Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-05-25
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 25 mai 1906 25 mai 1906
Description : 1906/05/25 (N13223). 1906/05/25 (N13223).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 29/04/2013
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LES RBFORMES
On n'avait jamais vu une Chambré
comptant autant de républicains que
celle qui provient des dernières élec-
tions: 411 députés des groupes de gau-
che constituent ce qu'on appelle le Bloc,
plus 80 progressistes. C'est dire qu'il
est impossible désormais de discuter
le régime républicain. C'est dire aussi
que le pays a le droit d'exiger les ré-
formes qui lui sont promises depuis si
longtemps.
Des réformes ! tout le monde en
parle. Le gouvernement, lui-même en
net sur le chantier : Il supprime la
moitié des sous-préfets pour faire de
ia décentralisation.
Très bien, j'applaudis de cœur à la
disparition des fonctionnaires inutiles,
parce que nous avons le télégraphe et
les téléphones, dont ne disposait pas
le premier Empire. Mais pourquoi
d'abord ne diminuer le nombre des
sous-préfets que dans la proportion
de 50 010? On va provoquer beaucoup
de mécontentements. Combien de pe-
tites villes et combien de députés re-
Drésentant ces mêmes petites villes
seront furieux de la Capitis diminutio
qui les atteindra? Une petite ville,
sous-préfecture durant un siècle et
devenant subitement un simple chef-
lieu de canton 1 Quelle déchéance! et
quels embarras pour le gouvernement
à propos des choix à faire pour se
maintenir dans la limite des crédits !
Ne vaudrait-il pas mieux supprimer
tous les sous-préfets ?
En second lieu, je me permettrai
de faire rémarquer que ce n'est pas
une œuvre de décentralisation que la
suppression de la moitié, même de la
totalité des sous-préfets. C'est au con-
traire, une mesure de centralisation
outrancière. Le préfet d'un départe-
ment se verra obligé de veiller à tou-
tes les affaires politiques du canton, de
toute sa circonscription. Il contrôlera
donc tout. En réalité, c'est la centra-
lisation départementale à la base de la
centralisation étatiste qu'on va créer
pour rendre celle-ci plus forte. La dé-
centralisation ne pouvait avoir lieu, à
ce point de vue, qu'à la condition
d'élargir les attributions des sous-
préfets et de réduire celles des pré-
fets.
N'invoquons donc pas, dans cette
matière, la décentralisation, un bien
grand mot du reste, et disons simple-
ment que le gouvernement veut réa-
liser une économie budjétaire tout à
fait souhaitable.
***
A moins que—c'est ce que je crois
savoir, et, dans ce cas, j'en félicite le
gouvernement — M. Clemenceau ne
veuille poser ainsi la question de
la substitution du scrutin de liste avec
la représentation proportionnelle au
scrutin d'arrondissement, qui a fait
son temps et dont les inconvénients
s'accusent de plus en plus regrettables
à chaque élection générale.
Il n'est personne à cette heure, qui
n'admette le scrutin de liste avec la
représentation proportionnelle. Cha-
que représentant serait ainsi délivré
de cette sorte de domesticité qui pèse
sur lui. On aurait une expression plus
exacte de la volonté du suffrage uni-
versel. On pourrait se livrer aux rê-
ves d'avenir et aux réformes de longue
haleine, renoncera peupler l'adminis-
tration de nouveaux parasites, songer
davantage aux intérêts généraux du
pays.
Il paraît que le gouvernement ne
serait pas éloigné de faire voter cette
grosse réforme. Il le peut, s'il le veut.
Et pourquoi ne le voudrait-il pas ? Est-
ce que la forme du gouvernement ré-
publicain est menacée?
Si M. Clemenceau n'hésite pas à sai-
sir la Chambre d'un projet de loi dans
ce sens, si surtout il admet en même
temps que le vote de chaque citoyen
doive être exprimé, pour être sincère,
avec un bulletin dissimulé sous enve-
loppe, il aura rendu à la République
le plus signalé des services.
.**
Je sais, d'ailleurs, qu'il est de ceux
qui ne veulent pas qu'on continue à
parler de curés, de moines et de reli-
gieuses. Pour lui, la politique anti-
cléricale a fait son temps. C'est la po-
litique des réformes sociales qui doit
lui succéder. Mais cette politique doit
être en même temps une politique* de
défense de la liberté et de la pro-
priété.
Sans liberté individuelle,pas de pro-
priété individuelle et réciproquement.
Donc, guerre au collectivisme révo-
lutionnaire qui menace la liberté et la
propriété, guerre aussi à la réaction
qui voudrait porter une main ! crimi-
nelle sur les conquêtes de la démocra-
tie. « Ni réaction, ni révolution »,
qes ce pas le programme de M,
Clémenceau comme ça été toujours le
nôtrç ?
Ce n'est guère un moyen efficace de
ruiner les espérances des collectivis-
tes que celui qui consiste à faire chorus
avec eux. Il faut opposer à leurs doc-
trines des réformes immédiates qui
donneront satisfaction aux popula-
tions : la caisse des retraites, le dé-
grèvement de la taxe avec l'impôt
sur le revenu par exemple.
Nous avons, dans le parti radical,
promis, depuis tant d'années, ces deux
réformes que nous devons les faire, si
nous ne voulons pas voir proclamer
par d'autres - par les collectivistes —
la faillite de notre programme. La
majorité énorme qui siégera dans
la nouvelle Chambre — tellement
énorme qu'elle n'a pour ainsi dire au-
cune opposition en face d'elle — a le
devoir de se préoccuper de trouver
les ressources nécessaires à la créa-
tion de la Caisse des retraites ainsi que
de voter un projet d'impôt sur le re-
venu qui atteigne vraiment son but.
Nous n'avons pas à examiner les
difficultés possibles. On a promis, on
doit tenir. Rien ne peut, d'ailleurs,
dans cet ordre d'idées, stériliser les
bonnes volontés de 411 députés répu-
blicains élus pour réaliser desréformes.
Pour nous,—c'est ce que nous n'avons
cessé de faire du reste — nous don-
nerons notre concours le plus entier
aux républicains qui voudront entrer
dans la voie des réformes sociales,
mais à la condition, bien entendu, que
ces réformes n'entraînent pas la ruine
du pays et soient profitables à la masse
des électeurs. -
CHARLES BOS.
LES ON-DIT
IBSEN
Une dépêche, dans la soirée,
nous a brusquement, brutale-
ment, appris la mort d'Henrick
Ibsen. Il était presque octogé-
naire ; depuis plusieurs années,
sa production dramatique s'était
ralentie, au point de sembler à peu près
arrêtée, et la triste nouvelle qui nous arrive
aujourd'hui était prévue depuis long-
temps.
La mort du grand dramaturge norwé-
gien n'en causera pas moins de douleur
à ceux qui ont suivi passionnément le
mouvement littéraire de ces quinze ou vingt
dernières années.
Ibsen a été le prophète de toute une gé-
nération d'artistes, de poètes et de philo-
sophes dont la vertu était d'avoir confiance
dans l'homme ; ils croyaient que l'homme
était assez grand pour avoir droit à la li-
berté.
L'amour optimiste de la liberté illumine
l'œuvre d'Ibsen.
Les conventions sociales, l'hypocrisie
bourgeoise, l'égoïsme stérile, la tyrannie
stupide des foules : telles étaient ses enne-
mies. Il les combattait sans trêve, et leur
opposait un individualisme sain et —qu'on
me passe le mot — solidariste.
Cette manière de penser n'est plus
que celle d'une minorité à l'heure actuelle.
Ibsen n'est plus « l'homme du jour ». Mais
il est peut-être l'homme de demain, parce
que les problèmes dont il devait super-
bement poser les termes devront être réso-
lus — et qu'on ne leur voit pas d'autre
solution possible que la liberté.
NOTRE VIEUX MATÉRIEL EN CHINE
Une des conclusions des diverses mis-
sions chinoises qui ont étudié les moyens
d'action de la civilisation occidentale dans
ces derniers temps est quele Céleste Empire
n'est pas prêt à bénéficier immédiatement
des inventions modernes. Il faut le concours
du temps. Ainsi, on a remarqué que le bas
prix de la main d'œuvre et l'attachement
aux habitudes surannées exigeaient une
adaptation très lente du machinisme agri-
cole. Le vieux matériel d'il y a vingt ou
trente ans suffit aux besoins actuels. Aussi
fait-il prime en Chine et les Américains
ont été les premiers, avec leur praticisme
résolu, à exporter en Mandchourie leurs
instruments démodés. Cet exemple ne
manquera pas d'être imité. Bon nombre de
nos industriels se sont déjà préoccupés de
la question, quoique un peu tard. Lesfon
deriesdes Chinois ne travaillent pas encore
le fer et leurs forgerons utilisent les vieux
débris dans leur façonnage primitif. Il y a
là un débouché intéressant.
ON IGNORE M. FALLIERES EN ALGÉRIE
Croiriez-vous qu'il y a des gens, sur le
territoire français, qui n'ont pas encore
appris l'élévation de M. Fallières à la pré-
sidence de la République ? Que dis-je? Il
en est qui ignorent même, que la France
est en République. Ils ont dormi pendant
de longues années, comme la Belle au
Bois. Un de nos amis, M. C. L., un man-
darin lettré qui nous en voudrait de di-
vulguer son nom, pourtant bien connu, à
utilisé le temps des grèves, des élections et
des cerises à parcourir l'Algérie. Il a poussé
accompagné de sa charmante femme, jus-
qu'aux portes du désert et peut-être nous
donnera-t-il prochainement le résultat de
ses observations en un substantiel et pit-
toresque récit. A El Kantara, il a rencon-
tré, paraît-il, un vénérable hadji à la barbe
de neige qui lui a demandé des nouvelles
du sultan Napoléoune.
— Napoléon III ? Mais il est mort, mon
brave.
Tout de suite, le fils des grandes Tentes
s'est étonné. Comment, l'Empereur est
mort? Ce n'est pas possible, on l'aurait
su. M. C. L. expliqua alors qua Napoléon
était mort en exil après avoir vainMi
par l'Allemagne et que la République avait
remplaoé l'empire depuis 1870.
L'Arabe n'en revenait pas. 11levait les
jûrafcir«ajuste dip, je MOunet-Saji^
Ah bien, c'était la fin de la fin, cela! Les
Français n'avaient plus de sultan 1 Il avait
vu Napoléon en Algérie, Napoléon avait
ordonné du lait aux musulmans, une ra-
tion de vin aux soldats. C'est égal, il con-
servait de la méfiance. A l'instar du gro-
gnard de Charlet, il se serait écrié volon-
tiers : lui mort? on voit bien que vous ne
le connaissez pas 1
En voilà un que les élections ne trou-
blent pas 1
Le Passant.
MORT D'HENRIK IBSEN
Henrik Ibsen est mort hier à 2 h. Ii2 à
Christiania (Norvège), telle est la nouvelle qui
vient de nous parvenir par un télégramme
bref et laconique. Cette mort est un deuil
pour la littérature de tous les pays.
La vie et l'œuvre d'Ibsen
Henrik Ibsen était né à Skajen (d'autres
écrivent Skien), le 20 mars 1828, non d'une
famille indigène, mais d'une branche de ma-
rins écossais qui s'était implantée sur le sol
norvégien.
Le « grand Lion », comme l'ont appelé ses
compatriotes, eut une jeunesse douloureuse,
des débuts pénibles.
La vocation des lettres se dessina en lui très
tôt, impérieuse, exclusive. Né dans une famille
heureuse et aisée, il s'y fut livré sans obsta-
cles, si des revers de fortune n'avaient tout à
coup frappé les siens. Aussi connut-il, dès
l'âge où la vie s'annonce radieuse et toute
fraîche d'espoirs enthousiastes, la désillusion
des rêves brisés.
Il fut contraint de choisir une profession
libérale et opta pour la pharmacie et la mé-
decine, mais à contre coeur, dans l'idée bien
arrêtée de s'évader aussitôt que les hasards
de l'existence lui seraient enfin favorables.
C'est dans le petit port de Grimstadt qu'il
exerça ce métier : il avait alors seize ans.
L'officine où il manipula les simples et pré-
para les médicaments existe toujours. En cette
Bourgade paisible et triste, tapie aux pieds
des montagnes dans le fond de son fjord que
découpent les flots bleus, son esprit profond,
replié au fond de lui-même — car l'homme
insociable et silencieux ne livra jamais le se-
cret de sa pensée, dut commencer dés cette
époque l'œuvre de gestation colossale qui de-
vait produire les chefs-d'œuvres futurs.
Ses études médicales interrompaient à peine
ses rêveries. If remplissaient machinalemens.
dans les banalités de son existence, la tâche
quotidienne, — mais il allait d'un effort con-
tinu vers son but at vers son idéal, sombre
philosophe dédaigneux des joies de ses frères
entrevoyait dans la mêlée obscure des
nuées le point de lumière sur lequel se gui-
dait le clairvoyant aveugle — Homère,
Il avait écrit à Grimstadt son premier
drame : Catilina. Puis il revint à Christiania,
y reprit ses études, donna des leçons pour vi-
vre et mal satisfait de sa première œuvre, re-
mit sur le chantier la plupart des scènes. Ce-
pendant la pièce ne fut pas représentée. Elle
parut en volume ainsi que les deux tragé-
dies qui suivirent : les critiques littéraires
firent à l'auteur dramatique impuissant à se
faire jouer encore l'aumône d'une appréciation
favorable.
De cette époque datent ses premières rela-
tion avec Vinje et avec Bjœrstjœrne Bjora-
son, le futur rival qui devait Marcaer en sens
contraire sur le même chemin de gloire et
soulever contre les doctrines du maitre ua
autre courant d'opinion.
Il s'essaya un peu en compagnie de Vingo
et de Botten Hansen au journalisme pamphlé-
taire et satirique, dans VAndhrimmer, cette
petite feuille de bataille d'où s'envolèrent tant
de strophes gonflées d'un souffle puissant,
Et puis las d'écrire des actes qui semblaient
ne devoir jamais vivre au fou de la rampe,
Henrik Ibsen accepta de mettre en scène les
actes de ses confrères plus heureux. Il fnt,sar
l'offre d'Ole Bull, directeur de théâtre à Ber-
gen d'abord, à Christiana ensuite, en 1851.
Le métier d'imprésario ne lui réussit guère.
Bientôt il lâchait son entreprise comme il
avait abandonné la médecine et le journa-
lisme, dégoûté des besognes matérielles et des
calculs médiocres, retournant à sa misère,
dédaigneux, à sa mansarde dorée de songes.
Mais entre temps il s'était marié, il avait
un fils.
Sasauvagerie bourrue s'accommodait mal au
caractère de sa compagne, L'l pauvreté n'était
pas pour rapprocher les deux époux que tant
de mésintelligences divisaient déjà. Et Ibsen,
plus sombre que jamais, se renferma dans
cette bouderie farouche devenue légendaire,
où se confondent sans doute avec les pre-
mières désillusions de la vie, la mysoginio du
mari déçu et les rancœurs de l'écrivain dont
l'épanouissement de génie seul brisa les obs-
tacles accumulés au début de sa carrière par
l'hostilité des uns et la bêtise des autres.
j £ Ce fut vers 36 ans qu'il connut la douceur
de l'existence assurée et de la possibilité de
se livrer tout entier à l'œuvre entreprise. Une
subvention littéraire lui assura la liberté de
travail. Alors il voyagea ; mûrit ses ouvrages
sous des cieux différents,des soleilsnouveaux.
Il s'éloigna des neiges de sa Norvège, sé-
journa en Italie, en Allemagne, en Espagne,
datant de capitales en capitales chacun de
ces drames qui apportaient à la patrie loin-
taine la saine et vigoureuse pensée de l'exilé.
Il s'isolait mieux dans ces voyages ; il trou-
vait au milieu des nations étrangères, parmi
ces peuples qui ne parlaient point sa langue,
et dont il ne cherchait pas à s'assimiler l'es-
prit, une force créatrice plus considérable,
une concentration plus puissante de ses idées
et de son génie.
Dans la Maison de Poupée, il a fait le pro-
cès du mariage contemporain ; dans les Sou-
tiens de la Société, il a dénoncé la maladie
mortelle du monde moderne, l'hypocrisie ;
dans les Revenants, il n'a pas refusé de voir
les tares physiques des races d'aujourd'hui ;
dans l'Ennemi du Peuple, il a accepté ce
« postulat » que les foules commettent par-
fois leurs crimes, comme Ijs aristocrates ;
dans Solness le Constructeur, il n'a pas hésité
même à avouer ses suspicions en ce qui con.
cerne l'individualisme du jour et l'orgueil,
son corolaire ; mais, par une suite de com-
mentaire, par des campagnes très importan-
tes menées parallèlement à son théâtre, Hen-
rik Ibsen a fait comprendre à quel idéal il a
a comparé l'organisation actuelle de la so-
ciété, et, à côté du péril qu'il a dénoncé, il a
montré, bon médecin, le remède.
Ce remède, il est — cette philosophie, au
fond, est éternelle — dans le respect de la
poussée des instincts de l'homme, joint au
respect encore plus important des droits d'au-
trui ; en deux mots, le théâtre d'Ibsen peut se
résumer.: Devoir et Indulgence.
C'est bien simple ; si simple, que tels des
amj s, et-tels des ennemis d'Henrik Ibsen ne
le vendraient pas croiro; mais, avec Ibsen
lui meme, nous crayons profondément que son
~lii1PIJt: et? Bona ft&atoas, ge«iale-
meut naïve. Son oeuvre est une œuvre colos-
sale.
Quand il ont en partie achevé le lourd pro-
gramme qu'il s'était imposé en quittant la
terre natale, il revint s'y fixer en 1881. L'exode
avait duré 27 ans.
Cependant il n'a pas considéré sa tâche
comme terminée.
L'âge, qui semblait n'avoir pas de prise sur
cette tête où les cheveux s'ébouriffaient en
neige blanche, où la barbe hirsute mangeait
les traits, où sous le front démesuré les yeux
avaient le candide azur des prunelles d'en-
fants; n'avait pas affaibli ce cerveau robuste
où l'intelligence poursuivait mathématique-
ment son évolution.
Chaque année voyait éclore l'œuvre nou-
velle.
Chaqua automne l'éditeur du grand drama-
turge recevait le manuscrit racopié tout en-
tier de la main de l'écrivain.
Enfermé dans sa calme retraite de Victoria
Terrasse, avec, sous les yeux le spectacle de
la grande cité norwégienne se déroulant à
l'horizon, Hen rick Ibsen méditait et travaillait.
Sa porte était close; les lettres restaient la plu-
part du temps sans réponse. Impassible, il
semblait s'être volontairement retranché du
monde, et son mutisme décourageait les in-
terviews las plus audacieuses. Là-bas d'ail-
leurs on 19 savait, et l'on respectait la sau-
vagerie du vieux maître, vivant sans amis
presque, recevant seulement le dimanche son
fils, le professeur Sigurd Ibsen, directeur de
la revue Le Sonneur (Ringeren) et la femme
de celui-ci, la propre fille de son rival
Bjœrnson.
Matin et soir, il sortait de sa retraite, se
rendait au grand café de Christiana, où à
l'écart, sa table était réservée, parcourait les
gazettes, et vidait sa chope et son verre d'eau-
de-vie.
Puis il regagnait son cabinet de travail et
dans la rue les passants avec une curiosité
respectueuse se retournaient quand passait
le vieux solitaire appuyé sur l'inséparable
parapluie, coiffé du large chapeau d'où s'é-
chappaient les flocons de cheveux blancs, —
le a grand Lion » dont le génie a remué l'an-
tique société, celui qui a pu dire ce mot et le
prouver : « L'homme le plus seul est le plus
fort. »
Henrick Ibsen a eu la magnifique vieillesse
de ces écrivains que la gloire et la mort sur-
prehnent à leur table de travail : il ne semble
pas que la fatigue ait jamais pesé sur le dra-
maturge, et le Jean-Gabriel Borkmann, qui
date de 1897 met Henrick Ibsen au rang des
Sophocle et des Hugo, des génies que l'âge
semble grandir d'année en année, et qui ne
veulent connaître, après la jeunesse, qu'une
maturité toujours plus flurissante.
Qui n'a pas présentes à la mémoire les fêtes
magnifiques qui furent organisées dans toute
l'Europe, avec un respectueux enthousiasma
pour les 70 ans du maigre, en 1998,
Ibsen avait 78 ans. Il meurt, m iisil de-
meurera immortel et son œuvre lui survivra
et sa gloire grandira encore: avec le temps.
- dm
PREMIÈRES RÉFORMES
Nous recevons la lettre intéressante que voioi :
21 mai 1006
Monsieur le Rédacteur en chef,
Permettez, s'il vous plaît, à un lecteur as
sLlu du Rappel quelque réflexions sur l'ex-
cellent article de M. Louis Martin, paru le 20,
sous la titre de « Premières réformes » qui
sont les réformes électorales.
H est évident que nous n'aurons dans sa
complète réalité la République, c'est-à-dire le
gouvernement de tous, par tous et pour tous,
que nous ne serons vraiment en démocratie,
ce qui signifia le gouvernement exercé, avec
une délégation nécessaire, par le peuple même
que lorsque le peuple tout entier participera
à l'exercice du pouvoir par une représentation
intégrale.
Aujourd'hui c'est une majorité qui l'exerce
seule, à l'exclusion et, souvent, au préjudice
d'une minorité équivalant presque à moitié
de la nation. La République actuelle est donc
plutôt oligarchique que démocratique dans le
sens étymologique et réel de ce dernier
terme.
Il serait curieux de mettre en regard la
proportion des suffrages qui viennent d'être
exprimés en faveur de telle et telle opinion
et celle des représentants de ces opinions
appelés à siéger dans la nouvelle Chambre.
Il est probable que celle-ci ne paraîtrait pas
limage fidèle du pays.
Oui, la première réforme à faire, la plus
démocratique, la plus républicaine, c'est l'a-
doption du scrutin de liste, avec représenta-
tion proportionnelle des minorités, comme on
l'a organisé depuis 15 ou 20 ans, pour le
grand bien de l'apaisement des partis, dans
plusieurs cantons suisses.
La logique voudrait qu'aussitôt cette ré-
forme adoptée la Chambre, image imparfaite
du pays, fût dissoute par le Président de la
République, pour faire place à une Chambra
plus exactement démocratique, mais. mais.
En attendant, — et voici le but principal de
ma lettre, — ne pensez-vous pas qu'il fau-
drait, en même temps qu'on accomplira cettd
réforme capitale pour la Chambre, la rendre
applicable aussi et immédiatement, aux Con-
seils municipaux ?
Les mêmes avantages la font désirer égale-
ment.
Veuillez agréer, monsieur le Rédacteur en
chef, l'expression de mes sentiments Jés plus
distingués et dévoués.
DERIÏAT
LE POURBOIRE PU GRAND-nue
(De notne correspondant particulier)
Cologne, 23 mai.
La grande exposition des Arts allemands,
organisée avec le patronage du grand-duc de
Hesse, a été récemment inaugurée par un
banquet splendide que le grand-duc présida.
Les nombreux convives illustres étaient très
satisfaits, mais les garçons qui servaient à
table l'étaient moins. Ils n'ont pas eu un cen-
time de pourboire, car aucun des convives ne
pensait à eux.
Ils ont donc adressé une demanda à cha-
cun rappelant que leur unique ressource était
le pourboire. Le grand-duc a répondu par un
refus net, disant que Cologne est pour lui une
ville étrangère et qu'il a des devoirs d'abord
envers les gens de son pays. Les autres invie
tes n'ont pas été plus accueillants que,ls
grand-duc, seulement ils ont invoqué d'autre-
raisons notamment l'exemple donné par le
grand-duc.
En Haïti
Des délais étant nécessaires au gouverne-
ment baftien pour arrêter les mesures ÇiyJuI
permettraient de négocier et conclure avec le
gouvernement de la .République française une
nouvelle convention commerciale destinée à
remplacer celle du 31 juillet 1900, les deux
gouvernements sont tombés d'accord pour
proroger provisoirement la convention exis-
tante jusqu'au 30 octobre 1906.
Washington, 22 mai.
Le département d'Etat est informé qu'on
embarque des munitions, dans une des An-
tilles anglaises, pour Haïti et que les chefs
d'une expédition cuntre Saint-Domingue,
s'embarqueront à Porto-Rico la semaine pro-
chaine.
CHRONIQUE
Le Taureau électoral
Le comte Du Gazon est un des rares
élus de la droite. Il descend des croisés par
la Grande Armée, dont son arrière grand-
père fournissait les fourrages. Allié, cela
va sans dire, aux plus illustres familles
militaires, aux Aquapura, aux Lapis-Loz-
zuli, aux Dupont-Trocourt, aux du Lau-
rier-en-Toc, etc. Son château historique
n'a pas eu l'honneur d'abriter le roi Vert-
Galant, mais, par compensation, le Prési-
dent de la République a failli s'y arrêter
en revenant des grandes manœuvres.
Rien ne manque au bonheur de ce par-
lementaire, pas même cette célébrité re-
lative qui ressemble à la gloire comme la
lumière électrique au soleil. Pourtant, un
souci plissait son front étroit à la veille
du scrutin. Son tigre de Nubie était-il
mort ? Hé ! non, le comte pensait aux
moyens d'assurer sa réélection. Un beau
matin, les paysans avaient vu s'ouvrir les
hautes grilles du manoir où avait failli
couchel\M. Loubet. Le maître était revenu
pendant la nuit à l'improviste.
Tout de suite, au débotté, le châtelain
avait voulu avoir une conférence avec son
régisseur, maître Dubois, un ancien valet
de chambre promu à la dignité de major-
dome. Il le reçut dans la salle des armu-
res, où les complets d'acier moyen âge
sont remplacés — ô mes aïeux! — par
une jolie collection de selles et de crava-
ches.
Il n'était pas à la noce, Dubois; d'un
geste fébrile, il étirait sa fauve mous-
tache en courbant sous l'algarade seigneu-
riale ses robustes épaules de fils de la terre.
Timidement, il avait étalé sur la table des
projets de baux, des lettres de fermiers,
des feuilles d'imposition. Mais le comte,
d'une chiquenaude sèche, avait écarté dé-
daigneusement les paperasses.
— Il ne s'agit pas de ces balivernes, na-
silla-t-il. Je veux savoir si vous avez pris
toutes vos dispositions pour le 6. Pas de
ballottage, hein? Voyons. Les bœufs
— Je me suis occupé, balbutia le régis-
seur, des bœufs de propagande. J'ai réuni
soixante paires de limousins bien appa-
reillés, prêts à se mettre en marche dès
l'ouverture de la période. Les demandes
d'attelage sont inscrites par ordre : six
cents charrois de bois, deux cents la-
bours profonds. La majorité du canton de
Vétilly, jusque-là réfractaire, semble ac-
quise. Cependant.
— Cependant? m
Le comte s'était levé d'un élan et sa face,
d'une longueur chevaline, se tendait en
une curieuse contraction d'irritation in-
quiète. L'honnête serviteur reprit, non
sans avoir toussé par contenance :
- Pourtant. sauf votre respect, mon-
seigneur, j'ai cru remarquer une hésita
tion. Les électeurs sont un peu blasés sur
l'article des bœufs. Ils désireraient autre
chose.
M. Du Gazon s'emporta :
— Comment, ces rustres n'étaient pas
contents? Il leur labourait leurs terres,
leur charriait leur bois. Fallait-il aussi leur
faire leurs enfants, à ces fainéants ? La
propagande par les faits alors !
Le langage de monseigneur, on le voit,
s'enconaillait volontiers depuis qu'il fré-
quentait les nouvelles couches, représen-
tées à ses yeux par le personnel des écu-
ries en renom. Dubois regardait son mai-
tre s'agiter dans la salle héraldique, se-
couer les selles d'un coup de botte rageur,
lancer au hasard ses poings d'athlète, faits
pour les rixes de cabaret.
A la fin le comte se planta devant lui en
point d'interrogation :
— Tu souris, je parie que toi aussi, tu
te moques de moi ? A moins que tu n'aies
une idée, par hasard ?
— Peut-être bien.
— Tu crois que l'on pourrait enlever la
majorité au premier tour ?
— L'unanimité, monseigneur, s'il est
permis de s'exprimer ainsi. Oserai-je vous
donner mon avis ?
— Ose, misérable.
Le régisseur hésita un instant. Il sedan-
dinait, les épaules roulantes, comme s'il
allait exécuter la danse des œufs.Ms au-
cun moyen d'éluder la question, d'echap-
per au terrible regard qui pesait sûr lui.
— Ëh bien, tant pis, voilà. Il leur fau-
drait un taureau de race. Une tournée par
feu. L'appétit vient en mangeant, monsei-
gneur. Vous les avez trop gâtés.
Le noble candidat se rasséréna. C'était
une idée tout de même qu'avait eue là le
sarrazin Il fut convenu séance tenante
que l'on ferait arrivertpar les voies rapides
du Charôlais,un reproducteur primé et ré-
sistant. Pas de temps à perdre.
— Tu n'as rien à me demander? con-
clut le comte d'une voie radoucie.
— Si, répondit Dubois piteusement.
Vous n'êtes pas sans avoir remarqué com-
bien je deviens acharné à votre service de-
puis quelque temps. Je ne suis plus que
l'oncle de moi-même. Les médecins disent
comme ça que c'est un 'surmtfnège. C'est
depuis que j'ai convolé en secondes noces
avec la femme de chambre de madame la
comtesse. Les docteurs m'ont conseillé
d'aller passer un mois, seulchezmon oncle,
le doyen de Vétilly-Ies- Veaux-de-Lait.
- Après la période alors ?
-- A vos ordres, monseigneur.
'» T » * » * • »
Le comte Du Gazon fut élu à « une majo-
rité nibdeste.
Le tààrlan cliarolaia ..Y:tirait mer-
veille.
Mais il avait bien l'aie, de revenir de li
bataille et, dans l'enclos cerné de barriè-
res mobiles où il ruminait tristement soui
les regards admiratifs des badauds, il rap*
pelait, par son "ttittîde affaissée, VExpia
tion des Châtiments. Le noble animal était
vaincu par ses conquêtes, victime du tra;
vail attrayant.
Revenant de sa villégiature hygiénique,
le régisseur Dubois vit le héros à demi ex-
piré de la période électorale. i
Lors, s'appuyant sur la barrière, dans un
doux élan de compassion animale, où en-
trait peut-être une secrète pensée de satis-
faction égoïste, il interpella le reproduc-
teur :
— Hé! tu vois, petit, comme je suis foref !
depuis que j'ai quitté ma femme pour allet
me faire soigner à Vétilly ? Je te plains
toi, si tu n'as pas un oncle curé !
Noël Amaudru.
L'élection de Saint-Flour
Les raisons de M. le Préfet
En réponse à l'article de notre directeur
Charles Bos, publié p ir le Rappel, et repris
par le Journal du Cantal, le préfet Gelinet
a écrit à ce journal une lettre que nou&
reproduisons ci-dessous et à laquelle Char-
les Bos a fait la réponse que nous repro-
duisons également.
*Un préfet qui se lllncc dans les polémi'
ques de presse ! Voilà un spectacle qui ne
nous est pas donné tous les jours. M. GéU-
net peut se rendre compte aujourd'hui
qu'il a eu tort de«1ontrer de l'originalité. -,
Le métier de journaliste s'apprend comme
les autres ; et le préfet du Cantal a l'air de
manquer d'exercice, s'il manque surtoutde
dispositions. -
Voici la lettre du préfet du Cantal :
Le préfet du Cantal,dédaigneux des injures
personnelles, mais s >ucieux de rétablir la
vérité quand il s'agit de ses actes adminis-
tratifs, invite le duirnal du Cantal à publier
les rectifications s ûvaites répondant, para-
graphe par paragraobe.aux assertions conte-
nues dans un article du 16 mai courant, sous
la signature de M. Ch. Bos.
Aucune pression administrative n'a été
exercée avant et peodant la période électorale
dans la département du Cantal.
Depuis un an, le préfet a nommé 3 facteurs
et 6 cantonniers et non 30 facteurs et 30 can-
tonniers dans l'arrondissement de Saint-
Flour, comme l'affirmo M. Cb. Bos.
Les facteurs n'ont jamais refusl de distri-
buer les journaux de M. Ch. Bos, pas plus que
les cantonniers n'ont mis méchamment dos
pierres sous son automobile.
Les fonctionnaires n'ont pas suivi son con.
carrent partout pendant ses tournées ; certain
d'entr'eux ont manif .-sté publiquement leurs
sympathies pour ce dernier, tandis que d'au-
tres en faisaient autant pour M. Ch. Bos : c'é-
tait leur droit.
Le Préfet n'a jamais répondu à M. Charles
Bos qu'il n'avait aucune autorité sur les Juges
de paix, sur les cantonniers, sur les institu»
teurs pas plus qu'il n'a répondu que les con-
ducleurs des ponts et c ia isdes avaient le droit
de se livrer dans les villages à une propagande
de diffamation et qiie les instituteurs étaient -
une catégorie de fonctionnaires qu'il était sou.
vent impossible d'arrêter.
Le préfet a sur tous les fonctionnaires de
son département — et il ne craint pas de l'af-
firmer hautement — une autorité faite d'es-
time, de confiance réciproque et de dévoue-
ment aux instit itions républicaines : il ne
leur demande pas autre chose, et il est heu-
reux de constater que, pendant la période
électorale, ils ont conservé la correction po-
litique qu'il leur avait recommandé expressé-
ment.
Enfin, le Préfet a rafusé à M. Ca. Bos de
lui communiquer les procès-verbaux dei
élections et de remplacer deux membres di
la commission de recensement général des
votes, parce que telle est la loi et que, pat
conséquent, tel était son droit et son devoir «
Voici la riposte de M. Caries Bos :
Mon oher ami,
Je vous remercie de m'avoir communiqué
les quelques mots que vous avez recus de M.
le Préfet du Cantal. En vérité, cet aimable
fonctionnaire n'a pas la manière, Oa lui avait
dit ; « Faites tout ce qu'il faudra pour que
Charle3 Bos soit battu, mais ne vous laissez
pas prendre. » Il a marché; il a tout fait
pour que je fusse battu ; seulement il a man-
qué d'nabileté. Depuis six mois, son jeu a été
par trop visible pour vous tous comma pour
moi. Aussi bien, la peur de SJS responsabi-
lités l'effraye maintenant. Et il proteste, à
grands cris, qu'il n'est jamais intervenu dans
l'élection do Saint-Fioar. Tout mauvais cas
est niable.
C'est comme son protégé Hugon. Pris ls *
main dans le sac, il crie : au voleur 1 Dant
quelques jours, il affirmera que c'est moi qui
ai fraudé et qui ai bénéficié de l'appui de
l'administration.
Voici vingt ans que je suis journaliste. Et
jamais, jusqu'à ce jour, je n'avais vu un pré-
fet se lancer dans une polémique. C'est pour-
quoi je suis ravi que l'honorable M. Gélinet
ait jugé à propos de rompre avec ce tradition-
nalisme suranné. La bonne aubaine ! Mais
que M. le préfet du Cantal soutira d'abord
une légère critique qu'un professionnel peut
se permettre de lui adresser et grâce à laquella
il fera assurément mieux la prochaine fois :
Sa rectification est mal venue. On no recti-
fie pas, même quand on est préfet du Cantal,
en s'exprimant à la troisième persmne On
n'écrit pas : « Le.Préfet du Cantal. invita.
etc. » Cela est sec et impérieux. Or, un ré-
dacteur du Journal du Cantal, ciloyan libre
et indépendant, ne peut pas être traité en su-
bordonné à qui on donne un ordre ou à qui
« on lave la tête. »
Cette rectification, ou plutôt ce communi-
qué, a l'allure d'un ukase. Fi donc ! L'officier
qu'a été M. Gélinet reparait trop sous le cos-
tume préfectoral. Il rédige une note comme
un ordre du jour à lire aux troupes assem-
blées : « Le colonel, mécontent de..« invite,
etc. » Mais qu'est-ce que cela peut bien nous
faire que le Préfet du Cantal soit mécon-
tent ? -
,
**# ? -*
Je viens de relire l'article que vous avez rt:l.
produit : Comment j'ai été battu (?) Où dont
M. Gélinet a-t-il pu apercevoir fo^,ore d'une
injure personnelle ? J ai écrit Qu'ancien méli-
niste, M. Gélinet avait e chassé de Saône-
et-Loire pareeque clérical, par Sarriea et Du-
bief. Combea t'a Caveyé à Béziers où, d'a eèsi.'
Lafferre, il £ (àit radical socialiste bon teint.V
On m:â'me mène ane Jaurès, enchanté de
ses services, l'a fortement recommandé pour4
JI pNfcfitUM 4Ji CaaW. Et 141"" t_
VBNDBEDI 28 *AI IQ03. — *» lassa. -
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LES RBFORMES
On n'avait jamais vu une Chambré
comptant autant de républicains que
celle qui provient des dernières élec-
tions: 411 députés des groupes de gau-
che constituent ce qu'on appelle le Bloc,
plus 80 progressistes. C'est dire qu'il
est impossible désormais de discuter
le régime républicain. C'est dire aussi
que le pays a le droit d'exiger les ré-
formes qui lui sont promises depuis si
longtemps.
Des réformes ! tout le monde en
parle. Le gouvernement, lui-même en
net sur le chantier : Il supprime la
moitié des sous-préfets pour faire de
ia décentralisation.
Très bien, j'applaudis de cœur à la
disparition des fonctionnaires inutiles,
parce que nous avons le télégraphe et
les téléphones, dont ne disposait pas
le premier Empire. Mais pourquoi
d'abord ne diminuer le nombre des
sous-préfets que dans la proportion
de 50 010? On va provoquer beaucoup
de mécontentements. Combien de pe-
tites villes et combien de députés re-
Drésentant ces mêmes petites villes
seront furieux de la Capitis diminutio
qui les atteindra? Une petite ville,
sous-préfecture durant un siècle et
devenant subitement un simple chef-
lieu de canton 1 Quelle déchéance! et
quels embarras pour le gouvernement
à propos des choix à faire pour se
maintenir dans la limite des crédits !
Ne vaudrait-il pas mieux supprimer
tous les sous-préfets ?
En second lieu, je me permettrai
de faire rémarquer que ce n'est pas
une œuvre de décentralisation que la
suppression de la moitié, même de la
totalité des sous-préfets. C'est au con-
traire, une mesure de centralisation
outrancière. Le préfet d'un départe-
ment se verra obligé de veiller à tou-
tes les affaires politiques du canton, de
toute sa circonscription. Il contrôlera
donc tout. En réalité, c'est la centra-
lisation départementale à la base de la
centralisation étatiste qu'on va créer
pour rendre celle-ci plus forte. La dé-
centralisation ne pouvait avoir lieu, à
ce point de vue, qu'à la condition
d'élargir les attributions des sous-
préfets et de réduire celles des pré-
fets.
N'invoquons donc pas, dans cette
matière, la décentralisation, un bien
grand mot du reste, et disons simple-
ment que le gouvernement veut réa-
liser une économie budjétaire tout à
fait souhaitable.
***
A moins que—c'est ce que je crois
savoir, et, dans ce cas, j'en félicite le
gouvernement — M. Clemenceau ne
veuille poser ainsi la question de
la substitution du scrutin de liste avec
la représentation proportionnelle au
scrutin d'arrondissement, qui a fait
son temps et dont les inconvénients
s'accusent de plus en plus regrettables
à chaque élection générale.
Il n'est personne à cette heure, qui
n'admette le scrutin de liste avec la
représentation proportionnelle. Cha-
que représentant serait ainsi délivré
de cette sorte de domesticité qui pèse
sur lui. On aurait une expression plus
exacte de la volonté du suffrage uni-
versel. On pourrait se livrer aux rê-
ves d'avenir et aux réformes de longue
haleine, renoncera peupler l'adminis-
tration de nouveaux parasites, songer
davantage aux intérêts généraux du
pays.
Il paraît que le gouvernement ne
serait pas éloigné de faire voter cette
grosse réforme. Il le peut, s'il le veut.
Et pourquoi ne le voudrait-il pas ? Est-
ce que la forme du gouvernement ré-
publicain est menacée?
Si M. Clemenceau n'hésite pas à sai-
sir la Chambre d'un projet de loi dans
ce sens, si surtout il admet en même
temps que le vote de chaque citoyen
doive être exprimé, pour être sincère,
avec un bulletin dissimulé sous enve-
loppe, il aura rendu à la République
le plus signalé des services.
.**
Je sais, d'ailleurs, qu'il est de ceux
qui ne veulent pas qu'on continue à
parler de curés, de moines et de reli-
gieuses. Pour lui, la politique anti-
cléricale a fait son temps. C'est la po-
litique des réformes sociales qui doit
lui succéder. Mais cette politique doit
être en même temps une politique* de
défense de la liberté et de la pro-
priété.
Sans liberté individuelle,pas de pro-
priété individuelle et réciproquement.
Donc, guerre au collectivisme révo-
lutionnaire qui menace la liberté et la
propriété, guerre aussi à la réaction
qui voudrait porter une main ! crimi-
nelle sur les conquêtes de la démocra-
tie. « Ni réaction, ni révolution »,
qes ce pas le programme de M,
Clémenceau comme ça été toujours le
nôtrç ?
Ce n'est guère un moyen efficace de
ruiner les espérances des collectivis-
tes que celui qui consiste à faire chorus
avec eux. Il faut opposer à leurs doc-
trines des réformes immédiates qui
donneront satisfaction aux popula-
tions : la caisse des retraites, le dé-
grèvement de la taxe avec l'impôt
sur le revenu par exemple.
Nous avons, dans le parti radical,
promis, depuis tant d'années, ces deux
réformes que nous devons les faire, si
nous ne voulons pas voir proclamer
par d'autres - par les collectivistes —
la faillite de notre programme. La
majorité énorme qui siégera dans
la nouvelle Chambre — tellement
énorme qu'elle n'a pour ainsi dire au-
cune opposition en face d'elle — a le
devoir de se préoccuper de trouver
les ressources nécessaires à la créa-
tion de la Caisse des retraites ainsi que
de voter un projet d'impôt sur le re-
venu qui atteigne vraiment son but.
Nous n'avons pas à examiner les
difficultés possibles. On a promis, on
doit tenir. Rien ne peut, d'ailleurs,
dans cet ordre d'idées, stériliser les
bonnes volontés de 411 députés répu-
blicains élus pour réaliser desréformes.
Pour nous,—c'est ce que nous n'avons
cessé de faire du reste — nous don-
nerons notre concours le plus entier
aux républicains qui voudront entrer
dans la voie des réformes sociales,
mais à la condition, bien entendu, que
ces réformes n'entraînent pas la ruine
du pays et soient profitables à la masse
des électeurs. -
CHARLES BOS.
LES ON-DIT
IBSEN
Une dépêche, dans la soirée,
nous a brusquement, brutale-
ment, appris la mort d'Henrick
Ibsen. Il était presque octogé-
naire ; depuis plusieurs années,
sa production dramatique s'était
ralentie, au point de sembler à peu près
arrêtée, et la triste nouvelle qui nous arrive
aujourd'hui était prévue depuis long-
temps.
La mort du grand dramaturge norwé-
gien n'en causera pas moins de douleur
à ceux qui ont suivi passionnément le
mouvement littéraire de ces quinze ou vingt
dernières années.
Ibsen a été le prophète de toute une gé-
nération d'artistes, de poètes et de philo-
sophes dont la vertu était d'avoir confiance
dans l'homme ; ils croyaient que l'homme
était assez grand pour avoir droit à la li-
berté.
L'amour optimiste de la liberté illumine
l'œuvre d'Ibsen.
Les conventions sociales, l'hypocrisie
bourgeoise, l'égoïsme stérile, la tyrannie
stupide des foules : telles étaient ses enne-
mies. Il les combattait sans trêve, et leur
opposait un individualisme sain et —qu'on
me passe le mot — solidariste.
Cette manière de penser n'est plus
que celle d'une minorité à l'heure actuelle.
Ibsen n'est plus « l'homme du jour ». Mais
il est peut-être l'homme de demain, parce
que les problèmes dont il devait super-
bement poser les termes devront être réso-
lus — et qu'on ne leur voit pas d'autre
solution possible que la liberté.
NOTRE VIEUX MATÉRIEL EN CHINE
Une des conclusions des diverses mis-
sions chinoises qui ont étudié les moyens
d'action de la civilisation occidentale dans
ces derniers temps est quele Céleste Empire
n'est pas prêt à bénéficier immédiatement
des inventions modernes. Il faut le concours
du temps. Ainsi, on a remarqué que le bas
prix de la main d'œuvre et l'attachement
aux habitudes surannées exigeaient une
adaptation très lente du machinisme agri-
cole. Le vieux matériel d'il y a vingt ou
trente ans suffit aux besoins actuels. Aussi
fait-il prime en Chine et les Américains
ont été les premiers, avec leur praticisme
résolu, à exporter en Mandchourie leurs
instruments démodés. Cet exemple ne
manquera pas d'être imité. Bon nombre de
nos industriels se sont déjà préoccupés de
la question, quoique un peu tard. Lesfon
deriesdes Chinois ne travaillent pas encore
le fer et leurs forgerons utilisent les vieux
débris dans leur façonnage primitif. Il y a
là un débouché intéressant.
ON IGNORE M. FALLIERES EN ALGÉRIE
Croiriez-vous qu'il y a des gens, sur le
territoire français, qui n'ont pas encore
appris l'élévation de M. Fallières à la pré-
sidence de la République ? Que dis-je? Il
en est qui ignorent même, que la France
est en République. Ils ont dormi pendant
de longues années, comme la Belle au
Bois. Un de nos amis, M. C. L., un man-
darin lettré qui nous en voudrait de di-
vulguer son nom, pourtant bien connu, à
utilisé le temps des grèves, des élections et
des cerises à parcourir l'Algérie. Il a poussé
accompagné de sa charmante femme, jus-
qu'aux portes du désert et peut-être nous
donnera-t-il prochainement le résultat de
ses observations en un substantiel et pit-
toresque récit. A El Kantara, il a rencon-
tré, paraît-il, un vénérable hadji à la barbe
de neige qui lui a demandé des nouvelles
du sultan Napoléoune.
— Napoléon III ? Mais il est mort, mon
brave.
Tout de suite, le fils des grandes Tentes
s'est étonné. Comment, l'Empereur est
mort? Ce n'est pas possible, on l'aurait
su. M. C. L. expliqua alors qua Napoléon
était mort en exil après avoir vainMi
par l'Allemagne et que la République avait
remplaoé l'empire depuis 1870.
L'Arabe n'en revenait pas. 11levait les
jûrafcir«ajuste dip, je MOunet-Saji^
Ah bien, c'était la fin de la fin, cela! Les
Français n'avaient plus de sultan 1 Il avait
vu Napoléon en Algérie, Napoléon avait
ordonné du lait aux musulmans, une ra-
tion de vin aux soldats. C'est égal, il con-
servait de la méfiance. A l'instar du gro-
gnard de Charlet, il se serait écrié volon-
tiers : lui mort? on voit bien que vous ne
le connaissez pas 1
En voilà un que les élections ne trou-
blent pas 1
Le Passant.
MORT D'HENRIK IBSEN
Henrik Ibsen est mort hier à 2 h. Ii2 à
Christiania (Norvège), telle est la nouvelle qui
vient de nous parvenir par un télégramme
bref et laconique. Cette mort est un deuil
pour la littérature de tous les pays.
La vie et l'œuvre d'Ibsen
Henrik Ibsen était né à Skajen (d'autres
écrivent Skien), le 20 mars 1828, non d'une
famille indigène, mais d'une branche de ma-
rins écossais qui s'était implantée sur le sol
norvégien.
Le « grand Lion », comme l'ont appelé ses
compatriotes, eut une jeunesse douloureuse,
des débuts pénibles.
La vocation des lettres se dessina en lui très
tôt, impérieuse, exclusive. Né dans une famille
heureuse et aisée, il s'y fut livré sans obsta-
cles, si des revers de fortune n'avaient tout à
coup frappé les siens. Aussi connut-il, dès
l'âge où la vie s'annonce radieuse et toute
fraîche d'espoirs enthousiastes, la désillusion
des rêves brisés.
Il fut contraint de choisir une profession
libérale et opta pour la pharmacie et la mé-
decine, mais à contre coeur, dans l'idée bien
arrêtée de s'évader aussitôt que les hasards
de l'existence lui seraient enfin favorables.
C'est dans le petit port de Grimstadt qu'il
exerça ce métier : il avait alors seize ans.
L'officine où il manipula les simples et pré-
para les médicaments existe toujours. En cette
Bourgade paisible et triste, tapie aux pieds
des montagnes dans le fond de son fjord que
découpent les flots bleus, son esprit profond,
replié au fond de lui-même — car l'homme
insociable et silencieux ne livra jamais le se-
cret de sa pensée, dut commencer dés cette
époque l'œuvre de gestation colossale qui de-
vait produire les chefs-d'œuvres futurs.
Ses études médicales interrompaient à peine
ses rêveries. If remplissaient machinalemens.
dans les banalités de son existence, la tâche
quotidienne, — mais il allait d'un effort con-
tinu vers son but at vers son idéal, sombre
philosophe dédaigneux des joies de ses frères
entrevoyait dans la mêlée obscure des
nuées le point de lumière sur lequel se gui-
dait le clairvoyant aveugle — Homère,
Il avait écrit à Grimstadt son premier
drame : Catilina. Puis il revint à Christiania,
y reprit ses études, donna des leçons pour vi-
vre et mal satisfait de sa première œuvre, re-
mit sur le chantier la plupart des scènes. Ce-
pendant la pièce ne fut pas représentée. Elle
parut en volume ainsi que les deux tragé-
dies qui suivirent : les critiques littéraires
firent à l'auteur dramatique impuissant à se
faire jouer encore l'aumône d'une appréciation
favorable.
De cette époque datent ses premières rela-
tion avec Vinje et avec Bjœrstjœrne Bjora-
son, le futur rival qui devait Marcaer en sens
contraire sur le même chemin de gloire et
soulever contre les doctrines du maitre ua
autre courant d'opinion.
Il s'essaya un peu en compagnie de Vingo
et de Botten Hansen au journalisme pamphlé-
taire et satirique, dans VAndhrimmer, cette
petite feuille de bataille d'où s'envolèrent tant
de strophes gonflées d'un souffle puissant,
Et puis las d'écrire des actes qui semblaient
ne devoir jamais vivre au fou de la rampe,
Henrik Ibsen accepta de mettre en scène les
actes de ses confrères plus heureux. Il fnt,sar
l'offre d'Ole Bull, directeur de théâtre à Ber-
gen d'abord, à Christiana ensuite, en 1851.
Le métier d'imprésario ne lui réussit guère.
Bientôt il lâchait son entreprise comme il
avait abandonné la médecine et le journa-
lisme, dégoûté des besognes matérielles et des
calculs médiocres, retournant à sa misère,
dédaigneux, à sa mansarde dorée de songes.
Mais entre temps il s'était marié, il avait
un fils.
Sasauvagerie bourrue s'accommodait mal au
caractère de sa compagne, L'l pauvreté n'était
pas pour rapprocher les deux époux que tant
de mésintelligences divisaient déjà. Et Ibsen,
plus sombre que jamais, se renferma dans
cette bouderie farouche devenue légendaire,
où se confondent sans doute avec les pre-
mières désillusions de la vie, la mysoginio du
mari déçu et les rancœurs de l'écrivain dont
l'épanouissement de génie seul brisa les obs-
tacles accumulés au début de sa carrière par
l'hostilité des uns et la bêtise des autres.
j £ Ce fut vers 36 ans qu'il connut la douceur
de l'existence assurée et de la possibilité de
se livrer tout entier à l'œuvre entreprise. Une
subvention littéraire lui assura la liberté de
travail. Alors il voyagea ; mûrit ses ouvrages
sous des cieux différents,des soleilsnouveaux.
Il s'éloigna des neiges de sa Norvège, sé-
journa en Italie, en Allemagne, en Espagne,
datant de capitales en capitales chacun de
ces drames qui apportaient à la patrie loin-
taine la saine et vigoureuse pensée de l'exilé.
Il s'isolait mieux dans ces voyages ; il trou-
vait au milieu des nations étrangères, parmi
ces peuples qui ne parlaient point sa langue,
et dont il ne cherchait pas à s'assimiler l'es-
prit, une force créatrice plus considérable,
une concentration plus puissante de ses idées
et de son génie.
Dans la Maison de Poupée, il a fait le pro-
cès du mariage contemporain ; dans les Sou-
tiens de la Société, il a dénoncé la maladie
mortelle du monde moderne, l'hypocrisie ;
dans les Revenants, il n'a pas refusé de voir
les tares physiques des races d'aujourd'hui ;
dans l'Ennemi du Peuple, il a accepté ce
« postulat » que les foules commettent par-
fois leurs crimes, comme Ijs aristocrates ;
dans Solness le Constructeur, il n'a pas hésité
même à avouer ses suspicions en ce qui con.
cerne l'individualisme du jour et l'orgueil,
son corolaire ; mais, par une suite de com-
mentaire, par des campagnes très importan-
tes menées parallèlement à son théâtre, Hen-
rik Ibsen a fait comprendre à quel idéal il a
a comparé l'organisation actuelle de la so-
ciété, et, à côté du péril qu'il a dénoncé, il a
montré, bon médecin, le remède.
Ce remède, il est — cette philosophie, au
fond, est éternelle — dans le respect de la
poussée des instincts de l'homme, joint au
respect encore plus important des droits d'au-
trui ; en deux mots, le théâtre d'Ibsen peut se
résumer.: Devoir et Indulgence.
C'est bien simple ; si simple, que tels des
amj s, et-tels des ennemis d'Henrik Ibsen ne
le vendraient pas croiro; mais, avec Ibsen
lui meme, nous crayons profondément que son
~lii1PIJt: et? Bona ft&atoas, ge«iale-
meut naïve. Son oeuvre est une œuvre colos-
sale.
Quand il ont en partie achevé le lourd pro-
gramme qu'il s'était imposé en quittant la
terre natale, il revint s'y fixer en 1881. L'exode
avait duré 27 ans.
Cependant il n'a pas considéré sa tâche
comme terminée.
L'âge, qui semblait n'avoir pas de prise sur
cette tête où les cheveux s'ébouriffaient en
neige blanche, où la barbe hirsute mangeait
les traits, où sous le front démesuré les yeux
avaient le candide azur des prunelles d'en-
fants; n'avait pas affaibli ce cerveau robuste
où l'intelligence poursuivait mathématique-
ment son évolution.
Chaque année voyait éclore l'œuvre nou-
velle.
Chaqua automne l'éditeur du grand drama-
turge recevait le manuscrit racopié tout en-
tier de la main de l'écrivain.
Enfermé dans sa calme retraite de Victoria
Terrasse, avec, sous les yeux le spectacle de
la grande cité norwégienne se déroulant à
l'horizon, Hen rick Ibsen méditait et travaillait.
Sa porte était close; les lettres restaient la plu-
part du temps sans réponse. Impassible, il
semblait s'être volontairement retranché du
monde, et son mutisme décourageait les in-
terviews las plus audacieuses. Là-bas d'ail-
leurs on 19 savait, et l'on respectait la sau-
vagerie du vieux maître, vivant sans amis
presque, recevant seulement le dimanche son
fils, le professeur Sigurd Ibsen, directeur de
la revue Le Sonneur (Ringeren) et la femme
de celui-ci, la propre fille de son rival
Bjœrnson.
Matin et soir, il sortait de sa retraite, se
rendait au grand café de Christiana, où à
l'écart, sa table était réservée, parcourait les
gazettes, et vidait sa chope et son verre d'eau-
de-vie.
Puis il regagnait son cabinet de travail et
dans la rue les passants avec une curiosité
respectueuse se retournaient quand passait
le vieux solitaire appuyé sur l'inséparable
parapluie, coiffé du large chapeau d'où s'é-
chappaient les flocons de cheveux blancs, —
le a grand Lion » dont le génie a remué l'an-
tique société, celui qui a pu dire ce mot et le
prouver : « L'homme le plus seul est le plus
fort. »
Henrick Ibsen a eu la magnifique vieillesse
de ces écrivains que la gloire et la mort sur-
prehnent à leur table de travail : il ne semble
pas que la fatigue ait jamais pesé sur le dra-
maturge, et le Jean-Gabriel Borkmann, qui
date de 1897 met Henrick Ibsen au rang des
Sophocle et des Hugo, des génies que l'âge
semble grandir d'année en année, et qui ne
veulent connaître, après la jeunesse, qu'une
maturité toujours plus flurissante.
Qui n'a pas présentes à la mémoire les fêtes
magnifiques qui furent organisées dans toute
l'Europe, avec un respectueux enthousiasma
pour les 70 ans du maigre, en 1998,
Ibsen avait 78 ans. Il meurt, m iisil de-
meurera immortel et son œuvre lui survivra
et sa gloire grandira encore: avec le temps.
- dm
PREMIÈRES RÉFORMES
Nous recevons la lettre intéressante que voioi :
21 mai 1006
Monsieur le Rédacteur en chef,
Permettez, s'il vous plaît, à un lecteur as
sLlu du Rappel quelque réflexions sur l'ex-
cellent article de M. Louis Martin, paru le 20,
sous la titre de « Premières réformes » qui
sont les réformes électorales.
H est évident que nous n'aurons dans sa
complète réalité la République, c'est-à-dire le
gouvernement de tous, par tous et pour tous,
que nous ne serons vraiment en démocratie,
ce qui signifia le gouvernement exercé, avec
une délégation nécessaire, par le peuple même
que lorsque le peuple tout entier participera
à l'exercice du pouvoir par une représentation
intégrale.
Aujourd'hui c'est une majorité qui l'exerce
seule, à l'exclusion et, souvent, au préjudice
d'une minorité équivalant presque à moitié
de la nation. La République actuelle est donc
plutôt oligarchique que démocratique dans le
sens étymologique et réel de ce dernier
terme.
Il serait curieux de mettre en regard la
proportion des suffrages qui viennent d'être
exprimés en faveur de telle et telle opinion
et celle des représentants de ces opinions
appelés à siéger dans la nouvelle Chambre.
Il est probable que celle-ci ne paraîtrait pas
limage fidèle du pays.
Oui, la première réforme à faire, la plus
démocratique, la plus républicaine, c'est l'a-
doption du scrutin de liste, avec représenta-
tion proportionnelle des minorités, comme on
l'a organisé depuis 15 ou 20 ans, pour le
grand bien de l'apaisement des partis, dans
plusieurs cantons suisses.
La logique voudrait qu'aussitôt cette ré-
forme adoptée la Chambre, image imparfaite
du pays, fût dissoute par le Président de la
République, pour faire place à une Chambra
plus exactement démocratique, mais. mais.
En attendant, — et voici le but principal de
ma lettre, — ne pensez-vous pas qu'il fau-
drait, en même temps qu'on accomplira cettd
réforme capitale pour la Chambre, la rendre
applicable aussi et immédiatement, aux Con-
seils municipaux ?
Les mêmes avantages la font désirer égale-
ment.
Veuillez agréer, monsieur le Rédacteur en
chef, l'expression de mes sentiments Jés plus
distingués et dévoués.
DERIÏAT
LE POURBOIRE PU GRAND-nue
(De notne correspondant particulier)
Cologne, 23 mai.
La grande exposition des Arts allemands,
organisée avec le patronage du grand-duc de
Hesse, a été récemment inaugurée par un
banquet splendide que le grand-duc présida.
Les nombreux convives illustres étaient très
satisfaits, mais les garçons qui servaient à
table l'étaient moins. Ils n'ont pas eu un cen-
time de pourboire, car aucun des convives ne
pensait à eux.
Ils ont donc adressé une demanda à cha-
cun rappelant que leur unique ressource était
le pourboire. Le grand-duc a répondu par un
refus net, disant que Cologne est pour lui une
ville étrangère et qu'il a des devoirs d'abord
envers les gens de son pays. Les autres invie
tes n'ont pas été plus accueillants que,ls
grand-duc, seulement ils ont invoqué d'autre-
raisons notamment l'exemple donné par le
grand-duc.
En Haïti
Des délais étant nécessaires au gouverne-
ment baftien pour arrêter les mesures ÇiyJuI
permettraient de négocier et conclure avec le
gouvernement de la .République française une
nouvelle convention commerciale destinée à
remplacer celle du 31 juillet 1900, les deux
gouvernements sont tombés d'accord pour
proroger provisoirement la convention exis-
tante jusqu'au 30 octobre 1906.
Washington, 22 mai.
Le département d'Etat est informé qu'on
embarque des munitions, dans une des An-
tilles anglaises, pour Haïti et que les chefs
d'une expédition cuntre Saint-Domingue,
s'embarqueront à Porto-Rico la semaine pro-
chaine.
CHRONIQUE
Le Taureau électoral
Le comte Du Gazon est un des rares
élus de la droite. Il descend des croisés par
la Grande Armée, dont son arrière grand-
père fournissait les fourrages. Allié, cela
va sans dire, aux plus illustres familles
militaires, aux Aquapura, aux Lapis-Loz-
zuli, aux Dupont-Trocourt, aux du Lau-
rier-en-Toc, etc. Son château historique
n'a pas eu l'honneur d'abriter le roi Vert-
Galant, mais, par compensation, le Prési-
dent de la République a failli s'y arrêter
en revenant des grandes manœuvres.
Rien ne manque au bonheur de ce par-
lementaire, pas même cette célébrité re-
lative qui ressemble à la gloire comme la
lumière électrique au soleil. Pourtant, un
souci plissait son front étroit à la veille
du scrutin. Son tigre de Nubie était-il
mort ? Hé ! non, le comte pensait aux
moyens d'assurer sa réélection. Un beau
matin, les paysans avaient vu s'ouvrir les
hautes grilles du manoir où avait failli
couchel\M. Loubet. Le maître était revenu
pendant la nuit à l'improviste.
Tout de suite, au débotté, le châtelain
avait voulu avoir une conférence avec son
régisseur, maître Dubois, un ancien valet
de chambre promu à la dignité de major-
dome. Il le reçut dans la salle des armu-
res, où les complets d'acier moyen âge
sont remplacés — ô mes aïeux! — par
une jolie collection de selles et de crava-
ches.
Il n'était pas à la noce, Dubois; d'un
geste fébrile, il étirait sa fauve mous-
tache en courbant sous l'algarade seigneu-
riale ses robustes épaules de fils de la terre.
Timidement, il avait étalé sur la table des
projets de baux, des lettres de fermiers,
des feuilles d'imposition. Mais le comte,
d'une chiquenaude sèche, avait écarté dé-
daigneusement les paperasses.
— Il ne s'agit pas de ces balivernes, na-
silla-t-il. Je veux savoir si vous avez pris
toutes vos dispositions pour le 6. Pas de
ballottage, hein? Voyons. Les bœufs
— Je me suis occupé, balbutia le régis-
seur, des bœufs de propagande. J'ai réuni
soixante paires de limousins bien appa-
reillés, prêts à se mettre en marche dès
l'ouverture de la période. Les demandes
d'attelage sont inscrites par ordre : six
cents charrois de bois, deux cents la-
bours profonds. La majorité du canton de
Vétilly, jusque-là réfractaire, semble ac-
quise. Cependant.
— Cependant? m
Le comte s'était levé d'un élan et sa face,
d'une longueur chevaline, se tendait en
une curieuse contraction d'irritation in-
quiète. L'honnête serviteur reprit, non
sans avoir toussé par contenance :
- Pourtant. sauf votre respect, mon-
seigneur, j'ai cru remarquer une hésita
tion. Les électeurs sont un peu blasés sur
l'article des bœufs. Ils désireraient autre
chose.
M. Du Gazon s'emporta :
— Comment, ces rustres n'étaient pas
contents? Il leur labourait leurs terres,
leur charriait leur bois. Fallait-il aussi leur
faire leurs enfants, à ces fainéants ? La
propagande par les faits alors !
Le langage de monseigneur, on le voit,
s'enconaillait volontiers depuis qu'il fré-
quentait les nouvelles couches, représen-
tées à ses yeux par le personnel des écu-
ries en renom. Dubois regardait son mai-
tre s'agiter dans la salle héraldique, se-
couer les selles d'un coup de botte rageur,
lancer au hasard ses poings d'athlète, faits
pour les rixes de cabaret.
A la fin le comte se planta devant lui en
point d'interrogation :
— Tu souris, je parie que toi aussi, tu
te moques de moi ? A moins que tu n'aies
une idée, par hasard ?
— Peut-être bien.
— Tu crois que l'on pourrait enlever la
majorité au premier tour ?
— L'unanimité, monseigneur, s'il est
permis de s'exprimer ainsi. Oserai-je vous
donner mon avis ?
— Ose, misérable.
Le régisseur hésita un instant. Il sedan-
dinait, les épaules roulantes, comme s'il
allait exécuter la danse des œufs.Ms au-
cun moyen d'éluder la question, d'echap-
per au terrible regard qui pesait sûr lui.
— Ëh bien, tant pis, voilà. Il leur fau-
drait un taureau de race. Une tournée par
feu. L'appétit vient en mangeant, monsei-
gneur. Vous les avez trop gâtés.
Le noble candidat se rasséréna. C'était
une idée tout de même qu'avait eue là le
sarrazin Il fut convenu séance tenante
que l'on ferait arrivertpar les voies rapides
du Charôlais,un reproducteur primé et ré-
sistant. Pas de temps à perdre.
— Tu n'as rien à me demander? con-
clut le comte d'une voie radoucie.
— Si, répondit Dubois piteusement.
Vous n'êtes pas sans avoir remarqué com-
bien je deviens acharné à votre service de-
puis quelque temps. Je ne suis plus que
l'oncle de moi-même. Les médecins disent
comme ça que c'est un 'surmtfnège. C'est
depuis que j'ai convolé en secondes noces
avec la femme de chambre de madame la
comtesse. Les docteurs m'ont conseillé
d'aller passer un mois, seulchezmon oncle,
le doyen de Vétilly-Ies- Veaux-de-Lait.
- Après la période alors ?
-- A vos ordres, monseigneur.
'» T » * » * • »
Le comte Du Gazon fut élu à « une majo-
rité nibdeste.
Le tààrlan cliarolaia ..Y:tirait mer-
veille.
Mais il avait bien l'aie, de revenir de li
bataille et, dans l'enclos cerné de barriè-
res mobiles où il ruminait tristement soui
les regards admiratifs des badauds, il rap*
pelait, par son "ttittîde affaissée, VExpia
tion des Châtiments. Le noble animal était
vaincu par ses conquêtes, victime du tra;
vail attrayant.
Revenant de sa villégiature hygiénique,
le régisseur Dubois vit le héros à demi ex-
piré de la période électorale. i
Lors, s'appuyant sur la barrière, dans un
doux élan de compassion animale, où en-
trait peut-être une secrète pensée de satis-
faction égoïste, il interpella le reproduc-
teur :
— Hé! tu vois, petit, comme je suis foref !
depuis que j'ai quitté ma femme pour allet
me faire soigner à Vétilly ? Je te plains
toi, si tu n'as pas un oncle curé !
Noël Amaudru.
L'élection de Saint-Flour
Les raisons de M. le Préfet
En réponse à l'article de notre directeur
Charles Bos, publié p ir le Rappel, et repris
par le Journal du Cantal, le préfet Gelinet
a écrit à ce journal une lettre que nou&
reproduisons ci-dessous et à laquelle Char-
les Bos a fait la réponse que nous repro-
duisons également.
*Un préfet qui se lllncc dans les polémi'
ques de presse ! Voilà un spectacle qui ne
nous est pas donné tous les jours. M. GéU-
net peut se rendre compte aujourd'hui
qu'il a eu tort de«1ontrer de l'originalité. -,
Le métier de journaliste s'apprend comme
les autres ; et le préfet du Cantal a l'air de
manquer d'exercice, s'il manque surtoutde
dispositions. -
Voici la lettre du préfet du Cantal :
Le préfet du Cantal,dédaigneux des injures
personnelles, mais s >ucieux de rétablir la
vérité quand il s'agit de ses actes adminis-
tratifs, invite le duirnal du Cantal à publier
les rectifications s ûvaites répondant, para-
graphe par paragraobe.aux assertions conte-
nues dans un article du 16 mai courant, sous
la signature de M. Ch. Bos.
Aucune pression administrative n'a été
exercée avant et peodant la période électorale
dans la département du Cantal.
Depuis un an, le préfet a nommé 3 facteurs
et 6 cantonniers et non 30 facteurs et 30 can-
tonniers dans l'arrondissement de Saint-
Flour, comme l'affirmo M. Cb. Bos.
Les facteurs n'ont jamais refusl de distri-
buer les journaux de M. Ch. Bos, pas plus que
les cantonniers n'ont mis méchamment dos
pierres sous son automobile.
Les fonctionnaires n'ont pas suivi son con.
carrent partout pendant ses tournées ; certain
d'entr'eux ont manif .-sté publiquement leurs
sympathies pour ce dernier, tandis que d'au-
tres en faisaient autant pour M. Ch. Bos : c'é-
tait leur droit.
Le Préfet n'a jamais répondu à M. Charles
Bos qu'il n'avait aucune autorité sur les Juges
de paix, sur les cantonniers, sur les institu»
teurs pas plus qu'il n'a répondu que les con-
ducleurs des ponts et c ia isdes avaient le droit
de se livrer dans les villages à une propagande
de diffamation et qiie les instituteurs étaient -
une catégorie de fonctionnaires qu'il était sou.
vent impossible d'arrêter.
Le préfet a sur tous les fonctionnaires de
son département — et il ne craint pas de l'af-
firmer hautement — une autorité faite d'es-
time, de confiance réciproque et de dévoue-
ment aux instit itions républicaines : il ne
leur demande pas autre chose, et il est heu-
reux de constater que, pendant la période
électorale, ils ont conservé la correction po-
litique qu'il leur avait recommandé expressé-
ment.
Enfin, le Préfet a rafusé à M. Ca. Bos de
lui communiquer les procès-verbaux dei
élections et de remplacer deux membres di
la commission de recensement général des
votes, parce que telle est la loi et que, pat
conséquent, tel était son droit et son devoir «
Voici la riposte de M. Caries Bos :
Mon oher ami,
Je vous remercie de m'avoir communiqué
les quelques mots que vous avez recus de M.
le Préfet du Cantal. En vérité, cet aimable
fonctionnaire n'a pas la manière, Oa lui avait
dit ; « Faites tout ce qu'il faudra pour que
Charle3 Bos soit battu, mais ne vous laissez
pas prendre. » Il a marché; il a tout fait
pour que je fusse battu ; seulement il a man-
qué d'nabileté. Depuis six mois, son jeu a été
par trop visible pour vous tous comma pour
moi. Aussi bien, la peur de SJS responsabi-
lités l'effraye maintenant. Et il proteste, à
grands cris, qu'il n'est jamais intervenu dans
l'élection do Saint-Fioar. Tout mauvais cas
est niable.
C'est comme son protégé Hugon. Pris ls *
main dans le sac, il crie : au voleur 1 Dant
quelques jours, il affirmera que c'est moi qui
ai fraudé et qui ai bénéficié de l'appui de
l'administration.
Voici vingt ans que je suis journaliste. Et
jamais, jusqu'à ce jour, je n'avais vu un pré-
fet se lancer dans une polémique. C'est pour-
quoi je suis ravi que l'honorable M. Gélinet
ait jugé à propos de rompre avec ce tradition-
nalisme suranné. La bonne aubaine ! Mais
que M. le préfet du Cantal soutira d'abord
une légère critique qu'un professionnel peut
se permettre de lui adresser et grâce à laquella
il fera assurément mieux la prochaine fois :
Sa rectification est mal venue. On no recti-
fie pas, même quand on est préfet du Cantal,
en s'exprimant à la troisième persmne On
n'écrit pas : « Le.Préfet du Cantal. invita.
etc. » Cela est sec et impérieux. Or, un ré-
dacteur du Journal du Cantal, ciloyan libre
et indépendant, ne peut pas être traité en su-
bordonné à qui on donne un ordre ou à qui
« on lave la tête. »
Cette rectification, ou plutôt ce communi-
qué, a l'allure d'un ukase. Fi donc ! L'officier
qu'a été M. Gélinet reparait trop sous le cos-
tume préfectoral. Il rédige une note comme
un ordre du jour à lire aux troupes assem-
blées : « Le colonel, mécontent de..« invite,
etc. » Mais qu'est-ce que cela peut bien nous
faire que le Préfet du Cantal soit mécon-
tent ? -
,
**# ? -*
Je viens de relire l'article que vous avez rt:l.
produit : Comment j'ai été battu (?) Où dont
M. Gélinet a-t-il pu apercevoir fo^,ore d'une
injure personnelle ? J ai écrit Qu'ancien méli-
niste, M. Gélinet avait e chassé de Saône-
et-Loire pareeque clérical, par Sarriea et Du-
bief. Combea t'a Caveyé à Béziers où, d'a eèsi.'
Lafferre, il £ (àit radical socialiste bon teint.V
On m:â'me mène ane Jaurès, enchanté de
ses services, l'a fortement recommandé pour4
JI pNfcfitUM 4Ji CaaW. Et 141"" t_
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