Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1911-01-05
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 05 janvier 1911 05 janvier 1911
Description : 1911/01/05 (N14909). 1911/01/05 (N14909).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
W° 14909. — 16 NIVOSE, AN 119. tlW CENTIMES LE NUMERO
!
JEUDI 5 JANVIER 1911. — N9 14909J
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
13, ras do Chàteau-d'Fau — pam. ;.
ISt chez MM. LAGRANGE, CBRF et O
f, pièce de la Bourset 6
Adresse Télégrapblque: XIX* stÈCLI- PARIS
ABOiVîWEMEMTS ,
(rois mois six mois on c$
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- - TRIBUNE LIBRe
.t_8 - .:" -
j^éforrrçe électorale
1
Les proportionnalistes, de-
puis la lettre que M. Briand
a adressée à la Commission du
suffrage universel, affectent
de prendre des airs triom-
phants. A les entendre, ils
sont sûrs, désormais, du succès. Ils
étaient un peu moins fiers avant d'avoir
reçu la communication du président- du
Conseil. Certains d'entre eux avouaient
même confidentiellement qu'ils avaient
perdu tout espoir. La majorité, à les en-
tendre, ministérielle avant tout, -était
prête, si le Gouvernement y paraissait
hostile, à sacrifier le principe de la
proportionnelle.
Bien que M. Briand ait fait à M. Be-
noist et à ses amis d'importantes con-
cessions, nous ne pensons pas qu'il
puisse donner son adhésion au systè-
me que présenteront ces messieurs, si
toutefois ils arrivent à se mettre d'ac-
cord.
La proportionnelle risque donc, mal-
gré fout, de ne pas être adoptée par la
Chambre, si la majorité se préoccupe
avant tout, comme on le dit, de suivre
le Gouvernement.
Est-ce à dire qu'aucune réforme ne
pourra être réalisée ? Tel n'est point, ce-
pendant, mon avis et je crois très fer-
mement que si le ministère ne peut,
après avoir affirmé ses sympathies pour
Je système majoritaire, se déjuger au
point d'adhérer au principe proportion-
nel, il lui sera tout aussi difficile de dé-
fendre le statu quo et de demander le
maintien du scrutin d'arrondissement
après lès paroles sévères prononcées à
plusieurs reprises à son endroit par M-
Briand.
Si l'on écarte ainsi la proportionnelle
telle que la conçoit M. Charles Benoist
et le scrutin d'arrondissement, force se-
ra bien d'examiner la solution qui con-
siste à adopter le scrutin de liste. Je
sais quelles objections y sont faites. Le
scrutin de liste pur et simple, dit-on,
est trop brutal. C'est le triomphe du
principe majoritaire et l'écrasement des
minorités.
L'argument est vrai si l'on ne consi-
dère qu'un seul département. Mais il
perd toute sa valeur dès. qu'on envisage
le Pays tout entier. Les conservateurs
peuvent perdre sur un point, mais com-
me ils gagnent sur un autre, il y a com-
pensation. Il en est de même pour tous
les partis.
Les députés étant ou mieux devant
être les représentants de la France, il
n'y a aucune utilité à ce que chaque
parti soit représenté dans chaque dé-
partement. Ce qui importe, c'est qu'il
le soit à la Chambre et proportionnel-
lement, ou à peu près, à sa force nu-
mérique dans le Pays. Ce résultat sera
obtenu avec le scrutin de liste, sans
qu'il soit besoin d'avoir recours à l'un
(les systèmes compliqués que préconi-
sent les -11artisans de la proportion-
nelle.
Mais, dira-t-on, dans les 'départe-
ments où l'entente ne pourra pas se
faire avant le second tour de scrutin
entre les différentes fractions du parti
républicain, ne risque-t-on pas de lais-
ser la minorité maîtresse de la situa-
tion ?
Je suis persuadé que c'est là un péril
purement imaginaire et que, partout,
l'entente se fera. Si, par impossible,
elle ne se réalisait pas dans un dépar-
tement déterminé, le fait serait telle-
ment exceptionnel qu'il ne présenterait
- aucun daiiger" De l'excès même du 'mal,
un bien pourrait résulter, et là où l'in-
discipline aurait assuré le succès de la
minorité, on peut être certain -que ce ré-
sultat, s'étant produit une première
fois, ne se renouvellerait pas.
Mais rien n'empêcherait le législateur
'de prendre des mesures pour éviter de
pareilles surprises. -
La loi pourrait décider que seules au-
raient la possibilité de rester en présen-
ce, au second tour de scrutin, les deux
listes qui auraient, au premier, obtenu
le plus de voix.
Mais cette disposition en entraînerait
fatalement une autre. Il ne faudrait
pas, en effet, par le retrait forcé d'un
certain nombre de candidats, favoriser
les marchandages et les alliances mons-
trueuses auxquelles nous avons assisté
lors des dernières élections.
Le seul moyen de les éviter, ce serait
d'imposer aux candidats de chaque lis-
te l'obligation de déposer, entre les
mains du préfet, plusieurs jours avant
le scrutin, une déclaration collective,
indiquant en faveur de quelle liste ils
comptent se désister pour le second
tour. ,', ,
Cela permettrait aux différëntés frac-
tions du parti républicain de s'entendre
à l'avance, de nouer des olliances et de
pratiquer la proportionnelle entre répu-
blicains.
Les radicaux, ayant besoin du con-
cours des socialistes, s'engageraient à
leur abandonner un nombre de sièges
égal à celui auquel ils auraient droit d'a-
près le chiffre de voix obtenu au pre-
mier tour ; les socialistes ailleurs agi-
raient de même.
Les radicaux ou les socialistes, qui
seraient tentés de reporter leurs voix
sur les réactionnaires, se mettraient
d'eux-mêmes hors du parti républicain.
L'avantage de cette solution serait de
forcer à la reconstitution du Bloc. Tous
les républicains y trouveraient un béné-
fice réel. Les électeurs seraient les pre-
miers à s'en féliciter, puisque ce serait
pour eux l'assurance que les réformes
promises seraient réalisées.
Si la majorité veut faire une réforme
électorale qui mettra la République à
l'abri des dangers que peut lui faire cou-
rir la proportionnelle et fera disparaî-
tre les multiples inconvénients du sys-
tème actuel, elle n'a qu a adopter, avec
ces quelques correctifs, le principe du
scrutin de liste.
Les républicains proportionnalistes ne
peuvent y être opposés, les partisans
du scrutin de liste y donneront certaine-
ment leur adhésion ; quant aux réac-
tionnaires, ils sont certains d'obtenir,
avec ce système, le nombre de sièges
auquel ils ont droit. Le procédé est sim-
ple, logique et équitable.- C'est malheu-
reusement plus qu'il n'en faut pour
qu'il ait contre lui la majorité et le
Gouvernement.
Alfred MASSÉ.
Député de la Nièvro.
•
LA POLITIQUE
*?♦ 0 ■->
DEBAT URCENT
Il '}'est pas possible qnc le
Parlement, au lendemain de la
rentrée, puisse différer plus
longtemps un débat sur notre
politique extérieure,* débat dont
tout le monde comprend l urgence.
Quels que soient , les scrupules des
députés et des sénateurs qui redoutent
de gêner par leur intervention faction
diplomatique du quai d'Orsay, nos ho-
norables devront, dans l'intérêt même
du poys, réclamer du ministre des Af-
faires étrangères des éclaircissements
indispensables. -
Au miHcu des polémiques de presse,
les opinions les plus diverses et les plus
contradictoires s'entrecroisent, sans fai-
l'7;-"((iJ7Jiêët, d'ailleurs, le moins du mon-
de la solution des questions que le
public se'pose.
Le premier point à élucider est celui
'de savoir ce que signifient désormais
l'Entente Cordiale et la Triple Entente.
./l]Jl'ès plusieurs années, on s'aperçoit
que le sens de ces deux mots — qui
désignaient, pensait-on, deux systèmes
diplomatiques - est vague, imprécis,
sufet à controverse.
Les affirmations de M. Lloyd George
et les dénégations du Daily News n'ont
fait qu'accentuer la nécessité d'un débat
prochain devant le Parlement français.
L'Entente Cordiale subsiste-t-elle,dans
les conditions mûmes établies par l'an-
cienne initiative d'Edouard VII, appuyé
alors par le zèle du gouvernement fran-
çais ? La triple Entente est-elle un mot.
vide ou signifie-t-elle qu'il y a un sys-
tème diplomatique européen capable de
faire contre-poids à la Triple Alliance ?
Il n'y a pas de doute que ces premiè-
res questions amèneront dans le débat
certaines questions « tusses ». Le pitbljc.
français ne peut dire tenu dans l'igno-
rance d'un changement aussi essentiel
que celui qui aurait permis à la Russie
de dégager sa frontière de - Pôlogne. -
Le Parlement doit sentir qu'il est des
aécisions de l'ordre naval et militaire
qu'il ne saurait prendre en pleine con-
naissance de cause, tant que les don-
nées — aujourd'hui insuffisantes — du
problème diplomatique n'auront pas été
précisées devant lui.
LES ON-DIT
-:. 8.-L---' ,.,
Aujourd'hui mercredi "ï
Lever du soleil : 7 h. 56 du malin.,
Coucher du soleil : 4 b. 14 du mtjn.
- Lever de la lune : 10 b. 36 du matin,
, Coucher de la lune : 8 b. 10 du matirç*
AUTREFOIS
Le Rajpel du 5 janvier 1875 1
C'est aujourd'hui qu'ont lieu les obsèques
de Ledru-Rollin. On se réunira à une heure
précise rue de Charonne, numéro 100.
— Nous apprenons avec regrèt la mort de
M. Pierre Larousse, le directeur et le prin-
cipal collaborateur du Grand Dictionnaire,
Universel. Il était né en 1817 à Toucy (Som*
me) t
AUJOURD'HUI
Les mendiant. jours de fête.
Sait-on d'où viennent tous ces mendiants
qui encombrent les mues de Pari», poureuiv
vent tes piétons de leurs supplications la-
meaiilaibles e-t se précipitent à la portière
des voitures, le jour du premier de l'An.:
Ils viennent des plus lointains pays, si
l'on en croit un homme bien placé pour. le
savoir, M. Vallet, chef de la brigade mo-
bile ;
Ils viennent de la Bretagne et de l'Espa-
gnre par trains entiers, dit-il»- et je suis pré-
cisément en train d'établir les conditions
toutes spéciales dans lesquelles ils sont re-
crutée par de véritables entrepreneurs de
la mendicité. -
Il faut croire que les bénéfices réalisés
sont considérables car étant donnés les
frais de transport d'une part et l'entretien,
si minime soit-il, des intéressés, il doit en-
core rester à ceux-oi de quoi retourner
dans leur pays avec un petit magot, après
cependant que leur imprésario a lui-même
prélevé sa commission et le rembouree-
ment de ses frais.
Il serait urgent, ajoute judicieusement
M. Vallet, que des dispositions sérieuses
soient prises pour empêcher ce honteux
trafic de l'enfance et l'exploitation de la
charité publique, au détriment- des venta-
bles pauvres qui, eux, précisément, s'abs-
tiennent bien d'étaler leur misère les jours
de fête.
La crise du français.
De M. Pierre Baudin, dans le Voltaire :
« Sans doute il eût été déplorable que
dans l'universelle ; tranquuilité du monde,
alors que la. pauvre humanité se donnait
d'un consienteanent général un jour de paix
familiale, Paris se signalât par des bagar-
res et mit de la poudre noire dans ses pa-
pillotes. a
Un bon point tout d'ahord a M. Pierre
Baudin pour sa description pompeuse d'u-
ne aicoaimae que certains ont baptisée plus
siirMplennentt IItlêvé des confiseurs Quani
à la poudre noire dans les papillotes de
Paris, c'est une image tout bonnement gé-
niale.
Plus loin.1
« H est singulier de voir plaider pour de
tels excès des hommes qui, en d'autres oc-
casions, déploient leur tonnerre contre les
vestiges de l'absolutisme et contre te droit
de grâce, notamment. »
Déployer son tonnerre est bien. Çelà fait
penser aux « p'tits vents du nord ».
Qui n'a pas son p'tit tonnerre ?
- jl*
LA N'GOKO-SANGHA
.—
Dans notre numéro du 31 décembre der-
nier, notre excellent collaborateur Ch.
Paix-Séailles demandait à M. Tardieu s'il
consentirait à publier dans le Temps le
texte intégral du télégramme adressé le 24
juillet 1906 au ministère des colonies par
'M. Gentil.
M. Tardieu vient de nous écrire pour
nous communiquer le texte intégral du té-
légramme en question, qui est ainsi
conçu ;
Brazzaville, le 24 faillcl 1906. - COLO-
NIES, Paris. — No 99. — Capiloine-Cottes
à Brazzaville me communique les renset-
gnements suivants : il a fait évacuer plus
de 35 factoreries allemandes installées en
territoire français abondamment pourvues
de marchandises ; il serait habile de la part
administration N'Goko-Sangha de racheter
toutes ces marchandises qui sont sur place
et aussi de prendre à son service nombreux
agents ou traitants qui vont se trouver
sans emploi. *
Je vous serais reconnaissant de commu-
niquer renseignements à NGolio en lui fai-
sant connaître que ce rachat ne préjudî-
cie en rien demande dommages-intérêts.
GENTIL*
M. Tardieu nous fait observer que co té-
légramme « souligne le droit de la Compa-
gnie à des dommages et intérèts. ».
Il est clair qu'il est bien qUClSlioado
dommages-intérêts, mais évidemment ces
dommages-intérêts devaient être obtenus
des Allemands, et il ne s'agit pas d'une
indemnité à réclamer à la colonie.
Ce document témoigne du reste de Ta sol-
licitude qu'a montrée l'administration pour
faciliter à la N'Goko-Sangha la défense de
ses droits et l'occupation des territoires
concédés. La société se plaint -de n'en avoir
pas eu communication. Or, la- - brochure
éditée par ses soins contient un procès-ver-
bal signé de son agent général Chaussé et
relatant une conversation, tenue en pré-
sence du gouverneur du Gabon, avec le Clir
pitaine Cottes, descendu à Libreville, un
mois après avoir vu à Brazzaville le gou-
verneur général Gentil. La société a donc
été informée de première main..
Le capitaine Cottes déclarait avoir trouvé
entre Andoutn et Mionvoui treize Euro-
péens appartenant à sept firmes alleman-
des el anglaises qu'il énumère, et leur avoir
; signifié d'avoir à évacuer le territoire Iran-
çais en leur accordant un délai d'un mois
pour rentrer leurs avances. Il avait accep-
té d'être leur intermédiaire auprès de la
N'Goko pour lui offrir le rachat de mar-
chandises et de caoutchouc dont parle.
le commissaire Gentil. « Je ne vis aucun
inconvénient, ajoute textuellement le capi-
taine Cottes, à tenir l'engagement qu'il se-
rait fait selon leur désir, le montant étant
à défalquer de l'indemnité que la N'Goko-
Sangha est en droit de réclamer pour le
préjudice causé. » El le capitaine fut mis
en possession d'un pli à ouvrir après ac-
ceptation du principe du rachat, indiquant
les endroits où se trouvait du caoutchouc
si où tes agents de la N'Golio pourraient en.
prendre possession.
Pourquoi la Société n'a-t-elle pas donné
suite à ces propositions qui mettaient en-
tre ses mains sans procès un acompte sur
l'indemnité et préjugeait la question à l'en-
contre des maisons allemandes ? Pourquoi
ses agents Chaussé et Laffon ont-ils même
refusé de monter jusqu'à la frontière avec
radministrateur Weber ? <-
En tous cas, nul ne peut contester que,
dès 1906, la Société était informée. Encore
un détail que M. Tardieu pourra vérifier.
Il existe au dossier une lettre transmet -
tant à la N'Goko-Sangha le rapport Gentil
et sur laquelle le prédécesseur de M. Mil-
JièS'-LacroÍIX a écrit : « Inutile: la Compa-
gnie est informée officieusement D.
M. André Tardieu croit devoir terminer
sa lettre — dont il ne demande pas l'in-
sertion, et il fait bien, car ses termes la
rendent ininsérablo — en déclarant qu'il
ne fera plus à M. Paix-Séailles l'honneur de
discuter avec lui.
Nous comprenons que M. André Tardieu
préfère ne pas prolonger une discussion
qui le met en cause, lui fonctionnaire de
l'Etat, dans une affaire où il a été avocat
et arbitre contre les intérêts de l'Etat.
Ce n'est d'ailleurs plus devant les seuls
lecteurs du Temps et du Rappel que la
question se trouve désormais posée. C'est
devant la Chambre et le Pays. Puissent-ils,
à l'issue d'un débat public approfondi et
complet, partager l'excellente opinion que
M. André Tardieu parait avoir de soi-
même.
P. qui la faute
0,
I..
M. Joseph Dénais critique, dans la Libre
Parole, la loi des retraites ouvrières et il
adresse ce blâme aux républicains de l'an-
cienne Chambre :
« La loi des retraites a été Melée,
parce qu'après quatre années de législatu-
re il était impossible aux députés de la
majorité de se représenter les mains vides
devant le suffrage universel. Pour cet in-
térêt personnel, mesquin, on a renouvelé
l'erreur commise déjà en maintes circons-
tances ; on a fait abstraction des réalités,
comme on avait fait pour le repos hebdo-
madaire, et, une fois de plus, d'un princi-
pe excellent, on a tiré une réalité détes-
table. »
M. Joseph Denais a mauvaise grâce à
formuler de tels reproches.
Il devrait se rappeler que si la loi a été
votée hâtivement en fin de législature, c'est
que ses amis firent traîner la discussion
par tous les moyens possibles d'obstruc-
tion. Il lui faudrait se souvenir encore que
si la loi a été sabotée au point que l'appli-
cation en est devenue, à coup sûr, assez
compliquée, c'est encore par ses bons amis
les réactionnaires du Sénat. Il serait éga-
lement bon qu'il n'oubliât pas que si les
réactionnaires de la Chambre .se montrè-
rent, en fin de compte, chauds partisans de
la réforme, ce n'est que parce qu'ils senti-
rent eux-mêmes l'impossibilité de se pré-
senter devant le corps électoral sans l'a-
voir votée. Et ce fu.t un assez joyeux spcc-
tacle de les voir approuver une loi dont ils
avaient dit autrefois tant de mal.
Celui qu'ils nous offrent aujourd'hui en
se posant en sauveurs du « prolétariat du-
pé :D. par -leurs soins, ne manque pas
non plus de gaieté 1
1>.. 1
La Foi s'en va
--:+-. - —-
A l'occasion du jour de l'an, le clergé pa-
risien a, comme il convenait, été présenter
ses vœux à son archevêque, M. Amette.
Aiprès les congratulations d'usage et l'o-
bligatoire revue de l'année, Sa Grandeur
a demandé à ses prêtres de Il prier pour le
Paipe afin que Dieu le soutienne et le pré-
serve contre les ennemis de l'Eglise ».
Il nous semble que M. Amette a manqué
de foi. Oui ou non, Pie X est-il le vicaire
du Christ ? Oui ou non, est-il le délégué de
Dieu sur te-rtre ? Si oui, on ne comprend
pas comment la protection divine pourrait
ui faire défaut ! Et s'il est vraiment déci-
dé que « les portes de l'Enfer ne prévau-
diront point contre l'Eglise »,, on ne voit
ipas bien a quoi pourront servir les prières
des curés de Paris 1
Faine recommander le Pape au Pre
Eternetli par le clergé, c'est à peu près
comme si on changeait M. Jaurès d'inter-
céder pour M. Briand près de M. Falliè-
res,
Et cclà: do-nne l'impression d'uo crédit
bien US.. -
- VARIÉTÉS -
t—— _;- -,
Veux Livres
'i' «■>««■«
■ et lyer)faqt.
Pour IJOS victlnjcs : la Feiqiqe et l'Enfant
Les Bêtes. (1)
La librairie Messein vient d'éditer deux
livres d'Urbain Gohier. Une aubaine.
Ceux qui déplorent, comme nous, de ne
plus lire dans les journaux quotidiens les
articles brillants et nerveux du mordant
polémiste, retrouveront avec plaisir dans
ceâ deux beaux livres la pensée vigoureuse
et la forme impeccable où s accuse )a per-
sonnalité sj âprement originale d'Urbain
Gobier. Gon-
Ceux qui sottement accusent Urbain Go-
hier d'un orgueil dédaigneux, qui l'isole —
à l'écart de la mêlée humaine — dans une
solitude rancunière, devront lire ces pages
sincères où la pitié émue pour les victimes
s'exprime en sarcasmes cinglants pour les
bourreaux.
Depuis vingt-cinq ans, Urbain Gohier n'a
cessé de batailler, dans le Soleil, VAurore,
le Matin, l'Intransigeant, dans les revues
et par des brochures, pour l'affranchisse-
ment de la femme et la protection de l'en-
fant. Il s'est penché aussi avec compassion
jusque sur les misères de nos « frères infé-
rieurs » les animaux, et le spectacle des
cruautés qu'ils subissent a soulevé son in-
dignation contre la barbarie des hommes.
Il faut lire les chapitres consacrés à la
Femme et à l'Enfant (Imposons le respect
de la femme française. — Le travail de la
femme. - Le droit de l'enfant. — Enfants
naturels. - Enfants martyrs, etc.), pour
avoir la conception exacte d'un féminisme
(l'aUonnel et du devoir social.
Nous faisons toutes nos réserves sur leg
conclusions d'Urbain Gohier relatives au
malthusianisme.
Mais si sa « plaidoirie par !es néo-mal-
thusiens » nous laisse incrédules et hosti-
les, en revanche ses réquisitoires contre
l'égolsme féroce et l'hypocrisie sociale des
hommes nous convainquent et nous émeu-
vent.
Il faut citer ces lignes sur le « bon fémi-
nisme » :
« Il ne s'agit pas, comme le disent les
mauvais plaisants, d'intervertir les rôles
naturels de l'homme et de la femme, de
reléguer l'homme à la cuisine ou à la nur-
sery, de confier à la femme le sceptre avec
les culottes. Il s'agit de rendre enfin jus-
tice à la femme et de lui accorder ce qui
lui est dû ; non pas des hommages poétï*
ques ou de fades galanteries, mais ce qui
lui est dû pratiquement, dans le domaioo
des intérêts matériels, soit au foyer, soit
hors du foyer.
« La femme ne perdra rien de sa grâce,
parce que sa dignité sera mieux sauveg»*-
dée ; elle aura tout autant de charme aux
yeux de l'homme devenu son égal qu'elle
en avait aux yeux d'un maître ; elle ne se
montrera ni moins aimante ni moins dé-
vouée quand elle associera volontairement
son travail ou son argent a la fortune dé
son compagnon, que quand elle était traitée
en mineure, en incapable et brutalement
dépouillée.
Ii Il y a au contraire beaucoup plus de
joie et de fierté pour un honnête homme à
conquérir une femme intelligente et libre
qu'à régner en sultan, de par les lois et les
préjugés, sur une créature ignorante ou
r-ésignée, sur la fameuse ic petite oie blan-
che n.
u .La femme française, si bien douée, si
bien équilibrée, est plus digne qu'aucune
autre de la liberté entière, de l'égalité com-
plète ; le bon féminisme consiste simple-
ment à faire consacrer par la loi ce que
tous les hommes de cœur, ayant le respect
de la femme, lui concèdent sans hésitation.
« Dans la société moderne, au regard de
la loi, le plus humble travailleur est l'égal
du plus riche financier ; -un homme vaut
un homme.
u N'est-il pas extravagant qu'une admi-
rable artiste, qu'une grande commerçante,
une directrice d'école normale ou Mme
Curie, soit privée de droits essentiels, alors
que ces droits sont la prérogative de l'hom-
me le plus ignorant ou le plus stupjde ?
Après avoir proclamé qu'un homme (vaut
un homme, il est temps de proclamer
qu'une femme, vaut un homme. »
*** •
Il faut méditer cette page, qui préface les
chapitres consacrés à l'Enfant :
« Il y a beaucoup de gens qui ne croient
pas à Jésus-Christ ; mais ils célèbrent cha-
que année avec plus ou moins de recueille-
ment, et par des pratiques plus ou moins
pieuses, la naissance de l'Enfant Jésus. Ou
cette fête de Noël, pour la masse du public,
n'a pas de sens, ou elle est la fête de l'en-
fance. Il faudrait la marquer, chaque fois,
par une ferme résolution 8e protéger l'en-
fance contre les périls et contre les souil-
lures.
« Dix affaires ignobles, succédant au cri-
me ae Soleilland et à la série de crimes
qu'a provoqués la grâce de Soleilland, dé-
couvrent les tares de notre société faisan-
dée. La recherche du plaisir est naturelle
à tout être sain ; dès que se mêle à la
jouissance un élément de perversité, de
violence, de cruauté, la folie commence à
",Z;. tI' H ——.——————
(1) Pour nos vicUmé»*fy«a J.;me et l'Enfant.
- .s. BtS.!t;()Jcr.Libr"'!l'¡e A.
Me&sèin, 19, îjsai Librairie A.
c' .: (
poindre ; l'avilissement des cœurs et le d#
traquement des cervelles se trahi-sseirt.
Alors, la puissance sociale doit intervenir
pour sauver les victimes.
« Nous n'entendons pas rendre l'ascétis-
me obligatoire ; nous comprenons Ja gaieté, •
la joie, nous absolvons certaines ivresses,
nous tolérons certains excès. Chaque indi-
vidu doit rester maître de sa destinée, sui- •
vre ses goûts, disposer de ses foi'ces, dès
qu'il est en Age de comprendre et tant qU'JI'
n'attente point à la liberté d'autrui. Nous
pouvons réprouver telles aberrations sans
nous arroger le droit de les punir. Mais il
y a quelque chose qui doit rester intact, à
l'abri de tout attentat, au-dessus de tout
conact impur : l'enfance.
Une large indulgence pour les faibles-
ses du cœur et de la chair, assurément !
Mais point de pitié pour les perversions qui
s'attaquent à l'âge sans défense.
« Les enquêtes qu'ont faites les chroni-
queurs et les informateurs découvrent Té-'
tendue du mal. Aux champs, comme à la
ville, comme à la. mer, l'enfance est aban-
donnée à l'audace des criminels et des
fous. Quand nous avons étudié 1 hygiène
de la ferme, nous avons appelé TaileUtion
sur la condition des servantes agricoles ;
que dire du sort des mousses livrés a»s
fantaisies monstrueuses d'un équipage allo-
lé d'alcool ? Il se passe, à bord des navires,
des drames sans nom, que les tribunaux
maritimes n'osent pas éclaircir ou qu'ils
sanctionnent de peines dérisoires. - Et dans
les grandes villes, nous voyons que la
chasse aux enfants est commercialement
organisée, qu'il existe de véritables mar-
chés de petites filles. Un trafic immense de
livres et de photographies obscènes exploite
comme sujet l'enfance. Les quartiers ou-
vriers sont écumés par des ogresses. La
sortie des écoles est guettée par les satyres
et par les pourvoyeuses.
« Maintenant qu'on le sait, maintenant
qu'on ne peut plus feindre de l'ignorer, que
va-t-on faire ? Quelles mesures prendre ?
« .La mère heureuse qui va border, cha-
que soir, le lit bien blanc de sa chérie',
jdans une chambrette confortable et sûre,
doit reporter sa pensée vers les soupentes
obscures, méphitiques, où des demi-douzai-
nes d'enfants des deux sexes couchent pêle-
mêle, écoutant au travers d'une cloison de
planches les bruits et les propos de la bes-
tialité déchaînée. Pour des milliers de fa-
milles, à Paris, il n'y a même qu'une
chambre commune à tous. Ah ! l'épouvante
de la femme et des filles, au retour d«'
l'homme ou des hommes que l'aleoola ren-
dus féroces, ét qu'il faut subir «n renvoyer •
à l'assommoir, aux rôdeuse qui lùi:aTT«^,
cheront ,1e pain de la semaine !.
«'La plume d'une vaillante femme, la
vieille Paule Minck avait jadis esquissé ces.
horreurs devant lesquelles s'effare no
imaginatlon de te bourgeois ». r -
« La condition de la femme dans la clause
pauvre est terrible. En la protégeant dès
l'enfance, en lui apprenant dès l'enfance
qu'elle a. droit à la protection- et que la
protection ne lui fera jamais défaut, on lui
donnera l'habitude et la volonté de se dé-
tendre. Et c'est d'abord contre son cntoura-
ge immédiat qu'il faut la défendre.
« Même les parents pauvres, surtout les
parents pauvres, ont une extraordinaire
conception de leur CI droit de propriété »
sur la personne de leurs enfants. Nulle
créature n'est la propriété d'une autre créa-
ture ; les enfants ne sont pas la chose de
leurs pères. On n'ose s'expliquer claire-
ment sur de telles matières : on répétera
que la puissance sociale, ce qu'on appelle
« gouvernement », n'a pas de tâche plus
sacrée ni de meilleure justification que la
sauvegarde des êtres faibles, incapables de
se sauver eux-mêmes.
« Dans la rue, la police peut suffire ; elle
empêchera la traite des petites filles comme1
elle empêchera le martyre des chevaux,
quand elle ne jugera pas ces tâches jnffi;
ricures a sa dignité. Dans la famille, il faut
que la société intervienne. Lit se trouve la
source du mal, qui déborde sur Ja rue. »
***
Mais nos victimes né sont pas seulement
la Femme et l'Enfant. - -
CI La barbarie, dit Urbain Goluer,s've autour de nous », et les pages admira-
bles de son plaidoyer pour les animaux se-
raient, elles aussi, à citer tout entières.
La vivisection, les courses de taureaux,
le martyre du cheval, les chiens perdus, les
pinsons aux yeux crevés, provoquent tour;
à tour la compassion émue et" la satyro
vengeresse de l'auteur.
Après avoir tracé de la vie et du carac-
tère des animaux une peinture charmante
qui égale quand elle ne dépasse pas les
meilleures descriptions de Toussai*:! -@t
d'Alexandre Dumas père, Urbain Gohier
s'écrie : « Soyez bons, c'est-à-dire soyez
justes. »
Des « faits ji, trop nombreux, hélas t
servent d'illustration impressionnante au
livre d'Urbain Gohier.
En voici un :
« Les concours de pinsons font aussi ra
musemcnt de nos concitoyens du Nord. LCJ
« pinchonneux »,. ou amateurs de
!
JEUDI 5 JANVIER 1911. — N9 14909J
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
13, ras do Chàteau-d'Fau — pam. ;.
ISt chez MM. LAGRANGE, CBRF et O
f, pièce de la Bourset 6
Adresse Télégrapblque: XIX* stÈCLI- PARIS
ABOiVîWEMEMTS ,
(rois mois six mois on c$
PéHSrr-rrrrm 8 t* il f« 29 |||
Déparlementa If. 12 f.
Union Postale 9 t. 16 f. 33
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FONDATEUR : EDMOND ABOUT
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Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
ADMINISTRATION & RÉDACTION : 53, rue du Châteêu-d'Eau : Téléphone 438-14. De 9 heures du soir à 2 heures du mutin, 123, rue Montmartre: Téléphone 143*93
- - TRIBUNE LIBRe
.t_8 - .:" -
j^éforrrçe électorale
1
Les proportionnalistes, de-
puis la lettre que M. Briand
a adressée à la Commission du
suffrage universel, affectent
de prendre des airs triom-
phants. A les entendre, ils
sont sûrs, désormais, du succès. Ils
étaient un peu moins fiers avant d'avoir
reçu la communication du président- du
Conseil. Certains d'entre eux avouaient
même confidentiellement qu'ils avaient
perdu tout espoir. La majorité, à les en-
tendre, ministérielle avant tout, -était
prête, si le Gouvernement y paraissait
hostile, à sacrifier le principe de la
proportionnelle.
Bien que M. Briand ait fait à M. Be-
noist et à ses amis d'importantes con-
cessions, nous ne pensons pas qu'il
puisse donner son adhésion au systè-
me que présenteront ces messieurs, si
toutefois ils arrivent à se mettre d'ac-
cord.
La proportionnelle risque donc, mal-
gré fout, de ne pas être adoptée par la
Chambre, si la majorité se préoccupe
avant tout, comme on le dit, de suivre
le Gouvernement.
Est-ce à dire qu'aucune réforme ne
pourra être réalisée ? Tel n'est point, ce-
pendant, mon avis et je crois très fer-
mement que si le ministère ne peut,
après avoir affirmé ses sympathies pour
Je système majoritaire, se déjuger au
point d'adhérer au principe proportion-
nel, il lui sera tout aussi difficile de dé-
fendre le statu quo et de demander le
maintien du scrutin d'arrondissement
après lès paroles sévères prononcées à
plusieurs reprises à son endroit par M-
Briand.
Si l'on écarte ainsi la proportionnelle
telle que la conçoit M. Charles Benoist
et le scrutin d'arrondissement, force se-
ra bien d'examiner la solution qui con-
siste à adopter le scrutin de liste. Je
sais quelles objections y sont faites. Le
scrutin de liste pur et simple, dit-on,
est trop brutal. C'est le triomphe du
principe majoritaire et l'écrasement des
minorités.
L'argument est vrai si l'on ne consi-
dère qu'un seul département. Mais il
perd toute sa valeur dès. qu'on envisage
le Pays tout entier. Les conservateurs
peuvent perdre sur un point, mais com-
me ils gagnent sur un autre, il y a com-
pensation. Il en est de même pour tous
les partis.
Les députés étant ou mieux devant
être les représentants de la France, il
n'y a aucune utilité à ce que chaque
parti soit représenté dans chaque dé-
partement. Ce qui importe, c'est qu'il
le soit à la Chambre et proportionnel-
lement, ou à peu près, à sa force nu-
mérique dans le Pays. Ce résultat sera
obtenu avec le scrutin de liste, sans
qu'il soit besoin d'avoir recours à l'un
(les systèmes compliqués que préconi-
sent les -11artisans de la proportion-
nelle.
Mais, dira-t-on, dans les 'départe-
ments où l'entente ne pourra pas se
faire avant le second tour de scrutin
entre les différentes fractions du parti
républicain, ne risque-t-on pas de lais-
ser la minorité maîtresse de la situa-
tion ?
Je suis persuadé que c'est là un péril
purement imaginaire et que, partout,
l'entente se fera. Si, par impossible,
elle ne se réalisait pas dans un dépar-
tement déterminé, le fait serait telle-
ment exceptionnel qu'il ne présenterait
- aucun daiiger" De l'excès même du 'mal,
un bien pourrait résulter, et là où l'in-
discipline aurait assuré le succès de la
minorité, on peut être certain -que ce ré-
sultat, s'étant produit une première
fois, ne se renouvellerait pas.
Mais rien n'empêcherait le législateur
'de prendre des mesures pour éviter de
pareilles surprises. -
La loi pourrait décider que seules au-
raient la possibilité de rester en présen-
ce, au second tour de scrutin, les deux
listes qui auraient, au premier, obtenu
le plus de voix.
Mais cette disposition en entraînerait
fatalement une autre. Il ne faudrait
pas, en effet, par le retrait forcé d'un
certain nombre de candidats, favoriser
les marchandages et les alliances mons-
trueuses auxquelles nous avons assisté
lors des dernières élections.
Le seul moyen de les éviter, ce serait
d'imposer aux candidats de chaque lis-
te l'obligation de déposer, entre les
mains du préfet, plusieurs jours avant
le scrutin, une déclaration collective,
indiquant en faveur de quelle liste ils
comptent se désister pour le second
tour. ,', ,
Cela permettrait aux différëntés frac-
tions du parti républicain de s'entendre
à l'avance, de nouer des olliances et de
pratiquer la proportionnelle entre répu-
blicains.
Les radicaux, ayant besoin du con-
cours des socialistes, s'engageraient à
leur abandonner un nombre de sièges
égal à celui auquel ils auraient droit d'a-
près le chiffre de voix obtenu au pre-
mier tour ; les socialistes ailleurs agi-
raient de même.
Les radicaux ou les socialistes, qui
seraient tentés de reporter leurs voix
sur les réactionnaires, se mettraient
d'eux-mêmes hors du parti républicain.
L'avantage de cette solution serait de
forcer à la reconstitution du Bloc. Tous
les républicains y trouveraient un béné-
fice réel. Les électeurs seraient les pre-
miers à s'en féliciter, puisque ce serait
pour eux l'assurance que les réformes
promises seraient réalisées.
Si la majorité veut faire une réforme
électorale qui mettra la République à
l'abri des dangers que peut lui faire cou-
rir la proportionnelle et fera disparaî-
tre les multiples inconvénients du sys-
tème actuel, elle n'a qu a adopter, avec
ces quelques correctifs, le principe du
scrutin de liste.
Les républicains proportionnalistes ne
peuvent y être opposés, les partisans
du scrutin de liste y donneront certaine-
ment leur adhésion ; quant aux réac-
tionnaires, ils sont certains d'obtenir,
avec ce système, le nombre de sièges
auquel ils ont droit. Le procédé est sim-
ple, logique et équitable.- C'est malheu-
reusement plus qu'il n'en faut pour
qu'il ait contre lui la majorité et le
Gouvernement.
Alfred MASSÉ.
Député de la Nièvro.
•
LA POLITIQUE
*?♦ 0 ■->
DEBAT URCENT
Il '}'est pas possible qnc le
Parlement, au lendemain de la
rentrée, puisse différer plus
longtemps un débat sur notre
politique extérieure,* débat dont
tout le monde comprend l urgence.
Quels que soient , les scrupules des
députés et des sénateurs qui redoutent
de gêner par leur intervention faction
diplomatique du quai d'Orsay, nos ho-
norables devront, dans l'intérêt même
du poys, réclamer du ministre des Af-
faires étrangères des éclaircissements
indispensables. -
Au miHcu des polémiques de presse,
les opinions les plus diverses et les plus
contradictoires s'entrecroisent, sans fai-
l'7;-"((iJ7Jiêët, d'ailleurs, le moins du mon-
de la solution des questions que le
public se'pose.
Le premier point à élucider est celui
'de savoir ce que signifient désormais
l'Entente Cordiale et la Triple Entente.
./l]Jl'ès plusieurs années, on s'aperçoit
que le sens de ces deux mots — qui
désignaient, pensait-on, deux systèmes
diplomatiques - est vague, imprécis,
sufet à controverse.
Les affirmations de M. Lloyd George
et les dénégations du Daily News n'ont
fait qu'accentuer la nécessité d'un débat
prochain devant le Parlement français.
L'Entente Cordiale subsiste-t-elle,dans
les conditions mûmes établies par l'an-
cienne initiative d'Edouard VII, appuyé
alors par le zèle du gouvernement fran-
çais ? La triple Entente est-elle un mot.
vide ou signifie-t-elle qu'il y a un sys-
tème diplomatique européen capable de
faire contre-poids à la Triple Alliance ?
Il n'y a pas de doute que ces premiè-
res questions amèneront dans le débat
certaines questions « tusses ». Le pitbljc.
français ne peut dire tenu dans l'igno-
rance d'un changement aussi essentiel
que celui qui aurait permis à la Russie
de dégager sa frontière de - Pôlogne. -
Le Parlement doit sentir qu'il est des
aécisions de l'ordre naval et militaire
qu'il ne saurait prendre en pleine con-
naissance de cause, tant que les don-
nées — aujourd'hui insuffisantes — du
problème diplomatique n'auront pas été
précisées devant lui.
LES ON-DIT
-:. 8.-L---' ,.,
Aujourd'hui mercredi "ï
Lever du soleil : 7 h. 56 du malin.,
Coucher du soleil : 4 b. 14 du mtjn.
- Lever de la lune : 10 b. 36 du matin,
, Coucher de la lune : 8 b. 10 du matirç*
AUTREFOIS
Le Rajpel du 5 janvier 1875 1
C'est aujourd'hui qu'ont lieu les obsèques
de Ledru-Rollin. On se réunira à une heure
précise rue de Charonne, numéro 100.
— Nous apprenons avec regrèt la mort de
M. Pierre Larousse, le directeur et le prin-
cipal collaborateur du Grand Dictionnaire,
Universel. Il était né en 1817 à Toucy (Som*
me) t
AUJOURD'HUI
Les mendiant. jours de fête.
Sait-on d'où viennent tous ces mendiants
qui encombrent les mues de Pari», poureuiv
vent tes piétons de leurs supplications la-
meaiilaibles e-t se précipitent à la portière
des voitures, le jour du premier de l'An.:
Ils viennent des plus lointains pays, si
l'on en croit un homme bien placé pour. le
savoir, M. Vallet, chef de la brigade mo-
bile ;
Ils viennent de la Bretagne et de l'Espa-
gnre par trains entiers, dit-il»- et je suis pré-
cisément en train d'établir les conditions
toutes spéciales dans lesquelles ils sont re-
crutée par de véritables entrepreneurs de
la mendicité. -
Il faut croire que les bénéfices réalisés
sont considérables car étant donnés les
frais de transport d'une part et l'entretien,
si minime soit-il, des intéressés, il doit en-
core rester à ceux-oi de quoi retourner
dans leur pays avec un petit magot, après
cependant que leur imprésario a lui-même
prélevé sa commission et le rembouree-
ment de ses frais.
Il serait urgent, ajoute judicieusement
M. Vallet, que des dispositions sérieuses
soient prises pour empêcher ce honteux
trafic de l'enfance et l'exploitation de la
charité publique, au détriment- des venta-
bles pauvres qui, eux, précisément, s'abs-
tiennent bien d'étaler leur misère les jours
de fête.
La crise du français.
De M. Pierre Baudin, dans le Voltaire :
« Sans doute il eût été déplorable que
dans l'universelle ; tranquuilité du monde,
alors que la. pauvre humanité se donnait
d'un consienteanent général un jour de paix
familiale, Paris se signalât par des bagar-
res et mit de la poudre noire dans ses pa-
pillotes. a
Un bon point tout d'ahord a M. Pierre
Baudin pour sa description pompeuse d'u-
ne aicoaimae que certains ont baptisée plus
siirMplennentt IItlêvé des confiseurs Quani
à la poudre noire dans les papillotes de
Paris, c'est une image tout bonnement gé-
niale.
Plus loin.1
« H est singulier de voir plaider pour de
tels excès des hommes qui, en d'autres oc-
casions, déploient leur tonnerre contre les
vestiges de l'absolutisme et contre te droit
de grâce, notamment. »
Déployer son tonnerre est bien. Çelà fait
penser aux « p'tits vents du nord ».
Qui n'a pas son p'tit tonnerre ?
- jl*
LA N'GOKO-SANGHA
.—
Dans notre numéro du 31 décembre der-
nier, notre excellent collaborateur Ch.
Paix-Séailles demandait à M. Tardieu s'il
consentirait à publier dans le Temps le
texte intégral du télégramme adressé le 24
juillet 1906 au ministère des colonies par
'M. Gentil.
M. Tardieu vient de nous écrire pour
nous communiquer le texte intégral du té-
légramme en question, qui est ainsi
conçu ;
Brazzaville, le 24 faillcl 1906. - COLO-
NIES, Paris. — No 99. — Capiloine-Cottes
à Brazzaville me communique les renset-
gnements suivants : il a fait évacuer plus
de 35 factoreries allemandes installées en
territoire français abondamment pourvues
de marchandises ; il serait habile de la part
administration N'Goko-Sangha de racheter
toutes ces marchandises qui sont sur place
et aussi de prendre à son service nombreux
agents ou traitants qui vont se trouver
sans emploi. *
Je vous serais reconnaissant de commu-
niquer renseignements à NGolio en lui fai-
sant connaître que ce rachat ne préjudî-
cie en rien demande dommages-intérêts.
GENTIL*
M. Tardieu nous fait observer que co té-
légramme « souligne le droit de la Compa-
gnie à des dommages et intérèts. ».
Il est clair qu'il est bien qUClSlioado
dommages-intérêts, mais évidemment ces
dommages-intérêts devaient être obtenus
des Allemands, et il ne s'agit pas d'une
indemnité à réclamer à la colonie.
Ce document témoigne du reste de Ta sol-
licitude qu'a montrée l'administration pour
faciliter à la N'Goko-Sangha la défense de
ses droits et l'occupation des territoires
concédés. La société se plaint -de n'en avoir
pas eu communication. Or, la- - brochure
éditée par ses soins contient un procès-ver-
bal signé de son agent général Chaussé et
relatant une conversation, tenue en pré-
sence du gouverneur du Gabon, avec le Clir
pitaine Cottes, descendu à Libreville, un
mois après avoir vu à Brazzaville le gou-
verneur général Gentil. La société a donc
été informée de première main..
Le capitaine Cottes déclarait avoir trouvé
entre Andoutn et Mionvoui treize Euro-
péens appartenant à sept firmes alleman-
des el anglaises qu'il énumère, et leur avoir
; signifié d'avoir à évacuer le territoire Iran-
çais en leur accordant un délai d'un mois
pour rentrer leurs avances. Il avait accep-
té d'être leur intermédiaire auprès de la
N'Goko pour lui offrir le rachat de mar-
chandises et de caoutchouc dont parle.
le commissaire Gentil. « Je ne vis aucun
inconvénient, ajoute textuellement le capi-
taine Cottes, à tenir l'engagement qu'il se-
rait fait selon leur désir, le montant étant
à défalquer de l'indemnité que la N'Goko-
Sangha est en droit de réclamer pour le
préjudice causé. » El le capitaine fut mis
en possession d'un pli à ouvrir après ac-
ceptation du principe du rachat, indiquant
les endroits où se trouvait du caoutchouc
si où tes agents de la N'Golio pourraient en.
prendre possession.
Pourquoi la Société n'a-t-elle pas donné
suite à ces propositions qui mettaient en-
tre ses mains sans procès un acompte sur
l'indemnité et préjugeait la question à l'en-
contre des maisons allemandes ? Pourquoi
ses agents Chaussé et Laffon ont-ils même
refusé de monter jusqu'à la frontière avec
radministrateur Weber ? <-
En tous cas, nul ne peut contester que,
dès 1906, la Société était informée. Encore
un détail que M. Tardieu pourra vérifier.
Il existe au dossier une lettre transmet -
tant à la N'Goko-Sangha le rapport Gentil
et sur laquelle le prédécesseur de M. Mil-
JièS'-LacroÍIX a écrit : « Inutile: la Compa-
gnie est informée officieusement D.
M. André Tardieu croit devoir terminer
sa lettre — dont il ne demande pas l'in-
sertion, et il fait bien, car ses termes la
rendent ininsérablo — en déclarant qu'il
ne fera plus à M. Paix-Séailles l'honneur de
discuter avec lui.
Nous comprenons que M. André Tardieu
préfère ne pas prolonger une discussion
qui le met en cause, lui fonctionnaire de
l'Etat, dans une affaire où il a été avocat
et arbitre contre les intérêts de l'Etat.
Ce n'est d'ailleurs plus devant les seuls
lecteurs du Temps et du Rappel que la
question se trouve désormais posée. C'est
devant la Chambre et le Pays. Puissent-ils,
à l'issue d'un débat public approfondi et
complet, partager l'excellente opinion que
M. André Tardieu parait avoir de soi-
même.
P. qui la faute
0,
I..
M. Joseph Dénais critique, dans la Libre
Parole, la loi des retraites ouvrières et il
adresse ce blâme aux républicains de l'an-
cienne Chambre :
« La loi des retraites a été Melée,
parce qu'après quatre années de législatu-
re il était impossible aux députés de la
majorité de se représenter les mains vides
devant le suffrage universel. Pour cet in-
térêt personnel, mesquin, on a renouvelé
l'erreur commise déjà en maintes circons-
tances ; on a fait abstraction des réalités,
comme on avait fait pour le repos hebdo-
madaire, et, une fois de plus, d'un princi-
pe excellent, on a tiré une réalité détes-
table. »
M. Joseph Denais a mauvaise grâce à
formuler de tels reproches.
Il devrait se rappeler que si la loi a été
votée hâtivement en fin de législature, c'est
que ses amis firent traîner la discussion
par tous les moyens possibles d'obstruc-
tion. Il lui faudrait se souvenir encore que
si la loi a été sabotée au point que l'appli-
cation en est devenue, à coup sûr, assez
compliquée, c'est encore par ses bons amis
les réactionnaires du Sénat. Il serait éga-
lement bon qu'il n'oubliât pas que si les
réactionnaires de la Chambre .se montrè-
rent, en fin de compte, chauds partisans de
la réforme, ce n'est que parce qu'ils senti-
rent eux-mêmes l'impossibilité de se pré-
senter devant le corps électoral sans l'a-
voir votée. Et ce fu.t un assez joyeux spcc-
tacle de les voir approuver une loi dont ils
avaient dit autrefois tant de mal.
Celui qu'ils nous offrent aujourd'hui en
se posant en sauveurs du « prolétariat du-
pé :D. par -leurs soins, ne manque pas
non plus de gaieté 1
1>.. 1
La Foi s'en va
--:+-. - —-
A l'occasion du jour de l'an, le clergé pa-
risien a, comme il convenait, été présenter
ses vœux à son archevêque, M. Amette.
Aiprès les congratulations d'usage et l'o-
bligatoire revue de l'année, Sa Grandeur
a demandé à ses prêtres de Il prier pour le
Paipe afin que Dieu le soutienne et le pré-
serve contre les ennemis de l'Eglise ».
Il nous semble que M. Amette a manqué
de foi. Oui ou non, Pie X est-il le vicaire
du Christ ? Oui ou non, est-il le délégué de
Dieu sur te-rtre ? Si oui, on ne comprend
pas comment la protection divine pourrait
ui faire défaut ! Et s'il est vraiment déci-
dé que « les portes de l'Enfer ne prévau-
diront point contre l'Eglise »,, on ne voit
ipas bien a quoi pourront servir les prières
des curés de Paris 1
Faine recommander le Pape au Pre
Eternetli par le clergé, c'est à peu près
comme si on changeait M. Jaurès d'inter-
céder pour M. Briand près de M. Falliè-
res,
Et cclà: do-nne l'impression d'uo crédit
bien US.. -
- VARIÉTÉS -
t—— _;- -,
Veux Livres
'i' «■>««■«
■ et lyer)faqt.
Pour IJOS victlnjcs : la Feiqiqe et l'Enfant
Les Bêtes. (1)
La librairie Messein vient d'éditer deux
livres d'Urbain Gohier. Une aubaine.
Ceux qui déplorent, comme nous, de ne
plus lire dans les journaux quotidiens les
articles brillants et nerveux du mordant
polémiste, retrouveront avec plaisir dans
ceâ deux beaux livres la pensée vigoureuse
et la forme impeccable où s accuse )a per-
sonnalité sj âprement originale d'Urbain
Gobier. Gon-
Ceux qui sottement accusent Urbain Go-
hier d'un orgueil dédaigneux, qui l'isole —
à l'écart de la mêlée humaine — dans une
solitude rancunière, devront lire ces pages
sincères où la pitié émue pour les victimes
s'exprime en sarcasmes cinglants pour les
bourreaux.
Depuis vingt-cinq ans, Urbain Gohier n'a
cessé de batailler, dans le Soleil, VAurore,
le Matin, l'Intransigeant, dans les revues
et par des brochures, pour l'affranchisse-
ment de la femme et la protection de l'en-
fant. Il s'est penché aussi avec compassion
jusque sur les misères de nos « frères infé-
rieurs » les animaux, et le spectacle des
cruautés qu'ils subissent a soulevé son in-
dignation contre la barbarie des hommes.
Il faut lire les chapitres consacrés à la
Femme et à l'Enfant (Imposons le respect
de la femme française. — Le travail de la
femme. - Le droit de l'enfant. — Enfants
naturels. - Enfants martyrs, etc.), pour
avoir la conception exacte d'un féminisme
(l'aUonnel et du devoir social.
Nous faisons toutes nos réserves sur leg
conclusions d'Urbain Gohier relatives au
malthusianisme.
Mais si sa « plaidoirie par !es néo-mal-
thusiens » nous laisse incrédules et hosti-
les, en revanche ses réquisitoires contre
l'égolsme féroce et l'hypocrisie sociale des
hommes nous convainquent et nous émeu-
vent.
Il faut citer ces lignes sur le « bon fémi-
nisme » :
« Il ne s'agit pas, comme le disent les
mauvais plaisants, d'intervertir les rôles
naturels de l'homme et de la femme, de
reléguer l'homme à la cuisine ou à la nur-
sery, de confier à la femme le sceptre avec
les culottes. Il s'agit de rendre enfin jus-
tice à la femme et de lui accorder ce qui
lui est dû ; non pas des hommages poétï*
ques ou de fades galanteries, mais ce qui
lui est dû pratiquement, dans le domaioo
des intérêts matériels, soit au foyer, soit
hors du foyer.
« La femme ne perdra rien de sa grâce,
parce que sa dignité sera mieux sauveg»*-
dée ; elle aura tout autant de charme aux
yeux de l'homme devenu son égal qu'elle
en avait aux yeux d'un maître ; elle ne se
montrera ni moins aimante ni moins dé-
vouée quand elle associera volontairement
son travail ou son argent a la fortune dé
son compagnon, que quand elle était traitée
en mineure, en incapable et brutalement
dépouillée.
Ii Il y a au contraire beaucoup plus de
joie et de fierté pour un honnête homme à
conquérir une femme intelligente et libre
qu'à régner en sultan, de par les lois et les
préjugés, sur une créature ignorante ou
r-ésignée, sur la fameuse ic petite oie blan-
che n.
u .La femme française, si bien douée, si
bien équilibrée, est plus digne qu'aucune
autre de la liberté entière, de l'égalité com-
plète ; le bon féminisme consiste simple-
ment à faire consacrer par la loi ce que
tous les hommes de cœur, ayant le respect
de la femme, lui concèdent sans hésitation.
« Dans la société moderne, au regard de
la loi, le plus humble travailleur est l'égal
du plus riche financier ; -un homme vaut
un homme.
u N'est-il pas extravagant qu'une admi-
rable artiste, qu'une grande commerçante,
une directrice d'école normale ou Mme
Curie, soit privée de droits essentiels, alors
que ces droits sont la prérogative de l'hom-
me le plus ignorant ou le plus stupjde ?
Après avoir proclamé qu'un homme (vaut
un homme, il est temps de proclamer
qu'une femme, vaut un homme. »
*** •
Il faut méditer cette page, qui préface les
chapitres consacrés à l'Enfant :
« Il y a beaucoup de gens qui ne croient
pas à Jésus-Christ ; mais ils célèbrent cha-
que année avec plus ou moins de recueille-
ment, et par des pratiques plus ou moins
pieuses, la naissance de l'Enfant Jésus. Ou
cette fête de Noël, pour la masse du public,
n'a pas de sens, ou elle est la fête de l'en-
fance. Il faudrait la marquer, chaque fois,
par une ferme résolution 8e protéger l'en-
fance contre les périls et contre les souil-
lures.
« Dix affaires ignobles, succédant au cri-
me ae Soleilland et à la série de crimes
qu'a provoqués la grâce de Soleilland, dé-
couvrent les tares de notre société faisan-
dée. La recherche du plaisir est naturelle
à tout être sain ; dès que se mêle à la
jouissance un élément de perversité, de
violence, de cruauté, la folie commence à
",Z;. tI' H ——.——————
(1) Pour nos vicUmé»*fy«a J.;me et l'Enfant.
- .s. BtS.!t;()Jcr.Libr"'!l'¡e A.
Me&sèin, 19, îjsai Librairie A.
c' .: (
poindre ; l'avilissement des cœurs et le d#
traquement des cervelles se trahi-sseirt.
Alors, la puissance sociale doit intervenir
pour sauver les victimes.
« Nous n'entendons pas rendre l'ascétis-
me obligatoire ; nous comprenons Ja gaieté, •
la joie, nous absolvons certaines ivresses,
nous tolérons certains excès. Chaque indi-
vidu doit rester maître de sa destinée, sui- •
vre ses goûts, disposer de ses foi'ces, dès
qu'il est en Age de comprendre et tant qU'JI'
n'attente point à la liberté d'autrui. Nous
pouvons réprouver telles aberrations sans
nous arroger le droit de les punir. Mais il
y a quelque chose qui doit rester intact, à
l'abri de tout attentat, au-dessus de tout
conact impur : l'enfance.
Une large indulgence pour les faibles-
ses du cœur et de la chair, assurément !
Mais point de pitié pour les perversions qui
s'attaquent à l'âge sans défense.
« Les enquêtes qu'ont faites les chroni-
queurs et les informateurs découvrent Té-'
tendue du mal. Aux champs, comme à la
ville, comme à la. mer, l'enfance est aban-
donnée à l'audace des criminels et des
fous. Quand nous avons étudié 1 hygiène
de la ferme, nous avons appelé TaileUtion
sur la condition des servantes agricoles ;
que dire du sort des mousses livrés a»s
fantaisies monstrueuses d'un équipage allo-
lé d'alcool ? Il se passe, à bord des navires,
des drames sans nom, que les tribunaux
maritimes n'osent pas éclaircir ou qu'ils
sanctionnent de peines dérisoires. - Et dans
les grandes villes, nous voyons que la
chasse aux enfants est commercialement
organisée, qu'il existe de véritables mar-
chés de petites filles. Un trafic immense de
livres et de photographies obscènes exploite
comme sujet l'enfance. Les quartiers ou-
vriers sont écumés par des ogresses. La
sortie des écoles est guettée par les satyres
et par les pourvoyeuses.
« Maintenant qu'on le sait, maintenant
qu'on ne peut plus feindre de l'ignorer, que
va-t-on faire ? Quelles mesures prendre ?
« .La mère heureuse qui va border, cha-
que soir, le lit bien blanc de sa chérie',
jdans une chambrette confortable et sûre,
doit reporter sa pensée vers les soupentes
obscures, méphitiques, où des demi-douzai-
nes d'enfants des deux sexes couchent pêle-
mêle, écoutant au travers d'une cloison de
planches les bruits et les propos de la bes-
tialité déchaînée. Pour des milliers de fa-
milles, à Paris, il n'y a même qu'une
chambre commune à tous. Ah ! l'épouvante
de la femme et des filles, au retour d«'
l'homme ou des hommes que l'aleoola ren-
dus féroces, ét qu'il faut subir «n renvoyer •
à l'assommoir, aux rôdeuse qui lùi:aTT«^,
cheront ,1e pain de la semaine !.
«'La plume d'une vaillante femme, la
vieille Paule Minck avait jadis esquissé ces.
horreurs devant lesquelles s'effare no
imaginatlon de te bourgeois ». r -
« La condition de la femme dans la clause
pauvre est terrible. En la protégeant dès
l'enfance, en lui apprenant dès l'enfance
qu'elle a. droit à la protection- et que la
protection ne lui fera jamais défaut, on lui
donnera l'habitude et la volonté de se dé-
tendre. Et c'est d'abord contre son cntoura-
ge immédiat qu'il faut la défendre.
« Même les parents pauvres, surtout les
parents pauvres, ont une extraordinaire
conception de leur CI droit de propriété »
sur la personne de leurs enfants. Nulle
créature n'est la propriété d'une autre créa-
ture ; les enfants ne sont pas la chose de
leurs pères. On n'ose s'expliquer claire-
ment sur de telles matières : on répétera
que la puissance sociale, ce qu'on appelle
« gouvernement », n'a pas de tâche plus
sacrée ni de meilleure justification que la
sauvegarde des êtres faibles, incapables de
se sauver eux-mêmes.
« Dans la rue, la police peut suffire ; elle
empêchera la traite des petites filles comme1
elle empêchera le martyre des chevaux,
quand elle ne jugera pas ces tâches jnffi;
ricures a sa dignité. Dans la famille, il faut
que la société intervienne. Lit se trouve la
source du mal, qui déborde sur Ja rue. »
***
Mais nos victimes né sont pas seulement
la Femme et l'Enfant. - -
CI La barbarie, dit Urbain Goluer,s've autour de nous », et les pages admira-
bles de son plaidoyer pour les animaux se-
raient, elles aussi, à citer tout entières.
La vivisection, les courses de taureaux,
le martyre du cheval, les chiens perdus, les
pinsons aux yeux crevés, provoquent tour;
à tour la compassion émue et" la satyro
vengeresse de l'auteur.
Après avoir tracé de la vie et du carac-
tère des animaux une peinture charmante
qui égale quand elle ne dépasse pas les
meilleures descriptions de Toussai*:! -@t
d'Alexandre Dumas père, Urbain Gohier
s'écrie : « Soyez bons, c'est-à-dire soyez
justes. »
Des « faits ji, trop nombreux, hélas t
servent d'illustration impressionnante au
livre d'Urbain Gohier.
En voici un :
« Les concours de pinsons font aussi ra
musemcnt de nos concitoyens du Nord. LCJ
« pinchonneux »,. ou amateurs de
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