Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1919-09-26
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 26 septembre 1919 26 septembre 1919
Description : 1919/09/26 (N17843). 1919/09/26 (N17843).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
5 VENDEMIAIRE, AN 128.. — N° 17.843. -.;" --"- Le numéro : DIX GENTTMLIJ VENDREDI 28 SEPTEMBRE 1919. — Ni 17.843.
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AUGUSTE VACQUERIE
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EDMOND DU MESNIL
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REDACTION ET ADMINISTRATION
38, Boulevard de Strasbourg. — PARIS.
TRIBUNE LIBRE
FIUME.
Gabriele d'Annunzio est un
très grand poète,c'est entendu.
Mais, après la longue guerre
que nous avons soutenue con-
tre les ambitions illégitimes de
l'Allemagne, et pour la défen-
se du Droit, lui est-il permis de conqué-
rir, par une surprise barbare, et sans au-
cune peine, un territoire et une ville qui
depuis trop longtemps sont entre deux
peuples rivaux un objet de discussion et
même de discorde ?. D'Annunzio a-t-il
oublié que, par la force, les Etats ne
fondent rien de durable ? Préfére-t-il,
en fils de Machiavel, que l'Italie ne vive
plus que selon son bon plaisir ?
Quels sont donc ce pays d'Istrie, cette
ville de Fiume tant convoités ? C'est une
contrée assez peu fréquentée des touris-
tes. Ceux qui passent par Trieste ont
rarement l'idée de pousser vers le sud,
et c'est dommage. Dès les frontières de
l'Istrie, le sol change d'aspect : le
Karst, longue chaîne de plateaux arides
et tourmentés, barre la presqu'île au
nord-est, de Goritz à Fiume. Pays sau-
vage, semé de pierres, à peine couvert
de broussailles, désolé en outre par la
glaciale bora, — l'antique Borée, —
dont le souffle violent peut renverser les
plus lourdes voitures. Mais que de mer-
veilles dissimulées au sein de ces ro-
chers ! Entonnoirs, cavernes, cours
d'eau souterrains.
Fiume, au fond du Quarnero, fait pen-
dant à Trieste : entre les deux s'allonge
la presqu'île d'Istrie.
Un archipel, dont Veglia et Cherso
sont les îles les plus grandes, couvre le
port de Fiume de môles naturels contre
les assauts de la mer et les vents du
large. Dans un site pittoresque, de cli-
mat doux et salubre, sous un ciel pres-
que toujours bleu, Fiume est une cité
bénie que la nature prédestine à être
une des reines de l'Adriatique.
Il y a la vieille ville et la ville neuve.
C'est la première qu'Elysée Reclus,ap-
pelle « la cité romaine ». Fiume, cJest,
Trieste en petit.
Même dessin de construction, depuis
les imposantes bâtisses de la ville neu-
ve au bord de la mer, derrière l'enchevê-
trement confus des mâts et des corda-
ges, parmi les bâtiments des docks jus-
qu'au vieux château de Tersatto sur la
colline, où l'on grimpe par les rues
étroites à escaliers de l'ancienne cité.
Même aspect de la ville à l'intérieur,
moins animé pourtant et moins riche,
malgré le grand développement du com-
merce et de l'industrie, les célèbres fa-
briques de torpilles Withead, les impor-
tantes constructions de l'Académie de
Marine et du Municipio. Même Corso
aux élégants magasins qui, depuis. les
Halles où frétille toute une population
des mers aux mille formes bizarres dans
un fouillis de chairs miroitantes, va jus-
qu'au canal de la Fiumara, plein de ba-
teaux chargés, de bois, bordé de vieux
arbres qui ombragent les boutiques bas-
ses et obscures, presque sous terre, et
les baraques en plein vent des petits
commerçants et des brocanteurs, avec
leurs étalages de légumes, de fruits, de
mercerie, d'ustensiles et de défroques
de toute espèce. De Fiume, ainsi que de
Trieste, nous parviennent en France les'
bois qui servent, dans notre Midi, à la
fabrique des barriques et des foudres.
Peu de monuments anciens. Certes,
Rome a laissé ici la trace de sa forte
main, mais une trace tellement mépri-
sée par les siècles ! Où d'ailleurs, dans
le monde connu de Rome souveraine, ne
irouvera-t-on pas des empreintes du gé-
nie conquérant de l'Empire ?
Montons à Tersatto par cet extraordi-
naire « chemin de croix », un escalier
de quatre cents marches. Voici la petite
église byzantine où sont ensevelis les
comtes Frangipani, seigneurs de Tersat-
to, et qui attire par les grâces de sa
Madone tant de pèlerinages. De nom-
breux ex-voto, la plupart tableaux de
naufrages, sont suspendus aux voûtes
des deux nefs.
Proche de l'église, le château élève
uës murailles massives aux tours à demi
ruinées.Une belle porte Renaissance don-
me accès dans l'enceinte- Au milieu se
dresse la colonne érigée par les Français
à Napoléon sur le champ de bataille de
Mareugo, et qui fut transportée ici par
la famille de l'amiral Nugent, actuelle
propriétaire du château.
Avant la guerre, les Italiens, au nom-
bre de vingt mille sur les trente mille
habitants de Fiume et de sa banlieue, ne
faisaient point de politique irrédentiste.
Mais les Croates y combattaient de tou-
tes leurs forces l'influence hongroise.
A l'heure présente, les Italiens sont
encore, si de l'heure fragile j'écarte l'a-
venture de d'Annunzio, les « maîtres du
« municipe et des affaires ». Mais ils
sont cernés par. les Croates et les Slovè-
ns qui tiennent l'amphithéâtre monta-
gneux et le Karst. Hier, pomme de dis-
corde entre Croates et Hongrois, Fiume
l'est aujourd'hui entre Croates et Ita-
liens. ,
Pour l'instant, je veux oublier la
plainte ou la convoitise des hommes Et
de la terrasse du château de Tersatto, je
regarde le merveilleux panorama. Toute
l'Istrie s'étale sous mes yeux comme
une carte en relief, barrée en arrière,
au-dessus de Fiume, par les montagnes
dentelées de la Croatie et tout au fond,
au nord, par les Karawankou. La côte
de l'ouest, peu accidentée, se montre
bordée de villes, de bourgades, à demi
perdues dans la brume, depuis Trieste
jusqu'au port lointain de Pola. A l'est,
au contraire, la vague ne heurte que des
falaises ; et seulement vers le nord,
quelques bourgades apparaissent parmi
les lauriers et les oliviers.
Tandis que la clarté mouvante des
îles violettes se perd dans l'horizon, il
monte toujours des eaux profondes de
la jner comme un mystérieux chant de
sirène, une voix d'amour si séduisante
dans le soleil,- et si perfide.
GEORGES BEAUME.
--
EDITORIAL
L'épilogue
Nul ne songeait plus à
contester l'extrême débilité
du traité de faix.
Ses parrains s'efforçaient
de le soutenir avec des bé-
quilles.
Son Père, le docteur, Clemenceau, hé-
sitait à formuler son diagnostic.
Il a parlé. Hélas '!
On prétend que M. le président du
Conseil a eu le dessein. de sauver son
enfant P.
bzconsciemmad, il l'a écrasé par son
discours même.
Ce fut un spectacle attristant que ce
petit corps malingre présenté par les
mains inhabiles d'un vieillard très las.
Les vrais amis de M, Clemenceau sont
décidément ceux qui lui conseillaient le
repos et la retraite glorieuse après les
fêtes de Strasbourg !
A la manière dont M. Clemenceau a
parlé du traité, on se rend compte pré-
cisément de la façon dont il le négocia.
Un beau verbalisme patriotique, une
forte poussée d'orgueil, une absence to-
tale de méthode par quoi la légèreté
d'esprit aboutit à l'incohérence des
actes.
M. Loucheur, plutôt que d incliner
son génie réalisateur à la diminution de
la vie chère, disait, récemment •
« le vous dois la vérité ; la vie est et
restera chère. »
A son tour, M. Clemenceau a déclaré :
« Le traité est plein d'erreurs, de lacu-
nes, de dangers. Mais je vous dois la
vérité : il restera toujours ainsi. »
Aux hmmes de lutter pour le rendre
meilleur,
Bien. Après quatre années infernales
d'une guerre atroce, nouvelles luttes
pour établir la paix.
Ce n'est peut-être pas ainsi que l'hu-
manilé. pantelante concevait le désar-
mement par la paix des peuples.
'El la France, qui attendit trois ans
le secours anglo-saxon, en contenant la
ruée des barbares sur sa poitrine san-
glante, n'a pas trouvé davantage en ces
négociations une paix française digne
de ses armes, et telle qu'elle Ventrevit
dans l'aube claire de l'armistice.
Il taut parler franc.
L'empirisme de M. Clemenceau, n'est
parvenu ni à conclure une paix dé sé-
curité ni à préparer une reconstitution
nationale rapide.
Situation exterieure et intérieure res-
tent assombries par des nuées d'orage.
M. Clemenceau prétendait les faire
crever comme un Titan dressé contre le
ciel.
Elles commencent à crever.., sous lui.
EDMOND DU MESNIL.
La Pensée des Autres
La cause la plus profonde de l'affai-
blissement de notre action, c'est que no-
Ire action parlementaire a été tou-
jours partielle.
C'est une question de discipline.
Ce Congrès ne doit pas être une co-
médie.
J'ai résisté au flot d'enthousiasme
aveugle, j'ai fait mon devoir,
-1 Donnez aux hommes qui se battent
pour des idées, des armes contre ceux
qui abandonnent ces idées.
Je ne veux plus voir ici des ambitions
de profiteurs.
Je ne veux pas la dissociation des
forces radicales par l'action gouverne-
men.
Il tant avoir le courage de triompher
Ou de tomber.
FRANKUN-BOUHLLON.
On dit.
■ '»■ - ..-
En Passant
Recommandation ;
-" : - - f.. - .!
On sait avec quelle facitité, pour ne pas dire
avec quelle légèreté, les parlementaires apos-
tillent des demandes et S) prodiguent en ie-
commandalion.
M. Clemenceau lui-même donne dans ce tra-
vers, et lors de sa première.. présidence du Con-
seil, il lui advint une mésaventure fort plai-
sante.
Alors qu'il siégeait au Sénat, un conseiller
de préfecture en mal d'avancement lui avait
demandé son appui auprès du ministre de l'in-
térieur.
M. Clemenceau, avec une bonne grâce par-
faite, écrivit un mot de recommandation. cha-
leureux.
Le conseiller de prélecture attendait toujours
sa nomination de sous-'préfet. Il vint un jour
au Sénat, se plaindre auprès de son éminent
protecteur. -
— C'est bien regrettable, lui dit M. Clemen-
ceau, en manière de politesse, d'autant plus
que vous paraissez tout à fait digne de la
fonction que vous sollicitez. Mais que voulez-
vous, les ministres sont ainsi.
Et il se débarrassa de l'importun.
Mais lorsque M. Clemenceau devint prési-
dent du Conseil, ce fut une autre affaire.
Le conseiller de préfecture ne lit qu'un bon
place Beauvau et sollicita une .audience.
Le président - qui ne se souvenait même
plus de son nom — absorbé par mille affaires
importantes, reçoit le visiteur entre deux
Dortes.
- Je viens, monsieur le président, dit le
conseiller la bouche enfarinée, vous rappeler
ma nomination.
- Quelle nomination ?
— Ma sous-préfecture.
- Votre sous-préfecture ? 11 n'y a pas de
vacances. Et puis je ne connais .pas votre
dossietr. Quels sont vos titres?. Quelles sont
vos recommandations ?
— Oli ! j'ai une recommandation de tout pre-
mièr ordre, murmura mystérieusement le sol-
liciteur en se retirant. Jo vous prie simple-
ment, monsieur le président, de prendre con.
naissance de mon dossier. Vous verrez 1
— C'est bien, je verrai. et je vous ferai
adresser ma réponse.
Et le président du Conseil de bougonner :
« Qui est-ce qui a bien pu me recommander un
pareil raseur »
Il demanda le,dossier et fut un instant inter-
loqué en y trouvant sa propre lettre. Mais
comme, chez M. Clemenceau l'esprit ne perd
jamais ses droits, il s'en tira, dit-on, piar une
boutade charmante.
« Monsieur, écrivit-il au solliciteur, j'ai par-
couru votre dossier. La recommandation dont
vous m'avez parlé n'est pas suffisante à mes
yeux Faites-vous appuyer par une personna-
lité qui ait le temps d'examiner plus sérieuse-
ment vos titres. »
Jean d'Aigremont.
e
Autrefois
La riposte du factionnaire -
Sous la Restauration, Désaugiers, le
chanteur bien connu, l'auteur de M. et
Mme Denis, étant grenadier dans la garde
nationale, se trouvait de faction aux laite-
ries. Suivant sa consigne, il barre la route
à un passant, en lui- disant :
- On n'entre pas ici avec des chiens.
- Oh ! n'ayez pas peur, lui dit le pas-
sant, mon chien n'a pas de fusil.
— N'ayez pas peur non plus, répondit Dé-
saugiers. mon fusil n'a pas. de chien.
Antisémitisme
Quand on annonça au maréchal de la
Ferté, gouverneur de Metz, la visite des
syndics de la communauté juive, il s'écria :
— Je ne veux pas recevoir ces coquins
qui ont fait mourir notre Sauveur.
— Mais, monseigneur, ils apportent un
présent de quatre mille pistoles.
— Oh alors, faites-les entrer. Après tout,
quand ils Vont fait mourir, il n'était pas
encore Dieu !
Sb
Aujourd'hui
Anecdote électorale
Mgr Freppel, qui fut aussi député, était
un bon vivant qui excellait dam les anec-
dotes électorales.
Il aimait conter, entre autres, celle-ci :
— « J'ai rencontré un fermier de mon
diocèse.
« Eh bien ! vous avez voté dimanche.
dernier ?
« - Moi ?. Oh ! non, par exemple.
« — Et pourquoi ?
(f. — Pourquoi, parce que maintenant on
est libre.
« — Comment libre ?
« —Mais oui, on est libre. Sous-l'Em-
pire, il fallait marcher. Il y avait le mairc,
et l'instituteur, et le garde-champêtre qui
vous tracassaient et qui vous faisaient
des misères si on ne mettait pas le « bon »
bulletin, mais, à présent, c'est fini. Te-
nez, dimanche,j'ai vendu ma vache ; faillie
mieux ça (lue d'avoir voté.
« Je n'ai pu le tirer de là. Il était libre
et il. avait vendu une vache !. »
Botaniste royal
Une jolie anecdote sur le roi de Suède est
contée par M. Gaston Bonnier, membre de
l'Institut..
M. Bonnier, voici quinze ans, au cours
d'un voyage d'étulles, se promenait en her-
borisant, aux environs de Stockholm ; tout
à coup, à un détour du chemin, il aperçut
un autre naturaliste qui, lui aussi, re-
cueillait des plantes dans un herbier ; ce
naturaliste était suivi de sa femme, montée
sur un petit âne. Les deux naturalistes en-
trèrent en conversation. Mais l'heure dit
défeuner sonna :
- Ne connaissez-vous pas une auberge
dai\s les environs ? demanda M'. Gaston
Bonnier à l'inconnu.
— Mais pourquoi ne d.tieur¡.criez-vous pas
chez moi, en compagnie de ma femme ?
répliqua l'inconnu. -
M. Bonnier accepta.
On était arrivé devant lé palais du roi
de Suède ; l'inconnu s'arrêta, lit ouvrir les
portes et pria M. Bonnier d'entrer en lui di-
sant :
--- Que voulez-vous ? je suis le roi de
Suède, je n'y peux rien. Je suis bien
obligé de vous inviter dans mon palais.
Et, durant tout le déjeuner, le roi ne parla
que de botanique au membre de l Institut
de France.
Le Tainin.
[ Le règne du désordre
:
Une crise redoutable
Les Amicales d'instituleurs viennent d'a-
dhérer à La Confédération générale du tra-
vail.
Les fonctionnaires de l'Etat, des deparle-
ments et des communes menacent de se
mettre en grève le VT octobre et adressent
un ultimatum aux pouvoirs puiblies.
MM. Clemenceau et Mandel. auront beau
ricaner : « Rond!s-de-cuir en révolte ! 1) *
Ces manifestations sont le symptôme d'un
état social grave.
Les fonctionnaires français étaient parmi
les plus probes, les plus instruits, les plus
disciplinés et les. moins payés du monde.
Ils faisaient honneur à leurs fonctions avec
des salaires' de misère. Ils formaient avec
me dignité et une modestie admirables un
groupe important de cette classe moyenne,
étai de la société française.
Après la guerre, avec l'apparition de la
vie chère, leu'rs' traitements de misère devin-
rent des traitements die famjne.
Un gouvernement soucieux d'équité, pré-
occupé du bien public, aurait dû spontané-
ment étudier une mesure générale pour don-
ner satisfaction aux fonctionnaires.
Au lieu de cela, Vempirisme de nos mal-
tres qui exclut toute vue d'ensemble, et qui
«le .plaît en règlements de détails, a pris à
tâche de rebuter, de froisser, d'exaspérer les
fonctionnaires.
Il a fait des concessions de bout de chan-
delles ; donné des promesses, sitôt reprises.
Les lenteurs parlementaires s'en sont mê-
lées. Le Sénat, inconscient de l'évolution so-
ciale et de l'urgence de ces problèmes' d'a-
près-guerre, a tâtonné, teegiversé, attendu.
Depuis le 6 août, les fonctionnaires atten-
dent le vote d'une loi qui doit améliorer leur
sort.
Ils perdent patience. La misère est mau-
vaise conseillère.
Ainsi, le gouvernement, p$r: son impré-
voyance coupable, son inertie malfaisante,
vient d'un coup d'aggraver la crise de la
fonction publique en France.
Il recrute de ses propres mains les cadres
de la Confédération générale du travail ; il
sème la défiance et le mécontentement par-
mi les classes moyennes ; il dresse les cor-
porations contre l'Etat..
Belle besorîne, n'est-ce pas ? Casse-cou !
, LE CONGRÈS
de la Ligue des Droits de l'Homme
*
Le Congrès de la Ligue des Droits de
l'Homme se tiendra à Strasbourg pendant
les fêtes de Noël.
L'ordre du jour comporte trois questions ;
L'examen critique dlu traité de paix.
Les transformations de l'idée de l'Etat :
syndicalisme, soviétisme, démocratie.
Le vote dæ femmes. U - -
Les combattants
et les élections
Décisions du Comité d'entente
Le Congrès du Parti radical a demandé,
on le sait, que les poilus soient largement
représenlés, dans l'es' prochaines listes élec-
torales du Parti, et voici que le comité d'en-
tente des associations de combattants a pris
la décision suivante ;
Les membres du Comité d'enlente, réunis le
23 septembre, ont accepté d'un commun accord
la ligne de conduite suivante, comme consé-
quence directe et pratique du manifeste cru
18 septembre J?li) :
1° Chaque parti politique est invité ù sou-
mettre audit Comité d'entente ses listes lie
candidats de Paris et de la province ;
2° Ces listes devront contenir une proportion
de 50 de combattants ;
3° Le Comité d'entente se déjend de soutenir,
et ne soutiendra aucune Itcte, mais il dénoncera
toutes celles nui ne contiendraient pas la part
proportionnelle de candidats fixée plus haut. II
se réserve le droit d'examiner le cas des can-
didats qui, aptes ù servir, se sont soustraits à
ce devoir ;
4° Le Comité d'entente demande aux groupes
de province des différentes associations de
combattants de lui signaler les listes dont Jo.
composition ne serait pas conforme aux clau-
ses du présent programme ;
5° Chaque association d; combattants con-
tractante reste li.lx'c de proposer ù ses rnem-
fbre toutes directives complémentairtes, sous
réserve qu'elles nie seront pas en opposition
avec les rromts Visés ci-dessus.
Adresser toutes communications à M. Charles
Bertrand, 41, rue de Provence, Paris.
Le Comité d'entente réunit, on le sait,
toutes les associations de combattants.
-
Les Prochaines Elections
DANS LES VOSGES
La Fédération radicale et radicale-socia-
liste des Vosges s'est occupée, dans sa der-
nière réunion, de la tactique électorale dans
le département et du choix des candidatures
aux prochaines élections législatives.
Ne s'attachant nullement aux questions de
personnes, elle ne s'est préoccupée que de
réaliser entre républicains une entente fé-
conde qut permettra aux Vosges de n'en-
voyer au Parlement que des représentants
républicains.
C'est dans cet esprit qu'elle a voté à l'una-
nimité l'ordre du jour suivant :
« La Fédération radicale et radicale-socia-
liste des Vosges, réunie à EpinàJ, confirme
sos décisions antérieures dont le but et le
mérite sont d'écarter les combinaisons lou-
ches et les alliances équivoques.
(t Considérant, en ouitre, qu'il est urgent
de faire connaître -au. parti républicain les
résolutions prises par ses délégués au sujet
des prochaines élections législatives ;
« Qu'il y a lieu, d'autre part, de ne pré-
senter à. ces élections qu'une seule liste ré-
publicaine formant le bloc de gauche con-
tre toutes les résistances de droite ; : ;
tI Considérant aussi qu'il est nécessaire de
mettre un terme à des hésitations, à des
atermoiements qui pourraient nuire à la cau-
se républicaine ;
Il Décide de prendre l'initiative de la cons-
titution d'une liste réalisant l'union de tous
les républicains de gauche et de soumettre
cette liste, d'ans un délai très rapproché, à
l'approbation d'un Congrès départemental
loyalement organisé. »
A LA CHAMBRE
————— ————
os -91 IC3 ions 9
■■■■ ■ > < —i —
Devant une Chambre attentive, mais déçue,
M. Clemenceau tente d'expliquer ses négociations. —
Faible discours. — Nul n'en propose l'affichage.
1
M. Clemenceau est monté hier à la tri-
bune de la Chambre. Notre Premier dut y
retrouver en pensée le. souvenir des grands
succès passés. Comme les journées qui ont
consacré son prestige paraissent déjà loin-
taines, et combien peu cette tribune, hier,
ressemblait à un piédestal !
Nous ne voulons être ni cruel, ni injuste.
Nous avons, par contre, le devoir impé-
rieux de dire Ce qui est et nous le dirons
sans ménagement, mais avec courtoisie. Il
faut parler, parce qu'au-dessus des hommes
il y a la France, cette France dont le ma-
laise est profond et envers qui nous serions
coupables si nous tentions d'en dissimuler
les causes
Où sont les séances fameuses au cours
desquelles des orateurs indomptables, des
Jaurès, des Briand, des Barthou, des Cle-
menceau tenaient tété à l'Assemblée dé-
chaînée, résistaient magnifiquement à la
tempête des voix, au vacarme assourdis-
sant des pupitres et repartaient, au pre-
mier mouvement d'accalmie, maîtres de
leur pensée, de leurs parâtes et el eu.x-me-
mes ? Mais où sont les neiges d'autan ?
M. Clemenceau fut de ceux-là. Sa présence
à la tribune, hier, nous a expliqué à elle
seule bien- des lacunes du traité de paix
qu'il y vendit défendre. et dont il n'a..nen
dit — ou presque.
Nous avons été traité en ennemis par la
présidence du Conseil, parce que, patriotes
nous aussi, nous avons osé dire que la
République n'est pas. tntire pour la dicta-
ture et que le régime républicain doit-être
celui de la franchise et de la clarté. Qui
oserait nous condamner, depuis hier ?
Quand nous avons douté de la souplesse
et de la force physique et morale de M. Cle-,
menceau dans la conduite des négociations,
nous t-rompions-nous ? Deux mille témoins
viennent de constater combien nous avons
dit vrai.
Le président de guerre a méconnu. son
heure. Après l'enthousiasme mondial dé-
chaîné par l'agenouillement de l'Allemagne
sollicitant l'armistice, son apothéose était
faite. Il devait rentrer sous sa tente, partir
en pleine gloire, se faire regretter.
Pour l'avoir conseillé, nous avons été
considéré en factieux. Où en arrive-t-on ?
Pour la première fois une Assemblée
française a fait à un grand et glorieux vieil--
lard l'aumône de la pitié. Céltlit un spec-
tacle triste jusqu'au degré suprême que
d'observer à la tribune et de suivre dans
S-apc-nstie confuse, exprimée paroles trop
souvent assourdies et inintelligibles ce maî-
tre de nos destinées qu'une syncope faillit
abattre devant ses auditeurs.
Le chêne penche-t-il soudainement ? Nous
ne le croyons pas. A la Conférence, que les
plénipotentiaires y fussent nombreux ou
réduits à quatre, les discussions furent, à
n'en pas douter, plus animées et plus fati-
gantes que ne le fut la séance d'hier, ren-
due facile par la complaisance des députés,
unanimes dans la plus bienveillante dès
attitudes.
Et pourtant, M; Clemenceau n'a pas su
feuilleter son dossier. Il n'a pas su se justir
fier des critiques énoncées depuis tant de
IO'jrs. II a parlé, parlé. Qu'avons-nous ap-
pris ? Rien.
Le président du Conseil aime la France
par-dessus tout, dit-il. Nous voulons le
croire. Mais alors, qu'il descende au fond
de sa conscience, qu'il s'interroge, et qu'il
nous dise s'il croit, en toute sincérité, être
l'athlète qui doit assumer, dès aujourd'hui,
la tâche écrasante du relèvement de la na-
tion.
El si sa conscience répond non, aura-t-il
le courage de comprendre qu'il doit immo-
1er son orgueil au. salut public ?
J'ai peine à le croire.
Mais la Chambre est maîtresse de la si-
tuation. M. Clemenceau bravait jadis la
tempête. S'il faut, pour des considérations
supérieures, lui signifier Vordre de départ,
point besoin de tempête. Une ondée n J sut-,
fira. -
Camille DEVILAR.
*"* » -
SEANCE DE L'APRÈSl\'lIDI
M. Clemenceau ne se plaindra pas. Il a
parlé hier devant une Assemblée nombreu-
se et attentive ; les tribunes même étant
remplies jusqu'à en craquer. Citait un bei
auditoire, vraiment, pour un président du
Conseil qui, ayant fait et gagné la guerre,
tenait à expliquer au pays comment il s'est
efforcé de faire la paix.
Le mieux eût été sans doute de nous faire
connaître les impérieuses raisons en vertu
desquelles M. Clellleiiceau, tint à négocier
sans le concours des Chambres. -. -
Mais laissons parler le chef dlU: gouverne-
ment. Le voici qui gravit, d'un pas lourd,
les marches de la tribune. Il étole un dos-
sier peu volumineux. A quoi lui servira-t-il ?
Pas à grand chose, sans doute. M. Clemen-
ceau s'entend à l'improvisation. féroce ; il
ne sait plus — mais le sût-il jamais ? -
utiliser la méthode dans un discours.
La révolution qui commence
Le président du Conseil débute par um
aveu qui contredit - naturellement - ses
paroles d'hier.
Hier, c'était la faute de la Commission et
de la Chambre si le débat sur le traité se
prolonge ainsi. Aujourd'hui, il convient que
la déférence du gouvernement envers les
orateurs inscrits est complice du retard ; il
ajoute que les discours de ses collaborateurs
n'ont pas abrégé l'affaire.
Pu'is on entend cette déclaration au moins
singulière, inexpliqué autant qu'inexplica-
ble :
M. Clemenceau. — J'ai maintenant à par-
ler, à mon tour, à la Chambre et, puisque
les élections approchent, au pays.
Est-ce encore un aveu ? Le gouvernement
entend-il faire de la discussion des clauses
du traité une machine électorale ? Ce serait
bien du pur Clemenceau. Lui seul peut en-
fanter pareilles idées.
C'est mû par des raisons électorales, -sans
doute, qu'il nous parle doe la' Révolution,
M. Clemencau. - On a parlé d'une révolu-
tion ouverte par la guerrew Permettez moi de
m emparer de ce mot et de vous dire qu'à WùD-
sens, c est en effet une révolution qui com-
mence, mais qu'il est difficile d'en prévoir ni
les pliases ni ',,i durée, car c'est une révolution.
au sens vrai du mot, qui implique un change-
ment de l'homme profond.
Au sortir de la guerre que nous a imposée
l'Allemaigne, nous vous apportons un texte de
traité qUI a la prétention de l'inaugurer, cette
révolution,
Erreur de parole
et encore de jugement
La tribune ne fut pas favorable, hier, m,
président du Conseil. Goûtons ceci :
M. Clemenceau. — Le traité est un bloc, ¡;n
ensemble, sur lequel vous avez à voter, san*
pouvoir l'amender dans le détail Or, qu'est-il
arrivé ? 1 ,
En dehs de M- le rapporteur général et de
At. le président du Conseil {tntcri uptions), par-
don, de M. le > président de la commission -
c-e n'est qu .uii Japsus, ce n'est pas un« insulte 1
M. Louis Baithou, rapporteur général de ia
commission de la paix. - Peut-être une pro-
phétie ! (Sourires.;,
M. Je président du Conseil. - En dehors donc
de 1. le rapporteur général et de .Al. Je pré-
sident ; de la commission, on s'est ielr dans des
ciitiques de déta!il au tien d'aller à l'ensemble
, Je ne m'en plains .pas : la discussion qui
s est déroulée sur les clauses linam-ières a été
et sera des plus utiles, quoique des plus désa-
gréables — j emploie ce mot pouji- exprimer
qu'elle ne nous met pas, au dehors, dans la
situation de confiance financière où 1ie cou-
drclts nous voir.
- Voilà bien encore M. Clemenceau tout en-
lier. Les Louis Marin, les André Lefèvre.
f Vincent Auriol ont supplié le Gouverne.
ment de préciser une politique financière. Le
Gouvernement en a renvoyé l'étude sérieuse
sine die, en abusant, entre temps, des moing
excusables moyens dilatoires.
Aujourd'hui, M. Clemenceau incrimine la
critique. Qwi excès d'intolérance 1
Le crime contre la langue française
Oh ! que ce discours de M. Clemenceau
est donc passionnant à suivre. Quel acU
d'accusation pourrait être plus redoutable
contre le chef actuel du gouvernement ?
M: Clemenceau vient de faire appN à la
solidarité des peuples, puis il exalte le traité,
comme cela, par ds mots, sans aucun fait.
F dit à ses auditeurs : « C'est un bon traité,
vous serez contraints de le dire avec moi.
et, J'eutTés chez vous^ de vous vanter de
l'avoir voté. » •
Puis il répond au reproche d'avoir aban.
dcnnê la langue française : (( Il n'a pa
dépendu de moi, dit-il, que l'Angictfii e
soit augmentée, depuis le XVlit® siècle, fl-(
deux ou trois cent millions d'homme et pou-
vais-je empêcher les hommes qui la repré-
sentent aujourd'hui de me dire que leur lan-
gue est, à. présent, la plus répandue à la
surface du globe ! »
Comment 1 pas un député ne s'est levé ù
ce moment pour interrompre le pré,-;ÍJl'iat du
Ct.-nse*tl et pour lui dire :
« Monsieur, une langue ne se propage pas
seulement par la population. Elle S.'l"l"nd r¡;¡J'
le livre, par le journal. Or, n'est-ce P3„s vous
qui, lorsque le papier est bon marché à Lon-
dres, faites frapper de la triple taxe
ad valorem ces mêmes papiers si nous vou-
lons les importer et nous en servir pour
diffuser la langue et la pensée françaises ?
« Vous voulez donc, et vous vous y em-
ployez que battus par le nombre des An glu-
Saxons nous soyons battus encore par },"1I1',.
publications ?
« Nierez-vous, cette fois, que ce soit vofrd
œuvre ? »
La manœuvre politique
M. Clemenceau, sentant la Chambre l'roida
h l'endroit de ses explications — elle était en
droit de l'être — tenta de l'éveiller par l'ap-
pel aux haines politiques.
M. Clemenceau. — J'ai fait tout ù l'heure '*
bilan de nos revers ; il en est un qui m'a-1
peut-être plus pénible à supporter que tous 1rs
autres. :\ous' avons eu, à un moment donné,
à lutter contre un parti de compromission aveo
les. Allemands, Je ne veux pas dire de soumis- -
sion, mais la pente est glissante, et ion se
réveille un jour au bout de la planche.
M. RenaudeJ. — C'est bien obscur : Brint.,
M. Jacques Piou —Tout le monde a compris,
M. le président du Conseil. — Je vois ctatr: t
ma lanterne. Je veux parler des arrangements
avec l'Allemagne au sujet du Congo. Non pail
que je les condamne en eux-mêmes ; ce qur je
condamne c'est la fajon dont ils nous fuiieiit
imposés, caf. ils nous donnaient le sentiment
d'une défaillance morale..,
M. Renaudel. - - Mieux valait la - guerre 1
(Bruit.)
M. Franklin-Bouillon. — M. Lebrun n'a rien
à dire ? (Bruits et interruptions.)
M. Renaudel. — Et Al, Tardiez négociait fc
N'goko Sangha ? (Bruit.)
0 surprise ! le président du Conseil reçoit
sur le nez, et durement, par ces interrup-
tions, le. gravier qu'il a jeté en l'air. Vite,
il changée d'attitude et de propos. Il dit que
l'Allemagne voulait germaniser le monde.
Son lieu commun est une piètre diversion.
L'orateur n'a plus rien, mais rien d: tow
d'un orateur.
A bâtons rompus
A partir de ce moment, le présidem dv
Conseil laisse vagabonder sa pensée. et le
parole suit la pensée. Ce n'est pas un dis
cours ; c'est une longue série de boutades
Suivons d'ailleurs l'orateur.
M. le Président dû Uonsen. - Je compte sut
l'Amérique dim sla paix. C'est elle qui a fait
triompher à Paris la Société des Nations. C'N'
la clef qui peut ouvrir la porte sur le ,mand£
nouveau.
Le succès suivra-t-il ? Je ne sais pas.
La Société iles -Nations ? N'y a-l-il pas. du
côté de l'Adriatique, des sociétaires qui ne s4
regardent pas d un très (bon œil ? (Sourires.!
Nous faisons ce que nous pouvons pour les
accorder, et ils sont prêts à nous entendre.
JCHlis heureux d'exprimer i' notre graiitud»
à leurs Gouvernements. T:é- bien ! très bien !;
Mois à certains moments, il arrive. W-l-as
f-omnie chez nous, que les li^-tivernés !• ur
échappent. {Sourires.)
Notre désir ardent est que 1:1 s. -.-t' des Na-
tions réussisse, et si nous pouvions akler M. le
président VVilson, comment que ce fOt, BOUC
;
AUGUSTE VACQUERIE
Fondateur (1869) ,
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Nord : 24-90, 24-91
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EDMOND DU MESNIL
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TRIBUNE LIBRE
FIUME.
Gabriele d'Annunzio est un
très grand poète,c'est entendu.
Mais, après la longue guerre
que nous avons soutenue con-
tre les ambitions illégitimes de
l'Allemagne, et pour la défen-
se du Droit, lui est-il permis de conqué-
rir, par une surprise barbare, et sans au-
cune peine, un territoire et une ville qui
depuis trop longtemps sont entre deux
peuples rivaux un objet de discussion et
même de discorde ?. D'Annunzio a-t-il
oublié que, par la force, les Etats ne
fondent rien de durable ? Préfére-t-il,
en fils de Machiavel, que l'Italie ne vive
plus que selon son bon plaisir ?
Quels sont donc ce pays d'Istrie, cette
ville de Fiume tant convoités ? C'est une
contrée assez peu fréquentée des touris-
tes. Ceux qui passent par Trieste ont
rarement l'idée de pousser vers le sud,
et c'est dommage. Dès les frontières de
l'Istrie, le sol change d'aspect : le
Karst, longue chaîne de plateaux arides
et tourmentés, barre la presqu'île au
nord-est, de Goritz à Fiume. Pays sau-
vage, semé de pierres, à peine couvert
de broussailles, désolé en outre par la
glaciale bora, — l'antique Borée, —
dont le souffle violent peut renverser les
plus lourdes voitures. Mais que de mer-
veilles dissimulées au sein de ces ro-
chers ! Entonnoirs, cavernes, cours
d'eau souterrains.
Fiume, au fond du Quarnero, fait pen-
dant à Trieste : entre les deux s'allonge
la presqu'île d'Istrie.
Un archipel, dont Veglia et Cherso
sont les îles les plus grandes, couvre le
port de Fiume de môles naturels contre
les assauts de la mer et les vents du
large. Dans un site pittoresque, de cli-
mat doux et salubre, sous un ciel pres-
que toujours bleu, Fiume est une cité
bénie que la nature prédestine à être
une des reines de l'Adriatique.
Il y a la vieille ville et la ville neuve.
C'est la première qu'Elysée Reclus,ap-
pelle « la cité romaine ». Fiume, cJest,
Trieste en petit.
Même dessin de construction, depuis
les imposantes bâtisses de la ville neu-
ve au bord de la mer, derrière l'enchevê-
trement confus des mâts et des corda-
ges, parmi les bâtiments des docks jus-
qu'au vieux château de Tersatto sur la
colline, où l'on grimpe par les rues
étroites à escaliers de l'ancienne cité.
Même aspect de la ville à l'intérieur,
moins animé pourtant et moins riche,
malgré le grand développement du com-
merce et de l'industrie, les célèbres fa-
briques de torpilles Withead, les impor-
tantes constructions de l'Académie de
Marine et du Municipio. Même Corso
aux élégants magasins qui, depuis. les
Halles où frétille toute une population
des mers aux mille formes bizarres dans
un fouillis de chairs miroitantes, va jus-
qu'au canal de la Fiumara, plein de ba-
teaux chargés, de bois, bordé de vieux
arbres qui ombragent les boutiques bas-
ses et obscures, presque sous terre, et
les baraques en plein vent des petits
commerçants et des brocanteurs, avec
leurs étalages de légumes, de fruits, de
mercerie, d'ustensiles et de défroques
de toute espèce. De Fiume, ainsi que de
Trieste, nous parviennent en France les'
bois qui servent, dans notre Midi, à la
fabrique des barriques et des foudres.
Peu de monuments anciens. Certes,
Rome a laissé ici la trace de sa forte
main, mais une trace tellement mépri-
sée par les siècles ! Où d'ailleurs, dans
le monde connu de Rome souveraine, ne
irouvera-t-on pas des empreintes du gé-
nie conquérant de l'Empire ?
Montons à Tersatto par cet extraordi-
naire « chemin de croix », un escalier
de quatre cents marches. Voici la petite
église byzantine où sont ensevelis les
comtes Frangipani, seigneurs de Tersat-
to, et qui attire par les grâces de sa
Madone tant de pèlerinages. De nom-
breux ex-voto, la plupart tableaux de
naufrages, sont suspendus aux voûtes
des deux nefs.
Proche de l'église, le château élève
uës murailles massives aux tours à demi
ruinées.Une belle porte Renaissance don-
me accès dans l'enceinte- Au milieu se
dresse la colonne érigée par les Français
à Napoléon sur le champ de bataille de
Mareugo, et qui fut transportée ici par
la famille de l'amiral Nugent, actuelle
propriétaire du château.
Avant la guerre, les Italiens, au nom-
bre de vingt mille sur les trente mille
habitants de Fiume et de sa banlieue, ne
faisaient point de politique irrédentiste.
Mais les Croates y combattaient de tou-
tes leurs forces l'influence hongroise.
A l'heure présente, les Italiens sont
encore, si de l'heure fragile j'écarte l'a-
venture de d'Annunzio, les « maîtres du
« municipe et des affaires ». Mais ils
sont cernés par. les Croates et les Slovè-
ns qui tiennent l'amphithéâtre monta-
gneux et le Karst. Hier, pomme de dis-
corde entre Croates et Hongrois, Fiume
l'est aujourd'hui entre Croates et Ita-
liens. ,
Pour l'instant, je veux oublier la
plainte ou la convoitise des hommes Et
de la terrasse du château de Tersatto, je
regarde le merveilleux panorama. Toute
l'Istrie s'étale sous mes yeux comme
une carte en relief, barrée en arrière,
au-dessus de Fiume, par les montagnes
dentelées de la Croatie et tout au fond,
au nord, par les Karawankou. La côte
de l'ouest, peu accidentée, se montre
bordée de villes, de bourgades, à demi
perdues dans la brume, depuis Trieste
jusqu'au port lointain de Pola. A l'est,
au contraire, la vague ne heurte que des
falaises ; et seulement vers le nord,
quelques bourgades apparaissent parmi
les lauriers et les oliviers.
Tandis que la clarté mouvante des
îles violettes se perd dans l'horizon, il
monte toujours des eaux profondes de
la jner comme un mystérieux chant de
sirène, une voix d'amour si séduisante
dans le soleil,- et si perfide.
GEORGES BEAUME.
--
EDITORIAL
L'épilogue
Nul ne songeait plus à
contester l'extrême débilité
du traité de faix.
Ses parrains s'efforçaient
de le soutenir avec des bé-
quilles.
Son Père, le docteur, Clemenceau, hé-
sitait à formuler son diagnostic.
Il a parlé. Hélas '!
On prétend que M. le président du
Conseil a eu le dessein. de sauver son
enfant P.
bzconsciemmad, il l'a écrasé par son
discours même.
Ce fut un spectacle attristant que ce
petit corps malingre présenté par les
mains inhabiles d'un vieillard très las.
Les vrais amis de M, Clemenceau sont
décidément ceux qui lui conseillaient le
repos et la retraite glorieuse après les
fêtes de Strasbourg !
A la manière dont M. Clemenceau a
parlé du traité, on se rend compte pré-
cisément de la façon dont il le négocia.
Un beau verbalisme patriotique, une
forte poussée d'orgueil, une absence to-
tale de méthode par quoi la légèreté
d'esprit aboutit à l'incohérence des
actes.
M. Loucheur, plutôt que d incliner
son génie réalisateur à la diminution de
la vie chère, disait, récemment •
« le vous dois la vérité ; la vie est et
restera chère. »
A son tour, M. Clemenceau a déclaré :
« Le traité est plein d'erreurs, de lacu-
nes, de dangers. Mais je vous dois la
vérité : il restera toujours ainsi. »
Aux hmmes de lutter pour le rendre
meilleur,
Bien. Après quatre années infernales
d'une guerre atroce, nouvelles luttes
pour établir la paix.
Ce n'est peut-être pas ainsi que l'hu-
manilé. pantelante concevait le désar-
mement par la paix des peuples.
'El la France, qui attendit trois ans
le secours anglo-saxon, en contenant la
ruée des barbares sur sa poitrine san-
glante, n'a pas trouvé davantage en ces
négociations une paix française digne
de ses armes, et telle qu'elle Ventrevit
dans l'aube claire de l'armistice.
Il taut parler franc.
L'empirisme de M. Clemenceau, n'est
parvenu ni à conclure une paix dé sé-
curité ni à préparer une reconstitution
nationale rapide.
Situation exterieure et intérieure res-
tent assombries par des nuées d'orage.
M. Clemenceau prétendait les faire
crever comme un Titan dressé contre le
ciel.
Elles commencent à crever.., sous lui.
EDMOND DU MESNIL.
La Pensée des Autres
La cause la plus profonde de l'affai-
blissement de notre action, c'est que no-
Ire action parlementaire a été tou-
jours partielle.
C'est une question de discipline.
Ce Congrès ne doit pas être une co-
médie.
J'ai résisté au flot d'enthousiasme
aveugle, j'ai fait mon devoir,
-1 Donnez aux hommes qui se battent
pour des idées, des armes contre ceux
qui abandonnent ces idées.
Je ne veux plus voir ici des ambitions
de profiteurs.
Je ne veux pas la dissociation des
forces radicales par l'action gouverne-
men.
Il tant avoir le courage de triompher
Ou de tomber.
FRANKUN-BOUHLLON.
On dit.
■ '»■ - ..-
En Passant
Recommandation ;
-" : - - f.. - .!
On sait avec quelle facitité, pour ne pas dire
avec quelle légèreté, les parlementaires apos-
tillent des demandes et S) prodiguent en ie-
commandalion.
M. Clemenceau lui-même donne dans ce tra-
vers, et lors de sa première.. présidence du Con-
seil, il lui advint une mésaventure fort plai-
sante.
Alors qu'il siégeait au Sénat, un conseiller
de préfecture en mal d'avancement lui avait
demandé son appui auprès du ministre de l'in-
térieur.
M. Clemenceau, avec une bonne grâce par-
faite, écrivit un mot de recommandation. cha-
leureux.
Le conseiller de prélecture attendait toujours
sa nomination de sous-'préfet. Il vint un jour
au Sénat, se plaindre auprès de son éminent
protecteur. -
— C'est bien regrettable, lui dit M. Clemen-
ceau, en manière de politesse, d'autant plus
que vous paraissez tout à fait digne de la
fonction que vous sollicitez. Mais que voulez-
vous, les ministres sont ainsi.
Et il se débarrassa de l'importun.
Mais lorsque M. Clemenceau devint prési-
dent du Conseil, ce fut une autre affaire.
Le conseiller de préfecture ne lit qu'un bon
place Beauvau et sollicita une .audience.
Le président - qui ne se souvenait même
plus de son nom — absorbé par mille affaires
importantes, reçoit le visiteur entre deux
Dortes.
- Je viens, monsieur le président, dit le
conseiller la bouche enfarinée, vous rappeler
ma nomination.
- Quelle nomination ?
— Ma sous-préfecture.
- Votre sous-préfecture ? 11 n'y a pas de
vacances. Et puis je ne connais .pas votre
dossietr. Quels sont vos titres?. Quelles sont
vos recommandations ?
— Oli ! j'ai une recommandation de tout pre-
mièr ordre, murmura mystérieusement le sol-
liciteur en se retirant. Jo vous prie simple-
ment, monsieur le président, de prendre con.
naissance de mon dossier. Vous verrez 1
— C'est bien, je verrai. et je vous ferai
adresser ma réponse.
Et le président du Conseil de bougonner :
« Qui est-ce qui a bien pu me recommander un
pareil raseur »
Il demanda le,dossier et fut un instant inter-
loqué en y trouvant sa propre lettre. Mais
comme, chez M. Clemenceau l'esprit ne perd
jamais ses droits, il s'en tira, dit-on, piar une
boutade charmante.
« Monsieur, écrivit-il au solliciteur, j'ai par-
couru votre dossier. La recommandation dont
vous m'avez parlé n'est pas suffisante à mes
yeux Faites-vous appuyer par une personna-
lité qui ait le temps d'examiner plus sérieuse-
ment vos titres. »
Jean d'Aigremont.
e
Autrefois
La riposte du factionnaire -
Sous la Restauration, Désaugiers, le
chanteur bien connu, l'auteur de M. et
Mme Denis, étant grenadier dans la garde
nationale, se trouvait de faction aux laite-
ries. Suivant sa consigne, il barre la route
à un passant, en lui- disant :
- On n'entre pas ici avec des chiens.
- Oh ! n'ayez pas peur, lui dit le pas-
sant, mon chien n'a pas de fusil.
— N'ayez pas peur non plus, répondit Dé-
saugiers. mon fusil n'a pas. de chien.
Antisémitisme
Quand on annonça au maréchal de la
Ferté, gouverneur de Metz, la visite des
syndics de la communauté juive, il s'écria :
— Je ne veux pas recevoir ces coquins
qui ont fait mourir notre Sauveur.
— Mais, monseigneur, ils apportent un
présent de quatre mille pistoles.
— Oh alors, faites-les entrer. Après tout,
quand ils Vont fait mourir, il n'était pas
encore Dieu !
Sb
Aujourd'hui
Anecdote électorale
Mgr Freppel, qui fut aussi député, était
un bon vivant qui excellait dam les anec-
dotes électorales.
Il aimait conter, entre autres, celle-ci :
— « J'ai rencontré un fermier de mon
diocèse.
« Eh bien ! vous avez voté dimanche.
dernier ?
« - Moi ?. Oh ! non, par exemple.
« — Et pourquoi ?
(f. — Pourquoi, parce que maintenant on
est libre.
« — Comment libre ?
« —Mais oui, on est libre. Sous-l'Em-
pire, il fallait marcher. Il y avait le mairc,
et l'instituteur, et le garde-champêtre qui
vous tracassaient et qui vous faisaient
des misères si on ne mettait pas le « bon »
bulletin, mais, à présent, c'est fini. Te-
nez, dimanche,j'ai vendu ma vache ; faillie
mieux ça (lue d'avoir voté.
« Je n'ai pu le tirer de là. Il était libre
et il. avait vendu une vache !. »
Botaniste royal
Une jolie anecdote sur le roi de Suède est
contée par M. Gaston Bonnier, membre de
l'Institut..
M. Bonnier, voici quinze ans, au cours
d'un voyage d'étulles, se promenait en her-
borisant, aux environs de Stockholm ; tout
à coup, à un détour du chemin, il aperçut
un autre naturaliste qui, lui aussi, re-
cueillait des plantes dans un herbier ; ce
naturaliste était suivi de sa femme, montée
sur un petit âne. Les deux naturalistes en-
trèrent en conversation. Mais l'heure dit
défeuner sonna :
- Ne connaissez-vous pas une auberge
dai\s les environs ? demanda M'. Gaston
Bonnier à l'inconnu.
— Mais pourquoi ne d.tieur¡.criez-vous pas
chez moi, en compagnie de ma femme ?
répliqua l'inconnu. -
M. Bonnier accepta.
On était arrivé devant lé palais du roi
de Suède ; l'inconnu s'arrêta, lit ouvrir les
portes et pria M. Bonnier d'entrer en lui di-
sant :
--- Que voulez-vous ? je suis le roi de
Suède, je n'y peux rien. Je suis bien
obligé de vous inviter dans mon palais.
Et, durant tout le déjeuner, le roi ne parla
que de botanique au membre de l Institut
de France.
Le Tainin.
[ Le règne du désordre
:
Une crise redoutable
Les Amicales d'instituleurs viennent d'a-
dhérer à La Confédération générale du tra-
vail.
Les fonctionnaires de l'Etat, des deparle-
ments et des communes menacent de se
mettre en grève le VT octobre et adressent
un ultimatum aux pouvoirs puiblies.
MM. Clemenceau et Mandel. auront beau
ricaner : « Rond!s-de-cuir en révolte ! 1) *
Ces manifestations sont le symptôme d'un
état social grave.
Les fonctionnaires français étaient parmi
les plus probes, les plus instruits, les plus
disciplinés et les. moins payés du monde.
Ils faisaient honneur à leurs fonctions avec
des salaires' de misère. Ils formaient avec
me dignité et une modestie admirables un
groupe important de cette classe moyenne,
étai de la société française.
Après la guerre, avec l'apparition de la
vie chère, leu'rs' traitements de misère devin-
rent des traitements die famjne.
Un gouvernement soucieux d'équité, pré-
occupé du bien public, aurait dû spontané-
ment étudier une mesure générale pour don-
ner satisfaction aux fonctionnaires.
Au lieu de cela, Vempirisme de nos mal-
tres qui exclut toute vue d'ensemble, et qui
«le .plaît en règlements de détails, a pris à
tâche de rebuter, de froisser, d'exaspérer les
fonctionnaires.
Il a fait des concessions de bout de chan-
delles ; donné des promesses, sitôt reprises.
Les lenteurs parlementaires s'en sont mê-
lées. Le Sénat, inconscient de l'évolution so-
ciale et de l'urgence de ces problèmes' d'a-
près-guerre, a tâtonné, teegiversé, attendu.
Depuis le 6 août, les fonctionnaires atten-
dent le vote d'une loi qui doit améliorer leur
sort.
Ils perdent patience. La misère est mau-
vaise conseillère.
Ainsi, le gouvernement, p$r: son impré-
voyance coupable, son inertie malfaisante,
vient d'un coup d'aggraver la crise de la
fonction publique en France.
Il recrute de ses propres mains les cadres
de la Confédération générale du travail ; il
sème la défiance et le mécontentement par-
mi les classes moyennes ; il dresse les cor-
porations contre l'Etat..
Belle besorîne, n'est-ce pas ? Casse-cou !
, LE CONGRÈS
de la Ligue des Droits de l'Homme
*
Le Congrès de la Ligue des Droits de
l'Homme se tiendra à Strasbourg pendant
les fêtes de Noël.
L'ordre du jour comporte trois questions ;
L'examen critique dlu traité de paix.
Les transformations de l'idée de l'Etat :
syndicalisme, soviétisme, démocratie.
Le vote dæ femmes. U - -
Les combattants
et les élections
Décisions du Comité d'entente
Le Congrès du Parti radical a demandé,
on le sait, que les poilus soient largement
représenlés, dans l'es' prochaines listes élec-
torales du Parti, et voici que le comité d'en-
tente des associations de combattants a pris
la décision suivante ;
Les membres du Comité d'enlente, réunis le
23 septembre, ont accepté d'un commun accord
la ligne de conduite suivante, comme consé-
quence directe et pratique du manifeste cru
18 septembre J?li) :
1° Chaque parti politique est invité ù sou-
mettre audit Comité d'entente ses listes lie
candidats de Paris et de la province ;
2° Ces listes devront contenir une proportion
de 50 de combattants ;
3° Le Comité d'entente se déjend de soutenir,
et ne soutiendra aucune Itcte, mais il dénoncera
toutes celles nui ne contiendraient pas la part
proportionnelle de candidats fixée plus haut. II
se réserve le droit d'examiner le cas des can-
didats qui, aptes ù servir, se sont soustraits à
ce devoir ;
4° Le Comité d'entente demande aux groupes
de province des différentes associations de
combattants de lui signaler les listes dont Jo.
composition ne serait pas conforme aux clau-
ses du présent programme ;
5° Chaque association d; combattants con-
tractante reste li.lx'c de proposer ù ses rnem-
fbre toutes directives complémentairtes, sous
réserve qu'elles nie seront pas en opposition
avec les rromts Visés ci-dessus.
Adresser toutes communications à M. Charles
Bertrand, 41, rue de Provence, Paris.
Le Comité d'entente réunit, on le sait,
toutes les associations de combattants.
-
Les Prochaines Elections
DANS LES VOSGES
La Fédération radicale et radicale-socia-
liste des Vosges s'est occupée, dans sa der-
nière réunion, de la tactique électorale dans
le département et du choix des candidatures
aux prochaines élections législatives.
Ne s'attachant nullement aux questions de
personnes, elle ne s'est préoccupée que de
réaliser entre républicains une entente fé-
conde qut permettra aux Vosges de n'en-
voyer au Parlement que des représentants
républicains.
C'est dans cet esprit qu'elle a voté à l'una-
nimité l'ordre du jour suivant :
« La Fédération radicale et radicale-socia-
liste des Vosges, réunie à EpinàJ, confirme
sos décisions antérieures dont le but et le
mérite sont d'écarter les combinaisons lou-
ches et les alliances équivoques.
(t Considérant, en ouitre, qu'il est urgent
de faire connaître -au. parti républicain les
résolutions prises par ses délégués au sujet
des prochaines élections législatives ;
« Qu'il y a lieu, d'autre part, de ne pré-
senter à. ces élections qu'une seule liste ré-
publicaine formant le bloc de gauche con-
tre toutes les résistances de droite ; : ;
tI Considérant aussi qu'il est nécessaire de
mettre un terme à des hésitations, à des
atermoiements qui pourraient nuire à la cau-
se républicaine ;
Il Décide de prendre l'initiative de la cons-
titution d'une liste réalisant l'union de tous
les républicains de gauche et de soumettre
cette liste, d'ans un délai très rapproché, à
l'approbation d'un Congrès départemental
loyalement organisé. »
A LA CHAMBRE
————— ————
os -91 IC3 ions 9
■■■■ ■ > < —i —
Devant une Chambre attentive, mais déçue,
M. Clemenceau tente d'expliquer ses négociations. —
Faible discours. — Nul n'en propose l'affichage.
1
M. Clemenceau est monté hier à la tri-
bune de la Chambre. Notre Premier dut y
retrouver en pensée le. souvenir des grands
succès passés. Comme les journées qui ont
consacré son prestige paraissent déjà loin-
taines, et combien peu cette tribune, hier,
ressemblait à un piédestal !
Nous ne voulons être ni cruel, ni injuste.
Nous avons, par contre, le devoir impé-
rieux de dire Ce qui est et nous le dirons
sans ménagement, mais avec courtoisie. Il
faut parler, parce qu'au-dessus des hommes
il y a la France, cette France dont le ma-
laise est profond et envers qui nous serions
coupables si nous tentions d'en dissimuler
les causes
Où sont les séances fameuses au cours
desquelles des orateurs indomptables, des
Jaurès, des Briand, des Barthou, des Cle-
menceau tenaient tété à l'Assemblée dé-
chaînée, résistaient magnifiquement à la
tempête des voix, au vacarme assourdis-
sant des pupitres et repartaient, au pre-
mier mouvement d'accalmie, maîtres de
leur pensée, de leurs parâtes et el eu.x-me-
mes ? Mais où sont les neiges d'autan ?
M. Clemenceau fut de ceux-là. Sa présence
à la tribune, hier, nous a expliqué à elle
seule bien- des lacunes du traité de paix
qu'il y vendit défendre. et dont il n'a..nen
dit — ou presque.
Nous avons été traité en ennemis par la
présidence du Conseil, parce que, patriotes
nous aussi, nous avons osé dire que la
République n'est pas. tntire pour la dicta-
ture et que le régime républicain doit-être
celui de la franchise et de la clarté. Qui
oserait nous condamner, depuis hier ?
Quand nous avons douté de la souplesse
et de la force physique et morale de M. Cle-,
menceau dans la conduite des négociations,
nous t-rompions-nous ? Deux mille témoins
viennent de constater combien nous avons
dit vrai.
Le président de guerre a méconnu. son
heure. Après l'enthousiasme mondial dé-
chaîné par l'agenouillement de l'Allemagne
sollicitant l'armistice, son apothéose était
faite. Il devait rentrer sous sa tente, partir
en pleine gloire, se faire regretter.
Pour l'avoir conseillé, nous avons été
considéré en factieux. Où en arrive-t-on ?
Pour la première fois une Assemblée
française a fait à un grand et glorieux vieil--
lard l'aumône de la pitié. Céltlit un spec-
tacle triste jusqu'au degré suprême que
d'observer à la tribune et de suivre dans
S-apc-nstie confuse, exprimée paroles trop
souvent assourdies et inintelligibles ce maî-
tre de nos destinées qu'une syncope faillit
abattre devant ses auditeurs.
Le chêne penche-t-il soudainement ? Nous
ne le croyons pas. A la Conférence, que les
plénipotentiaires y fussent nombreux ou
réduits à quatre, les discussions furent, à
n'en pas douter, plus animées et plus fati-
gantes que ne le fut la séance d'hier, ren-
due facile par la complaisance des députés,
unanimes dans la plus bienveillante dès
attitudes.
Et pourtant, M; Clemenceau n'a pas su
feuilleter son dossier. Il n'a pas su se justir
fier des critiques énoncées depuis tant de
IO'jrs. II a parlé, parlé. Qu'avons-nous ap-
pris ? Rien.
Le président du Conseil aime la France
par-dessus tout, dit-il. Nous voulons le
croire. Mais alors, qu'il descende au fond
de sa conscience, qu'il s'interroge, et qu'il
nous dise s'il croit, en toute sincérité, être
l'athlète qui doit assumer, dès aujourd'hui,
la tâche écrasante du relèvement de la na-
tion.
El si sa conscience répond non, aura-t-il
le courage de comprendre qu'il doit immo-
1er son orgueil au. salut public ?
J'ai peine à le croire.
Mais la Chambre est maîtresse de la si-
tuation. M. Clemenceau bravait jadis la
tempête. S'il faut, pour des considérations
supérieures, lui signifier Vordre de départ,
point besoin de tempête. Une ondée n J sut-,
fira. -
Camille DEVILAR.
*"* » -
SEANCE DE L'APRÈSl\'lIDI
M. Clemenceau ne se plaindra pas. Il a
parlé hier devant une Assemblée nombreu-
se et attentive ; les tribunes même étant
remplies jusqu'à en craquer. Citait un bei
auditoire, vraiment, pour un président du
Conseil qui, ayant fait et gagné la guerre,
tenait à expliquer au pays comment il s'est
efforcé de faire la paix.
Le mieux eût été sans doute de nous faire
connaître les impérieuses raisons en vertu
desquelles M. Clellleiiceau, tint à négocier
sans le concours des Chambres. -. -
Mais laissons parler le chef dlU: gouverne-
ment. Le voici qui gravit, d'un pas lourd,
les marches de la tribune. Il étole un dos-
sier peu volumineux. A quoi lui servira-t-il ?
Pas à grand chose, sans doute. M. Clemen-
ceau s'entend à l'improvisation. féroce ; il
ne sait plus — mais le sût-il jamais ? -
utiliser la méthode dans un discours.
La révolution qui commence
Le président du Conseil débute par um
aveu qui contredit - naturellement - ses
paroles d'hier.
Hier, c'était la faute de la Commission et
de la Chambre si le débat sur le traité se
prolonge ainsi. Aujourd'hui, il convient que
la déférence du gouvernement envers les
orateurs inscrits est complice du retard ; il
ajoute que les discours de ses collaborateurs
n'ont pas abrégé l'affaire.
Pu'is on entend cette déclaration au moins
singulière, inexpliqué autant qu'inexplica-
ble :
M. Clemenceau. — J'ai maintenant à par-
ler, à mon tour, à la Chambre et, puisque
les élections approchent, au pays.
Est-ce encore un aveu ? Le gouvernement
entend-il faire de la discussion des clauses
du traité une machine électorale ? Ce serait
bien du pur Clemenceau. Lui seul peut en-
fanter pareilles idées.
C'est mû par des raisons électorales, -sans
doute, qu'il nous parle doe la' Révolution,
M. Clemencau. - On a parlé d'une révolu-
tion ouverte par la guerrew Permettez moi de
m emparer de ce mot et de vous dire qu'à WùD-
sens, c est en effet une révolution qui com-
mence, mais qu'il est difficile d'en prévoir ni
les pliases ni ',,i durée, car c'est une révolution.
au sens vrai du mot, qui implique un change-
ment de l'homme profond.
Au sortir de la guerre que nous a imposée
l'Allemaigne, nous vous apportons un texte de
traité qUI a la prétention de l'inaugurer, cette
révolution,
Erreur de parole
et encore de jugement
La tribune ne fut pas favorable, hier, m,
président du Conseil. Goûtons ceci :
M. Clemenceau. — Le traité est un bloc, ¡;n
ensemble, sur lequel vous avez à voter, san*
pouvoir l'amender dans le détail Or, qu'est-il
arrivé ? 1 ,
En dehs de M- le rapporteur général et de
At. le président du Conseil {tntcri uptions), par-
don, de M. le > président de la commission -
c-e n'est qu .uii Japsus, ce n'est pas un« insulte 1
M. Louis Baithou, rapporteur général de ia
commission de la paix. - Peut-être une pro-
phétie ! (Sourires.;,
M. Je président du Conseil. - En dehors donc
de 1. le rapporteur général et de .Al. Je pré-
sident ; de la commission, on s'est ielr dans des
ciitiques de déta!il au tien d'aller à l'ensemble
, Je ne m'en plains .pas : la discussion qui
s est déroulée sur les clauses linam-ières a été
et sera des plus utiles, quoique des plus désa-
gréables — j emploie ce mot pouji- exprimer
qu'elle ne nous met pas, au dehors, dans la
situation de confiance financière où 1ie cou-
drclts nous voir.
- Voilà bien encore M. Clemenceau tout en-
lier. Les Louis Marin, les André Lefèvre.
f Vincent Auriol ont supplié le Gouverne.
ment de préciser une politique financière. Le
Gouvernement en a renvoyé l'étude sérieuse
sine die, en abusant, entre temps, des moing
excusables moyens dilatoires.
Aujourd'hui, M. Clemenceau incrimine la
critique. Qwi excès d'intolérance 1
Le crime contre la langue française
Oh ! que ce discours de M. Clemenceau
est donc passionnant à suivre. Quel acU
d'accusation pourrait être plus redoutable
contre le chef actuel du gouvernement ?
M: Clemenceau vient de faire appN à la
solidarité des peuples, puis il exalte le traité,
comme cela, par ds mots, sans aucun fait.
F dit à ses auditeurs : « C'est un bon traité,
vous serez contraints de le dire avec moi.
et, J'eutTés chez vous^ de vous vanter de
l'avoir voté. » •
Puis il répond au reproche d'avoir aban.
dcnnê la langue française : (( Il n'a pa
dépendu de moi, dit-il, que l'Angictfii e
soit augmentée, depuis le XVlit® siècle, fl-(
deux ou trois cent millions d'homme et pou-
vais-je empêcher les hommes qui la repré-
sentent aujourd'hui de me dire que leur lan-
gue est, à. présent, la plus répandue à la
surface du globe ! »
Comment 1 pas un député ne s'est levé ù
ce moment pour interrompre le pré,-;ÍJl'iat du
Ct.-nse*tl et pour lui dire :
« Monsieur, une langue ne se propage pas
seulement par la population. Elle S.'l"l"nd r¡;¡J'
le livre, par le journal. Or, n'est-ce P3„s vous
qui, lorsque le papier est bon marché à Lon-
dres, faites frapper de la triple taxe
ad valorem ces mêmes papiers si nous vou-
lons les importer et nous en servir pour
diffuser la langue et la pensée françaises ?
« Vous voulez donc, et vous vous y em-
ployez que battus par le nombre des An glu-
Saxons nous soyons battus encore par },"1I1',.
publications ?
« Nierez-vous, cette fois, que ce soit vofrd
œuvre ? »
La manœuvre politique
M. Clemenceau, sentant la Chambre l'roida
h l'endroit de ses explications — elle était en
droit de l'être — tenta de l'éveiller par l'ap-
pel aux haines politiques.
M. Clemenceau. — J'ai fait tout ù l'heure '*
bilan de nos revers ; il en est un qui m'a-1
peut-être plus pénible à supporter que tous 1rs
autres. :\ous' avons eu, à un moment donné,
à lutter contre un parti de compromission aveo
les. Allemands, Je ne veux pas dire de soumis- -
sion, mais la pente est glissante, et ion se
réveille un jour au bout de la planche.
M. RenaudeJ. — C'est bien obscur : Brint.,
M. Jacques Piou —Tout le monde a compris,
M. le président du Conseil. — Je vois ctatr: t
ma lanterne. Je veux parler des arrangements
avec l'Allemagne au sujet du Congo. Non pail
que je les condamne en eux-mêmes ; ce qur je
condamne c'est la fajon dont ils nous fuiieiit
imposés, caf. ils nous donnaient le sentiment
d'une défaillance morale..,
M. Renaudel. - - Mieux valait la - guerre 1
(Bruit.)
M. Franklin-Bouillon. — M. Lebrun n'a rien
à dire ? (Bruits et interruptions.)
M. Renaudel. — Et Al, Tardiez négociait fc
N'goko Sangha ? (Bruit.)
0 surprise ! le président du Conseil reçoit
sur le nez, et durement, par ces interrup-
tions, le. gravier qu'il a jeté en l'air. Vite,
il changée d'attitude et de propos. Il dit que
l'Allemagne voulait germaniser le monde.
Son lieu commun est une piètre diversion.
L'orateur n'a plus rien, mais rien d: tow
d'un orateur.
A bâtons rompus
A partir de ce moment, le présidem dv
Conseil laisse vagabonder sa pensée. et le
parole suit la pensée. Ce n'est pas un dis
cours ; c'est une longue série de boutades
Suivons d'ailleurs l'orateur.
M. le Président dû Uonsen. - Je compte sut
l'Amérique dim sla paix. C'est elle qui a fait
triompher à Paris la Société des Nations. C'N'
la clef qui peut ouvrir la porte sur le ,mand£
nouveau.
Le succès suivra-t-il ? Je ne sais pas.
La Société iles -Nations ? N'y a-l-il pas. du
côté de l'Adriatique, des sociétaires qui ne s4
regardent pas d un très (bon œil ? (Sourires.!
Nous faisons ce que nous pouvons pour les
accorder, et ils sont prêts à nous entendre.
JCHlis heureux d'exprimer i' notre graiitud»
à leurs Gouvernements. T:é- bien ! très bien !;
Mois à certains moments, il arrive. W-l-as
f-omnie chez nous, que les li^-tivernés !• ur
échappent. {Sourires.)
Notre désir ardent est que 1:1 s. -.-t' des Na-
tions réussisse, et si nous pouvions akler M. le
président VVilson, comment que ce fOt, BOUC
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