la quelle la teste et tous les
membres do lolent et souffroient de moult
fort rhume; et,, entre tous, moy-mesme ne
dormis de toute cette nuit, et ne puis me
soutenir de la douleur de la teste, des
reins, des costcz, épaules et jambes.
AU MUSÉE DU TROCADÉRO
Sous la conduite de leur président,
M. Charles Normand, et du savant con-
servateur du musée, M. Enlart, les
Amis des monuments et des arts ont
« excursionné » hier matin dans les sal-
les du musée de sculpture comparée, au
Trocadéro. Ah ! la charmante visite, et
quelle vie M. Enlart sait donner à son
enseignement ! On assistait littérale-
ment. à la transformation des styles ; en
voyait le roman muer en gothique, le
gothique en flamboyant, le flamboyant
en Renaissance, Et que de descriptions
attachantes ! Que d'anecdotes curieu-
ses ! Quel attrait- sans cesse renouvelé !
On en a - ne le répétez pas ! — ou-
blié l'heure du déjeuner.
Le Passant.
-"
LA MORT DE CARDUCCI
Nous avons .'dit que la Chambre italienne
tout entière, a approuvé lA motion deman-
dant que Carducei fût enseveli$u Panthé&n
de Santa-€toce-$PÏQrencé» (pii .contient, dÓjà
pju s, d'u n e 'tomba, illustre. ,
La. nouvelle. de ce vote de la Chambre
téléphonée h Bologne, a fortement ému la
population qui, espérait garder la tombe
4» ,.g,ra.nd poète. Les étudiants protestent,
rappelant que le corps de Dante est resté
à Ravenue ;' mais devant la grandeur de
la manifestation nationale, on espère que
cette motion première se calmera.
A Bologne, les théâtres sont fermés.
Le corps de Cardueci, vêtu de noir, cou-
vert du drapeau national et portant les
insignes de la maçonnerie, a été transporté
à la bibliothèque municipale transformée
enichambre ardiente. Une couronne do
laurièr a été d-époséè sur le lit funèbre.
D'innombrables dépêches continuent à
arriver à la famille du poète, de l'intérieur
et de l'étranger.
D'autre part, on annonce que la Ligue
franco-italienne a pris l'initiative d'organi-
ser une cérémonie à la Sorbonne en l'non.
neur du grand poète italien Carducci.
,1f;;";" ———————————.
ELECTIONS SÉNATORIALES
',,- CALVADOS
Inscrits : 1.253. — Votants : 1.149
MM.. Boivin-Uia-mpeaux, avocat
au Conseil d'Etat, rép. lib. 785 ELU
Le Hoc, maire de Deau-
ville, radical 243
1 Lebret, ancien député, an-
cien ministre, p.f.O,;!. 99
Il s'agissait de remplacer M. Duchesne-
Fournet, sénateur républicain, décédé.
SEINE-ET-OISE
Inscrits : 1.457. — Votants : 1.444
MM. Collet maire de Mantes,
rép. libéral. 785 ELU
Perillier, anc. dcp., rad. s. 366
Ferdinand-Dreyfus, a. dép.,
• fép. (Alliance * democratiq.) 273
Jacques Vogt, soc. unifié. 11
Daumont, indépendant., 5
Il s'agissait do remplacer M. Maret sé-
nateur républicain décédé.,
• — —■ 1
La vie d'un Théâtre
Les trois Nouveautés. — Gloires d'an tan
Les choses ont leur existence propre
ainsi que les hommes ; comme eux,
elles ont leurs joies, leurs douleurs,
leurs triomphes, leurs désespoirs. Et je
ne sais rien de plus curieux, de plus in-
téressant, de p'us cruel et de plus bi-
zarre, entre toutes ces choses, que la
vie d'nn théâtre.
J'ai donc considéré comme une bon-
ne fortune l'occasion 'de parcourir l'his-
toire d'une de ces vies, histoire racontée
tout simplement, avec des dates, des
noms et de brèves notices. Il s'agit des
Nouveautés (1).
En réalité, il y a eu trois théâtres de
ce nom. Le premier, bâti en 1827 place
de la Bourse, sur un des côtés du pas-
sage Feydeau, coûta près de trois mil-
lions et demi. La façade consistait en
deux ordres, l'un ionique, l'autre co-
rinthien, Composés chacun de cinq -en-
tre-colonnements, ornés de mascarorts
et de niciies contenant des bustes ou
des statues ; elle semblait mesquine en
comparaison du palais de la Bourse, au-
quel elle faisait vis-à-vis et qui l'écra-
sait. Ce théâtre fut vendu 1,100,000
francien 1832. Il fut exproprié et démo-
li en 1869, pour le percement de la rue
du 10-Décembre, aujourd'hui rue du
4-Septembre.
Son fondateur fut Cyprien Bérard,
qui avait quelque temps supplanté Dé-
saugiers au Vaudeville ; son premier
régisseur général, Saint-Léger. Au co-
mité de contentieux, je relève le nom
de M. Cochin, avocat à la Cour de cas-
sation ; au comité de lecture, les noms
de Charles Nodier, Planard, Langlois,
Riant, Puzin, Avenel, le comte de
Maillé, de Nugent, Delaforest, Amédée
Pichot, Frédéric Soulié, Couture, Geof-
froy, etc.
Il y avait 1,250 places — de 1 fr. 50 à
6 francs. Les deux premières pièces :
Quinze et Vingt Ans ou Les Femmes,
Comédie-vaudeville en deux actes de J.
Brisset, et Le Coureur de Veuves, opé-
ra du même J. Brisset, musique de
Blangini, n'eurent aucun succès ; et la
direction dut retirer cet opéra, parce
qu'elle n'avait pas le droit de donner
des partitions inédites.
Pendant toute son existence, 'du reste,
de 1827 à 1832, le théâtre des Nouveau-
tés fut maintes fois persécuté par l'Opé-
ra-Comique pour le même mot1f. On ne
badinait pas avec les privilèges, sous
Charles X, quand le comte Sosthène de
La Rochefoucauld, chargé du départe-
ment des Beaux-Arts, s'évertuait à ra-
mener à huit, comme en 1807, le nom-
bre ides théâtres dans Paris.
En cinq ans, les Nouveautés repré-
sentèrent 143 pièces-, dont un grand
nombre ne furent même pas impri-
mées. Quelle leçon 'd'humilité l'on peut
prendre en parcourant cette longue .lis-
te de comptes rendus analytiques —
tout ce qui reste d'oeuvres que leurs au-
teurs croyaient sans doute moins éphé-
teurs croyaient sans aucun doute éphé-
mères ! Ces auteurs n'étaient pourtant
point les premiers venus : les Dartois,
Rochefort, Etienne; Arago, Victor Du-
cange, Planard, Paul Duport, E. Scribe,
Ch. Desnoyer, Paul de Kock, Désau-
giers, Romieu, Frédéric Soulié, Pigault-
Lebrun, Eugène Sue, Anicef-Bourgeois.
Parmi les pièces non imprimées, trois
surtout attirent l'attention par ce qu'on
appelle aujourd'hui le « sens de l'ac-
tualité ».
L'une, intitulée Paul, drame en deux
époques, par E. Vanderbuch et de For-
(iyHistoire des-ihé'âtre»4c.Paris,: Les H0uwau-
lês, par L. Ilenr' y Loooriité. Editeur H. I>aragon,
30, rue Diuv"'™4 Paris v ,.., ,.,
ges, nous montre un jeune séminariste
qui s'offre de passer la nuit en prières
au chevet d'une jeune fille qu'on croit
morte. Singulières prières, car il viole
la jeune fille et disparaît. Heureuse-
ment, celle-ci sort de sa léthargie à
temps pour n'être pas enterrée. Et non
seulement elle ressuscite, mais, en son
sein, nait un autre être. Heureusement
encore, le séminariste, qui a pris le bon
parti de jeter sa soutane aux orties, re-
vient au bout d'un an, épouse la jeune
fille et reconnaît l'enfant qu'il avait
procréé dans d'aussi macabres circons-
tances.
La deuxième pièce, La Grippe ou le
fal à la mode, à-propos en un acte,
mêlé de couplets par Barthélémy, Ro-
che et Courtier, fut sifflée comme la pré-
cédente — mais, de plus, elle souleva
quelques applaudissements. On y voyait
l'apothicairé Dumilieu, chargé de soi-
gner la grippe dans tous les théâtres ;
il en profitait pour faire sur tous des
réflexions plus ou moins spirituelles et
obligeantes.
Enfin, devançant Chantecler que nous
ne possédons pas encore, la troisième
pièce, Les Poulets, folie-parade en un
acte par X., infligeait aux acteurs des
rôles d'animaux. MM. Armand, Laca-
ze et Montigny étaient Tribolinus le
Coq, le Chapon et Népos le Poussin ;
Mmes Clorinde et Astruc étaient la Pou-
le mouillée et la Dinde. Dans l'espoir
d'acquérir la science divinatoire, Tribo-
Inus, gardien des poulets sacrés au. pied
du Vésuve, mange les précieuses volail-
les. Il est trahi par sa femme et par son
neveu Népos, quand. Mais on n'a ja-
mais su comment cela terminait, le pu-
blic ayant fait un tel vacarme qu'on dut
baisser le rideau.
Enfin, le 16 février 1832, le dernier idi-
recteur des Nouveautés fut obligé de dé-
poser son bilan.
-: En 1827, les recettes du théâtre s'é-
taient élevées à 359,953 francs ; en .1828,
à 377, 850 francs ; en 1829, à 391,512
francs ; en 1830, à 480,843 francs ; en
1831, à 147,015 francs.
Durant trois ans, du mois de juin
1828 au mois de juin 1831, Déjazet avait
joué place de la Bourse.
Le deuxième théâtre des Nouveautés
a vécu, 60, rue du Faubourg-Saint-Mar-
tin, de 1866 à 1873. Il fut fondé par un
journaliste, Jules Rouquette. qui, qua-
tre mois plus tard, le céda à son con-
frère Eugène Hugot. Le 3 décembre, un
incendie consumait le théâtre qui fut
reconstruit en 56 jours. Cependant, dès
le mois de mai 1867, E. Hugot cédait la
direction à Mme Albine de l'Est. Celle-
ci l'abandonna à son tour, en 1869, au
vaudevilliste Adolphe Guénée. Puis, il y
eut la direction de la comtesse Lionel
de Chabriilan, auteur, actrice et ancien-
ne directrice du théâtre des Champs-
Elysées. Pendant et après la Commu-
ne, deux nouveaux directeurs se suc-
cédèrent, l'un pendant 15 jours, l'autre
pendant six mois. Enfin, Charles Cliin-
cholle, l'ancien rédacteur au Figaro, et
Arthur Chédivy luttèrent 'désespéré-
ment jusqu'en 1873. A cette époque,
Hippolyte Lemonier donna au théâtre le
nom de Délassements Comiques. Mais
le succès persista à ne point venir, et
la salle fut démolie en 1878.
Total du répertoire : 103 pièces (60
nouveautés, dont 16 imprimées, et 43
reprises, dont 3 éditées à cette occa-
iÎln)-
« Bien qu'affichant, par intervalles,
des prétentions à la littérature, dit M.
L.-Henry Lecomte, ce théâtricule, géré
par des écrivains désireux de faire un
sort à leurs ouvrages ou par des actri-
ces jalouses de la vedette, jouait d'ordi-
naire des pièces dont les journaux dé-
daignaient de donner l'analyse et que
les éditeurs se gardaient d'imprimer. »
Il est loin d'en être ainsi, on le sait,
pour le troisième théâtre des Nouveau-
tés (1878-1907) boulevard des Italiens,
fondé et gouverné par Jules Brasseur
jusqu'au mois d'octobre 1890, et dirigé
depuis par M. Henri Micheau, fils de la
direc.trice du Théâtre du Parc, à
Bruxelles.
Mais ceci n'est plus de fliistoire —
c'est de l'heure présente. Aussi me eon-
tenterai-je de vous dire que le répertoire
comptait 180 pièces au 31 décembre der-
nier.
Bien que très rapprochées de nous,
quelques-ûnes de ces pièces semblent
déjà d'un autre âge, et l'on se surprend
à rêver dans le passé en lisant les noms
des Clairvllte, des Hennequin, des Wil-
der, des Labiche, des Philippe Gille,
'des Lambert Thiboust, des Albert
Wolff, des Toché, dés Burani, des Mi-
chel Carré.
Quelle poussière de souvenirs soulè-
ve la vie d'un théâtre !
G. fie Vorney.
LES CôilLISSES DE CHAMBRES
Les chemins de fer de l'Etat
La commission parlementaire des travaux
publics s'est réunie h la Chambre pour exa-
miner le projet de loi sur le régime finan-
cier et l'organisation administrative des
chemins de fer de l'Etat.
Elle a accepté pour le futur réseau. de
l'Etat les dispositions lui donnant la person-
nalité civile et la faculté d'emprunter.
Après discussion l'article 1er a été adopté
avec une addition tendant à autoriser par
décret l'administration des chemins de fer
de l'Etal à exploiter pourMc compte de
l'Algérie et. d'es colonies.
L'article 4,qut prévoit pour le réseau rie
-l'Etat la faculté d'émettre des .obligations
amortissables, a été adopté, sauf. en ce
qui concerne la question du délai d'amortis-
smerM" qui est-réservé. -
En introduisant dans le texte du projet
de loi ces quelques dispositions de dôtal
la commission a eu pour but de reacfif
plus facilement comparables les résulta.
de l'exploitation nouvelle par FEtat et ceu }
de l'exploitation ancienne par la Corn,
gnie de l Ouest.
L'armée des Vosges
* 1 - - ;;
La Bataille de Dijon
Dès le 18 janvier, Manteuffel ooncefil
tre le 2e corps prussien — vingt-sem
mille hommes — devant Dijon ; des ré-
connaissances en force sont poussées
jusque chez l'ennemi par l'armée de
Garibaldi, le 19 janvier. C'est alors qu
le général Kettler reçoit l'ordre urgent
de s'emparer de Dijon, tandis que Ga-
ribaldi reçoit l'ordre du gouvernement
de la Défense nationale de conserver Dir
jon à tout prix. Kettler s'avance, prend
Daix et Hauteville, mais la quatrième
brigade sort de Dijon, rencontre l'enne-
mi à Messingy et le repousse du village;'
plus nombreux, il revient à la charge,
mais les francs-tireurs savoyards l'ar-
rêtent.
La bataille s'anime pendant l'après'
midi du Si janvier ; Ricciotti Garibaldi
évacue Messingy ; le centre de l'action
est alors aux positions de Talant et d^ •
Fontaine, occupées par nos troupes que
y courent de sérieux dangers. En atta-'
quant l'ennemi à sa base : la colline dei
Daix, Ricciotti Garibaldi-sauve ces posi-'
lions menacées. La 4e brigade rentre
ensuite à Dijon ; le lendemain matin,.
elle occupait les fermes d'Ahuy et des
Charmettes. Ce fut une journée calme :
l'ennemi tente mollement de s'emparer,
de Talant et de Fontaine, mais il est
violemment repoussé. #
'; "J
L'attaque de Pouilly 1 -
Nous voici au 23 janvier, la journéfe;
héroïque. Dès le matin, Kettler est en
marche vers Dijon, mais la résistance'
est vive et, pour se frayer une route, it
attaque Pouilly : quelques bâtisses si..
tuées autour d'une maison de campa-
gne, entourée de jardins et d'un pare
clos de murs, pompeusement' appelée.,
« le château de Pouilly \». Nos troupes
sont surprises au bivouac, tandis qu'el-
les préparent la soupe ; en un instant,
Pouilly est mis en état de défense ; l'en-
nemi s'empare de quelques maisons,,
mais le* « château H, fortement occupée
résiste. Les Ours 'de Nantes, embusqués
dans les bosquets, sont exterminés ; les:
francs-tireurs de Marseille, réfugiée
dans un petit enclos, sont bientôt chas-
sés. i
Neuf hommes restaient dans la maîW
son ; de l'étage supérieur, ils arrêtent
pendant une demi-heure, le mouvement
des Prussiens, qui réussirent enfin bJ
pénétrer au rez-de-chaussée et à met-
tre le feu au « château » après avoir!
commis des atrocités barbares. Devant
le débordement incessant de l'ennemi
les mobiles de Louhans se dêbandent.
une panique s'ensuit à Dijon ; l'ennemi
se croit maître de la ville, mais le vieuîr
Garibaldi a fait occuper tous les points1
vulnérables de la place.
1: JI.1
La défense de l'usine Bargy ,,:.
La 4e brigade s'avance alors sûr ta:
route de Langres ; dans la plaine lisse,,
une seule construction se dresse, c'est
l'usine Bargy. Garibaldi a vite reconnu
que c'est là la clef de Dijon, aussi chat."
ge-t-il son fils Ricciotti de la défendre à'
tout prix. L'usine est alors occupée par
les chasseurs des Alpes de Michard, lesf
chasseurs du Mont-Blanc de Tappaz et
les francs-tireurs de Vlsère de Rostaing.
Michard prépare l'usine pour une dé4
fense désespérée. Sur la route, des bat-
teries d'artillerie se sacrifient pour ga-'
gner du temps, mais l'ennemi s'avance
en chassant devant lui les mobiles de-,
bandés, et approche, divisé en trois coy
lonnes, vers l'usine Bargy ; le choc este
terrible. - 1 n
L'attaque de la première colonne est
bientôt rendue nulle par, l'installation'
défectueuse des batteries ennemies. La*
deuxième colonne — le 1er bataillon dir
61e poméranièn: est. arrêtée par le feu'f
terrible qui vient de l'usine : les hom'-'
mes doivent se coucher et se borner ifl
cribler la bâtisse de balles. La troisiè'-'
me colonne — 26 bataillon du 61e pomé-
ranien — s'avance très près de l'usine:
en suivant le lit desséché d'une rivière.'
Toute la résistance se concentre alors
dans l'usine, on barricade lès portes ;>
Michard garde le bâtiment, Ricciotti
Garibaldi la cour et ses dépendances$
la colonne approche et est décimée ; le;
drapeau, ayant à chaque instant son1-
porteur tué, passe de mains en mains.
Il disparaît sous les cadavres, sous une
grêle de balles, et dans l'obscurité
croissante des sous-officiers poméra-'
niens le cherchent. C'est peu facile.
« Jamais je n'ai contemplé un aussr
grand nombre de cadavres amoncelés
sur un petit espace », a écrit Garibaldi*.
Un brillant fait d'armes
Que se passait-il à l'usine, pendant cW
temps ? Elle est entourée de tous côtés,*
c'est la cible de tout le champ de ba-
taille, les fenêtres sans volets laissent
passer les projectiles, les nôtres ne peu"
pent plus riposter, les munitions vonfj
manquer. Ricciotti Garibaldi, désespé'-*
ré, scrute l'horizon avec sa "lorgnetteJk
cherchant du renfort.
line colonne s'avance ; à "ci n qÜà.nl" -
pas, il ne peut eneoFe reconnaître si ce
sont ides amis ou désxennemis, mais:
d'une hatriQÇ. o,n enjèye. jim &oiiSAaA
CKVQ cEsnrtMti» t,«5vxtnttorÉîo
Mardi 19 Février 1907. - No 13493?
FoBdftteurt -
ftUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
fi mit Iniiltil Sltwîi Un ao
Paris. 2fr. 5fr. 9fr. 18frj
Départements.. 2 — 6 — 11 — 20
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RÉDACTION : 14, RUE DU MAIL, PARIS
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Rédacteur en chef
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CHARLES LAURENT
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ADMINISTRATION : 14, RUE DU MAII1
Téléphone 102-82 't
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
Le liste citait,,
Cherchez-vous un travail facile et ré-
munérateur ? Je vais vous raconter com-
ment un de mes amis a gagné cent sous
sans risquer de méningite et sans pren-
dre de suée.
Samedi, par les couloirs des Cham-
bres, des ministères et des journaux,
soufflait je ne sais quel vent de panique,
avec la rage énervante du mistral sur
la Canebière. Dans les corridors dont je
parle, presque tout le monde s'affolait,
les hommes politiques et les journa-
listes sont des gens si impressionna-
foies !
Dans un groupe où l'on se preoecu-
pait du sort des ministres, quelqu'un,
plus nerveux 1peut-être que ses voisins,
s'écria :
- Peuple, on te trompe. Je parie la
.thune : tout à l'heure, nous allons trou-
ver dans la sixième colonne de la der-
- nière heure du Temps cette nouvelle en
une Jigne :: -,
Nous croyons savoir que M. Brrand est
démtssiomklire, ,'
Le camarade à qui je faisais allusion
plus haut était un des rares, à n'avoir
-pas perdu la tête : ,
— Tu paries la thune ? dit-il d'une
xoix - calme. Tenu.
Le Temps parut. Il ne contenait pas
ta ligne annoncée par les oiseaux de
oiaùvàis augure. Mon ami n'avait plus
AU 'à passer à la caisse.
J'ai raconté cette anecdote, parce
qu'elle est édifiante, et parce qu'elle
ilousapprend le prix du sang-froid dans
les heures de crainte et d'agitation. Ti-
rons de cette histoire une leçon de sa-
gesse, et ne nous perdons pas dans l'im-
broglio des incidents ministériels — im-
broglio qui doit être dénoué pas plus
lard que demain.
., ***
M. Briand a la coquetterie, légitime
'd'ailleurs, de faire reconnaître s« loi, la
4oi de Séparation, par le clergé. L'Eglise
a cédé un peu, très peu — un-!)eu enfin,
8 la persuasion du ministre des cultes.
Les évêques acceptent de s'entendre
avec les préfets, sur la location des édi-
fices cultuels. M. de Selves, préfet de la
Seine, notamment, est entré en graves
pourparlers avec l'archevêque.
Pendant ce temps, le ministre des
cultes soumettait à ses collègues les pro-
jets des baux qui pourraient être si-
gnes.
Je ..drupasque M. Clemenceau
ivoyait d'un osil particulièrement favo-
rable les « tractations » entre les ex-
préfets violets et les préfets proprement
dits ; quant aux baux, le président du
conseil trouvait peut-être qu'ils ber-
naient le propriétaire, l'Etat, au profit
:du locataire, le curé. Quoiqu'il en soit,
lM. Clemenceau ne voulut pas mettre
itout de suite au panier les projets de
fcaux rédigés et calligraphiés par son
icollaborateur des cultes.
Mais en rentrant dans ses apparte-
ments, le président du conseil put lire
iwn ordre du jour voté par les groupes
radicaux-socialistes de la Seine. Le gou-
"vernement y était invité à ne plus con-
sentir à l'Eglise aucune de ces conces-
sions qui ne servent qu'à encourager les
iexigences des cléricaux.
Ah ! ne me brouillez pas avec la République
dit M. Clemenceau à M. Briand, la pre-
mière fois qu'il le revit. Puisque baux
lil y a, faites-moi des baux. Je les ac-
cepte d'avance, à condition qu'ils ne
m' exposent point à des reproches de la
part de mes vieux frères d'armes du ra-
incansme.
Le ministre des cultes est trop fin
pour ne pas comprendre et apprécier le
sentiment de son chef de file. Il est trop
lénergique pour se rebuter en face d'une
ïîifficulté d?écriture. Que diable ! Il n'est
pas le premier gérant de propriété qui
ait eu à louer à un curé et qui se soit
itiré de l'affaire au mieux de ses fer-
mages.
, Et M. Briand rédige, biffe, recotii-
Imener, rature encore des projets de
baux, toujours des projets de baux. Pro-
blème : trouver une formule en même
jlemps sévère et libérale. Ne choquons
point la Libre-Pensée et n'effarouchons
point la Soutane. La tâche est rude,
faut-il croire '; car, dans cnacun des
projets où M. Briand prociïgue son In-
géniosité, il y a un rien, un souffle, un
irien, qui empêche M. Clemenceau de
(souscrire de bon cœur au bail préparé
par Son ministre.
0\If.
Déjà des députés inquiétés dans leur
Sollicitude pour le ministère, se propo-
sent d interpeller. Afin de s'assurer que
: le cabinet Clemenceau n'est pas mort,
ils s'entetent à le faire parler. Ce n'est
pas ce qui gênera des ministres dont
tfeux ou trois sont de grands orateurs.
.on croit généralement que le cabinet
se cassera ou se raccommodera tout 'à
faif au conseil des ministres de deamUu.
Les interpellateurs pourraient donc,
dans un cas comme dans l'autre, se dis-
penser de monter à la tribune. S'ils
persistent à interroger MM. Clemenceau
et Briancf, ceux-ci pourront répondre 1
: — Il y avait peut-être de la division
dans léquipage et une fissure: dans la
coque du bateau. Mais rien ne rappro-
che les hommes mieux qu'un danger
couru en commun ; nous avons été vite
d'accord pour aveugler la voie d'eau, et
nous n'avons jamais navigué plus sûre-
ment ni plu$cordialement qu'après ceffe
alerte.
HUGUES DESTREM
LES ON - DIT
if CHOSES A NOTER
La Guerre de 70 racontée
ear 1-e Rappel » est loin d'être
terminée, bien que, selon l'or-
dre de ces éphémérides, le
traité de paix soit à la veille
d'être adopté par FAssemMée
de Bordeaux.Mais le drame ne serait
pas complet si l'on n'y joignait le récit
de la Commune, car la Commune en fait
partie intégrante. A quelques semaines
d'intervalles, la Commune succède au
siège de Paris "èt «contre l'âme réelle du
peuple vilipendé, trompé, décidé à ven-
ger Paris de ceux qui avaient émaaeulé
la Défense ; décidé à barrer le chemin
à la réaction, à préserver la République,
puisqu'il n'était plus possible, pour le
moment, de reprendre la lutte contre
l'étranger. ,-
Dans l'un de nos récents numéros de
« la Guerre '», le sens d'une note relative
à la réunion des gardes nationaux tenue
au Tivoli Vaux-Hall a dû échapper à
ceux de nos lecteurs. qui sont trop jeu-
nes pour avoir assisté aux événements.
On décida, dans cette réunion, la nomi-
nation d'un délégué par compagnie, et
ce fut la naissance du Comité central qui
fit la Commune.
On l'a vu, la Commune ne date pas
du 18 mars 1871, elle est réclamée, pro-
clamée par beaucoup de bataillons, le
31 octobre 1870 ; son sens alors est ce-
lui-ci : résistance à outrance à l'étranger,
pouvoirs de contrôle remis aux délégués
de la Ville de Paris pour l'organisation
de cette résistance aux Allemands. Et
c'est, pendant tout le siège, un malen-
tendu persistant entre un gouvernement
dit de Défense nationale qui, comme
Paul Meurice le disait dans notre nu-
méro d'hier, jï n'a rien défendu du tout,
ni Paris, ni la province, ni la Républi-
que, ni la patrie, ni notre enceinte, ni no-
tre bourse », et le peuple qui exigeait
qu'on fit, pour la défense effective, les
sacrifices nécessaires.
Et ainsi le rôle du grand parti répu-
blicain se dessine avec clarté dans ces
pages en raccourci le peuple républi-
cain n'a pas voulu la guerre, a été hos-
tile à l'entreprise de cette campagne qui
n'avait d'autre but que de refaire une po-
pularité à l'Empire. La guerre engagée,
le peuple républicain n'a voulu la clore
qu'après une résistance effective, qui
écarterait les catastrophes ; la paix hon-
teuse conclue malgré lui, le peuple s'est
"'1",.1.a. nmif In ripe; Mrnitr. tli- la
République que les réactionnaires de
l'Assemblée de Bordeaux méconnais-
saient.
L'expose que nous donnons ici -des
sentiments du parti républicain est si
profondément exact, que, pendant plu-
sieurs années après la Commune, le thè-
me principal aesractionnaires contre la
République, sera ïï d'avoir inutilement
prolongé la résistance et rendu ainsi;
plus dures les conditions de paix. On Bo-
napartistes et royalistes ont passé dix
ans à nous chanter cette antienne, jus-
qu'au jour où ils se sont brusquement
mués en « patriotes » exaspérés.
Il résulte de ce qui précède que THef-
véisme est, âu monde, la théorie la plus
opposée à toute l'histoire, à. toutes les
tendances, à tous les espoirs du parti ré-
publicain.
LA GUERRE DE 1870
Racontée par le f apper »
Numéro du 20 Février 1871
La journée. « Les Prussiens, mal-
gré l'armistice, s'amusent à jouer les
conquérants à nos portes. M. Rllprecht,
assesseur de régence, vient d'être nom-
mé sous-préfet de l'arrondissement de
Saint-Denis. »
Protestafion de gardes nationaux. =
« On assure que le gouvernement se se-
rait engagé, pour obtenir une prolonga-
tion de l'armistice, à laisser défiler dans
Paris les troupes allemandes..
Le 125e bataillon, qui a déjà protesté
contre la capitulation, proteste énergi-
quement contre ce nouvel outrage.
« Il somme le gouvernement de 'dé-
clarer si ce bruit est ou non fondé," »
Le cas du général Ducrot. — « Le Mo-
niteur officiel de Versailles du 15 dé-
ment l'assertion d'un journal qui avait
annonce que M. de Bismarck réclamait
le général Ducrot comme étant son pri-
sonnier de guerre en rupture 'd'hon-
neur, et aurait même (déclaré ne pas
vouloir aller plus avant dans les négo-
ciations de l'armistice si M. Ducrot n'é-
tait remis aux Prussiens.. a
Garibaldi et son armée. :¡,;;; « Garilml-
di en quittant la France a adressé à ses
vaillants compagnons d'armes 'de l'ar-
mée des Vosges la proclamation que
voici : '-
« Bordeaux, 13 février 1871. Xux bra-
ves de l'armée des Vosges. En retour-
nant dans vos foyers, racontez à vos fa-
milles les. travaux, les fatigues et les
combats que nous avons soutenus en-
semble -pour la sainte cause de la Ré;.
publique, Dites-leur surtout que vous
aviez un chef qui vous aimait comme
ses propres enfants et qui était- fier de
votre bravoure. Au revoir dans des cir-
constances meilleures. =- Signé :: GA-
RIBALDI. » , F -
LES MËMOIRES DE Mme DE BOIGNE -
Bien qu'expurgés, san fc doute, par
les soins pieux de M. Nicoullaud, héri-
tier moral du dernier marquis d'Os-
mond, les Mémoires de la comtesse de
Boigne promettent de faire quelque ta-
page et beaucoup de grandes familles
craignent les coups de griffe posthumes
de cette terrible femme, qui mourut
presque centenaire et connut le second
Empire après avoir vécu à la cour de
Marie-Antoinette.
Mariée à dix-sept ans au général Le-
borgne dit de Boigne, ex-généralissime
de l'armée des Mahrattes dans les In-
des, qui avait rapporté de là-bas une
fortune colossale, ciïe ne tarda guère à
se séparer de lui. ,"
Il avait 47 ans et elle dix-sept. Elle
dicta les termes du contrat, qui lui as-
surait, à elle et aux siens, près de cent
mille livres de rente. Au bout dë dix
mois, le général ramena sa femme au
marquis d'Osmond. « Gardez-là- dit-il,
je ne sais.qu'en faire, c'est un démon. »
Il persista, du reste, chevaîeresquement
à servir une royale pension à celle qui
portait son nom ; elle l'en récompensa
en le traitant dans ses Mémoires de
vieux militaire fatigué.
Au suplus, de toutes les personnali-
tés :de l'ancien régime, de la Restaura-
tion et de la cour de Louis-Philippe,
qu'elle rencontra, Mme de Boigne a fait
une vaste hécatombe. Deux ou trois à
peine échappèrent à ses coups, Mme
Récamier, la reine Amélie, par exem-
ple.
Nous reviendrons sur cette piquante
exécution de l'aristocratie française par
une impitoyable douairière, dont on
connaît la longue intimité apec le chan-
celier Pasquier.
ACADÉMICIEN « ARTISTE POÈTE M
Si M. Maurice Donnay, le nouvel aca-
démicien, jetait un regard en arrière,
se souviendrait-il (ce n'est pas sûr.)
des vers qu'en parcourant une exposi-
tion de peinture, i} improvisa, devant
un tableau représentant une Parisienne,
il va environ dix-huit ans ! Il les écri-
vit sur une feuille,de carnet,, les accro-
cha au tableau. Et vers et tableau furent
vendus ensemble ! '-.:..:. I:.(s,.
Voici le poème :
Corps délicat et savoureux, *
Sous ses dehors verts de fruit aigre,
D'une maigreur de fausse maigre,
Sans éminences. mais sans creux ;
Quarq.nle-six à la ceinture,
Moins de cent livres comme poids ;
Et pour sa main aux frêles doigts.
Juste cinq et quart de pointure.
C'est cette femme que Paris,
Comme un parfum charmant distille.
La femme complexe et subtile,
Fauvette, tigresse, souris.
C'est signé : « Maurice DONAY, àrïis-
te-poète, 49, rue La Bruyère ; poésies
pour pastels, gouaches, sanguines,
aquarelles et tableaux à l'huile ».
Heureux temps du Chat Noir !. ,'<-
_;j.rw..1.- t¡-:c.t
EN 1414. DÊja'
A ceux qui croient la fâcheuse grippe
une maladie moderne, nous dédions ce
passage cueilli dans les registres du
Parlement ; ils verront que nos pères
n'étaient pas épargnés par cette dia-
blesse de maladie, qui fait tant de vic-
times en ce moment >
An 1114. -
Le luncly5 mars n'a pas esté plaidoyô,
ne n'avait' aucun advocat, ni procureur, ni
parties, par le palais, pour ; une monlte
griève maladie- qui généralement. courait
par Paris, par la quelle la teste et tous les
membres do lolent et souffroient de moult
fort rhume; et,, entre tous, moy-mesme ne
dormis de toute cette nuit, et ne puis me
soutenir de la douleur de la teste, des
reins, des costcz, épaules et jambes.
AU MUSÉE DU TROCADÉRO
Sous la conduite de leur président,
M. Charles Normand, et du savant con-
servateur du musée, M. Enlart, les
Amis des monuments et des arts ont
« excursionné » hier matin dans les sal-
les du musée de sculpture comparée, au
Trocadéro. Ah ! la charmante visite, et
quelle vie M. Enlart sait donner à son
enseignement ! On assistait littérale-
ment. à la transformation des styles ; en
voyait le roman muer en gothique, le
gothique en flamboyant, le flamboyant
en Renaissance, Et que de descriptions
attachantes ! Que d'anecdotes curieu-
ses ! Quel attrait- sans cesse renouvelé !
On en a - ne le répétez pas ! — ou-
blié l'heure du déjeuner.
Le Passant.
-"
LA MORT DE CARDUCCI
Nous avons .'dit que la Chambre italienne
tout entière, a approuvé lA motion deman-
dant que Carducei fût enseveli$u Panthé&n
de Santa-€toce-$PÏQrencé» (pii .contient, dÓjà
pju s, d'u n e 'tomba, illustre. ,
La. nouvelle. de ce vote de la Chambre
téléphonée h Bologne, a fortement ému la
population qui, espérait garder la tombe
4» ,.g,ra.nd poète. Les étudiants protestent,
rappelant que le corps de Dante est resté
à Ravenue ;' mais devant la grandeur de
la manifestation nationale, on espère que
cette motion première se calmera.
A Bologne, les théâtres sont fermés.
Le corps de Cardueci, vêtu de noir, cou-
vert du drapeau national et portant les
insignes de la maçonnerie, a été transporté
à la bibliothèque municipale transformée
enichambre ardiente. Une couronne do
laurièr a été d-époséè sur le lit funèbre.
D'innombrables dépêches continuent à
arriver à la famille du poète, de l'intérieur
et de l'étranger.
D'autre part, on annonce que la Ligue
franco-italienne a pris l'initiative d'organi-
ser une cérémonie à la Sorbonne en l'non.
neur du grand poète italien Carducci.
,1f;;";" ———————————.
ELECTIONS SÉNATORIALES
',,- CALVADOS
Inscrits : 1.253. — Votants : 1.149
MM.. Boivin-Uia-mpeaux, avocat
au Conseil d'Etat, rép. lib. 785 ELU
Le Hoc, maire de Deau-
ville, radical 243
1 Lebret, ancien député, an-
cien ministre, p.f.O,;!. 99
Il s'agissait de remplacer M. Duchesne-
Fournet, sénateur républicain, décédé.
SEINE-ET-OISE
Inscrits : 1.457. — Votants : 1.444
MM. Collet maire de Mantes,
rép. libéral. 785 ELU
Perillier, anc. dcp., rad. s. 366
Ferdinand-Dreyfus, a. dép.,
• fép. (Alliance * democratiq.) 273
Jacques Vogt, soc. unifié. 11
Daumont, indépendant., 5
Il s'agissait do remplacer M. Maret sé-
nateur républicain décédé.,
• — —■ 1
La vie d'un Théâtre
Les trois Nouveautés. — Gloires d'an tan
Les choses ont leur existence propre
ainsi que les hommes ; comme eux,
elles ont leurs joies, leurs douleurs,
leurs triomphes, leurs désespoirs. Et je
ne sais rien de plus curieux, de plus in-
téressant, de p'us cruel et de plus bi-
zarre, entre toutes ces choses, que la
vie d'nn théâtre.
J'ai donc considéré comme une bon-
ne fortune l'occasion 'de parcourir l'his-
toire d'une de ces vies, histoire racontée
tout simplement, avec des dates, des
noms et de brèves notices. Il s'agit des
Nouveautés (1).
En réalité, il y a eu trois théâtres de
ce nom. Le premier, bâti en 1827 place
de la Bourse, sur un des côtés du pas-
sage Feydeau, coûta près de trois mil-
lions et demi. La façade consistait en
deux ordres, l'un ionique, l'autre co-
rinthien, Composés chacun de cinq -en-
tre-colonnements, ornés de mascarorts
et de niciies contenant des bustes ou
des statues ; elle semblait mesquine en
comparaison du palais de la Bourse, au-
quel elle faisait vis-à-vis et qui l'écra-
sait. Ce théâtre fut vendu 1,100,000
francien 1832. Il fut exproprié et démo-
li en 1869, pour le percement de la rue
du 10-Décembre, aujourd'hui rue du
4-Septembre.
Son fondateur fut Cyprien Bérard,
qui avait quelque temps supplanté Dé-
saugiers au Vaudeville ; son premier
régisseur général, Saint-Léger. Au co-
mité de contentieux, je relève le nom
de M. Cochin, avocat à la Cour de cas-
sation ; au comité de lecture, les noms
de Charles Nodier, Planard, Langlois,
Riant, Puzin, Avenel, le comte de
Maillé, de Nugent, Delaforest, Amédée
Pichot, Frédéric Soulié, Couture, Geof-
froy, etc.
Il y avait 1,250 places — de 1 fr. 50 à
6 francs. Les deux premières pièces :
Quinze et Vingt Ans ou Les Femmes,
Comédie-vaudeville en deux actes de J.
Brisset, et Le Coureur de Veuves, opé-
ra du même J. Brisset, musique de
Blangini, n'eurent aucun succès ; et la
direction dut retirer cet opéra, parce
qu'elle n'avait pas le droit de donner
des partitions inédites.
Pendant toute son existence, 'du reste,
de 1827 à 1832, le théâtre des Nouveau-
tés fut maintes fois persécuté par l'Opé-
ra-Comique pour le même mot1f. On ne
badinait pas avec les privilèges, sous
Charles X, quand le comte Sosthène de
La Rochefoucauld, chargé du départe-
ment des Beaux-Arts, s'évertuait à ra-
mener à huit, comme en 1807, le nom-
bre ides théâtres dans Paris.
En cinq ans, les Nouveautés repré-
sentèrent 143 pièces-, dont un grand
nombre ne furent même pas impri-
mées. Quelle leçon 'd'humilité l'on peut
prendre en parcourant cette longue .lis-
te de comptes rendus analytiques —
tout ce qui reste d'oeuvres que leurs au-
teurs croyaient sans doute moins éphé-
teurs croyaient sans aucun doute éphé-
mères ! Ces auteurs n'étaient pourtant
point les premiers venus : les Dartois,
Rochefort, Etienne; Arago, Victor Du-
cange, Planard, Paul Duport, E. Scribe,
Ch. Desnoyer, Paul de Kock, Désau-
giers, Romieu, Frédéric Soulié, Pigault-
Lebrun, Eugène Sue, Anicef-Bourgeois.
Parmi les pièces non imprimées, trois
surtout attirent l'attention par ce qu'on
appelle aujourd'hui le « sens de l'ac-
tualité ».
L'une, intitulée Paul, drame en deux
époques, par E. Vanderbuch et de For-
(iyHistoire des-ihé'âtre»4c.Paris,: Les H0uwau-
lês, par L. Ilenr' y Loooriité. Editeur H. I>aragon,
30, rue Diuv"'™4 Paris v ,.., ,.,
ges, nous montre un jeune séminariste
qui s'offre de passer la nuit en prières
au chevet d'une jeune fille qu'on croit
morte. Singulières prières, car il viole
la jeune fille et disparaît. Heureuse-
ment, celle-ci sort de sa léthargie à
temps pour n'être pas enterrée. Et non
seulement elle ressuscite, mais, en son
sein, nait un autre être. Heureusement
encore, le séminariste, qui a pris le bon
parti de jeter sa soutane aux orties, re-
vient au bout d'un an, épouse la jeune
fille et reconnaît l'enfant qu'il avait
procréé dans d'aussi macabres circons-
tances.
La deuxième pièce, La Grippe ou le
fal à la mode, à-propos en un acte,
mêlé de couplets par Barthélémy, Ro-
che et Courtier, fut sifflée comme la pré-
cédente — mais, de plus, elle souleva
quelques applaudissements. On y voyait
l'apothicairé Dumilieu, chargé de soi-
gner la grippe dans tous les théâtres ;
il en profitait pour faire sur tous des
réflexions plus ou moins spirituelles et
obligeantes.
Enfin, devançant Chantecler que nous
ne possédons pas encore, la troisième
pièce, Les Poulets, folie-parade en un
acte par X., infligeait aux acteurs des
rôles d'animaux. MM. Armand, Laca-
ze et Montigny étaient Tribolinus le
Coq, le Chapon et Népos le Poussin ;
Mmes Clorinde et Astruc étaient la Pou-
le mouillée et la Dinde. Dans l'espoir
d'acquérir la science divinatoire, Tribo-
Inus, gardien des poulets sacrés au. pied
du Vésuve, mange les précieuses volail-
les. Il est trahi par sa femme et par son
neveu Népos, quand. Mais on n'a ja-
mais su comment cela terminait, le pu-
blic ayant fait un tel vacarme qu'on dut
baisser le rideau.
Enfin, le 16 février 1832, le dernier idi-
recteur des Nouveautés fut obligé de dé-
poser son bilan.
-: En 1827, les recettes du théâtre s'é-
taient élevées à 359,953 francs ; en .1828,
à 377, 850 francs ; en 1829, à 391,512
francs ; en 1830, à 480,843 francs ; en
1831, à 147,015 francs.
Durant trois ans, du mois de juin
1828 au mois de juin 1831, Déjazet avait
joué place de la Bourse.
Le deuxième théâtre des Nouveautés
a vécu, 60, rue du Faubourg-Saint-Mar-
tin, de 1866 à 1873. Il fut fondé par un
journaliste, Jules Rouquette. qui, qua-
tre mois plus tard, le céda à son con-
frère Eugène Hugot. Le 3 décembre, un
incendie consumait le théâtre qui fut
reconstruit en 56 jours. Cependant, dès
le mois de mai 1867, E. Hugot cédait la
direction à Mme Albine de l'Est. Celle-
ci l'abandonna à son tour, en 1869, au
vaudevilliste Adolphe Guénée. Puis, il y
eut la direction de la comtesse Lionel
de Chabriilan, auteur, actrice et ancien-
ne directrice du théâtre des Champs-
Elysées. Pendant et après la Commu-
ne, deux nouveaux directeurs se suc-
cédèrent, l'un pendant 15 jours, l'autre
pendant six mois. Enfin, Charles Cliin-
cholle, l'ancien rédacteur au Figaro, et
Arthur Chédivy luttèrent 'désespéré-
ment jusqu'en 1873. A cette époque,
Hippolyte Lemonier donna au théâtre le
nom de Délassements Comiques. Mais
le succès persista à ne point venir, et
la salle fut démolie en 1878.
Total du répertoire : 103 pièces (60
nouveautés, dont 16 imprimées, et 43
reprises, dont 3 éditées à cette occa-
iÎln)-
« Bien qu'affichant, par intervalles,
des prétentions à la littérature, dit M.
L.-Henry Lecomte, ce théâtricule, géré
par des écrivains désireux de faire un
sort à leurs ouvrages ou par des actri-
ces jalouses de la vedette, jouait d'ordi-
naire des pièces dont les journaux dé-
daignaient de donner l'analyse et que
les éditeurs se gardaient d'imprimer. »
Il est loin d'en être ainsi, on le sait,
pour le troisième théâtre des Nouveau-
tés (1878-1907) boulevard des Italiens,
fondé et gouverné par Jules Brasseur
jusqu'au mois d'octobre 1890, et dirigé
depuis par M. Henri Micheau, fils de la
direc.trice du Théâtre du Parc, à
Bruxelles.
Mais ceci n'est plus de fliistoire —
c'est de l'heure présente. Aussi me eon-
tenterai-je de vous dire que le répertoire
comptait 180 pièces au 31 décembre der-
nier.
Bien que très rapprochées de nous,
quelques-ûnes de ces pièces semblent
déjà d'un autre âge, et l'on se surprend
à rêver dans le passé en lisant les noms
des Clairvllte, des Hennequin, des Wil-
der, des Labiche, des Philippe Gille,
'des Lambert Thiboust, des Albert
Wolff, des Toché, dés Burani, des Mi-
chel Carré.
Quelle poussière de souvenirs soulè-
ve la vie d'un théâtre !
G. fie Vorney.
LES CôilLISSES DE CHAMBRES
Les chemins de fer de l'Etat
La commission parlementaire des travaux
publics s'est réunie h la Chambre pour exa-
miner le projet de loi sur le régime finan-
cier et l'organisation administrative des
chemins de fer de l'Etat.
Elle a accepté pour le futur réseau. de
l'Etat les dispositions lui donnant la person-
nalité civile et la faculté d'emprunter.
Après discussion l'article 1er a été adopté
avec une addition tendant à autoriser par
décret l'administration des chemins de fer
de l'Etal à exploiter pourMc compte de
l'Algérie et. d'es colonies.
L'article 4,qut prévoit pour le réseau rie
-l'Etat la faculté d'émettre des .obligations
amortissables, a été adopté, sauf. en ce
qui concerne la question du délai d'amortis-
smerM" qui est-réservé. -
En introduisant dans le texte du projet
de loi ces quelques dispositions de dôtal
la commission a eu pour but de reacfif
plus facilement comparables les résulta.
de l'exploitation nouvelle par FEtat et ceu }
de l'exploitation ancienne par la Corn,
gnie de l Ouest.
L'armée des Vosges
* 1 - - ;;
La Bataille de Dijon
Dès le 18 janvier, Manteuffel ooncefil
tre le 2e corps prussien — vingt-sem
mille hommes — devant Dijon ; des ré-
connaissances en force sont poussées
jusque chez l'ennemi par l'armée de
Garibaldi, le 19 janvier. C'est alors qu
le général Kettler reçoit l'ordre urgent
de s'emparer de Dijon, tandis que Ga-
ribaldi reçoit l'ordre du gouvernement
de la Défense nationale de conserver Dir
jon à tout prix. Kettler s'avance, prend
Daix et Hauteville, mais la quatrième
brigade sort de Dijon, rencontre l'enne-
mi à Messingy et le repousse du village;'
plus nombreux, il revient à la charge,
mais les francs-tireurs savoyards l'ar-
rêtent.
La bataille s'anime pendant l'après'
midi du Si janvier ; Ricciotti Garibaldi
évacue Messingy ; le centre de l'action
est alors aux positions de Talant et d^ •
Fontaine, occupées par nos troupes que
y courent de sérieux dangers. En atta-'
quant l'ennemi à sa base : la colline dei
Daix, Ricciotti Garibaldi-sauve ces posi-'
lions menacées. La 4e brigade rentre
ensuite à Dijon ; le lendemain matin,.
elle occupait les fermes d'Ahuy et des
Charmettes. Ce fut une journée calme :
l'ennemi tente mollement de s'emparer,
de Talant et de Fontaine, mais il est
violemment repoussé. #
'; "J
L'attaque de Pouilly 1 -
Nous voici au 23 janvier, la journéfe;
héroïque. Dès le matin, Kettler est en
marche vers Dijon, mais la résistance'
est vive et, pour se frayer une route, it
attaque Pouilly : quelques bâtisses si..
tuées autour d'une maison de campa-
gne, entourée de jardins et d'un pare
clos de murs, pompeusement' appelée.,
« le château de Pouilly \». Nos troupes
sont surprises au bivouac, tandis qu'el-
les préparent la soupe ; en un instant,
Pouilly est mis en état de défense ; l'en-
nemi s'empare de quelques maisons,,
mais le* « château H, fortement occupée
résiste. Les Ours 'de Nantes, embusqués
dans les bosquets, sont exterminés ; les:
francs-tireurs de Marseille, réfugiée
dans un petit enclos, sont bientôt chas-
sés. i
Neuf hommes restaient dans la maîW
son ; de l'étage supérieur, ils arrêtent
pendant une demi-heure, le mouvement
des Prussiens, qui réussirent enfin bJ
pénétrer au rez-de-chaussée et à met-
tre le feu au « château » après avoir!
commis des atrocités barbares. Devant
le débordement incessant de l'ennemi
les mobiles de Louhans se dêbandent.
une panique s'ensuit à Dijon ; l'ennemi
se croit maître de la ville, mais le vieuîr
Garibaldi a fait occuper tous les points1
vulnérables de la place.
1: JI.1
La défense de l'usine Bargy ,,:.
La 4e brigade s'avance alors sûr ta:
route de Langres ; dans la plaine lisse,,
une seule construction se dresse, c'est
l'usine Bargy. Garibaldi a vite reconnu
que c'est là la clef de Dijon, aussi chat."
ge-t-il son fils Ricciotti de la défendre à'
tout prix. L'usine est alors occupée par
les chasseurs des Alpes de Michard, lesf
chasseurs du Mont-Blanc de Tappaz et
les francs-tireurs de Vlsère de Rostaing.
Michard prépare l'usine pour une dé4
fense désespérée. Sur la route, des bat-
teries d'artillerie se sacrifient pour ga-'
gner du temps, mais l'ennemi s'avance
en chassant devant lui les mobiles de-,
bandés, et approche, divisé en trois coy
lonnes, vers l'usine Bargy ; le choc este
terrible. - 1 n
L'attaque de la première colonne est
bientôt rendue nulle par, l'installation'
défectueuse des batteries ennemies. La*
deuxième colonne — le 1er bataillon dir
61e poméranièn: est. arrêtée par le feu'f
terrible qui vient de l'usine : les hom'-'
mes doivent se coucher et se borner ifl
cribler la bâtisse de balles. La troisiè'-'
me colonne — 26 bataillon du 61e pomé-
ranien — s'avance très près de l'usine:
en suivant le lit desséché d'une rivière.'
Toute la résistance se concentre alors
dans l'usine, on barricade lès portes ;>
Michard garde le bâtiment, Ricciotti
Garibaldi la cour et ses dépendances$
la colonne approche et est décimée ; le;
drapeau, ayant à chaque instant son1-
porteur tué, passe de mains en mains.
Il disparaît sous les cadavres, sous une
grêle de balles, et dans l'obscurité
croissante des sous-officiers poméra-'
niens le cherchent. C'est peu facile.
« Jamais je n'ai contemplé un aussr
grand nombre de cadavres amoncelés
sur un petit espace », a écrit Garibaldi*.
Un brillant fait d'armes
Que se passait-il à l'usine, pendant cW
temps ? Elle est entourée de tous côtés,*
c'est la cible de tout le champ de ba-
taille, les fenêtres sans volets laissent
passer les projectiles, les nôtres ne peu"
pent plus riposter, les munitions vonfj
manquer. Ricciotti Garibaldi, désespé'-*
ré, scrute l'horizon avec sa "lorgnetteJk
cherchant du renfort.
line colonne s'avance ; à "ci n qÜà.nl" -
pas, il ne peut eneoFe reconnaître si ce
sont ides amis ou désxennemis, mais:
d'une hatriQÇ. o,n enjèye. jim &oiiSAaA
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