Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1892-05-01
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 01 mai 1892 01 mai 1892
Description : 1892/05/01 (A22,N7412). 1892/05/01 (A22,N7412).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/05/2013
Vingt-deuxième anné-e. OINQ C6IltilI165 -p-_t9-!__eJlC1 *■* ÇlWft Centimes DIMANCHE 1T CMAI 189â
LE XIX1 SIECLE
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LA LIBERTÉ
SUR LA SELLETTE
C'était à prévoir. Si la police a cru
faire du luxe en réduisant à un ser-
gent de'ville battant le quart dans la
rue la surveillance de la maison la
plus notoirement menacée de Paris ;
si un personnel déjà insuffisant gas-
pille le plus clair de son activité à des
surveillances réciproques au lieu d'a-
gir avec ensemble; si le conseiller
Gués a semblé pris d'éblouissement
devant son accusé et lui a témoigné
une déférence voisine de l'aplatisse-
ment; si la sébastine succède à la dy-
namite, c'est la faute à Voltaire.
Non, je voulais dire : C'est la faute
à la liberté de la presse ! Mais les
deux refrains se ressemblent tant et
ont servi à * usages qui ont tant
d'analogie.
il est un certain nombre ae citoyens
qui ne voient qu'une chose dans les
récentes catastrophes : c'est une oc-
casion propice d'en finir avec la li-
berté de la presse. L'attentat de Fies-
chi a bien fourni au gouvernement de
1830, qui ne l'a pas laissé échapper,
le prétexte des lois de Septembre. Le
régime du 3 Décembre, qui avait pris
dès ses débuts toutes ses précautions
pour éviter le contrôle d'une presse
libre, n'en tira pas moins bon parti
de la bombe d'Orsini et s'accorda les
commodités de la loi de sûreté géné-
rale. Est-ce que Ravachol ne pourrait
pas rendre un pareil service à des
personnes qui n'ont pas pu s'accoutu-
mer à vivre avec la liberté et qui
voient depuis plus de dix ans avec
chagrin la République mettre en pra-
tique des doctrines que les divers
gouvernements monarchiques ou dic-
tatoriaux n'avaient proclamées que
pour les mieux renier à la toute pre-
mière occasion?
On discerne aisément que c'est là le
courant d'esprit sénatorial. Depuis
que le Sénat a coopéré à la mise en
vigueur d'une législation libérale, une
bonne partie de son temps s'est passée
à s'en repentir.
On n'a pas perdu le souvenir de la
loi élaborée avec tant de persévérance
par M. Marcel Barthe, et si irrévéren-
cieusement mise en lambeaux par la
Chambre. A cette heure encore, l'ho-
norable sénateur n'a point changé de
préoccupations : il adressait récem-
ment une circulaire aux conseils gé-
néraux pour solliciter des vœux en
faveur d'une juridiction nouvelle qu'il
a imaginée. Sa démarche n'a pas eu,
semble-t-il, le succès qu'il en atten-
dait. Divers conseils ont estimé que
son objet ne rentrait pas dans le ca-
dre de leurs délibérations; un plus
grand nombre encore ont jugé inutile
de s'en occuper. -
Quand on lui parle de précautions
à prendre contre la presse, la majo-
rité du Sénat est toujours prête à to-
per, même sans examen, et elle en
oublie ce soin méticuleux que la haute
Assemblée se pique d'apporter dans
les affaires juridiques. C'est ainsi
qu'elle a adopté, il y a deux ans, une
proposition de loi destinée à simplifier
la procédure en matière de presse. Elle
était due à l'initiative d'un juriscon-
sulte de mérite, feu Lisbonne. Auteur,
il fut nommé rapporteur, et le projet
fut voté en double délibération, mais
non discuté. Quand la commission1
nommée par la Chambre en fit la lec-
ture, il n'y eut qu'un cri : il ne se
composait que de deux articles abso-
lument inconciliables.
M. le président du conseil, qui est
tout imprégné encore de l'atmosphère
du Luxembourg, voulant rassurer, par
l'entremise du Figaro, la population
parisienne sur les exploits des anar-
chistes, a surtout gémi sur « l'extrême
licence de la parole et de la plume. »
Un journaliste, qui appartient aussi
au Sénat, après avoir constaté la dé-
fectueuse organisation de la police,
conclut en propres termes que « la
première origine du mal est la funeste
loi de 1881 sur la presse m,qu'il appelle
« une loi de privilège pour les journa-
listes et les orateurs. »
Puisqu'on croit le moment favora-
ble pour renouveler ces appels à la
réaction, c'est une raison de plus pour
ne pas les laisser passer sans les ré-
futer une fois encore.
- Il est hors de doute que la police, et
même la justice, ont eu des périodes
de singulière complaisance pour de
véritables excès. Mais convient-il d'en
accuser la loi qu'on a cru devoir, à
tort ou à raison, laisser sommeiller ?
Est-ce que, par hasard, la loi de 1881
autoriserait la provocation au crime,
la provocation de l'armée à la déso-
béissance, ou d'autres démonstrations
dont on s'ingénie à lui faire porter la
responsabilité ? Point du tout : ce sont
des délits qu'elle prévoit et punit, au
contraire.
Quant au prétendu privilège, il con-
sisterait en ceci : que les délits de la
presse et de la parole sont déférés au
jury. C'est une garantie qui a été re-
vendiquée comme essentielle par tous
"les libéraux sous tous les régimes. On
veut représenter cela comme un pri-
vilège professionnel aççàrrlé à une
catégorie de citoyens, aux journa-
listes et même aux orateurs envisagés
comme une corporation. Mais la li-
berté de parler et d'écrire est une ga-
rantie commune à tous. On s'est plu à
répéter un mot de dilettante plus ou
moins authentique. Lors de la créa-
tion du régime de l'autorisation préa-
lable et des avertissements, un habile
écrivain aurait dit : « C'est mainte-
nant qu'on va voir ceux qui ont du
talent. » Est-ce qu'il n'y aurait pas
quelque égard à avoir pour les. droits
de ceux qui n'ont pas de talent — ou
qui n'ont pas celui d'estomper leur
pensée? H.
On veut raisonner comme si l'im-
primerie n'était pas inventée, et l'on
invoque le droit commun. Cela me
rappelle un détail que donnait M. De-
cauville sur son petit chemin de fer de
l'Exposition. Il ne rentrait pas dans
les conditions des grandes voies fer-
rées et n'était prévu d'aucune façon
par les règlements. La préfecture s'en
tira en délivrant aux mécaniciens des
licences de cochers d'omnibus par les-
quelles il leur était enjoint de mettre
leurs bêtes hors d'état de mordre et de
ne pas les laisser brouter les feuilles
ou les pousses des arbres.
Le voilà dans toute sa beauté, le
droit commun !
Gustave Isambert.
Le XIXe SIÈCLE publiera demain la
a Chronique v, par M. Paul Giniaty.
LA RAFLE DE CE MATIN
A la suite d'une entrevue qui a eu lieu
hier, jusqu'à une heure fort avancée de la
soirée, à la préfecture de police, entre M.
Lozé et le chef du parquet, une vingtaine
de mandats d'arrêt à mettre à exécu-
tion contre des anarchistes habitant Paris
et la banlieue ont été remis à différents
commissaires de police.
Les arrestations auront lieu ce matin.
RAVACHOL
C'est lundi, à moins d'un contre-ordre,
que Ravachol partira pour Montbrison. Il
sera accompagné, ainsi que nous l'avons
dit, de gendarmes et d'agents de la sûreté.
Il voyagera dans un compartiment de
2° classe, et non dans un compartiment
cellulaire.
Simon ne partira que lundi pour la pri-
son de la Santé.
LE MOT D'ORDRE ANARCHISTE
Londres, 29 avril.
Il n'est pas exact, ainsi que le bruit en a
couru, qu'on ait découvert ici les preuves
d'un vaste complot anarchiste dont les ra-
mifications s'étendraient dans les différents
Etats du continent.
Les rapports de police établissent toute-
fois que le mot d'ordre qu'attendent plu-
sieurs groupes d'anarchistes du continent
doit pour la journée du 1er mai partir d'An-
gleterre. Les gouvernements intéressés en
ont aussitôt été avisés.
UN aui EST BIEN GARDÉ
Bruxelles, 29 avril.
La cour d'assises du Brabant a eu à juger
aujourd'hui Guillaume Brecke,qui était in-
culpé de provocation au crime, pour di-
vers articles parus en décembre dernier
dans le journal anarchiste le Conscrit.
Mais pendant la délibération, le prévenu,
qui s'était retiré dans la salle des Pas-Per-
dus, a pris la fuite.
La cour l'a condamné à sept mois de
prison et 50 francs d'amende.
Un mandat d'arrêt a été lancé contre lui.
—Il—«Il -
AU LANDTAG PRUSSIEN
Berlin, 29 avril.
La Chambre des députés a discuté encore
aujourd'hui le budget supplémentaire de-
mandé par le président du conseil.
Le gouvernement a été successivement
attaqué par M. Ennecerus, national-libéral,
qui a déclaré qu'il considérait la combinai-
son ministérielle actuelle comme un pro-
visoire, et par M. Lieber, membre du cen-
tre, pour qui l'abandon de la loi scolaire
n'est rien moins que la défaite du chris-
tianisme.
« L'école sans confession, établie sur le
type français, a-t-il ajouté, favorise,comi-iie
le dit la Revue des Deux-Mondes, le socia-
lisme révolutionnaire. »
M. Lieber a ensuite reproché à M. de Ca-
privi de ne s'être pas préoccupé des senti-
ments de la majorité, et, s'adressant à M.
d'Eulenbourg:
« Ce n'est pas vous, président du con-
seil, dit-il, que nous avons blâmé, ce sont
vos déclarations affectant d'ignorer les par-
tis ayant soutenu la loi scolaire.
M. d'Eulenbourg a aussitôt relevé cette
accusation. ---
11 n'a pas la prétention a-avoir aeja con-
quis la confiance de la Chambre, mais il a
le droit de ne pas être soupçonné gratuite-
ment de vouloir détruire les bases reli-
gieuses de l'école. Il comprend les regrets
de la majorité et croit qu'il aurait peut-
être mieux valu de ne pas interrompre
brusquement la délibération sur la loi
scolaire.
En définitive, la Chambre des députés a
renvoyé le projet de budget supplémen-
taire à la commission du budget.
LES TROUBLES DU VÉNÉZUELA
New-York, 29 avril.
Le Herald, annonce que le président Palacio
a acheié une grande quantité de fusils et de
munitions à Trinidad.
Ceci confirmerait le bruit que le président
Palacio se serait assuré l'appui de l'Angle-
terre, grâce à la cession du territoire en li-
tige situé entre le Venezuela et la Guyane an-
glaise.
Le général Crespo a fait prisonnier le gêné-
rsl Casanas, général en chef du président Pa-
lacio.
BBW—IMB—BB——BBBB
M. TURINAZ SANS TRAITEMENT
Nancy, 99, avril. — M. Turinaz, évêque de
Nancy, vient de recevoir une lettre du minis-
tre des cultes lui notifiant la suppression de
son trai.teiuçaf*
LA DYNAMITE
-
LES BLESSURES INÉDITES
La chimie moderne. — La catastrophe
de Beaumont et l'homme sans tête.
Vingt kilos de dynamite et
trois millions de mètres
cubes d'air.
Tout n'est qu'heur et malheur. Le pro-
grès industriel, qui ne compte plus, d'ores
et déjà, ni ses bienfaits ni ses merveilles, a
aussi, en revanche, son tragique déchet de
surprises, de deuils, de catastrophes et de
douleurs— les épines de la rose. C'est à ce
point que les pessimistes auraient presque
le droit de se demander si ce n'est pas à la
chirurgie que tels des plus étonnants mi-
racles de la science ont le plus profité, en
lui assurant, avec l'occasion inattendue
d'élargir ses sanglants horizons, de la be-
sogne et du pain sur la planche.
Le fait est que — pour me borner à qua-
tre progrès seulement — les chemins de
fer, la dynamite, le fusil Lebel et l'électri-
cité ont enfanté toute une pathologie nou-
velle.
Certaines blessures inédites, certains
shochs-cérébraux ou médullaires — in-
soupçonnés paraissent spéciaux aux acci-
dents de chemins de fer, aux collisions,dé-
raillements et "télescopages". Il a même
fallu, au moins en Amérique (où ce genre
de catastrophes est plus fréquent que par-
tout ailleurs), créer exprès un vocable tout
neuf, railway-spine, ce qui peut à peu près
se traduire par cette périphrase : « Para-
lysie de l'appareil cérébro-spinal provo-
quée par un accident de chemin de fer ».
C'est la forme ordinaire — avec sa genèse
sui generis --de l'hystérie masculine.
Aux fusils Lebel et aux autres armes ana-
logues à longue portée, tir rapide et tra-
jectoire rasante, dont les balles cylindro-
ogivales, chemisées de melchiorou d'acier,
vous traversent très bien cinq ou six hom-
mes à la file, nous devons les perforations
hélicoïdales, à la section nette et franche,
découpée comme à remporte-pièce dans
l'épaisseur pantelante desmuscles et des
os. Toute une classe de traumatismes sans
précédents, auxquels a dû s'adapter la thé-
rapeutique ab impromptu des champs de
bataille.
Quant aux innombrables acèidents cau-
sés par l'électricité et autour desquels les
marchands de fluide organisent avec tant
de soin la conspiration du silence, on les
constate, mais on ne les juge plus. Per-
sonne n'y entend plus rien, et il semble1
que, de ce chef, toute la science physiolo-
gique et médicale est à refaire, intégra-
lement.
La dynamite et ses effets
Reste la dynamite, la sinistre reine du
jour, dont les mystérieux effets sont encore
plus terribles, plus complexes et plus ex-
traordinaires.
Assurément, de toutes les nouveautés in-
criminées, c'est encore la dynamite qui
compte à son passif le moins de dévastations
et le moins de victimes. Le fusil Lebela déjà
« fait merveille" au Dahomey sur cibles
noires, et sur cibles blanches à Fourmies.
Chaque semaine, l'électricité vous fauche,
tant en Amérique qu'en Europe, sa bonne
petite demi-douzaine, au bas mot, de mar-
tyrs innocents, tôt oubliés, si tant est même
qu'ils soient seulement connus en dehors
de l'étroit cercle familial.
Il faudrait, enfin, beaucoup de Ravachol,
"travaillant" systématiquement et de con-
cert, pour abattre autant de quilles humai-
nes qu'il s'en est cassé, en une minute,
l'été dernier, à Mœnchenstein ou à Saint-
Mandé. Mais la dynamite est d'actualité.
Elle vous a, d'ailleurs, des allures drama-
tiques et une terrifiante mise en scène qui
l'imposent, comme une manière de Croque-
mitaine incompréhensible et tout-puissant,
aux préoccupations de la foule.
Il faut bien dire que ses singuliers et for-
midables effets, qui n'ont de comparables
que les effets, non moins formidables et
non moins singuliers, des autres" casse-
toutites » inconnues de nos pères, aux-
quelles se complaît la chimie moderniste,
sont vraiment de nature à ensemencer l'é-
pouvante et l'horreur.
Mystérieux ravages
Oncques, de mémoire de « panseur », on
n'avait vu de ravages semblables aux rava-
ges qu'elle détermine, de plaies semblables
aux plaies qu'elle engendre.
Je ne saurais mieux faire ici que de lais-
ser la parole au plus intime de mes amis,
Emile Gautier, qui a justement traité la
question ex professo dans un livre au-
quel Raoul Lucet a, je ne saurais vous le
cacher plus longtemps, collaboré dans les
grandes largeurs :
« Ce sont des cadavres entièrement dé-
pouillés de leurs vêtements ou savamment
écorchés, de la nuque aux talons, comme
s'ils avaient passé par les mains du plus
habile des préparateurs de pièces anato-
miques; ce sont des membres presque
aussi nettement amputés que par le fil d'un
rasoir, mis littéralement en marmelade, ou
projetés, à l'état piteux de fumier ou de
charbon, à des centaines de mètres ; ce
sont des squelettes entiers volatilisés, au
sein d'un informe magma de chairs pilées ;
ce sont de petites égratignures, insigni-
fiantes en apparence, qui se traduisant en
dedans par d'incommensurables désor-
dres, hors de toute proportion avec l'é-
troite porte d'entrée ouverte dans la peau ;
ce sont des viscères entiers arrachés des
cavités du corps sans laisser de traces, sans
qu'il soit seulement possible de reconnaî-
tre par où ils ont bien pu s'en aller. avec
la vie ; c'est, comme le fait s'est produit,
le 23 septembre 1877, à Oubatché (Nouvelle-
Calédonie), un ongle de la main droite qui
va s'enforcer dans l'une des vertèbres de
l'épine dorsale, après avoir traversé toute
la largeur de la cage thoracique ; ce sont
des paralysies subites, de terribles com-
motions intérieures, parfois sans la moin-
dre lésion visible. C'est le bouleversement
sans nom, le chaos, l'effondrement organi-
que. » (Les Etapes de la science, p. 3A3).
Décollation suprême
Une fois dans ma vie, pendant l'année
terrible, il m'est arrivé de jouer un rôle
(passif) dans une explosion de ce genre,
non pas précisément de dynamite, mais de
fulminate de mercure — ce qui est tout
comme, puisque les effets sont sensible-
ment les mêmes. La capsulerie de Beau-
mont, derrière la gare de Hennes, là où
s'est bâtie depuis la prison centrale des
femmes, venait de sauter, pour une raison
demeurée inconnue. Passant par là avec
un mien camarade, M. Edouard Danion,
qui commande aujourd'hui le bataillon
d'artillerie , de forteresse à La Rochelle,
nous arrivâmes — nécessairement - le3
premiers sur le lieu du sinistre.
A peine avions-nous franchi le mur d'en-
ceinte, au milieu de la panique provoquée
.bar la crainte assez justifiée d'explosions
nouvelles, nous nous heurtons à un cada-
vre, presque complètement nu, le visage
blanc, mais sans lésions apparentes. Je
l'empoigne par les cheveux, tandis que
Danion soulève les jambes. Horreur! la tête
me reste dans les mains. La secousse in-
térieure — le coup de vent — avait rompu
le cou sans déchirer la peau, et c'était le
brusque effort de traction exercé par mes
bras qui avait, en étirant le frêle tissu, pa-
rachevé la décollation suprême. Quand
j'y songe, après vingt-deux ans, j'en ai çn-
core la chair de poule!
Voilà pourtant comment opèrent les ex-
plosifs « fin de siècle », et les blessures des
malheureuses victimes du boulevard Ma-
genta sont du même tonneau.
Le souffle de la mort
C'est que la dynamite — qui en est le
type — n'agit pas tant par la mitraille, pro-
jectiles a priori ou débris a posteriori,
qu'elle lance, que par le souffle des gaz
qu'elle déchaîne et les prodigieuses tempé-
ratures qu'elle développe instantanément.
Les anciennes poudres renfermaient un
métal, le potassium du salpêtre, dont la
combustion, toujours incomplète, donnait
avec le soufre et le charbon, des carbona-
tes, des sulfites et des sulfates de potasse,
tous sels qui, même à très haute tempéra-
ture, demeuraient à l'état solide, ainsi que
l'attestaient les fumées et les suies encras-
santes qui survivaient à l'explosion. Tout
au contraire, la plupart des nouveaux ex-
plosifs ne laissent, après combustion inté-
grale, que des résidus gazeux. Il s'ensuit
que l'augmentation de volume subie par
l'explosif, la chaleur dégagée et la rapidité
avec laquelle s'effectue cette expansion,
sont autrement considérables qu'avec les
méchantes poudres de perlimpinpin d'au-
trefois. :
C'est ainsi que vingt kilogrammes de
dynamite amènent instantanément le dé-
placement de trois millions de mètres cubes
d'air l Rien, évidemment, ne saurait résis-
ter à une pareille rafale, dont la répercus-
sion se peut faire sentir à longue distance,
et pulvérise tout ce qui barre peu ou prou
le passage.
C'est par la nature élastique et fluide du
choc que s'expliquent les capricieuses ir-
régularités des explosions, ces gens sou-
levés en l'air, ces meubles volatilisés, ces
couteaux plantés dans les murs, ces cada-
vres déshabillés par l'insufflation, entre
l'étoffe et la chair, de l'ouragan des gaz,
ces désordres internes et intimes qu'au-
cune « boutonnière" ne révèle, etc.
Ajoutez que la déflagration d'une livre
de fulminate de mercure, par exemple,
suffit pour élever instantanément de )
(deux mille cinq cents degrés!) la tempéra-
ture d'une chambre close. Et cependant la
chose va si vite, que tout se borne, en gé-
néral, à des effets mécaniques, et que les
brûlures directes sont rares, à moins que
l'explosion n'ait allumé, çà et là, au vol,
quelques objets très inflammables.
Jamais, en résumé, l'on n'avait constaté,
dans l'histoire des misères humaines, si
riche pourtant en atrocités monstrueuses
et lamentables, d'aussi fantastique, d'aussi
hideux résultats. Hippocrate y perdrait son
grec et Ambroise Paré son latin. Mais leurs
émules et sucèesseurs commencent à s'y
faire. Au siècle prochain, lorsque la dyna-
mite (qui n'aura peut-être pas encore
achevé de résoudre la question sociale et
d'inaugurer le règne de la justice) sera de-
venue aussi banale que la fièvre typhoïde
et l'influenza, la pathologie classique
comptera tout bonnement un chapitre de
plus.
Voilà le progrès 1
Raoul Lucet.
CHRONIQUE
Je viens de lire le manifeste qu'a fait
afficher hier la Ligue populaire d'étlldes,
de propagande et d'action, et qu'ont re-
produit quelques journaux. Ce manifeste
était adressé à l'armée.
A Dieu ne plaise que j'en remette sous
vos yeux l'abominable texte. Les énergu-
mènes de la Ligue rappellent à nos sol-
dats « qu'ils sont soumis aux plus rigou-
reux traitements, aux plus humiliantes
vexations. — Blessés dans votre dignité
d'hommes, disent-ils, meurtris dans votre
fierté de citoyens, dépouillés de tout
droit, de toute indépendance d'esprit, de
tout libre arbitre, vous êtes considérés
par vos chefs comme de simples machines
à obéir, comme de vraies bêtes de somme.
Chair à bâton aujourd'hui, chair à canon
demain : voilà votre lot! »
Je ne comprends rien à ces fureurs.
L'armée est précisément, de toutes les ins-
titutions sociales, celle où l'on a réalisé,
autant que la chose est possible en ce
monde, le rêve de l'égalité parfaite, rêve
cher aux utopistes de l'anarchie. Je veux
bien admettre que la vie soit dure au ré-
giment; mais elle l'est également pour
tout le monde. Il n'y a à la caserne au-
cune distinction de classes. Le fils du
bourgeois qui porte la casaque du soldat
est traité sur le même pied que le fils de
l'ouvrier et du paysan; on n'a égard ni à
ses mains blanches ni à ses études ; il faut
qu'il fasse les exercices et les corvées
comme les camarades; il est puni com-
me eux, et quelquefois même plus
qu'eux. Car ce n'est un secret pour
personne que les sous-officiers se plai-
sent souvent à taquiner un fils de fa-
mille, à se venger de sa supériorité in-
tellectuelle et morale, en lui infligeant
dans le service des vexations ou des hu-
miliations qu'ils épargnent plus volon-
tiers à un pauvre diable.
Cette vie est-elle aussi cruelle que le
disent messieurs les anarchistes? Ils se ser-
vent de ce terme : « chair à bâton j), pour
désigner nos soldats. Ils seront bien for-
cés, si on les presse, de reconnaître que
c'est là une simple métaphore. On se
sert, en effet, du bâton dans l'armée al-
lemande ; mais il y a longtemps que ces
vilains procédés sont proscrits de la nô-
tre. Jamais un soldat n'est, ce qu'on ap-
pelle, battu. Il regarderait un coup de
bâton ou un coup de canne comme la
dernière des dégradations.
Les Romains avaient imaginé un truc
admirable pour frapper les soldats déso-
béissants sans les déshonorer. Ils avaient
mis aux mains de leurs centurions un
sarment de vigne et ils avaient décrété
qu'un coup de sarment donné par un su-
périeur ne portait pas atteinte à la con-
sidération du légionnaire. Ne vous éton-
nez pas de Ja facilité avec laauelle ce
préjugé avait été admis. Chez nous, un
soldat condamné à mort pour fait de
rébellion contre ses chefs se console en
pensant qu'il sera fusillé; il lui serait
insupportable de penser qu'il pourrait
monter à la guillotine. Et cependant,
douze balles dans la tête ou la même tête
tranchée sur un billot, le résultat est le
même : c'est absolument kif-kif, comme
disent nos tirailleurs algériens. Non, ce
n'est pas si kif-kif que cela, puisque, de
ces deux supplices, l'un est accepté avec
résignation et orgueil, et que l'autre sou-
lève le cœur d'indignation et d'hor-
reur. -
Nous n'avons pas trouvé en France
l'équivalent du sarment de vigne des cen-
turions romains. Nous avons proscrit
purement et simplement les coups de la
discipline courante. Chair à bâton n'est
donc pas juste. Ce qui est vrai encore
aujourd'hui, c'est qu'en effet on mal-
traite souvent les soldats de paroles gros-
sières. Mais j'en reviens là: ces gros mots
tombent sur le jeune bourgeois comme
sur l'ouvrier ou le paysan ; et l'on m'ac-
cordera bien que celui qui doit le plus
en souffrir, c'est justement le premier,
qui n'a pas l'usage de ce vocabulaire et
pour qui ces mots n'ont rien perdu de
leur signification et de leur violence. Un
jeune homme bien élevé peut tressaillir
de colère quand un sous-officier malap-
pris le traite de fichue bête ou d'andouille.
Il n'est pas familier avec ces épithètes.
Elles sont fort indifférentes à tel autre
dont l'oreille a été, depuis son enfance,
faite à ces. aménités.
Si quelqu'un avait à réclamer contre
le régime et les habitudes de la caserne,
ce serait plutôt le jeune homme de bonne
famille bourgeoise, qui tombe tout à
coup dans un milieu dont il n'a aucune
idée et qui lui est souvent très pénible.
Nous voyons cependant qu'en général il
ne se plaint pas. Il prend gaillardement
son parti des nécessités qu'il est obligé
de subir. Il sait que l'obéissance passive
est la première de toutes les exigences
dans le service militaire. Il s'y résigne,
se disant à part lui que cela ne peut être
autrement. Il accepte de même les autres
ennuis d'un état par lequel tous les Fran-
çais doivent passer aujourd'hui, sans
exception. Il ne récrimine pas. A quoi
bon?
C'est La Bruyère qui a dit : Si la mort
faisait des exceptions parmi les hommes,
quelle tristesse et quel désespoir chez
ceux qu'elle emporterait, laissant vivre
les autres ! Je cite de travers, citant de
mémoire. Mais c'est l'idée. Elle est fort
juste. Il en va de même pour le service
militaire : ce qui en atténue l'ennui,
c'est qu'il pèse indistinctement sur tou-
tes les têtes. Du moment que personne ne
peut se soustraire à cette fatalité inéluc-
table, tous l'acceptent de meilleur cœur
et la révolte n'est permise à personne.
Il n'y a pas moyen de faire autrement;
c'est la grande raison, cela! Ces mes-
sieurs de l'anarchie ont beau jeu à dire :
chair à canon! chair à canon! Ne croi-
rait-on pas que le gouvernement envoie
pour son plaisir les enfants de la France
à la bataille et à la mort? Il y a, sans au-
cun doute,des guerres impies,des guerres
abominables. Ce ne sont pas générale-
ment les démocraties qui les déclarent.
Elles aiment d'instinct la paix, et tout le
monde est persuadé que si nous avons
jamais la guerre, ce sera malgré nous, et
après avoir épuisé tous les moyens de
conciliation compatibles avec l'honneur.
Mais enfin, supposez que nous soyons
attaqués.
Car ces messieurs de la Ligue parlent
toujours comme si nous étions seuls dans
le monde; comme si nous pouvions, à
notre fantaisie, déchaîner la guerre ou
conserver la paix. Ils n'ignorent pour-
tant pas qu'il en est des nations comme
des individus. L'homme le plus inoffen-
sif et le plus calme peut se heurter à
un malotru qui le force à dégainer. S'il-
n'est pas armé et qu'il ne soit pas le plus
robuste, le plus agile et le plus adroit, il
sera roulé; la chose est claire. Il faut
donc que,pour sa sécurité personnelle, il
se tienne prêt à toute éventualité.
Les peuples, surtout les grands peu-
ples, sont obligés aux mêmes précau-
tions. Ils faut qu'ils aient une armée pour
les défendre, et il faut que cette armée,
ce soit la jeunesse du pays tout entier.
Ce sera, le cas échéant, de la chair à ca-
non ; mais exactement, comme lorsqu'un
homme est réduit à se battre, on peut
dire de lui qu'il est de la chair à coups
de poing ou à coups d'épée.
Ce sont là de vaines et creuses décla-
mations. Mais ceux qui les rédigent et
ceux qui les impriment sont bien coupa-
bles ; et de quelque respect que je sois
animé pour la liberté de la presse, je ne
serais pas fâché de voir déférer au jury
ces factums où l'on prêche à nos soldats
la désobéissance à leurs chefs et le dé-
dain de la patrie.
Il y a des choses qu'il vaut mieux ne
pas laisser dire.
Francisque Sarcey.
UNE AMUSANTE MÉPRISE
Un monsieur correctement vêtu de noir,
une serviette d'avocat sous le bras, entrait
avant-hier, vers midi, au 127 du boulevard
Meslesherbes et s'engageait rapidement
dans le grand escalier sans parler à la con-
cierge.
Cette dernière, une dame Galema, qui a
pour locataire M. Boutet, le juge d'instruc-
tion bien connu, redoute fortement les
anarchistes ; elle crut que le visiteur si
pressé en était un qui allait dynamiter le
magistrat habitant sous le toit confié à sa
garde et, prise d'une peur folle, elle appela
deux gardiens de la paix stationnant de-
vant le n° 131. Ils accoururent, grimpèrent
derrière le monsieur à la serviette, l'arrê-
tèrent et, à leur grande stupéfaction, ap-
prirent de la boucha même du visiteur,
très égayé par l'aventure, qu'il n'était au-
tre que M. Bulot, substitut du procureur
général, le même qui faillit devenir la vic-
time de Ravachol.
- Mme Galema s'est confondue en excuses
et M. Bulot lui a pardonné sa méprise en
riaht de bon cœur,
LE SALON
DES CHAMPS-ÉLYSÉES
Ce Salon ne comptera certes pas parmi
les meilleurs, nles bons. Il ne renferme
aucune grande page de jeunes artistes as-
sez personnels, assçz sincères, en tout cay*
pour qu'on prenne Intérêt à le urs essais, a
leurs efforts.
Les « Maîtres" se reposent ou se réser-
vent, sauf MM. Detaille et Benjamin Cons-
tant. L'absence de pensée se laisse cruelle-
ment apercevoir dans la plupart des en-
vois d'artistes, même de ceux qui ont des
qualités appréciables de métier. Le fait
divers, l'anecdote sévissent. Les beaux:
paysages, jadis trop nombreux, s'espacent
sur la cimaise, et n'est-ce pas là un signa
grave du malaise de notre école de pein-
ture ?
Les étrangers enfin continuent à exposer
de bonnes toiles dans une proportion qui
commence à devenir inquiétante. Le Salon
n'est pas ennuyeux à cause de sa variété, à
cause d'un certain nombre de toiles agréa-
bles (bien qu'en somme insignifiantes). Il
n'est pas ennuyeux : il est seulement mé-
diocre. Un philosophe indifférent aux usa-
ges mondains dirait qu'il est inutile.
En le parcourant, nous justifierons ces
considérations générales qui sont, je crois,
non moins justes qu'elles sont brèves. Et
nous commencerons cette promenade cri-
tique en montant d'abord, comme il con-
vient, au « Salon d'honneur » par le grande
escalier. Sur le palier, notre attention sera
certainement attirée par le vaste plafon
de M. AIME MOROT, les Danses françaises
àtravers les âges,plilond destiné à l'Hôtel de
Ville. Trois couples de danseurs empruntée
aux siècles derniers et au commencement de
celui-ci, une échappée sur un salon mo-
derne, deux Amours dans un coin, c'est
tout. Cela suffirait d'ailleurs, si l'exécution
avait dans la couleur plus de gaieté et de
grâce. A quoi bon traiter des sujets de fan."
taisie avec tant de sagesse ?
Sur ce palier est une jolie peinture dé-
corative, de M. REYNOL DE STEPHENS :
des femmes couchées,pareilles à des Muses,
qu'entourent des roses en guirlande. Cela
rappelle M. Alma Tadéma.
LE GRAND SALON
Entrons dans le Grand Salon ; l'aspect eu
est fort peu imposant.
En face, M. BENJAMIN CONSTANT y
triomphe sans rival. Son plafond, Paris-.
conviant le monde à ses fêtes, destiné à la-
salle des fêtes de l'Hôtel de Ville, ressemble
à une gigantesque affiche pour laquelle M.
Besnard aurait collaboré avec M. Chéret.
La Ville de Paris se détache sur l'azur, et,
en avant, des figures aux multicolores dra-
peries sonnent dans des trompettes. Beau-i
coup de nuages bleus, roses et lourds. Eir
bas, Paris et des feux d'artifice. Ce plafond1
où le coloris est un badigeon inspiré, oit
le dessin est d'une fougue au demeurant
assez académique, où les difficultés sont
esquivées à la faveur des nuages, est toute-,
fois curieux et marque chez l'artiste un désir
louable de varier sa manière. On ne pourra
le juger qu'une fois mis en place, à la lu-
mière électrique. Tel qu'il apparaît aux
Champs-Elysées, c'est du Véronèse ultra-
démocratique.
Suivons maintenant la cimaise de gaucho
à droite, selon l'ordre que nous observe-
rons jusqu'à la fin pour la peinture.
M. VAN AKEN : Misère humaine. Une ma-
lade couchée dans un taudis. Le sujet prêta
à l'anecdote larmoyante. Le peintre l'a
traité d'une touche énergique jusqu'à la
rudesse, mais avec un sentiment assez dé-
licat.
M. BRUNIN : Une lame recommandée.
Autre peintre anversois. Pastiche soigné
d'art flamand. Tableau amusant par son
archaïsme de musée.
M. AUGUIN : le Soleil dissipant la brume.
Petite toile claire et d'accent juste d'un des
plus estimables élèves de Corot, qui aurait
allumé de bon cœur sa pipe dans ce
paysage.
M. ROUSSEL : le Corps de Marceau rendu
à l'armée française, a l'armée française
« éplorée », dit le livret. Vaste machine as-
sez banale.
M. CHIGOT: Echouage par un gros temps.
Vingt-cinq mètres de toile pour ne rien
dire. Les pêcheurs qui tirent la barque au
rivage sont des figurants sans conscience.
C'est peint à la grosse et méthodiquement.
Traversant le Grand Salon, commençons
la visite des salles par la
SALLE XVII
En allant de gauche à droite, nous trou-
vons d'abord avec ennui :
M. WENKER qui, sous le titre de Basilissa,
expose une figure de reine d'Orient d'un
coloris à la fois douceâtre et criard. M.
Wenker a fait plus heureusement un petit
portrait de femme, sobre et fin.
M. SEYMOUR-THOMAS : Une religieusa
ambulancière blessée expire dans les bras
d'une de ses sœurs, taudis que se désola
avec sang-froid un brave capitaine. Pein-
ture patriotique méritoire de la part d'un
artiste américain.
M. J.-A. BAIL : La Fontaine, toile d'una
exécution solide et d'un effet chardinesque.
Un envoi de peintre, chose à signaler.
M. VAYSON : Le même paysage que d'or-
dinaire : moutons, bergère, ciel de la Pro-
vence, mais agrandi démesurément et, par
suite, d'un moindre caractère.
M. BENJAMIN CONSTANT : Un portrait da
chasseur. Très bonne coupe.
M. THEVENOT : Une femme en rose dans
un jardin. Pochade un peu pesante pour
un sujet si léger.
M. SMITH-LEWIS : Grande toile d'aspect
assez malpropre représentant la Coupe dxc
goémon, à Saint-Jllalo. Les chevaux sont
et une anatomie vivante.
PELOUSE : Matinée d'aotit. Un des der-4
niers paysages du maître regretté. Les
terrains se tiennent et les cîmes lointaines
fuient. Belle toile d'une robuste finesse.
SALLE XV
M. ZWILLER : Les Gros Bonnets du vil-
lage, sujet usé, mais que le peintre a ra-
jeuni en le traitant sans malice caricat\l"'l'
raie dan.3 une note claire.
M. VEBER: Suzanne ahuitans. Un e char-
mante tête de profil, très florentine, d'un.
contour net et gracieux, à la Piéro déliai
Francesca. *
M. DE VUILLEFROY : Une Posada, da
toutes les couleurs, un peu plus espagnole
que nature.
M. Y VON : portrait de M. Kellner.
Ne bougeons plus !
M. VERDIER : Les Echos, grande pago 4é':
corative pleine de fadeur. -
- SALLE XIII ,
M. LINA BILL : Une vue d'Agde, lematiQ1
L'eau est clairç, le ciel transoareat; iah;)
LE XIX1 SIECLE
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LA LIBERTÉ
SUR LA SELLETTE
C'était à prévoir. Si la police a cru
faire du luxe en réduisant à un ser-
gent de'ville battant le quart dans la
rue la surveillance de la maison la
plus notoirement menacée de Paris ;
si un personnel déjà insuffisant gas-
pille le plus clair de son activité à des
surveillances réciproques au lieu d'a-
gir avec ensemble; si le conseiller
Gués a semblé pris d'éblouissement
devant son accusé et lui a témoigné
une déférence voisine de l'aplatisse-
ment; si la sébastine succède à la dy-
namite, c'est la faute à Voltaire.
Non, je voulais dire : C'est la faute
à la liberté de la presse ! Mais les
deux refrains se ressemblent tant et
ont servi à * usages qui ont tant
d'analogie.
il est un certain nombre ae citoyens
qui ne voient qu'une chose dans les
récentes catastrophes : c'est une oc-
casion propice d'en finir avec la li-
berté de la presse. L'attentat de Fies-
chi a bien fourni au gouvernement de
1830, qui ne l'a pas laissé échapper,
le prétexte des lois de Septembre. Le
régime du 3 Décembre, qui avait pris
dès ses débuts toutes ses précautions
pour éviter le contrôle d'une presse
libre, n'en tira pas moins bon parti
de la bombe d'Orsini et s'accorda les
commodités de la loi de sûreté géné-
rale. Est-ce que Ravachol ne pourrait
pas rendre un pareil service à des
personnes qui n'ont pas pu s'accoutu-
mer à vivre avec la liberté et qui
voient depuis plus de dix ans avec
chagrin la République mettre en pra-
tique des doctrines que les divers
gouvernements monarchiques ou dic-
tatoriaux n'avaient proclamées que
pour les mieux renier à la toute pre-
mière occasion?
On discerne aisément que c'est là le
courant d'esprit sénatorial. Depuis
que le Sénat a coopéré à la mise en
vigueur d'une législation libérale, une
bonne partie de son temps s'est passée
à s'en repentir.
On n'a pas perdu le souvenir de la
loi élaborée avec tant de persévérance
par M. Marcel Barthe, et si irrévéren-
cieusement mise en lambeaux par la
Chambre. A cette heure encore, l'ho-
norable sénateur n'a point changé de
préoccupations : il adressait récem-
ment une circulaire aux conseils gé-
néraux pour solliciter des vœux en
faveur d'une juridiction nouvelle qu'il
a imaginée. Sa démarche n'a pas eu,
semble-t-il, le succès qu'il en atten-
dait. Divers conseils ont estimé que
son objet ne rentrait pas dans le ca-
dre de leurs délibérations; un plus
grand nombre encore ont jugé inutile
de s'en occuper. -
Quand on lui parle de précautions
à prendre contre la presse, la majo-
rité du Sénat est toujours prête à to-
per, même sans examen, et elle en
oublie ce soin méticuleux que la haute
Assemblée se pique d'apporter dans
les affaires juridiques. C'est ainsi
qu'elle a adopté, il y a deux ans, une
proposition de loi destinée à simplifier
la procédure en matière de presse. Elle
était due à l'initiative d'un juriscon-
sulte de mérite, feu Lisbonne. Auteur,
il fut nommé rapporteur, et le projet
fut voté en double délibération, mais
non discuté. Quand la commission1
nommée par la Chambre en fit la lec-
ture, il n'y eut qu'un cri : il ne se
composait que de deux articles abso-
lument inconciliables.
M. le président du conseil, qui est
tout imprégné encore de l'atmosphère
du Luxembourg, voulant rassurer, par
l'entremise du Figaro, la population
parisienne sur les exploits des anar-
chistes, a surtout gémi sur « l'extrême
licence de la parole et de la plume. »
Un journaliste, qui appartient aussi
au Sénat, après avoir constaté la dé-
fectueuse organisation de la police,
conclut en propres termes que « la
première origine du mal est la funeste
loi de 1881 sur la presse m,qu'il appelle
« une loi de privilège pour les journa-
listes et les orateurs. »
Puisqu'on croit le moment favora-
ble pour renouveler ces appels à la
réaction, c'est une raison de plus pour
ne pas les laisser passer sans les ré-
futer une fois encore.
- Il est hors de doute que la police, et
même la justice, ont eu des périodes
de singulière complaisance pour de
véritables excès. Mais convient-il d'en
accuser la loi qu'on a cru devoir, à
tort ou à raison, laisser sommeiller ?
Est-ce que, par hasard, la loi de 1881
autoriserait la provocation au crime,
la provocation de l'armée à la déso-
béissance, ou d'autres démonstrations
dont on s'ingénie à lui faire porter la
responsabilité ? Point du tout : ce sont
des délits qu'elle prévoit et punit, au
contraire.
Quant au prétendu privilège, il con-
sisterait en ceci : que les délits de la
presse et de la parole sont déférés au
jury. C'est une garantie qui a été re-
vendiquée comme essentielle par tous
"les libéraux sous tous les régimes. On
veut représenter cela comme un pri-
vilège professionnel aççàrrlé à une
catégorie de citoyens, aux journa-
listes et même aux orateurs envisagés
comme une corporation. Mais la li-
berté de parler et d'écrire est une ga-
rantie commune à tous. On s'est plu à
répéter un mot de dilettante plus ou
moins authentique. Lors de la créa-
tion du régime de l'autorisation préa-
lable et des avertissements, un habile
écrivain aurait dit : « C'est mainte-
nant qu'on va voir ceux qui ont du
talent. » Est-ce qu'il n'y aurait pas
quelque égard à avoir pour les. droits
de ceux qui n'ont pas de talent — ou
qui n'ont pas celui d'estomper leur
pensée? H.
On veut raisonner comme si l'im-
primerie n'était pas inventée, et l'on
invoque le droit commun. Cela me
rappelle un détail que donnait M. De-
cauville sur son petit chemin de fer de
l'Exposition. Il ne rentrait pas dans
les conditions des grandes voies fer-
rées et n'était prévu d'aucune façon
par les règlements. La préfecture s'en
tira en délivrant aux mécaniciens des
licences de cochers d'omnibus par les-
quelles il leur était enjoint de mettre
leurs bêtes hors d'état de mordre et de
ne pas les laisser brouter les feuilles
ou les pousses des arbres.
Le voilà dans toute sa beauté, le
droit commun !
Gustave Isambert.
Le XIXe SIÈCLE publiera demain la
a Chronique v, par M. Paul Giniaty.
LA RAFLE DE CE MATIN
A la suite d'une entrevue qui a eu lieu
hier, jusqu'à une heure fort avancée de la
soirée, à la préfecture de police, entre M.
Lozé et le chef du parquet, une vingtaine
de mandats d'arrêt à mettre à exécu-
tion contre des anarchistes habitant Paris
et la banlieue ont été remis à différents
commissaires de police.
Les arrestations auront lieu ce matin.
RAVACHOL
C'est lundi, à moins d'un contre-ordre,
que Ravachol partira pour Montbrison. Il
sera accompagné, ainsi que nous l'avons
dit, de gendarmes et d'agents de la sûreté.
Il voyagera dans un compartiment de
2° classe, et non dans un compartiment
cellulaire.
Simon ne partira que lundi pour la pri-
son de la Santé.
LE MOT D'ORDRE ANARCHISTE
Londres, 29 avril.
Il n'est pas exact, ainsi que le bruit en a
couru, qu'on ait découvert ici les preuves
d'un vaste complot anarchiste dont les ra-
mifications s'étendraient dans les différents
Etats du continent.
Les rapports de police établissent toute-
fois que le mot d'ordre qu'attendent plu-
sieurs groupes d'anarchistes du continent
doit pour la journée du 1er mai partir d'An-
gleterre. Les gouvernements intéressés en
ont aussitôt été avisés.
UN aui EST BIEN GARDÉ
Bruxelles, 29 avril.
La cour d'assises du Brabant a eu à juger
aujourd'hui Guillaume Brecke,qui était in-
culpé de provocation au crime, pour di-
vers articles parus en décembre dernier
dans le journal anarchiste le Conscrit.
Mais pendant la délibération, le prévenu,
qui s'était retiré dans la salle des Pas-Per-
dus, a pris la fuite.
La cour l'a condamné à sept mois de
prison et 50 francs d'amende.
Un mandat d'arrêt a été lancé contre lui.
—Il—«Il -
AU LANDTAG PRUSSIEN
Berlin, 29 avril.
La Chambre des députés a discuté encore
aujourd'hui le budget supplémentaire de-
mandé par le président du conseil.
Le gouvernement a été successivement
attaqué par M. Ennecerus, national-libéral,
qui a déclaré qu'il considérait la combinai-
son ministérielle actuelle comme un pro-
visoire, et par M. Lieber, membre du cen-
tre, pour qui l'abandon de la loi scolaire
n'est rien moins que la défaite du chris-
tianisme.
« L'école sans confession, établie sur le
type français, a-t-il ajouté, favorise,comi-iie
le dit la Revue des Deux-Mondes, le socia-
lisme révolutionnaire. »
M. Lieber a ensuite reproché à M. de Ca-
privi de ne s'être pas préoccupé des senti-
ments de la majorité, et, s'adressant à M.
d'Eulenbourg:
« Ce n'est pas vous, président du con-
seil, dit-il, que nous avons blâmé, ce sont
vos déclarations affectant d'ignorer les par-
tis ayant soutenu la loi scolaire.
M. d'Eulenbourg a aussitôt relevé cette
accusation. ---
11 n'a pas la prétention a-avoir aeja con-
quis la confiance de la Chambre, mais il a
le droit de ne pas être soupçonné gratuite-
ment de vouloir détruire les bases reli-
gieuses de l'école. Il comprend les regrets
de la majorité et croit qu'il aurait peut-
être mieux valu de ne pas interrompre
brusquement la délibération sur la loi
scolaire.
En définitive, la Chambre des députés a
renvoyé le projet de budget supplémen-
taire à la commission du budget.
LES TROUBLES DU VÉNÉZUELA
New-York, 29 avril.
Le Herald, annonce que le président Palacio
a acheié une grande quantité de fusils et de
munitions à Trinidad.
Ceci confirmerait le bruit que le président
Palacio se serait assuré l'appui de l'Angle-
terre, grâce à la cession du territoire en li-
tige situé entre le Venezuela et la Guyane an-
glaise.
Le général Crespo a fait prisonnier le gêné-
rsl Casanas, général en chef du président Pa-
lacio.
BBW—IMB—BB——BBBB
M. TURINAZ SANS TRAITEMENT
Nancy, 99, avril. — M. Turinaz, évêque de
Nancy, vient de recevoir une lettre du minis-
tre des cultes lui notifiant la suppression de
son trai.teiuçaf*
LA DYNAMITE
-
LES BLESSURES INÉDITES
La chimie moderne. — La catastrophe
de Beaumont et l'homme sans tête.
Vingt kilos de dynamite et
trois millions de mètres
cubes d'air.
Tout n'est qu'heur et malheur. Le pro-
grès industriel, qui ne compte plus, d'ores
et déjà, ni ses bienfaits ni ses merveilles, a
aussi, en revanche, son tragique déchet de
surprises, de deuils, de catastrophes et de
douleurs— les épines de la rose. C'est à ce
point que les pessimistes auraient presque
le droit de se demander si ce n'est pas à la
chirurgie que tels des plus étonnants mi-
racles de la science ont le plus profité, en
lui assurant, avec l'occasion inattendue
d'élargir ses sanglants horizons, de la be-
sogne et du pain sur la planche.
Le fait est que — pour me borner à qua-
tre progrès seulement — les chemins de
fer, la dynamite, le fusil Lebel et l'électri-
cité ont enfanté toute une pathologie nou-
velle.
Certaines blessures inédites, certains
shochs-cérébraux ou médullaires — in-
soupçonnés paraissent spéciaux aux acci-
dents de chemins de fer, aux collisions,dé-
raillements et "télescopages". Il a même
fallu, au moins en Amérique (où ce genre
de catastrophes est plus fréquent que par-
tout ailleurs), créer exprès un vocable tout
neuf, railway-spine, ce qui peut à peu près
se traduire par cette périphrase : « Para-
lysie de l'appareil cérébro-spinal provo-
quée par un accident de chemin de fer ».
C'est la forme ordinaire — avec sa genèse
sui generis --de l'hystérie masculine.
Aux fusils Lebel et aux autres armes ana-
logues à longue portée, tir rapide et tra-
jectoire rasante, dont les balles cylindro-
ogivales, chemisées de melchiorou d'acier,
vous traversent très bien cinq ou six hom-
mes à la file, nous devons les perforations
hélicoïdales, à la section nette et franche,
découpée comme à remporte-pièce dans
l'épaisseur pantelante desmuscles et des
os. Toute une classe de traumatismes sans
précédents, auxquels a dû s'adapter la thé-
rapeutique ab impromptu des champs de
bataille.
Quant aux innombrables acèidents cau-
sés par l'électricité et autour desquels les
marchands de fluide organisent avec tant
de soin la conspiration du silence, on les
constate, mais on ne les juge plus. Per-
sonne n'y entend plus rien, et il semble1
que, de ce chef, toute la science physiolo-
gique et médicale est à refaire, intégra-
lement.
La dynamite et ses effets
Reste la dynamite, la sinistre reine du
jour, dont les mystérieux effets sont encore
plus terribles, plus complexes et plus ex-
traordinaires.
Assurément, de toutes les nouveautés in-
criminées, c'est encore la dynamite qui
compte à son passif le moins de dévastations
et le moins de victimes. Le fusil Lebela déjà
« fait merveille" au Dahomey sur cibles
noires, et sur cibles blanches à Fourmies.
Chaque semaine, l'électricité vous fauche,
tant en Amérique qu'en Europe, sa bonne
petite demi-douzaine, au bas mot, de mar-
tyrs innocents, tôt oubliés, si tant est même
qu'ils soient seulement connus en dehors
de l'étroit cercle familial.
Il faudrait, enfin, beaucoup de Ravachol,
"travaillant" systématiquement et de con-
cert, pour abattre autant de quilles humai-
nes qu'il s'en est cassé, en une minute,
l'été dernier, à Mœnchenstein ou à Saint-
Mandé. Mais la dynamite est d'actualité.
Elle vous a, d'ailleurs, des allures drama-
tiques et une terrifiante mise en scène qui
l'imposent, comme une manière de Croque-
mitaine incompréhensible et tout-puissant,
aux préoccupations de la foule.
Il faut bien dire que ses singuliers et for-
midables effets, qui n'ont de comparables
que les effets, non moins formidables et
non moins singuliers, des autres" casse-
toutites » inconnues de nos pères, aux-
quelles se complaît la chimie moderniste,
sont vraiment de nature à ensemencer l'é-
pouvante et l'horreur.
Mystérieux ravages
Oncques, de mémoire de « panseur », on
n'avait vu de ravages semblables aux rava-
ges qu'elle détermine, de plaies semblables
aux plaies qu'elle engendre.
Je ne saurais mieux faire ici que de lais-
ser la parole au plus intime de mes amis,
Emile Gautier, qui a justement traité la
question ex professo dans un livre au-
quel Raoul Lucet a, je ne saurais vous le
cacher plus longtemps, collaboré dans les
grandes largeurs :
« Ce sont des cadavres entièrement dé-
pouillés de leurs vêtements ou savamment
écorchés, de la nuque aux talons, comme
s'ils avaient passé par les mains du plus
habile des préparateurs de pièces anato-
miques; ce sont des membres presque
aussi nettement amputés que par le fil d'un
rasoir, mis littéralement en marmelade, ou
projetés, à l'état piteux de fumier ou de
charbon, à des centaines de mètres ; ce
sont des squelettes entiers volatilisés, au
sein d'un informe magma de chairs pilées ;
ce sont de petites égratignures, insigni-
fiantes en apparence, qui se traduisant en
dedans par d'incommensurables désor-
dres, hors de toute proportion avec l'é-
troite porte d'entrée ouverte dans la peau ;
ce sont des viscères entiers arrachés des
cavités du corps sans laisser de traces, sans
qu'il soit seulement possible de reconnaî-
tre par où ils ont bien pu s'en aller. avec
la vie ; c'est, comme le fait s'est produit,
le 23 septembre 1877, à Oubatché (Nouvelle-
Calédonie), un ongle de la main droite qui
va s'enforcer dans l'une des vertèbres de
l'épine dorsale, après avoir traversé toute
la largeur de la cage thoracique ; ce sont
des paralysies subites, de terribles com-
motions intérieures, parfois sans la moin-
dre lésion visible. C'est le bouleversement
sans nom, le chaos, l'effondrement organi-
que. » (Les Etapes de la science, p. 3A3).
Décollation suprême
Une fois dans ma vie, pendant l'année
terrible, il m'est arrivé de jouer un rôle
(passif) dans une explosion de ce genre,
non pas précisément de dynamite, mais de
fulminate de mercure — ce qui est tout
comme, puisque les effets sont sensible-
ment les mêmes. La capsulerie de Beau-
mont, derrière la gare de Hennes, là où
s'est bâtie depuis la prison centrale des
femmes, venait de sauter, pour une raison
demeurée inconnue. Passant par là avec
un mien camarade, M. Edouard Danion,
qui commande aujourd'hui le bataillon
d'artillerie , de forteresse à La Rochelle,
nous arrivâmes — nécessairement - le3
premiers sur le lieu du sinistre.
A peine avions-nous franchi le mur d'en-
ceinte, au milieu de la panique provoquée
.bar la crainte assez justifiée d'explosions
nouvelles, nous nous heurtons à un cada-
vre, presque complètement nu, le visage
blanc, mais sans lésions apparentes. Je
l'empoigne par les cheveux, tandis que
Danion soulève les jambes. Horreur! la tête
me reste dans les mains. La secousse in-
térieure — le coup de vent — avait rompu
le cou sans déchirer la peau, et c'était le
brusque effort de traction exercé par mes
bras qui avait, en étirant le frêle tissu, pa-
rachevé la décollation suprême. Quand
j'y songe, après vingt-deux ans, j'en ai çn-
core la chair de poule!
Voilà pourtant comment opèrent les ex-
plosifs « fin de siècle », et les blessures des
malheureuses victimes du boulevard Ma-
genta sont du même tonneau.
Le souffle de la mort
C'est que la dynamite — qui en est le
type — n'agit pas tant par la mitraille, pro-
jectiles a priori ou débris a posteriori,
qu'elle lance, que par le souffle des gaz
qu'elle déchaîne et les prodigieuses tempé-
ratures qu'elle développe instantanément.
Les anciennes poudres renfermaient un
métal, le potassium du salpêtre, dont la
combustion, toujours incomplète, donnait
avec le soufre et le charbon, des carbona-
tes, des sulfites et des sulfates de potasse,
tous sels qui, même à très haute tempéra-
ture, demeuraient à l'état solide, ainsi que
l'attestaient les fumées et les suies encras-
santes qui survivaient à l'explosion. Tout
au contraire, la plupart des nouveaux ex-
plosifs ne laissent, après combustion inté-
grale, que des résidus gazeux. Il s'ensuit
que l'augmentation de volume subie par
l'explosif, la chaleur dégagée et la rapidité
avec laquelle s'effectue cette expansion,
sont autrement considérables qu'avec les
méchantes poudres de perlimpinpin d'au-
trefois. :
C'est ainsi que vingt kilogrammes de
dynamite amènent instantanément le dé-
placement de trois millions de mètres cubes
d'air l Rien, évidemment, ne saurait résis-
ter à une pareille rafale, dont la répercus-
sion se peut faire sentir à longue distance,
et pulvérise tout ce qui barre peu ou prou
le passage.
C'est par la nature élastique et fluide du
choc que s'expliquent les capricieuses ir-
régularités des explosions, ces gens sou-
levés en l'air, ces meubles volatilisés, ces
couteaux plantés dans les murs, ces cada-
vres déshabillés par l'insufflation, entre
l'étoffe et la chair, de l'ouragan des gaz,
ces désordres internes et intimes qu'au-
cune « boutonnière" ne révèle, etc.
Ajoutez que la déflagration d'une livre
de fulminate de mercure, par exemple,
suffit pour élever instantanément de )
(deux mille cinq cents degrés!) la tempéra-
ture d'une chambre close. Et cependant la
chose va si vite, que tout se borne, en gé-
néral, à des effets mécaniques, et que les
brûlures directes sont rares, à moins que
l'explosion n'ait allumé, çà et là, au vol,
quelques objets très inflammables.
Jamais, en résumé, l'on n'avait constaté,
dans l'histoire des misères humaines, si
riche pourtant en atrocités monstrueuses
et lamentables, d'aussi fantastique, d'aussi
hideux résultats. Hippocrate y perdrait son
grec et Ambroise Paré son latin. Mais leurs
émules et sucèesseurs commencent à s'y
faire. Au siècle prochain, lorsque la dyna-
mite (qui n'aura peut-être pas encore
achevé de résoudre la question sociale et
d'inaugurer le règne de la justice) sera de-
venue aussi banale que la fièvre typhoïde
et l'influenza, la pathologie classique
comptera tout bonnement un chapitre de
plus.
Voilà le progrès 1
Raoul Lucet.
CHRONIQUE
Je viens de lire le manifeste qu'a fait
afficher hier la Ligue populaire d'étlldes,
de propagande et d'action, et qu'ont re-
produit quelques journaux. Ce manifeste
était adressé à l'armée.
A Dieu ne plaise que j'en remette sous
vos yeux l'abominable texte. Les énergu-
mènes de la Ligue rappellent à nos sol-
dats « qu'ils sont soumis aux plus rigou-
reux traitements, aux plus humiliantes
vexations. — Blessés dans votre dignité
d'hommes, disent-ils, meurtris dans votre
fierté de citoyens, dépouillés de tout
droit, de toute indépendance d'esprit, de
tout libre arbitre, vous êtes considérés
par vos chefs comme de simples machines
à obéir, comme de vraies bêtes de somme.
Chair à bâton aujourd'hui, chair à canon
demain : voilà votre lot! »
Je ne comprends rien à ces fureurs.
L'armée est précisément, de toutes les ins-
titutions sociales, celle où l'on a réalisé,
autant que la chose est possible en ce
monde, le rêve de l'égalité parfaite, rêve
cher aux utopistes de l'anarchie. Je veux
bien admettre que la vie soit dure au ré-
giment; mais elle l'est également pour
tout le monde. Il n'y a à la caserne au-
cune distinction de classes. Le fils du
bourgeois qui porte la casaque du soldat
est traité sur le même pied que le fils de
l'ouvrier et du paysan; on n'a égard ni à
ses mains blanches ni à ses études ; il faut
qu'il fasse les exercices et les corvées
comme les camarades; il est puni com-
me eux, et quelquefois même plus
qu'eux. Car ce n'est un secret pour
personne que les sous-officiers se plai-
sent souvent à taquiner un fils de fa-
mille, à se venger de sa supériorité in-
tellectuelle et morale, en lui infligeant
dans le service des vexations ou des hu-
miliations qu'ils épargnent plus volon-
tiers à un pauvre diable.
Cette vie est-elle aussi cruelle que le
disent messieurs les anarchistes? Ils se ser-
vent de ce terme : « chair à bâton j), pour
désigner nos soldats. Ils seront bien for-
cés, si on les presse, de reconnaître que
c'est là une simple métaphore. On se
sert, en effet, du bâton dans l'armée al-
lemande ; mais il y a longtemps que ces
vilains procédés sont proscrits de la nô-
tre. Jamais un soldat n'est, ce qu'on ap-
pelle, battu. Il regarderait un coup de
bâton ou un coup de canne comme la
dernière des dégradations.
Les Romains avaient imaginé un truc
admirable pour frapper les soldats déso-
béissants sans les déshonorer. Ils avaient
mis aux mains de leurs centurions un
sarment de vigne et ils avaient décrété
qu'un coup de sarment donné par un su-
périeur ne portait pas atteinte à la con-
sidération du légionnaire. Ne vous éton-
nez pas de Ja facilité avec laauelle ce
préjugé avait été admis. Chez nous, un
soldat condamné à mort pour fait de
rébellion contre ses chefs se console en
pensant qu'il sera fusillé; il lui serait
insupportable de penser qu'il pourrait
monter à la guillotine. Et cependant,
douze balles dans la tête ou la même tête
tranchée sur un billot, le résultat est le
même : c'est absolument kif-kif, comme
disent nos tirailleurs algériens. Non, ce
n'est pas si kif-kif que cela, puisque, de
ces deux supplices, l'un est accepté avec
résignation et orgueil, et que l'autre sou-
lève le cœur d'indignation et d'hor-
reur. -
Nous n'avons pas trouvé en France
l'équivalent du sarment de vigne des cen-
turions romains. Nous avons proscrit
purement et simplement les coups de la
discipline courante. Chair à bâton n'est
donc pas juste. Ce qui est vrai encore
aujourd'hui, c'est qu'en effet on mal-
traite souvent les soldats de paroles gros-
sières. Mais j'en reviens là: ces gros mots
tombent sur le jeune bourgeois comme
sur l'ouvrier ou le paysan ; et l'on m'ac-
cordera bien que celui qui doit le plus
en souffrir, c'est justement le premier,
qui n'a pas l'usage de ce vocabulaire et
pour qui ces mots n'ont rien perdu de
leur signification et de leur violence. Un
jeune homme bien élevé peut tressaillir
de colère quand un sous-officier malap-
pris le traite de fichue bête ou d'andouille.
Il n'est pas familier avec ces épithètes.
Elles sont fort indifférentes à tel autre
dont l'oreille a été, depuis son enfance,
faite à ces. aménités.
Si quelqu'un avait à réclamer contre
le régime et les habitudes de la caserne,
ce serait plutôt le jeune homme de bonne
famille bourgeoise, qui tombe tout à
coup dans un milieu dont il n'a aucune
idée et qui lui est souvent très pénible.
Nous voyons cependant qu'en général il
ne se plaint pas. Il prend gaillardement
son parti des nécessités qu'il est obligé
de subir. Il sait que l'obéissance passive
est la première de toutes les exigences
dans le service militaire. Il s'y résigne,
se disant à part lui que cela ne peut être
autrement. Il accepte de même les autres
ennuis d'un état par lequel tous les Fran-
çais doivent passer aujourd'hui, sans
exception. Il ne récrimine pas. A quoi
bon?
C'est La Bruyère qui a dit : Si la mort
faisait des exceptions parmi les hommes,
quelle tristesse et quel désespoir chez
ceux qu'elle emporterait, laissant vivre
les autres ! Je cite de travers, citant de
mémoire. Mais c'est l'idée. Elle est fort
juste. Il en va de même pour le service
militaire : ce qui en atténue l'ennui,
c'est qu'il pèse indistinctement sur tou-
tes les têtes. Du moment que personne ne
peut se soustraire à cette fatalité inéluc-
table, tous l'acceptent de meilleur cœur
et la révolte n'est permise à personne.
Il n'y a pas moyen de faire autrement;
c'est la grande raison, cela! Ces mes-
sieurs de l'anarchie ont beau jeu à dire :
chair à canon! chair à canon! Ne croi-
rait-on pas que le gouvernement envoie
pour son plaisir les enfants de la France
à la bataille et à la mort? Il y a, sans au-
cun doute,des guerres impies,des guerres
abominables. Ce ne sont pas générale-
ment les démocraties qui les déclarent.
Elles aiment d'instinct la paix, et tout le
monde est persuadé que si nous avons
jamais la guerre, ce sera malgré nous, et
après avoir épuisé tous les moyens de
conciliation compatibles avec l'honneur.
Mais enfin, supposez que nous soyons
attaqués.
Car ces messieurs de la Ligue parlent
toujours comme si nous étions seuls dans
le monde; comme si nous pouvions, à
notre fantaisie, déchaîner la guerre ou
conserver la paix. Ils n'ignorent pour-
tant pas qu'il en est des nations comme
des individus. L'homme le plus inoffen-
sif et le plus calme peut se heurter à
un malotru qui le force à dégainer. S'il-
n'est pas armé et qu'il ne soit pas le plus
robuste, le plus agile et le plus adroit, il
sera roulé; la chose est claire. Il faut
donc que,pour sa sécurité personnelle, il
se tienne prêt à toute éventualité.
Les peuples, surtout les grands peu-
ples, sont obligés aux mêmes précau-
tions. Ils faut qu'ils aient une armée pour
les défendre, et il faut que cette armée,
ce soit la jeunesse du pays tout entier.
Ce sera, le cas échéant, de la chair à ca-
non ; mais exactement, comme lorsqu'un
homme est réduit à se battre, on peut
dire de lui qu'il est de la chair à coups
de poing ou à coups d'épée.
Ce sont là de vaines et creuses décla-
mations. Mais ceux qui les rédigent et
ceux qui les impriment sont bien coupa-
bles ; et de quelque respect que je sois
animé pour la liberté de la presse, je ne
serais pas fâché de voir déférer au jury
ces factums où l'on prêche à nos soldats
la désobéissance à leurs chefs et le dé-
dain de la patrie.
Il y a des choses qu'il vaut mieux ne
pas laisser dire.
Francisque Sarcey.
UNE AMUSANTE MÉPRISE
Un monsieur correctement vêtu de noir,
une serviette d'avocat sous le bras, entrait
avant-hier, vers midi, au 127 du boulevard
Meslesherbes et s'engageait rapidement
dans le grand escalier sans parler à la con-
cierge.
Cette dernière, une dame Galema, qui a
pour locataire M. Boutet, le juge d'instruc-
tion bien connu, redoute fortement les
anarchistes ; elle crut que le visiteur si
pressé en était un qui allait dynamiter le
magistrat habitant sous le toit confié à sa
garde et, prise d'une peur folle, elle appela
deux gardiens de la paix stationnant de-
vant le n° 131. Ils accoururent, grimpèrent
derrière le monsieur à la serviette, l'arrê-
tèrent et, à leur grande stupéfaction, ap-
prirent de la boucha même du visiteur,
très égayé par l'aventure, qu'il n'était au-
tre que M. Bulot, substitut du procureur
général, le même qui faillit devenir la vic-
time de Ravachol.
- Mme Galema s'est confondue en excuses
et M. Bulot lui a pardonné sa méprise en
riaht de bon cœur,
LE SALON
DES CHAMPS-ÉLYSÉES
Ce Salon ne comptera certes pas parmi
les meilleurs, nles bons. Il ne renferme
aucune grande page de jeunes artistes as-
sez personnels, assçz sincères, en tout cay*
pour qu'on prenne Intérêt à le urs essais, a
leurs efforts.
Les « Maîtres" se reposent ou se réser-
vent, sauf MM. Detaille et Benjamin Cons-
tant. L'absence de pensée se laisse cruelle-
ment apercevoir dans la plupart des en-
vois d'artistes, même de ceux qui ont des
qualités appréciables de métier. Le fait
divers, l'anecdote sévissent. Les beaux:
paysages, jadis trop nombreux, s'espacent
sur la cimaise, et n'est-ce pas là un signa
grave du malaise de notre école de pein-
ture ?
Les étrangers enfin continuent à exposer
de bonnes toiles dans une proportion qui
commence à devenir inquiétante. Le Salon
n'est pas ennuyeux à cause de sa variété, à
cause d'un certain nombre de toiles agréa-
bles (bien qu'en somme insignifiantes). Il
n'est pas ennuyeux : il est seulement mé-
diocre. Un philosophe indifférent aux usa-
ges mondains dirait qu'il est inutile.
En le parcourant, nous justifierons ces
considérations générales qui sont, je crois,
non moins justes qu'elles sont brèves. Et
nous commencerons cette promenade cri-
tique en montant d'abord, comme il con-
vient, au « Salon d'honneur » par le grande
escalier. Sur le palier, notre attention sera
certainement attirée par le vaste plafon
de M. AIME MOROT, les Danses françaises
àtravers les âges,plilond destiné à l'Hôtel de
Ville. Trois couples de danseurs empruntée
aux siècles derniers et au commencement de
celui-ci, une échappée sur un salon mo-
derne, deux Amours dans un coin, c'est
tout. Cela suffirait d'ailleurs, si l'exécution
avait dans la couleur plus de gaieté et de
grâce. A quoi bon traiter des sujets de fan."
taisie avec tant de sagesse ?
Sur ce palier est une jolie peinture dé-
corative, de M. REYNOL DE STEPHENS :
des femmes couchées,pareilles à des Muses,
qu'entourent des roses en guirlande. Cela
rappelle M. Alma Tadéma.
LE GRAND SALON
Entrons dans le Grand Salon ; l'aspect eu
est fort peu imposant.
En face, M. BENJAMIN CONSTANT y
triomphe sans rival. Son plafond, Paris-.
conviant le monde à ses fêtes, destiné à la-
salle des fêtes de l'Hôtel de Ville, ressemble
à une gigantesque affiche pour laquelle M.
Besnard aurait collaboré avec M. Chéret.
La Ville de Paris se détache sur l'azur, et,
en avant, des figures aux multicolores dra-
peries sonnent dans des trompettes. Beau-i
coup de nuages bleus, roses et lourds. Eir
bas, Paris et des feux d'artifice. Ce plafond1
où le coloris est un badigeon inspiré, oit
le dessin est d'une fougue au demeurant
assez académique, où les difficultés sont
esquivées à la faveur des nuages, est toute-,
fois curieux et marque chez l'artiste un désir
louable de varier sa manière. On ne pourra
le juger qu'une fois mis en place, à la lu-
mière électrique. Tel qu'il apparaît aux
Champs-Elysées, c'est du Véronèse ultra-
démocratique.
Suivons maintenant la cimaise de gaucho
à droite, selon l'ordre que nous observe-
rons jusqu'à la fin pour la peinture.
M. VAN AKEN : Misère humaine. Une ma-
lade couchée dans un taudis. Le sujet prêta
à l'anecdote larmoyante. Le peintre l'a
traité d'une touche énergique jusqu'à la
rudesse, mais avec un sentiment assez dé-
licat.
M. BRUNIN : Une lame recommandée.
Autre peintre anversois. Pastiche soigné
d'art flamand. Tableau amusant par son
archaïsme de musée.
M. AUGUIN : le Soleil dissipant la brume.
Petite toile claire et d'accent juste d'un des
plus estimables élèves de Corot, qui aurait
allumé de bon cœur sa pipe dans ce
paysage.
M. ROUSSEL : le Corps de Marceau rendu
à l'armée française, a l'armée française
« éplorée », dit le livret. Vaste machine as-
sez banale.
M. CHIGOT: Echouage par un gros temps.
Vingt-cinq mètres de toile pour ne rien
dire. Les pêcheurs qui tirent la barque au
rivage sont des figurants sans conscience.
C'est peint à la grosse et méthodiquement.
Traversant le Grand Salon, commençons
la visite des salles par la
SALLE XVII
En allant de gauche à droite, nous trou-
vons d'abord avec ennui :
M. WENKER qui, sous le titre de Basilissa,
expose une figure de reine d'Orient d'un
coloris à la fois douceâtre et criard. M.
Wenker a fait plus heureusement un petit
portrait de femme, sobre et fin.
M. SEYMOUR-THOMAS : Une religieusa
ambulancière blessée expire dans les bras
d'une de ses sœurs, taudis que se désola
avec sang-froid un brave capitaine. Pein-
ture patriotique méritoire de la part d'un
artiste américain.
M. J.-A. BAIL : La Fontaine, toile d'una
exécution solide et d'un effet chardinesque.
Un envoi de peintre, chose à signaler.
M. VAYSON : Le même paysage que d'or-
dinaire : moutons, bergère, ciel de la Pro-
vence, mais agrandi démesurément et, par
suite, d'un moindre caractère.
M. BENJAMIN CONSTANT : Un portrait da
chasseur. Très bonne coupe.
M. THEVENOT : Une femme en rose dans
un jardin. Pochade un peu pesante pour
un sujet si léger.
M. SMITH-LEWIS : Grande toile d'aspect
assez malpropre représentant la Coupe dxc
goémon, à Saint-Jllalo. Les chevaux sont
et une anatomie vivante.
PELOUSE : Matinée d'aotit. Un des der-4
niers paysages du maître regretté. Les
terrains se tiennent et les cîmes lointaines
fuient. Belle toile d'une robuste finesse.
SALLE XV
M. ZWILLER : Les Gros Bonnets du vil-
lage, sujet usé, mais que le peintre a ra-
jeuni en le traitant sans malice caricat\l"'l'
raie dan.3 une note claire.
M. VEBER: Suzanne ahuitans. Un e char-
mante tête de profil, très florentine, d'un.
contour net et gracieux, à la Piéro déliai
Francesca. *
M. DE VUILLEFROY : Une Posada, da
toutes les couleurs, un peu plus espagnole
que nature.
M. Y VON : portrait de M. Kellner.
Ne bougeons plus !
M. VERDIER : Les Echos, grande pago 4é':
corative pleine de fadeur. -
- SALLE XIII ,
M. LINA BILL : Une vue d'Agde, lematiQ1
L'eau est clairç, le ciel transoareat; iah;)
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