Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1911-11-28
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 28 novembre 1911 28 novembre 1911
Description : 1911/11/28 (N15236). 1911/11/28 (N15236).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75681589
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
- "- 1- L'
-- N° 15236. - 8 FRIMAIRE, AU 120. - ..- H- CINQ CENTIMES LE NUMERO MARRI M N6VEMBRC 1§11. — Nvl523#. -
LE 1 SIECLE
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Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
TRIBUNE LIBRE 1
j ..-. '-
La Première Réforme
.t18
Les présidents des Grou-
pes et des grandes Com-
missions 'de la Chambre se
sont mis d'accord pour lui
demander d'inscrire a son
ordre du jour, après la
discussion du Budget, la suite du dé-
bat sur la Réforme électorale.
Décision fort sage qui, je l'espère,
sera maintenue, mais qui rencontrera
pourtant, de certain côté, quelque ré-
sistance.
Je voudrais dire aux lecteurs du
Rappel, après J.-L. Bonnet, que l'in-
térêt évident de la majorité radicale
est de résoudre d'abord et sans retard
cette question,
Bonnet a écrit, ici même, un artiele
attristé sur l'élection de Neuilly-Bou-
logne. Je crois bien qu'il a exagéré et
que l'attitude des socialistes, qui l'in-
digne si fort, n'a pas changé grand'
chose aux résultats du scrutin.
Ce que les radicaux doivent retenir
et méditer, ce n'est pas tant la tacti-
que du Parti que l'adhésion réfléchie
des électeurs socialistes S cette tacti-
que-
Si la Fédératiôn socialiste de la
Seine, en décidant le maintien au se-
cond tour de son candidat, n'avait
obéi qu'à des considérations de cir-
constances ou de personnes, les élec-
teurs socialistes, qui sont des républi-
cains, l'auraient désavouée par leur
vote. Or, le candidat socialiste a re-
trouvé au second tour presque tous les
suffrages qu'il avait recueillis au pre-
mier- Nous nous trouvons donc en
présence d'un état d'esprit très répan-
du dans les masses socialistes, qu'on
peut condamner, mais dont il faut
bien tenir compte.
Dès lors, "a quoi bon nous jeter ré-
ciproquement à la tête nos « trahi-
sons », nos « défections », nos.' « dé-
faillances » ? Car le Parti radical et
le Parti socialiste ont eu chacun les
siennes. Et nous serons bien avancés
quand nous aurons, de chaque côté,
dressé le bilan de nos défaites et reje-
té sur autrui les responsabilités qui
sont, hélas ! bien partagées.
Prenons donc notre parti de ce qui
est ; sachons nous accommoder de ce
que nous avons.
A la situation présente, qui n'est
pas, je le reconnais, sans danger
pour l'ensemble du Parti républicain,
appliquons le seul remède efficace :
faisons la Réforme électorale.
D'où viennent le trouble et le malai-
se ? De ce que, dans la plupart des
circonscriptions électorales, l'issue de
la lulte dépend uniquement des réac-
tionnaires. Il leur suffit de ne pas pré-
senter de candidat pour être assurés
que l'élu, quel qu'il soit, leur devra
son succès. Par cela seul que dans le
collège électoral une minorité s'offre
à qui saura la prendre, tous les can-
didats, tous les partis en lutte manœu-
vrent de son côté.
Les réactionnaires peuvent alors,
sans risques, sans frais, sans lutte, ti-
rer le meilleur parti d'une bataille
dont les combattants sortent diminués
au seul profit des témoins de la ren-
contre-
Généralisez cette situation, allez
aux élections générales avec le scru-
tin d'arrondissement, et vojus aurez
une Chambre où les républicains d'éti-
quette seront en immense majorité,
mais d'où l'èsprit laîque et réforma-
teur qui fait la force et qui est la rai-
son d'être de l'idée républicaine, aura
'à peu près disparu- -
Quand il serait si simple d'en finir
avec les équivoques et les coalitions
par l'établissement d'un système élec-
toral qui, pour rendre à tous les par-
tis la liberté de leurs mouvements, né
leur permettrait de ne compter que
sur eux-mêmes il
Pour être élu, dans le système ac-
tuel, il faut réunir la majorité des'
voix. Et voilà pourquoi les candidats
courent après tous les suffrages et em-
ploient tous les moyens.
v Pour être 'élu, dans le système basé
"sur le scrutin de liste et la R. P., il
faudra avoir la confiance de son parti
d'abord, les suffrages des électeurs <3e
son parti ensuite.
Les candidats, investis par les grou-
pements radicaux, seront élus par les
seuls électeurs radicaux ; les candi-
dats socialistes, choisis par les mili-
tants socialistes, seront élus par les
seuls électeurs socialistes.
La politique de parti entrera â la
Chambre avec la Proportionnelle .;
c'est la Proportionnelle qui fournirai
la majorité de gouvernement néces-
saire, tout en assurant le contrôle des
minorités-
Faites cètte réforme-là, si vous vou-
lez rendre le Parlement a sa fonction
et donner au régime parlementaire le
prestige dont il a besoirf. ,
Il n'en est pas Ge plus ufgëftïé hi
de plus nécessaire- La politique répu-
blicaine ne retrouvera que par elle son
équilibre et sa direction.
Alexandre VARENNE,
Ancien député.
LA POLITIQUE
40*
AUTOUR DES DEUX BLOCS
le Rappel — nos lecteurs ne
s'en doutaient guère — vient,
oarait-il, de « témoigner (l'une
Irien grande nervosité »
C'est notre excellent confrè-
re. M. Gaston Caqniard, qui
porte ce diagnostic dans la Petite Répu-
blique, et il ajoute : « Nervosité, qui le
conduit même à voir les chQses de tra-
vers. »
Le cas est donc sérieux. Maladie ner-
veuse accompagnée de troubles visuels,
.uniquement parce que nous n'avons
pas pour M. Aristide Briand les yeux,
comme on Misait au Grand Siècle, Ue M.
Gaston Cagniard.
l'out l'émoi de notre confrère, que
nous remercions en passant de l'aima-
ble intérêt qu'tï veut bien nous porter,
provient en effet ¡j'un récent Editorial
où nous commentions l'intervention à
la tribune de l'ancien président du Con-
seil. s
« Editorial étonnamment contradic-
toire », gémit M. Gaston Cagniard. A
tort ; nous allons le lui prouver.
Que notre loyal confrère veuille bien
s'imposer l'ennui 'de nous i eli-re - les
nerfs détendus — et il constatera que
nos appréciations sont aussi claires que
conformes à la vérité.
Que disiojis-nous ?
Nous avons loué tout d'abord, et en
termes que M. Gaston Cagniard lui-mê-
me ne élésa,vDJ,terait pas, l'admirable ta-
lent de parole de l'ancien président du,
Conseil.
Puis, nous avons reconnu que les vio-
lences de ses anciens collègues révolu-
tionnaires avaient provoqué sur tous les
bancs, même sur ceux de la gauche,
une protestation et une manifestation
de sympathie.
Enfin, nous avons constaté que la
seule présence de M. Briand à la tri-
bune avait galvanisé tous les déchets
'de réaction qui sommeillent à la Cham-
bre, et que le lendemain toule la presse
réactionnaire, cléricale et progressiste,
avait reformé un bloc unanime et.
symbolique 'dernére le grand ténor de
l'Apaisement.-
Que M. Aristide Briand y ait consen-
ti, qu'il ait recherché cette manifesta-
tion de sympathie ou de gratitude, nous
ne le pensons pas.
Nous sommes même très 'disposés à
croire qu'il y est tout à fait étranger, et
qu'elle l'a plus gêné que ravi.
Mais, quand on est trop aimé pour.
« soi-même », il arrive parfois de l'être
ainsi contre soi-même.
Quoi qu'il en soit, le Pays républi-
cain, qui ne se pique pas de psycholo-
gie sentimentale et qui est simpliste, a
vu clairement le Blo,c de Droite se dres-
ser en face du Bloc de Gauche. et es-
quisser un retour offensif. Et ce bloc
.apaisé ne lui dit rien qui vaille.
Ceci dit,: nous sommes, suivant son
aimable désir, entièrement d'accord
avec M. Gaston Cagniard « pour affir-
mer qu'il y a mieux à faire dans les
circonstances graves ou nous sommes
que de jeter dans les rangs républicains
des brandons 'de discorde, et d'anémier
la m.æjor-ité iL
Nous ajouterons que le meilleur
moyen tle ne pas diviser, de ne pas
anémier la majorité républicaine, est
Me l'entraîner vigoureusement à l'action
laïque et sociale contre les « apaisés »
toujours à l'affût des 'défaillances répu-
blicaines.
Il n'est pas 'de meilleur terrain 'de
combat pour les vieux républicains tels
que M. Gaston Cagniard.
Aussi sommes-nous. bien certains 'de
nus y rencontrer côte à côte âvec luh
: ., - i
LE FAIT DU JOUR
- - ----------- - -- --
Au MAROC. -~ « Ja bon général. li méchant caïd. » ---
Les On = Dit
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui lundi Y
Lever du soleil, 7 li. 27. du matins --
Coucher du soleil, 4 h. 7 du soir
Lever de la lune, 12 h. 47 du soir.
Coucher de la lune, 9 b. 44 du soir*
Courses à Saint-Ouen*.
AUTREFOIS
L'amour en miroir
J- La reine Elisabeth ayant remarqué tou-
tes les prouesses que Villa Mediana accom-
plissait dans les tournois, sans doute pour
plaire à quelque mystérieuse dame de ses
pensées, lui dit un jour qu'elle voulait ab-
solument connaître sa maîtresse. Villa Me-
diana s'en défendit quelque temps ; mais
enfin, cédant à sa curiosité, il promit de
lui en envoyer le portrait. Le lendemain,
la reine recut un simple petit miroir, et
s'y voyant elle-même elle comprit aussitôt
l'amour de l'Espagnol.
AUJOURD'HUI
Les joies de ce monde
Une des plus charmantes actrices de la
Comédie-Française, célèbre par l'amitié
qu'elle inspira à plusieurs honynes politi-
ques, passant dans la rue Richelieu, est
arrêtée un instant par un embarras de voi-
tures.,
Un aveugle s'approche et s écrie :
— Ma bonne dame, ayez pitié d'un mal-
heureux qui a perdu toutes les joies de ce
monde..,
— Hélas ! dit la belle sociétaire, est-ce
que le pauvre homme fait partie des muets
du sérail ?
Les enseignes bizarres
U
Lu à la devanture d'un plombier, rue des
Récollets :
« Pompe à bière, fournisseur de la
Chambre des députés ».
A la devanture d'une modiste, boulevard
Saint-Denis :
« Chapeaux grand genre. Prix unique :
8 fr. 80 et 4 ir. 80 ».
T
L'iliifflatioi Tunisien
:+.+:-
Puisque les zélateurs passionnés de l'Ad-
ministration tunisienne ne peuvent atten-
dre la défense de M. le résident général
pour distiller leur fiel, et qu'ils cherchent
à peser sur l'opinion publique, par tout
un échafaudage de faussetés et de menson-
ges, nous nous voyons contraints à repren-
dre une polémique que nous avions cru
devoir interrompre pendant la durée des
débats parlementaires.
Il est, malheureusement, des adversai-
res qui interprètent toute attitude loyale
comme un geste de pusillanimité.
C'est du moment où l'on abaisse la poin-
te de l'épée qu'ils profitent pour porter un
coup sournois-
Ces messieurs de l'Administration tu-
nisienne appartiennent à cette noble école.
Et c'est pitié, vraiment, de voir l'insigne
mauvaise foi qui inspire leurs communica-
tions secrètes aux défenseurs de leur détes-
table cause.
Voici le Temps, par exemple, que l'on
supposait capable de vérifier la documen-
tation qu'on lui apporte, et qui n'hésite pas
à couvrir de son autorité, qui fut grande,
les allégations que voici :
« M. Lagrosillière, dit-il, s'est attaché à
dénoncer des spoliations imaginaires, et il
n'a pas dit un mot des spoliations vérita-
bles.
« Les 14.000 indigènes, qu'on a essayé de
déposséder de leur propriété de labia-
el-Houbira, ont multiplié les protesta-
tions. Ils ont revendiqué à Paris même,
tions. la Cour de cassation, jusqu'au Par-
jusqu'à la Cour de cassation, jusqu'au Par-
lement ». -
Autant de lignes, autant de mots, autant
d'erreurs flagrantes et de renseignements
faux.
1° Les indigènes dont il est question
n'ont jamais été 14.000. Ils ont été exacte-
ment 503, ainsi qu'il résulte de la teneur
même du jugement du tribunal de Sousse
du 13 février 1908.
2° Les indigènes dont il esi question
il'onl jamais été dépossédés de leur pro-
priété de Tabia-el-Iloubira, pour la bonne
"ai.son que cette propriété ne leur appar-
tient pas..
3° Les indigènes en question, non seule-
ment ne sont pas propriétaires du domaine
de Tabia-el-Iloubira, mais encore le juge-
ment précité établit que « leur possession
:ollective ne présente pas le caractère d'u-
ni possession annale et légale, n'ayant été
ni paisible, ni conrinue, qu'elle est précai-
re et promiscue 1)..
4° Les indigènes en question ont été dé-
boulés, condamnés aux dépens, et le pro-
priétaire du domaine « maintenu en pos-
session des terrains dont la possession lui
a élé reconnue par l'Etat » avec « le droit
d'en faire expulser tous les occupants ».
5° Le jugement du tribunal de Sousse a
été rendu en dernier ressort ; il est revêtu
de la formule exécutoire.
6° Il est exact qu'un pourvoi ait été in-
troduit devant la Cour de cassation ; mais
uniquement pour un prétendu vice de for-
me : le cumul du petitoire el du posses-
soire.
Or, ce qui constitue précisément un des
scandales de l'Administration tunisienne,
c'est qu'un citoyen français, ayant bénéficié
d'un jugement rendu en dernier ressort et
ayant force exécutoire, se soit heurté à un
refus d'exécution et ait été dépossédé de
son bien par un coup de force inqualifia-
ble.
Si le Temps veut s'engager dans ce dé-
bat, il fera bien de veiller à la source de
ses informations. On assure que c'est M.
Paul Bourde, ancien directeur de l'Agri-
culture en Tunisie, qui éclaire notre con-
frère. M. Paul Bourde, si le fait est exact,
ferait bien d'allumer sa lanterne. Après
avoir illustré son nom en Tunisie, il au-
rait tort de le justifier au Temps.
LIRE EN 28 PAGE :
Les Lundis Révolutionnaires
par Gustave ROUANET
QUESTIONS EXTÉRIEURES
- -
L'Entente Cordiale à la Chambre des Communes
-« WWK»- —
C'est aujourd'hui que commencera, de-
vant la Chambre des Communes, le grand
débat sur la politique étrangère anglaise,
débat qui intéressera le Continent tout au-
tant que les Iles britanniques. ,
En effet, et au fond, il s'agira de juger
l'Entente cordiale elle-même et, en même
temps, l'Entente anglo-russe pour l'Asie.
On comprend qu'un débat de cette im-
portance soit attendu avec quelque curiosi-
té. Nous ne nous tromperions pas, en di-
sant même, qu'il est attendu par beaucoup
avec une certaine anxiété.
En Angleterre, la Triple Entende et l'En-
tente cordiale n'ont pas le don de séduire
tous les esprits. Une fraction de l'opinion
politique est en quelque sorte indifférente
aux questions extérieures.Les partisans du
moindre effort, que l'on appelle là-bas les
Il petits Anglais », par opposition aux par-
tisans de la plus grande Angleterre, s'ef-
fraient de toute perspective diplomatique
qui engagerait l'Angleterre militairement.
Les unionistes du genre de lord Curzon
imaginent que tout irait bien mieux dans
leur pays si la diplomatie nationale ne se
trouvait pas liée, par moments, à celle du
cabinet de Paris ou à celle du cabinet de
Pétersbourg.,
Mais il ne faut pas exagérer l'importance
du rôle que peuvent jouer les « petits An-
glais n ou les « Curzonietes ». Le Gou-
vernement présidé par M. Asquitll a donné
fi; .; ,
trop de marques réelles et sincères de son
dévouement à la Triple Entente pour, que
l'on puisse douter du sens du discours de
sir Edward Gr&y. Les partisans de l'Enten-
de cordiale sont par avance convaincus que
le système qui fonctionne actuellement ne
risque rien. Il ne s'est pas trouvé, en ef-
fet, ni en Angleterre, ni en ¡France, d'ad-
versaires irréductibles du rapprochement
franco-anglais.
Sans doute, dans les deux pays, y a-t-il
eu récemment des critiques élevées contre
certaines modalités de l'Entente et contre
certaines conséquences des accords anté-
rieurs, critiques qui s'effaceront devant un
sérieux examen. En matière d'affaires
étrangères, comme en politique intérieure,
il faut savoir avec quels amis on « blo-
que » et contre quelles attaques on prend
des précautions : là est le fond du dé-
bat.
Ces principes une fois posés, les consé-
quences en découlent naturellement. Mais
nul ne peut estimer, à Londres comme à
Paris, que l'on puisse accepter les avanta-
ges d'un accommodement, sans en pren-
dre en même temps les charges.,
Le discours de sir Edward Grey mettra
bien des choses au point. Mais d'ores et
déjà, on ne voit au profit de qui serait es-
compté,- chez nous ou ailleurs, une détente
de l'Entente,. ,':'
Alblt MILHAUD.
L'ACTUALITÉ
- , -:+.-
LE SCANDALE D'OUDJDA
Un coup de théâtre. — Le caïd avoue ses spoliations.
L'intervention du général Toutée justifiée.
Fonctionnaires incapables ou complices.
'Alors qu'un de nos aimables confrères
prenait plaisir à vouloir nous entraîner
dans des vignes -de Tunisie, nous étions
bien Jnspirés en déclinant cette petite fu-
gue sentimentale, et en persistant à nous
maintenir sur le seul terrain d'Oudjda.
La question, en effet, — malgré toutes
les diversions plus ou moins heureuses,
qui ont été tentées, — était claire.
Oui ou non des actes d'indélicatesse, de
spolialion et de banditisme s'accomplis-
saienl-ils à l'état permanent dans l'amatal
d'Oudjda 1
Qui ou non, des fonctionnaires français
élarienl-ils responsables par incurie, ou
complices de ces méfaits P
Oui ou non, une comptabilité et une cais-
se soumises au contrôle du Haut-Commis-
saire français au Maroc étaient-elles régu-
lières el exacles P -,
- Or, un véritable coup de théâtre, qui
produira sur l'opinion publique une im-
pression profonde, vient d'éclater à Oudj-
da.
Les aveux ,
Le principal accusé, le cald, vient de
faire des aveux complets.
Au départ de la Commission d'enquête —
rentrée à Paris, en le sait, il y a cinq
jours, — le commissaire rapporteur près
le Conseil de guerre a repris son instruc-
tion contre les prévenus restés à Odjdjda :
le cadi, MM. Destailleur, Pandorf, Lor-
geou et divers autres. Cette fois, un résul-
tat certain fut promptement acquis : le
cadi, principal inculpé, a reconnu les ma-
nœuvres dont il était accusé, et a deman-
dé qu'il lui fût permis, à titre de répara-
tion, de restituer les sommes et les biens
indûment obtenus. De plus, il s'engage à
ce que ceux qui avaient été ses associés
ou ses complices, et qui, comme lui, sont
en prison, donnent pour cette réparation
tous les concours pécuniaires.
A la suite de ces importants aveux, le
général Toutée, qui est à Paris, fut mandé
hier au. ministère, et reçut communication
des documents. Voici quelle fut alors la
réponse du général :
— Il n'est point possible de laisser tes
indigènes lésés sans protection. Je tiens
pour nécessaire la réparation des actes
délictueux aujourd'hui reconnus, mais cet-
te réparation ne doit pas aller sans une
réparation matérielle à laquelle ¡ont droit
les victimes 4de pareilles manœuvres. iEn
conséquence, je ne puis Qu'approuver la
demande des inculpés : la réparation com-
plète des injustices, spoliations et de tous
dommages causés par les accusés. »
Ceux-ci ayant reconnu les fautes qui
font l'objet de l'inculpation, acceptent, en
outre, la vérification des titres et la fixa-
tion des dommages, c'est-à-dire tlu mon-
tant des restitutions tel qu'il sera établi
par le magistrat que précisément le géné-
ral Toutée avait chargé de la revision des
biens immobiliers dans l'amalat d'Oudjda.
Les accusés reconnaissent que le juge
Marty, délégué par le Haut-Commissaire,
le général Toutée, a été ,de la plus parfaite
équité. Ils réclament donc que M. Marty
soit l'arbitre appelé à déterminer le mon-
tant des dommages qu'ils auront à payer
à leurs victimes.
Ajoutons que le général Toutée n'a cessé
de protester contre les versions qui ont
été rapportées dans les journaux à Paris,
au sujet de l'arrestation de MM. Destail-
leur- et Pandori. Le général a fourni sur
tous ces points des explications décisives
qui sont depuis quelque temps déjà entre
les mains du Gouvernement.
En effet, ceux qui, de bonne foi sans dou-
te, nous ont monté le détestable « bateau »
du « consul » arrêté par le « général »,
ignoraient complètement dans quelle situa-
tion de subordination complète M. Destail-
leur se trouvait à l'égard du général Tou-
tée.
Un document ignoré
Voici, en effet, quels sont exactement les
attributions du général Haut-Commissaire
(Toutée) et du commissaire du Gouverne-
ment à Oudjda. :
« Le commissaire du gouvernement a
Oudjda est le délégué du flaut-Commissai-
re français dans la partie nord de la ré-
gion fronlièfe ; il est son agent d'exécu-
tion pour loules les questions politiques el
administratives, notamment pour celles qui
se rattachent à l'application du régime des
accords. Il correspond directement avec
lui et ne reçoit d'ordres que de lui. »
(Instructions du 18 janvier 1910, signées
des ministres -de la Guerre et des Affaires
étrangères.)
On voit donc qu'il ne pouvait y avoir
de IconfUt d'attributions, comme on l'a dit,
entre le « consul Il Destailleur et le « gé-
néral .» Toutée.
Le général, conformément a des instruc-
tions ministérielles précises, avait, en M.
Destailleur un agent d'exécution, un su-
bordonné, placé étroitement, uniquement
sous ses ordres, ne recevant d'ordres que
de lui, ne pouvant correspondre qu'avec
lui, et qui, sommé :de justifier de sa. comp-
tabilité par son chef, s'est- révolté contre
son autorité en pays ennemi. Si l'on de-
vait rechercher, dans cet incident scanda-
leux, pnovoqué par M. Destailleur, un
conflit entre « consul et général ,)l, la faute
encore en incomberait seule ^au ministère
klep Afli:\i.r.ÇfJ étrangères) 'q2. a~c qp W*
reté trop connue, a contresigné les ins-
tructions formelles du 18 janvier 1910, pla-
çant son consul sous- l'autorité absolue dui
Haut-Commissdire.
- Quoi qu'il en soit, la situation est d'une
clarté lumineuse. -
D'un côté, le général Toutée, qui a vou-
lu mettre fin à des actes de banditisme qui
pouvaient déshtonorer la colonisation fran-
çaise.
De l'autre icôté, un calti voleur et pré-
varicateur, et des fonctionnaires coupables
d'incurie ou de complicité.
Le Gouvernement va, parait-il, se pro-
noncer.
Ce serait vraiment lui faire injure que
de douter un seul instant de sa décision*
■ ■ » *
Les Cttules d'hier
LE CENTENAIRE DE LOUIS BLANC
DISCOURS DE M. STEEG
Sous la présidence d'honneur de M. Hen-
ri Brisslon, président de la Chambre des
députés, et sous la présidence effective
de M. T. Steeg, ministre de l'Instruction
publique, a eu lieu hier après-midi, à deux
heures, place Monge, la cérémonie com-
mémorative du centième anniversaire de
la naissance de Louis Blanc.
Après une allocution de notre collabo-
rateur, M. Paul Painlevé, député du Ve
arrondissement, M. Steeg, au nom du Gou-
vernement, a rendu hommage à l'un des
fondateurs de la République.
Il s'est félicité de voir groupée autour,
du monument de Louis Blanc « la démo-
cratie parisienne, venue pour honorer
la mémoire du grand révolutionnaire qui
a bravé pour elle tous les périls de la lut-
te, toutes les tristesses de l'exil et l'a tou-
jours aimée d'un si vaillant, d'un si par-
fait amour ».
Pauvre, Louis Blanc a Connu et GOmpris les
pauvres. Il a vraiment fraternisé avec eux.
Dans la mansarde où sa jeunesse a souffert du
froid et de la faim, il s'est juré de renverser,
un ordre social inkiue qui rendait mallieumix
un , si grand nombre de ses frères. Il s'est juré
de détruire l'ignorance et la misère, et son Arne
altérée de justice est allée droit aux conséquen-
ces logiques des principes de 1789. Il pense que
la Révolution inachevée, momentanément inter-
rompue, n'est qu'endormie. Il se fait le prophète
et le héraut de son imminent réveil. Mais il ne
croit pas à la toute-puissance bienfaisante de la
violence et de la colère. La brutalité aveugle dé
la passion qui détruit n'est rien sans la force
de l'idée, seule créatrice. Une révolution doit
être à ses yeux la brusque explosion d'une pen-
sée de justice et de bonté, que des siècles ont
éiahorée et qui brusquement éclate, comme unr
fruit mûr pour ensemencer la terre de ses ger-
mes féconds. Sans conceptions immédiatement
réalisables, une révolution chancelle et succom-
be sous le fracas dee ruines stériles qu'elle en-
tasse. Aussi Louis Blanc trace-t-il par avance
un vaste programme d'action rénovatrice, « l'Or-*
ganisation du travail ».
M. T. Steeg montre que s'il y a des otf-
vrages plus originaux, il n'en est pas de
plus synthétique : « C'est, pourrait-on di-
re, en style parlementaire, un magnifique
avant-projet qui retient et condense, des
diverses doctrines économiques, ce quit
en pourra être, dès demain, inséré dans
l'histoire par l'action politique. » Mais l'i-
déalisme humanitaire de Louis Blanc ne
lui est pas particulier, on le retrouverait
chez beaucoup d'hommes de sa généra-
tion : ce.qui lui appartient bien en pro-
pre, c'est l'effort qu'il fit, comme membre
du Gouvernement provisoire, pour appli-
quer sans retard les principes essentiel?
de sa pensée CI Que cet effort ait échoué,)
bien des raisons l'expliquent. Ce projet, ,si'
beau en apparence, n'était peut-être pas!
viable. Peut-être aussi des adversaires,
dépourvus de scrupules se firent-ils un jeu
de lui susciter des obstacles insurmonta"
bles. » Et cependant bien de ses rêve.,
Sont devenus des réalités.
Les théoriciens sont coupables de faire à la
démocratie de fallacieuses promesses, de la gri-
ser'de mots prestigieux dont le danger est d'au-,
tant plus grand que leur séduction sur la foute
peut être plus facilement, escomptée. 11 ne suf-
lit pas de vanter au peuple ses droits et ses
libertés. 11 faut faire de son droit un pouvoir,"
de sa liberté toute théorique et idéale une liberté
effective et vécue. N'est-ce pas une dérision de
parler de liberté aux meurt-de-faim, aux va-nu-
pieds, a ceux qui plient dès leur naissance sous
le fardeau de la misère et auxquels on dit :
« Agissez, vous êtes libres. Courez, le prix dei
la course est aux plus agiles ! » La liberté n'esq
lien si elle n'est un pouvoir d'action conquis.
non par la violence et l'expropriation, mais pan
une explicite reconnaissance du droit de tous *
l'existence, au travail, au développement de tou*
tes les facultés. Chimérique aussi l'espoir de
triompher du mal par la lutte des clSSes. « La
plaie de la société n'est pas la lutte des CÙlSses.
mais l'ignorance dont elles sont victimes. » En-
fin, les coups de force prétendus libérateurs n.
vaudront jamais l'action méthodique et continue
par laquelle un peuple s'élève sûrement à la
possession des moyens d'exercer son droit, à la
conquête de aA liberté.
M. Steeg a terminé en ces termes :
Nous pouvons, messieurs, nous inspirer dœ
idées de Louis Blanc. Nous avons pour garant
de leur rtoblesse et de leur élévation républi-
caine lexistence même de ce grand honnête
homme qui a tant sacrifié à l'œuvre humaime et
politique qu'il avait entreprise et dont la vie
toute de labeur et de dévouement fut si simple,
si probe, si remplie. On peut critiquer l'oeuvre,
l'homme reste admirable de dignité morale, de
courage civique, de patriotisme sans tache. Ja-
mais l'amour du genre humain n'a détruit en
lui l'amour de la patrie. Il a connu les jours è.
deuil de l'Année terrible, il a pleuré sur les dé-
faites et sur l'invasion de ce pays auquel il
assignait fièrement dans sa pensée la magnifi-
que mission de réconcilier tous les peuples dans
une grande tâche d'émancipation et d'améliora-
tion sociale dont la France serait la'dirigeante
et l'inspiratrice. Mais aux heures les plus sont.
bm il n'a junpis douté, jamais d&espôrô d
-- N° 15236. - 8 FRIMAIRE, AU 120. - ..- H- CINQ CENTIMES LE NUMERO MARRI M N6VEMBRC 1§11. — Nvl523#. -
LE 1 SIECLE
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Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
TRIBUNE LIBRE 1
j ..-. '-
La Première Réforme
.t18
Les présidents des Grou-
pes et des grandes Com-
missions 'de la Chambre se
sont mis d'accord pour lui
demander d'inscrire a son
ordre du jour, après la
discussion du Budget, la suite du dé-
bat sur la Réforme électorale.
Décision fort sage qui, je l'espère,
sera maintenue, mais qui rencontrera
pourtant, de certain côté, quelque ré-
sistance.
Je voudrais dire aux lecteurs du
Rappel, après J.-L. Bonnet, que l'in-
térêt évident de la majorité radicale
est de résoudre d'abord et sans retard
cette question,
Bonnet a écrit, ici même, un artiele
attristé sur l'élection de Neuilly-Bou-
logne. Je crois bien qu'il a exagéré et
que l'attitude des socialistes, qui l'in-
digne si fort, n'a pas changé grand'
chose aux résultats du scrutin.
Ce que les radicaux doivent retenir
et méditer, ce n'est pas tant la tacti-
que du Parti que l'adhésion réfléchie
des électeurs socialistes S cette tacti-
que-
Si la Fédératiôn socialiste de la
Seine, en décidant le maintien au se-
cond tour de son candidat, n'avait
obéi qu'à des considérations de cir-
constances ou de personnes, les élec-
teurs socialistes, qui sont des républi-
cains, l'auraient désavouée par leur
vote. Or, le candidat socialiste a re-
trouvé au second tour presque tous les
suffrages qu'il avait recueillis au pre-
mier- Nous nous trouvons donc en
présence d'un état d'esprit très répan-
du dans les masses socialistes, qu'on
peut condamner, mais dont il faut
bien tenir compte.
Dès lors, "a quoi bon nous jeter ré-
ciproquement à la tête nos « trahi-
sons », nos « défections », nos.' « dé-
faillances » ? Car le Parti radical et
le Parti socialiste ont eu chacun les
siennes. Et nous serons bien avancés
quand nous aurons, de chaque côté,
dressé le bilan de nos défaites et reje-
té sur autrui les responsabilités qui
sont, hélas ! bien partagées.
Prenons donc notre parti de ce qui
est ; sachons nous accommoder de ce
que nous avons.
A la situation présente, qui n'est
pas, je le reconnais, sans danger
pour l'ensemble du Parti républicain,
appliquons le seul remède efficace :
faisons la Réforme électorale.
D'où viennent le trouble et le malai-
se ? De ce que, dans la plupart des
circonscriptions électorales, l'issue de
la lulte dépend uniquement des réac-
tionnaires. Il leur suffit de ne pas pré-
senter de candidat pour être assurés
que l'élu, quel qu'il soit, leur devra
son succès. Par cela seul que dans le
collège électoral une minorité s'offre
à qui saura la prendre, tous les can-
didats, tous les partis en lutte manœu-
vrent de son côté.
Les réactionnaires peuvent alors,
sans risques, sans frais, sans lutte, ti-
rer le meilleur parti d'une bataille
dont les combattants sortent diminués
au seul profit des témoins de la ren-
contre-
Généralisez cette situation, allez
aux élections générales avec le scru-
tin d'arrondissement, et vojus aurez
une Chambre où les républicains d'éti-
quette seront en immense majorité,
mais d'où l'èsprit laîque et réforma-
teur qui fait la force et qui est la rai-
son d'être de l'idée républicaine, aura
'à peu près disparu- -
Quand il serait si simple d'en finir
avec les équivoques et les coalitions
par l'établissement d'un système élec-
toral qui, pour rendre à tous les par-
tis la liberté de leurs mouvements, né
leur permettrait de ne compter que
sur eux-mêmes il
Pour être élu, dans le système ac-
tuel, il faut réunir la majorité des'
voix. Et voilà pourquoi les candidats
courent après tous les suffrages et em-
ploient tous les moyens.
v Pour être 'élu, dans le système basé
"sur le scrutin de liste et la R. P., il
faudra avoir la confiance de son parti
d'abord, les suffrages des électeurs <3e
son parti ensuite.
Les candidats, investis par les grou-
pements radicaux, seront élus par les
seuls électeurs radicaux ; les candi-
dats socialistes, choisis par les mili-
tants socialistes, seront élus par les
seuls électeurs socialistes.
La politique de parti entrera â la
Chambre avec la Proportionnelle .;
c'est la Proportionnelle qui fournirai
la majorité de gouvernement néces-
saire, tout en assurant le contrôle des
minorités-
Faites cètte réforme-là, si vous vou-
lez rendre le Parlement a sa fonction
et donner au régime parlementaire le
prestige dont il a besoirf. ,
Il n'en est pas Ge plus ufgëftïé hi
de plus nécessaire- La politique répu-
blicaine ne retrouvera que par elle son
équilibre et sa direction.
Alexandre VARENNE,
Ancien député.
LA POLITIQUE
40*
AUTOUR DES DEUX BLOCS
le Rappel — nos lecteurs ne
s'en doutaient guère — vient,
oarait-il, de « témoigner (l'une
Irien grande nervosité »
C'est notre excellent confrè-
re. M. Gaston Caqniard, qui
porte ce diagnostic dans la Petite Répu-
blique, et il ajoute : « Nervosité, qui le
conduit même à voir les chQses de tra-
vers. »
Le cas est donc sérieux. Maladie ner-
veuse accompagnée de troubles visuels,
.uniquement parce que nous n'avons
pas pour M. Aristide Briand les yeux,
comme on Misait au Grand Siècle, Ue M.
Gaston Cagniard.
l'out l'émoi de notre confrère, que
nous remercions en passant de l'aima-
ble intérêt qu'tï veut bien nous porter,
provient en effet ¡j'un récent Editorial
où nous commentions l'intervention à
la tribune de l'ancien président du Con-
seil. s
« Editorial étonnamment contradic-
toire », gémit M. Gaston Cagniard. A
tort ; nous allons le lui prouver.
Que notre loyal confrère veuille bien
s'imposer l'ennui 'de nous i eli-re - les
nerfs détendus — et il constatera que
nos appréciations sont aussi claires que
conformes à la vérité.
Que disiojis-nous ?
Nous avons loué tout d'abord, et en
termes que M. Gaston Cagniard lui-mê-
me ne élésa,vDJ,terait pas, l'admirable ta-
lent de parole de l'ancien président du,
Conseil.
Puis, nous avons reconnu que les vio-
lences de ses anciens collègues révolu-
tionnaires avaient provoqué sur tous les
bancs, même sur ceux de la gauche,
une protestation et une manifestation
de sympathie.
Enfin, nous avons constaté que la
seule présence de M. Briand à la tri-
bune avait galvanisé tous les déchets
'de réaction qui sommeillent à la Cham-
bre, et que le lendemain toule la presse
réactionnaire, cléricale et progressiste,
avait reformé un bloc unanime et.
symbolique 'dernére le grand ténor de
l'Apaisement.-
Que M. Aristide Briand y ait consen-
ti, qu'il ait recherché cette manifesta-
tion de sympathie ou de gratitude, nous
ne le pensons pas.
Nous sommes même très 'disposés à
croire qu'il y est tout à fait étranger, et
qu'elle l'a plus gêné que ravi.
Mais, quand on est trop aimé pour.
« soi-même », il arrive parfois de l'être
ainsi contre soi-même.
Quoi qu'il en soit, le Pays républi-
cain, qui ne se pique pas de psycholo-
gie sentimentale et qui est simpliste, a
vu clairement le Blo,c de Droite se dres-
ser en face du Bloc de Gauche. et es-
quisser un retour offensif. Et ce bloc
.apaisé ne lui dit rien qui vaille.
Ceci dit,: nous sommes, suivant son
aimable désir, entièrement d'accord
avec M. Gaston Cagniard « pour affir-
mer qu'il y a mieux à faire dans les
circonstances graves ou nous sommes
que de jeter dans les rangs républicains
des brandons 'de discorde, et d'anémier
la m.æjor-ité iL
Nous ajouterons que le meilleur
moyen tle ne pas diviser, de ne pas
anémier la majorité républicaine, est
Me l'entraîner vigoureusement à l'action
laïque et sociale contre les « apaisés »
toujours à l'affût des 'défaillances répu-
blicaines.
Il n'est pas 'de meilleur terrain 'de
combat pour les vieux républicains tels
que M. Gaston Cagniard.
Aussi sommes-nous. bien certains 'de
nus y rencontrer côte à côte âvec luh
: ., - i
LE FAIT DU JOUR
- - ----------- - -- --
Au MAROC. -~ « Ja bon général. li méchant caïd. » ---
Les On = Dit
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui lundi Y
Lever du soleil, 7 li. 27. du matins --
Coucher du soleil, 4 h. 7 du soir
Lever de la lune, 12 h. 47 du soir.
Coucher de la lune, 9 b. 44 du soir*
Courses à Saint-Ouen*.
AUTREFOIS
L'amour en miroir
J- La reine Elisabeth ayant remarqué tou-
tes les prouesses que Villa Mediana accom-
plissait dans les tournois, sans doute pour
plaire à quelque mystérieuse dame de ses
pensées, lui dit un jour qu'elle voulait ab-
solument connaître sa maîtresse. Villa Me-
diana s'en défendit quelque temps ; mais
enfin, cédant à sa curiosité, il promit de
lui en envoyer le portrait. Le lendemain,
la reine recut un simple petit miroir, et
s'y voyant elle-même elle comprit aussitôt
l'amour de l'Espagnol.
AUJOURD'HUI
Les joies de ce monde
Une des plus charmantes actrices de la
Comédie-Française, célèbre par l'amitié
qu'elle inspira à plusieurs honynes politi-
ques, passant dans la rue Richelieu, est
arrêtée un instant par un embarras de voi-
tures.,
Un aveugle s'approche et s écrie :
— Ma bonne dame, ayez pitié d'un mal-
heureux qui a perdu toutes les joies de ce
monde..,
— Hélas ! dit la belle sociétaire, est-ce
que le pauvre homme fait partie des muets
du sérail ?
Les enseignes bizarres
U
Lu à la devanture d'un plombier, rue des
Récollets :
« Pompe à bière, fournisseur de la
Chambre des députés ».
A la devanture d'une modiste, boulevard
Saint-Denis :
« Chapeaux grand genre. Prix unique :
8 fr. 80 et 4 ir. 80 ».
T
L'iliifflatioi Tunisien
:+.+:-
Puisque les zélateurs passionnés de l'Ad-
ministration tunisienne ne peuvent atten-
dre la défense de M. le résident général
pour distiller leur fiel, et qu'ils cherchent
à peser sur l'opinion publique, par tout
un échafaudage de faussetés et de menson-
ges, nous nous voyons contraints à repren-
dre une polémique que nous avions cru
devoir interrompre pendant la durée des
débats parlementaires.
Il est, malheureusement, des adversai-
res qui interprètent toute attitude loyale
comme un geste de pusillanimité.
C'est du moment où l'on abaisse la poin-
te de l'épée qu'ils profitent pour porter un
coup sournois-
Ces messieurs de l'Administration tu-
nisienne appartiennent à cette noble école.
Et c'est pitié, vraiment, de voir l'insigne
mauvaise foi qui inspire leurs communica-
tions secrètes aux défenseurs de leur détes-
table cause.
Voici le Temps, par exemple, que l'on
supposait capable de vérifier la documen-
tation qu'on lui apporte, et qui n'hésite pas
à couvrir de son autorité, qui fut grande,
les allégations que voici :
« M. Lagrosillière, dit-il, s'est attaché à
dénoncer des spoliations imaginaires, et il
n'a pas dit un mot des spoliations vérita-
bles.
« Les 14.000 indigènes, qu'on a essayé de
déposséder de leur propriété de labia-
el-Houbira, ont multiplié les protesta-
tions. Ils ont revendiqué à Paris même,
tions. la Cour de cassation, jusqu'au Par-
jusqu'à la Cour de cassation, jusqu'au Par-
lement ». -
Autant de lignes, autant de mots, autant
d'erreurs flagrantes et de renseignements
faux.
1° Les indigènes dont il est question
n'ont jamais été 14.000. Ils ont été exacte-
ment 503, ainsi qu'il résulte de la teneur
même du jugement du tribunal de Sousse
du 13 février 1908.
2° Les indigènes dont il esi question
il'onl jamais été dépossédés de leur pro-
priété de Tabia-el-Iloubira, pour la bonne
"ai.son que cette propriété ne leur appar-
tient pas..
3° Les indigènes en question, non seule-
ment ne sont pas propriétaires du domaine
de Tabia-el-Iloubira, mais encore le juge-
ment précité établit que « leur possession
:ollective ne présente pas le caractère d'u-
ni possession annale et légale, n'ayant été
ni paisible, ni conrinue, qu'elle est précai-
re et promiscue 1)..
4° Les indigènes en question ont été dé-
boulés, condamnés aux dépens, et le pro-
priétaire du domaine « maintenu en pos-
session des terrains dont la possession lui
a élé reconnue par l'Etat » avec « le droit
d'en faire expulser tous les occupants ».
5° Le jugement du tribunal de Sousse a
été rendu en dernier ressort ; il est revêtu
de la formule exécutoire.
6° Il est exact qu'un pourvoi ait été in-
troduit devant la Cour de cassation ; mais
uniquement pour un prétendu vice de for-
me : le cumul du petitoire el du posses-
soire.
Or, ce qui constitue précisément un des
scandales de l'Administration tunisienne,
c'est qu'un citoyen français, ayant bénéficié
d'un jugement rendu en dernier ressort et
ayant force exécutoire, se soit heurté à un
refus d'exécution et ait été dépossédé de
son bien par un coup de force inqualifia-
ble.
Si le Temps veut s'engager dans ce dé-
bat, il fera bien de veiller à la source de
ses informations. On assure que c'est M.
Paul Bourde, ancien directeur de l'Agri-
culture en Tunisie, qui éclaire notre con-
frère. M. Paul Bourde, si le fait est exact,
ferait bien d'allumer sa lanterne. Après
avoir illustré son nom en Tunisie, il au-
rait tort de le justifier au Temps.
LIRE EN 28 PAGE :
Les Lundis Révolutionnaires
par Gustave ROUANET
QUESTIONS EXTÉRIEURES
- -
L'Entente Cordiale à la Chambre des Communes
-« WWK»- —
C'est aujourd'hui que commencera, de-
vant la Chambre des Communes, le grand
débat sur la politique étrangère anglaise,
débat qui intéressera le Continent tout au-
tant que les Iles britanniques. ,
En effet, et au fond, il s'agira de juger
l'Entente cordiale elle-même et, en même
temps, l'Entente anglo-russe pour l'Asie.
On comprend qu'un débat de cette im-
portance soit attendu avec quelque curiosi-
té. Nous ne nous tromperions pas, en di-
sant même, qu'il est attendu par beaucoup
avec une certaine anxiété.
En Angleterre, la Triple Entende et l'En-
tente cordiale n'ont pas le don de séduire
tous les esprits. Une fraction de l'opinion
politique est en quelque sorte indifférente
aux questions extérieures.Les partisans du
moindre effort, que l'on appelle là-bas les
Il petits Anglais », par opposition aux par-
tisans de la plus grande Angleterre, s'ef-
fraient de toute perspective diplomatique
qui engagerait l'Angleterre militairement.
Les unionistes du genre de lord Curzon
imaginent que tout irait bien mieux dans
leur pays si la diplomatie nationale ne se
trouvait pas liée, par moments, à celle du
cabinet de Paris ou à celle du cabinet de
Pétersbourg.,
Mais il ne faut pas exagérer l'importance
du rôle que peuvent jouer les « petits An-
glais n ou les « Curzonietes ». Le Gou-
vernement présidé par M. Asquitll a donné
fi; .; ,
trop de marques réelles et sincères de son
dévouement à la Triple Entente pour, que
l'on puisse douter du sens du discours de
sir Edward Gr&y. Les partisans de l'Enten-
de cordiale sont par avance convaincus que
le système qui fonctionne actuellement ne
risque rien. Il ne s'est pas trouvé, en ef-
fet, ni en Angleterre, ni en ¡France, d'ad-
versaires irréductibles du rapprochement
franco-anglais.
Sans doute, dans les deux pays, y a-t-il
eu récemment des critiques élevées contre
certaines modalités de l'Entente et contre
certaines conséquences des accords anté-
rieurs, critiques qui s'effaceront devant un
sérieux examen. En matière d'affaires
étrangères, comme en politique intérieure,
il faut savoir avec quels amis on « blo-
que » et contre quelles attaques on prend
des précautions : là est le fond du dé-
bat.
Ces principes une fois posés, les consé-
quences en découlent naturellement. Mais
nul ne peut estimer, à Londres comme à
Paris, que l'on puisse accepter les avanta-
ges d'un accommodement, sans en pren-
dre en même temps les charges.,
Le discours de sir Edward Grey mettra
bien des choses au point. Mais d'ores et
déjà, on ne voit au profit de qui serait es-
compté,- chez nous ou ailleurs, une détente
de l'Entente,. ,':'
Alblt MILHAUD.
L'ACTUALITÉ
- , -:+.-
LE SCANDALE D'OUDJDA
Un coup de théâtre. — Le caïd avoue ses spoliations.
L'intervention du général Toutée justifiée.
Fonctionnaires incapables ou complices.
'Alors qu'un de nos aimables confrères
prenait plaisir à vouloir nous entraîner
dans des vignes -de Tunisie, nous étions
bien Jnspirés en déclinant cette petite fu-
gue sentimentale, et en persistant à nous
maintenir sur le seul terrain d'Oudjda.
La question, en effet, — malgré toutes
les diversions plus ou moins heureuses,
qui ont été tentées, — était claire.
Oui ou non des actes d'indélicatesse, de
spolialion et de banditisme s'accomplis-
saienl-ils à l'état permanent dans l'amatal
d'Oudjda 1
Qui ou non, des fonctionnaires français
élarienl-ils responsables par incurie, ou
complices de ces méfaits P
Oui ou non, une comptabilité et une cais-
se soumises au contrôle du Haut-Commis-
saire français au Maroc étaient-elles régu-
lières el exacles P -,
- Or, un véritable coup de théâtre, qui
produira sur l'opinion publique une im-
pression profonde, vient d'éclater à Oudj-
da.
Les aveux ,
Le principal accusé, le cald, vient de
faire des aveux complets.
Au départ de la Commission d'enquête —
rentrée à Paris, en le sait, il y a cinq
jours, — le commissaire rapporteur près
le Conseil de guerre a repris son instruc-
tion contre les prévenus restés à Odjdjda :
le cadi, MM. Destailleur, Pandorf, Lor-
geou et divers autres. Cette fois, un résul-
tat certain fut promptement acquis : le
cadi, principal inculpé, a reconnu les ma-
nœuvres dont il était accusé, et a deman-
dé qu'il lui fût permis, à titre de répara-
tion, de restituer les sommes et les biens
indûment obtenus. De plus, il s'engage à
ce que ceux qui avaient été ses associés
ou ses complices, et qui, comme lui, sont
en prison, donnent pour cette réparation
tous les concours pécuniaires.
A la suite de ces importants aveux, le
général Toutée, qui est à Paris, fut mandé
hier au. ministère, et reçut communication
des documents. Voici quelle fut alors la
réponse du général :
— Il n'est point possible de laisser tes
indigènes lésés sans protection. Je tiens
pour nécessaire la réparation des actes
délictueux aujourd'hui reconnus, mais cet-
te réparation ne doit pas aller sans une
réparation matérielle à laquelle ¡ont droit
les victimes 4de pareilles manœuvres. iEn
conséquence, je ne puis Qu'approuver la
demande des inculpés : la réparation com-
plète des injustices, spoliations et de tous
dommages causés par les accusés. »
Ceux-ci ayant reconnu les fautes qui
font l'objet de l'inculpation, acceptent, en
outre, la vérification des titres et la fixa-
tion des dommages, c'est-à-dire tlu mon-
tant des restitutions tel qu'il sera établi
par le magistrat que précisément le géné-
ral Toutée avait chargé de la revision des
biens immobiliers dans l'amalat d'Oudjda.
Les accusés reconnaissent que le juge
Marty, délégué par le Haut-Commissaire,
le général Toutée, a été ,de la plus parfaite
équité. Ils réclament donc que M. Marty
soit l'arbitre appelé à déterminer le mon-
tant des dommages qu'ils auront à payer
à leurs victimes.
Ajoutons que le général Toutée n'a cessé
de protester contre les versions qui ont
été rapportées dans les journaux à Paris,
au sujet de l'arrestation de MM. Destail-
leur- et Pandori. Le général a fourni sur
tous ces points des explications décisives
qui sont depuis quelque temps déjà entre
les mains du Gouvernement.
En effet, ceux qui, de bonne foi sans dou-
te, nous ont monté le détestable « bateau »
du « consul » arrêté par le « général »,
ignoraient complètement dans quelle situa-
tion de subordination complète M. Destail-
leur se trouvait à l'égard du général Tou-
tée.
Un document ignoré
Voici, en effet, quels sont exactement les
attributions du général Haut-Commissaire
(Toutée) et du commissaire du Gouverne-
ment à Oudjda. :
« Le commissaire du gouvernement a
Oudjda est le délégué du flaut-Commissai-
re français dans la partie nord de la ré-
gion fronlièfe ; il est son agent d'exécu-
tion pour loules les questions politiques el
administratives, notamment pour celles qui
se rattachent à l'application du régime des
accords. Il correspond directement avec
lui et ne reçoit d'ordres que de lui. »
(Instructions du 18 janvier 1910, signées
des ministres -de la Guerre et des Affaires
étrangères.)
On voit donc qu'il ne pouvait y avoir
de IconfUt d'attributions, comme on l'a dit,
entre le « consul Il Destailleur et le « gé-
néral .» Toutée.
Le général, conformément a des instruc-
tions ministérielles précises, avait, en M.
Destailleur un agent d'exécution, un su-
bordonné, placé étroitement, uniquement
sous ses ordres, ne recevant d'ordres que
de lui, ne pouvant correspondre qu'avec
lui, et qui, sommé :de justifier de sa. comp-
tabilité par son chef, s'est- révolté contre
son autorité en pays ennemi. Si l'on de-
vait rechercher, dans cet incident scanda-
leux, pnovoqué par M. Destailleur, un
conflit entre « consul et général ,)l, la faute
encore en incomberait seule ^au ministère
klep Afli:\i.r.ÇfJ étrangères) 'q2. a~c qp W*
reté trop connue, a contresigné les ins-
tructions formelles du 18 janvier 1910, pla-
çant son consul sous- l'autorité absolue dui
Haut-Commissdire.
- Quoi qu'il en soit, la situation est d'une
clarté lumineuse. -
D'un côté, le général Toutée, qui a vou-
lu mettre fin à des actes de banditisme qui
pouvaient déshtonorer la colonisation fran-
çaise.
De l'autre icôté, un calti voleur et pré-
varicateur, et des fonctionnaires coupables
d'incurie ou de complicité.
Le Gouvernement va, parait-il, se pro-
noncer.
Ce serait vraiment lui faire injure que
de douter un seul instant de sa décision*
■ ■ » *
Les Cttules d'hier
LE CENTENAIRE DE LOUIS BLANC
DISCOURS DE M. STEEG
Sous la présidence d'honneur de M. Hen-
ri Brisslon, président de la Chambre des
députés, et sous la présidence effective
de M. T. Steeg, ministre de l'Instruction
publique, a eu lieu hier après-midi, à deux
heures, place Monge, la cérémonie com-
mémorative du centième anniversaire de
la naissance de Louis Blanc.
Après une allocution de notre collabo-
rateur, M. Paul Painlevé, député du Ve
arrondissement, M. Steeg, au nom du Gou-
vernement, a rendu hommage à l'un des
fondateurs de la République.
Il s'est félicité de voir groupée autour,
du monument de Louis Blanc « la démo-
cratie parisienne, venue pour honorer
la mémoire du grand révolutionnaire qui
a bravé pour elle tous les périls de la lut-
te, toutes les tristesses de l'exil et l'a tou-
jours aimée d'un si vaillant, d'un si par-
fait amour ».
Pauvre, Louis Blanc a Connu et GOmpris les
pauvres. Il a vraiment fraternisé avec eux.
Dans la mansarde où sa jeunesse a souffert du
froid et de la faim, il s'est juré de renverser,
un ordre social inkiue qui rendait mallieumix
un , si grand nombre de ses frères. Il s'est juré
de détruire l'ignorance et la misère, et son Arne
altérée de justice est allée droit aux conséquen-
ces logiques des principes de 1789. Il pense que
la Révolution inachevée, momentanément inter-
rompue, n'est qu'endormie. Il se fait le prophète
et le héraut de son imminent réveil. Mais il ne
croit pas à la toute-puissance bienfaisante de la
violence et de la colère. La brutalité aveugle dé
la passion qui détruit n'est rien sans la force
de l'idée, seule créatrice. Une révolution doit
être à ses yeux la brusque explosion d'une pen-
sée de justice et de bonté, que des siècles ont
éiahorée et qui brusquement éclate, comme unr
fruit mûr pour ensemencer la terre de ses ger-
mes féconds. Sans conceptions immédiatement
réalisables, une révolution chancelle et succom-
be sous le fracas dee ruines stériles qu'elle en-
tasse. Aussi Louis Blanc trace-t-il par avance
un vaste programme d'action rénovatrice, « l'Or-*
ganisation du travail ».
M. T. Steeg montre que s'il y a des otf-
vrages plus originaux, il n'en est pas de
plus synthétique : « C'est, pourrait-on di-
re, en style parlementaire, un magnifique
avant-projet qui retient et condense, des
diverses doctrines économiques, ce quit
en pourra être, dès demain, inséré dans
l'histoire par l'action politique. » Mais l'i-
déalisme humanitaire de Louis Blanc ne
lui est pas particulier, on le retrouverait
chez beaucoup d'hommes de sa généra-
tion : ce.qui lui appartient bien en pro-
pre, c'est l'effort qu'il fit, comme membre
du Gouvernement provisoire, pour appli-
quer sans retard les principes essentiel?
de sa pensée CI Que cet effort ait échoué,)
bien des raisons l'expliquent. Ce projet, ,si'
beau en apparence, n'était peut-être pas!
viable. Peut-être aussi des adversaires,
dépourvus de scrupules se firent-ils un jeu
de lui susciter des obstacles insurmonta"
bles. » Et cependant bien de ses rêve.,
Sont devenus des réalités.
Les théoriciens sont coupables de faire à la
démocratie de fallacieuses promesses, de la gri-
ser'de mots prestigieux dont le danger est d'au-,
tant plus grand que leur séduction sur la foute
peut être plus facilement, escomptée. 11 ne suf-
lit pas de vanter au peuple ses droits et ses
libertés. 11 faut faire de son droit un pouvoir,"
de sa liberté toute théorique et idéale une liberté
effective et vécue. N'est-ce pas une dérision de
parler de liberté aux meurt-de-faim, aux va-nu-
pieds, a ceux qui plient dès leur naissance sous
le fardeau de la misère et auxquels on dit :
« Agissez, vous êtes libres. Courez, le prix dei
la course est aux plus agiles ! » La liberté n'esq
lien si elle n'est un pouvoir d'action conquis.
non par la violence et l'expropriation, mais pan
une explicite reconnaissance du droit de tous *
l'existence, au travail, au développement de tou*
tes les facultés. Chimérique aussi l'espoir de
triompher du mal par la lutte des clSSes. « La
plaie de la société n'est pas la lutte des CÙlSses.
mais l'ignorance dont elles sont victimes. » En-
fin, les coups de force prétendus libérateurs n.
vaudront jamais l'action méthodique et continue
par laquelle un peuple s'élève sûrement à la
possession des moyens d'exercer son droit, à la
conquête de aA liberté.
M. Steeg a terminé en ces termes :
Nous pouvons, messieurs, nous inspirer dœ
idées de Louis Blanc. Nous avons pour garant
de leur rtoblesse et de leur élévation républi-
caine lexistence même de ce grand honnête
homme qui a tant sacrifié à l'œuvre humaime et
politique qu'il avait entreprise et dont la vie
toute de labeur et de dévouement fut si simple,
si probe, si remplie. On peut critiquer l'oeuvre,
l'homme reste admirable de dignité morale, de
courage civique, de patriotisme sans tache. Ja-
mais l'amour du genre humain n'a détruit en
lui l'amour de la patrie. Il a connu les jours è.
deuil de l'Année terrible, il a pleuré sur les dé-
faites et sur l'invasion de ce pays auquel il
assignait fièrement dans sa pensée la magnifi-
que mission de réconcilier tous les peuples dans
une grande tâche d'émancipation et d'améliora-
tion sociale dont la France serait la'dirigeante
et l'inspiratrice. Mais aux heures les plus sont.
bm il n'a junpis douté, jamais d&espôrô d
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