Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1896-10-24
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 24 octobre 1896 24 octobre 1896
Description : 1896/10/24 (N9724). 1896/10/24 (N9724).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7564547n
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/05/2013
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#»À R ! S ET DEPARTEMENTS
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i Numéro^ CIN Q X2 H! NTIMES
LE XI! SIECLE
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
131, rue Mont;:nartre, 131
tchez MM. LAGHANGE, CERF 4' <51
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D»4à8 hturet du soir et de 10 heures du Mtr à 1 heure du matéu
rSfo 9724. — Samedi 24 Octobre 1896
3 BRUMAIRE AN 105
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Adresser * mandat* à rAdminùtrmtêur
_.,-,----- NOS LEADERS
Les Conférences populaires
De même que nous suivons avec un
patriotique intérêt les efforts de ces
sociétés d'instruction militaire prépa-
ratoire, sociétés de tir ou de gymnas-
tique, dont l'objet est de faire des ado-
lescents les serviteurs utiles de la pa-
trie ; de même notre sympathie est
acquise aux sociétés d'un autre genre
dont le but est de fournir gratuitement
aux hommes les moyens d'instruction
qu'avec leurs seules ressources ils ne
pourraient se procurer,
« Après le pain, l'instruction est le
premier besoin du peuple » ; c'est le
mot de Danton. Après, avec la néces-
sité d'avoir des soldats, il y a la néces-
sité d'avoir des citoyens.
Et si la force d'un pays se mesure
au nombre des baïonnettes qu'il pour-
rait, la guerre éclatant, mettre en
ligne, sa vraie grandeur lui vient de la
quantité qu'il renferme d'hommes à
l'intelligence ouverte, au cerveau cul-
tivé, possédant assez de notions des
choses pour ne pas marcher en aveu-
gles et sourds à travers la vie, ayant
appris à connaître, à sentir, à penser.
De même que la République a fait
grand pour la sécurité nationale en
établissant le service militaire person-
nel, obligatoire ; de même elle a fait
grand pour l'instruction du peuple en
décrélant l'obligation et la gratuité de
l'enseignement primaire.
Mais le régiment ne prend que tard
!e jeune Français, et l'école le lâche
trop tôt. Les sociétés d'instruction mi-
litaire ont pour but de le préparer à
l'enseignement qu'il doit recevoir sous
les drapeaux ; les sociétés de confé-
rences et de cours pour les adultes ont
pour but de continuer, de compléter
l'enseignement que le travailleur a
reçu à l'école.
**
De ces institutions par lesquelles
s'affirme le plus noble esprit de solida-
rité, quelques-unes existent depuis de
longues années, et il suffira d'en rap-
peler le nom pour évoquer le souvenir
des services rendus : l'Association
philotechnique, l'Union française de
la jeunesse, l'Union de la jeunesse
républicaine, etc. — L'une des plus
intéressantes, aujourd'hui, à coup sûr,
?st la Société nationale des confé-
rences populaires.
J'en parle — et je suis heureux de
cette occasion d'en parler - parce que
je viens de recevoir l'Annuaire qu'elle
publie pour la sixième année de son
existence.
Elle a été fondée en 1891 par un
homme d'initiative généreuse, M.
Guérin-Catelain, qui avait eu une
idée.
Quelle? Celle-ci :
Ayant groupé un noyau de confé-
renciers, faire imprimer les conféren-
ces faites et les envoyer dans toute la
France, afin qu'elles puissent être
lues, « refaites » partout, par des ci-
toyens de bonne volonté, principale-
ment des instituteurs. L'idée, excel-
lente, devait être féconde. En efret,
on ne s'improvise pas du jour au len-
demain conférencier; tout le monde,
avec un peu de bonne volonté, peut se
faire lecteur.
Réunir autour de soi quelques insti-
tuteurs, leur donner lecture du papier
que l'on vient de recevoir de Paris.,
rien de plus simple. Et je passe tout de
suite au résultat acquis.
Actuellement, le nombre des cor-
respondants de la Société nationale
des conférences populaires est de
0,427. Se décomposent ainsi : 2 rec-
teurs d'académie, 28 inspecteurs d'a-
cadémie, 228 inspecteurs primaires,
5,904 directeurs et directrices d'écoles
primaires, instituteurs et institutrices;
?t 92 correspondants divers.
De sorte que toute conférence faite
?ous les auspices de la Société natio-
nale, immédiatement imprimée, est
envoyée à 6,427 correspondants qui la
efont à leur tour, la lisent chacun
levant son auditoire habituel. Il serait
difficile, on le voit, d'imaginer un
tnoyen plus simple et plus prompt de
répandre l'instruction. \J Annuaire
évalue à plus de 400,0001e nombre des
sonférences ainsi faites.
#*#
Je parcours la liste de ces confé-
rences : histoire, littérature, géogra-
phie, voyages, hygiène, questions so-
oiales, tous les sujets y sont traités,
su hasard de l'inspiration des confé-
renciers. Dans la liste de ceux-ci je
trouve les noms de MM. André Theu-
eiet, Jean Steeg, Siegfried, Augé de
Lassus, Georges Ville, etc., etc.
Mais qui ne tiendrait à honneur de
Eaire une conférence qui sera répétée,
par toute la France, pnr plus de 6,000
çoix? Certes les correspondants, les
lecteurs méritent plus d'éloges que les
auteurs même des conférences. Les
instituteurs ont à ce point rivalisé de
zèle que la Société nationale a dû leur
distribuer des récompenses^, médailles,
et diplômes d'honneur attestant leur
active part de collaboration dans la
grande œuvre d'instruction démocra-
tique entreprise. J'ai sous les yeux le
palmarès; il est long.
A la dernière assemblée générale de
la société, M. Buisson, directeur de
renseignement primaire, délégué du
ministre de l'instruction publique,
s'est exprimé en ces termes : — « Le
comité de la société a entraîné des
milliers d'instituteurs, des milliers
d'adhérents pris dans tous les rangs
de l'administration, depuis le direc-
teur de l'enseignement primaire jus-
qu aux inspecteurs et aux instituteurs
que je suis heureux de compter en
aussi grand nombre parmi vos adhé-
rents de la première heure. M.
Guérin-Catelain a su faire tout cela et
il s'empresse de remercier tous ceux
qui y ont collaboré, excepté lui. Vous
êtes là, heureusement, mesdames et
messieurs, pour mettre les choses en
place et pour rendre à chacun ce qui
lui est dû. » — Les applaudissements
de l'auditoire ont accueilli ces paroles ;
il n'était que trop juste en effet que le
nom de M. Guérin-Catelain figurât en
tête de ce palmarès.
Je n'ai pu, en ces brèves lignes qui
précèdent, que donner une idée bien
imparfaite, bien incomplète de cette
Société nationale qui rend tant de
services à la grande cause de l'ensei-
gnement populaire. J'espère toutefois
en avoir assez dit pour provoquer des
adhésions nouvelles et amener à M.
Guérin-Catelain et à ses dévoués colla-
borateurs de nouveaux concours. Le
journaliste ne fait que remplir son de-
voir et s'acquitter strictement de sa
tâche quand il signale les grands ré-
sultats obtenus par l'initiative indi-
viduelle - et c'est une joie pour lui.
LUCIEN VICTOR-MEUNIER
Nous publierons demain un article
de M. Camille Polletan
LE TRAITE DES DARftWLIS
Les journaux de la triplice, et peut-être
plus encore les journaux anglais, continuent
à chercher de quelle façon immédiate et
pratique se feront sentir les effets de l'en-
tente franco-russe, Ils ont trouvé et annon-
cent que les puissances signataires du traité
do Berlin vont être sous peu appelées à mo-
difier le « traité des Dardanelles ».
Il est inutile de dire que les nouvellistes
d'outre-Rhin et d'outre-Manche vont en être
une fois de plus pour leurs frais d'imagina-
tion. Mais comme ils ne vont pas manquer
de faire grand tapage et d'annoncer que
l'équilibre du monde est en danger, il est
peut-être utile de ramener les choses au
point et de dire ce qu'est le traité des Dar-
danelles.
Il a été conclu le 13 juillet 1841, entre la
Porte d'un côté, la Russie, la Grande-Breta-
gne, la Prusse ; l'Autriche et la France de
1 autre. Par ce traité il était décidé qu'aucun
navire de guerre autre que les navires
turcs ne pourraient traverser le détroit sans
l'autorisation de la Porte : les navires de
commerce eux-même, avaient besoin d'être
munis d'une autorisation — qui ne pouvait
leur être refusée — avaient à payer un droit
d'entretien des phares et ne pouvaien, pas-
ser de nuit : co qui aurait permis aux puis-
sances signa aires de plaider l'inutilité des
droi.s de phares! Mais on é ait encore à
l'époque où l'on croyait à la Turauie et où
cette croyance était une des bases de la poli-
tique européenne. On a changé depuis.
Le traité de 1841 fut confirmé en 1856 au
congrès du Paris — et la clause relative aux
navires do guerre fut admise et dans le
traité de Londres de 1851 et dans le traité de
Berlin de 1878. Les navires de commerce
passent depuis vingt-cinq ans.
Mais la Russie, qui est seule intéressée
en repècc, a conclu en 1891 un traité avec
la Turquie, par lequel les navires de la flotte
volontaire traversent le détroit en battant
pavillon commercial. Or, ces navires de la
Hotte volontaire sont des transports de
guerre admirablement armés. On ne voit
donc pas très bien ce qui reste du traité de
1841 et on voit encore moins l'intérêt qu'au-
rait l'Europe à commencer une discussion
sur ce point. Il ne pourrait s'agir que d'une
discussion théorique. L'état actuel de l'Orient
demande d'autres mesures qui seront prises
en temps voulu, sans qu'on ait besoin de
l'autorisation des journaux oificieux alle-
mands ou anglais. L'entente avec les gou-
vernements de Berlin et de Londres suffira.
WASP.
— «yjliii
DESSOUS DE DUTEiEIT JUDICIAIRE 1
On s', ntretient beaucoup, dans le monde
des magis.rats parisiens, des « dessus » du
dernier mouvement judiciaire.
Comme on le sait, trois conseillers nou-
veaux ont été nommés à la cour de cassa-
tion : M. Fabreguettes, premier président à
la cour d'appel de Toulouse, en remplace-
ment de M. Villetard de Laguérie, décédé;
M. Boulloche, directeur des affaires crimi-
nelles et des grâces, en remplacement de
M. Lescouvé, admis sur sa demande à faire
valoir ses droits à la retraite et nommé
conseiller honoraire ; et M. Zeis, premier
président à la cour d'Alger en remplacement
de M. Babinet, admis sur sa demande à
faire valoir ses droi s à laretraite et nommé
président de chambre honoraire.
Mercredi prochain, deux de ces trois con-
seillers, MM. Fabreguettes et Boulloehe,
seront installés dans leurs fonctions. Seule,
l'installation de M. Zeis est retardée.
Pourquoi cet ajournement?
De « bons esprits », comme on aime à dire
dans les ouvrages de droit, expliquent que
cet ajournement est exclusivement motivé,
sinon par l'impossibilité absolue, du moins
par la difficulté qu éprouverait M. Zeis à se
rendre immédia ement d'Alger à Paris. La
distance en etlet est grande entre ces deux
villes; puis M. Zeis est âgé; enfin M. Zeis a
son déménagement à opérer. En somme, sa
non-présence mercredi prochain à la cour
suprême est très normale et très naturelle.
Les « mauvais esprits » — il y en a par-
tout — soutiennent, eux, que la non-instal-
lation de M. Zeis est due à de tous autres
motifs.
— M. Zeis, disent-ils en substance, pour-
rait parfaitement se trouver à Paris le mer-
credi 28 octobre. Car il ne faut que quatre
jours au plus pour venir d'Alger à Paris.
Or, depuis le 20 octobre, M. Zeis, qui, soit
dit en passant, est très valide, connaît sa
nomination. Sa non-présence à Paris le jour
de l'installation de MM. Fabreguettes et
Boulloche s'explique par ce fait que M. Zeis
ne doit être installé qu'en décembre pro-
chain. En effet, M. Babinet, le conseiller
qu'il remplace n'était atteint par la limite
d'âge qu'en décembre 186. Si l'honorable
conseiller a consenti à faire valoir ses droits
à la retraite, c'est parce qu'il lui a été pro-
mis : Io qu'il serait nommé président de
chambre honoraire ; 2° que I nstallation de
M. Zeis n'aurait lieu qu'en décembre et qu'il
pourrait par conséquent, jusqu'à cette épo-
que, continuer à siéger à la cour suprême et
à toucher les appointements de conseiller en
exercice. Bref, M. Zeis, qui est un ami in-
time du président du conseil, n'a été, par
anticipation en quelque sorte, compris dans
le dernier mouvement judiciaire que parce
que les ministères ne sont pas éternels et
qu'en fait, en décembre prochain, il pourrait
arriver — Di talem avertiie casuml — que le
ministère Méline ait vécu.
Qui a raison des « bons » ou des « mau-
vais esprits » du Palais?
LE DIVORCE D'HENRI ROCHEFORT
On a plaidé, hier, à la 5,1 chambre du tri-
bunal civil de la Seine, le procès en divorce
intenté par Mme de Brèdo contre Henri Ro-
chefort.
M. Henri Chevalier a soutenu la demande
de Mme de Brède. Henri Rochefort ne s était
fait représenter par aucun avocat. M0 Haron,
son avoué, s'est borné à faire passer des
conclusions au tribunal.
A huitaine pour jugement.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN:
Les courses : A Enghien (obstacles).
- Durée du jour : Il h. 26 m.
CHEZ NOUS
canaHBHHky»
- Les zouaves au Luxembourg.
Un concert, auquel assistaient plus de
10,000 personnes, a été donné hier dans le
jardin du Luxembourg par la musique du
30 régiment de zouaves.
On a fort applaudi toutes les parties du
concert, mais la Marseillaise et l'Hymne
russe, réclamés par des milliers de voix,
ont porté l'enthousiasme au comble.
Les musiciens ont dû quitter lé Luxem-
bourg par petits groupes pour éviter les
ovations.
La circulation des voitures a été un mo-
ment arrêtée sur le boulevard Saint-Michel
qui présentait l'animation des jours de
fête.
.N'-". A l'Elysée :
Le président de la République viendra
demain matin à Paris pour présider le con-
seil des ministres. Il rentrera à Rambouil-
let dans l'après-midi.
Le lendemain, M Félix Faure ira chasser
chez des amis personnels et, lundi, il ren-
trera définitivement à Paris.
rvv-.. M. Méiine, président du conseil,
ministre de l'agriculture, inaugurera au-
jourd'hui, à trois heures, l'exposition d'a-
nimaux de basse-cour organisée au palais
de l'Industrie (entrée par la porte n° 5) par
la Société nationale d'aviculture de France.
Cette exposition réunit près de deux
mille lots. Elle sera ouverte jusqu'à lundi
prochain.
- Séance hier à l'Académie française.
Lecture a été donnée d'une lettre par la-
quelle M. Jean Aicard déclare retirer sa
candidature au fauteuil d'Alexandre Dumas.
- Passage des princes :
Le roi de Grèce a quitté Paris hier soir
par l'Express-Orient. Il s'arrêtera quelques
jours à Vienne avant de rentrer à Athènes.
Le roi des Belges vient d'arriver. Il vient
surveiller les travaux de construction de la
propriété qu'il a achetée à Beaulieu.
La reine de Portugal a traversé Vichy,
allant au château de Randan,
- Le contre-amiral Léopold Four-
mer, ancien major général de la marine à
Brest, vient de mourir à Montricourt
(Tarn-et-Garonne), où il se trouvait en
convalescence depuis quelques mois.
Le contre-amiral Fournier, né à Negre-
pelisse en 1839, était lieutenant de vais-
seau en 1870 et commandait en cette qua-
lité les wagons blindés à l'attaque de Mon-
tretout, où il fut grièvement blessé.
La date des obsèques n'est pas encore
fixée.
- Les obsèques de Mme Delpeuch
ont été célébrées hier, à midi, à Saint-
François-de-Salles, au milieu d'une grande
affluence de notabillités politiques et par-
lementaires.
Le deuil était conduit par M. Edouard
Delpeuch et trois membres de la famille.
L'inhumation a été faite au Père-Lachaise.
—— La mort de M. Léon Say avait laissé
vacante la présidence de la Société d'hor-
ticulture de France.
Cette association a procédé hier à l'élec-
tion de son nouveau président. Son choix
s'est porté sur M. Viger, député, ancien
ministre de l'agriculture.
- MM. Le Myre de Vilers, le prince
d'Arenberg, Binger, Simon, directeur de
la Banque de l'Indo-Chine; Mercet, vice-
président du Comptoir d'escompte, et Mu-
teau se sont réunis hier au ministère des
colonies, sous la présidence de M. André
Lebon.
Ils ont jeté les bases d'une société ci-
vile, destinée à assurer la construction et
l'entretien d'une maison de convalescence
destinée aux factionnaires coloniaux, aux
employés de commerce et aux colons, re-
venant de nos possessions d'outre-mer.
-- La Société centrale de médecine
vétérinaire a tenu hier, à trois heures, sa
séance annuelle.
- Les caisses d'épargne ont procédé
à l'élection de deux membres de la com-
mission supérieure instituée par la loi du
20 juillet 1895, en remplacement de MM.
Ducy, d'Evreux, et Gaden, de Bordeaux.
1,146 suffrages ont été exprimés. Ont
été élus : 0
M. Rubillard, président de la caisse d'é-
pargne du Mans, 494 voix ;
- M. Morin, vice-président de la caisse
d'épargne de Pithiviers, 283 voix.
- Le concours de tir :
La distribution des prix du 58 concours
de tir aura lieu dimanche prochain, à une
heure et demie, dans le grand amphithéâtre
de la Scrbonne.
M. Barthou, ministre de l'intérieur, pré-
sidera. Le général Saussier a promis la
musique de la garde républicaine.
Le soir grand banquet à l'hôtel Conti-
nental.
- Par ces temps brumeux, l'imagina-
tion se laisse entraîner vers les régions en-
soleillées du Midi; rêve qui devient une
réalité sous la plume de Constant de Tours,
l'aimable auteur de Vingt jours sur les
côtes de la Méditerranée (de Marseille à
l'Espagne), paru à l'ancienne maison Quan-
tin dans la jolie collection des Guides-
Albums du Touriste. C'est un délicieux
voyage à faire dans son fauteuil ou sur
place ; le beau ciel de Provence, Arles et
Saint- Trophime, les farandoles des Saintes-
Maries-de-la-Mer, les courses de taureaux,
Montpellier, Narbonne, etc., sollicitent
tour à tour notre attention, sans compter
une série de 130 dessins reproduisant les
paysages, monuments et costumes.
A L'ETRANGER
Les terres du ciel :
M. Witt, astronome à l'observatoire de
Berlin, a, dans la soirée du 11 octobre,
découvert par la voie photographique une
planète de onzième grandeur.
Allons, tant mieux!
"-'-'-« A l'instar de Jules Verne » ou « la
vie imitant le roman ».
La fameuse histoire du détective Fix,
poursuivant à travers la terre et les mers le
gentleman Phileas Fogg faisant le tour du
monde en quatrevingts jours, vient de
trouver son pendant dans la réalité.
Le paquebot Ruapehu débarquait, en ef-
fet, hier à Plymouth un « globe-trotter »
peu ordinaire qui aura terminé bientôt sa
circumnavigation.
C'est un avocat australien, nommé Ja-
mes Edward Geake, poursuivi là-bas en
raison d'un escroquerie de 15,000 francs,et
qui avait profité de sa mise en liberté sous
caution pour prendre le large.
Le détective Rogers fut lancé à sa pour-
suite, le suivit d'abord à travers la Nou-
velle-Zélande, dut ren-oncer à le saisir là,
s'embarqua derrière lui pour la Républi-
que argentine, où il arriva à temps pour
réclamer son extradition. Mais il avait
compté sans les lenteurs ordinaires de la
procédure.
Il télégraphia en Australie, mais sans
pouvoir empêcher que l'avocat Geake se
sauvât avec sa femme pour le Brésil. Ce
fut là, enfin, qu'il put s'emparer de lui et
obtenir que les autorités locales le gardas-
sent jusqu'à l'arrivée des pièces. Toutes
les formalités épuisées, il prit passage,
avec son prisonnier, sur le premier paque-
bot en partance, celui qui l'a débarqué
hier en Angleterre.
Geake a été amené à Londres. Dans
quelques jours, il sera embarqué sur un
paquebot qui le ramènera en Australie, et
il aura fait complètement letour du monde
avant de s'entendre condamner.
Le Passant.
PRISONNIER DANS UNE AMBASSADE
Le Globe de Londres publie une extaaor-
dinaire histoire d'enlèvement, dont voici le
résumé.
Il paraît qu'au mois de novembre dernier,
le gouvernement chinois fut mis sur les
traces d'une conspiration qui avait pour but
de faire disparaître le vice-roi de Canton et
de préparer ainsi le renversement de la
dynastie mandchoue. Le secret transpira,
damant plus que l'arrivée prématurée de
400 coolies, qui avaient été envoyés de
Hong-Kong à Canton, pour amener l'exécu-
tion du complot, éveilla les soupçons. Le
résultat fut que quinze organisateurs furent
arrêtés et décapités.
D'autres conjurés purent s'échapper et
parmi eux se trouvait un médecin nommé
San-Yat-Sen, bien connu à Hong-Kong, qui
passa d'abord en Amérique puis vmt à
Londres. Il s'installa dans le voisinage de
Gray's Inn Road.
Samedi dernier il sortit de chez lui et de-
puis n'a pas reparu. On croit qu'il a été en-
levé et transpor é à l'ambassade de Chine.
Une autre histoire veut que San-Yat-Sen,
se croyant en sûreté dans les rues de Lon-
dres, passait insouciamment devant l'am-
bassade chinoise quand il fut soudain saisi
par deux Chinois eu poussé violemment
dans l'ambassade où il est maintenant re-
tenu.
11 est en tous cas certain que le prisonnier
a trouvé le moyen de faire connaître sa dé-
tention à quelques amis anglais qu'il avait
connus à Hong-Kong et ceux-ci s'occupent
activement de lui Le ministre des affaires
étrangères e la direction de la police ont été
avisés. Au début, on a conçu quelque doute
sur l'au henticité de cette histoire, mnis ac-
tuellement des détectives surveillent les
alentours de l'ambassade pour empêcher
que le prisonnier ne soit emmené.
Les amis de celui-ci prétendent que des
préparatifs avaient été faits pour le trans-
porter en Chine, à bord d un navire retenu
pour la circonstance. Ils ont demandé un
mandat de comparution du prisonnier de-
vant les tribunaux afin de le faire sortir,
mais il est dou. même si le mandat est
accordé, qu'il puisse trouver son exécution
dans une ambassade étrangère.
Les fonctionnaires de l'ambassade chi-
noise nient qu'ils détiennent leur compa-
triote, dont les amis maintiennent énergi-
quement leurs affirmations.
LA VIE DE PARIS
Par HENRY FOUQUIER
Les correspondances d'hommes et
de femmes célèbres offrent un intérêt
qui nous paraît parfois, par l'intimité
où elles nous font entrer, supérieur à
l'intérêt même de leurs œuvres les plus
belles. Pour le moment, nous sommes
bien traités par les circonstances. Si-
multanément, des publications parais-
sent, qui nous donnent les lettres de
Victor Hugo et, aussi, des détails sur
Alfred de Musset et Mme Sand, parti-
culièrement à propos de l'épisode cé-
lèbre déjà de leur voyage à Venise, où
le poète, malade, fut trompé par son
amie et par son propre médecin. Le
génie ne met pas à l'abri de ces sortes
d'aventuros et même, comme l'a rap-
pelé un ironique,
La garde qui veille anx barrières du Louvre
N'en défend pas les rois!
On se demande souvent s'il n'y a pas
quelque inconvénient à donner ainsi en
pâture à la curiosité du public les his-
toires secrètes du cœur qui sont arri-
vées à des hommes et à des femmes
dont les descendants vivent encore, et
à redire ces drames de la passion qui
ont agité leur vie? Ces inconvénients
peuvent exister. Mais on ne s'y arrête
pas, car, de plus en plus, qu'il s'agisse
des politiques ou des grands écrivains,
les hommes en vue ne peuvent défen-
dre le secret de leur vie privée. Il sem-
ble qu'elle doive appartenir au public.
Et ce qu'il y a d'assez amusant, c'est
que ce même Sainte-Beuve, qui est re-
mis sur le tapis à l'occasion de la Cor-
respondance de Victor Hugo, et d'une
façon assez désagréable pour lui, est
l'homme qui a le mieux expliqué les
raisons qui font que l'intimité de la vie
d'un homme est indispensable à con-
naître pour apprécier de façon complète
soit le rôle qu'il a joué, soit son mérite
littéraire. Si bien que lui, qu'on a estimé
jadis un peu indiscret, se trouve en
butte à l'indiscrétion la plus com-
plète, à propos, surtout, de ses rela-
tions avec Victor Hugo et de la brouille
éclatante qui les termina, Sainte-Beuve
n'ayant pas pu voir, sans devenir
amoureux, la grande grâce de Mme
Victor Hugo, et cet amour, quoique
resté platonique, étant devenu très gê-
nant.
Cette correspondance de Victor Hugo
avec Sainte-Beuve est des plus intéres-
santes. Je ne voudrais pas avoir l'air
d'avoir, ici, une opinion de circons-
tance, dans une maison où le souvenir
de V ictor Hugo est resté à juste titre très
cher. J'évite de même, autant que faire
se peut, le reproche d'être devenu, en
vieillissant, l'homme grincheux qui ne
se souvient du passe que pour le louer
au détriment du présent : laudator tern-
poris acti, dit le poète latin. Mais il me
parait hors de conteste que la généra-
tion qui a précédé la mienne a eu, sur
notre jeune génération, une supériorité
que je tiens pour très essentielle. Elle
avait, à la fois, un très grand respect
pour les maitres, une véritable vénéra-
tion pour le talent et, en même temps,
entre jeunes gens qui débutaient en-
semble dans la vie littéraire, une cama-
raderie passionnée, une amitié sincère,
qui est bien touchante 1 Les lettres de
Victor Hugo, à cet égard, sont admira-
bles et édifiantes. Même alors qu'il a
déjà quelque grief contre Sainte-Beuve,
il lui écrit dans les termes d'une amitié
désolée à la surprise d'un désaccord
possible entre eux. Les ruptures d'ami-
tiés, chez les jeunes gens de cette épo-
que, ont les déchirements et les tris-
tesses de ruptures d'amour. La solida-
rité intellectuelle entre hommes ayant
les mêmes ambitions, passant par les
mômes épreuves, supportant les mêmes
luttes, cette solidarité est admirable.
Elle forme un contraste absolu avec la
« rosserie » — j'emploie un mot à la
mode, quoique je déteste et la chose et
le mot qui fexprime — qui est si ordi-
naire dans les rapports de nos jeunes
littérateurs.
Ceux-ci ne sont, en réalité, d'accord
que sur un point. Ils ont presque tous,
au même degré, le mépris de ceux qui
les ont précédés dans la carrière.A part
trois ou quatre hommes, envers qui
les générations nouvelles témoignent
d'un respect qui ne va pas sans quel-
que superstition, hommes qui sont,
d'ailleurs, morts et, par conséquent,
ne gênent personne, la mode est, au-
jourd'hui, poussée au dénigrement. Il
se publie, à Paris, une demi-douzaine
de revues, œuvre presque exclusive
d'hommes jeunes, dont la seule raison
d'être semble être de dénigrer les écri-
vains dont le public connaît le nom et
aime le talent. Les qualifier de « cri-
tiques » est une aménité courante. En-
core si c'était là le fait de cette loi,
bonne en soi, qui veut qu'une généra-
tion nouvelle ait ses aspirations à elle,
son désir d'être indépendante et créa-
trice à son tour, il n'y aurait que demi-
mal. Mais il n'en est pas ainsi. Car ces
jeunes gens ne sont pas, comme jadis
les romantiques, unis par une foi com-
mune, par un idéal. Ils ont chacun le
goût ardent de l'individualisme et ils
se détestent et « s'éreintent » entre eux,
absolument comme ils détestent et
« éreintent » les gens arrivés. Et si les
vieillards ont quelquefois le tort de trop
louer le temps passé, où revit le sou-
venir de leur jeunesse, ils ont, eux, le
iBt
tort autrement grave de paraître dé-
tester leur temps, alors même quilg
ont le bonheur d'y être jeunes, pouvant
espérer dans l'avenir pour voir se réaliw
ser les projetsqu'ils conçoivent comme
nécessaires et justes.
La correspondance de Victor Hugo
n'a donc pas été, pour moi, la satisfac-
tion d ailleurs légitime de la curiosité
qui s aitacne à bon droit à tout ce qui
touche à l'histoire de la vie, des idées
et des sentiments d'un homme de génie.
Elle est, à mes yeux, d'une haute va-
leur morale parce qu'elle nous montre,
chez le poète jeune, de respect pour les
ancêtres qu'il devait faire oublier, d'op-
timisme, de sentiment, de tendresse de
cœur, de sensibilité. Quel contraste
avec la séchéresse de tant de nos jeunes
gens, avec l'égoïsme de tous ces con-
templateurs de leur nombril pour qui
rien ne semble exister en dehors d'eux.-:
mêmes I Il n'est pas une tendresse que
Victor Hugo renie. Il est amant, mari,
père ; il est ami. Certes, partout des
douleurs pourront l'atteindre. Mais ces
douleurs sont pour le poète ce que sonf
les sacrements pour le chrétien. Qui ne
les connalt pas n'arrive pas à la per-
fection 1
HENRY FOUQUIER.
Nous publierons demain la Chronique
de M. André Batz.
Le Drame de la rue Montmartre
Un drame sanglant s'est déroulé hier soir
à huit heures et demie dans l'hôtel situé
165, rue Montmartre. Un garçon de café1,
nommé Yvon Clcuziotl, âgé de trente-deux
ans, habitait depuis quelque temps la mai-
son. Depuis quelques jours il était tomDÓ
malade et ne travaillait plus.
Hier, il avait prié sa maîtresse, une jeune
et jolie fille de vingt-et-un ans, Louise Vieille,
dite « Germaine J), de venir le voir. La jeune
fille accéda à sa demande et vint dans la
soirée. Que se pas-a-t-il au cours de l'entre-
tien ? On l'ignore encore.
Toujours est-il que Cleuziou tirant un re-
volver de dessous son oreiller en déchargea
trois coups sur la jeune fille, qui tomba. °La
croyant morte, le meur rier à son tour se
fit justice on se logeant une balle dans la
tête.
Le docteur Jouin, appelé, ne put que cons-
tater le décès de Cleuziou. Quant à Louise
Vieil!e, sur les trois balles tirées, deux n'ont
fait qu'effleurer la tête, labourant le cuir
chevelu ; la troisième s'est logée dans le dos.
Cette dernière blessure présente un aspect
inquiétant. A dix heures moins le quart, une
voiture des ambulances urbaines a trans-
porté la blessée à l'hôpital Lariboisière.
iltftfc ■
CHRONiQUEDRAMATIQUE
Porte-Saint-Mariin. - Les Bienfaiteurs,
pièce en quatre actes, do M. Brieux.
M. Brieux vient de nous asséner uno
rude satire de notre pratique courante
de la charité. Ah ! mais c'est quelqu'un.
Attention !
Landrecy est vaguement ingénieur
dans les bureaux d'une usine, en quel-
que chef-lieu lointain. Sa femme Pau-
line et lui, sans autres ressources, d'ail-
leurs, que ie produit de son emploi, font
la charité autour d'eux à pleines mains,
c'est dire qu'elles sont bientôt vides. Ils
ont, en outre, recueilli une jeune orphe-
line, leur cousine Georgette, et ils gar-
dent obstinément à leur service, Clara,
un souillon revêche et des plus mai
embouchées, sous prétexte qu'elle ne
pourrait se placer ailleurs, si bien que
leur logis a été surnommé la maison
des fous.
Cependant, Landrecy, après avoir pris
chaudement contre son patron la dé-
fense d'un ouvrier, a offert sa démis-
sion qui a été acceptée. On trouvera
bien une place ailleurs. Ah ! si on avait
un capital pour racheter une usine
électrique qui est en liquidation et y
exploiter le nouvel accumulateur in-
venté par Landrecy et son collègue
Henri Clermont, le fiancé de Georgette 1
Quelle fortune i Que de bienfaits on ré-
pandrait autour de soii Quelle occasion
d'appliquer leurs chères théories sur le
salaire proportionnel, pour chaque ou-
vrier, au nombre des bouches à nourrir
chez lui, et sur le relèvement du tra-
vailleur par le constant appel à sa di-
gnité d'homme.
Au milieu de ce pot-au-lait tombe un
oncle d'Amérique vingt fois million-
naire, Valentin Salviat, le frère de Pau-
line, parti jadis en sabots de son Mau-
riac. Il réussit, non sans peine, à l'aire
accepter le capital rêvé. Il est bien urt
peu sceptique sur l'efficacité de la cha-
rité, notre rude Auvergnat, et, comme
tous ceux de sa race, il compte plus sur
l'effort individuel que sur l'association.
L'assistance publique,il en a tàté jadis,
et, parmi les avanies essuyées dans ses
bureaux, il a constaté qu'elle profi-
tait surtout à ses employés. Quant
à la charité des religions, celle « qui;
eût fait un Tartufe de Voltaire lui-
même ». ou. Enfin, puisqu'on y tient
et que ses millions n'ont rien de Inlcnx
à faire, on va se livrer à un exercice
expérimental de charité privée, d abord
sur les pauvres de tout acabit et ensuite
sur les travailleurs payés selon leurs
charges de famille et traités selon leur,
dignité d'hommes. 1
Cette berquinade, assaisonnée d'ail-
leurs de mots jolis ou pointus, remplit
le premier acte et forme le postulat de,
la démonstration ; car on ne nous a pas
caché qu'il s'agit d'une pièce à thèse.
Un an s'est écoulé. L'or de Salviat ai
patronné et a fait foisonner les a:
dations de charité, autour des Land
cy : en voici pour les vieillards iadH
gents, pour les filles-mères, pour lem
sortis de prison dits les régénérés, etc.
Notre bourru bienfaisant est de retour:
on va lui rendre des comptes ai W
#»À R ! S ET DEPARTEMENTS
- ,
i Numéro^ CIN Q X2 H! NTIMES
LE XI! SIECLE
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
131, rue Mont;:nartre, 131
tchez MM. LAGHANGE, CERF 4' <51
6, place de la Bourse, 6.
*rtrssse télégraphique : XIX* SIÈCLE — PARIS
A R ORNEMENTS f
Paris irais hn, 6 f. sa fois, Il f. n Il, 20 f.
Départements — 7f. — 12f. — 24f.
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dans tous les Bureaux de Poste.
RÉDACTION Ï 131, rue Montmartre» 131
D»4à8 hturet du soir et de 10 heures du Mtr à 1 heure du matéu
rSfo 9724. — Samedi 24 Octobre 1896
3 BRUMAIRE AN 105
ADMINISTRATION. tal, rue àlontmarta.% tM
Adresser * mandat* à rAdminùtrmtêur
_.,-,----- NOS LEADERS
Les Conférences populaires
De même que nous suivons avec un
patriotique intérêt les efforts de ces
sociétés d'instruction militaire prépa-
ratoire, sociétés de tir ou de gymnas-
tique, dont l'objet est de faire des ado-
lescents les serviteurs utiles de la pa-
trie ; de même notre sympathie est
acquise aux sociétés d'un autre genre
dont le but est de fournir gratuitement
aux hommes les moyens d'instruction
qu'avec leurs seules ressources ils ne
pourraient se procurer,
« Après le pain, l'instruction est le
premier besoin du peuple » ; c'est le
mot de Danton. Après, avec la néces-
sité d'avoir des soldats, il y a la néces-
sité d'avoir des citoyens.
Et si la force d'un pays se mesure
au nombre des baïonnettes qu'il pour-
rait, la guerre éclatant, mettre en
ligne, sa vraie grandeur lui vient de la
quantité qu'il renferme d'hommes à
l'intelligence ouverte, au cerveau cul-
tivé, possédant assez de notions des
choses pour ne pas marcher en aveu-
gles et sourds à travers la vie, ayant
appris à connaître, à sentir, à penser.
De même que la République a fait
grand pour la sécurité nationale en
établissant le service militaire person-
nel, obligatoire ; de même elle a fait
grand pour l'instruction du peuple en
décrélant l'obligation et la gratuité de
l'enseignement primaire.
Mais le régiment ne prend que tard
!e jeune Français, et l'école le lâche
trop tôt. Les sociétés d'instruction mi-
litaire ont pour but de le préparer à
l'enseignement qu'il doit recevoir sous
les drapeaux ; les sociétés de confé-
rences et de cours pour les adultes ont
pour but de continuer, de compléter
l'enseignement que le travailleur a
reçu à l'école.
**
De ces institutions par lesquelles
s'affirme le plus noble esprit de solida-
rité, quelques-unes existent depuis de
longues années, et il suffira d'en rap-
peler le nom pour évoquer le souvenir
des services rendus : l'Association
philotechnique, l'Union française de
la jeunesse, l'Union de la jeunesse
républicaine, etc. — L'une des plus
intéressantes, aujourd'hui, à coup sûr,
?st la Société nationale des confé-
rences populaires.
J'en parle — et je suis heureux de
cette occasion d'en parler - parce que
je viens de recevoir l'Annuaire qu'elle
publie pour la sixième année de son
existence.
Elle a été fondée en 1891 par un
homme d'initiative généreuse, M.
Guérin-Catelain, qui avait eu une
idée.
Quelle? Celle-ci :
Ayant groupé un noyau de confé-
renciers, faire imprimer les conféren-
ces faites et les envoyer dans toute la
France, afin qu'elles puissent être
lues, « refaites » partout, par des ci-
toyens de bonne volonté, principale-
ment des instituteurs. L'idée, excel-
lente, devait être féconde. En efret,
on ne s'improvise pas du jour au len-
demain conférencier; tout le monde,
avec un peu de bonne volonté, peut se
faire lecteur.
Réunir autour de soi quelques insti-
tuteurs, leur donner lecture du papier
que l'on vient de recevoir de Paris.,
rien de plus simple. Et je passe tout de
suite au résultat acquis.
Actuellement, le nombre des cor-
respondants de la Société nationale
des conférences populaires est de
0,427. Se décomposent ainsi : 2 rec-
teurs d'académie, 28 inspecteurs d'a-
cadémie, 228 inspecteurs primaires,
5,904 directeurs et directrices d'écoles
primaires, instituteurs et institutrices;
?t 92 correspondants divers.
De sorte que toute conférence faite
?ous les auspices de la Société natio-
nale, immédiatement imprimée, est
envoyée à 6,427 correspondants qui la
efont à leur tour, la lisent chacun
levant son auditoire habituel. Il serait
difficile, on le voit, d'imaginer un
tnoyen plus simple et plus prompt de
répandre l'instruction. \J Annuaire
évalue à plus de 400,0001e nombre des
sonférences ainsi faites.
#*#
Je parcours la liste de ces confé-
rences : histoire, littérature, géogra-
phie, voyages, hygiène, questions so-
oiales, tous les sujets y sont traités,
su hasard de l'inspiration des confé-
renciers. Dans la liste de ceux-ci je
trouve les noms de MM. André Theu-
eiet, Jean Steeg, Siegfried, Augé de
Lassus, Georges Ville, etc., etc.
Mais qui ne tiendrait à honneur de
Eaire une conférence qui sera répétée,
par toute la France, pnr plus de 6,000
çoix? Certes les correspondants, les
lecteurs méritent plus d'éloges que les
auteurs même des conférences. Les
instituteurs ont à ce point rivalisé de
zèle que la Société nationale a dû leur
distribuer des récompenses^, médailles,
et diplômes d'honneur attestant leur
active part de collaboration dans la
grande œuvre d'instruction démocra-
tique entreprise. J'ai sous les yeux le
palmarès; il est long.
A la dernière assemblée générale de
la société, M. Buisson, directeur de
renseignement primaire, délégué du
ministre de l'instruction publique,
s'est exprimé en ces termes : — « Le
comité de la société a entraîné des
milliers d'instituteurs, des milliers
d'adhérents pris dans tous les rangs
de l'administration, depuis le direc-
teur de l'enseignement primaire jus-
qu aux inspecteurs et aux instituteurs
que je suis heureux de compter en
aussi grand nombre parmi vos adhé-
rents de la première heure. M.
Guérin-Catelain a su faire tout cela et
il s'empresse de remercier tous ceux
qui y ont collaboré, excepté lui. Vous
êtes là, heureusement, mesdames et
messieurs, pour mettre les choses en
place et pour rendre à chacun ce qui
lui est dû. » — Les applaudissements
de l'auditoire ont accueilli ces paroles ;
il n'était que trop juste en effet que le
nom de M. Guérin-Catelain figurât en
tête de ce palmarès.
Je n'ai pu, en ces brèves lignes qui
précèdent, que donner une idée bien
imparfaite, bien incomplète de cette
Société nationale qui rend tant de
services à la grande cause de l'ensei-
gnement populaire. J'espère toutefois
en avoir assez dit pour provoquer des
adhésions nouvelles et amener à M.
Guérin-Catelain et à ses dévoués colla-
borateurs de nouveaux concours. Le
journaliste ne fait que remplir son de-
voir et s'acquitter strictement de sa
tâche quand il signale les grands ré-
sultats obtenus par l'initiative indi-
viduelle - et c'est une joie pour lui.
LUCIEN VICTOR-MEUNIER
Nous publierons demain un article
de M. Camille Polletan
LE TRAITE DES DARftWLIS
Les journaux de la triplice, et peut-être
plus encore les journaux anglais, continuent
à chercher de quelle façon immédiate et
pratique se feront sentir les effets de l'en-
tente franco-russe, Ils ont trouvé et annon-
cent que les puissances signataires du traité
do Berlin vont être sous peu appelées à mo-
difier le « traité des Dardanelles ».
Il est inutile de dire que les nouvellistes
d'outre-Rhin et d'outre-Manche vont en être
une fois de plus pour leurs frais d'imagina-
tion. Mais comme ils ne vont pas manquer
de faire grand tapage et d'annoncer que
l'équilibre du monde est en danger, il est
peut-être utile de ramener les choses au
point et de dire ce qu'est le traité des Dar-
danelles.
Il a été conclu le 13 juillet 1841, entre la
Porte d'un côté, la Russie, la Grande-Breta-
gne, la Prusse ; l'Autriche et la France de
1 autre. Par ce traité il était décidé qu'aucun
navire de guerre autre que les navires
turcs ne pourraient traverser le détroit sans
l'autorisation de la Porte : les navires de
commerce eux-même, avaient besoin d'être
munis d'une autorisation — qui ne pouvait
leur être refusée — avaient à payer un droit
d'entretien des phares et ne pouvaien, pas-
ser de nuit : co qui aurait permis aux puis-
sances signa aires de plaider l'inutilité des
droi.s de phares! Mais on é ait encore à
l'époque où l'on croyait à la Turauie et où
cette croyance était une des bases de la poli-
tique européenne. On a changé depuis.
Le traité de 1841 fut confirmé en 1856 au
congrès du Paris — et la clause relative aux
navires do guerre fut admise et dans le
traité de Londres de 1851 et dans le traité de
Berlin de 1878. Les navires de commerce
passent depuis vingt-cinq ans.
Mais la Russie, qui est seule intéressée
en repècc, a conclu en 1891 un traité avec
la Turquie, par lequel les navires de la flotte
volontaire traversent le détroit en battant
pavillon commercial. Or, ces navires de la
Hotte volontaire sont des transports de
guerre admirablement armés. On ne voit
donc pas très bien ce qui reste du traité de
1841 et on voit encore moins l'intérêt qu'au-
rait l'Europe à commencer une discussion
sur ce point. Il ne pourrait s'agir que d'une
discussion théorique. L'état actuel de l'Orient
demande d'autres mesures qui seront prises
en temps voulu, sans qu'on ait besoin de
l'autorisation des journaux oificieux alle-
mands ou anglais. L'entente avec les gou-
vernements de Berlin et de Londres suffira.
WASP.
— «yjliii
DESSOUS DE DUTEiEIT JUDICIAIRE 1
On s', ntretient beaucoup, dans le monde
des magis.rats parisiens, des « dessus » du
dernier mouvement judiciaire.
Comme on le sait, trois conseillers nou-
veaux ont été nommés à la cour de cassa-
tion : M. Fabreguettes, premier président à
la cour d'appel de Toulouse, en remplace-
ment de M. Villetard de Laguérie, décédé;
M. Boulloche, directeur des affaires crimi-
nelles et des grâces, en remplacement de
M. Lescouvé, admis sur sa demande à faire
valoir ses droits à la retraite et nommé
conseiller honoraire ; et M. Zeis, premier
président à la cour d'Alger en remplacement
de M. Babinet, admis sur sa demande à
faire valoir ses droi s à laretraite et nommé
président de chambre honoraire.
Mercredi prochain, deux de ces trois con-
seillers, MM. Fabreguettes et Boulloehe,
seront installés dans leurs fonctions. Seule,
l'installation de M. Zeis est retardée.
Pourquoi cet ajournement?
De « bons esprits », comme on aime à dire
dans les ouvrages de droit, expliquent que
cet ajournement est exclusivement motivé,
sinon par l'impossibilité absolue, du moins
par la difficulté qu éprouverait M. Zeis à se
rendre immédia ement d'Alger à Paris. La
distance en etlet est grande entre ces deux
villes; puis M. Zeis est âgé; enfin M. Zeis a
son déménagement à opérer. En somme, sa
non-présence mercredi prochain à la cour
suprême est très normale et très naturelle.
Les « mauvais esprits » — il y en a par-
tout — soutiennent, eux, que la non-instal-
lation de M. Zeis est due à de tous autres
motifs.
— M. Zeis, disent-ils en substance, pour-
rait parfaitement se trouver à Paris le mer-
credi 28 octobre. Car il ne faut que quatre
jours au plus pour venir d'Alger à Paris.
Or, depuis le 20 octobre, M. Zeis, qui, soit
dit en passant, est très valide, connaît sa
nomination. Sa non-présence à Paris le jour
de l'installation de MM. Fabreguettes et
Boulloche s'explique par ce fait que M. Zeis
ne doit être installé qu'en décembre pro-
chain. En effet, M. Babinet, le conseiller
qu'il remplace n'était atteint par la limite
d'âge qu'en décembre 186. Si l'honorable
conseiller a consenti à faire valoir ses droits
à la retraite, c'est parce qu'il lui a été pro-
mis : Io qu'il serait nommé président de
chambre honoraire ; 2° que I nstallation de
M. Zeis n'aurait lieu qu'en décembre et qu'il
pourrait par conséquent, jusqu'à cette épo-
que, continuer à siéger à la cour suprême et
à toucher les appointements de conseiller en
exercice. Bref, M. Zeis, qui est un ami in-
time du président du conseil, n'a été, par
anticipation en quelque sorte, compris dans
le dernier mouvement judiciaire que parce
que les ministères ne sont pas éternels et
qu'en fait, en décembre prochain, il pourrait
arriver — Di talem avertiie casuml — que le
ministère Méline ait vécu.
Qui a raison des « bons » ou des « mau-
vais esprits » du Palais?
LE DIVORCE D'HENRI ROCHEFORT
On a plaidé, hier, à la 5,1 chambre du tri-
bunal civil de la Seine, le procès en divorce
intenté par Mme de Brèdo contre Henri Ro-
chefort.
M. Henri Chevalier a soutenu la demande
de Mme de Brède. Henri Rochefort ne s était
fait représenter par aucun avocat. M0 Haron,
son avoué, s'est borné à faire passer des
conclusions au tribunal.
A huitaine pour jugement.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN:
Les courses : A Enghien (obstacles).
- Durée du jour : Il h. 26 m.
CHEZ NOUS
canaHBHHky»
- Les zouaves au Luxembourg.
Un concert, auquel assistaient plus de
10,000 personnes, a été donné hier dans le
jardin du Luxembourg par la musique du
30 régiment de zouaves.
On a fort applaudi toutes les parties du
concert, mais la Marseillaise et l'Hymne
russe, réclamés par des milliers de voix,
ont porté l'enthousiasme au comble.
Les musiciens ont dû quitter lé Luxem-
bourg par petits groupes pour éviter les
ovations.
La circulation des voitures a été un mo-
ment arrêtée sur le boulevard Saint-Michel
qui présentait l'animation des jours de
fête.
.N'-". A l'Elysée :
Le président de la République viendra
demain matin à Paris pour présider le con-
seil des ministres. Il rentrera à Rambouil-
let dans l'après-midi.
Le lendemain, M Félix Faure ira chasser
chez des amis personnels et, lundi, il ren-
trera définitivement à Paris.
rvv-.. M. Méiine, président du conseil,
ministre de l'agriculture, inaugurera au-
jourd'hui, à trois heures, l'exposition d'a-
nimaux de basse-cour organisée au palais
de l'Industrie (entrée par la porte n° 5) par
la Société nationale d'aviculture de France.
Cette exposition réunit près de deux
mille lots. Elle sera ouverte jusqu'à lundi
prochain.
- Séance hier à l'Académie française.
Lecture a été donnée d'une lettre par la-
quelle M. Jean Aicard déclare retirer sa
candidature au fauteuil d'Alexandre Dumas.
- Passage des princes :
Le roi de Grèce a quitté Paris hier soir
par l'Express-Orient. Il s'arrêtera quelques
jours à Vienne avant de rentrer à Athènes.
Le roi des Belges vient d'arriver. Il vient
surveiller les travaux de construction de la
propriété qu'il a achetée à Beaulieu.
La reine de Portugal a traversé Vichy,
allant au château de Randan,
- Le contre-amiral Léopold Four-
mer, ancien major général de la marine à
Brest, vient de mourir à Montricourt
(Tarn-et-Garonne), où il se trouvait en
convalescence depuis quelques mois.
Le contre-amiral Fournier, né à Negre-
pelisse en 1839, était lieutenant de vais-
seau en 1870 et commandait en cette qua-
lité les wagons blindés à l'attaque de Mon-
tretout, où il fut grièvement blessé.
La date des obsèques n'est pas encore
fixée.
- Les obsèques de Mme Delpeuch
ont été célébrées hier, à midi, à Saint-
François-de-Salles, au milieu d'une grande
affluence de notabillités politiques et par-
lementaires.
Le deuil était conduit par M. Edouard
Delpeuch et trois membres de la famille.
L'inhumation a été faite au Père-Lachaise.
—— La mort de M. Léon Say avait laissé
vacante la présidence de la Société d'hor-
ticulture de France.
Cette association a procédé hier à l'élec-
tion de son nouveau président. Son choix
s'est porté sur M. Viger, député, ancien
ministre de l'agriculture.
- MM. Le Myre de Vilers, le prince
d'Arenberg, Binger, Simon, directeur de
la Banque de l'Indo-Chine; Mercet, vice-
président du Comptoir d'escompte, et Mu-
teau se sont réunis hier au ministère des
colonies, sous la présidence de M. André
Lebon.
Ils ont jeté les bases d'une société ci-
vile, destinée à assurer la construction et
l'entretien d'une maison de convalescence
destinée aux factionnaires coloniaux, aux
employés de commerce et aux colons, re-
venant de nos possessions d'outre-mer.
-- La Société centrale de médecine
vétérinaire a tenu hier, à trois heures, sa
séance annuelle.
- Les caisses d'épargne ont procédé
à l'élection de deux membres de la com-
mission supérieure instituée par la loi du
20 juillet 1895, en remplacement de MM.
Ducy, d'Evreux, et Gaden, de Bordeaux.
1,146 suffrages ont été exprimés. Ont
été élus : 0
M. Rubillard, président de la caisse d'é-
pargne du Mans, 494 voix ;
- M. Morin, vice-président de la caisse
d'épargne de Pithiviers, 283 voix.
- Le concours de tir :
La distribution des prix du 58 concours
de tir aura lieu dimanche prochain, à une
heure et demie, dans le grand amphithéâtre
de la Scrbonne.
M. Barthou, ministre de l'intérieur, pré-
sidera. Le général Saussier a promis la
musique de la garde républicaine.
Le soir grand banquet à l'hôtel Conti-
nental.
- Par ces temps brumeux, l'imagina-
tion se laisse entraîner vers les régions en-
soleillées du Midi; rêve qui devient une
réalité sous la plume de Constant de Tours,
l'aimable auteur de Vingt jours sur les
côtes de la Méditerranée (de Marseille à
l'Espagne), paru à l'ancienne maison Quan-
tin dans la jolie collection des Guides-
Albums du Touriste. C'est un délicieux
voyage à faire dans son fauteuil ou sur
place ; le beau ciel de Provence, Arles et
Saint- Trophime, les farandoles des Saintes-
Maries-de-la-Mer, les courses de taureaux,
Montpellier, Narbonne, etc., sollicitent
tour à tour notre attention, sans compter
une série de 130 dessins reproduisant les
paysages, monuments et costumes.
A L'ETRANGER
Les terres du ciel :
M. Witt, astronome à l'observatoire de
Berlin, a, dans la soirée du 11 octobre,
découvert par la voie photographique une
planète de onzième grandeur.
Allons, tant mieux!
"-'-'-« A l'instar de Jules Verne » ou « la
vie imitant le roman ».
La fameuse histoire du détective Fix,
poursuivant à travers la terre et les mers le
gentleman Phileas Fogg faisant le tour du
monde en quatrevingts jours, vient de
trouver son pendant dans la réalité.
Le paquebot Ruapehu débarquait, en ef-
fet, hier à Plymouth un « globe-trotter »
peu ordinaire qui aura terminé bientôt sa
circumnavigation.
C'est un avocat australien, nommé Ja-
mes Edward Geake, poursuivi là-bas en
raison d'un escroquerie de 15,000 francs,et
qui avait profité de sa mise en liberté sous
caution pour prendre le large.
Le détective Rogers fut lancé à sa pour-
suite, le suivit d'abord à travers la Nou-
velle-Zélande, dut ren-oncer à le saisir là,
s'embarqua derrière lui pour la Républi-
que argentine, où il arriva à temps pour
réclamer son extradition. Mais il avait
compté sans les lenteurs ordinaires de la
procédure.
Il télégraphia en Australie, mais sans
pouvoir empêcher que l'avocat Geake se
sauvât avec sa femme pour le Brésil. Ce
fut là, enfin, qu'il put s'emparer de lui et
obtenir que les autorités locales le gardas-
sent jusqu'à l'arrivée des pièces. Toutes
les formalités épuisées, il prit passage,
avec son prisonnier, sur le premier paque-
bot en partance, celui qui l'a débarqué
hier en Angleterre.
Geake a été amené à Londres. Dans
quelques jours, il sera embarqué sur un
paquebot qui le ramènera en Australie, et
il aura fait complètement letour du monde
avant de s'entendre condamner.
Le Passant.
PRISONNIER DANS UNE AMBASSADE
Le Globe de Londres publie une extaaor-
dinaire histoire d'enlèvement, dont voici le
résumé.
Il paraît qu'au mois de novembre dernier,
le gouvernement chinois fut mis sur les
traces d'une conspiration qui avait pour but
de faire disparaître le vice-roi de Canton et
de préparer ainsi le renversement de la
dynastie mandchoue. Le secret transpira,
damant plus que l'arrivée prématurée de
400 coolies, qui avaient été envoyés de
Hong-Kong à Canton, pour amener l'exécu-
tion du complot, éveilla les soupçons. Le
résultat fut que quinze organisateurs furent
arrêtés et décapités.
D'autres conjurés purent s'échapper et
parmi eux se trouvait un médecin nommé
San-Yat-Sen, bien connu à Hong-Kong, qui
passa d'abord en Amérique puis vmt à
Londres. Il s'installa dans le voisinage de
Gray's Inn Road.
Samedi dernier il sortit de chez lui et de-
puis n'a pas reparu. On croit qu'il a été en-
levé et transpor é à l'ambassade de Chine.
Une autre histoire veut que San-Yat-Sen,
se croyant en sûreté dans les rues de Lon-
dres, passait insouciamment devant l'am-
bassade chinoise quand il fut soudain saisi
par deux Chinois eu poussé violemment
dans l'ambassade où il est maintenant re-
tenu.
11 est en tous cas certain que le prisonnier
a trouvé le moyen de faire connaître sa dé-
tention à quelques amis anglais qu'il avait
connus à Hong-Kong et ceux-ci s'occupent
activement de lui Le ministre des affaires
étrangères e la direction de la police ont été
avisés. Au début, on a conçu quelque doute
sur l'au henticité de cette histoire, mnis ac-
tuellement des détectives surveillent les
alentours de l'ambassade pour empêcher
que le prisonnier ne soit emmené.
Les amis de celui-ci prétendent que des
préparatifs avaient été faits pour le trans-
porter en Chine, à bord d un navire retenu
pour la circonstance. Ils ont demandé un
mandat de comparution du prisonnier de-
vant les tribunaux afin de le faire sortir,
mais il est dou. même si le mandat est
accordé, qu'il puisse trouver son exécution
dans une ambassade étrangère.
Les fonctionnaires de l'ambassade chi-
noise nient qu'ils détiennent leur compa-
triote, dont les amis maintiennent énergi-
quement leurs affirmations.
LA VIE DE PARIS
Par HENRY FOUQUIER
Les correspondances d'hommes et
de femmes célèbres offrent un intérêt
qui nous paraît parfois, par l'intimité
où elles nous font entrer, supérieur à
l'intérêt même de leurs œuvres les plus
belles. Pour le moment, nous sommes
bien traités par les circonstances. Si-
multanément, des publications parais-
sent, qui nous donnent les lettres de
Victor Hugo et, aussi, des détails sur
Alfred de Musset et Mme Sand, parti-
culièrement à propos de l'épisode cé-
lèbre déjà de leur voyage à Venise, où
le poète, malade, fut trompé par son
amie et par son propre médecin. Le
génie ne met pas à l'abri de ces sortes
d'aventuros et même, comme l'a rap-
pelé un ironique,
La garde qui veille anx barrières du Louvre
N'en défend pas les rois!
On se demande souvent s'il n'y a pas
quelque inconvénient à donner ainsi en
pâture à la curiosité du public les his-
toires secrètes du cœur qui sont arri-
vées à des hommes et à des femmes
dont les descendants vivent encore, et
à redire ces drames de la passion qui
ont agité leur vie? Ces inconvénients
peuvent exister. Mais on ne s'y arrête
pas, car, de plus en plus, qu'il s'agisse
des politiques ou des grands écrivains,
les hommes en vue ne peuvent défen-
dre le secret de leur vie privée. Il sem-
ble qu'elle doive appartenir au public.
Et ce qu'il y a d'assez amusant, c'est
que ce même Sainte-Beuve, qui est re-
mis sur le tapis à l'occasion de la Cor-
respondance de Victor Hugo, et d'une
façon assez désagréable pour lui, est
l'homme qui a le mieux expliqué les
raisons qui font que l'intimité de la vie
d'un homme est indispensable à con-
naître pour apprécier de façon complète
soit le rôle qu'il a joué, soit son mérite
littéraire. Si bien que lui, qu'on a estimé
jadis un peu indiscret, se trouve en
butte à l'indiscrétion la plus com-
plète, à propos, surtout, de ses rela-
tions avec Victor Hugo et de la brouille
éclatante qui les termina, Sainte-Beuve
n'ayant pas pu voir, sans devenir
amoureux, la grande grâce de Mme
Victor Hugo, et cet amour, quoique
resté platonique, étant devenu très gê-
nant.
Cette correspondance de Victor Hugo
avec Sainte-Beuve est des plus intéres-
santes. Je ne voudrais pas avoir l'air
d'avoir, ici, une opinion de circons-
tance, dans une maison où le souvenir
de V ictor Hugo est resté à juste titre très
cher. J'évite de même, autant que faire
se peut, le reproche d'être devenu, en
vieillissant, l'homme grincheux qui ne
se souvient du passe que pour le louer
au détriment du présent : laudator tern-
poris acti, dit le poète latin. Mais il me
parait hors de conteste que la généra-
tion qui a précédé la mienne a eu, sur
notre jeune génération, une supériorité
que je tiens pour très essentielle. Elle
avait, à la fois, un très grand respect
pour les maitres, une véritable vénéra-
tion pour le talent et, en même temps,
entre jeunes gens qui débutaient en-
semble dans la vie littéraire, une cama-
raderie passionnée, une amitié sincère,
qui est bien touchante 1 Les lettres de
Victor Hugo, à cet égard, sont admira-
bles et édifiantes. Même alors qu'il a
déjà quelque grief contre Sainte-Beuve,
il lui écrit dans les termes d'une amitié
désolée à la surprise d'un désaccord
possible entre eux. Les ruptures d'ami-
tiés, chez les jeunes gens de cette épo-
que, ont les déchirements et les tris-
tesses de ruptures d'amour. La solida-
rité intellectuelle entre hommes ayant
les mêmes ambitions, passant par les
mômes épreuves, supportant les mêmes
luttes, cette solidarité est admirable.
Elle forme un contraste absolu avec la
« rosserie » — j'emploie un mot à la
mode, quoique je déteste et la chose et
le mot qui fexprime — qui est si ordi-
naire dans les rapports de nos jeunes
littérateurs.
Ceux-ci ne sont, en réalité, d'accord
que sur un point. Ils ont presque tous,
au même degré, le mépris de ceux qui
les ont précédés dans la carrière.A part
trois ou quatre hommes, envers qui
les générations nouvelles témoignent
d'un respect qui ne va pas sans quel-
que superstition, hommes qui sont,
d'ailleurs, morts et, par conséquent,
ne gênent personne, la mode est, au-
jourd'hui, poussée au dénigrement. Il
se publie, à Paris, une demi-douzaine
de revues, œuvre presque exclusive
d'hommes jeunes, dont la seule raison
d'être semble être de dénigrer les écri-
vains dont le public connaît le nom et
aime le talent. Les qualifier de « cri-
tiques » est une aménité courante. En-
core si c'était là le fait de cette loi,
bonne en soi, qui veut qu'une généra-
tion nouvelle ait ses aspirations à elle,
son désir d'être indépendante et créa-
trice à son tour, il n'y aurait que demi-
mal. Mais il n'en est pas ainsi. Car ces
jeunes gens ne sont pas, comme jadis
les romantiques, unis par une foi com-
mune, par un idéal. Ils ont chacun le
goût ardent de l'individualisme et ils
se détestent et « s'éreintent » entre eux,
absolument comme ils détestent et
« éreintent » les gens arrivés. Et si les
vieillards ont quelquefois le tort de trop
louer le temps passé, où revit le sou-
venir de leur jeunesse, ils ont, eux, le
iBt
tort autrement grave de paraître dé-
tester leur temps, alors même quilg
ont le bonheur d'y être jeunes, pouvant
espérer dans l'avenir pour voir se réaliw
ser les projetsqu'ils conçoivent comme
nécessaires et justes.
La correspondance de Victor Hugo
n'a donc pas été, pour moi, la satisfac-
tion d ailleurs légitime de la curiosité
qui s aitacne à bon droit à tout ce qui
touche à l'histoire de la vie, des idées
et des sentiments d'un homme de génie.
Elle est, à mes yeux, d'une haute va-
leur morale parce qu'elle nous montre,
chez le poète jeune, de respect pour les
ancêtres qu'il devait faire oublier, d'op-
timisme, de sentiment, de tendresse de
cœur, de sensibilité. Quel contraste
avec la séchéresse de tant de nos jeunes
gens, avec l'égoïsme de tous ces con-
templateurs de leur nombril pour qui
rien ne semble exister en dehors d'eux.-:
mêmes I Il n'est pas une tendresse que
Victor Hugo renie. Il est amant, mari,
père ; il est ami. Certes, partout des
douleurs pourront l'atteindre. Mais ces
douleurs sont pour le poète ce que sonf
les sacrements pour le chrétien. Qui ne
les connalt pas n'arrive pas à la per-
fection 1
HENRY FOUQUIER.
Nous publierons demain la Chronique
de M. André Batz.
Le Drame de la rue Montmartre
Un drame sanglant s'est déroulé hier soir
à huit heures et demie dans l'hôtel situé
165, rue Montmartre. Un garçon de café1,
nommé Yvon Clcuziotl, âgé de trente-deux
ans, habitait depuis quelque temps la mai-
son. Depuis quelques jours il était tomDÓ
malade et ne travaillait plus.
Hier, il avait prié sa maîtresse, une jeune
et jolie fille de vingt-et-un ans, Louise Vieille,
dite « Germaine J), de venir le voir. La jeune
fille accéda à sa demande et vint dans la
soirée. Que se pas-a-t-il au cours de l'entre-
tien ? On l'ignore encore.
Toujours est-il que Cleuziou tirant un re-
volver de dessous son oreiller en déchargea
trois coups sur la jeune fille, qui tomba. °La
croyant morte, le meur rier à son tour se
fit justice on se logeant une balle dans la
tête.
Le docteur Jouin, appelé, ne put que cons-
tater le décès de Cleuziou. Quant à Louise
Vieil!e, sur les trois balles tirées, deux n'ont
fait qu'effleurer la tête, labourant le cuir
chevelu ; la troisième s'est logée dans le dos.
Cette dernière blessure présente un aspect
inquiétant. A dix heures moins le quart, une
voiture des ambulances urbaines a trans-
porté la blessée à l'hôpital Lariboisière.
iltftfc ■
CHRONiQUEDRAMATIQUE
Porte-Saint-Mariin. - Les Bienfaiteurs,
pièce en quatre actes, do M. Brieux.
M. Brieux vient de nous asséner uno
rude satire de notre pratique courante
de la charité. Ah ! mais c'est quelqu'un.
Attention !
Landrecy est vaguement ingénieur
dans les bureaux d'une usine, en quel-
que chef-lieu lointain. Sa femme Pau-
line et lui, sans autres ressources, d'ail-
leurs, que ie produit de son emploi, font
la charité autour d'eux à pleines mains,
c'est dire qu'elles sont bientôt vides. Ils
ont, en outre, recueilli une jeune orphe-
line, leur cousine Georgette, et ils gar-
dent obstinément à leur service, Clara,
un souillon revêche et des plus mai
embouchées, sous prétexte qu'elle ne
pourrait se placer ailleurs, si bien que
leur logis a été surnommé la maison
des fous.
Cependant, Landrecy, après avoir pris
chaudement contre son patron la dé-
fense d'un ouvrier, a offert sa démis-
sion qui a été acceptée. On trouvera
bien une place ailleurs. Ah ! si on avait
un capital pour racheter une usine
électrique qui est en liquidation et y
exploiter le nouvel accumulateur in-
venté par Landrecy et son collègue
Henri Clermont, le fiancé de Georgette 1
Quelle fortune i Que de bienfaits on ré-
pandrait autour de soii Quelle occasion
d'appliquer leurs chères théories sur le
salaire proportionnel, pour chaque ou-
vrier, au nombre des bouches à nourrir
chez lui, et sur le relèvement du tra-
vailleur par le constant appel à sa di-
gnité d'homme.
Au milieu de ce pot-au-lait tombe un
oncle d'Amérique vingt fois million-
naire, Valentin Salviat, le frère de Pau-
line, parti jadis en sabots de son Mau-
riac. Il réussit, non sans peine, à l'aire
accepter le capital rêvé. Il est bien urt
peu sceptique sur l'efficacité de la cha-
rité, notre rude Auvergnat, et, comme
tous ceux de sa race, il compte plus sur
l'effort individuel que sur l'association.
L'assistance publique,il en a tàté jadis,
et, parmi les avanies essuyées dans ses
bureaux, il a constaté qu'elle profi-
tait surtout à ses employés. Quant
à la charité des religions, celle « qui;
eût fait un Tartufe de Voltaire lui-
même ». ou. Enfin, puisqu'on y tient
et que ses millions n'ont rien de Inlcnx
à faire, on va se livrer à un exercice
expérimental de charité privée, d abord
sur les pauvres de tout acabit et ensuite
sur les travailleurs payés selon leurs
charges de famille et traités selon leur,
dignité d'hommes. 1
Cette berquinade, assaisonnée d'ail-
leurs de mots jolis ou pointus, remplit
le premier acte et forme le postulat de,
la démonstration ; car on ne nous a pas
caché qu'il s'agit d'une pièce à thèse.
Un an s'est écoulé. L'or de Salviat ai
patronné et a fait foisonner les a:
dations de charité, autour des Land
cy : en voici pour les vieillards iadH
gents, pour les filles-mères, pour lem
sortis de prison dits les régénérés, etc.
Notre bourru bienfaisant est de retour:
on va lui rendre des comptes ai W
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