Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1911-09-28
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 28 septembre 1911 28 septembre 1911
Description : 1911/09/28 (N15175). 1911/09/28 (N15175).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75680972
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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JFUBI 28 SEPTEMBRE 1911. — 81,15179.
LE m SIECLE
l ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
18, fattl. de Strasbourg et 71, pu du Faub.-SMWfîit* PIIII
Bt Cheas MM. LAGRANGE, CERF et O*
fi; place de ta Bourse, 6
Adresse Télégraphique: XIX* SIÈCLB - PAJBU9
A. no :"-IMENTS
- - Trois moia sis mois on dgÇ
Paris -.n. - i L 26
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TÉLÉPHONE : 434-90 et 434-91
Adresser lettres et mandats à rAdministrateur
,
:- ""O. 0 TRIBUNE LIBRE
:' l" — * ':' :
,
Vers les Régies Municipales
(, ,',' - 'tu. ",-,' :o
Le Gouvernement a com-
pris admirablement son de-
voir en face ctes périls que
la crise de l'alimentation
fait courir à l'ensemble des
consommateurs. Il a coura-
geusement apporte des solutions, yu u
reçoive les remerciements du Pays
pour cette politique réalisatrice !
En décidant d'intercaler dans la loi
8e finances des dispositions accordant
aux Communes la faculté de diriger et
de gêner des entreprises coopératives,
le cabinet Caillaux ne préserve, pas
seulement la masse dés travailleurs de
souffrances ou de privations imméri.
tées. Il dresse, dans une netteté et une
crânerie de bon aloi, le programme
du 'parti radical aux prochaines élec-
tions municipales. Il moralise la poli-
tique de clocher en élevant les préoc-
cupations électorales de mai 1912 bien
au: personnelles : il les concentre et les
fixe sur une réconfortante solution du
vaste problème social.
Le Gouvernement trouvera, d'ail-
leurs, une Chambre extrêmement bien
disposée à l'égard de ses projets. Il
faut savoir, en effet, qu'à l'unanimité
la Commission d'administration géné-
rate a émis un vote énergiquement fa-
vorable à une proposition de loi aOIl-
nant aux Communes la faculté d'ex-
ploiter en régie directe toutes les en-
treprises présentant un intérêt géné-
ral.
Ce n'est pas qu'en droit l'Etat ait
jamais pu s'opposer aux essais de ré-
gies municipales. Mais, toutes les fois
que l'autorisation administrative a été
nécessaire, le Conseil d'Etat a été d'a-
vis. que l'intervention des Communes
dans le domaine économique ne paraît
admissible que si elle est légitimée par
'des circonstances exceptionnelles.
Comme l'étranger nous a devancés !
La grande boulangerie municipale de
Budapest vend 25.000 kilogrammes de
pain par jour. Non seulement les ou-
vriers y reçoivent-deg salaires supé-
rieurs à ceux de l'industrie privée,
mais le prix du pain a été abaissé dans
d'invraisemblables proportions. En
août 1909, le kilogramme, vendu 38
centimes par les petits magasins indé-
pendants, a été cédé à 25 centimes par
le service de la ville. A Vérone, en
Italie, le pain se vendait 51 centimes le
kilo. Or, en le faisant de meilleure
qualité, la boulangerie municipale le
cède à 42 centimes et oblige ses con-
currents à abaisser leur tarif à 46 cen-
times.
En Suisse, à Vevey, la municipalité,
en raison des mauvaises récoltes,
achète en gros des tonnes de pommes
de terre et les revend 9 fr. 70 les 100
kilos et 1 fr. 45 les 15 kilos, ce qui re-
présente 25 pour cent au-dessous du
cours.
Plusieurs cités allemandes ont cons-
truit soit des boucheries, soit des abat-
toirs communaux, dont l'intervention
a ramené la viande à des taux raison-
nables. On a pu obtenir une réduction
de plus de 10 pour cent. Sérieux pro-
grès ! ,: ",
C'est en s'inspirant. d'un Itffut senti-
ment de sollicitude ouvrièré que la vil-
ïe-de Milan a municipalisé la ve'Ùté/du
lait, afin de pouvoir le fournir "à la
classe pauvre dans; des conditions de
bonne qualité irréprochable et (le bon
marché évident. N'est-ce point la voie
de prévoyance hygiénique où la socié-
té doit s'engager si elle veut conjurer
les lamentables hécatombes infantiles ?
Les administrateurs de la ville de
Reggio, ouvrant une nouvelle branche
ëe l'activité sociale des Communes,
ont fondé une pharmacie qui a immé-
diatement venclu les médicaments 66
pour cent meilleur marché. Celle-ci
)l'a pas tardé à devenir son propre
fournisseur.
Si l'on veut obtenir une synthèse de
Ce qu'il est possible de réaliser mu-
inicipalement en matière d'alimenta-
tion, on n'a qu'à tourner les regards
vers la capitale de l'Autriche. L'actua-
lité d'une très violente agitation nous
y invite également.
Les régies viennoises comprennent
des halles centrales, un marché aux
;victuailles, un abattoir si grand qu'il
est surmonté oe ponts et de viaducs
de communication. Le ïïïaTché quoti-
dien de la glace possède un réservoir
comprenant 153 compartiments et
5 salles de congélation. On a même
municipalisé l'importante brasserie oe
flannersdorf. Le rachat en a coûté
trois millions. Mais, tandis que dans
les petits débits, on livre trop souvent
à la clientèle des boissons (le qualité
défectueuse et à prix élevés, la Brasse-
rie, assujettie à un contrôle perma-
nent, ne vend que des produits loyaux
et à très bon marché.
Comment se fait-il, cira-t-on alors,
que, - dans une ville qui représente le
plus beau triomphe de la municipali-
sation, aient éclaté, les 17 seplembre
et jours suivants, les plus graves
émeutes qu'ait provoquées la vie chè-
re ? -
Il est surtout fi noter que, dans les
manifestations viennoises, ont pris
place de nombreuses délégations, en
uniforme, d'employés des postes, des
chemins de fer et d'autres fonctionnai-
res de l'Etat ou de la Ville.. ':,
, Eh bien ! le renchérissement peut se
produire malgré les régies communa-
les. La pénurie oes récoltes, les tarifs
douaniers, la spéculation exercent sur
le marché une influence que ne détrui-
sent point et qu'atténuent seulement
les entreprises de solidarité officielles.
Est-ce à dire qu'il faille y renon-
cer ? C'est comme si l'on conseillait la
dissolution des coopératives françai-
ses ! Cependant, elles souffrent du ren-
chérissement, mais beaucoup moins
que les consommateurs considérés in-
dividuellement.
Non ! ne nous lassons pas de rom-
pre une à une les mailles résistantes
dans lesquelles les intérêts particu-
liers retiennent enserré, paralysé et
gémissant, l'intérêt général.
Entre l'Etat, accablé de préoccupa-
tions, et l'individu, isolé dans son
égoîsme ou son dénuement, qui ne
souhaiterait de voir se lever bientôt
l'ère bienfaisante où l'on fera de cha-
que cité comme un vaste foyer fami-
lial, générateur de bien-être, de con-
fort démocratique et de progrès in-
cessant ! -
Albert SAUZDE,
;—
LA POLITIQUE
——
APRES LE DESASTRE
A propos du désastre de Tou-
lon, dont la nouvelle a si dou-
loureusement retenti au cœur
de tous les Français, certains
Me nos confrères, cédant à des
sentiments, ou peut-être à des ressenti-
ments pour le moins déplacés en une si
tragique circonstance, font un rappro-
chement inexact entre la catastrophe de
l'Iéna et celle de la Liberté.
Rapprochement inexact, certes. Non
seulement ce n'est pas la même chose,
mais c'est même absolument le contrai-
re.
La catastrophe de la Liberté sur-
prend tout M monde, la catastrophe de
l'Iéna' ne 'devait: surprendre personne,
le commandant de ce malheureux na-
vire ayant signalé lui-même, dans un
rapport ÕUwiel, le danger qu.'il cou-
rait, dùr fait de la poudreB. On ne
tînt nul éomi) te. àe Ús' avertissements
et le dèsastré se produisit..
La perte de la Liberté, au contrairei
ne, saurait être imputée à pareille -ipeu-r
rie. Il n'y a pas deux semaines, le com-
inondant affirmait, dans son l'apport,
adressé rue Royale, que les poudres en
usage sur la Liberté lui « donnaient
toute satisfaction. »
Au surplus, ces poudres n'ont été
adoptées par la marine que sur l'avis
âune Commission spéciale, composèe
des sommités scientifiques les plus
compétentes et, d'ailleurs, ces poudres
sont les mêmes qu'emploient toutes les
marines de guerre.
Mesures de sécurité., de protection,
de contrôle, toutes celles qiti avaient
été reconnues nécessaires, ou simple-
ment utiles, n'ont cessé d'ètre prises
sur la Liberté.
Il n'est donc que deux explications
possibles à l'épouvantable malheur qui
met la France en deuil.
Ou bien celui-ci est dû à la confla-
gration de la poudre et, alors, autdnt
dire que les plus illustres savants en
pyrotechnie se sont trompés et que,
malgré toutes les précautions,il n'existe
'pas de poudre sûre pour la m'mine i :: ou
bien de toute évidence la catastrophe
est due à un incendie et la poudre n'y
est pour rien.
"Aussi bien, si l'on admet l'hypothèse
de la conflagration îles poudres, com-
ment explique-t-on que notre marine
soit la seule à déplorer des désastres
comme celui d.e la Liberté, et que ceux-
ci se produisent toujours à Toulon ?
Pour nous, l'hypothèse opposée ne
semble faire aucun doute.
Mais comment l'incendie s'est-il al-
lumé ? .- - - 1 , ,
Comment a-t-il pu se. propager' sans
que les soutes aient été noyées ?
M. Delcassé est parti pour Toulon
avec le ferme dessein d'établir les res-
ponsabilités, toutes lés responsabilités,
si hautes soient-elles.
La France a confiance 'dans Tardent
patriotisme qui ranime. Nous voulons
espérer que le Gouvernement ne recu-
lera pas, le cas échéant, devant les ri-
gueurs nécessaires.
POUR LES VICTIMES
- ,_'-+8+-"
L'effroyable catastrophe de la Liberté
laisse après elle de grandes misères, qu'il
importe de soulager sans retard. Des bles-
sés, infirmes pour toujours, des veuves,
des orphelins, de vieux parents désormais
sans soutien, attendent du Pays un geste
généreux.
Il nous parait, et il paraîtra de même
à tous nos confrères, qu'il appartient à la
Presse de prendre l'initiative d'une vaste
souscription, destinée à venir immédiate-
ment et très largement en aide à ces mal-
heureuses victimes, au sort desquelles nui
ne peut rester indifférent. ;
Il faut que dès maintenant les journaux
de Paris et les journaux de province, sans
distinction d'opinion, s'unissent po.ur pro-
voquer parmi leurs lecteurs un grand mou-
vement de solidarité.
Les sommes recueillies pourraient être
centralisées par les syndicats de presse
qui se chargeraient également de leur ré-
partition.
Tous les Français voudront répondre à
cet appel !
Lui seul !
M. Arthuren-ne Meyer écrit à propos de
la catastrophe de la Liberté :
« 350 morts, la Liberté, une magnifique
unité navale perdue ; une autre compromi-
se, la République, inutilisée pour de longs
mois, voilà les terrifiantes nouvelles qui
viennent attrister mes derniers jours de va-
cances, à Fontainebleau ».
La villégiature de M. Meyer troublée.
Voilà qui est vraiment triste ! '¡,
Comment la divinité qui, au dire de no-
tre Arthur national, a dirigé ces malheu-
reux événements, n'a-t-elle pas pensé qu'un,
homme deux fois sien — par la circoncision
et par le baptême — allait avoir une mau-
vaise fin de villégiaturé !
C'est bien le premier cri d'un grand Fran-
çais à l'annonce d'un tel malheur : « Cré-
dié ! ma digestion va être troublée ! »
Mes derniers jours de vacances !
Ce que mes yeux ont vu !
Ce qiue mes oreilles ont entendu1 !
Moi seul, et c'est assez !
Mais pardonnons à M. Arthurenne Meyer.
Il est clair que l'âge a troublé ses esprits.
Son article : « Pleurons et prions » en est
l'indiscutable preuve.
Comment d'aussi tragiques circonstances
peuvent-elles inspirer d'aussi risibles cho-
ses ?
Ces une espèce de revue de fin de va-
cances où M. Pelletan défile, flanqué du gé-
néral Samrail et de M. de Max. Et, en vérité,
qfuand M. Meyer, en manière de conclusion,
convie M. Fallières à prier avec lui, pour
les morts, cette divinité stupide, qu'il ap-
pelle Providence et qu'il accuse de tout le
mal, on se demande si lé vieux petit mon-
sieur possède encore assez de lucidité pour
distinguer entre le dieu de sa jeupesse et
celui du maréehal de Turenne !
■ "■ ♦ ■* -■ * "* ■-
Ne pas confondre
—+++— .:
Il M. Drioux vient de reprendre l'instruc-
tion dont il est chargé concernant les dé-
tournements commis au quai d'Orsay.
« Accompagné de son greffier, M. d Vige-
ry, et de MM. Jouin, sous-chef, et Robert,
inspecteur principal de la Sûreté, le juge
s'est transporté hier, vers une heure et
demie, au ministère des Affaires étràngè-
I*6S -'
« Reçu par MM. Mabire, cîtëf de bureau
et Montréal, inspecteur des Finances, le
magistrat fut conduit.., etc. m
- Il ne s'agit pas, comme on pourrait le
croire, d'une opération judiciaire relative
aux affaires Tunisiennes.
On s'occupait seulement de la compta-
bilité fantaisiste de l'ex-directéur Hatnon.
Mais il ne faut :déeespérer de rien ! La
justice sait maintenant le chemin des bu-
reaux du quai d'Orsay espérons qu'elle
ne l'oubliera pas ! > ,
Français et Républicains
..-+--
Après MM. Roux-Costadau, Briquet, Rin-
guier voici que M. Alexandre Varenne, an-
cien député socialiste unifié du Puy-de-Dô-
me, est à son tour effrayé par les progrès
que font, dans son parti, les idées de dé-
sordre, d'antipatriotismo et d'anarchie.
Ses sentiments français et républicains
remportent sur une discipline étroite, a la-
quelle il ne sut, d'ailleurs, jamais se plier
complètement. Il a osé braver la censure
des « camarades » et flétrir, dans son jpur-
nal, VAmi du Peuple, ceux qui eurent l'au-
dace de « menacer le Pays, dè saboter la
Défense nationale, crime odieux s'il en fut
contre la Nation et-contre la civilisation,
et que nous n'aurions pas laissé commet-
tre ». Il a affirmé qu' « il y a des questions
d'hoinneur national sur lesquelles il ne sau-
rait y avoir de divergences entre ceux qui
veulent conserver à leur Pays l'indépendan-
ce et la dignité. Le devoir des socialistes
est double : ils ne peuvent pas se croiser
les bras devant les dangers de conflits pos-
sibles et ils ne peuvent pas davantage dé-
serter le devoir national. Il faut ou on sa-
che.à Berlin, que la France n'est pas résir
gnée à subirl'invasion et que-la Patrie, se-
ra par nouis défendue jusqu'au deriiiep:.h,tt'm,.
me. Tenons-nous prêts à accomplir.s'il le
faut, tout notre devoir nàtionàl ;
Pour ces paroles si sages et si franche-
ment patriotiques, une section socialiste pa-
risienne, dont les mcmbrès ont évidemment
pérdu la notion du grotesque, propose tout
simplement l'excommunication de M.
Alexandre Varenne.
Nous n'éprouvons, pour notre part, aucu-
ne surprise à voir un esprit aussi distin-
gué et aussi plein de bon sens rompre net-
tement avec les saboteurs et tous les fau-
teurs de désordre.
Et si, pour s'être déclaré Français, il est
exclu du parti unifié, il s'en consolera vite,
en constatant qu'il a pour lui tous les ré-
publicains socialistes dignes de ce titre.
- -
Les Affaires du Maroc
i 9
LES NEGOCIATIONS
FRANCO-ALLEMANDES
Berlin, 26 septembre. — L'entretien que
M. Cambon a eu hier avec M. de Kiderlen-
Waechter a duré deux heures.
On déclare à Berlin que la réponse de la
France est satisfaisante* : Toutefois quel-
ques changements dans la rédaction sont
encore nécessaires.
V M. de Kiderlen-Waechter a eu ce matin
une entrevue avec M. de Bethmann-Holl-
weg. Il recevra M. Cambon probablement
ce soir. Le texte de l'accord sera ensuite
soumis une fois encore a Paris. C'est donc
au plus tôt à la fin-de la semaine que les
pourparlers sur la question marocaine
pourront s'achever.
Les négociations suivent d'ailleurs une
marche favorable.
LES FUTURES NEGOCIATIONS
FRANCOVESPAGNOLES
Madrid, 2G septembre. — Les négocia-
tions franco-espagnoles commenceront
quand on connaîtra les conclusions aux-
quelles auront abouti les conversations de
Berlin.
L'Espagne veut s'assurer au Maroc l'a-
grandissement territorial auquel elle aspi-
re depuis la perte de ses colonies, et elle
a dépensé 120 millions de pesetas dans ses
expéditions marocaines. En outre, elle
éprouve un peu de malaise à la perspective
de rencontrer -dans le sud sa voisine du
Nord. EHe se voit prise en quelque sorte
entre la France continentale et la France
d'Afrique.
C'est ce qui explique l'ardeur qu'elle ap-
porte à défendre ce qu'elle considère com-
me ses droits, en Afrique et la passion qui
l'a. parfois emportée contre sa rivale plus
riche et plus forte.
On fait aussi ressortir ici que l'Espagne
ne serait pas pour la France une alliée à
dédaigner. Elle peut en quinze jours mettre
sur pied une première armée de 360.000
hommes aguerris et bien équipés.
L'Espagne a déclaré, par la bouche du
premier ministre, qu'elle défendrait la ter-
re qu'elle avait conquise tant qu'il lui reste-
rait un homme et un fusil, mais il peut pas
être question d'une guerre entre l'Espagne
et la France pour mille raisons admises par
tous. La négociation qui va s'engager sera
donc une discussion courtoise et. qui, on
peut l'espérer, aboutira à un accord.
Les sacrifices de la France en Afrique,
en hommes et en argent, sont bien supé-
rieurs à ceux de l'Espagne. Ses intérêts
économiques sont également beaucoup
plus considérables. Les Espagnols le recon-
naissent volontiers:, On ne se dissimule
pas non plus que la, France aura eu à"
payer chèrement la liberté d'agir au .Ma-
roc, en sacrifiant une de ses colonies.
Le gouvernement espagnol, dit-on ici,
n'est pas opposé au principe d'une, com-
pensation à accorder &- la France : mais
:c'est sur l'objet à céder que l'entente de-
vient difficile. La compensation qui con-
viendrait davantage à la France serait
une cession de territoires au nord du Ma-
roc, mais l'Espagne est absolument irré-
ductible sur ce point. Quant au sud, il lui
tint à cœur presque autant que le nord.
Le Diario universal, organe libéral du
comte Romanones, déclare que jamais en
aucun cas l'Espagne ne consentirait à
l'abandon de Larache et ù'EI-Kçar, qui
sont compris dans la zone d'influence es-
pagnole reconnue par le traité de 1904,
sans qu'une modification préalable soit ap,
portée au traité en vigueur.
Force serait donc de revenir :au) sud
puisque l'e principe d'une compensation
est adopté. -
Le traité de 1904 a concédé à l'Espagne
une zone d'influence considérable qu'elle
ne. peut songer à mettre en valeur et où
elle trouvera de quoi nous indemniser des
sacrifices consentis. ;
Pour ce qui est du clîemin de fer, de Fez,
qui doit passer aussi par EI-Kçar, il n'est
pas téméraire d'affirmer qu'une solution
amicale de la question serait déjà envisa-
gée à Madrid.
On peut espérer que. le cabinet Canale-
jaSi qui a déjà donné plnsièurs fois des
preuves de modération et de férmeté, - sau-
ra toutefois résister aux injonctions des
partis d'extrême droite et hâtera la solu*-
Uon désirable. ., -. -'
- ., L'ACTUALITÉ
,
Le lendemain
de la Catastrophe
-, * 1 !
Triste bilan. — La liste des victimes. - Les sauvetages
La Journée à Toulon. — Les condoléances.
Les causes de
la Catastrophe
Quelles ont été les causes de la catastro-
phe de la Liberté ? Y eut-il incendie avant
les explosions ? Ou les explosions allumè-
rent-elles l'incendie ? Les renseignements
qui sont donnés à ce sujet sont tout à fait
contradictoires. Un officier général a fait
lés déclarations suivantes :
« D'après les renseignements qui m'ont
été donnés et après m'être rendu sur les ,
lieux, il semble que le feu aurait éclaté
dans le inagasin général du navire, conte-
nant des peintures et des huiles. L'incen-
die se serait alors communiqué de là aux
soutes dont on ne put ouvrir les vannes.
La poudre B7 ne serait donc 'pas en cause ».
: Signalons, en passant, que des hommes
qui s'étaient, jetés à la mer pour s'éloigner
du navi re, au ee«nmençement d u sinistre,
entendirent la sonnerie, du clairon rappe-
lant à l' « incendié. ,.».', Ils regagnèrent je
bol.: : Quelque^minutes après, l'explosion
; se produisait. ljne cinquantaine, ont perdu
là vie dans ces circonstances. ",
Là poudre B ,
L'Agence Havas a communiqué la dépê-
che suivante :
« L'opinion d'après laquelle la déflagra-
tion de la poudre B serait la cause de la
catastrophe s'accrédite danis les milieux ma-
ritimes.
« Vers cinq heures du matin, les hommes
de quart aperçurent une fumée assez den-
se qui s'échappait de l'avant du navire. Us
en informèrent immédiatement leurs offi-
ciers et ceux-ci donnèrent l'ordre de noyer
les soutes par mesure de précaution. -
« Des hommes désignés spécialement re-
çurent la mission d'aller ouvrir les van-
nes qui communiquaient avec la mer afin
de noyer les poudres. Mais ils remontèrent
précipitamment disant que la besogne était
impossible : une fumée âcre, empoisonnée,
montait des soutes, rendant l'approche dan-
gereuse et mémo mortelle en raison du gaz
qui se dégageait. Le danger devenait donc
grave ; rapidement la nouvelle s'en propa-
gea parmi l'équipage, les hommes se. préci-
pitèrent sur les embarcations, tandis que
d'autres se jetaient à la mer. C'est à cet
instant que les secours envoyés par.d'au-:
tres navires et la direction du port arri-
vaient sur les. lieux. Le$officiers de la Li-
berté, afin d'éviter le désordre, et espérant
venir à boult de l'incendie, intervinrent ; la;
panique cessa aussitôt, et avec- un grande
courage, stimulés par l'exemple de leurs of-
ficiers, tous les hommes se portèrent à l'en-
droit assigné. -
« Une première détonation vint malheu-
reusement faire présager le terrible désas-
tre qui allait suivre. ;
« Comprenant qu'il était inutile de sacri-
fier des vies humaines pour sauver un na-
vire, on invita l'équipage à quitter le bord
avec ordre et méthode ; c'est pc dant que
cette opération s'effectuait que la formida-
ble explosion se produisit, anéantissant en
partie les malheureux qui se trouvaient au-
tour du navire embrasé. Il semblerait donc
que la catastrophe serait due à une défla-
gration de la poudre B, comme cela se pro-
duisit à bord de Vléna ». -
L'explosion avant l'incendie
D'autre part, un ingénieur des construc-
tions navales à fait remarquer :
« On a beaucoup parlé d'un incendie an-
térieur aux premières explosions, qui se
sont produites vers cinq heures trente ;
or, le premier télégramme de télégraphie
sans fil, envoyé par Ta Liberté à la préfectu-
re maritime et qui signale un incendie à
bord est de 5 h. 30 ; à 5 h. 35, un deuxième
radiotélégrammo disait : « Quatre explo*.
sions. consécutives se sont produites à une.
minute d'intervalle *. et était mut-sur
l'incendie. ,.. ; -,', - ,' ,':}
«Il ressort de ces faits sions sont vraisemblablement non la con-
séquence, mais au cpntra'ire la oause dè
l'incendie. , ; ,',
« Un autre, fait cWb) bien prouver qu'il
n'y à pas en d'incendie à bord avant les
explosions de h 35: C'est que le -rà e
aux postes d'incendie n'a été sonné quTà
5 h. 40, cinq minutes après les petites ex-
plosions.
« Des témoins oculaires nous ont, du res-
te, affirmé que ce n'est qu'après les peti-
tes explosions qu'ils ont remarqué que de
la fumée sortait vers le mat ; un mate-
lot de la Liberté, notamment, a dit que c'est
par la casemate tribord avant cpje Je feu a
commencé.
« La vérité, c'est que la première défla-
gration a dû se faire dans la soute de 190
et la fumée a dû sortir par cette casemate
en montant par le monte-charge, la porte
de oommunication de la soute avec le cor-
ridor tribord n'étant pas fermée.
« Au point de vue du noyage des soutes,
il faut se rendre compte que l'opération de-
mande au moins trente minutes, tandis
ciu.'il n'y a eu que dix-neuf minutes entre
l'alerte de 5 h. 35 et l'explosion, qui a eu
lieu à 5 h. 55. L'opération n'a pu donc être
matériellement exécutée, même. en admet-
tant que tous les appareils aient normale-
ment fonctionné.
« Il n'est pas douteux que la soute de 190
avant ait sauté, puisqu'un quartier-maître
du Cecitt a étéiué par la coiffe d'un projec-
tile de 190. Les soutes de 360 avant ont éga-
lement fait explosion, car tout l'avant du
bâtiment est défoncé et aussi, les parties su-
périeures ».
Les victimes
Le nombre des
-, morts serait de 300
Tous les réchappés de la Libàté, recueil-
lis à bord des autres navires des escadres -:
ont été rassemblés hier matin sur. le dé
barcadère des appontements.
Aïkfur et à masure que chaque bètimenl
ramène des survivants, ces dernier sont
classés par spécialités et un gradé en dres-
se la liste. Cette opération, à laquelle as-
siste l'amiral Bellue,ne peut être effectuée.
aussi rapidement que l'on voudrait.
On dit, cependant;- que le nombre de9
réchappés serait de 453, auxquels il con- t >
vient d'ajouter une centaine de blessés
transportés dans les hôpitaux, ce qui fait
un total de 550 survivants environ.
Le nombre-des moirts, rien que pour lui
Liberté, serait^donc à peu près de .200. > ;
A ce chiffre il convient d'ajouter 35 man-
quants signalés daïïs la troisième escadre, èt. i
une soixantaine dans la seconde, >
Le bilan de la catastrophe, en ce qui con"
cerne les morts seulement, pourrait doiie
être évalué approximativement à 300.
Les blessés
Voici la liste des blessés du cuirassé Li-
berté :
Lieutenant de vaisseau Strullu, commissaire
Cavaro de Kergorre, Jean Vigoureux, élève offi-
cier ; CJaude Monlherat, ouvrier mécanicien ;
Lescouanec-Roux, fusiller ; Louis Crion, fjuartieiv
niaître chauffeur ; Marcel Pouillard, ouvrier mé-
canicien ; Jean Guelleux gabier ; Jean Amlavot,
quartier-maître torpilleur ; Léon Groissard, mate-
lot ; Ernest-Gueze, enauffeur ; Alex BarmluÕ"
ouvrier mécanicien ; Henri Le Marrec, quartier-
maitre mécanicien ; Jean Le Biton; quartier-
maître chauffeur ; Gaston Bêrtot, ouvrier méca-
nic-ieii ; Joseph Le Forest, ouvrier mécanicien ;
Vincent Maho, fusilier ; Louis Miossec, matelot. ;
Marcel Daguenet, ouvrier mécanicien ; Paul Ste-
phan, matelot-fusilier ; Pierre: Le Meur, chaur..
leur.-; Lucien Descouler, gabier ; Jean Trucci, :
matelot - ; Gaston Gosse, ouvrier mécanicien ;
Feroand Champion, quartier-maître mécanicien ;
Pierre Guilhennène, quartier-maître mécanicien ;
Louis Guillebaud, ouvrier mécanicien ; François
Joucour, fusilier ; Gabriel Legùff, quartier-maître
chauffeur ; Charles Vatinal, mécanicien torpil-
leur f Alexandre i>ebïanc, matelot ; Nicolas Le
Gall, fusilier-; Gast # orvéille, matelot ; Frà ;
çois Lé Gatt, tatiWar ; 'Ftaâjçeis -
Rouxel, gabier ; Frsftçoû Pérot», ^îeuxiëme
tre fourniér; Maurice Anchere; ouvrier mécani
ciein ; ^iffîàuaae Déc -
rue,second-maître canonier;Pierre cloche; -
nonnier ; Jacques. JtaUaiMf, quart)er-ma-l Mu-
langw-ce^ * PeJr ftteiliôr< ; Etienne; 'f'ttér.'
cihauffeur ; Philippe Chauchat, chauffeur ; Au-
.guste Garzuel, fusilier ; Clotaire Robillard, ca- -
nonnier ; Pierre Guégan, second-maître, canon.
nier ; Charles Godic, canonnier ; Pierre, second-
maître canonnier; Joseph Madec, apprenti ma-
l'in ; Thierry, chauffeur auxiliaire ; Glamor,
chauffeur breveté ; François Robial, fusilier ;
Michel Provost, quartier-maître chauffeur ; Fran-
çois llello, matelot torpilleur ; Deschamps, ca-
nonnier ; Cochaid, fourrier Dominique Claitiifi,
ouvrier mécanicien ; André Garrigan, ouvrier
mécanicien ; Louis Pothier, fusilier ; Jean Heran,
gabier ; Fernand Barbe, ouvrier mécanicien ;
Georges Chouvet, quartier-maître armui-ier ; Jean
GaJand, quartier-mailre canonnier ; Arthur Bou-
quin, fusilier ; Mathurîn Doudet, canonnier ;
îStO>phan Rnnigo, fusilier ; Louis Clochet, méca-
nicien ; -Antoine Piquerial, chauffeur ; Jacques
Mare, quartier-maître de manœuvre ; Yves Me-
riès, canonnier ; Joseph Laval, matelot ; Louis
Rouvier, chauffeur ; Charles Trojani, matelot
torpilleur ; Yves Philippe, quartier-maître chauf-
feur ; Vincent Le Paulichat, quartier-maître mé-
canicien ; Auguste Daras, torpilleur ; Gustave
Cambon, chauffeur.
On communique la liste suivante de?
res navires ..,
.Ëôkiefk. Masse, appïenti ; top^eurt:4a ,Btenr :
Haô ; < Alderte- Vatflio, • Justice* ;.-AJur-
re», .du JJépreeràiie ; Eugène. Dequelle; q.ti{,ie,l' -
-Miaitee 4^ iRaioa^vre^'du fustiçë:; Joseph "M're'::"
tinlcmieit. brevetée/da- R&pubi^qué ; Loirip^^ .Buanic,
gabier breveté; èiïMfiubMque ¡;, eet m.'
letot; du" Miitseitt&iie ; Aî&fè l^Qûxvgar>iei> bré- -
'veiêi de ÎE&gàt-Qtiinetr; i'teS' Bi'zcrlio, gar-Quinet ; Georges. Guitot. :m^telot, du Repu*
6i%ue iîermaiik; Le GouiCj /qBarlièç-^aitrè de
manoeuvre du Foudre ; Àléi&andre Alatlle, gabier,
breveté-, du ./Mmatelot, du République ; Henri Le Tallec, gabier,
du Lèon-Gambetta ; Georges Eveno, fusilier; du
Suffren ; Victor Viezil, matelot-mécanicien, dia
Démocratie ; Yves Le Meyet, fusilier, du Sutfren ;
Louis Bavarano, matelot du Marseillaise ; Pier-
re Mingnant, matelot, du Marseillaise ; François
Le Floch, chauffeur, du République ; Emile Gai-
lon, chauffeur breveté, du Justice ; Michel Auf-
fret, canonnier breveté, du Marseillaise ; Joa-
chim Le Guillou, 2" maitre, du Justice ; Fernand
Le Bras, quartier-maître de manœuvre, du Jus-
tice ; Louis Le Guyader, gabier, du Walaeca;
Rousseau ; Augustin, Hellocq, fusillier auxiliaire,
du République ; Paul Ricard, matelot, du Repu-
bligue ; François Le Siou, gabier, du Marseil-
laise ; Charles Guénard, torpilleur breveté, du
Jules-Ferry ; Emile Le Looer, timonier, de l'Ami-
ral-Aube ; IAexa.ndr,", Le Vachet, mécanicien,
du République ; François Biarrhée, canonnier
auxiliaire, du République' ; Guillaume Causse,
timonier breveté, de VAmiral-Aube ; Louis La
Goff, matelot, .du Justice ; Charles Bois, .rUlsj)je
breveté, du Suffren ; Adrien Le Guellec, matelot,
du Marseillaise ; Emile Daniel, matelot, du Jau.
règuiberry ; -Augustin ,Roy" torpilleur brevete.
du Démocratie- Maurice, apprenti marin, du
Justice ; Michel Gentil, matelot, du ]Jon-Gam-
betla ; Ange Petit, canonnier breveté, du Justice :
François Légal, fusilier auxiliaire, du Justice ;
Jean Puyin, chauffeur auxiliaire, du Justice ;
Adolphe Mate, 2e maître de mousqueJerie, dit
Suffren ; Malic, fusilier, du Justice ; Culeaud,
timonier, du Justice : Eugène Bouiles, canonnier,
de l'Amiral-Aubc ; Arthur Bernaert, matelot, du
Justice ; François Pratucci, matelot, du Jute*
Michelet ; Louis Catozano, matelot, du Vérité. ',
JFUBI 28 SEPTEMBRE 1911. — 81,15179.
LE m SIECLE
l ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
18, fattl. de Strasbourg et 71, pu du Faub.-SMWfîit* PIIII
Bt Cheas MM. LAGRANGE, CERF et O*
fi; place de ta Bourse, 6
Adresse Télégraphique: XIX* SIÈCLB - PAJBU9
A. no :"-IMENTS
- - Trois moia sis mois on dgÇ
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M 9 boni à soir à 3 hues ds raatii, 123, rte IOBtmartrt TOépfaeae 143-93
FONDATEUR: EDMOND ABOUT-
TÉLÉPHONE : 434-90 et 434-91
Adresser lettres et mandats à rAdministrateur
,
:- ""O. 0 TRIBUNE LIBRE
:' l" — * ':' :
,
Vers les Régies Municipales
(, ,',' - 'tu. ",-,' :o
Le Gouvernement a com-
pris admirablement son de-
voir en face ctes périls que
la crise de l'alimentation
fait courir à l'ensemble des
consommateurs. Il a coura-
geusement apporte des solutions, yu u
reçoive les remerciements du Pays
pour cette politique réalisatrice !
En décidant d'intercaler dans la loi
8e finances des dispositions accordant
aux Communes la faculté de diriger et
de gêner des entreprises coopératives,
le cabinet Caillaux ne préserve, pas
seulement la masse dés travailleurs de
souffrances ou de privations imméri.
tées. Il dresse, dans une netteté et une
crânerie de bon aloi, le programme
du 'parti radical aux prochaines élec-
tions municipales. Il moralise la poli-
tique de clocher en élevant les préoc-
cupations électorales de mai 1912 bien
au:
fixe sur une réconfortante solution du
vaste problème social.
Le Gouvernement trouvera, d'ail-
leurs, une Chambre extrêmement bien
disposée à l'égard de ses projets. Il
faut savoir, en effet, qu'à l'unanimité
la Commission d'administration géné-
rate a émis un vote énergiquement fa-
vorable à une proposition de loi aOIl-
nant aux Communes la faculté d'ex-
ploiter en régie directe toutes les en-
treprises présentant un intérêt géné-
ral.
Ce n'est pas qu'en droit l'Etat ait
jamais pu s'opposer aux essais de ré-
gies municipales. Mais, toutes les fois
que l'autorisation administrative a été
nécessaire, le Conseil d'Etat a été d'a-
vis. que l'intervention des Communes
dans le domaine économique ne paraît
admissible que si elle est légitimée par
'des circonstances exceptionnelles.
Comme l'étranger nous a devancés !
La grande boulangerie municipale de
Budapest vend 25.000 kilogrammes de
pain par jour. Non seulement les ou-
vriers y reçoivent-deg salaires supé-
rieurs à ceux de l'industrie privée,
mais le prix du pain a été abaissé dans
d'invraisemblables proportions. En
août 1909, le kilogramme, vendu 38
centimes par les petits magasins indé-
pendants, a été cédé à 25 centimes par
le service de la ville. A Vérone, en
Italie, le pain se vendait 51 centimes le
kilo. Or, en le faisant de meilleure
qualité, la boulangerie municipale le
cède à 42 centimes et oblige ses con-
currents à abaisser leur tarif à 46 cen-
times.
En Suisse, à Vevey, la municipalité,
en raison des mauvaises récoltes,
achète en gros des tonnes de pommes
de terre et les revend 9 fr. 70 les 100
kilos et 1 fr. 45 les 15 kilos, ce qui re-
présente 25 pour cent au-dessous du
cours.
Plusieurs cités allemandes ont cons-
truit soit des boucheries, soit des abat-
toirs communaux, dont l'intervention
a ramené la viande à des taux raison-
nables. On a pu obtenir une réduction
de plus de 10 pour cent. Sérieux pro-
grès ! ,: ",
C'est en s'inspirant. d'un Itffut senti-
ment de sollicitude ouvrièré que la vil-
ïe-de Milan a municipalisé la ve'Ùté/du
lait, afin de pouvoir le fournir "à la
classe pauvre dans; des conditions de
bonne qualité irréprochable et (le bon
marché évident. N'est-ce point la voie
de prévoyance hygiénique où la socié-
té doit s'engager si elle veut conjurer
les lamentables hécatombes infantiles ?
Les administrateurs de la ville de
Reggio, ouvrant une nouvelle branche
ëe l'activité sociale des Communes,
ont fondé une pharmacie qui a immé-
diatement venclu les médicaments 66
pour cent meilleur marché. Celle-ci
)l'a pas tardé à devenir son propre
fournisseur.
Si l'on veut obtenir une synthèse de
Ce qu'il est possible de réaliser mu-
inicipalement en matière d'alimenta-
tion, on n'a qu'à tourner les regards
vers la capitale de l'Autriche. L'actua-
lité d'une très violente agitation nous
y invite également.
Les régies viennoises comprennent
des halles centrales, un marché aux
;victuailles, un abattoir si grand qu'il
est surmonté oe ponts et de viaducs
de communication. Le ïïïaTché quoti-
dien de la glace possède un réservoir
comprenant 153 compartiments et
5 salles de congélation. On a même
municipalisé l'importante brasserie oe
flannersdorf. Le rachat en a coûté
trois millions. Mais, tandis que dans
les petits débits, on livre trop souvent
à la clientèle des boissons (le qualité
défectueuse et à prix élevés, la Brasse-
rie, assujettie à un contrôle perma-
nent, ne vend que des produits loyaux
et à très bon marché.
Comment se fait-il, cira-t-on alors,
que, - dans une ville qui représente le
plus beau triomphe de la municipali-
sation, aient éclaté, les 17 seplembre
et jours suivants, les plus graves
émeutes qu'ait provoquées la vie chè-
re ? -
Il est surtout fi noter que, dans les
manifestations viennoises, ont pris
place de nombreuses délégations, en
uniforme, d'employés des postes, des
chemins de fer et d'autres fonctionnai-
res de l'Etat ou de la Ville.. ':,
, Eh bien ! le renchérissement peut se
produire malgré les régies communa-
les. La pénurie oes récoltes, les tarifs
douaniers, la spéculation exercent sur
le marché une influence que ne détrui-
sent point et qu'atténuent seulement
les entreprises de solidarité officielles.
Est-ce à dire qu'il faille y renon-
cer ? C'est comme si l'on conseillait la
dissolution des coopératives françai-
ses ! Cependant, elles souffrent du ren-
chérissement, mais beaucoup moins
que les consommateurs considérés in-
dividuellement.
Non ! ne nous lassons pas de rom-
pre une à une les mailles résistantes
dans lesquelles les intérêts particu-
liers retiennent enserré, paralysé et
gémissant, l'intérêt général.
Entre l'Etat, accablé de préoccupa-
tions, et l'individu, isolé dans son
égoîsme ou son dénuement, qui ne
souhaiterait de voir se lever bientôt
l'ère bienfaisante où l'on fera de cha-
que cité comme un vaste foyer fami-
lial, générateur de bien-être, de con-
fort démocratique et de progrès in-
cessant ! -
Albert SAUZDE,
;—
LA POLITIQUE
——
APRES LE DESASTRE
A propos du désastre de Tou-
lon, dont la nouvelle a si dou-
loureusement retenti au cœur
de tous les Français, certains
Me nos confrères, cédant à des
sentiments, ou peut-être à des ressenti-
ments pour le moins déplacés en une si
tragique circonstance, font un rappro-
chement inexact entre la catastrophe de
l'Iéna et celle de la Liberté.
Rapprochement inexact, certes. Non
seulement ce n'est pas la même chose,
mais c'est même absolument le contrai-
re.
La catastrophe de la Liberté sur-
prend tout M monde, la catastrophe de
l'Iéna' ne 'devait: surprendre personne,
le commandant de ce malheureux na-
vire ayant signalé lui-même, dans un
rapport ÕUwiel, le danger qu.'il cou-
rait, dùr fait de la poudreB. On ne
tînt nul éomi) te. àe Ús' avertissements
et le dèsastré se produisit..
La perte de la Liberté, au contrairei
ne, saurait être imputée à pareille -ipeu-r
rie. Il n'y a pas deux semaines, le com-
inondant affirmait, dans son l'apport,
adressé rue Royale, que les poudres en
usage sur la Liberté lui « donnaient
toute satisfaction. »
Au surplus, ces poudres n'ont été
adoptées par la marine que sur l'avis
âune Commission spéciale, composèe
des sommités scientifiques les plus
compétentes et, d'ailleurs, ces poudres
sont les mêmes qu'emploient toutes les
marines de guerre.
Mesures de sécurité., de protection,
de contrôle, toutes celles qiti avaient
été reconnues nécessaires, ou simple-
ment utiles, n'ont cessé d'ètre prises
sur la Liberté.
Il n'est donc que deux explications
possibles à l'épouvantable malheur qui
met la France en deuil.
Ou bien celui-ci est dû à la confla-
gration de la poudre et, alors, autdnt
dire que les plus illustres savants en
pyrotechnie se sont trompés et que,
malgré toutes les précautions,il n'existe
'pas de poudre sûre pour la m'mine i :: ou
bien de toute évidence la catastrophe
est due à un incendie et la poudre n'y
est pour rien.
"Aussi bien, si l'on admet l'hypothèse
de la conflagration îles poudres, com-
ment explique-t-on que notre marine
soit la seule à déplorer des désastres
comme celui d.e la Liberté, et que ceux-
ci se produisent toujours à Toulon ?
Pour nous, l'hypothèse opposée ne
semble faire aucun doute.
Mais comment l'incendie s'est-il al-
lumé ? .- - - 1 , ,
Comment a-t-il pu se. propager' sans
que les soutes aient été noyées ?
M. Delcassé est parti pour Toulon
avec le ferme dessein d'établir les res-
ponsabilités, toutes lés responsabilités,
si hautes soient-elles.
La France a confiance 'dans Tardent
patriotisme qui ranime. Nous voulons
espérer que le Gouvernement ne recu-
lera pas, le cas échéant, devant les ri-
gueurs nécessaires.
POUR LES VICTIMES
- ,_'-+8+-"
L'effroyable catastrophe de la Liberté
laisse après elle de grandes misères, qu'il
importe de soulager sans retard. Des bles-
sés, infirmes pour toujours, des veuves,
des orphelins, de vieux parents désormais
sans soutien, attendent du Pays un geste
généreux.
Il nous parait, et il paraîtra de même
à tous nos confrères, qu'il appartient à la
Presse de prendre l'initiative d'une vaste
souscription, destinée à venir immédiate-
ment et très largement en aide à ces mal-
heureuses victimes, au sort desquelles nui
ne peut rester indifférent. ;
Il faut que dès maintenant les journaux
de Paris et les journaux de province, sans
distinction d'opinion, s'unissent po.ur pro-
voquer parmi leurs lecteurs un grand mou-
vement de solidarité.
Les sommes recueillies pourraient être
centralisées par les syndicats de presse
qui se chargeraient également de leur ré-
partition.
Tous les Français voudront répondre à
cet appel !
Lui seul !
M. Arthuren-ne Meyer écrit à propos de
la catastrophe de la Liberté :
« 350 morts, la Liberté, une magnifique
unité navale perdue ; une autre compromi-
se, la République, inutilisée pour de longs
mois, voilà les terrifiantes nouvelles qui
viennent attrister mes derniers jours de va-
cances, à Fontainebleau ».
La villégiature de M. Meyer troublée.
Voilà qui est vraiment triste ! '¡,
Comment la divinité qui, au dire de no-
tre Arthur national, a dirigé ces malheu-
reux événements, n'a-t-elle pas pensé qu'un,
homme deux fois sien — par la circoncision
et par le baptême — allait avoir une mau-
vaise fin de villégiaturé !
C'est bien le premier cri d'un grand Fran-
çais à l'annonce d'un tel malheur : « Cré-
dié ! ma digestion va être troublée ! »
Mes derniers jours de vacances !
Ce que mes yeux ont vu !
Ce qiue mes oreilles ont entendu1 !
Moi seul, et c'est assez !
Mais pardonnons à M. Arthurenne Meyer.
Il est clair que l'âge a troublé ses esprits.
Son article : « Pleurons et prions » en est
l'indiscutable preuve.
Comment d'aussi tragiques circonstances
peuvent-elles inspirer d'aussi risibles cho-
ses ?
Ces une espèce de revue de fin de va-
cances où M. Pelletan défile, flanqué du gé-
néral Samrail et de M. de Max. Et, en vérité,
qfuand M. Meyer, en manière de conclusion,
convie M. Fallières à prier avec lui, pour
les morts, cette divinité stupide, qu'il ap-
pelle Providence et qu'il accuse de tout le
mal, on se demande si lé vieux petit mon-
sieur possède encore assez de lucidité pour
distinguer entre le dieu de sa jeupesse et
celui du maréehal de Turenne !
■ "■ ♦ ■* -■ * "* ■-
Ne pas confondre
—+++— .:
Il M. Drioux vient de reprendre l'instruc-
tion dont il est chargé concernant les dé-
tournements commis au quai d'Orsay.
« Accompagné de son greffier, M. d Vige-
ry, et de MM. Jouin, sous-chef, et Robert,
inspecteur principal de la Sûreté, le juge
s'est transporté hier, vers une heure et
demie, au ministère des Affaires étràngè-
I*6S -'
« Reçu par MM. Mabire, cîtëf de bureau
et Montréal, inspecteur des Finances, le
magistrat fut conduit.., etc. m
- Il ne s'agit pas, comme on pourrait le
croire, d'une opération judiciaire relative
aux affaires Tunisiennes.
On s'occupait seulement de la compta-
bilité fantaisiste de l'ex-directéur Hatnon.
Mais il ne faut :déeespérer de rien ! La
justice sait maintenant le chemin des bu-
reaux du quai d'Orsay espérons qu'elle
ne l'oubliera pas ! > ,
Français et Républicains
..-+--
Après MM. Roux-Costadau, Briquet, Rin-
guier voici que M. Alexandre Varenne, an-
cien député socialiste unifié du Puy-de-Dô-
me, est à son tour effrayé par les progrès
que font, dans son parti, les idées de dé-
sordre, d'antipatriotismo et d'anarchie.
Ses sentiments français et républicains
remportent sur une discipline étroite, a la-
quelle il ne sut, d'ailleurs, jamais se plier
complètement. Il a osé braver la censure
des « camarades » et flétrir, dans son jpur-
nal, VAmi du Peuple, ceux qui eurent l'au-
dace de « menacer le Pays, dè saboter la
Défense nationale, crime odieux s'il en fut
contre la Nation et-contre la civilisation,
et que nous n'aurions pas laissé commet-
tre ». Il a affirmé qu' « il y a des questions
d'hoinneur national sur lesquelles il ne sau-
rait y avoir de divergences entre ceux qui
veulent conserver à leur Pays l'indépendan-
ce et la dignité. Le devoir des socialistes
est double : ils ne peuvent pas se croiser
les bras devant les dangers de conflits pos-
sibles et ils ne peuvent pas davantage dé-
serter le devoir national. Il faut ou on sa-
che.à Berlin, que la France n'est pas résir
gnée à subirl'invasion et que-la Patrie, se-
ra par nouis défendue jusqu'au deriiiep:.h,tt'm,.
me. Tenons-nous prêts à accomplir.s'il le
faut, tout notre devoir nàtionàl ;
Pour ces paroles si sages et si franche-
ment patriotiques, une section socialiste pa-
risienne, dont les mcmbrès ont évidemment
pérdu la notion du grotesque, propose tout
simplement l'excommunication de M.
Alexandre Varenne.
Nous n'éprouvons, pour notre part, aucu-
ne surprise à voir un esprit aussi distin-
gué et aussi plein de bon sens rompre net-
tement avec les saboteurs et tous les fau-
teurs de désordre.
Et si, pour s'être déclaré Français, il est
exclu du parti unifié, il s'en consolera vite,
en constatant qu'il a pour lui tous les ré-
publicains socialistes dignes de ce titre.
- -
Les Affaires du Maroc
i 9
LES NEGOCIATIONS
FRANCO-ALLEMANDES
Berlin, 26 septembre. — L'entretien que
M. Cambon a eu hier avec M. de Kiderlen-
Waechter a duré deux heures.
On déclare à Berlin que la réponse de la
France est satisfaisante* : Toutefois quel-
ques changements dans la rédaction sont
encore nécessaires.
V M. de Kiderlen-Waechter a eu ce matin
une entrevue avec M. de Bethmann-Holl-
weg. Il recevra M. Cambon probablement
ce soir. Le texte de l'accord sera ensuite
soumis une fois encore a Paris. C'est donc
au plus tôt à la fin-de la semaine que les
pourparlers sur la question marocaine
pourront s'achever.
Les négociations suivent d'ailleurs une
marche favorable.
LES FUTURES NEGOCIATIONS
FRANCOVESPAGNOLES
Madrid, 2G septembre. — Les négocia-
tions franco-espagnoles commenceront
quand on connaîtra les conclusions aux-
quelles auront abouti les conversations de
Berlin.
L'Espagne veut s'assurer au Maroc l'a-
grandissement territorial auquel elle aspi-
re depuis la perte de ses colonies, et elle
a dépensé 120 millions de pesetas dans ses
expéditions marocaines. En outre, elle
éprouve un peu de malaise à la perspective
de rencontrer -dans le sud sa voisine du
Nord. EHe se voit prise en quelque sorte
entre la France continentale et la France
d'Afrique.
C'est ce qui explique l'ardeur qu'elle ap-
porte à défendre ce qu'elle considère com-
me ses droits, en Afrique et la passion qui
l'a. parfois emportée contre sa rivale plus
riche et plus forte.
On fait aussi ressortir ici que l'Espagne
ne serait pas pour la France une alliée à
dédaigner. Elle peut en quinze jours mettre
sur pied une première armée de 360.000
hommes aguerris et bien équipés.
L'Espagne a déclaré, par la bouche du
premier ministre, qu'elle défendrait la ter-
re qu'elle avait conquise tant qu'il lui reste-
rait un homme et un fusil, mais il peut pas
être question d'une guerre entre l'Espagne
et la France pour mille raisons admises par
tous. La négociation qui va s'engager sera
donc une discussion courtoise et. qui, on
peut l'espérer, aboutira à un accord.
Les sacrifices de la France en Afrique,
en hommes et en argent, sont bien supé-
rieurs à ceux de l'Espagne. Ses intérêts
économiques sont également beaucoup
plus considérables. Les Espagnols le recon-
naissent volontiers:, On ne se dissimule
pas non plus que la, France aura eu à"
payer chèrement la liberté d'agir au .Ma-
roc, en sacrifiant une de ses colonies.
Le gouvernement espagnol, dit-on ici,
n'est pas opposé au principe d'une, com-
pensation à accorder &- la France : mais
:c'est sur l'objet à céder que l'entente de-
vient difficile. La compensation qui con-
viendrait davantage à la France serait
une cession de territoires au nord du Ma-
roc, mais l'Espagne est absolument irré-
ductible sur ce point. Quant au sud, il lui
tint à cœur presque autant que le nord.
Le Diario universal, organe libéral du
comte Romanones, déclare que jamais en
aucun cas l'Espagne ne consentirait à
l'abandon de Larache et ù'EI-Kçar, qui
sont compris dans la zone d'influence es-
pagnole reconnue par le traité de 1904,
sans qu'une modification préalable soit ap,
portée au traité en vigueur.
Force serait donc de revenir :au) sud
puisque l'e principe d'une compensation
est adopté. -
Le traité de 1904 a concédé à l'Espagne
une zone d'influence considérable qu'elle
ne. peut songer à mettre en valeur et où
elle trouvera de quoi nous indemniser des
sacrifices consentis. ;
Pour ce qui est du clîemin de fer, de Fez,
qui doit passer aussi par EI-Kçar, il n'est
pas téméraire d'affirmer qu'une solution
amicale de la question serait déjà envisa-
gée à Madrid.
On peut espérer que. le cabinet Canale-
jaSi qui a déjà donné plnsièurs fois des
preuves de modération et de férmeté, - sau-
ra toutefois résister aux injonctions des
partis d'extrême droite et hâtera la solu*-
Uon désirable. ., -. -'
- ., L'ACTUALITÉ
,
Le lendemain
de la Catastrophe
-, * 1 !
Triste bilan. — La liste des victimes. - Les sauvetages
La Journée à Toulon. — Les condoléances.
Les causes de
la Catastrophe
Quelles ont été les causes de la catastro-
phe de la Liberté ? Y eut-il incendie avant
les explosions ? Ou les explosions allumè-
rent-elles l'incendie ? Les renseignements
qui sont donnés à ce sujet sont tout à fait
contradictoires. Un officier général a fait
lés déclarations suivantes :
« D'après les renseignements qui m'ont
été donnés et après m'être rendu sur les ,
lieux, il semble que le feu aurait éclaté
dans le inagasin général du navire, conte-
nant des peintures et des huiles. L'incen-
die se serait alors communiqué de là aux
soutes dont on ne put ouvrir les vannes.
La poudre B7 ne serait donc 'pas en cause ».
: Signalons, en passant, que des hommes
qui s'étaient, jetés à la mer pour s'éloigner
du navi re, au ee«nmençement d u sinistre,
entendirent la sonnerie, du clairon rappe-
lant à l' « incendié. ,.».', Ils regagnèrent je
bol.: : Quelque^minutes après, l'explosion
; se produisait. ljne cinquantaine, ont perdu
là vie dans ces circonstances. ",
Là poudre B ,
L'Agence Havas a communiqué la dépê-
che suivante :
« L'opinion d'après laquelle la déflagra-
tion de la poudre B serait la cause de la
catastrophe s'accrédite danis les milieux ma-
ritimes.
« Vers cinq heures du matin, les hommes
de quart aperçurent une fumée assez den-
se qui s'échappait de l'avant du navire. Us
en informèrent immédiatement leurs offi-
ciers et ceux-ci donnèrent l'ordre de noyer
les soutes par mesure de précaution. -
« Des hommes désignés spécialement re-
çurent la mission d'aller ouvrir les van-
nes qui communiquaient avec la mer afin
de noyer les poudres. Mais ils remontèrent
précipitamment disant que la besogne était
impossible : une fumée âcre, empoisonnée,
montait des soutes, rendant l'approche dan-
gereuse et mémo mortelle en raison du gaz
qui se dégageait. Le danger devenait donc
grave ; rapidement la nouvelle s'en propa-
gea parmi l'équipage, les hommes se. préci-
pitèrent sur les embarcations, tandis que
d'autres se jetaient à la mer. C'est à cet
instant que les secours envoyés par.d'au-:
tres navires et la direction du port arri-
vaient sur les. lieux. Le$officiers de la Li-
berté, afin d'éviter le désordre, et espérant
venir à boult de l'incendie, intervinrent ; la;
panique cessa aussitôt, et avec- un grande
courage, stimulés par l'exemple de leurs of-
ficiers, tous les hommes se portèrent à l'en-
droit assigné. -
« Une première détonation vint malheu-
reusement faire présager le terrible désas-
tre qui allait suivre. ;
« Comprenant qu'il était inutile de sacri-
fier des vies humaines pour sauver un na-
vire, on invita l'équipage à quitter le bord
avec ordre et méthode ; c'est pc dant que
cette opération s'effectuait que la formida-
ble explosion se produisit, anéantissant en
partie les malheureux qui se trouvaient au-
tour du navire embrasé. Il semblerait donc
que la catastrophe serait due à une défla-
gration de la poudre B, comme cela se pro-
duisit à bord de Vléna ». -
L'explosion avant l'incendie
D'autre part, un ingénieur des construc-
tions navales à fait remarquer :
« On a beaucoup parlé d'un incendie an-
térieur aux premières explosions, qui se
sont produites vers cinq heures trente ;
or, le premier télégramme de télégraphie
sans fil, envoyé par Ta Liberté à la préfectu-
re maritime et qui signale un incendie à
bord est de 5 h. 30 ; à 5 h. 35, un deuxième
radiotélégrammo disait : « Quatre explo*.
sions. consécutives se sont produites à une.
minute d'intervalle *. et était mut-sur
l'incendie. ,.. ; -,', - ,' ,':}
«Il ressort de ces faits
séquence, mais au cpntra'ire la oause dè
l'incendie. , ; ,',
« Un autre, fait cWb) bien prouver qu'il
n'y à pas en d'incendie à bord avant les
explosions de h 35: C'est que le -rà e
aux postes d'incendie n'a été sonné quTà
5 h. 40, cinq minutes après les petites ex-
plosions.
« Des témoins oculaires nous ont, du res-
te, affirmé que ce n'est qu'après les peti-
tes explosions qu'ils ont remarqué que de
la fumée sortait vers le mat ; un mate-
lot de la Liberté, notamment, a dit que c'est
par la casemate tribord avant cpje Je feu a
commencé.
« La vérité, c'est que la première défla-
gration a dû se faire dans la soute de 190
et la fumée a dû sortir par cette casemate
en montant par le monte-charge, la porte
de oommunication de la soute avec le cor-
ridor tribord n'étant pas fermée.
« Au point de vue du noyage des soutes,
il faut se rendre compte que l'opération de-
mande au moins trente minutes, tandis
ciu.'il n'y a eu que dix-neuf minutes entre
l'alerte de 5 h. 35 et l'explosion, qui a eu
lieu à 5 h. 55. L'opération n'a pu donc être
matériellement exécutée, même. en admet-
tant que tous les appareils aient normale-
ment fonctionné.
« Il n'est pas douteux que la soute de 190
avant ait sauté, puisqu'un quartier-maître
du Cecitt a étéiué par la coiffe d'un projec-
tile de 190. Les soutes de 360 avant ont éga-
lement fait explosion, car tout l'avant du
bâtiment est défoncé et aussi, les parties su-
périeures ».
Les victimes
Le nombre des
-, morts serait de 300
Tous les réchappés de la Libàté, recueil-
lis à bord des autres navires des escadres -:
ont été rassemblés hier matin sur. le dé
barcadère des appontements.
Aïkfur et à masure que chaque bètimenl
ramène des survivants, ces dernier sont
classés par spécialités et un gradé en dres-
se la liste. Cette opération, à laquelle as-
siste l'amiral Bellue,ne peut être effectuée.
aussi rapidement que l'on voudrait.
On dit, cependant;- que le nombre de9
réchappés serait de 453, auxquels il con- t >
vient d'ajouter une centaine de blessés
transportés dans les hôpitaux, ce qui fait
un total de 550 survivants environ.
Le nombre-des moirts, rien que pour lui
Liberté, serait^donc à peu près de .200. > ;
A ce chiffre il convient d'ajouter 35 man-
quants signalés daïïs la troisième escadre, èt. i
une soixantaine dans la seconde, >
Le bilan de la catastrophe, en ce qui con"
cerne les morts seulement, pourrait doiie
être évalué approximativement à 300.
Les blessés
Voici la liste des blessés du cuirassé Li-
berté :
Lieutenant de vaisseau Strullu, commissaire
Cavaro de Kergorre, Jean Vigoureux, élève offi-
cier ; CJaude Monlherat, ouvrier mécanicien ;
Lescouanec-Roux, fusiller ; Louis Crion, fjuartieiv
niaître chauffeur ; Marcel Pouillard, ouvrier mé-
canicien ; Jean Guelleux gabier ; Jean Amlavot,
quartier-maître torpilleur ; Léon Groissard, mate-
lot ; Ernest-Gueze, enauffeur ; Alex BarmluÕ"
ouvrier mécanicien ; Henri Le Marrec, quartier-
maitre mécanicien ; Jean Le Biton; quartier-
maître chauffeur ; Gaston Bêrtot, ouvrier méca-
nic-ieii ; Joseph Le Forest, ouvrier mécanicien ;
Vincent Maho, fusilier ; Louis Miossec, matelot. ;
Marcel Daguenet, ouvrier mécanicien ; Paul Ste-
phan, matelot-fusilier ; Pierre: Le Meur, chaur..
leur.-; Lucien Descouler, gabier ; Jean Trucci, :
matelot - ; Gaston Gosse, ouvrier mécanicien ;
Feroand Champion, quartier-maître mécanicien ;
Pierre Guilhennène, quartier-maître mécanicien ;
Louis Guillebaud, ouvrier mécanicien ; François
Joucour, fusilier ; Gabriel Legùff, quartier-maître
chauffeur ; Charles Vatinal, mécanicien torpil-
leur f Alexandre i>ebïanc, matelot ; Nicolas Le
Gall, fusilier-; Gast # orvéille, matelot ; Frà ;
çois Lé Gatt, tatiWar ; 'Ftaâjçeis -
Rouxel, gabier ; Frsftçoû Pérot», ^îeuxiëme
tre fourniér; Maurice Anchere; ouvrier mécani
ciein ; ^iffîàuaae Déc -
rue,second-maître canonier;Pierre cloche; -
nonnier ; Jacques. JtaUaiMf, quart)er-ma-l Mu-
langw-ce^ * PeJr ftteiliôr< ; Etienne; 'f'ttér.'
cihauffeur ; Philippe Chauchat, chauffeur ; Au-
.guste Garzuel, fusilier ; Clotaire Robillard, ca- -
nonnier ; Pierre Guégan, second-maître, canon.
nier ; Charles Godic, canonnier ; Pierre, second-
maître canonnier; Joseph Madec, apprenti ma-
l'in ; Thierry, chauffeur auxiliaire ; Glamor,
chauffeur breveté ; François Robial, fusilier ;
Michel Provost, quartier-maître chauffeur ; Fran-
çois llello, matelot torpilleur ; Deschamps, ca-
nonnier ; Cochaid, fourrier Dominique Claitiifi,
ouvrier mécanicien ; André Garrigan, ouvrier
mécanicien ; Louis Pothier, fusilier ; Jean Heran,
gabier ; Fernand Barbe, ouvrier mécanicien ;
Georges Chouvet, quartier-maître armui-ier ; Jean
GaJand, quartier-mailre canonnier ; Arthur Bou-
quin, fusilier ; Mathurîn Doudet, canonnier ;
îStO>phan Rnnigo, fusilier ; Louis Clochet, méca-
nicien ; -Antoine Piquerial, chauffeur ; Jacques
Mare, quartier-maître de manœuvre ; Yves Me-
riès, canonnier ; Joseph Laval, matelot ; Louis
Rouvier, chauffeur ; Charles Trojani, matelot
torpilleur ; Yves Philippe, quartier-maître chauf-
feur ; Vincent Le Paulichat, quartier-maître mé-
canicien ; Auguste Daras, torpilleur ; Gustave
Cambon, chauffeur.
On communique la liste suivante de?
res navires ..,
.Ëôkiefk. Masse, appïenti ; top^eurt:4a ,Btenr :
Haô ; < Alderte- Vatflio, • Justice* ;.-AJur-
re», .du JJépreeràiie ; Eugène. Dequelle; q.ti{,ie,l' -
-Miaitee 4^ iRaioa^vre^'du fustiçë:; Joseph "M're'::"
tinlcmieit. brevetée/da- R&pubi^qué ; Loirip^^ .Buanic,
gabier breveté; èiïMfiubMque ¡;, eet m.'
letot; du" Miitseitt&iie ; Aî&fè l^Qûxvgar>iei> bré- -
'veiêi de ÎE&gàt-Qtiinetr; i'teS' Bi'zcrlio,
6i%ue iîermaiik; Le GouiCj /qBarlièç-^aitrè de
manoeuvre du Foudre ; Àléi&andre Alatlle, gabier,
breveté-, du ./M
du Lèon-Gambetta ; Georges Eveno, fusilier; du
Suffren ; Victor Viezil, matelot-mécanicien, dia
Démocratie ; Yves Le Meyet, fusilier, du Sutfren ;
Louis Bavarano, matelot du Marseillaise ; Pier-
re Mingnant, matelot, du Marseillaise ; François
Le Floch, chauffeur, du République ; Emile Gai-
lon, chauffeur breveté, du Justice ; Michel Auf-
fret, canonnier breveté, du Marseillaise ; Joa-
chim Le Guillou, 2" maitre, du Justice ; Fernand
Le Bras, quartier-maître de manœuvre, du Jus-
tice ; Louis Le Guyader, gabier, du Walaeca;
Rousseau ; Augustin, Hellocq, fusillier auxiliaire,
du République ; Paul Ricard, matelot, du Repu-
bligue ; François Le Siou, gabier, du Marseil-
laise ; Charles Guénard, torpilleur breveté, du
Jules-Ferry ; Emile Le Looer, timonier, de l'Ami-
ral-Aube ; IAexa.ndr,", Le Vachet, mécanicien,
du République ; François Biarrhée, canonnier
auxiliaire, du République' ; Guillaume Causse,
timonier breveté, de VAmiral-Aube ; Louis La
Goff, matelot, .du Justice ; Charles Bois, .rUlsj)je
breveté, du Suffren ; Adrien Le Guellec, matelot,
du Marseillaise ; Emile Daniel, matelot, du Jau.
règuiberry ; -Augustin ,Roy" torpilleur brevete.
du Démocratie- Maurice, apprenti marin, du
Justice ; Michel Gentil, matelot, du ]Jon-Gam-
betla ; Ange Petit, canonnier breveté, du Justice :
François Légal, fusilier auxiliaire, du Justice ;
Jean Puyin, chauffeur auxiliaire, du Justice ;
Adolphe Mate, 2e maître de mousqueJerie, dit
Suffren ; Malic, fusilier, du Justice ; Culeaud,
timonier, du Justice : Eugène Bouiles, canonnier,
de l'Amiral-Aubc ; Arthur Bernaert, matelot, du
Justice ; François Pratucci, matelot, du Jute*
Michelet ; Louis Catozano, matelot, du Vérité. ',
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