Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1892-06-07
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 07 juin 1892 07 juin 1892
Description : 1892/06/07 (A22,N7449). 1892/06/07 (A22,N7449).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/05/2013
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Vingt-deuxième annk. - Ne 7.M9 CINQ. Centimes - Paris et Départements - 1 CINO CentiIDes MARDI 7 JUIN 189)
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8 jours, 60 centimes.
ASSURANCES
SUR L'ÉTAT
On n'entend plus parler du projet
îlouvier sur lés retraites. On l'agite
de temps en temps devant nos yeux
quand les plaintes atteignent leur
maximum d'intensité, mais dès que le
silence se fait, on se hâte de le ren-
voyer au magasin des accessoires.
C'est ainsi que cela se passe souvent
chez nous : les campagnes sont vives
2nais courtes. Aussi les habiles ne se
risquent-ils jamais à heurter de front
.une réforme: ils aiment mieux l'user
en temporisant, et la force d'inertie
reste à leurs yeux le meilleur et sou-
vent l'unique moyen - de gouverne-
ment.
Toutefois, la question des retraites
est de celles qu'on se flatte en vain
d'enterrer. Elle renaît de ses cendres
tous les ans aux approches de la dis-
cussion du budget, et, d'année en an-
née, elle devient plus difficile à ré-
soudre. On a beau augmenter en mau-
gréant les crédits affectés au service
des pensions. Par un phénomène assez
bizarre, il semble que plus les charges
augmentent, plus s'allonge en même
temps la liste des mécontents.
Comment se fait-il que tout le monde
jette aujourd'hui la pierre à ce con-
trat d'assurance qni lie réciproque-
ment l'Etat et ses fonctionnaires et
qui est devenu également insuppor-
table aux deux parties contractantes ?
L'assuré n'est plus tranquille. Il a
beau payer régulièrement sa prime
sous forma de retenues sur son traite-
ment, il n'a plus comme autrefois la
certitude de recevoir au jour diL la
petite rente viagère qu'il se promet
pendant trente ans. Depuis que le
conseil d'Etat a déclaré qu'on pouvait
avoir des droits à la retraite sans que
l'administration fût pour cela con-
trainte à la liquider, depuis qu'il a
trouvé cette ligne de partage origi-
nale entre les obligations de l'assuré
et celles de l'assureur, le fonction-
naire est comme le personnage de
Daudet: il n'a plus confiance. 11 s'in-
quiète de voir exercer sur ses appoin-
tements mensuels un droit de préliba-
tion qui ne lui rapportera peut-être
jamais rien. Quelques-uns préfére-
raient même toucher intégralement ce
qui leur est dû et, à défaut de la pré-
voyance nationale dont l'infaillibilité
leur est désormais suspecte, aviser à
leur guise aux meilleurs moyens d'as-
surer l'avenir.
Si les fonctionnaires j ettent les hauts
cris, l'Etat assureur n'est pas plus con-
tent de son rôle de providence. Il
trouve, et avec raison, que ce rôle lui
coûte les yeux de la tête. D'abord, il
ne capitalise pas lei sommes qu'il re-
tient aux fonctionnaires et mange
comme les prodigues son blé en herbe.
Mais en admettant même qu'il fût
plus sage, qu'il eût, comme toute mai-
son bien conduire, une caisse de ré-
serve pour reconstituer les capitaux
destines au service des pensions, il
lui serait tout aussi impossible de
joindre les deux bouts. Entre les re-
tenues qu'il prélève sur les traite-
ments et les pensions de retraite qu'il
s'engage à servir, il y a un écart con-
sidérable qu'il faudra combler tous
tes ans à grand renfort de crédits
nouveaux.
Quand on a fait les lois sur les re-
traites, on a pris pour base des tables
de mortalité déjà caduques et dont la
plus connue, celle de Deparcieux, re-
montait au milieu du siècle dernier.
Les compagnies d'assurances fran-
çaises ont du reste suivi les mêmes
errements, et c'est ce qui explique, on
peut le dire en passant, les difficultés
qu'elles rencontrent aujourd'hui.
Les progrès de l'hygiène, les grands
travaux d'assainissement, l'accroisse-
ment de l'épargne et du bien-être ont
reculé sensiblement les bornes de
l'existence. Il y a, depuis vingt-cinq
ans surtout, une augmentation nota-
ble de la vie moyenne à tous les âges
et sur l'ensemble de la population.
Les compagnies anglaises et amé-
ricaines, mieux avisées, se sont em-
pressées de modifier leurs tables et
leur tarifs et d'offrir au public des
combinaisons attrayantes et produc-
tives. La plupart des compagnies
françaises ainsi que l'Etat sont restés
« vieux jeu" et se trouvent aujour-
d'hui distancés ou débordés.
- Si l'Etat ne peut plus servir en
effet aujourd'hui toutes les pensions
de retraite qu'on lui demande, c'est
que le nombre des fonctionnaires en-
core vivants après vingt-cinq ou
trente ans de services actifs a dé-
passé considérablementses pr4Y^ions.
On vit trop pour qu'il fasse honneur
à ses affaires. Je pourrais citer telle
fonction civile à Paris dont le titu-
laire a dix mille francs d'appointe-
ments. On a mis à la retraite à la
limite d'âge trois de ses prédécesseurs,
tous très vivants encore auj ourd'hui
et qui touchent chacun six mille
francs de pension. Voilà donc un
poste de dix mille francs qui coûte- en
réalité vingt-huit mille francs par an
au trésor public.
Onéreuse à l'Etat, suspecte aux
fonctionnaires, la loi de 1853 est vir-
tuellement dénoncée. Mais,au lieu d'en
éluder l'application par des chinoise-
ries de légiste, comme la décision du
conseil d'Etat dont nous parlions tout
à l'heure, ne vaut-il pas mieux se hâ-
ter de la refondre, en commençant
par reléguer dans les archives des ta-
bles de mortalité qui datent de Louis
XV?
André Balz.
"~të~XÏX® SIÈCLE publiera demain la
a Chronique », par M. Paul Ginisty.
M. JEFFERSON COOLIDGE
Arrivée du nouveau ministre des Etats-
Unis à Paris
M. T. Jefferson Ccolidge, ministre pléni-
potentiaire des Etats-Unis en France, est
arrivé la nuit dernière au Havre, abord de
la Toarctine.
Né à Boston en 1831, M. Coolidge appar-
tient à une famille de négociants qui
compte parmi les plus riches et les plus
anciennes des Massachussetts.
Il est, en effet, l'arrière-neveu de Tho-
mas Jefferson, le troisième président des
Etats-Unis.
M. Coolidge commença ses études à l'U-
niversité d'Hauvard et les termina en Eu-
rope.
Entré dans les affaires, il devint prési-
dent ou directeur de plusieurs grandes
compagnies de chemins de fer et entre-
prises industrielles.
Le successeur de M. Whitelaw-Reid est un
républicain protectionniste, un partisan
du bill Mac-Kinley.
Il n'a jamais occupé de fonctions élec-
tives. Il a fait ses débuts dans la diplo-
matie comme délégué des Etats-Unis au
congrès des Deux-Amériques.
M. Coolidge n'est pas un nouveau venu
pour nous. Il a habité la France pendant
trois ans de suite sous l'Empire.
Il parle très bien le français et a con-
servé à Paris de nombreuses relations.
UN SUICIDE A CENT SIX ANS
(DE NOTRE COKRKSPONDANT PARTICULIER)
Saint-Pétersbourg, 5 juin. — Le télégraphe
nous apporte la nouvelle qu'à Jekaterinostav,
M. Guillaume Balan, âgé de cent six ans, vient
de se suicider en se pendant.
M. Balau était d'origine française; ses pa-
rents étaient des réfugiés venus en Russie
sous l'impératrice Catherine. Il était restaura-
teur à Jekaterinoslav et possédait une jolie
fortune.
LA FÊTE DU « SATUTO » A ROME
- Rome, 5 juin.
Ce matin, à l'occasion du retour du roi,
revenu à Rome pour la fête de la Cons-
titution, une manifestation a eu lieu de-
vant le Quirinal.
Une fou'e de dix mille personnes a ac-
clamé le roi qui, par deux fois, a dû pa-
raître au balcon du palais.
Les associations romaines étaient mas-
sées sur la place avec bannières et musi-
ques.
L'ambassadeur d'Allemagne, en sortant
du Quirinal où il avait accompagné le roi
à l'issue de la revue que le souverain a
passée comme chaque année à cette date,
a été salué par des applaudissements et
des cris de : « Vive l'Allemagne notre al-
liée! »
A Naples, c'est la reine Marguerite qui a
passé en revue les troupes de la, garni-
son.
La foule a fait une ovation à la reine.
M. BLAINE
Washington, 5 juin.
A la veille des élections à la présidence, la
démission de M. Blaiue cause une grande sen-
sation. --
Ses partisans qui font partie de la conven-
tion républicaine qui se réunira le 7 courant à
Mineapolis sont convaincus que la démission
de M. Blaine indique qu'il pose sa candidature
et ils sont résolus à le nommer.
LE DOYEN DES SAUVETEURS
(DK - NOTHE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Rouen, 5 juin.
M. Jean-Baptiste Toutain, né le 30 octo-
bre 1797 à Bosseville-Bonsecours, retraité
de la ville de Rouen comme vérificateur
des poids et mesures, est mort hier.
C'était, nous dit-on, le doyen des sauve-
teurs de Rouen, et probablement de Fran-
ce.
Auteur de plusieurs actes de courage et
de sauvetage, il recevait en 188.2 la mé-
daille d'honneur en argent du gouverne-
ment, pour un sauvetage en Seine par lui
accompli l'année précédente, soit à l'âge
de quatre-vingt-trois ans.
Ses titres l'avaient fait admettre comme
membre d'honneur de la Société des sau-
veteurs-hospitaliers de Rôuen.
L'ANNIVERSAIRE DE GARIBALDI
Nice, 5 juin. — Ce matin, la municipalité a
porté une couronne à la statue de Gari-
baldi. Un peu plus tard, les cercles Mazzini et
Oberdauck et le groupe des républicains ita-
liens ont porté des couronnes de laurier cra-
vatées de noir et de rouge. Six sociétés fran-
çaises, musique en tête, sont ensuite venues.
Quelques paroles ont été prononcées. Un
journaliste a glorifié la République romaine
de 181.9.
MORT D'UNE CANTATRICE
Le Havre, 5 juin. — Mme Caccia, née Juana
Le Havre, décédée hier au Havre, où elle de-
Kossi, est dcédée hier a.u Havre, où elle de-
meurait depuis de nombreuses années. Née à
Barcelone en 1818, fille d'une cantatrice italien-
ne. Mme Caccia avait, en 18.46, débuté-à FUpéra
avec un certain succès dans le rôle de Rachel
de la Juive. Sa principale création avait été le
rôle de Carlo dans la Part du Diable.
Mme Caccia, qui donnait au Havre des le-
çons de chant, avait, peu de temjçs ayant sa
„jaor.kété atteinte Se cécité.
CHRONIQUE
Ce ne sera pas @ trop tôt ! Le gouver-
nement a déposé un projet de loi en
vertu duquel le nombre des @ agents
de police chargés de veiller sur les com-
munes suburbaines du département de
la Seine sera notablement augmenté. Il
passera, j'imagine, comme une lettre à la
poste.
On se plaint à Paris que certains
quartiers, surtout les quartiers ex-
centriques , ne soient pas assez proté-
gés ; qu'on n'y puisse rentrer le soir en
toute sécurité. Il y a, je crois, quelque
exagération dans ces doléances. La vérité
est que chacun de ces quartiers est
pourvu d'agents de police qui le parcou-
rent la nuit en tous sens. Il est clair
qu'ils ne peuvent toujours être à point
nommé aux environs de l'endroit où se
commet un crime; mais leur présence
incessante et leurs rondes nocturnes dé-
concertent les chenapans et les effraient.
Jouy peut les chansonner tout à son
aise ; il faut bien convenir pourtant que
l'idée seule qu'ils peuvent surgir à un
coin de rue a dû souvent suftire pour
arrêter un voleur ou faire balancer un
assassin.
Passé les fortifications, il n'y a pour
ainsi dire plus d'agents de police. On
n'est gardé que par l'honnêteté publique.
Voilà qui allait fort bien à l'époque où
la population parisienne vivait confinée
dans Paris même, où elle ne se répandait
dans la banlieue que les dimanches et les
jours de fête pour manger'une friture ou
une matelotte et boire du vin à quinze.
Elle rentrait le soir au logis, après une
journée de bon air pris à la campagne,ou
du moins à ce que l'on appelait de ce
nom.
Les mœurs ont bien changé. Combien
y a-t-il de Parisiens qui, en ce moment,
partent soit à six heures, soit à minuit
quarante-cinq, après le spectacle, pour
s'en aller dans une des communes de la
banlieue parisienne où ils demeurent ?
La statistique officielle accuse à peu près
le chiffre de cent mille, et peut-être est-
il au dessous de la vérité.
Ce mouvement de décentralisation ne
fait que commencer. Je suis très frappé
de la rapidité avec laquelle il s'accentue
tous les ans. J'en ai sous les yeux un
exemple frappant. Nanterre, que j'habite
en été, n'est pourtant pas une des sta-
tions favorites des Parisiens. Ils s'arrê-
tent plutôt-à Asnières, qui est devenu
une grande ville, ou poussent jusqu'à
Rueil ou Bougival. Et cependant, tout
autour de moi, les maisons poussent
comme des champignons. Ce ne sont pas,
de petits vide-bouteilles à l'usage, d'une
famille. Ce sont d'immenses caravansé-
rails à quatre étages, où la foule des em-
ployés parisiens trouve en dehors de Pa-
ris des logements à bon marché. Le che-
min de fer passe avec les habitants des
abonnements à l'année, qui sont encore
trop chers, à mon avis. Je crois que l'ad-
ministration de l'Ouest aurait avantage
à favoriser cette émigration quotidienne
et à multiplier les trains. Quelques pro-
grès se sont déjà faits en ce sens, depuis
douze ans que j'habite Nanterre ; mais
combien lents et peu sensibles !
Tous les soirs donc, entre neuf
heures et une heure du matin, dans nos
localités, il y a une foule de Parisiens
qui, débarqués à la gare, regagnent leur
logis par des voies la plupart du temps
assez mal éclairées. Ce sont là pour les
rôdeurs de bonnes aubaines toutes prê-
tes. Car remarquez que les chenapans
doivent naturellement être plus nom-
breux dans la banlieue qu'à Paris. A Pa-
ris, ils sont traqués, et il n'y a pas de
bons coups à faire. Rien ne leur est plus
facile que de prendre, tout comme les
honnêtes gens, le chemin de fer le soir
et d'attendre, comme dit La Fontaine,
chap chute aux environs de la gare.
Je ne fais point allusion à Nanterre,
qui est un pays assez paisible et où je
n'ai jamais entendu parler d'agression
nocturne. Je dois dire cependant que les
femmes ne se hasardent pas volontiers,
passé minuit, dans ces larges avenues
bordées d'arbres et désertes qui condui-
sent de la gare aux maisons habitées. Je
sais que pour moi je n'y ai jamais fait
rencontre que d'honnêtes gens, qui me
saluaient d'un bonsoir amical.
Mais dans d'autres localités plus pro-
ches de Paris, les routes sont moins
sûres ; le voisinage même de la Seine est
un danger, et je sais tel de mes amis qui
ne rentre gaillardement au logis que
parce qu'il a un revolver dans sa poche
et qu'il est parfaitement décidé à le bra-
quer contre tout visage suspect.
Ce n'est pas tout. Vous connaissez les
habitudes de nombre de Parisiens. Ils ont
près de Paris une maison de villégiature
pour l'été, mais ils ne l'habitent point
l'hiver; ils en laissent la garde à un jar-
dinier. De nos côtés, beaucoup ont pris
l'habitude d'héberger toute l'année un
employé du chemin de fer, qui reste chez
eux à demeure et veille sur l'habitation du-
rant les mois d'hiver.
Ce n'est la qu'une sécurité relative. Les
gredins et les bandits dont fourmille la
banlieue parisienne sont au courant de
ces particularités ; ils savent qu'il n'y a
pour garder une maison qu'un homme
de peine, souvent appelé ailleurs par ses
fonctions. Rien de plus facile que de la
dévaliser, soit la nuit, soit en plein jour,
surtout en plein jour. Le gardien est à
son ouvrage, les voisins ne font pas at-
tention ; une équipe de cambrioleurs
pénètre dans le logis et en un tour de
main le vide de ses meubles.
Tous les journaux sont pleins du récit
de ces expéditions, qui se renouvellent
fréquemiuent.Qaelques localités aux alen-
tours de Paris ont été ainsi exploitées d'une
façon désastreuse. Les maires n'osaient
pas trop se plaindre ni crier trop haut.
Car publier à son de trompe qu'on n'était
pas en sûreté dans la commune, c'était
en écarter les Parisiens, qui, ayant le
louis facile, en font la fortune. Il a fallu
L&ue les choses en vinssent £ Lun excès in-
supportable, pour que quelques-uns se
décidassent à mettre le public dans le
secret de leurs frayeurs et de leurs récri-
minations.
Cette situation a fini par appeler l'at-
tention des pouvoirs publics. Jamais on ne
rendra, je crois, très sûre:la zone des for-
tifications c'est que le génie militaire
^du diable si je sais pourquoi) s'oppose
a ce qu'on y bâtisse. Aussi personne pe
se hasarde-t-il, passé minuit, dans les
chemins de ronde. Mais plus loin, ce sont
des villages ou de gros bourgs, ou même
des villes plus ou moins importantes. Il
est possible, sinon facile, d'en faire le sé-
jour aussi tranquille que celui de Paris
même. Il n'y a qu'à y mettre des agents
de police.
Quand on pense qu'à Nanterre, un
bourg de six mille âmes, nous n'avons
pas un agent de police ! Mais Nanterre,
ce n'est rien. Colombes, il y a 18,000
habitants; à St-Mandé, 10,000; à Saint-
Maur, 16,000; à hsy, 9,000. Je pourrais
continuer cette énumération, car toutes
les communes des environs de Paris sont
de véritables villes; et pas une de ces
localités n'a pour la garder un agent de
police.
Et savez-vous ce qui arrive? C'est que
dans les six premiers mois de 1891 on n'a
pas compté moins de 2,869 agressions
nocturnes, rixes et vols, dans la banlieue
parisienne. Je vousparlais tout à l'heure
de la tranquillité dont on jouit à Nan-
terre,, Eh bien! je n'irais pas me prome-
ner, le soir, sans unrevolver dans ma po-
che, à un kilomètre, du côté de la maison
de pénitence. !
Nous ne sommes pas protégés : voilà le
vrai. Il faut que nous le soyons; car,
chaque année, croît le flot des Parisiens
qui émigrent dans la banlieue.
Nous espérons que la Chambre et le
Sénat voteront d'emblée les fonds qui
vont leur être demandés.
Francisque Sarcey.
RIEN NE VA PLUS
DEUX SORTES DE BLANC
En 1882, les héritiers de M. François
Blanc, le fondateur du Casino de Monaco,
s'imaginèrent de dédoubler les 30,000 ac-
tions laissées par leur auteur et s'attribuè-
rent ainsi quinze nouveaux millions, en
portant le capital de la société dite « des
Bains de mer et du Cercle des étrangers de
Monaco" à trente millions de francs.
Pour réaliser l'opération, c'est-à-dire
pour convertir le papier ainsi noirci par
M. Blanc et consorts en espèces, un M. Mun-
dcl s'offrit en 1885; on lui promit une com-
mission de 16.fr. 25 par titre placé. C'est
pour le paiement de cette commission
qu'il assigna le prince Constantin Radzi-
will, le prince Roland Bonaparte et M. Ed-
mond Blanc devant le tribunal do com-
merce, où Me Lettrel, avocat, a exposé la
demande de M.Mundel et où Mes Lignereux
et Sabatier, agréés, ont répondu au nom
des héritiers Blanc.
Quoique ce fût une affaire de roulette,
elle ne marcha pas toute seule. M. Er-
langer, à qui elle fut proposée, peu diffi-
cile pourtant en pareille matière (témoin
la concession salée d'Emma), déclara qu'il
aimerait mieux se charger de l'émission
d'actions de toute autre maison hospita-
lière que de celle-là. Le hasard fit décou-
vrir un nommé Blanc (Alexandre) dont la
faillite avait donné h fr. 68 0/0 à ses créan-
ciers. Sans bureau, sans domicile, il por-
tait un nom qui devait donner le change
aux acheteurs des titres. Mais les Blanc
purs n'allaient pas remettre si facilement
leurs actions à un Blanc un peu sali par
un précédent commercial. 11 était blanc
pour le public, mais pas assez pour eux.
On imagina de déposer les précieux pa-
piers à la Société de dépôts et comptes-
courants qui avança 1,250,000 fr. sur mille
titres. 905,000 fr. furent payés ; le reste fut
partagé avec M. Donon et le syndicat orga-
nisé par le moins blanc des Blanc. C'est
ainsi que plus de A0,000 titres furent placés
successivement dans le public à des taux
très différents ; quelques-uns même furent
payés 2.000 francs.
- Le résultat de l'opération profita d'abord
à tous les Blanc, purs ou non, c'est-à-dire
que M. Blanc (Edmond) a converti tous ses
titres en lingots sans en garder un seul,
que les princes ses beaux-frères en ont
conservé chacun trois ou quatre mille tout
au plus et que le reste s'est trouvé absorbé
p ar le bon public, tout en laissant un assez
joli bénéfice à l'autre Blanc pour se blan-
chir complètement, s'il le voulait, de sa
petite tache commerciale.
Quant à M. Mundel, il a tout vu passer
devant son nez. De là sa réclamation et le
procès qui sera jugé à une date prochaine.
DRAMATIClUE INCIDENT
EN CHEMIN DE FER
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Etampes, 5 juin.
Un incident dramatique a eu lieu hier
sur la ligne d'Orléans, entre les gares de
Toury et d'Etampes.
Le train direct d'Orléans qui passe à
Etampes à 10 heures M venait de dépasser
la gare de Toury. Le préfet d'Indre-et-
Loire, qui occupait avec une autre per-
sonne un compartiment de lre classe, vit
tout à coup la portière s'ouvrir et un in-
dividu entrer. L'inconnu était nu-tête, il
avait un air hagard et gesticulait.
Les deux voyageurs, qui avaient voulu
l'interroger, ne tardèrent pas à s'apercevoir
que le malheureux n'avait pas sa raison.
Il ne leur répondait que par des mots
sans suite, et conservait las yeux obstiné-
ment fixés sur la portière.
Tout à coup il l'ouvrit de nouveau et
jeta son porte-monnaie d'un mouvement
brusque. S'étant approché, il descendit sur
le marche-pied et s'élança sur la voie.
Quelques instants après, le train arrivait
à Etampes, où le chef de gare, prévenu de
l'incident, envoya un homme d'équipe à la
recherche de l'inconnu.
Ce dernier, que l'on croyait broyé, fut
trouvé sur la voie occupé à chercher son
porte-monnaie.Al'endroit où il s'étaitélancé
sa chute avait été amortie par le sable, et
il ne s'était fait que de légères contusions.
Ce malheureux, dont on ignore le nom,
a été transporté à l'hospice d'Etam pes.
LA CATASTROPHE DE PRZIBRAM
Vienne, 5 juin. — On croit que l'incendie des
fosses de Przibram a été allumé par plusieurs
ouvriers de la. mine.
M. CARNOT DANS L'EST
A BAR-LE-DUC ET A NANCY
Le départ de l'Elysée. — A la gare de
l'Est. — Le train du président. —
Les manifestations patriotiques
de Lunéville et de Nancy.
A huit heures, M. Carnot a quitté l'Elysée,
prenant place dans un landau fermé où,
avec lui, se trouvaient le général Brugère,
les colonels Chamoinet Dalstein, et le com-
mandant Courtès-Lapeyrat. Une victoria
découverte suivait dans laquelle étaient
montés le commandant Pistor et M. Tran-
chau, chef du secrétariat de la prési-
dence.
Après avoirsuivila rue Royale, les grands
boulevards jusqu'à la rue Le Peletier, la
rue de Châteaudun, la rue La Fayette, la
rue Chabrol, le cortège présidentiel arrive
boulevard Magenta. La gare de l'Est apparaît
encadrée de trophées, de drapeaux trico-
lores ; la foule des curieux se bouscule lé-
gèrement, se découvre et pousse les cris de
« Vive Carnot! » auxquels le président ré-
pond en saluant avec sa bonne grâce ha-
bituelle.
Sous le péristyle de la gare, M. Lozô et
M. Soinoury, directeur de la sûreté géné-
rale, reçoivent le président, qu'ils condui-
sent dans l'une des salles d'attente, déco-
rée de tentures rouges et ornéedesuperbes
massifs de fleurs. MM. Loubet, président
du conseil, Bourgeois, ministre de l'ins-
truction publique, Van Blarenberghe, pré-
sident du conseil d'administration de la
Compagnie de l'Est, Barabant, directeur,
de Sabatier, premisr sous-chef de gare,
remplaçant M. Cabié, malade, attendaient
M. Carnot dans le salon.
Le président s'est ensuite dirigé sur le
quai où se trouvaient déjà MM.Poincaré et
Buviguier, députés de la Meuse, Gaillot,
chef de la police municipale. MM. Van Bla-
renberghe et Barabant présentent à M. Car-
not M. Flamand, ingénieur du matériel et
de la traction, auteur des projets d'après
lesquels ont été construits les nouveaux
wagons que le président inaugure pour
le voyage de Nancy.
LE TRAIN PRÉSIDENTIEL
Le train est composé de Il voitures traî-
nées par la fameuse locomotive « ie Cha-
meau", conduite par MM. Schuveillers,
mécanicien, et Mourcelly, chauffeur. Après
la locomotive et son ter.der, tout enguir-
lendés de feuillages et de fleurs et décorés
de trophées de drapeaux, viennent unfour-
gon, puis 2 voiture de Ire class > pour les
invités, le télégraphe, le service de la Com-
pagnie, le wagon double occupé par le
président et disposé comme suit : le grand
salon, un petit compartiment, un lavabo,
puis, dans l'autre wagon relié à celui-ci
par un soufflet de communication, un pe-
tit salon, la chambre à coucher du prési-
dent, le cabinet de toilette y attenant, un
compartiment de service et, enfin, une an-
tichambre; puis un wagon-restaurant, un
fourgon office, 9 autres wagons destinés
aux invités et à la presse et, enfin, ua four-
gon.
La longueur totale du train est de IhO
mètres.
M. Carnot a pris un vif intérêt à la des-
cription que'lui a faits M. Flamand du mé-
canisme de la machine du nouveau type à
deux bouilleurs. Puis il a gagné le wagon
110 8, qui lui était destiné ; il y est monté
en compagnie de MM. Loubet, Bourgeois,
général Brugère et Tranchau.
A 8 h.hO, M.de Sabatier donne le signal du
départ. La dernière personne à laquelle
M. Carnot serre la main sur le quai est M.
Lozé, qui lui dit : « M. le Président, je re-
grette de ne pouvoir vous accompagner;
je reste pour garder la maison. »
Exquis !
Lorsque le train s'est mis en marche, de
nombreux cris de « Vive Carnot! Vive la
République ! » se sont fait entendre. Malgré
l'heure matinale, plus d'un millier de per-
sonnes se trouvaient sur les quais et aux
abords de la gare. Des voyageurs en par-
tance pour le Luxembourg, qui se trou-
vaient sur le quai du départ, joignent leurs
acclamations à celles des curieux. M. Car-
not est resté à la portière jusqu'après le
pont de la rue Lafayette, répondant par des
saluts aux cris de la foule.
PENDANT LA ROUTE
(DÉPÊCHES DE NOS ENVOYÉS SPÉCIAUX)
Chàlons-sur-Marne, 5 juin.
Après quelques secondes d'arrêt à Châ-
teau-Thierry où M. Deville, député etmaire
de cette ville, a adressé à M. Carnot quel-
ques paroles de bienvenue, le président est
descendu un instant à Châlons-sur-Marne.
Il a été reçu à Châlons par MM. Develle,
ministre de l'agriculture, le général Ja-
mont, Viguié, préfet de la Marne, le préfet
de la Meuse, et Bourdon, maire de la ville.
Le président est descendu sur le quai, où
avait été étendu un tapis. La gare tout
entière était pavoisée et ornée de trophées
de drapeaux. - -
Au moment où le président, après avoir
serré la main d'une jeune fille qui lui
avait offert un bouquet, est remonté dans
le wagon-restaurant, la musique a joué la
Marseillaise, au milieu des acclamations
d'une fjule considérable.
MM. Bourgeois et Develle, le général Ja-
mont, le général Brugëre, le préfet de la
Meuse, M. Weiss, chef-adjoint de l'exploi-
tation de la ligne de l'Est, MM. Barabant,
directeur et Van Blarenberghe, président
du conseil d'administration de la Compa-
gnie de l'Est, ont suivi M. Carnot dans son
wagon.
A BAR-LE-DUC
Bar-le-Duc, 5 juin.
A Bar-le-Duc — la première ville qu'au
cours de son voyage dans l'Est va visiter
un peu longuement le président —revenait
l'honneur de donner l'exemple de l'enthou-
siasme aux autres villes lorraines. Elle s'est
très amplement acquittée de cette mission,
grâce aux sentiments républicains de la
grande majorité des populations de la
Meuse et grâce aussi aux sentiments de
courtoisie et d'hospitalité de la minorité.
Nous entrons en gare à midi et demie.
Le président quitte son wagon, accompa-
gné par MM. Loubet et Bourgeois, ainsi que
par M. Jules Develle qui, avec le préfet,
M. Bret, et son frère, M. Edmond Develle,
était allé jusqu'à Châlons à la rencontre du
président. MM. Boulanger, sénateur, Poin-
caré, Royer, questeur du Sénat, et Buvi-
gnier s'étaient joints à leurs collègues de la
députation du département.
Le chef de l'Etat a été reçu par le maire,
M. Busselot, qui lui a souhaité la bienve-
nue et lui a présenté le conseil municipal
dans la gare, décorée d'une grande profu-
sion de drapeaux et d'arbres verts dans
les branches desquels se balançaient des
lampions destinés aux illuminations de ce
.50ir, car, si le orésident quitte Bar-le-Duc
à trois heures et demie, les réjouissance!
ne s'en prolongeront pas moins dans Li
soirée.
M. Carnot quittela gare, escorté par deux
brigades de gendarmerie et deux esca-
drons du 6e chasseurs. Le colonel Sauret,
du 9Ae, et le commandant Henry, de la
gendarmerie, se tenaient à chacune des
portières du landau présidentiel.
La salve traditionnelle de 101 coups de
canon est tirée de l'esplanade du Châ-
teau.
Dès que le président apparaît, la popu-*
lation, malgré sa devise : « Plus pense que
ne dis n, pousse des vivats qui ne vont plus
cesser. Il monte en voiture avec le géné-
ral Jamont, le maire de Bar-le-Duc et le
général Brugère, tandis que la pluie, une
pluie battante, se met à tomber. Va-t-on
relever la capote du landau ? M. Carnot s'y
oppose et, saluant la foule à chaque pas,
il reste la tête nue sous l'averse.
Le cortège présidentiel suit la rue de la
Gare, à l'entrée de laquelle s'élève un arc
de triomphe portant sur une face l'inscrip-
tion u Bienvenue à Carnot », et sur l'autre,
« Vive la République: » Des mâts auxquels
sont attachées des oriflammes tricolore.
sont dressés de chaque côté de la rue. Les
fenêtres de nombreuses maisons sont pa-
voisées et encadrées de guirlandes et de
branchettes de sapin. On remarque beau-
coup de drapeaux tricolores et, de temps
en temps, des drapeaux russes et lorrains.
Aux extrémités du pont qui traverse i'Or-
nain, deux arcs de triomphe sont érigés.
Sur l'un, on lit: * La Loge la Régénération
à Carnot » ; sur l'autre : « Le Comité répu-
blicain à Carnot ».
A l'entrée do la rue de la Rochelle, une
estrade a été dressée qu'occupent les da\8
mes invitées par la municipalité. ,
Mme Varin-Bernicr, femme du conseiller
général, offre au président un bouquet ;
Mme, Mercl"on, une bouteille de l'excellent
mais bientôt introuvable pineau, le vin de
la région; Mme Ch. Buzeiot, douze pots de
confiture de groseille, ia gloire de Bar,
renfermés dans un joli coffret.
M. Carnot remercie de cette heureuse et
originale idée.
Tout le long de la rue de la Rochelle
étaient tendues des bandes d'étuffes bleue,
blanche et rouge, qui la traversaient en
donnant l'effet d'un immense vélum tri-
colore. Cinq ou six portiques et arcs de
triomphe étaient dressés dan& les diffé-
rents quartiers de la ville. Nous signalons
la belle statue de la République, du sculp-
teur Thilmany,. et l'arc de triomphe de la
rue Entre-Deux-Ponts,. dont une des face
était ornéo d'attributs militaires et la tac,
opposée d'attributs industriels et agri-
coles. -
Une surprise qui a beaucoup touché M.
Carnot lui a été ménagée: Tous Les ouvriers
des usines de la ville et des environs, en
costume de travad,. après avoir figuré dans
le cortège, ont tenu à défiler d.tn-..nt lui,
bannière en tête et pacifiquement armés
de leurt' outils. Compassiers de Ligny, fon-
deurs de Dammarie et de Marhot, pape-
tiers de Jeandheurs, Msseurs cle Bar-le-
Duc, ouvriers de l'usure de blcu. brasseurs
des grandes maisons de la ville, ceux-ci
revêtus de costumes de brasseurs alsa-
ciens faits exprès en Alsace à cette inten-
tion, ont pris part à cette manifestation
dont l'effet a été très imposant.
Le cortège entre ensuite dans la rue du
Bourg et arrive à la préfecture, où sont
rangés des soldats du 9J40 ds ligue.
M. Brd, préfet de la Meuse, et Mme. Bret,.
née René Brice, reçoivent le président dans
le salon d'honneur de la préfecture.
Les réceptions vont commencer.
LES RÉCEPTIONS OFFICIELLES
C'est un peu toujours la même chose. Le
président du tribunal civil est introduit le
premier; puis se succèdent les sous-préfets
et les conseillers de préfecture, les meui*
bres du barreau, le conseil municipal pré-
senté par le maire :
Le conseil municipal en entier, dit-if, et la
grande majorité de mes concitoyens sont pro-
fondément attachés au gouvernement de la
République que vous représentez avec tant da
bonheur, et je puis ajouter que ia presque
unanimité d'entre eux professent à votre
égard et envers votre famille des sentiments
d'affectueux respect, de sympathie et d'estimo
particulièrement vivaces.
M. Carnot répond qu'il a été très ému
des manifestations sympathiques de la po-
pulation ouvrière.
Il félicite le conseil municipal et la
maire, qui en sont les organisateurs.
DÉCLARATION DE L'ÉVÊQUE
DE VERDUN
M. Pagis, évêque de Verdun, présenta
son clergé et fait la déclaration suivante :
Monsieur le président, j'ai l'honneur de vous
offrir mes témoignages profondément respec-
tueux et ceux de tout le clergé de mon dio-
cèse,et spécialement de mes prêtres de Bar-le-
Duc que je suis heureux de vous présenter.
Je n'ai pas hésité à quitter ma ville épisco-
pale, même en ce grand jour de fête, pour
vous saluer à votre passage et pour vous ex-
primer les sentimentsqui nous animent. Nous
sommes de bons Français, monsieur le prési-
dent, et nous aimons passionnément la France.
Nous honorons en vous le premier citoyen de
notre pays, investi de la magistrature suprê
me, qui a droit au respect et à la soumission
de tous. Nous acceptons franchemeut, loyale-
ment, sans arrière-pensée, la forme gouver-
nementale dont vous avez la garde, que notro
pays s'est librement donnée.
Sur ce point je vous prie de croire à ma sin-
cérité parfaite. Notre attitude, à mon avis mal
comprise, a donné lieu à des malentendus, à des
défiances, à des conflits qui ont provoqué des
rigueurs regrettables. Je le déplore et désire
de tout mon cœur que les désaccords dis-
paraissent et que l'union se fasse dans la
paix.
Un gouvernement est inébranlable quand il
peut compter sur toutes les forces vives à!X-
pays. J'estime que les forces catholiques sont
les premières par l'importance et par le nom-
bre. Nous vous les offrons, monsieur le pré-
sident, acceptez-les. Je me permets de vous le
dire, avec toute la liberté de mon patriotismo
et de ma foi. Si vous voulez nous aimer un
peu, nous témoigner un peu de confiance,
protéger nos libertés nécessaires, vous verrez
que nous sommes capables de vous aimer
beaucoup et de consacrer tout ce que nous
avons d'influence, d'intelligence et de cœur à
la prospérité, à la grandeur de la France.
Cette expression de nos sentiments prend
ici, en cette ville de Bar-le-Duc et ce pays de
Lorraine, un caractère exceptionnel de sin-
cérité patriotique.
Il me semble que nous aimons la France
davantage, nous à qui la France confie une
mission d'honneur, une mission sacrée, la
garde de la frontière.
Nous voulons la paix, monsieur le prési-
dent, comme la France la veut, comme vous
la voulez vous-même. Mais nous n'avons pas'
peur de la guerre. Je suis fier de vous le dire,
moi, évêque de Verdun, qui suis un peu sol-
dat depuis que je vis en contact quotidien
avec nos braves soldats, et si jamais l'heure
venait à sonner, l'heure df's suprêmes périls,
vous verriez l'évêque et ses prêtres se mêler
aux soldats et rivaliser de bravoure avec
eux.
Après la bataille, je veux dire après les VlC-:
tOJf. VOUS notre chef, PUISAGE vous êtes chef i
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ASSURANCES
SUR L'ÉTAT
On n'entend plus parler du projet
îlouvier sur lés retraites. On l'agite
de temps en temps devant nos yeux
quand les plaintes atteignent leur
maximum d'intensité, mais dès que le
silence se fait, on se hâte de le ren-
voyer au magasin des accessoires.
C'est ainsi que cela se passe souvent
chez nous : les campagnes sont vives
2nais courtes. Aussi les habiles ne se
risquent-ils jamais à heurter de front
.une réforme: ils aiment mieux l'user
en temporisant, et la force d'inertie
reste à leurs yeux le meilleur et sou-
vent l'unique moyen - de gouverne-
ment.
Toutefois, la question des retraites
est de celles qu'on se flatte en vain
d'enterrer. Elle renaît de ses cendres
tous les ans aux approches de la dis-
cussion du budget, et, d'année en an-
née, elle devient plus difficile à ré-
soudre. On a beau augmenter en mau-
gréant les crédits affectés au service
des pensions. Par un phénomène assez
bizarre, il semble que plus les charges
augmentent, plus s'allonge en même
temps la liste des mécontents.
Comment se fait-il que tout le monde
jette aujourd'hui la pierre à ce con-
trat d'assurance qni lie réciproque-
ment l'Etat et ses fonctionnaires et
qui est devenu également insuppor-
table aux deux parties contractantes ?
L'assuré n'est plus tranquille. Il a
beau payer régulièrement sa prime
sous forma de retenues sur son traite-
ment, il n'a plus comme autrefois la
certitude de recevoir au jour diL la
petite rente viagère qu'il se promet
pendant trente ans. Depuis que le
conseil d'Etat a déclaré qu'on pouvait
avoir des droits à la retraite sans que
l'administration fût pour cela con-
trainte à la liquider, depuis qu'il a
trouvé cette ligne de partage origi-
nale entre les obligations de l'assuré
et celles de l'assureur, le fonction-
naire est comme le personnage de
Daudet: il n'a plus confiance. 11 s'in-
quiète de voir exercer sur ses appoin-
tements mensuels un droit de préliba-
tion qui ne lui rapportera peut-être
jamais rien. Quelques-uns préfére-
raient même toucher intégralement ce
qui leur est dû et, à défaut de la pré-
voyance nationale dont l'infaillibilité
leur est désormais suspecte, aviser à
leur guise aux meilleurs moyens d'as-
surer l'avenir.
Si les fonctionnaires j ettent les hauts
cris, l'Etat assureur n'est pas plus con-
tent de son rôle de providence. Il
trouve, et avec raison, que ce rôle lui
coûte les yeux de la tête. D'abord, il
ne capitalise pas lei sommes qu'il re-
tient aux fonctionnaires et mange
comme les prodigues son blé en herbe.
Mais en admettant même qu'il fût
plus sage, qu'il eût, comme toute mai-
son bien conduire, une caisse de ré-
serve pour reconstituer les capitaux
destines au service des pensions, il
lui serait tout aussi impossible de
joindre les deux bouts. Entre les re-
tenues qu'il prélève sur les traite-
ments et les pensions de retraite qu'il
s'engage à servir, il y a un écart con-
sidérable qu'il faudra combler tous
tes ans à grand renfort de crédits
nouveaux.
Quand on a fait les lois sur les re-
traites, on a pris pour base des tables
de mortalité déjà caduques et dont la
plus connue, celle de Deparcieux, re-
montait au milieu du siècle dernier.
Les compagnies d'assurances fran-
çaises ont du reste suivi les mêmes
errements, et c'est ce qui explique, on
peut le dire en passant, les difficultés
qu'elles rencontrent aujourd'hui.
Les progrès de l'hygiène, les grands
travaux d'assainissement, l'accroisse-
ment de l'épargne et du bien-être ont
reculé sensiblement les bornes de
l'existence. Il y a, depuis vingt-cinq
ans surtout, une augmentation nota-
ble de la vie moyenne à tous les âges
et sur l'ensemble de la population.
Les compagnies anglaises et amé-
ricaines, mieux avisées, se sont em-
pressées de modifier leurs tables et
leur tarifs et d'offrir au public des
combinaisons attrayantes et produc-
tives. La plupart des compagnies
françaises ainsi que l'Etat sont restés
« vieux jeu" et se trouvent aujour-
d'hui distancés ou débordés.
- Si l'Etat ne peut plus servir en
effet aujourd'hui toutes les pensions
de retraite qu'on lui demande, c'est
que le nombre des fonctionnaires en-
core vivants après vingt-cinq ou
trente ans de services actifs a dé-
passé considérablementses pr4Y^ions.
On vit trop pour qu'il fasse honneur
à ses affaires. Je pourrais citer telle
fonction civile à Paris dont le titu-
laire a dix mille francs d'appointe-
ments. On a mis à la retraite à la
limite d'âge trois de ses prédécesseurs,
tous très vivants encore auj ourd'hui
et qui touchent chacun six mille
francs de pension. Voilà donc un
poste de dix mille francs qui coûte- en
réalité vingt-huit mille francs par an
au trésor public.
Onéreuse à l'Etat, suspecte aux
fonctionnaires, la loi de 1853 est vir-
tuellement dénoncée. Mais,au lieu d'en
éluder l'application par des chinoise-
ries de légiste, comme la décision du
conseil d'Etat dont nous parlions tout
à l'heure, ne vaut-il pas mieux se hâ-
ter de la refondre, en commençant
par reléguer dans les archives des ta-
bles de mortalité qui datent de Louis
XV?
André Balz.
"~të~XÏX® SIÈCLE publiera demain la
a Chronique », par M. Paul Ginisty.
M. JEFFERSON COOLIDGE
Arrivée du nouveau ministre des Etats-
Unis à Paris
M. T. Jefferson Ccolidge, ministre pléni-
potentiaire des Etats-Unis en France, est
arrivé la nuit dernière au Havre, abord de
la Toarctine.
Né à Boston en 1831, M. Coolidge appar-
tient à une famille de négociants qui
compte parmi les plus riches et les plus
anciennes des Massachussetts.
Il est, en effet, l'arrière-neveu de Tho-
mas Jefferson, le troisième président des
Etats-Unis.
M. Coolidge commença ses études à l'U-
niversité d'Hauvard et les termina en Eu-
rope.
Entré dans les affaires, il devint prési-
dent ou directeur de plusieurs grandes
compagnies de chemins de fer et entre-
prises industrielles.
Le successeur de M. Whitelaw-Reid est un
républicain protectionniste, un partisan
du bill Mac-Kinley.
Il n'a jamais occupé de fonctions élec-
tives. Il a fait ses débuts dans la diplo-
matie comme délégué des Etats-Unis au
congrès des Deux-Amériques.
M. Coolidge n'est pas un nouveau venu
pour nous. Il a habité la France pendant
trois ans de suite sous l'Empire.
Il parle très bien le français et a con-
servé à Paris de nombreuses relations.
UN SUICIDE A CENT SIX ANS
(DE NOTRE COKRKSPONDANT PARTICULIER)
Saint-Pétersbourg, 5 juin. — Le télégraphe
nous apporte la nouvelle qu'à Jekaterinostav,
M. Guillaume Balan, âgé de cent six ans, vient
de se suicider en se pendant.
M. Balau était d'origine française; ses pa-
rents étaient des réfugiés venus en Russie
sous l'impératrice Catherine. Il était restaura-
teur à Jekaterinoslav et possédait une jolie
fortune.
LA FÊTE DU « SATUTO » A ROME
- Rome, 5 juin.
Ce matin, à l'occasion du retour du roi,
revenu à Rome pour la fête de la Cons-
titution, une manifestation a eu lieu de-
vant le Quirinal.
Une fou'e de dix mille personnes a ac-
clamé le roi qui, par deux fois, a dû pa-
raître au balcon du palais.
Les associations romaines étaient mas-
sées sur la place avec bannières et musi-
ques.
L'ambassadeur d'Allemagne, en sortant
du Quirinal où il avait accompagné le roi
à l'issue de la revue que le souverain a
passée comme chaque année à cette date,
a été salué par des applaudissements et
des cris de : « Vive l'Allemagne notre al-
liée! »
A Naples, c'est la reine Marguerite qui a
passé en revue les troupes de la, garni-
son.
La foule a fait une ovation à la reine.
M. BLAINE
Washington, 5 juin.
A la veille des élections à la présidence, la
démission de M. Blaiue cause une grande sen-
sation. --
Ses partisans qui font partie de la conven-
tion républicaine qui se réunira le 7 courant à
Mineapolis sont convaincus que la démission
de M. Blaine indique qu'il pose sa candidature
et ils sont résolus à le nommer.
LE DOYEN DES SAUVETEURS
(DK - NOTHE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Rouen, 5 juin.
M. Jean-Baptiste Toutain, né le 30 octo-
bre 1797 à Bosseville-Bonsecours, retraité
de la ville de Rouen comme vérificateur
des poids et mesures, est mort hier.
C'était, nous dit-on, le doyen des sauve-
teurs de Rouen, et probablement de Fran-
ce.
Auteur de plusieurs actes de courage et
de sauvetage, il recevait en 188.2 la mé-
daille d'honneur en argent du gouverne-
ment, pour un sauvetage en Seine par lui
accompli l'année précédente, soit à l'âge
de quatre-vingt-trois ans.
Ses titres l'avaient fait admettre comme
membre d'honneur de la Société des sau-
veteurs-hospitaliers de Rôuen.
L'ANNIVERSAIRE DE GARIBALDI
Nice, 5 juin. — Ce matin, la municipalité a
porté une couronne à la statue de Gari-
baldi. Un peu plus tard, les cercles Mazzini et
Oberdauck et le groupe des républicains ita-
liens ont porté des couronnes de laurier cra-
vatées de noir et de rouge. Six sociétés fran-
çaises, musique en tête, sont ensuite venues.
Quelques paroles ont été prononcées. Un
journaliste a glorifié la République romaine
de 181.9.
MORT D'UNE CANTATRICE
Le Havre, 5 juin. — Mme Caccia, née Juana
Le Havre, décédée hier au Havre, où elle de-
Kossi, est dcédée hier a.u Havre, où elle de-
meurait depuis de nombreuses années. Née à
Barcelone en 1818, fille d'une cantatrice italien-
ne. Mme Caccia avait, en 18.46, débuté-à FUpéra
avec un certain succès dans le rôle de Rachel
de la Juive. Sa principale création avait été le
rôle de Carlo dans la Part du Diable.
Mme Caccia, qui donnait au Havre des le-
çons de chant, avait, peu de temjçs ayant sa
„jaor.kété atteinte Se cécité.
CHRONIQUE
Ce ne sera pas @ trop tôt ! Le gouver-
nement a déposé un projet de loi en
vertu duquel le nombre des @ agents
de police chargés de veiller sur les com-
munes suburbaines du département de
la Seine sera notablement augmenté. Il
passera, j'imagine, comme une lettre à la
poste.
On se plaint à Paris que certains
quartiers, surtout les quartiers ex-
centriques , ne soient pas assez proté-
gés ; qu'on n'y puisse rentrer le soir en
toute sécurité. Il y a, je crois, quelque
exagération dans ces doléances. La vérité
est que chacun de ces quartiers est
pourvu d'agents de police qui le parcou-
rent la nuit en tous sens. Il est clair
qu'ils ne peuvent toujours être à point
nommé aux environs de l'endroit où se
commet un crime; mais leur présence
incessante et leurs rondes nocturnes dé-
concertent les chenapans et les effraient.
Jouy peut les chansonner tout à son
aise ; il faut bien convenir pourtant que
l'idée seule qu'ils peuvent surgir à un
coin de rue a dû souvent suftire pour
arrêter un voleur ou faire balancer un
assassin.
Passé les fortifications, il n'y a pour
ainsi dire plus d'agents de police. On
n'est gardé que par l'honnêteté publique.
Voilà qui allait fort bien à l'époque où
la population parisienne vivait confinée
dans Paris même, où elle ne se répandait
dans la banlieue que les dimanches et les
jours de fête pour manger'une friture ou
une matelotte et boire du vin à quinze.
Elle rentrait le soir au logis, après une
journée de bon air pris à la campagne,ou
du moins à ce que l'on appelait de ce
nom.
Les mœurs ont bien changé. Combien
y a-t-il de Parisiens qui, en ce moment,
partent soit à six heures, soit à minuit
quarante-cinq, après le spectacle, pour
s'en aller dans une des communes de la
banlieue parisienne où ils demeurent ?
La statistique officielle accuse à peu près
le chiffre de cent mille, et peut-être est-
il au dessous de la vérité.
Ce mouvement de décentralisation ne
fait que commencer. Je suis très frappé
de la rapidité avec laquelle il s'accentue
tous les ans. J'en ai sous les yeux un
exemple frappant. Nanterre, que j'habite
en été, n'est pourtant pas une des sta-
tions favorites des Parisiens. Ils s'arrê-
tent plutôt-à Asnières, qui est devenu
une grande ville, ou poussent jusqu'à
Rueil ou Bougival. Et cependant, tout
autour de moi, les maisons poussent
comme des champignons. Ce ne sont pas,
de petits vide-bouteilles à l'usage, d'une
famille. Ce sont d'immenses caravansé-
rails à quatre étages, où la foule des em-
ployés parisiens trouve en dehors de Pa-
ris des logements à bon marché. Le che-
min de fer passe avec les habitants des
abonnements à l'année, qui sont encore
trop chers, à mon avis. Je crois que l'ad-
ministration de l'Ouest aurait avantage
à favoriser cette émigration quotidienne
et à multiplier les trains. Quelques pro-
grès se sont déjà faits en ce sens, depuis
douze ans que j'habite Nanterre ; mais
combien lents et peu sensibles !
Tous les soirs donc, entre neuf
heures et une heure du matin, dans nos
localités, il y a une foule de Parisiens
qui, débarqués à la gare, regagnent leur
logis par des voies la plupart du temps
assez mal éclairées. Ce sont là pour les
rôdeurs de bonnes aubaines toutes prê-
tes. Car remarquez que les chenapans
doivent naturellement être plus nom-
breux dans la banlieue qu'à Paris. A Pa-
ris, ils sont traqués, et il n'y a pas de
bons coups à faire. Rien ne leur est plus
facile que de prendre, tout comme les
honnêtes gens, le chemin de fer le soir
et d'attendre, comme dit La Fontaine,
chap chute aux environs de la gare.
Je ne fais point allusion à Nanterre,
qui est un pays assez paisible et où je
n'ai jamais entendu parler d'agression
nocturne. Je dois dire cependant que les
femmes ne se hasardent pas volontiers,
passé minuit, dans ces larges avenues
bordées d'arbres et désertes qui condui-
sent de la gare aux maisons habitées. Je
sais que pour moi je n'y ai jamais fait
rencontre que d'honnêtes gens, qui me
saluaient d'un bonsoir amical.
Mais dans d'autres localités plus pro-
ches de Paris, les routes sont moins
sûres ; le voisinage même de la Seine est
un danger, et je sais tel de mes amis qui
ne rentre gaillardement au logis que
parce qu'il a un revolver dans sa poche
et qu'il est parfaitement décidé à le bra-
quer contre tout visage suspect.
Ce n'est pas tout. Vous connaissez les
habitudes de nombre de Parisiens. Ils ont
près de Paris une maison de villégiature
pour l'été, mais ils ne l'habitent point
l'hiver; ils en laissent la garde à un jar-
dinier. De nos côtés, beaucoup ont pris
l'habitude d'héberger toute l'année un
employé du chemin de fer, qui reste chez
eux à demeure et veille sur l'habitation du-
rant les mois d'hiver.
Ce n'est la qu'une sécurité relative. Les
gredins et les bandits dont fourmille la
banlieue parisienne sont au courant de
ces particularités ; ils savent qu'il n'y a
pour garder une maison qu'un homme
de peine, souvent appelé ailleurs par ses
fonctions. Rien de plus facile que de la
dévaliser, soit la nuit, soit en plein jour,
surtout en plein jour. Le gardien est à
son ouvrage, les voisins ne font pas at-
tention ; une équipe de cambrioleurs
pénètre dans le logis et en un tour de
main le vide de ses meubles.
Tous les journaux sont pleins du récit
de ces expéditions, qui se renouvellent
fréquemiuent.Qaelques localités aux alen-
tours de Paris ont été ainsi exploitées d'une
façon désastreuse. Les maires n'osaient
pas trop se plaindre ni crier trop haut.
Car publier à son de trompe qu'on n'était
pas en sûreté dans la commune, c'était
en écarter les Parisiens, qui, ayant le
louis facile, en font la fortune. Il a fallu
L&ue les choses en vinssent £ Lun excès in-
supportable, pour que quelques-uns se
décidassent à mettre le public dans le
secret de leurs frayeurs et de leurs récri-
minations.
Cette situation a fini par appeler l'at-
tention des pouvoirs publics. Jamais on ne
rendra, je crois, très sûre:la zone des for-
tifications c'est que le génie militaire
^du diable si je sais pourquoi) s'oppose
a ce qu'on y bâtisse. Aussi personne pe
se hasarde-t-il, passé minuit, dans les
chemins de ronde. Mais plus loin, ce sont
des villages ou de gros bourgs, ou même
des villes plus ou moins importantes. Il
est possible, sinon facile, d'en faire le sé-
jour aussi tranquille que celui de Paris
même. Il n'y a qu'à y mettre des agents
de police.
Quand on pense qu'à Nanterre, un
bourg de six mille âmes, nous n'avons
pas un agent de police ! Mais Nanterre,
ce n'est rien. Colombes, il y a 18,000
habitants; à St-Mandé, 10,000; à Saint-
Maur, 16,000; à hsy, 9,000. Je pourrais
continuer cette énumération, car toutes
les communes des environs de Paris sont
de véritables villes; et pas une de ces
localités n'a pour la garder un agent de
police.
Et savez-vous ce qui arrive? C'est que
dans les six premiers mois de 1891 on n'a
pas compté moins de 2,869 agressions
nocturnes, rixes et vols, dans la banlieue
parisienne. Je vousparlais tout à l'heure
de la tranquillité dont on jouit à Nan-
terre,, Eh bien! je n'irais pas me prome-
ner, le soir, sans unrevolver dans ma po-
che, à un kilomètre, du côté de la maison
de pénitence. !
Nous ne sommes pas protégés : voilà le
vrai. Il faut que nous le soyons; car,
chaque année, croît le flot des Parisiens
qui émigrent dans la banlieue.
Nous espérons que la Chambre et le
Sénat voteront d'emblée les fonds qui
vont leur être demandés.
Francisque Sarcey.
RIEN NE VA PLUS
DEUX SORTES DE BLANC
En 1882, les héritiers de M. François
Blanc, le fondateur du Casino de Monaco,
s'imaginèrent de dédoubler les 30,000 ac-
tions laissées par leur auteur et s'attribuè-
rent ainsi quinze nouveaux millions, en
portant le capital de la société dite « des
Bains de mer et du Cercle des étrangers de
Monaco" à trente millions de francs.
Pour réaliser l'opération, c'est-à-dire
pour convertir le papier ainsi noirci par
M. Blanc et consorts en espèces, un M. Mun-
dcl s'offrit en 1885; on lui promit une com-
mission de 16.fr. 25 par titre placé. C'est
pour le paiement de cette commission
qu'il assigna le prince Constantin Radzi-
will, le prince Roland Bonaparte et M. Ed-
mond Blanc devant le tribunal do com-
merce, où Me Lettrel, avocat, a exposé la
demande de M.Mundel et où Mes Lignereux
et Sabatier, agréés, ont répondu au nom
des héritiers Blanc.
Quoique ce fût une affaire de roulette,
elle ne marcha pas toute seule. M. Er-
langer, à qui elle fut proposée, peu diffi-
cile pourtant en pareille matière (témoin
la concession salée d'Emma), déclara qu'il
aimerait mieux se charger de l'émission
d'actions de toute autre maison hospita-
lière que de celle-là. Le hasard fit décou-
vrir un nommé Blanc (Alexandre) dont la
faillite avait donné h fr. 68 0/0 à ses créan-
ciers. Sans bureau, sans domicile, il por-
tait un nom qui devait donner le change
aux acheteurs des titres. Mais les Blanc
purs n'allaient pas remettre si facilement
leurs actions à un Blanc un peu sali par
un précédent commercial. 11 était blanc
pour le public, mais pas assez pour eux.
On imagina de déposer les précieux pa-
piers à la Société de dépôts et comptes-
courants qui avança 1,250,000 fr. sur mille
titres. 905,000 fr. furent payés ; le reste fut
partagé avec M. Donon et le syndicat orga-
nisé par le moins blanc des Blanc. C'est
ainsi que plus de A0,000 titres furent placés
successivement dans le public à des taux
très différents ; quelques-uns même furent
payés 2.000 francs.
- Le résultat de l'opération profita d'abord
à tous les Blanc, purs ou non, c'est-à-dire
que M. Blanc (Edmond) a converti tous ses
titres en lingots sans en garder un seul,
que les princes ses beaux-frères en ont
conservé chacun trois ou quatre mille tout
au plus et que le reste s'est trouvé absorbé
p ar le bon public, tout en laissant un assez
joli bénéfice à l'autre Blanc pour se blan-
chir complètement, s'il le voulait, de sa
petite tache commerciale.
Quant à M. Mundel, il a tout vu passer
devant son nez. De là sa réclamation et le
procès qui sera jugé à une date prochaine.
DRAMATIClUE INCIDENT
EN CHEMIN DE FER
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Etampes, 5 juin.
Un incident dramatique a eu lieu hier
sur la ligne d'Orléans, entre les gares de
Toury et d'Etampes.
Le train direct d'Orléans qui passe à
Etampes à 10 heures M venait de dépasser
la gare de Toury. Le préfet d'Indre-et-
Loire, qui occupait avec une autre per-
sonne un compartiment de lre classe, vit
tout à coup la portière s'ouvrir et un in-
dividu entrer. L'inconnu était nu-tête, il
avait un air hagard et gesticulait.
Les deux voyageurs, qui avaient voulu
l'interroger, ne tardèrent pas à s'apercevoir
que le malheureux n'avait pas sa raison.
Il ne leur répondait que par des mots
sans suite, et conservait las yeux obstiné-
ment fixés sur la portière.
Tout à coup il l'ouvrit de nouveau et
jeta son porte-monnaie d'un mouvement
brusque. S'étant approché, il descendit sur
le marche-pied et s'élança sur la voie.
Quelques instants après, le train arrivait
à Etampes, où le chef de gare, prévenu de
l'incident, envoya un homme d'équipe à la
recherche de l'inconnu.
Ce dernier, que l'on croyait broyé, fut
trouvé sur la voie occupé à chercher son
porte-monnaie.Al'endroit où il s'étaitélancé
sa chute avait été amortie par le sable, et
il ne s'était fait que de légères contusions.
Ce malheureux, dont on ignore le nom,
a été transporté à l'hospice d'Etam pes.
LA CATASTROPHE DE PRZIBRAM
Vienne, 5 juin. — On croit que l'incendie des
fosses de Przibram a été allumé par plusieurs
ouvriers de la. mine.
M. CARNOT DANS L'EST
A BAR-LE-DUC ET A NANCY
Le départ de l'Elysée. — A la gare de
l'Est. — Le train du président. —
Les manifestations patriotiques
de Lunéville et de Nancy.
A huit heures, M. Carnot a quitté l'Elysée,
prenant place dans un landau fermé où,
avec lui, se trouvaient le général Brugère,
les colonels Chamoinet Dalstein, et le com-
mandant Courtès-Lapeyrat. Une victoria
découverte suivait dans laquelle étaient
montés le commandant Pistor et M. Tran-
chau, chef du secrétariat de la prési-
dence.
Après avoirsuivila rue Royale, les grands
boulevards jusqu'à la rue Le Peletier, la
rue de Châteaudun, la rue La Fayette, la
rue Chabrol, le cortège présidentiel arrive
boulevard Magenta. La gare de l'Est apparaît
encadrée de trophées, de drapeaux trico-
lores ; la foule des curieux se bouscule lé-
gèrement, se découvre et pousse les cris de
« Vive Carnot! » auxquels le président ré-
pond en saluant avec sa bonne grâce ha-
bituelle.
Sous le péristyle de la gare, M. Lozô et
M. Soinoury, directeur de la sûreté géné-
rale, reçoivent le président, qu'ils condui-
sent dans l'une des salles d'attente, déco-
rée de tentures rouges et ornéedesuperbes
massifs de fleurs. MM. Loubet, président
du conseil, Bourgeois, ministre de l'ins-
truction publique, Van Blarenberghe, pré-
sident du conseil d'administration de la
Compagnie de l'Est, Barabant, directeur,
de Sabatier, premisr sous-chef de gare,
remplaçant M. Cabié, malade, attendaient
M. Carnot dans le salon.
Le président s'est ensuite dirigé sur le
quai où se trouvaient déjà MM.Poincaré et
Buviguier, députés de la Meuse, Gaillot,
chef de la police municipale. MM. Van Bla-
renberghe et Barabant présentent à M. Car-
not M. Flamand, ingénieur du matériel et
de la traction, auteur des projets d'après
lesquels ont été construits les nouveaux
wagons que le président inaugure pour
le voyage de Nancy.
LE TRAIN PRÉSIDENTIEL
Le train est composé de Il voitures traî-
nées par la fameuse locomotive « ie Cha-
meau", conduite par MM. Schuveillers,
mécanicien, et Mourcelly, chauffeur. Après
la locomotive et son ter.der, tout enguir-
lendés de feuillages et de fleurs et décorés
de trophées de drapeaux, viennent unfour-
gon, puis 2 voiture de Ire class > pour les
invités, le télégraphe, le service de la Com-
pagnie, le wagon double occupé par le
président et disposé comme suit : le grand
salon, un petit compartiment, un lavabo,
puis, dans l'autre wagon relié à celui-ci
par un soufflet de communication, un pe-
tit salon, la chambre à coucher du prési-
dent, le cabinet de toilette y attenant, un
compartiment de service et, enfin, une an-
tichambre; puis un wagon-restaurant, un
fourgon office, 9 autres wagons destinés
aux invités et à la presse et, enfin, ua four-
gon.
La longueur totale du train est de IhO
mètres.
M. Carnot a pris un vif intérêt à la des-
cription que'lui a faits M. Flamand du mé-
canisme de la machine du nouveau type à
deux bouilleurs. Puis il a gagné le wagon
110 8, qui lui était destiné ; il y est monté
en compagnie de MM. Loubet, Bourgeois,
général Brugère et Tranchau.
A 8 h.hO, M.de Sabatier donne le signal du
départ. La dernière personne à laquelle
M. Carnot serre la main sur le quai est M.
Lozé, qui lui dit : « M. le Président, je re-
grette de ne pouvoir vous accompagner;
je reste pour garder la maison. »
Exquis !
Lorsque le train s'est mis en marche, de
nombreux cris de « Vive Carnot! Vive la
République ! » se sont fait entendre. Malgré
l'heure matinale, plus d'un millier de per-
sonnes se trouvaient sur les quais et aux
abords de la gare. Des voyageurs en par-
tance pour le Luxembourg, qui se trou-
vaient sur le quai du départ, joignent leurs
acclamations à celles des curieux. M. Car-
not est resté à la portière jusqu'après le
pont de la rue Lafayette, répondant par des
saluts aux cris de la foule.
PENDANT LA ROUTE
(DÉPÊCHES DE NOS ENVOYÉS SPÉCIAUX)
Chàlons-sur-Marne, 5 juin.
Après quelques secondes d'arrêt à Châ-
teau-Thierry où M. Deville, député etmaire
de cette ville, a adressé à M. Carnot quel-
ques paroles de bienvenue, le président est
descendu un instant à Châlons-sur-Marne.
Il a été reçu à Châlons par MM. Develle,
ministre de l'agriculture, le général Ja-
mont, Viguié, préfet de la Marne, le préfet
de la Meuse, et Bourdon, maire de la ville.
Le président est descendu sur le quai, où
avait été étendu un tapis. La gare tout
entière était pavoisée et ornée de trophées
de drapeaux. - -
Au moment où le président, après avoir
serré la main d'une jeune fille qui lui
avait offert un bouquet, est remonté dans
le wagon-restaurant, la musique a joué la
Marseillaise, au milieu des acclamations
d'une fjule considérable.
MM. Bourgeois et Develle, le général Ja-
mont, le général Brugëre, le préfet de la
Meuse, M. Weiss, chef-adjoint de l'exploi-
tation de la ligne de l'Est, MM. Barabant,
directeur et Van Blarenberghe, président
du conseil d'administration de la Compa-
gnie de l'Est, ont suivi M. Carnot dans son
wagon.
A BAR-LE-DUC
Bar-le-Duc, 5 juin.
A Bar-le-Duc — la première ville qu'au
cours de son voyage dans l'Est va visiter
un peu longuement le président —revenait
l'honneur de donner l'exemple de l'enthou-
siasme aux autres villes lorraines. Elle s'est
très amplement acquittée de cette mission,
grâce aux sentiments républicains de la
grande majorité des populations de la
Meuse et grâce aussi aux sentiments de
courtoisie et d'hospitalité de la minorité.
Nous entrons en gare à midi et demie.
Le président quitte son wagon, accompa-
gné par MM. Loubet et Bourgeois, ainsi que
par M. Jules Develle qui, avec le préfet,
M. Bret, et son frère, M. Edmond Develle,
était allé jusqu'à Châlons à la rencontre du
président. MM. Boulanger, sénateur, Poin-
caré, Royer, questeur du Sénat, et Buvi-
gnier s'étaient joints à leurs collègues de la
députation du département.
Le chef de l'Etat a été reçu par le maire,
M. Busselot, qui lui a souhaité la bienve-
nue et lui a présenté le conseil municipal
dans la gare, décorée d'une grande profu-
sion de drapeaux et d'arbres verts dans
les branches desquels se balançaient des
lampions destinés aux illuminations de ce
.50ir, car, si le orésident quitte Bar-le-Duc
à trois heures et demie, les réjouissance!
ne s'en prolongeront pas moins dans Li
soirée.
M. Carnot quittela gare, escorté par deux
brigades de gendarmerie et deux esca-
drons du 6e chasseurs. Le colonel Sauret,
du 9Ae, et le commandant Henry, de la
gendarmerie, se tenaient à chacune des
portières du landau présidentiel.
La salve traditionnelle de 101 coups de
canon est tirée de l'esplanade du Châ-
teau.
Dès que le président apparaît, la popu-*
lation, malgré sa devise : « Plus pense que
ne dis n, pousse des vivats qui ne vont plus
cesser. Il monte en voiture avec le géné-
ral Jamont, le maire de Bar-le-Duc et le
général Brugère, tandis que la pluie, une
pluie battante, se met à tomber. Va-t-on
relever la capote du landau ? M. Carnot s'y
oppose et, saluant la foule à chaque pas,
il reste la tête nue sous l'averse.
Le cortège présidentiel suit la rue de la
Gare, à l'entrée de laquelle s'élève un arc
de triomphe portant sur une face l'inscrip-
tion u Bienvenue à Carnot », et sur l'autre,
« Vive la République: » Des mâts auxquels
sont attachées des oriflammes tricolore.
sont dressés de chaque côté de la rue. Les
fenêtres de nombreuses maisons sont pa-
voisées et encadrées de guirlandes et de
branchettes de sapin. On remarque beau-
coup de drapeaux tricolores et, de temps
en temps, des drapeaux russes et lorrains.
Aux extrémités du pont qui traverse i'Or-
nain, deux arcs de triomphe sont érigés.
Sur l'un, on lit: * La Loge la Régénération
à Carnot » ; sur l'autre : « Le Comité répu-
blicain à Carnot ».
A l'entrée do la rue de la Rochelle, une
estrade a été dressée qu'occupent les da\8
mes invitées par la municipalité. ,
Mme Varin-Bernicr, femme du conseiller
général, offre au président un bouquet ;
Mme, Mercl"on, une bouteille de l'excellent
mais bientôt introuvable pineau, le vin de
la région; Mme Ch. Buzeiot, douze pots de
confiture de groseille, ia gloire de Bar,
renfermés dans un joli coffret.
M. Carnot remercie de cette heureuse et
originale idée.
Tout le long de la rue de la Rochelle
étaient tendues des bandes d'étuffes bleue,
blanche et rouge, qui la traversaient en
donnant l'effet d'un immense vélum tri-
colore. Cinq ou six portiques et arcs de
triomphe étaient dressés dan& les diffé-
rents quartiers de la ville. Nous signalons
la belle statue de la République, du sculp-
teur Thilmany,. et l'arc de triomphe de la
rue Entre-Deux-Ponts,. dont une des face
était ornéo d'attributs militaires et la tac,
opposée d'attributs industriels et agri-
coles. -
Une surprise qui a beaucoup touché M.
Carnot lui a été ménagée: Tous Les ouvriers
des usines de la ville et des environs, en
costume de travad,. après avoir figuré dans
le cortège, ont tenu à défiler d.tn-..nt lui,
bannière en tête et pacifiquement armés
de leurt' outils. Compassiers de Ligny, fon-
deurs de Dammarie et de Marhot, pape-
tiers de Jeandheurs, Msseurs cle Bar-le-
Duc, ouvriers de l'usure de blcu. brasseurs
des grandes maisons de la ville, ceux-ci
revêtus de costumes de brasseurs alsa-
ciens faits exprès en Alsace à cette inten-
tion, ont pris part à cette manifestation
dont l'effet a été très imposant.
Le cortège entre ensuite dans la rue du
Bourg et arrive à la préfecture, où sont
rangés des soldats du 9J40 ds ligue.
M. Brd, préfet de la Meuse, et Mme. Bret,.
née René Brice, reçoivent le président dans
le salon d'honneur de la préfecture.
Les réceptions vont commencer.
LES RÉCEPTIONS OFFICIELLES
C'est un peu toujours la même chose. Le
président du tribunal civil est introduit le
premier; puis se succèdent les sous-préfets
et les conseillers de préfecture, les meui*
bres du barreau, le conseil municipal pré-
senté par le maire :
Le conseil municipal en entier, dit-if, et la
grande majorité de mes concitoyens sont pro-
fondément attachés au gouvernement de la
République que vous représentez avec tant da
bonheur, et je puis ajouter que ia presque
unanimité d'entre eux professent à votre
égard et envers votre famille des sentiments
d'affectueux respect, de sympathie et d'estimo
particulièrement vivaces.
M. Carnot répond qu'il a été très ému
des manifestations sympathiques de la po-
pulation ouvrière.
Il félicite le conseil municipal et la
maire, qui en sont les organisateurs.
DÉCLARATION DE L'ÉVÊQUE
DE VERDUN
M. Pagis, évêque de Verdun, présenta
son clergé et fait la déclaration suivante :
Monsieur le président, j'ai l'honneur de vous
offrir mes témoignages profondément respec-
tueux et ceux de tout le clergé de mon dio-
cèse,et spécialement de mes prêtres de Bar-le-
Duc que je suis heureux de vous présenter.
Je n'ai pas hésité à quitter ma ville épisco-
pale, même en ce grand jour de fête, pour
vous saluer à votre passage et pour vous ex-
primer les sentimentsqui nous animent. Nous
sommes de bons Français, monsieur le prési-
dent, et nous aimons passionnément la France.
Nous honorons en vous le premier citoyen de
notre pays, investi de la magistrature suprê
me, qui a droit au respect et à la soumission
de tous. Nous acceptons franchemeut, loyale-
ment, sans arrière-pensée, la forme gouver-
nementale dont vous avez la garde, que notro
pays s'est librement donnée.
Sur ce point je vous prie de croire à ma sin-
cérité parfaite. Notre attitude, à mon avis mal
comprise, a donné lieu à des malentendus, à des
défiances, à des conflits qui ont provoqué des
rigueurs regrettables. Je le déplore et désire
de tout mon cœur que les désaccords dis-
paraissent et que l'union se fasse dans la
paix.
Un gouvernement est inébranlable quand il
peut compter sur toutes les forces vives à!X-
pays. J'estime que les forces catholiques sont
les premières par l'importance et par le nom-
bre. Nous vous les offrons, monsieur le pré-
sident, acceptez-les. Je me permets de vous le
dire, avec toute la liberté de mon patriotismo
et de ma foi. Si vous voulez nous aimer un
peu, nous témoigner un peu de confiance,
protéger nos libertés nécessaires, vous verrez
que nous sommes capables de vous aimer
beaucoup et de consacrer tout ce que nous
avons d'influence, d'intelligence et de cœur à
la prospérité, à la grandeur de la France.
Cette expression de nos sentiments prend
ici, en cette ville de Bar-le-Duc et ce pays de
Lorraine, un caractère exceptionnel de sin-
cérité patriotique.
Il me semble que nous aimons la France
davantage, nous à qui la France confie une
mission d'honneur, une mission sacrée, la
garde de la frontière.
Nous voulons la paix, monsieur le prési-
dent, comme la France la veut, comme vous
la voulez vous-même. Mais nous n'avons pas'
peur de la guerre. Je suis fier de vous le dire,
moi, évêque de Verdun, qui suis un peu sol-
dat depuis que je vis en contact quotidien
avec nos braves soldats, et si jamais l'heure
venait à sonner, l'heure df's suprêmes périls,
vous verriez l'évêque et ses prêtres se mêler
aux soldats et rivaliser de bravoure avec
eux.
Après la bataille, je veux dire après les VlC-:
tOJf. VOUS notre chef, PUISAGE vous êtes chef i
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