Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1896-10-16
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Description : 16 octobre 1896 16 octobre 1896
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/05/2013
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PARIS ET DEPARTEMENTS
lie Numéro, CINQ CENTIMES
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N° 9716. — Vendredi le Octobre 1896
25 VENDÉMIAIRE AN 105
ADMINISTRATION t 181, rue Montmartre, tat-
Adresser lettre» et mandats à VAdministrateur
NOS LEADERS
LETTRES LIBRES
6'Armée coloniale et la marine
Il y a un an au moins, alors que le
gouvernement, cédant à un mouve-
ment très actif de l'opinion publique,
manifestait l'intention de procéder à
la constitution d'une armée coloniale,
j'écrivais ici même que les intérêts
particuliers mis en jeu par le projet
gouvernemental seraient assez puis-
Ban.ts pour retarder la solution d'un
problème que l'on discute depuis plus
Se dix ans sans jamais aboutir ; les
faits n'ont que trop donné raison à ma
manière de voir. Il semble qu'on soit
Aujourd'hui plus loin que jamais de
l'heure où la France sera dotée d'une
armée coloniale.
Il y a un an, la solution qui parais-
sait être le plus en faveur consistait à
rattacher l'armée coloniale au minis-
tre de la guerre. En ce moment,
dans les milieux gouvernementaux, il
semble que le maintien des troupes
Soloniales au ministère de la marine
)mporte la majorité des suffrages.
#*#
Les partisans de ce système invo-
,quee surtout une question de fait :
Voirà bien des années, disent-ils, que
(es troupes coloniales dépendent de la
marine, et-malgré tous les reproches
adressés à cette dernière, les choses
Vont assez bien, sans être parfaites,
pour qu'on dedVô hésiter à se lancer
~tans l'inconiïû.
On ajoute encore que les troupes
Bplojaiales et la marine étant destinées
.opérer côte à cote et à se prêter sans
jïeSse une assistance réciproque, il y
a intérêt à ce qu'elles soient réunies
dans le même ministère ; que si l'on
rattache les troupes coloniales au mi-
nistère des colonies, elles perdront
rapidement leur caractère militaire
pour devenir une sorte de milice co-
loniale ; que si, au contraire, on les
rattache à la guerre, elles perdront
leur homogénéité, leur esprit de
torps, les traditions qu'officiers, sous-
officiers et soldats se transmettent de-
puis un siècle et qui font que tous les
Éléments de l'infanterie et de l'artil-
lerie de marine sont adaptés d'avance
a la vie maritime et coloniale.
Parmi les troupes coloniales elles-
mêmes les opinions varient avec les
grades : les jeunes officiers que la vie
coloniale n'a pas encore fatigués,
qu'elle attire, au contraire, par la fa-
cilité des mœurs et les chances d'un
avancement plus rapide, sont généra-
lement favorables au maintien des
troupes coloniales sous la direction du
ministre de la marine. Les officiers
généraux, au contraire, qui n'ont plus
rien à attendre du denier colonial,
sont, en général, partisans du ratta-
chement des troupes coloniales au
ministère de la guerre. Il n'est point
rare de les entendre mettre leurs
états de service aux colonies en pa-
rallèle avec ceux des généraux de
l'armée métropolitaine à qui sont ré-
servés les commandements des corps
d'armée. Ils se considèrent comme sa-
crifiés à ces derniers et, ayant tiré des
colonies tout ce qu'ils en pouvaient
obtenir, ils iraient volontiers courir
dans les hauts rangs des troupes mé-
tropolitaines, les chances d'une nou-
velle fortune.
4*
Des raisons majeures militent con-
tre le maintien des troupes coloniales
au ministère de la marine.
Au point de vue financier, ce main-
tien offre des inconvénients graves.
Il est bien établi par l'expérience que
l'infanterie et l'artillerie de marine
coûtent plus cher étant attachées à ce
ministère que si elles dépendaient de
eelui de la guerre. Le nombre des offi-
ciers généraux de ces deux armes est
très supérieur aux besoins réels des
colonies.
En Indo-Chine, il existe aujour-
d'hui trois généraux, dont un de divi-
sion, alors qu'un seul général de bri-
gade suffirait. A mesure que le pays
se pacifie, on. augmente ses dépenses
militaires.
L'état-major particulier de l'artille-
rie y est encore moins en rapport avec
les besoins réels. Vingt-quatre officiers
en faisaient, de mon temps, partie ; ils
coûtaient plus de 450,000 francs pour
une dépense en matériel de moins
d'un million. Malgré le concours qui
me fut donné, en vue de la réduction
du nombre de ces officiers, par le com-
mandement militaire lui-même, je ne
pus obtenir que des diminutions tout
à fait insuffisantes; depuis mon dé-
part, on a considérablement augmenté ;
ce même état-major.
Le ministre de la marine, ne sachant
que faire des officiers d'infanterie et
d'artillerie de marine qui encombrent
les cadres de ces deux corps, est con-
traint de les mettre à la charge des
colonies. Celles-ci ont beau protester
que cela augmente inutilement leurs
dépenses, le gouvernement reste
sourd à leurs plaintes. Où mettrait-il
les officiers qui existent en trop? Or,
le nombre de ceux-ci va sans cesse en
augmentant, à cause des nominations
supplémentaires que l'on fait dans les
moments où surgissent des besoins
exceptionnels.
Si au lieu d'être isolées au ministère
de la marine, les troupes coloniales
faisaient partie de l'énorme masse mi-
litaire de la guerre, il serait facile
d'emprunter à celle-ci et de lui rendre
les unités dont les colonies ont besoin,
en réglant les emprunts d'après les
nécessités réelles de chaque colonie et
de chaque année.
Au point de vue financier, j'estime
donc qu'il y a inconvénient à laisser
les troupes coloniales sous la dépen-
dance du ministre de la marine. Cet
inconvénient apparaîtrait plus grave
encore le jour où l'on ajouterait à
l'infanterie de marine, à l'artillerie de
marine et aux régiments indigènes
qui dépendent actuellement du minis-
tre de la marine, les bataillons de la
légion étrangère et les troupes de ré-
serve qu'il faudra constituer pour les
nécessités extraordinaires.
**
Le rattachement des troupes colo-
niales à la marine offre un autre in-
convénient non moins sérieux : il est
la source principale des conflits inces-
sants qui se produisent, dans nos co-
lonies, entre les autorités militaires et
les gouverneurs.
La marine n'a pas encore oublié
qu'elle a eu, jusqu'à ces dernières
années, la direction complète des colo-
nies ; elle n'a pas désespéré de remet-
tre la main sur le domaine où ses
amiraux trouvaient des situations vi-
vement regrettées ; lui attribuer tou-
tes les troupes coloniales d'une ma-
nière définitive, ce serait réveiller des
ambitions à peine assoupies.
On encouragerait ainsi, par cette
mesure, la tendance qu'a eue de tout
temps la marine à faire, dans les mers
où ses bateaux circulent, une politique
spéciale, que dirigent des idées tradi-
tionnelles rue Royale, et qui ne fut pas
toujours la plus conforme aux intérêts
généraux de notre pays, parce qu'elle
ne tenait pas suffisamment compte de
la situation continentale de la France:
Ce n'est donc pas au ministère delà
marine qu'il faut attribuer l'armée co-
loniale, à moins qu'on ne veuille voir
augmenter les dépenses et nos colonies
persister dans le militarisme qui leur
fait tant de mal.
J'examinerai, dans une seconde
Lettre, les autres solutions.
J.-L. DE LANESSAN.
Nous publierons demain un article
de M. Charles Bos.
LA RENTRÉE DES CHAMBRES
La date du 27
Commission du budget en retard
Les futurs débats
Madagascar-Politique générale
La France et la Russie
Ainsi que nous l'avons annoncé hier, la
date de la rentrée des Chambres sera fixée
au mardi 27 octobre. Le conseil de cabinet,
qui se réunit aujourd'hui sous la présidence
de M. Méline, arrêtera définitivement cette
date.
Le gouvernement, malgré son désir, n'a
maintenant aucune raison de reculer au
3 novembre l'ouverture de la session extra-
ordinaire de 1896. En effet, MM. Delombre
et Krantz, délégués par la commission du
budget, se sont rendus hier auprès du pré-
sident du conseil pour lui annoncer que la
commission du budget serait prête à dis-
cuter dès le 27 octobre.
On comprend aisément que la commission
du budget n'ait pas voulu prendre la res-
ponsabilité du retard de la convocation du
Parlement ; mais il n'en est pas moins cer-
tain, malgré l'affirmation de MM. Delombre
et Krantz, qu'elle ne sera pas en mesure de
soutenir la discussion financière avant un
mois au moins, on peut facilement s'en con-
vaincre en constatant que l'examen des
budgets de dépenses n'est pas encore ter-
miné et que le ministre des finances ne l'a
pas encore saisie de ses propositions en ce
qui touche l'équilibre qui se trouve singu-
lièrement compromis par suite de l'inscrip-
tion de nouvelles dépenses dans divers cha-
pitres.
D'autre part, M. Cochery n'a pas fait sa-
voir à la commission s'il persistait à main-
tenir son projet d'impôt sur les revenus,
avec l'impôt sur la rente, ou s'il lui substi-
tuait un nouveau projet.
Ce sont là des questions dont l'urgence
n'est pas contestable et cependant la com-
mission du budget ne semble pas devoir
s'en préoccuper.
En faisant remarquer le peu d'avancement
des travaux do la commission du budget,
nous n'entendons pas donner un argument
à ceux des députés qui ont agi auprès du
ministère pour que la rentrée n'ait lieu que
le 3 novembre, nous voulons simplement
souligner ce fait que, cette année, la com-
mission du budget, statue sur des proposi-
tions qui ne sont pas définitives et qui peu-
vent naturellement changer suivant que M.
Cochery fera telle ou telle proposition.
C'est la première fois que pareil fait se
produit, mais la majorité modérée de la
commission du budget peut-elle se refuser
à souscrire à la baroque méthode de tra-
vail inaugurée par M. Cochery ?
Au surplus, si la commission du budget
était prête le 27 octobre, ce qui est maté-
riellement impossible, nous venons de le
démontrer, la discussion budgétaire ne pour-
rait pas être portée immédiatement à la tri-
bune. Tout le monde n'est-il pas d'accord
pour en finir, d'abord, avec deux ou trois
affaires tout aussi urgentes que le budget.
DÉBAT URGENT
En première ligne se posera la question
de Madagascar et le gouvernement devra
répondre sans plus tarder aux interpella-
tions déjà annoncées. Il importe de savoir
ce que le ministre des colonies se propose
de faire pour mettre un terme aux exactions
commises dans notre nouvelle colore.
Quelles sont les instructions qu'a emportées
là-bas le général Galliéni '? Quelle est l'at-
titude que va tenir l'administration des co-
lonies à l'égard des contrats singuliers si-
gnés par M. Laroche, pour l'exploitation de
notre possession.
Ce débat ne peut pas être différé, pas plus
que celui qui sera soulevé dès la reprise des
travaux parlementaires au sujet de la poli-
tique générale du gouvernement. Le dernier
mouvement préfectoral contient dos indica-
tions sur cette politique, mais encore faut-il
qu'une discussion à la tribune en fixe le vé-
ritable caractère.
Enfin on prévoit que le vote des dépenses
occasionnées par le séjour des souverains
russes en France — qui s'élèvent à environ
six millions — donnera lieu à un échange
d'observations sur les conditions dans les-
quelles les cérémonies, de la semaine franco-
russe ont été organisées.
On annonce également qu'à ce propos
M. Jaurès demandera au ministre des af-
faires étrangères de préciser la nature de
l'accord intervenu entre la France et la
Russie.
C'est ainsi qu'à l'heure actuelle s'annonce
la rentrée du Parlement.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN:
Les courses : A Chantilly.
— Rentrée des cours et tribunaux.
— Changement d'heures : Bibliothèque natio-
nale, de 9 à 4 ; Mazariae, de n à 4. 1
— ire inscription de l'Ecole des langues orien-
tales, et pour les dispenses des droits univer-
sitaires.
- Durée du jour : 11 h. 54 m.
AU JOUR LE JOUR
Solidarité, c'est le titre et c'est la con-
clusion du beau livre que vient de pu-
blier (chez l'éditeur Armand Colin) M.
Léon Bourgeois, ancien président du
conseil.
Voilà un livre qu'il ne faut pas se con-
tenter de lire ; il faut l'étudier et le mé-
diter. Aussi n'en parlons-nous aujour-
d'hui, ne l'ayant entre les mains que
depuis peu d'heures, que pour en an-
noncer l'apparition.
M. Léon Bourgeois estime que nous
sommes à la veille de découvrir la so-
lution qui satisfera à la fois les défen-
seurs de la science économique et ceux
des systèmes socialistes. Il dit :
« La notion des rapports de l'individu
et de la société s'est profondément mo-
difiée depuis un quart de siècle. En
apparence, rien n'est changé, le débat
continue dans les mêmes termes. »,
mais « ce n'est pas entre les hommes,
c'est entre les idées qu'un accord tend
à s'établir ; ce n'est pas un contrat qui
se prépare, c'est une synthèse. »
Deux ou trois alinéas pris dans le
volume indiqueront, mieux que nous
ne saurions le faire nous-même, la
marche de l'argumentation de l'auteur :
« Pour tous au fond, et sous des
noms divers, la doctrine est la même ;
elle se ramène clairement à cette pen-
sée fondamentale : il y a entre chacun
des individus et tous les autres un lien
nécessaire de solidar ité ; c'est l'étude
exacte des causes, des conditions et
des limites de cette solidarité qui seule
pourra donner la mesure des droits et
des devoirs de chacun envers tous et
de tous envers chacun et qui assurera
les conclusions scientifiques et morales
du problème social. »
« Lien nécessaire de solidarité », dit
M. Bourgeois, et c'est le mot : solida-
rité qu'il imprime en caractères ita-
liques; il aurait pu en outre, et surtout
souligner le mot: nécessaire. C'est cette
nécessité de la solidarité qui seule peut
être opposée à certains esprits.
M. Bourgeois dit en effet, très jus-
tement : « La thèse d'indifférence des
économistes n'est, au fond, que la justi-
fication des excès de la force ; dans la
libre lutte pour l'existence, le fort dé-
truit le faible : c'est le spectacle que
nous offre l'indifférente nature. Est-ce
pour en rester là que les hommes sont
en société? Si la liberté humaine est un
principe, le droit à l'existence en est
un aussi, nécessairement antérieur à
tout autre, et l'Etat doit le garantir
avant tout autre. »
Et il émet encore une affirmation
que nous acceptons quant à nous,
quand il s'écrie : « L'homme nait débi-
teur de la société humaine. »
Mais que vaudra cette affirmation
pour l'homme qui refusera de l'accep-
ter? Pour l'homme qui répondra: « Je
n'ai pas demandé à naître, et je ne suis
pas débiteur, n'ayant pris aucun enga-
gement. » Celui-là, on sera toujours ré-
duit à lui faire remarquer que, la pla-
nète entière était occupée avant qu'il
n'arrivât, que la dette existe, qu'il n'est
pas de procédé connu qui ait puissance
de le soustraire à son paiement, que
c'est là un fait et que la loi de solida-
rité est une loi nécessaire.
Le grand pacificateur sera celui qui,
sans violence, arrivera à convaincre
cet homme de la nécessité d'accepter la
solidarité, d'accepter le devoir.
CHEZ NOUS
-
~—- La roi de Grèce à Paris :
L'amiral Besnard, ministre de la marine,
accompagné du lieutenant de vaisseau
Pumpeernel, officier de son état-major
particulier, a rendu hier matin visite au
roi de Grèce.
Aujourd'hui, le roi se rendra au château
de Rambouillet où le président de la Répu-
blique offre en son honneur un dinei
de trente-cinq couverts,
—— Nos hôtes :
Sont arrivés à Paris :
Le prince Karageorgewitch, arrivant de
Vienne ; M. de Freycinet, venant de Bâle;
le comte Bazile Hendrikoff, maître de la
cour de Russie ; M. Casimir-Perier, de
retour de Pont-sur-Seine.
Ont quitté la capitale :
Le prince Ourousoff, chambellan de la
cour de Russie ; M. Soianoff, chambellan
du prince de Bulgarie, et lord Dufferin,
ex-ambassadeur d'Angleterre qui rentre à
Londres, par Calais.
—— L'affaire Cornudet-Barthou :
Un nouvel incident vient de se greffer
sur le différend qui divise le ministre de
l'intérieur et le directeur de la Lanterne.
M. Chabrier, se jugeant oflensé par l'ar-
ticle de M. Cornudet, a envoyé deux té-
moins à celui-ci. M. Cornudet ayant refusé
toute rétractation et toute réparation avant
d'avoir porté la question devant le syndi-
cat de la presse parlementaire, ce syndicat
a été aussitôt saisi.
-- Les choses en sont là.
Quant au conflit Cornudet-Barthou, il
est improbable qu'il soit réglé dans la
séance que les délégués tiendront aujour-
d'hui, puisque M. Cornudet a demandé à
être entendu de nouveau demain ven-
dredi.
M. Chambige, député du Puy-de-Dôme,
mandé par M. René Goblet au sujet de
l'incident Barthou-Cornudet, est parti pour
Paris.
M. Méline, président du conseil,
ministre de l'agriculture, a reçu hier matin
le comte de Montholon, ministre de France
à Bruxelles.
Mme Furtado-Heine vient de faire
remettre à M. Lépine, préfet de police, la
somme de 3,000 fr., destinée à la caisse de
l'Œuvre des loyers.
La liste d'admission à l'Ecole de
Saint-Cyr sera probablement arrêtée au-
jourd'hui par le ministre de la guerre et
publiée dans le Journal officiel de demain.
, Les Pipos :
C'était hier, à midi moins un quart l'en-
trée des « conscrits » à l'Ecole polytechni-
que. La rentrée des anciens est, comme
nous l'avons dit, fixée à lundi.
-- Sauf dans le milieu spécial des gens
du métier, on ignore peut-être que c'est la
Grande Distillerie Cusenier qui vend le
plus gros chiffre d'absinthe du monde en-
tier. En France même, la Distillerie Cusenier
vient seconde (comme quantité vendue,
quoique première comme qualité). Mais les
chiffres de ses établissements de Buenos-
Ayres, Mexico, Mulhouse, Bruxelles, lui
font battre le record pour le monde entier.
Ces quantités s'augmentent tous les jours
depuis que la maison Cusenier a créé son
exquise Absinthe blanche oxygénée.
L'Absinthe blanche oxygénée Cusenier
est obligatoirement dans tous les bons
cafés.
- Nous apprenons le décès de M. Lu-
cien Puteaux, ancien conseiller municipal
du quartier des Batignolles, président de
la Société municipale de secours mutuels
du 17e arrondissement.
M. Puteaux était membre de la commis-
sion de surveillance des asiles d'aliénés de
la Seine, administrateur de l'Ecole nor-
male de la Seine, doyen de la délégation
cantonale du 17° arrondissement.
Les obsèques auront lieu vendredi, à
midi.
"'-----..- Le gouvernement portugais a confié
à un ingénieur et à un contremaître fran-
çais la réorganisation de l'arsenal de la
marine à Lisbonne.
-- Li Hung Tchang, en souvenir de sa
visite, vient de faire remettre sa photogra-
phie, par M. A. de Bernières, secrétaire
français de l'ambassade extraordinaire,
commissaire des douanes chinoises, au
président de la République, à M. Méline
et à M. Hanotaux.
Le Passant.
00 -———————————
LE CAS DE M. LANDRIN
On continue à s'entretenir du cas de M.
Landrin et il parait certain qu'à la rentrée
du conseil, qui est proche, un conseiller de-
mandera au conseil de voter la démission
de M. Landrin du poste de vice-président.
M. Landrin, mis au courant de ces faits,
a fait la déclaration suivante à un de nos
confrères du soir :
- « J'ai signé l'affiche incriminée, la tête
froide, sachant très bien ce qu'elle renfer-
mait. Comme elle exprimait les opinions
sociales et politiques avec lesquelles je me
suis fait élire, je ne regrette rien et ne désa-
voue rien.
» J'attends que l'incident annoncé se pro-
duise et j'y répondrai, sans vouloir esquiver
le débat par une démission anticipée. Cette
démission, je ne la donnerai d'ailleurs qu'a-
près un vote bien déterminé du conseil.
» Si on donne suite à ce projet et que le
conseil s'y associe, tant pis pour le conseil
et non pour moi, qui resterai dans la cir-
constance comme toujours invariablement
fidèle à mes doctrines socialistes révolution-
naires. »
Que M. Landrin prétende rester invaria-
blement fidèle à ses doctrines socialistes ré-
volutionnaires, c'est son droit, mais qu'il ne
dise pas comme toujours, car il nous sem-
ble difficile que ses doctrines soient assez
larges pour encourager ses votes aux réu-
nions du bureau du conseil convoqué par
lui et où il présidait lorsqu'on jeta les bases
de la réception du tsar à l'Hôtel de Ville et
pour exiger sa signature au bas de l'affiche
traitant de la même question, mais dans un
sens opposé.
LES TRAVAUX BUDGÉTAIRES
La commission du budget continue ses
travaux sans que ses délibérations soient
marquées par des discussions intéressantes.
La discussion financière ne sera certaine-
ment intéressante que lorsqu'elle viendra en
séance publique.
Résumons les travaux de la séance d'hier.
Répondant à une question de M. Merlou,
le président dit qu'aucune communication
ne lui a été faite relativement aux crédits
destinés à couvrir les frais d'installation à
Paris de l'Ecole supérieure de la marine,
installation ordonnée par un décret paru
hier matin à l'Officiel.
La commission aborde ensuite l'examen
du budget des chemins de fer de l'Etat.
Après discussion,la commission décide que
le rapporteur général exprimera, dans son
rapport, le regret que le décret de décembre
185 ait eu la prétention de rendre définitive
une organisation qui ne pouvait être que
provisoire. Le rapporteur général invitera
en conséquence le gouvernement à présen-
ter un projet de loi réglant d'une façon dé-
finitive le fonctionnement du réseau de
l'Etat.
M. le rapporteur fait remarquer que les
recettes du réseau de l'Etat suivent une
progression croissante. Elles sont, cette
année, supérieure de 2,300,000 francs aux
évaluations budgétaires et de 1,900,000 fr.
aux résultats de l'exercice précédent.
La commission aborde en fin de séance
l'examen du budget de l'Algérie.
M. Chaudey, rapporteur, fait un exposé
de la situation administrative et financière
de notre colonie.
Les chapitres sont adoptés, sauf plusieurs
qui sont réservés notamment celui relatif
aux fonds secrets.
UN DANGER NATIONAL
Marseille assaini
Le respect d'un programme électoral
Refus de réception — Situation étrange
Les travaux d'une commission
Question d'ordre général
Nous disions en terminant notre précédent
article sur la situation sanitaire de Marseille,
situation à laquelle la santé du pays est si
étroitement liée, que nous préciserions toutes
les responsabilités encourues dans la grave
question de l'assainissement de notre grand
port méditerranéen.
Mais avant d'entrer dans l'examen précis
des faits, depuis le jour où, se faisant
un tremplin électoral de l'œuvre de l'assai-
nissement, M. Flaissières, de conseiller mu-
nicipal, devenait maire de Marseille, il nous
parait nécessaire de donner les raisons qui
ont motivé cette discussion.
Il y a quelques mois, au moment où l'en-
trepreneur, M. Génis, venait de terminer les
travaux, bon nombre de propriétaires pen-
sèrent avec juste raison que ceux-ci avaient
été construits en vue de l'évacuation des
eaux ménagères et autres, et qu'en consé-
quence ils pouvaient se raccorder en payant
le montant de la taxe municipale y affé-
rente.
Les anciens égouts ayant été en majeure
partie éventrés, et le déversement des im-
meubles momentanément suspendu, les
sous-sols se trouvaient empoisonnés par les
infiltrations, et devenaient un danger de
jour en jour plus imminent pour la santé
publique ; d'autant qu'à la même époque,
on s'en souvient, l'épidémie cholérique était
aux portes de Marseille, en Orient.
Tel ne fut pas l'avis de M. Flaissières,
qui avait pris l'engagement solennel devant
ses électeurs, que Marseille demeurerait un
cloaque infect où stagneraient toutes les
épidémies, que notre grand port de com-
merce serait un danger public pour la
santé du pays tout entier ?
Le maire s'en tint strictement aux termes
de son programme, et refusa net l'autorisa-
tion demandée par les propriétaires.
La raison alléguée pour expliquer un pa-
reil état de choses était-elle sérieuse t
Nous n'hésitons pas à répondre non.
Se retranchant derrière un des articles du
contrat intervenu entre la ville et M. Génis,
M. Flaissières répondit : « Si nous vous au-
torisons à vous raccorder aux égouts, ceux-
ci seront, de par les clauses qui nous lient
à l'entreprise, considérés comme reçus, ce
que nous ne pouvons faire avant que la
commission nommée à cet effet ne se soit
prononcée sur la qualité des matériaux.»
Nous reconnaissons volontiers avec le
maire de Marseille qu'il ne pouvait donner
reçu des travaux, c'est-à-dire permettre aux
propriétaires 'à'assainir leurs immeubles
empoisonnés, avant que la commission mu-
nicipale n'ait émis son avis sur la qualité
des matériaux employés; mais M. Flais-
sières oubliait, et c'est ici que son attitude
devient étrange, qu'il existe dans ce même
contrat, tant critiqué par ses sous-ordres,
un article dont la précision ne prete a au-
cune équivoque et qui oblige tacitement la
ville à recevoir les travaux par rue et par
kilomètre achevé. Nous sommes convaincus
que le maire de Marseille ne peut fournir
aucune explication plausible sur ce refus de
réceptions partielles auquel le contraignait
cependant le cahier des charges.
Peut-être objeetera-t-on, ainsi qu'on le fit
déjà, que dans les six mois qui devaient
s'écouler entre l'achèvement des travaux et
l'acceptation définitive de leur fonctionne-
ment, on avait grand temps de faire procé-
der aux vérifications ; que du reste on ne
peut accuser l'administration municipale
d'incurie, puisque la commission a conclu,
après examen attentif, à la non réception de
93,000 mètres d'égouts et qu'on vient de le
faire signifier à l'entrepreneur.
Comment cette commission a-t-elle pu vé-
rifier les matériaux employés dans 93,000
mètres d'égouts en grès, enfouis à quelques
mètres du sol t Les commissaires n'ont rien
vérifié parce qu'ils ne le pouvaient pas, et
cela est d'autant plus vrai que l'organe offi-
ciel du maire de Marseille, disait dernière-
ment, en parlant des experts qui seront pro-
bablement nommés : « Cette fois on n'hési-
tera pas, quand le rapport sera déposé à
faire ouvrir des tranchées parallèles dans les
rues où il y a des ouvrages refusée, de fa-
çon qu'on puisse voir le profil des tuyaux, afin
qu'on constate les lignes brisées qu'ils décri-
vent, l'eau qui s'échappe des joints, les tuyaux
cassés, ceux désemboîtés en plein et enfin la
nature des matériaux employés. »
M. Flaissières peut-il prétendre que la
commission a opéré, ainsi que devront le faire
les experts ? En aurait-il été de même si les
réceptions avaient été faites au fur et à me-
sure de l'achèvement des troiiçons d'égouts
ainsi que l'exigeait le cahier des charges ?
Ce seul cas, de date récente, dit assez com-
bien est étrange l'attitude de M. Flaissières
à l'égard de l'œuvre d'intérêt général de l'as-
sainissement de Marseille. On ne peut même
pas prétendre qu'en agissant ainsi, le maire
ait eu, avant tout, souci des intérêts de la
ville, puisque à l'heure actuelle, le nombre
des procès perdus par la ville de Marseille
ne se compte plus. Et pendant ce temps,
notre grand port de commerce complète-
ment assaini, défiant les épidémies, gràce à
sa magnifique ceinture d'égouts, risque de
devenir à nouveau un foyer permanent de
toutes les maladies contagieuses, de conta-
miner le pays tout entier, raison unique et
de valeur assez sérieuse pour nous inquié-
ter.
UN PKOCÈS IN MMATlGiV
M. Jules Verne, l'auteur célèbre des Voya-
ges extraordinaires et son éditeur M. Hetzel,
comparaissent le 28 de ce mois, devant la 9*
chambre correctionnelle du tribunal de la
Seine, à la requête de M. Eugène Turpin.
Celui-ci les poursuit pour diffamation. La
cause de ce procès sensationnel est le der-
nier volume publié chez Hetzel par M. Jules
Verne et intitulé : Face au Drapeau M. Tur-
pin a cru se reconnaitre dans le principal
personnage de ce livre et il accuse M. Jules
Verne de l'avoir représenté sous les traits
les plus noirs en lui prêtant des sentiments
qui portent la plus grave atteinte à son
honneur et à sa consid ration.
De là une assignation lancée par M. Tur-
pin contre MM. Jules Verne et Hetzel, et qui
ne tend rien moins qu'à teur demander con-
jointement et solidairement 50,000 fr. de
dommages-intérêts, l'insertion du jugement
à intervenir dans cinquante journaux au
choix du requérant et la suppression des
passages ditfamatoires dans fe livre incri-
miné.
C'est Mc HenriCoulon, a-sisté de Me Albert
Montel, qui soutiendra les prétentions do
M. Eugène Turpin.
Attendons-nous à des révélatioos piquan-
tes et à des incidents n >mbreux^
LES MIETTES M LA SEMAINE
Jeudi 8 octobre. — Versailles!' Une
résurrection du passé dans l'espérance
d'un avenir que tous pressentent et sa-
luent, Le palais s éveillant de sa mé-
lancolie de tant d'années, et, dans les
rumeurs de la foule, au rythme des sal-
ves d'artillerie, dans le scintillement
des uniformes et l'éclat des fanfares,
sous le drapeau de la République cla-
quant à son fronton, 1 Hôte, le jeune.
empereur des steppes immenses dont
l'infini recule au lointain de l'Orient,
venant parmi l'escorte de cavaliers
français, évoquer la momoire du grand
roi. Après les Invalides, Versailles ;
Louis après Napoléon.
Et cela a été un arrêt charmant dans
cette promenade de rêve, une vision
fraîche et douce d'une impression moins
violente qu'en l'apothéose de Paris. Le
génie de la France ancienne revivait
dans ce vaste décor d architecture mu-
rale et végétale, témoin de sa magnifi-
cence et de sa gloire.- La nation mo-
derne, avec ses aspirations nouvelles,
son idéal différent, subissait le charme
de cette évocation de la patrie d'autre-
fois, de qui elle était née, qui lui avait
légué, avec l'héroïsme sacré de la race,
le goût du Beau et du Gr and dont ce
palais était la manifestation sublime.
Sans doute, au balcon des jardins,
devant la magie du coup d'œil, envahi
des souvenirs d'une histoire qu'il con-
naît bien, Nicolas a-t-il eu la sensation
profonde du destin de ce peuple dont
l'énergie vitale se retrempe aux sour-
ces vives d'un passé u orgueil. Et de-
vant nous, le jeune souverain, de sa
présence significatÍ ve, chassaità jamais
les remords de jadis. Son passage dans
la galerie des glaces, aux côtés du pré-
sident de la République, effaçait la souil-
lure dont après vingt-six annees nous
brûlait encore la honte, et dans ce salon
où sur notre ruine d'un instant s'écha-
faudait autrefois l'empire de sang, Ni-
colas Il, empereurde to utes les Russies,
affirmait le relèvement définitif de la
France, consacrait la puissance de la
jeune République.
Sur la façade du palais, les drapeaux
des deux peuples ilottaient.
Vendredi 9 octobre. — Châlons! Hier
le peuple, aujourd'hui l'armée. Ce n'est
plus la joie expansive de la rue, l'ac-
clamation roulant le long des avenues
comme un murmure de tleuve; les ar-
bres dépouillés par l'automne n'ont
point épanoui une lloraison aussi gra-
cieuse qu'artificielle. Nous sommes
au camp ; c'est l'heure sérieuse et so-
lennelle où la patrie, non loin de sa
frontière mutilée, montre non sans
fierté à son hôte ses troupes de pre-
mière ligne, ces admirables corps d'ar-
mée de l'Est, remparts vivants à l'abri
desquels elle a reconstitué, plus solide
que jamais, sa domination matérielle
et morale.
L'empereur, en sa longue tunique
pourpre de colonel cosaque, passe sur
le front des régiments, lentement, au
pas de son alezan doré. Son regard,
allumé à l'éclat des aciers, court le
long de cette muraille humaine immo-
bile et terrible, pénètre les masses pro-
fondes d'hommes alignés aux armes
droites. Le geste hésitant de sa main
portée au bonnet d'astrakan, tel qu'on
le remarquait ces jours derniers, s'af-
fermit aujourd'hui dans le salut grave
aux drapeaux et aux chefs, et l'on ne
sait plus dans la confusion des sensa-
tions si ce n'est pas lui que la Franco
présente à ses soldats, comme l'incar-
nation la plus élevée de cette armée
amie avec laquelle se cimente cette
confraternité d'armes qu'il invoquera
si hautement tout à l'heure.
Puis le défilé, les quadruples rec-
tangles des divisions en masses
épaisses, les képis rouges des fantas-
sins dans la forêt des baïonnettes, le
bleu-ciel des turcos, le carmin des
zouaves, la ligne sombre des vitriers
et des marsouins, l'artillerie roulant au
grand trot dans le fracas des pièces et
des caissons, toute l'armée en marchq
vers l'avenir réparateur, et la chargo
enfin, le tourbillonnement fou, l'enche-
vêtrement fantastique de ces dix mille
cavaliers aux sabres levés, bondissant
PARIS ET DEPARTEMENTS
lie Numéro, CINQ CENTIMES
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
131, rue Montmartre, 131
It chez MM. LAGRANGE, CERF & O
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RÉDACTION: 131, rue Montmartre, 131
Dt 4 è 9 heure» du soir et de 10 heur» du soir à 1 heure du matm
N° 9716. — Vendredi le Octobre 1896
25 VENDÉMIAIRE AN 105
ADMINISTRATION t 181, rue Montmartre, tat-
Adresser lettre» et mandats à VAdministrateur
NOS LEADERS
LETTRES LIBRES
6'Armée coloniale et la marine
Il y a un an au moins, alors que le
gouvernement, cédant à un mouve-
ment très actif de l'opinion publique,
manifestait l'intention de procéder à
la constitution d'une armée coloniale,
j'écrivais ici même que les intérêts
particuliers mis en jeu par le projet
gouvernemental seraient assez puis-
Ban.ts pour retarder la solution d'un
problème que l'on discute depuis plus
Se dix ans sans jamais aboutir ; les
faits n'ont que trop donné raison à ma
manière de voir. Il semble qu'on soit
Aujourd'hui plus loin que jamais de
l'heure où la France sera dotée d'une
armée coloniale.
Il y a un an, la solution qui parais-
sait être le plus en faveur consistait à
rattacher l'armée coloniale au minis-
tre de la guerre. En ce moment,
dans les milieux gouvernementaux, il
semble que le maintien des troupes
Soloniales au ministère de la marine
)mporte la majorité des suffrages.
#*#
Les partisans de ce système invo-
,quee surtout une question de fait :
Voirà bien des années, disent-ils, que
(es troupes coloniales dépendent de la
marine, et-malgré tous les reproches
adressés à cette dernière, les choses
Vont assez bien, sans être parfaites,
pour qu'on dedVô hésiter à se lancer
~tans l'inconiïû.
On ajoute encore que les troupes
Bplojaiales et la marine étant destinées
.opérer côte à cote et à se prêter sans
jïeSse une assistance réciproque, il y
a intérêt à ce qu'elles soient réunies
dans le même ministère ; que si l'on
rattache les troupes coloniales au mi-
nistère des colonies, elles perdront
rapidement leur caractère militaire
pour devenir une sorte de milice co-
loniale ; que si, au contraire, on les
rattache à la guerre, elles perdront
leur homogénéité, leur esprit de
torps, les traditions qu'officiers, sous-
officiers et soldats se transmettent de-
puis un siècle et qui font que tous les
Éléments de l'infanterie et de l'artil-
lerie de marine sont adaptés d'avance
a la vie maritime et coloniale.
Parmi les troupes coloniales elles-
mêmes les opinions varient avec les
grades : les jeunes officiers que la vie
coloniale n'a pas encore fatigués,
qu'elle attire, au contraire, par la fa-
cilité des mœurs et les chances d'un
avancement plus rapide, sont généra-
lement favorables au maintien des
troupes coloniales sous la direction du
ministre de la marine. Les officiers
généraux, au contraire, qui n'ont plus
rien à attendre du denier colonial,
sont, en général, partisans du ratta-
chement des troupes coloniales au
ministère de la guerre. Il n'est point
rare de les entendre mettre leurs
états de service aux colonies en pa-
rallèle avec ceux des généraux de
l'armée métropolitaine à qui sont ré-
servés les commandements des corps
d'armée. Ils se considèrent comme sa-
crifiés à ces derniers et, ayant tiré des
colonies tout ce qu'ils en pouvaient
obtenir, ils iraient volontiers courir
dans les hauts rangs des troupes mé-
tropolitaines, les chances d'une nou-
velle fortune.
4*
Des raisons majeures militent con-
tre le maintien des troupes coloniales
au ministère de la marine.
Au point de vue financier, ce main-
tien offre des inconvénients graves.
Il est bien établi par l'expérience que
l'infanterie et l'artillerie de marine
coûtent plus cher étant attachées à ce
ministère que si elles dépendaient de
eelui de la guerre. Le nombre des offi-
ciers généraux de ces deux armes est
très supérieur aux besoins réels des
colonies.
En Indo-Chine, il existe aujour-
d'hui trois généraux, dont un de divi-
sion, alors qu'un seul général de bri-
gade suffirait. A mesure que le pays
se pacifie, on. augmente ses dépenses
militaires.
L'état-major particulier de l'artille-
rie y est encore moins en rapport avec
les besoins réels. Vingt-quatre officiers
en faisaient, de mon temps, partie ; ils
coûtaient plus de 450,000 francs pour
une dépense en matériel de moins
d'un million. Malgré le concours qui
me fut donné, en vue de la réduction
du nombre de ces officiers, par le com-
mandement militaire lui-même, je ne
pus obtenir que des diminutions tout
à fait insuffisantes; depuis mon dé-
part, on a considérablement augmenté ;
ce même état-major.
Le ministre de la marine, ne sachant
que faire des officiers d'infanterie et
d'artillerie de marine qui encombrent
les cadres de ces deux corps, est con-
traint de les mettre à la charge des
colonies. Celles-ci ont beau protester
que cela augmente inutilement leurs
dépenses, le gouvernement reste
sourd à leurs plaintes. Où mettrait-il
les officiers qui existent en trop? Or,
le nombre de ceux-ci va sans cesse en
augmentant, à cause des nominations
supplémentaires que l'on fait dans les
moments où surgissent des besoins
exceptionnels.
Si au lieu d'être isolées au ministère
de la marine, les troupes coloniales
faisaient partie de l'énorme masse mi-
litaire de la guerre, il serait facile
d'emprunter à celle-ci et de lui rendre
les unités dont les colonies ont besoin,
en réglant les emprunts d'après les
nécessités réelles de chaque colonie et
de chaque année.
Au point de vue financier, j'estime
donc qu'il y a inconvénient à laisser
les troupes coloniales sous la dépen-
dance du ministre de la marine. Cet
inconvénient apparaîtrait plus grave
encore le jour où l'on ajouterait à
l'infanterie de marine, à l'artillerie de
marine et aux régiments indigènes
qui dépendent actuellement du minis-
tre de la marine, les bataillons de la
légion étrangère et les troupes de ré-
serve qu'il faudra constituer pour les
nécessités extraordinaires.
**
Le rattachement des troupes colo-
niales à la marine offre un autre in-
convénient non moins sérieux : il est
la source principale des conflits inces-
sants qui se produisent, dans nos co-
lonies, entre les autorités militaires et
les gouverneurs.
La marine n'a pas encore oublié
qu'elle a eu, jusqu'à ces dernières
années, la direction complète des colo-
nies ; elle n'a pas désespéré de remet-
tre la main sur le domaine où ses
amiraux trouvaient des situations vi-
vement regrettées ; lui attribuer tou-
tes les troupes coloniales d'une ma-
nière définitive, ce serait réveiller des
ambitions à peine assoupies.
On encouragerait ainsi, par cette
mesure, la tendance qu'a eue de tout
temps la marine à faire, dans les mers
où ses bateaux circulent, une politique
spéciale, que dirigent des idées tradi-
tionnelles rue Royale, et qui ne fut pas
toujours la plus conforme aux intérêts
généraux de notre pays, parce qu'elle
ne tenait pas suffisamment compte de
la situation continentale de la France:
Ce n'est donc pas au ministère delà
marine qu'il faut attribuer l'armée co-
loniale, à moins qu'on ne veuille voir
augmenter les dépenses et nos colonies
persister dans le militarisme qui leur
fait tant de mal.
J'examinerai, dans une seconde
Lettre, les autres solutions.
J.-L. DE LANESSAN.
Nous publierons demain un article
de M. Charles Bos.
LA RENTRÉE DES CHAMBRES
La date du 27
Commission du budget en retard
Les futurs débats
Madagascar-Politique générale
La France et la Russie
Ainsi que nous l'avons annoncé hier, la
date de la rentrée des Chambres sera fixée
au mardi 27 octobre. Le conseil de cabinet,
qui se réunit aujourd'hui sous la présidence
de M. Méline, arrêtera définitivement cette
date.
Le gouvernement, malgré son désir, n'a
maintenant aucune raison de reculer au
3 novembre l'ouverture de la session extra-
ordinaire de 1896. En effet, MM. Delombre
et Krantz, délégués par la commission du
budget, se sont rendus hier auprès du pré-
sident du conseil pour lui annoncer que la
commission du budget serait prête à dis-
cuter dès le 27 octobre.
On comprend aisément que la commission
du budget n'ait pas voulu prendre la res-
ponsabilité du retard de la convocation du
Parlement ; mais il n'en est pas moins cer-
tain, malgré l'affirmation de MM. Delombre
et Krantz, qu'elle ne sera pas en mesure de
soutenir la discussion financière avant un
mois au moins, on peut facilement s'en con-
vaincre en constatant que l'examen des
budgets de dépenses n'est pas encore ter-
miné et que le ministre des finances ne l'a
pas encore saisie de ses propositions en ce
qui touche l'équilibre qui se trouve singu-
lièrement compromis par suite de l'inscrip-
tion de nouvelles dépenses dans divers cha-
pitres.
D'autre part, M. Cochery n'a pas fait sa-
voir à la commission s'il persistait à main-
tenir son projet d'impôt sur les revenus,
avec l'impôt sur la rente, ou s'il lui substi-
tuait un nouveau projet.
Ce sont là des questions dont l'urgence
n'est pas contestable et cependant la com-
mission du budget ne semble pas devoir
s'en préoccuper.
En faisant remarquer le peu d'avancement
des travaux do la commission du budget,
nous n'entendons pas donner un argument
à ceux des députés qui ont agi auprès du
ministère pour que la rentrée n'ait lieu que
le 3 novembre, nous voulons simplement
souligner ce fait que, cette année, la com-
mission du budget, statue sur des proposi-
tions qui ne sont pas définitives et qui peu-
vent naturellement changer suivant que M.
Cochery fera telle ou telle proposition.
C'est la première fois que pareil fait se
produit, mais la majorité modérée de la
commission du budget peut-elle se refuser
à souscrire à la baroque méthode de tra-
vail inaugurée par M. Cochery ?
Au surplus, si la commission du budget
était prête le 27 octobre, ce qui est maté-
riellement impossible, nous venons de le
démontrer, la discussion budgétaire ne pour-
rait pas être portée immédiatement à la tri-
bune. Tout le monde n'est-il pas d'accord
pour en finir, d'abord, avec deux ou trois
affaires tout aussi urgentes que le budget.
DÉBAT URGENT
En première ligne se posera la question
de Madagascar et le gouvernement devra
répondre sans plus tarder aux interpella-
tions déjà annoncées. Il importe de savoir
ce que le ministre des colonies se propose
de faire pour mettre un terme aux exactions
commises dans notre nouvelle colore.
Quelles sont les instructions qu'a emportées
là-bas le général Galliéni '? Quelle est l'at-
titude que va tenir l'administration des co-
lonies à l'égard des contrats singuliers si-
gnés par M. Laroche, pour l'exploitation de
notre possession.
Ce débat ne peut pas être différé, pas plus
que celui qui sera soulevé dès la reprise des
travaux parlementaires au sujet de la poli-
tique générale du gouvernement. Le dernier
mouvement préfectoral contient dos indica-
tions sur cette politique, mais encore faut-il
qu'une discussion à la tribune en fixe le vé-
ritable caractère.
Enfin on prévoit que le vote des dépenses
occasionnées par le séjour des souverains
russes en France — qui s'élèvent à environ
six millions — donnera lieu à un échange
d'observations sur les conditions dans les-
quelles les cérémonies, de la semaine franco-
russe ont été organisées.
On annonce également qu'à ce propos
M. Jaurès demandera au ministre des af-
faires étrangères de préciser la nature de
l'accord intervenu entre la France et la
Russie.
C'est ainsi qu'à l'heure actuelle s'annonce
la rentrée du Parlement.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN:
Les courses : A Chantilly.
— Rentrée des cours et tribunaux.
— Changement d'heures : Bibliothèque natio-
nale, de 9 à 4 ; Mazariae, de n à 4. 1
— ire inscription de l'Ecole des langues orien-
tales, et pour les dispenses des droits univer-
sitaires.
- Durée du jour : 11 h. 54 m.
AU JOUR LE JOUR
Solidarité, c'est le titre et c'est la con-
clusion du beau livre que vient de pu-
blier (chez l'éditeur Armand Colin) M.
Léon Bourgeois, ancien président du
conseil.
Voilà un livre qu'il ne faut pas se con-
tenter de lire ; il faut l'étudier et le mé-
diter. Aussi n'en parlons-nous aujour-
d'hui, ne l'ayant entre les mains que
depuis peu d'heures, que pour en an-
noncer l'apparition.
M. Léon Bourgeois estime que nous
sommes à la veille de découvrir la so-
lution qui satisfera à la fois les défen-
seurs de la science économique et ceux
des systèmes socialistes. Il dit :
« La notion des rapports de l'individu
et de la société s'est profondément mo-
difiée depuis un quart de siècle. En
apparence, rien n'est changé, le débat
continue dans les mêmes termes. »,
mais « ce n'est pas entre les hommes,
c'est entre les idées qu'un accord tend
à s'établir ; ce n'est pas un contrat qui
se prépare, c'est une synthèse. »
Deux ou trois alinéas pris dans le
volume indiqueront, mieux que nous
ne saurions le faire nous-même, la
marche de l'argumentation de l'auteur :
« Pour tous au fond, et sous des
noms divers, la doctrine est la même ;
elle se ramène clairement à cette pen-
sée fondamentale : il y a entre chacun
des individus et tous les autres un lien
nécessaire de solidar ité ; c'est l'étude
exacte des causes, des conditions et
des limites de cette solidarité qui seule
pourra donner la mesure des droits et
des devoirs de chacun envers tous et
de tous envers chacun et qui assurera
les conclusions scientifiques et morales
du problème social. »
« Lien nécessaire de solidarité », dit
M. Bourgeois, et c'est le mot : solida-
rité qu'il imprime en caractères ita-
liques; il aurait pu en outre, et surtout
souligner le mot: nécessaire. C'est cette
nécessité de la solidarité qui seule peut
être opposée à certains esprits.
M. Bourgeois dit en effet, très jus-
tement : « La thèse d'indifférence des
économistes n'est, au fond, que la justi-
fication des excès de la force ; dans la
libre lutte pour l'existence, le fort dé-
truit le faible : c'est le spectacle que
nous offre l'indifférente nature. Est-ce
pour en rester là que les hommes sont
en société? Si la liberté humaine est un
principe, le droit à l'existence en est
un aussi, nécessairement antérieur à
tout autre, et l'Etat doit le garantir
avant tout autre. »
Et il émet encore une affirmation
que nous acceptons quant à nous,
quand il s'écrie : « L'homme nait débi-
teur de la société humaine. »
Mais que vaudra cette affirmation
pour l'homme qui refusera de l'accep-
ter? Pour l'homme qui répondra: « Je
n'ai pas demandé à naître, et je ne suis
pas débiteur, n'ayant pris aucun enga-
gement. » Celui-là, on sera toujours ré-
duit à lui faire remarquer que, la pla-
nète entière était occupée avant qu'il
n'arrivât, que la dette existe, qu'il n'est
pas de procédé connu qui ait puissance
de le soustraire à son paiement, que
c'est là un fait et que la loi de solida-
rité est une loi nécessaire.
Le grand pacificateur sera celui qui,
sans violence, arrivera à convaincre
cet homme de la nécessité d'accepter la
solidarité, d'accepter le devoir.
CHEZ NOUS
-
~—- La roi de Grèce à Paris :
L'amiral Besnard, ministre de la marine,
accompagné du lieutenant de vaisseau
Pumpeernel, officier de son état-major
particulier, a rendu hier matin visite au
roi de Grèce.
Aujourd'hui, le roi se rendra au château
de Rambouillet où le président de la Répu-
blique offre en son honneur un dinei
de trente-cinq couverts,
—— Nos hôtes :
Sont arrivés à Paris :
Le prince Karageorgewitch, arrivant de
Vienne ; M. de Freycinet, venant de Bâle;
le comte Bazile Hendrikoff, maître de la
cour de Russie ; M. Casimir-Perier, de
retour de Pont-sur-Seine.
Ont quitté la capitale :
Le prince Ourousoff, chambellan de la
cour de Russie ; M. Soianoff, chambellan
du prince de Bulgarie, et lord Dufferin,
ex-ambassadeur d'Angleterre qui rentre à
Londres, par Calais.
—— L'affaire Cornudet-Barthou :
Un nouvel incident vient de se greffer
sur le différend qui divise le ministre de
l'intérieur et le directeur de la Lanterne.
M. Chabrier, se jugeant oflensé par l'ar-
ticle de M. Cornudet, a envoyé deux té-
moins à celui-ci. M. Cornudet ayant refusé
toute rétractation et toute réparation avant
d'avoir porté la question devant le syndi-
cat de la presse parlementaire, ce syndicat
a été aussitôt saisi.
-- Les choses en sont là.
Quant au conflit Cornudet-Barthou, il
est improbable qu'il soit réglé dans la
séance que les délégués tiendront aujour-
d'hui, puisque M. Cornudet a demandé à
être entendu de nouveau demain ven-
dredi.
M. Chambige, député du Puy-de-Dôme,
mandé par M. René Goblet au sujet de
l'incident Barthou-Cornudet, est parti pour
Paris.
M. Méline, président du conseil,
ministre de l'agriculture, a reçu hier matin
le comte de Montholon, ministre de France
à Bruxelles.
Mme Furtado-Heine vient de faire
remettre à M. Lépine, préfet de police, la
somme de 3,000 fr., destinée à la caisse de
l'Œuvre des loyers.
La liste d'admission à l'Ecole de
Saint-Cyr sera probablement arrêtée au-
jourd'hui par le ministre de la guerre et
publiée dans le Journal officiel de demain.
, Les Pipos :
C'était hier, à midi moins un quart l'en-
trée des « conscrits » à l'Ecole polytechni-
que. La rentrée des anciens est, comme
nous l'avons dit, fixée à lundi.
-- Sauf dans le milieu spécial des gens
du métier, on ignore peut-être que c'est la
Grande Distillerie Cusenier qui vend le
plus gros chiffre d'absinthe du monde en-
tier. En France même, la Distillerie Cusenier
vient seconde (comme quantité vendue,
quoique première comme qualité). Mais les
chiffres de ses établissements de Buenos-
Ayres, Mexico, Mulhouse, Bruxelles, lui
font battre le record pour le monde entier.
Ces quantités s'augmentent tous les jours
depuis que la maison Cusenier a créé son
exquise Absinthe blanche oxygénée.
L'Absinthe blanche oxygénée Cusenier
est obligatoirement dans tous les bons
cafés.
- Nous apprenons le décès de M. Lu-
cien Puteaux, ancien conseiller municipal
du quartier des Batignolles, président de
la Société municipale de secours mutuels
du 17e arrondissement.
M. Puteaux était membre de la commis-
sion de surveillance des asiles d'aliénés de
la Seine, administrateur de l'Ecole nor-
male de la Seine, doyen de la délégation
cantonale du 17° arrondissement.
Les obsèques auront lieu vendredi, à
midi.
"'-----..- Le gouvernement portugais a confié
à un ingénieur et à un contremaître fran-
çais la réorganisation de l'arsenal de la
marine à Lisbonne.
-- Li Hung Tchang, en souvenir de sa
visite, vient de faire remettre sa photogra-
phie, par M. A. de Bernières, secrétaire
français de l'ambassade extraordinaire,
commissaire des douanes chinoises, au
président de la République, à M. Méline
et à M. Hanotaux.
Le Passant.
00 -———————————
LE CAS DE M. LANDRIN
On continue à s'entretenir du cas de M.
Landrin et il parait certain qu'à la rentrée
du conseil, qui est proche, un conseiller de-
mandera au conseil de voter la démission
de M. Landrin du poste de vice-président.
M. Landrin, mis au courant de ces faits,
a fait la déclaration suivante à un de nos
confrères du soir :
- « J'ai signé l'affiche incriminée, la tête
froide, sachant très bien ce qu'elle renfer-
mait. Comme elle exprimait les opinions
sociales et politiques avec lesquelles je me
suis fait élire, je ne regrette rien et ne désa-
voue rien.
» J'attends que l'incident annoncé se pro-
duise et j'y répondrai, sans vouloir esquiver
le débat par une démission anticipée. Cette
démission, je ne la donnerai d'ailleurs qu'a-
près un vote bien déterminé du conseil.
» Si on donne suite à ce projet et que le
conseil s'y associe, tant pis pour le conseil
et non pour moi, qui resterai dans la cir-
constance comme toujours invariablement
fidèle à mes doctrines socialistes révolution-
naires. »
Que M. Landrin prétende rester invaria-
blement fidèle à ses doctrines socialistes ré-
volutionnaires, c'est son droit, mais qu'il ne
dise pas comme toujours, car il nous sem-
ble difficile que ses doctrines soient assez
larges pour encourager ses votes aux réu-
nions du bureau du conseil convoqué par
lui et où il présidait lorsqu'on jeta les bases
de la réception du tsar à l'Hôtel de Ville et
pour exiger sa signature au bas de l'affiche
traitant de la même question, mais dans un
sens opposé.
LES TRAVAUX BUDGÉTAIRES
La commission du budget continue ses
travaux sans que ses délibérations soient
marquées par des discussions intéressantes.
La discussion financière ne sera certaine-
ment intéressante que lorsqu'elle viendra en
séance publique.
Résumons les travaux de la séance d'hier.
Répondant à une question de M. Merlou,
le président dit qu'aucune communication
ne lui a été faite relativement aux crédits
destinés à couvrir les frais d'installation à
Paris de l'Ecole supérieure de la marine,
installation ordonnée par un décret paru
hier matin à l'Officiel.
La commission aborde ensuite l'examen
du budget des chemins de fer de l'Etat.
Après discussion,la commission décide que
le rapporteur général exprimera, dans son
rapport, le regret que le décret de décembre
185 ait eu la prétention de rendre définitive
une organisation qui ne pouvait être que
provisoire. Le rapporteur général invitera
en conséquence le gouvernement à présen-
ter un projet de loi réglant d'une façon dé-
finitive le fonctionnement du réseau de
l'Etat.
M. le rapporteur fait remarquer que les
recettes du réseau de l'Etat suivent une
progression croissante. Elles sont, cette
année, supérieure de 2,300,000 francs aux
évaluations budgétaires et de 1,900,000 fr.
aux résultats de l'exercice précédent.
La commission aborde en fin de séance
l'examen du budget de l'Algérie.
M. Chaudey, rapporteur, fait un exposé
de la situation administrative et financière
de notre colonie.
Les chapitres sont adoptés, sauf plusieurs
qui sont réservés notamment celui relatif
aux fonds secrets.
UN DANGER NATIONAL
Marseille assaini
Le respect d'un programme électoral
Refus de réception — Situation étrange
Les travaux d'une commission
Question d'ordre général
Nous disions en terminant notre précédent
article sur la situation sanitaire de Marseille,
situation à laquelle la santé du pays est si
étroitement liée, que nous préciserions toutes
les responsabilités encourues dans la grave
question de l'assainissement de notre grand
port méditerranéen.
Mais avant d'entrer dans l'examen précis
des faits, depuis le jour où, se faisant
un tremplin électoral de l'œuvre de l'assai-
nissement, M. Flaissières, de conseiller mu-
nicipal, devenait maire de Marseille, il nous
parait nécessaire de donner les raisons qui
ont motivé cette discussion.
Il y a quelques mois, au moment où l'en-
trepreneur, M. Génis, venait de terminer les
travaux, bon nombre de propriétaires pen-
sèrent avec juste raison que ceux-ci avaient
été construits en vue de l'évacuation des
eaux ménagères et autres, et qu'en consé-
quence ils pouvaient se raccorder en payant
le montant de la taxe municipale y affé-
rente.
Les anciens égouts ayant été en majeure
partie éventrés, et le déversement des im-
meubles momentanément suspendu, les
sous-sols se trouvaient empoisonnés par les
infiltrations, et devenaient un danger de
jour en jour plus imminent pour la santé
publique ; d'autant qu'à la même époque,
on s'en souvient, l'épidémie cholérique était
aux portes de Marseille, en Orient.
Tel ne fut pas l'avis de M. Flaissières,
qui avait pris l'engagement solennel devant
ses électeurs, que Marseille demeurerait un
cloaque infect où stagneraient toutes les
épidémies, que notre grand port de com-
merce serait un danger public pour la
santé du pays tout entier ?
Le maire s'en tint strictement aux termes
de son programme, et refusa net l'autorisa-
tion demandée par les propriétaires.
La raison alléguée pour expliquer un pa-
reil état de choses était-elle sérieuse t
Nous n'hésitons pas à répondre non.
Se retranchant derrière un des articles du
contrat intervenu entre la ville et M. Génis,
M. Flaissières répondit : « Si nous vous au-
torisons à vous raccorder aux égouts, ceux-
ci seront, de par les clauses qui nous lient
à l'entreprise, considérés comme reçus, ce
que nous ne pouvons faire avant que la
commission nommée à cet effet ne se soit
prononcée sur la qualité des matériaux.»
Nous reconnaissons volontiers avec le
maire de Marseille qu'il ne pouvait donner
reçu des travaux, c'est-à-dire permettre aux
propriétaires 'à'assainir leurs immeubles
empoisonnés, avant que la commission mu-
nicipale n'ait émis son avis sur la qualité
des matériaux employés; mais M. Flais-
sières oubliait, et c'est ici que son attitude
devient étrange, qu'il existe dans ce même
contrat, tant critiqué par ses sous-ordres,
un article dont la précision ne prete a au-
cune équivoque et qui oblige tacitement la
ville à recevoir les travaux par rue et par
kilomètre achevé. Nous sommes convaincus
que le maire de Marseille ne peut fournir
aucune explication plausible sur ce refus de
réceptions partielles auquel le contraignait
cependant le cahier des charges.
Peut-être objeetera-t-on, ainsi qu'on le fit
déjà, que dans les six mois qui devaient
s'écouler entre l'achèvement des travaux et
l'acceptation définitive de leur fonctionne-
ment, on avait grand temps de faire procé-
der aux vérifications ; que du reste on ne
peut accuser l'administration municipale
d'incurie, puisque la commission a conclu,
après examen attentif, à la non réception de
93,000 mètres d'égouts et qu'on vient de le
faire signifier à l'entrepreneur.
Comment cette commission a-t-elle pu vé-
rifier les matériaux employés dans 93,000
mètres d'égouts en grès, enfouis à quelques
mètres du sol t Les commissaires n'ont rien
vérifié parce qu'ils ne le pouvaient pas, et
cela est d'autant plus vrai que l'organe offi-
ciel du maire de Marseille, disait dernière-
ment, en parlant des experts qui seront pro-
bablement nommés : « Cette fois on n'hési-
tera pas, quand le rapport sera déposé à
faire ouvrir des tranchées parallèles dans les
rues où il y a des ouvrages refusée, de fa-
çon qu'on puisse voir le profil des tuyaux, afin
qu'on constate les lignes brisées qu'ils décri-
vent, l'eau qui s'échappe des joints, les tuyaux
cassés, ceux désemboîtés en plein et enfin la
nature des matériaux employés. »
M. Flaissières peut-il prétendre que la
commission a opéré, ainsi que devront le faire
les experts ? En aurait-il été de même si les
réceptions avaient été faites au fur et à me-
sure de l'achèvement des troiiçons d'égouts
ainsi que l'exigeait le cahier des charges ?
Ce seul cas, de date récente, dit assez com-
bien est étrange l'attitude de M. Flaissières
à l'égard de l'œuvre d'intérêt général de l'as-
sainissement de Marseille. On ne peut même
pas prétendre qu'en agissant ainsi, le maire
ait eu, avant tout, souci des intérêts de la
ville, puisque à l'heure actuelle, le nombre
des procès perdus par la ville de Marseille
ne se compte plus. Et pendant ce temps,
notre grand port de commerce complète-
ment assaini, défiant les épidémies, gràce à
sa magnifique ceinture d'égouts, risque de
devenir à nouveau un foyer permanent de
toutes les maladies contagieuses, de conta-
miner le pays tout entier, raison unique et
de valeur assez sérieuse pour nous inquié-
ter.
UN PKOCÈS IN MMATlGiV
M. Jules Verne, l'auteur célèbre des Voya-
ges extraordinaires et son éditeur M. Hetzel,
comparaissent le 28 de ce mois, devant la 9*
chambre correctionnelle du tribunal de la
Seine, à la requête de M. Eugène Turpin.
Celui-ci les poursuit pour diffamation. La
cause de ce procès sensationnel est le der-
nier volume publié chez Hetzel par M. Jules
Verne et intitulé : Face au Drapeau M. Tur-
pin a cru se reconnaitre dans le principal
personnage de ce livre et il accuse M. Jules
Verne de l'avoir représenté sous les traits
les plus noirs en lui prêtant des sentiments
qui portent la plus grave atteinte à son
honneur et à sa consid ration.
De là une assignation lancée par M. Tur-
pin contre MM. Jules Verne et Hetzel, et qui
ne tend rien moins qu'à teur demander con-
jointement et solidairement 50,000 fr. de
dommages-intérêts, l'insertion du jugement
à intervenir dans cinquante journaux au
choix du requérant et la suppression des
passages ditfamatoires dans fe livre incri-
miné.
C'est Mc HenriCoulon, a-sisté de Me Albert
Montel, qui soutiendra les prétentions do
M. Eugène Turpin.
Attendons-nous à des révélatioos piquan-
tes et à des incidents n >mbreux^
LES MIETTES M LA SEMAINE
Jeudi 8 octobre. — Versailles!' Une
résurrection du passé dans l'espérance
d'un avenir que tous pressentent et sa-
luent, Le palais s éveillant de sa mé-
lancolie de tant d'années, et, dans les
rumeurs de la foule, au rythme des sal-
ves d'artillerie, dans le scintillement
des uniformes et l'éclat des fanfares,
sous le drapeau de la République cla-
quant à son fronton, 1 Hôte, le jeune.
empereur des steppes immenses dont
l'infini recule au lointain de l'Orient,
venant parmi l'escorte de cavaliers
français, évoquer la momoire du grand
roi. Après les Invalides, Versailles ;
Louis après Napoléon.
Et cela a été un arrêt charmant dans
cette promenade de rêve, une vision
fraîche et douce d'une impression moins
violente qu'en l'apothéose de Paris. Le
génie de la France ancienne revivait
dans ce vaste décor d architecture mu-
rale et végétale, témoin de sa magnifi-
cence et de sa gloire.- La nation mo-
derne, avec ses aspirations nouvelles,
son idéal différent, subissait le charme
de cette évocation de la patrie d'autre-
fois, de qui elle était née, qui lui avait
légué, avec l'héroïsme sacré de la race,
le goût du Beau et du Gr and dont ce
palais était la manifestation sublime.
Sans doute, au balcon des jardins,
devant la magie du coup d'œil, envahi
des souvenirs d'une histoire qu'il con-
naît bien, Nicolas a-t-il eu la sensation
profonde du destin de ce peuple dont
l'énergie vitale se retrempe aux sour-
ces vives d'un passé u orgueil. Et de-
vant nous, le jeune souverain, de sa
présence significatÍ ve, chassaità jamais
les remords de jadis. Son passage dans
la galerie des glaces, aux côtés du pré-
sident de la République, effaçait la souil-
lure dont après vingt-six annees nous
brûlait encore la honte, et dans ce salon
où sur notre ruine d'un instant s'écha-
faudait autrefois l'empire de sang, Ni-
colas Il, empereurde to utes les Russies,
affirmait le relèvement définitif de la
France, consacrait la puissance de la
jeune République.
Sur la façade du palais, les drapeaux
des deux peuples ilottaient.
Vendredi 9 octobre. — Châlons! Hier
le peuple, aujourd'hui l'armée. Ce n'est
plus la joie expansive de la rue, l'ac-
clamation roulant le long des avenues
comme un murmure de tleuve; les ar-
bres dépouillés par l'automne n'ont
point épanoui une lloraison aussi gra-
cieuse qu'artificielle. Nous sommes
au camp ; c'est l'heure sérieuse et so-
lennelle où la patrie, non loin de sa
frontière mutilée, montre non sans
fierté à son hôte ses troupes de pre-
mière ligne, ces admirables corps d'ar-
mée de l'Est, remparts vivants à l'abri
desquels elle a reconstitué, plus solide
que jamais, sa domination matérielle
et morale.
L'empereur, en sa longue tunique
pourpre de colonel cosaque, passe sur
le front des régiments, lentement, au
pas de son alezan doré. Son regard,
allumé à l'éclat des aciers, court le
long de cette muraille humaine immo-
bile et terrible, pénètre les masses pro-
fondes d'hommes alignés aux armes
droites. Le geste hésitant de sa main
portée au bonnet d'astrakan, tel qu'on
le remarquait ces jours derniers, s'af-
fermit aujourd'hui dans le salut grave
aux drapeaux et aux chefs, et l'on ne
sait plus dans la confusion des sensa-
tions si ce n'est pas lui que la Franco
présente à ses soldats, comme l'incar-
nation la plus élevée de cette armée
amie avec laquelle se cimente cette
confraternité d'armes qu'il invoquera
si hautement tout à l'heure.
Puis le défilé, les quadruples rec-
tangles des divisions en masses
épaisses, les képis rouges des fantas-
sins dans la forêt des baïonnettes, le
bleu-ciel des turcos, le carmin des
zouaves, la ligne sombre des vitriers
et des marsouins, l'artillerie roulant au
grand trot dans le fracas des pièces et
des caissons, toute l'armée en marchq
vers l'avenir réparateur, et la chargo
enfin, le tourbillonnement fou, l'enche-
vêtrement fantastique de ces dix mille
cavaliers aux sabres levés, bondissant
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