Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1896-08-08
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 08 août 1896 08 août 1896
Description : 1896/08/08 (N9647). 1896/08/08 (N9647).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7564470j
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/05/2013
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■ .CIN'Q CENTIMES I© 3NFi*n3.éx*o^
PARIS ET DEPARTEMENTS.
Ijô Numéro,CINQ CENTIMES
'l'!'-.
ANNONCES
JLUX BUREAUX DU JOURNAL *
181, rue Montmartre, 131
t chez MM. LAGR ANGE, CERF* Of
kdreMe tôlégr&phlque : XIX' SIÈCLE - PARIS
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Paris :..; Mil*, 6f. SiMs, 11 f. h h, 20f.
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RÉDACTION: 131, rue Montmartre, 131
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Wlo 9647. — Samedi 8 Août 1896
22 THERMIDOR AN 104 --
ADMINISTRATION t 131, rue Montmartre, 18)
Adresser lettres et mandats à VAdministrateur
NOS LEADERS
UN PEU DE JUSTICE
Les journaux conservateurs, en ce
temps de vacances où la politique
chôme, veulent bien s'occuper un peu
des affaires municipales de Paris.
Mais avec quel dédain pour les repré-
sentants élus de la grande ville et sur-
tout avec quelle ignorance des services
rendus par le conseil depuis, 1871 !
Pourtant, les faits sont là et ils sont
probants. Mais on ne tient pas à cons-
tater les résultats acquis. Il est bien
préférable, pour montrer que tout va
mal, de déclarer que le conseil n'est
composé que de révolutionnaires, qu'il
a l'intention de bouleverser l'adminis-
tration et que, d'ailleurs, il ne fait que
se livrer à des manifestations poli-
tiques.
Dans ce concert d'attaques injustes,
le Figaro se distingue par des critiques
passionnées et un acharnement qui
étonnent de la part d'une feuille dans
laquelle Francis Magnard avait intro-
duit un scepticisme bien parisien en
même temps que le bon ton et la cour-
toisie à l'égard de tous.
Il est trop commode d'accuser le
conseil municipal de n'émettre que
des votes politiques et de négliger les
intérêts économiques de Paris. La vé-
rité est qu'il n'y a pas une délibération
ou une discussion politique sur deux
cents. Encore est-ce, la plupart du
temps, la droite qui les provoque. Et,
à droite, si je ne me trompe, se trou-
vent les amis du Figaro.
On ne peut cependant pas demander
à une assemblée aussi considérable
que le conseil municipal de ne jamais
se placer sur le terrain politique pour
la solution de certaines questions qui
sont purement politiques. Voici, par
exemple, la laïcisation des hôpitaux.
Le conseil, qui a une majorité républi-
caine et anti-cléricale, a laïcisé le per-
sonnel hospitalier. C'était son droit, et
je ne vois point, en cela, un système
de persécution. Qu'il plaise aux élus
de droite de dire que les républicains
ont eu surtout à cœur de combattre les
congrégations religieuses, c'est leur
affaire. Mais je prétends qu'il est per-
mis de soutenir la neutralité de l'hô-
pital, au point de vue de la religion,
comme celle de l'école. Y laisser des
sœurs, ce n'est évidemment pas res-
pecter cette neutralité.
Or, chaque fois qu'un débat de ce
genre est soulevé, un membre de la
droite monte à la tribune pour mal-
mener les républicains. Geux-ci se dé-
fendent et le débat se passionne. Il
n'en saurait être autrement.
Le Figaro semble ignorer que le
conseil municipal tient plus de séances
que la Chambre, qu'il prend, tous les
ans, des milliers de délibérations, et
que l'on fait beaucoup de travail dans
ses commissions. Où voit-on la politi-
que dans ces questions si importantes
d'édilité : enseignement, assistance
publique, eaux, égouts, travaux pu-
blics, finances, contentieux, planta-
tions, etc. ?
Le conseil municipal élu a tout sim-
plement complété l'œuvre d'Haus-
smann dans un sens démocratique.
Le préfet de l'empire avait fait per-
cer de larges boulevards dans le cen-
tre de Paris. Le conseil municipal en
a ouvert dans les quartiers ouvriers,
dans les quartiers de la périphérie,
sans, pour cela, délaisser les autres.
Dans ces quartiers, où la population
est si dense, il a fait pénétrer l'air, la
lumière et l'hygiène. Dira-t-on que
c'est une mauvaise besogne qu'il a
accomplie ?
Il a jeté des millions dans la cons-
truction de groupes scolaires. Grâce
à lui, Paris est la ville du monde qui a
le plus d'écoles et les plus belles écoles
et le meilleur personnel enseignant.
La plupart des enfants, avant d'entrer
à l'atelier, ont, au moins, le certificat
d'études. Les intelligents, ceux qui
peuvent devenir des sujets d'élite,
obtiennent des bourses et ont toutes
les facilités d'arriver. L'enseignement
primaire, l'enseignement primaire
supérieur, l'enseignement profession-
nel et même l'enseignement secon-
daire sont, à Paris et par le conseil
municipal lui-même, mieux organisés
que partout ailleurs. L'Etat, au sur-
plus, y trouve tous les jours de bons
exemples à suivre et ne s'en prive pas.
**#
Faut-il parler des finances de la
ville ? Eh bien ! même à cette heure,
le budget de Paris est autrement équi-
libré que celui de l'Etat. Et l'Etat ce
n'est pas trop exagéré de le dire, l'Etat
vole la ville de Paris autant qu'il le
peut. Maintenant, il refuse de payer
les dépenses qui lui sont imposées par
la loi ; c'est Paris qui comble le déficit.
On avouera que, dans ces conditions,
un budget est difficile à établir. Néan-
moins, on y parvient quand même.
Sans doute, de mauvaises pratiques
financières se sont introduites. On a
engagé das dépenses sur les crédits
votés mais qui n'étaient pas en caisse ;
on a peut-être opéré des virements
qu'il eut été possible d'éviter. Quel est
le budget où des choses pareilles ne se
produisent pas ? On n'osera pas, j'ima-
gine, me, citer, le budget de l'Etat
français. Si ce budget était respecté
par l'administration comme l'est celui
de la ville, il serait mieux géré qu'il ne
l'est.
**
On dit encore : les égouts de Paris
sont mal compris, le service des eaux
est insuffisant. C'est possible, mais à
qui la faute ?
Au Conseil? Non, il a voté tous les
crédits qu'on lui a demandés. A l'admi-
nistration? Oui.
L'administration a toujours voulu
procéder par petits paquets. Au lieu de
déclarer au conseil : — qui aurait ac-
cordé l'argent nécessaire — avec tant
de millions, je fais tous mes égouts,
avec tant de millions, je donnerai trop
d'eau à Paris pour qu'il en ait assez,
au lieu de tenir ce langage, les ingé-
nieurs ont sérié les constructions d'é-
gouts et les adductions d'eau de source,
si bien que le système des égouts est
incomplet et que la quantité d'eau de
source fournie aux habitants est loin
d'être celle qu'il faudrait.
Mais la responsabilité de ces incon-
vénients ne peut en aucune façon re-
tomber sur le conseil. Pourquoi donc
l'accuse-t-on ? Pourquoi donc veut-on
le charger de tous les péchés commis
par d'autres? La population ne se lais-
sera pas prendre par des racontars qui
ne peuvent profiter qu'aux réaction-
naires.
CHARLES BOS.
Nous publierons demain un article
de M. Camille Pelletal"l
UNE INTERPELLATION
LE CAS OU POLYTECHNICIEN BLOIS
M. Georges Berry, député de la Seine, a
écrit au ministre de la gu rre pour l'infor-
mer qu'il l'interpellera, dès la rentrée de la
Chambre, sur le cas du polytechnicien Blois
et sur la mesure prise à 1 égard de celui-ci
par l'autorité militaire.
M. Berry estime que, si les faits imputés à
l'ex-polytechnieien sont exacts, son cas re-
lève des tribunaux de droit commun.
L'EUROPE IT, LI-HUNG-TCHANG
Nous ne savons pas si Li-Hung-Tchang
laissera aux Anglais un excellent souvenir
de son passage à Londres. Mais ce que nous
savons bien, c'est que les Français ne gar-
dent pas de son séjour à Paris une très
heureuse impression.
Non seulement, en effet, la visite du vice-
roi du Petchili a coûté au Trésor une note
quelque peu disproportionnée avec l'hon-
neur que nous éprouvions à avoir parmi
nous le plus célèbre des hommes d'Etat du
Céleste-Empire, mais elle a causé encore de
très vives déceptions à tous les industriels
qui s'étaient mis en frais pour convaincre
1 ainbassadeur extraordinaire de la supério-
rité de notre outillage et de notre fabrica-
tion.
Nous ne nous plaignons pas que Li-Hung-
Tchang ne nous ait fait aucune commande
Il a agi de même avec L s Russes et les Al-
lemands et nous n'avons pas à prétendre de
sa part à un n- d ementde faveur. Mais il
nous semble qu'il aurait pu montrer un peu
moins de désin olture envers les puissances
qui ont protégé la Chine contre les envahis-
sements du Japon, il n'y a pas pins de dix-
huit mois, et que ce n'était pas lui deman-
der beaucoup que de leur témoigner quel-
ques égards pendant son séjour auprès
elles. -
LES MOINS-VALUES
Chaque mois, les résultats publiés par
l'administration des finances, du rendement
des impôts et revenus indirects, forcent à
constater que notre situation financière, loin
de s'améliorer, va plutôt s'aggravant. La
dernière publication faite par l'administra-
tion nous apprend que ces résulta s, pour
le mois de juillet qui vient de finir, accusent
une moins-value de 4,800,000 fr. en chiffres
ronds et par rapport aux évaluations budgé-
taires et par rapport à la période correspon-
dante de 1875.
Dès à présent il est certain que l'exercice
actuel se soldera, par rapport aux évalua-
tions budgétaires, par un déficit d'une qua-
rantaine de millions. Comptez un chilfre au
moins égal de crédits supplémentaires.
Voilà vraiment une situation tout à fait plai
sante et dont il y a lieu de se grandement
féliciter, n'est-ce pas ?
Que la pruspérité de la France ne soit pas
menacée par les mécomptes subis en cours
d'un exercice — même quand cet exercice en
déficit vient s'ajouter à d'autres exercices
également en déficit — cela va sans dire. On
aurait tort, cependant, de croire que les
choses pourront indéfiniment continuer
ainsi. Rapprochez ce tableau du rendement
des impôts de celui, publié l'autre jour, des
résultats du recensement. La France se dé-
peuple et s'appauvrit. Il faudrait pourtant
se décider à agir, à se mettre sérieusement
aux réformes, réformes administratives,
réformes fiscales, qui sont le seul remède
possible. Dans les circonstances actuelles,
se contenter, comme le fait la Chambre de-
puis qu'elle existe, de budgets d'attente,
c'est vraiment faire preuve de trop d'insou-
ciance et de trop d'apathie.
A PROPOS DE LA COUR DES COMPTES
L'Etat est en pourparlers avec la ville de
Paris pour l'achat des écoles de la rue Cam-
bon installées dans les dépendances de l'an-
cien couvent de l'Assomption.
Et cet achat a pour but de réunir ce ter-
rain aux anciennes constructions du çou-
vent que possède déjà rF,tat et où sont ins-
tallées les archives du ministère des finances.
Le tout serait démoli et sur remplacement
on construirait la nouvelle cour des comptes,
l'ancien emplacement étant abandonné et
M. Boulanger ayant renoncé à l'espoir de
la voir se réôdifier au quai d'Orsay.
Le nouveau projet marche à grand train.
Mais pendant que l'administration s'ins-
talle dans les dépendances du couvent, il
ferait bien de provoquer du conseil d Etat
un décret de désaffectation de l'église de
l'Assomption, qui n'a été laissée à la pa-
roisse de la Madeleine qu'à la suite d une
entente de M. Grévy et de son ami Lere-
bours, curé de la Madeleine.
En effet, l'Assomption est désaffectée en
principe, puisque la paroisse a déjà une
église paroissiale, la Madeleine.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN:
Les courses : A Lisieux.
-Durée du jour : 15 h. 58 m.
CHEZ NOUS
Le voyage de l'empereur de Russie
en France est chose décidée. Le tsar arri-
vera le ier octobre à Paris, où il séjour-
nera une semaine.
Depuis quelques jours déjà on s'otcupe
activement de lui préparer des apparte-
ments dans le palais du ministère des af-
faires étrangères, au quai d'Orsay.
M. Roujon, directeur des beaux-arts, de
qui relèvent les bâtiments civils et le
Garde Meuble, a eu plusieurs conférences
avec M. de Gourlet, inspecteur général
des palais nationaux, et avec différents
fonctionnaires. M. Des Chapelles a été par-
ticulièrement chargé par M. Roujon de
s'occuper de l'aménagement du palais du
quai d'Orsay.
- Le docteur Gilles de la Tourette
vient d'être nommé médecin en chef de
l'Exposition universelle de 1900.
M. Gilles de la Tourette est dès à pré-
sent chargé d'assurer le service médical de
l'Exposition pendant la période des travaux
qui va s'ouvrir très prochainement. Il sera
secondé par un certain nombre d'autres
médecins qui seront désignés ultérieure-
ment.
t
- Un accident :
M. Bouvard, directeur des services d'ar-
chitecture de l'Exposition de 1900, a fait
une chute dans l'escalier de la propriété
qu'il habite à Marly.
On espère qu'il n'y aura à ce faux-pas
aucune suite fâcheuse, mais M. Bouvard ne
pourra sans doute venir à Paris de quel-
ques jours. <
- Là note suivante nous est commu-
niquée par ragence Havas : -
Plusieurs journaux reviennent sur la ques-
tion des monnaies divisionnaires et semblent
croire qu'une mesure récente a été prise par
le gouvernement.
C'est une erreur. La démonétisation des
anciennes monnaies divisionnaires a en lieu
en vertu de l'article 3 de la loi du 19 juillet
1866 et de l'article i-, du décret du 17 juin
1868 rendu en exécution de cette loi. C'est à
partir du 1er octobre 1868 qu'elles ont cessé
d'avoir cours légal entre les particuliers et
à partir du 1er janvier 1869 d'êtres reçues
par les caisses publiques.
Depuis, absolument aucune mesure nou-
velle n'a éLé prise par le gouvernement.
- Une trouvaille littéraire :
Le bibliothécaire du séminaire de Saint-
Sulpice, l'abbé Lévesque, vient de décou-
vrir parmi les manuscrits nombreux con-
fiés à sa garde, un volumineux cahier iné-
dit de Bossuet.
Ce n'est rien moins que le texte original
du second tôme d'un traité intitulé : Etat
d'oraison, demeuré jusqu'ici introuvable
et qu'on estimait détruit.
L'Etat d'Oraison, dont le directeur de
Saint-Sulpice fait en ce moment tirer une
copie, sera prochainement publié.
Avis aux fervents du grand siècle !
-- Ollendorff met en vente aujour-
d'hui la Meute, la pièce d'Abel Hermant,
qui fit tant de bruit cet hiver à la Renais-
sance. En outre de son intérêt de curiosité,
la Meute se recommande par ses hautes
qualités dramatiques et sa puissance d'ob-
servation. C'est toute une société que l'au-
teur, avec l'acuité de sa critique et la force
de son talent, fait vivre et s'agiter devant
nous. La Meute est non seulement une
pièce, mais un livre qui restera.
--- Le Geste, le dernier roman que
Maurice Montégut publie chez Ollendorff,
est un livre profondément nouveau et
troublant. C'est une intrigue de passion
tumultueuse, soulevant un problème de
société moderne. L'œuvre met en scène
des personnages vrais malgré leur étran-
geté, et Maurice Montégut vient de prou-
ver une fois de plus, dans le Geste, qui
obtient un retentissant succès, la maîtrise
et la souplesse de son grand talent.
- La reine d'Angleterre a approuvé
la proposition tendant à décerner aux ha-
bitants d'Ouessant, de Molènes et des en-
virons, qui firent preuve de dévouement
lors du naufrage du Drummond-Qastle,
une médaille commémorative en argent
portant les mots : « Témoignage de grati-
tude de la reine Victoria. »
Le ministre du commerce ou président
du Board oj trade, M. Ritchie, a informé
de cette décision le gouvernement fran-
çais, qui a répondu par des remercie-
ments.
- Le baron d'Anethan, ministre de
Belgique en France, a quitté Paris hier
soir, se rendant à Bruxelles.
A L'ETRANGER
.,,",,- L'empereur d'Allemagne souffre
d'une affection catarrhale de, la gorge. Il a
été obligé de renoncer" sur le conseil de
ses médecins, à se rendre à Wesel, Buhrort
et Essen.
- Un singulier phénomène s'observe,
depuis quelques années, dans le quartier
de Kensington, à Londres. La population
masculine y croît en proportion assez mo-
dérée, tandis que le beau sexe s'y multiplie
avec une incroyable rapidité. s D'après un
recensement datant du mois de mars der-
nier, sur un chiffre total de 170,000 per-
sonnes, "on' compte 66,000 hommes et
104,000 femmes.
Soixante-six mille hommes pour cent-
quatre mille femmes ! Heureux habitants
de Kensington 1 Ils vont être normalement
obligés à en revenir à la polygamie, « cas
pendable»l peut-être, mais état si désirable.
Le Passant.
LE DIVORCE D'HENRI ROCEIEFOIST
Le 31 juillet paraissait dans nos colonnes
l'entrefilet suivant :
Parmi les instances introduites en cette der-
nière semaine judiciaire et qui seront plaidées
après vacations, signalons la demande en di-
vorce formée par Mme de Brède contre son
mari, M. Henri Kochafort.
Le placet de l'affaire nous apprend que le ma-
riage et la séparation de fait des deux époux
remontent l'un et l'autre à dix-huit ans.
Le /•r août, le Figaro publiait cette nou-
velle :
Mme Henri Rochefort, née de Beaupré de
Brède, vient d'introduire une demande en di-
vorce contre son mari.
Les deux époux vivaient séparés de fait de-
puis près de vingt ans et c'est cette séparation
que la demanderesse invoque comme grief à
l'appui de sa requête.
L affaire vient d'être inscrite au rôle de la qua-
trième chambre civile, mais le procès ne sera
jugé qu'après les vacances.
Et, hier, jeudi, 8 août, le Figaro annon-
çait :
Mme Henri de Rochefort, née de Beaupré de
la Nauraye, nous prie d'annoncep qu'eue n'a
formé aucune demande en divorce contre son
mari, comme on l'a annoncé par erreur, à ce
qu'il paraît.
Pour répondre au démenti catégorique
qu'indirectemént nous adresse Mme de
Brède, nous nous bornerons à préciser quel-
ques dates.
Le mardi 28 juillet, Mme Bouin de Brède,
accompagnée de son avoué, Me Barberon,
s'est., entre quatre et cinq heures du soir,
rendue au Palais de Justice, au cabinet de
M. Baudouin, président du tribunal de la
Seine, siégeant, non à la 48 chambre, mais
à la 1 "chambre. M* Barberon a présenté à M.
Baudouin une requête à fin de divorce entre
M. et Mme Henri Rochefort. Après avoir
donné à Mme de Brède quelques conseils
très juridiques, M. le président du tribunal
a répondu à la requête par une ordonnance
fixant au mardi 4 août les prélimina rcs de
conciliation entre les époux, formalité pres-
crite par la loi en matière de divorce.
Mais le mardi 4 août, pas plus Mme de
Brède qu Henri Rochefort ne se sont présen-
tés au cabinet de M. Baudouin.
Par suite de cette non comparution, Mme
Bouin de Brède devra pour continuer son
instance en divorce, obtenir une nouvelle
ordonnance de M. Baudouin qui, disons-le
en passant, tient beaucoup à concilier en
personne, « si faire se peut », les deux
époux — séparés de fait et devenus étran-
gers l'un à l'autre depuis un grand nombre
d'années.
TENTATIVE DE CORRUPTION DE FONCTIOMAIRE
La justice égale pour tous.
Après les bruyantes affaires de corrup-
tion de fonctionnaires, dans le procès du
Panama— procès qui s'est dénoué par les
non-lieu ou les acquittements que l'on sait
— il nous parait piquant de signaler l'affaire
Palix.
La veuve Palix est une fille soumise qui
est âgée de quarante-six ans. Elle a com-
paru, hier, devant Ja 9" chambre correction-
nelle sous l'inculpation de tentative de cor-
ruption de fonctionnaire.
D'après la prévention, la misérable, arrê-
tée au bois de Boulogne pour racolage, au-
rait dit à l'agent qui procédait à son arres-
tation : « Si tu veux me laisser aller, je te
donnerai 5 francs et, en plus, nous irons
ensemble passer quelques instants dans le
bois. »
Le tribunal a condamné la veuve Palix à
huit jours de prison.
Qu'on ne vienne plus prétendre mainte-
nant qu'en France la loi sur la corruption
de fonctionnaires n'est jamais appliquée !
———————————
Le Mystère de la rue des Archives
La mort de Mme Vaillant, dont le corps,
il y a deux jours, fut retrouvé percé de
deux coups de couteau, dans son logement,
87, rue des Archives, semble bien due à un
crime. -■
Mme Vaillant, qui vivait seule et très
chichement d'une petite pension , avait,
comme on le sait, disparu depuis le 1er
août.
M. Montillier, commissaire de police du
quartier, prévenu par les voisins de l'ab-
sence de la vieille femme, elle avait soixante
ans, se présenta pour faire ouvrir la porte,
qui n'était du reste fermée qu'au pêne et
trouva le cadavre de Mme Vaillant, vêtu et
étendu sur le parquet, au milieu d'une mare
de sang.
La chambre, sans être tout à fait en dé-
sordre, paraissait cependant avoir été légè-
rement bouleversée, ainsi, l'édredon recou-
vrait la partis supérieure du corps et, par-
dessus 1 édredon, une chaise était tombée.
Le commissaire de police fit couper les
vêtements de la vieille femme et, sous les
deux seins, deux blessures faites par un
instrument qu'on n'a pu encore déterminer
apparurent béantes, entourées de caillots de
sang.
L hypothèse d'un crime fut la seule qui se
présen a, à ce moment, à l'esprit du magis-
trat; cependant, ni bruits de lutte, ni cris,
n'avaient été perçus par les voisins, et l'en-
quête conclut à un suicide.
Les bijoux do la défunte avaient été re-
trouvés et le porte-monnaie de Mme Vail-
lant, que contenait une de ses poches, était
intact.
Le matin du 1er août, Mme Vaillan, qui
venait de toucher sa pension mensuelle de
125 fr., avait fait un achat de toile à tor-
chons, toile qu'elle voulait offrir à des pa-
rents de la campagne habitant Vîllers-Cot-
terets.
On crut que son absence se rattachait à
un voyage qu'elle avgait du reste annoncé,
voyage se rattachant au cadeau qu'elle vou-
lait faire à ses parents, aussi n'accorda-t-o]
pas d'importance à sa disparition.
Cependant quand, au bout de trois jours
les voisins et la concierge ne la virent pa
paraitre, ils s'émurent et c'est alors qu'il
signalèrent son absence au commissaire d
police du quartier.
Le service 1e la sûreté cherche à l'heur
actuelle à reconstituer l'emploi du temps d,
la morte entre le moment où elle a touchi
sa pension mensuelle et l'instant où elle es
rentrée chez elle.
L'au'opsie du cadavre qui sera faite au
jourd hui par le docteur Vibert, dira si l'hy
pothèse d'un crime est justifiée.
Ce qui vient à l'appui de cette hypothèse
c'est que, bien que des blessures aient étl
constatées sur Mme Vaillant, l'arme ayan
servi à les faire n'a pas été retrouvée. Or, i
est peu probable, dans le cas où Mme Vait
lant se serait suicidée, qu'elle eût pensé i
prendre la précaution de cacher l'arme qu
lui avait servi à se donner la mort.
-91>
LA VIE DE PARI
Par HENRY FOUQUIER r
La distribution des prix, au Conser
vatoire de musique et de déclamation
s'est passée sans encombre et selon le!
us. Le public qui y assistait n'était pa:
le même que celui des concours et
d'ailleurs, nulle occasion ne lui étai
offerte de se fâcher. Il assistait à un<
représentation gratuite, mais qui, ce
pendant, n'est pas à la portée de tou
le monde : et il n'en faut pas plus poui
mettre en très belle humeur les Pari
siens qui adorent avoir, sans payer, un
spectacle qui n'est pas à la portée de
tout le monde. Il y a, dans ce goût, une
pointe de snobisme qui explique que
les théâtres « à côté » ont toujours du
monde, quand bien même on n'y ferait
autre chose que d'allumer les chan-
delles. Il est du reste excellent qu'il en
soit allé de la sorte pour le Conserva-
toire et que la foule n'ait pas fait men-
tir le dicton qui veut que les arts et en
particulier la musique adoucissent les
mœurs.
M. le ministre de l'instruction publi-
que a prononcé un joli discours. Ces
réunions sont pain bénit pour les ora-
teurs officiels. Pourvu qu'ils y montrent
en prenant la parole, de la bonne grâce,
de la bonhomie et, quand il le faut, une
pointe d'émotion, ils sont certains d'être
acclamés. Ah! comme ils sont loin (et
comme ils doivent en être heureux!) du
public de la Chambre, si peu encoura-
geant, si hostile parfois, si cruel et qui,
tout en se laissant souvent trop embal-
ler par la virtuosité des orateurs,
écoute mal les gens qui ont parfois rai-
son sans assez d'adresse l Seulement,
ces discours officiels applaudis ont
l'inconvénient de ne pas aborder bien
de front les difficultés qui pourraient
être soulevées ici. C'est très bien de
faire l'éloge de l'art français en général,
de constater ses succès européens, de
rendre justice au zèle des maîtres dont
on décore l'u i ou l'autre, de donner de
bons avis aux élèves, de leur recom-
mander l'assiduité, la déférence et
même. la vertu ! Mais ceci ne nous
apprend pas si quelque chose sera fait
pour faire les études du Conservatoire
plus pratiques, pour accomplir les ré-
formes dont il a été souvent question
et dont les concours semblent démon-
trer de plus en plus la nécessité.
Cette année encore n'avons-nous pas
vu le système des concours même offrir
des surprises? Il n'est pas assez dé-
montré qu'une élève qui a très bien ré-
pété une scène apprise, inflexion par
inflexion, pendant des mois, ait l'intel-
ligence artistique assez ouverte et le
goût assez formé pour aborder la scène.
Il n'est pas démontré davantage qu'un
chanteur,. muni d une jolie voix et de
quelques avantages physiques, soit un
vrai musicien. Les concours instru-
mentaux seuls présentent à peu près
quelque certitude. On regrette toujours
que les élèves jouent, sans costumes,
sans accessoires, des morceaux de
rôles laissés à leur choix, sur la scène
étroite du Conservatoire, dans des con-
ditions vraiment déplorables. Le grand
vice de l'éducation du Conservatoire,
le malheur des épreuves où cette édu-
cation cherche sa sanction, c'est que
tout demeure incertain. -
Et alors, qu'arrive-t-il? C'est qu'on
reproche à l'Etat, par la protection qu'il
donne aux beaux-arts, et qui, paralt-il,
est un de ses plus impérieux - devoirs
(on peut discuter là-dessus) d'encoura-
ger cette chose néfaste, une des plaies
sociales de notre temps, qui est la mul-
tiplication des fausses vocations. Toute
médaille a son revers — et les mé-
dailles de concours et d'examens plus
que les autres encore. Le nombre de
plus en plus considérable de brevetées
de l'instruction publique a jeté dans
la vie de Paris surtout un nombre éton-
nant de jeunes personnes qui, fières à
bon droit de leurs travaux et de leur
diplôme, croiraient déroger en gagnant
leur vie autrement que dans une. pro-
fession libérale » et qui sont bien sou-
vent horriblement malheureuses. Les
concours du Conservatoire jettent
chaque année sur le pavé des
quantités d'acteurs et d'actrices,
qui croient à leur vocation et à
leur talent, et qui éprouvent d'ef-
froyables déconvenues. On ne se
figure pas dans quel mensonge vivent
ces pauvres gens, surtout les femmes.
L'entourage les exalte. Elles se grisent
d'applaudissements. Elles se tiennent
tout de suite pour des Sarah Bernhardt 1
Et puis, quand en sortant de cette illu-
sion des premiers succès complaisants,
des surprises heureuses, elles se trou-
vent en face de la réalité, quelle mi-
sère 1 Professionnellement, je suis for-
cément un peu au courant de ce oui se
passe dans le mondedes théâtres. C'est
effroyable et navrant. La concurrence,
qui règne partout, est peut-être tà plus
forte que partout ailleurs. Paris est
plein de femmes, dont il en est qui Be:
sont pas sans talent, qui courent après
un engagement, souvent perfas etnefas,
et n'arrivent pas à l'obtenir. Il y a des
actrices de vrai mérite qui sont restées
inutilisées pendant des mois et des an-
nées. Quand ce sont des femmes et
qu'elles sont jolies, elles arrivent tout
de même à se débrouiller. Mais com-
ment?
Vous m'entend z bien, sans qu'il soit
nécessaire d'insister. Mais un acteur
ou une actrice sans beauté ou avec des
scrupules qui veut. au sortir du Con-
servatoire, gagner sa vie par son seul
métier de comédi n, n'y arrive guère.
Les premiers emplois sur ces scènes,
sont largement, très largement rétri-
bués.On cite des chiffres vraiment énor-
mes. Mais ies débutants et débutantes,
ce qu'on pourrait appeler le cadre des
sous-officiers de 1 armée dramatique
meurt littéralement de faim. Cepen-
dant, quand on a éiuqué ces jeunes
gens, qu'on leur a donné des récom-
penses, ils se retournent vers l'Etat ei
lui disent : « Vous m'avez encouragé à
adopter ce métier de comédien, vous
parlez de l'éclat qui- votre école jetts
sur l'art et vous ne trouvez pas 16
moyen de me faire vivre. » Qui de nous
n'a entendu ces plaintes, véritablement
navrantes de la part des artistes qui
n'ont pa: de moyens personnels d'exis-
tence, et navrantes aussi, à un autre
point de vue, de la part de ceux qui
ont la passion d'un métier et ne Deu.
vent pas la satisfaire.' A ces plaintes on
répond, ce qui est vrai que les théâtres
subventionnés sont bouués, qu'ils ont
tous des pensionnaires qui, si peu
payés quils soient,, n'en grèvent pas
moins inutilement le budget, puisqu'ils
ne jouent jamais et que l'Etat donne
l'éducation et ne peut rien assurer de
plus. Le problème est bien difficile et
bien douloureux. En somme, je n'exa- ,
gère pas en disant qu'il y a, à Paris,
sortis des serres de 1 Etat, des cen-
taines d'artistes sans emploi à qui on
dit que, pour se faire connaître, il faut
commencer par être connu ! Je ne vou-
drais pas être un pessimiste découra-
géant. Mais je ne' saurais trop répéter
que quiconque veut aborder le théâtre
de notre temps doit, après un examen
sévère de sa vocation et de ses moyens,
s'assurer enc re d une force de vo-
lonté et d'un c urage de caractère qui
ne doivent pas être ordinaires l
HER y FOUQUIER.
Nous publierons leuiain la Chronique
de U. An iré liaiz.
LES ENFANTS NATURELS
Est-ce que tous les enfants ne sont pas
naturels? C'est la question que posait jadis
M. Edouard Palll.'i'l.n dans le Monde où L'on
s'ennuie, cette comédie de mœurs si char-
mante et d'une si line et cruelle observa-
lion. ,.
Bellac eût pu en prendre texte pour la dé-
velopper, et le prolesseur n eût pas manqué
alors de nous faire l'hi:..tùrique de la condi-
tion juridique des enfants naturels, d'abord
à Rome, puis dans le droit intermédiaire et
et enfin dans notru- droit civil.
Cette dissertation eut convenu à son pé-
dantisme. D'au ant mieux que, dans une
question aussi seniimenta e, il eût pu faire
apprécier le charme et la majesté de son élo-
quence. Il n'y a pas, (n effet, de sujet qui
se prête mi ux aux développements ora.
toires.
On peut y exercer sa sensibilité. Je vous
assure que beaucoup n y ull. pas manqué
depuis de 1 ngue" années. Mais soit que
leur argumentation manquât de solidité ou
de persuasion, soit que par eux la question
fût mal présentée, ia condition certes vrai-
ment douloureuse et in éressante des ew
fants naturels restait toujours la même, lors-
qu'il y a quelques annees un publiciste dou-
blé d'un avocat de grand, talent, M. Henri
Coulon, prit en main la question des enfants
naturels, et dans une brochure sensation-
nelle intitulée : De la Condition des enfants
naturels reconnus dans tu succession de leurs
père et mère. — Ce qa'elte a été. — Ce qu'elle
est. — Ce qu'elle devrait être, — plaida leur
cause avec la même (halêUr- la même força
de dialectique, la même hardiesse d'esprit
que nous éLions habitués à rencontrer dans
les plaidoyers du IV. mment avocat.
Un peut dire qu'à partir de ce jour la cause
des enfants naturel* fut gagnée.
Dans le monde parlementaire où l'on a
— tiop rarement hélas ! — la bonne pensée
de renoncer pour quelques instants aux
luttas politiques sténjt's pour s'attacher à
quelque loi généreuse et humanitaire, on
s émut du sort qui était fait depuis si long-
temps aux enfants naturels dans notre juri-
diction civile à QHe époque ou suuffle de
tous cô és un vent d'égaliié et de miséri-
corde sociale. Des esprlt excell. nts tels que
M. DemOle, M. Julhen, se dévouèrent à cette
question et de leur activité bienfaisante est
enlin sortie la loi du 25 m:lrs dernier qui a
apporté a la condition des enfant- naturels
une première moditicatiun importante ; celle
d'en faire des héritiers réservataires et de
leur attribuer dans la succession de leurs
père et mère une part beaucoup plus grande
que celle qui leur était dévolue jusqu'à ce
jour.
Depuis la loi du 25 mars 1896 les enfants
naturels sont héritiers. Avant, ils ne l'é-
taient pas. Vous n'attendez pas de moi que
je vous explique toutes les conséquences
juridiques qui découlaient de cette situation
de non-héritiers. Qu'il vous suftise de savoir
que c'était là une véritable source de pro-
cès. Sous l'empire de la loi nouvelle ils sont
en outre héritiers réservataires, c'est-à-dire
que s ils ont été reconnus par leur père on
leur mère ces derniers ne pourront pas les
deshérit er entièrement. Voici d ailleurs les
principaux articles de la dernière loi où vous
trouverez en substance les droits des en-
fants naturels reconnus dan» la succession
de leurs père et mère :
Article 758 du code civil. — « Le droit hé-
rèditaire de l'enfant naturel dans la succes-
sion de ses père et mère est fixé ainsi qcffl
■ .CIN'Q CENTIMES I© 3NFi*n3.éx*o^
PARIS ET DEPARTEMENTS.
Ijô Numéro,CINQ CENTIMES
'l'!'-.
ANNONCES
JLUX BUREAUX DU JOURNAL *
181, rue Montmartre, 131
t chez MM. LAGR ANGE, CERF* Of
kdreMe tôlégr&phlque : XIX' SIÈCLE - PARIS
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Paris :..; Mil*, 6f. SiMs, 11 f. h h, 20f.
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RÉDACTION: 131, rue Montmartre, 131
Pe4 k 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 heure du matin
Wlo 9647. — Samedi 8 Août 1896
22 THERMIDOR AN 104 --
ADMINISTRATION t 131, rue Montmartre, 18)
Adresser lettres et mandats à VAdministrateur
NOS LEADERS
UN PEU DE JUSTICE
Les journaux conservateurs, en ce
temps de vacances où la politique
chôme, veulent bien s'occuper un peu
des affaires municipales de Paris.
Mais avec quel dédain pour les repré-
sentants élus de la grande ville et sur-
tout avec quelle ignorance des services
rendus par le conseil depuis, 1871 !
Pourtant, les faits sont là et ils sont
probants. Mais on ne tient pas à cons-
tater les résultats acquis. Il est bien
préférable, pour montrer que tout va
mal, de déclarer que le conseil n'est
composé que de révolutionnaires, qu'il
a l'intention de bouleverser l'adminis-
tration et que, d'ailleurs, il ne fait que
se livrer à des manifestations poli-
tiques.
Dans ce concert d'attaques injustes,
le Figaro se distingue par des critiques
passionnées et un acharnement qui
étonnent de la part d'une feuille dans
laquelle Francis Magnard avait intro-
duit un scepticisme bien parisien en
même temps que le bon ton et la cour-
toisie à l'égard de tous.
Il est trop commode d'accuser le
conseil municipal de n'émettre que
des votes politiques et de négliger les
intérêts économiques de Paris. La vé-
rité est qu'il n'y a pas une délibération
ou une discussion politique sur deux
cents. Encore est-ce, la plupart du
temps, la droite qui les provoque. Et,
à droite, si je ne me trompe, se trou-
vent les amis du Figaro.
On ne peut cependant pas demander
à une assemblée aussi considérable
que le conseil municipal de ne jamais
se placer sur le terrain politique pour
la solution de certaines questions qui
sont purement politiques. Voici, par
exemple, la laïcisation des hôpitaux.
Le conseil, qui a une majorité républi-
caine et anti-cléricale, a laïcisé le per-
sonnel hospitalier. C'était son droit, et
je ne vois point, en cela, un système
de persécution. Qu'il plaise aux élus
de droite de dire que les républicains
ont eu surtout à cœur de combattre les
congrégations religieuses, c'est leur
affaire. Mais je prétends qu'il est per-
mis de soutenir la neutralité de l'hô-
pital, au point de vue de la religion,
comme celle de l'école. Y laisser des
sœurs, ce n'est évidemment pas res-
pecter cette neutralité.
Or, chaque fois qu'un débat de ce
genre est soulevé, un membre de la
droite monte à la tribune pour mal-
mener les républicains. Geux-ci se dé-
fendent et le débat se passionne. Il
n'en saurait être autrement.
Le Figaro semble ignorer que le
conseil municipal tient plus de séances
que la Chambre, qu'il prend, tous les
ans, des milliers de délibérations, et
que l'on fait beaucoup de travail dans
ses commissions. Où voit-on la politi-
que dans ces questions si importantes
d'édilité : enseignement, assistance
publique, eaux, égouts, travaux pu-
blics, finances, contentieux, planta-
tions, etc. ?
Le conseil municipal élu a tout sim-
plement complété l'œuvre d'Haus-
smann dans un sens démocratique.
Le préfet de l'empire avait fait per-
cer de larges boulevards dans le cen-
tre de Paris. Le conseil municipal en
a ouvert dans les quartiers ouvriers,
dans les quartiers de la périphérie,
sans, pour cela, délaisser les autres.
Dans ces quartiers, où la population
est si dense, il a fait pénétrer l'air, la
lumière et l'hygiène. Dira-t-on que
c'est une mauvaise besogne qu'il a
accomplie ?
Il a jeté des millions dans la cons-
truction de groupes scolaires. Grâce
à lui, Paris est la ville du monde qui a
le plus d'écoles et les plus belles écoles
et le meilleur personnel enseignant.
La plupart des enfants, avant d'entrer
à l'atelier, ont, au moins, le certificat
d'études. Les intelligents, ceux qui
peuvent devenir des sujets d'élite,
obtiennent des bourses et ont toutes
les facilités d'arriver. L'enseignement
primaire, l'enseignement primaire
supérieur, l'enseignement profession-
nel et même l'enseignement secon-
daire sont, à Paris et par le conseil
municipal lui-même, mieux organisés
que partout ailleurs. L'Etat, au sur-
plus, y trouve tous les jours de bons
exemples à suivre et ne s'en prive pas.
**#
Faut-il parler des finances de la
ville ? Eh bien ! même à cette heure,
le budget de Paris est autrement équi-
libré que celui de l'Etat. Et l'Etat ce
n'est pas trop exagéré de le dire, l'Etat
vole la ville de Paris autant qu'il le
peut. Maintenant, il refuse de payer
les dépenses qui lui sont imposées par
la loi ; c'est Paris qui comble le déficit.
On avouera que, dans ces conditions,
un budget est difficile à établir. Néan-
moins, on y parvient quand même.
Sans doute, de mauvaises pratiques
financières se sont introduites. On a
engagé das dépenses sur les crédits
votés mais qui n'étaient pas en caisse ;
on a peut-être opéré des virements
qu'il eut été possible d'éviter. Quel est
le budget où des choses pareilles ne se
produisent pas ? On n'osera pas, j'ima-
gine, me, citer, le budget de l'Etat
français. Si ce budget était respecté
par l'administration comme l'est celui
de la ville, il serait mieux géré qu'il ne
l'est.
**
On dit encore : les égouts de Paris
sont mal compris, le service des eaux
est insuffisant. C'est possible, mais à
qui la faute ?
Au Conseil? Non, il a voté tous les
crédits qu'on lui a demandés. A l'admi-
nistration? Oui.
L'administration a toujours voulu
procéder par petits paquets. Au lieu de
déclarer au conseil : — qui aurait ac-
cordé l'argent nécessaire — avec tant
de millions, je fais tous mes égouts,
avec tant de millions, je donnerai trop
d'eau à Paris pour qu'il en ait assez,
au lieu de tenir ce langage, les ingé-
nieurs ont sérié les constructions d'é-
gouts et les adductions d'eau de source,
si bien que le système des égouts est
incomplet et que la quantité d'eau de
source fournie aux habitants est loin
d'être celle qu'il faudrait.
Mais la responsabilité de ces incon-
vénients ne peut en aucune façon re-
tomber sur le conseil. Pourquoi donc
l'accuse-t-on ? Pourquoi donc veut-on
le charger de tous les péchés commis
par d'autres? La population ne se lais-
sera pas prendre par des racontars qui
ne peuvent profiter qu'aux réaction-
naires.
CHARLES BOS.
Nous publierons demain un article
de M. Camille Pelletal"l
UNE INTERPELLATION
LE CAS OU POLYTECHNICIEN BLOIS
M. Georges Berry, député de la Seine, a
écrit au ministre de la gu rre pour l'infor-
mer qu'il l'interpellera, dès la rentrée de la
Chambre, sur le cas du polytechnicien Blois
et sur la mesure prise à 1 égard de celui-ci
par l'autorité militaire.
M. Berry estime que, si les faits imputés à
l'ex-polytechnieien sont exacts, son cas re-
lève des tribunaux de droit commun.
L'EUROPE IT, LI-HUNG-TCHANG
Nous ne savons pas si Li-Hung-Tchang
laissera aux Anglais un excellent souvenir
de son passage à Londres. Mais ce que nous
savons bien, c'est que les Français ne gar-
dent pas de son séjour à Paris une très
heureuse impression.
Non seulement, en effet, la visite du vice-
roi du Petchili a coûté au Trésor une note
quelque peu disproportionnée avec l'hon-
neur que nous éprouvions à avoir parmi
nous le plus célèbre des hommes d'Etat du
Céleste-Empire, mais elle a causé encore de
très vives déceptions à tous les industriels
qui s'étaient mis en frais pour convaincre
1 ainbassadeur extraordinaire de la supério-
rité de notre outillage et de notre fabrica-
tion.
Nous ne nous plaignons pas que Li-Hung-
Tchang ne nous ait fait aucune commande
Il a agi de même avec L s Russes et les Al-
lemands et nous n'avons pas à prétendre de
sa part à un n- d ementde faveur. Mais il
nous semble qu'il aurait pu montrer un peu
moins de désin olture envers les puissances
qui ont protégé la Chine contre les envahis-
sements du Japon, il n'y a pas pins de dix-
huit mois, et que ce n'était pas lui deman-
der beaucoup que de leur témoigner quel-
ques égards pendant son séjour auprès
elles. -
LES MOINS-VALUES
Chaque mois, les résultats publiés par
l'administration des finances, du rendement
des impôts et revenus indirects, forcent à
constater que notre situation financière, loin
de s'améliorer, va plutôt s'aggravant. La
dernière publication faite par l'administra-
tion nous apprend que ces résulta s, pour
le mois de juillet qui vient de finir, accusent
une moins-value de 4,800,000 fr. en chiffres
ronds et par rapport aux évaluations budgé-
taires et par rapport à la période correspon-
dante de 1875.
Dès à présent il est certain que l'exercice
actuel se soldera, par rapport aux évalua-
tions budgétaires, par un déficit d'une qua-
rantaine de millions. Comptez un chilfre au
moins égal de crédits supplémentaires.
Voilà vraiment une situation tout à fait plai
sante et dont il y a lieu de se grandement
féliciter, n'est-ce pas ?
Que la pruspérité de la France ne soit pas
menacée par les mécomptes subis en cours
d'un exercice — même quand cet exercice en
déficit vient s'ajouter à d'autres exercices
également en déficit — cela va sans dire. On
aurait tort, cependant, de croire que les
choses pourront indéfiniment continuer
ainsi. Rapprochez ce tableau du rendement
des impôts de celui, publié l'autre jour, des
résultats du recensement. La France se dé-
peuple et s'appauvrit. Il faudrait pourtant
se décider à agir, à se mettre sérieusement
aux réformes, réformes administratives,
réformes fiscales, qui sont le seul remède
possible. Dans les circonstances actuelles,
se contenter, comme le fait la Chambre de-
puis qu'elle existe, de budgets d'attente,
c'est vraiment faire preuve de trop d'insou-
ciance et de trop d'apathie.
A PROPOS DE LA COUR DES COMPTES
L'Etat est en pourparlers avec la ville de
Paris pour l'achat des écoles de la rue Cam-
bon installées dans les dépendances de l'an-
cien couvent de l'Assomption.
Et cet achat a pour but de réunir ce ter-
rain aux anciennes constructions du çou-
vent que possède déjà rF,tat et où sont ins-
tallées les archives du ministère des finances.
Le tout serait démoli et sur remplacement
on construirait la nouvelle cour des comptes,
l'ancien emplacement étant abandonné et
M. Boulanger ayant renoncé à l'espoir de
la voir se réôdifier au quai d'Orsay.
Le nouveau projet marche à grand train.
Mais pendant que l'administration s'ins-
talle dans les dépendances du couvent, il
ferait bien de provoquer du conseil d Etat
un décret de désaffectation de l'église de
l'Assomption, qui n'a été laissée à la pa-
roisse de la Madeleine qu'à la suite d une
entente de M. Grévy et de son ami Lere-
bours, curé de la Madeleine.
En effet, l'Assomption est désaffectée en
principe, puisque la paroisse a déjà une
église paroissiale, la Madeleine.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN:
Les courses : A Lisieux.
-Durée du jour : 15 h. 58 m.
CHEZ NOUS
Le voyage de l'empereur de Russie
en France est chose décidée. Le tsar arri-
vera le ier octobre à Paris, où il séjour-
nera une semaine.
Depuis quelques jours déjà on s'otcupe
activement de lui préparer des apparte-
ments dans le palais du ministère des af-
faires étrangères, au quai d'Orsay.
M. Roujon, directeur des beaux-arts, de
qui relèvent les bâtiments civils et le
Garde Meuble, a eu plusieurs conférences
avec M. de Gourlet, inspecteur général
des palais nationaux, et avec différents
fonctionnaires. M. Des Chapelles a été par-
ticulièrement chargé par M. Roujon de
s'occuper de l'aménagement du palais du
quai d'Orsay.
- Le docteur Gilles de la Tourette
vient d'être nommé médecin en chef de
l'Exposition universelle de 1900.
M. Gilles de la Tourette est dès à pré-
sent chargé d'assurer le service médical de
l'Exposition pendant la période des travaux
qui va s'ouvrir très prochainement. Il sera
secondé par un certain nombre d'autres
médecins qui seront désignés ultérieure-
ment.
t
- Un accident :
M. Bouvard, directeur des services d'ar-
chitecture de l'Exposition de 1900, a fait
une chute dans l'escalier de la propriété
qu'il habite à Marly.
On espère qu'il n'y aura à ce faux-pas
aucune suite fâcheuse, mais M. Bouvard ne
pourra sans doute venir à Paris de quel-
ques jours. <
- Là note suivante nous est commu-
niquée par ragence Havas : -
Plusieurs journaux reviennent sur la ques-
tion des monnaies divisionnaires et semblent
croire qu'une mesure récente a été prise par
le gouvernement.
C'est une erreur. La démonétisation des
anciennes monnaies divisionnaires a en lieu
en vertu de l'article 3 de la loi du 19 juillet
1866 et de l'article i-, du décret du 17 juin
1868 rendu en exécution de cette loi. C'est à
partir du 1er octobre 1868 qu'elles ont cessé
d'avoir cours légal entre les particuliers et
à partir du 1er janvier 1869 d'êtres reçues
par les caisses publiques.
Depuis, absolument aucune mesure nou-
velle n'a éLé prise par le gouvernement.
- Une trouvaille littéraire :
Le bibliothécaire du séminaire de Saint-
Sulpice, l'abbé Lévesque, vient de décou-
vrir parmi les manuscrits nombreux con-
fiés à sa garde, un volumineux cahier iné-
dit de Bossuet.
Ce n'est rien moins que le texte original
du second tôme d'un traité intitulé : Etat
d'oraison, demeuré jusqu'ici introuvable
et qu'on estimait détruit.
L'Etat d'Oraison, dont le directeur de
Saint-Sulpice fait en ce moment tirer une
copie, sera prochainement publié.
Avis aux fervents du grand siècle !
-- Ollendorff met en vente aujour-
d'hui la Meute, la pièce d'Abel Hermant,
qui fit tant de bruit cet hiver à la Renais-
sance. En outre de son intérêt de curiosité,
la Meute se recommande par ses hautes
qualités dramatiques et sa puissance d'ob-
servation. C'est toute une société que l'au-
teur, avec l'acuité de sa critique et la force
de son talent, fait vivre et s'agiter devant
nous. La Meute est non seulement une
pièce, mais un livre qui restera.
--- Le Geste, le dernier roman que
Maurice Montégut publie chez Ollendorff,
est un livre profondément nouveau et
troublant. C'est une intrigue de passion
tumultueuse, soulevant un problème de
société moderne. L'œuvre met en scène
des personnages vrais malgré leur étran-
geté, et Maurice Montégut vient de prou-
ver une fois de plus, dans le Geste, qui
obtient un retentissant succès, la maîtrise
et la souplesse de son grand talent.
- La reine d'Angleterre a approuvé
la proposition tendant à décerner aux ha-
bitants d'Ouessant, de Molènes et des en-
virons, qui firent preuve de dévouement
lors du naufrage du Drummond-Qastle,
une médaille commémorative en argent
portant les mots : « Témoignage de grati-
tude de la reine Victoria. »
Le ministre du commerce ou président
du Board oj trade, M. Ritchie, a informé
de cette décision le gouvernement fran-
çais, qui a répondu par des remercie-
ments.
- Le baron d'Anethan, ministre de
Belgique en France, a quitté Paris hier
soir, se rendant à Bruxelles.
A L'ETRANGER
.,,",,- L'empereur d'Allemagne souffre
d'une affection catarrhale de, la gorge. Il a
été obligé de renoncer" sur le conseil de
ses médecins, à se rendre à Wesel, Buhrort
et Essen.
- Un singulier phénomène s'observe,
depuis quelques années, dans le quartier
de Kensington, à Londres. La population
masculine y croît en proportion assez mo-
dérée, tandis que le beau sexe s'y multiplie
avec une incroyable rapidité. s D'après un
recensement datant du mois de mars der-
nier, sur un chiffre total de 170,000 per-
sonnes, "on' compte 66,000 hommes et
104,000 femmes.
Soixante-six mille hommes pour cent-
quatre mille femmes ! Heureux habitants
de Kensington 1 Ils vont être normalement
obligés à en revenir à la polygamie, « cas
pendable»l peut-être, mais état si désirable.
Le Passant.
LE DIVORCE D'HENRI ROCEIEFOIST
Le 31 juillet paraissait dans nos colonnes
l'entrefilet suivant :
Parmi les instances introduites en cette der-
nière semaine judiciaire et qui seront plaidées
après vacations, signalons la demande en di-
vorce formée par Mme de Brède contre son
mari, M. Henri Kochafort.
Le placet de l'affaire nous apprend que le ma-
riage et la séparation de fait des deux époux
remontent l'un et l'autre à dix-huit ans.
Le /•r août, le Figaro publiait cette nou-
velle :
Mme Henri Rochefort, née de Beaupré de
Brède, vient d'introduire une demande en di-
vorce contre son mari.
Les deux époux vivaient séparés de fait de-
puis près de vingt ans et c'est cette séparation
que la demanderesse invoque comme grief à
l'appui de sa requête.
L affaire vient d'être inscrite au rôle de la qua-
trième chambre civile, mais le procès ne sera
jugé qu'après les vacances.
Et, hier, jeudi, 8 août, le Figaro annon-
çait :
Mme Henri de Rochefort, née de Beaupré de
la Nauraye, nous prie d'annoncep qu'eue n'a
formé aucune demande en divorce contre son
mari, comme on l'a annoncé par erreur, à ce
qu'il paraît.
Pour répondre au démenti catégorique
qu'indirectemént nous adresse Mme de
Brède, nous nous bornerons à préciser quel-
ques dates.
Le mardi 28 juillet, Mme Bouin de Brède,
accompagnée de son avoué, Me Barberon,
s'est., entre quatre et cinq heures du soir,
rendue au Palais de Justice, au cabinet de
M. Baudouin, président du tribunal de la
Seine, siégeant, non à la 48 chambre, mais
à la 1 "chambre. M* Barberon a présenté à M.
Baudouin une requête à fin de divorce entre
M. et Mme Henri Rochefort. Après avoir
donné à Mme de Brède quelques conseils
très juridiques, M. le président du tribunal
a répondu à la requête par une ordonnance
fixant au mardi 4 août les prélimina rcs de
conciliation entre les époux, formalité pres-
crite par la loi en matière de divorce.
Mais le mardi 4 août, pas plus Mme de
Brède qu Henri Rochefort ne se sont présen-
tés au cabinet de M. Baudouin.
Par suite de cette non comparution, Mme
Bouin de Brède devra pour continuer son
instance en divorce, obtenir une nouvelle
ordonnance de M. Baudouin qui, disons-le
en passant, tient beaucoup à concilier en
personne, « si faire se peut », les deux
époux — séparés de fait et devenus étran-
gers l'un à l'autre depuis un grand nombre
d'années.
TENTATIVE DE CORRUPTION DE FONCTIOMAIRE
La justice égale pour tous.
Après les bruyantes affaires de corrup-
tion de fonctionnaires, dans le procès du
Panama— procès qui s'est dénoué par les
non-lieu ou les acquittements que l'on sait
— il nous parait piquant de signaler l'affaire
Palix.
La veuve Palix est une fille soumise qui
est âgée de quarante-six ans. Elle a com-
paru, hier, devant Ja 9" chambre correction-
nelle sous l'inculpation de tentative de cor-
ruption de fonctionnaire.
D'après la prévention, la misérable, arrê-
tée au bois de Boulogne pour racolage, au-
rait dit à l'agent qui procédait à son arres-
tation : « Si tu veux me laisser aller, je te
donnerai 5 francs et, en plus, nous irons
ensemble passer quelques instants dans le
bois. »
Le tribunal a condamné la veuve Palix à
huit jours de prison.
Qu'on ne vienne plus prétendre mainte-
nant qu'en France la loi sur la corruption
de fonctionnaires n'est jamais appliquée !
———————————
Le Mystère de la rue des Archives
La mort de Mme Vaillant, dont le corps,
il y a deux jours, fut retrouvé percé de
deux coups de couteau, dans son logement,
87, rue des Archives, semble bien due à un
crime. -■
Mme Vaillant, qui vivait seule et très
chichement d'une petite pension , avait,
comme on le sait, disparu depuis le 1er
août.
M. Montillier, commissaire de police du
quartier, prévenu par les voisins de l'ab-
sence de la vieille femme, elle avait soixante
ans, se présenta pour faire ouvrir la porte,
qui n'était du reste fermée qu'au pêne et
trouva le cadavre de Mme Vaillant, vêtu et
étendu sur le parquet, au milieu d'une mare
de sang.
La chambre, sans être tout à fait en dé-
sordre, paraissait cependant avoir été légè-
rement bouleversée, ainsi, l'édredon recou-
vrait la partis supérieure du corps et, par-
dessus 1 édredon, une chaise était tombée.
Le commissaire de police fit couper les
vêtements de la vieille femme et, sous les
deux seins, deux blessures faites par un
instrument qu'on n'a pu encore déterminer
apparurent béantes, entourées de caillots de
sang.
L hypothèse d'un crime fut la seule qui se
présen a, à ce moment, à l'esprit du magis-
trat; cependant, ni bruits de lutte, ni cris,
n'avaient été perçus par les voisins, et l'en-
quête conclut à un suicide.
Les bijoux do la défunte avaient été re-
trouvés et le porte-monnaie de Mme Vail-
lant, que contenait une de ses poches, était
intact.
Le matin du 1er août, Mme Vaillan, qui
venait de toucher sa pension mensuelle de
125 fr., avait fait un achat de toile à tor-
chons, toile qu'elle voulait offrir à des pa-
rents de la campagne habitant Vîllers-Cot-
terets.
On crut que son absence se rattachait à
un voyage qu'elle avgait du reste annoncé,
voyage se rattachant au cadeau qu'elle vou-
lait faire à ses parents, aussi n'accorda-t-o]
pas d'importance à sa disparition.
Cependant quand, au bout de trois jours
les voisins et la concierge ne la virent pa
paraitre, ils s'émurent et c'est alors qu'il
signalèrent son absence au commissaire d
police du quartier.
Le service 1e la sûreté cherche à l'heur
actuelle à reconstituer l'emploi du temps d,
la morte entre le moment où elle a touchi
sa pension mensuelle et l'instant où elle es
rentrée chez elle.
L'au'opsie du cadavre qui sera faite au
jourd hui par le docteur Vibert, dira si l'hy
pothèse d'un crime est justifiée.
Ce qui vient à l'appui de cette hypothèse
c'est que, bien que des blessures aient étl
constatées sur Mme Vaillant, l'arme ayan
servi à les faire n'a pas été retrouvée. Or, i
est peu probable, dans le cas où Mme Vait
lant se serait suicidée, qu'elle eût pensé i
prendre la précaution de cacher l'arme qu
lui avait servi à se donner la mort.
-91>
LA VIE DE PARI
Par HENRY FOUQUIER r
La distribution des prix, au Conser
vatoire de musique et de déclamation
s'est passée sans encombre et selon le!
us. Le public qui y assistait n'était pa:
le même que celui des concours et
d'ailleurs, nulle occasion ne lui étai
offerte de se fâcher. Il assistait à un<
représentation gratuite, mais qui, ce
pendant, n'est pas à la portée de tou
le monde : et il n'en faut pas plus poui
mettre en très belle humeur les Pari
siens qui adorent avoir, sans payer, un
spectacle qui n'est pas à la portée de
tout le monde. Il y a, dans ce goût, une
pointe de snobisme qui explique que
les théâtres « à côté » ont toujours du
monde, quand bien même on n'y ferait
autre chose que d'allumer les chan-
delles. Il est du reste excellent qu'il en
soit allé de la sorte pour le Conserva-
toire et que la foule n'ait pas fait men-
tir le dicton qui veut que les arts et en
particulier la musique adoucissent les
mœurs.
M. le ministre de l'instruction publi-
que a prononcé un joli discours. Ces
réunions sont pain bénit pour les ora-
teurs officiels. Pourvu qu'ils y montrent
en prenant la parole, de la bonne grâce,
de la bonhomie et, quand il le faut, une
pointe d'émotion, ils sont certains d'être
acclamés. Ah! comme ils sont loin (et
comme ils doivent en être heureux!) du
public de la Chambre, si peu encoura-
geant, si hostile parfois, si cruel et qui,
tout en se laissant souvent trop embal-
ler par la virtuosité des orateurs,
écoute mal les gens qui ont parfois rai-
son sans assez d'adresse l Seulement,
ces discours officiels applaudis ont
l'inconvénient de ne pas aborder bien
de front les difficultés qui pourraient
être soulevées ici. C'est très bien de
faire l'éloge de l'art français en général,
de constater ses succès européens, de
rendre justice au zèle des maîtres dont
on décore l'u i ou l'autre, de donner de
bons avis aux élèves, de leur recom-
mander l'assiduité, la déférence et
même. la vertu ! Mais ceci ne nous
apprend pas si quelque chose sera fait
pour faire les études du Conservatoire
plus pratiques, pour accomplir les ré-
formes dont il a été souvent question
et dont les concours semblent démon-
trer de plus en plus la nécessité.
Cette année encore n'avons-nous pas
vu le système des concours même offrir
des surprises? Il n'est pas assez dé-
montré qu'une élève qui a très bien ré-
pété une scène apprise, inflexion par
inflexion, pendant des mois, ait l'intel-
ligence artistique assez ouverte et le
goût assez formé pour aborder la scène.
Il n'est pas démontré davantage qu'un
chanteur,. muni d une jolie voix et de
quelques avantages physiques, soit un
vrai musicien. Les concours instru-
mentaux seuls présentent à peu près
quelque certitude. On regrette toujours
que les élèves jouent, sans costumes,
sans accessoires, des morceaux de
rôles laissés à leur choix, sur la scène
étroite du Conservatoire, dans des con-
ditions vraiment déplorables. Le grand
vice de l'éducation du Conservatoire,
le malheur des épreuves où cette édu-
cation cherche sa sanction, c'est que
tout demeure incertain. -
Et alors, qu'arrive-t-il? C'est qu'on
reproche à l'Etat, par la protection qu'il
donne aux beaux-arts, et qui, paralt-il,
est un de ses plus impérieux - devoirs
(on peut discuter là-dessus) d'encoura-
ger cette chose néfaste, une des plaies
sociales de notre temps, qui est la mul-
tiplication des fausses vocations. Toute
médaille a son revers — et les mé-
dailles de concours et d'examens plus
que les autres encore. Le nombre de
plus en plus considérable de brevetées
de l'instruction publique a jeté dans
la vie de Paris surtout un nombre éton-
nant de jeunes personnes qui, fières à
bon droit de leurs travaux et de leur
diplôme, croiraient déroger en gagnant
leur vie autrement que dans une. pro-
fession libérale » et qui sont bien sou-
vent horriblement malheureuses. Les
concours du Conservatoire jettent
chaque année sur le pavé des
quantités d'acteurs et d'actrices,
qui croient à leur vocation et à
leur talent, et qui éprouvent d'ef-
froyables déconvenues. On ne se
figure pas dans quel mensonge vivent
ces pauvres gens, surtout les femmes.
L'entourage les exalte. Elles se grisent
d'applaudissements. Elles se tiennent
tout de suite pour des Sarah Bernhardt 1
Et puis, quand en sortant de cette illu-
sion des premiers succès complaisants,
des surprises heureuses, elles se trou-
vent en face de la réalité, quelle mi-
sère 1 Professionnellement, je suis for-
cément un peu au courant de ce oui se
passe dans le mondedes théâtres. C'est
effroyable et navrant. La concurrence,
qui règne partout, est peut-être tà plus
forte que partout ailleurs. Paris est
plein de femmes, dont il en est qui Be:
sont pas sans talent, qui courent après
un engagement, souvent perfas etnefas,
et n'arrivent pas à l'obtenir. Il y a des
actrices de vrai mérite qui sont restées
inutilisées pendant des mois et des an-
nées. Quand ce sont des femmes et
qu'elles sont jolies, elles arrivent tout
de même à se débrouiller. Mais com-
ment?
Vous m'entend z bien, sans qu'il soit
nécessaire d'insister. Mais un acteur
ou une actrice sans beauté ou avec des
scrupules qui veut. au sortir du Con-
servatoire, gagner sa vie par son seul
métier de comédi n, n'y arrive guère.
Les premiers emplois sur ces scènes,
sont largement, très largement rétri-
bués.On cite des chiffres vraiment énor-
mes. Mais ies débutants et débutantes,
ce qu'on pourrait appeler le cadre des
sous-officiers de 1 armée dramatique
meurt littéralement de faim. Cepen-
dant, quand on a éiuqué ces jeunes
gens, qu'on leur a donné des récom-
penses, ils se retournent vers l'Etat ei
lui disent : « Vous m'avez encouragé à
adopter ce métier de comédien, vous
parlez de l'éclat qui- votre école jetts
sur l'art et vous ne trouvez pas 16
moyen de me faire vivre. » Qui de nous
n'a entendu ces plaintes, véritablement
navrantes de la part des artistes qui
n'ont pa: de moyens personnels d'exis-
tence, et navrantes aussi, à un autre
point de vue, de la part de ceux qui
ont la passion d'un métier et ne Deu.
vent pas la satisfaire.' A ces plaintes on
répond, ce qui est vrai que les théâtres
subventionnés sont bouués, qu'ils ont
tous des pensionnaires qui, si peu
payés quils soient,, n'en grèvent pas
moins inutilement le budget, puisqu'ils
ne jouent jamais et que l'Etat donne
l'éducation et ne peut rien assurer de
plus. Le problème est bien difficile et
bien douloureux. En somme, je n'exa- ,
gère pas en disant qu'il y a, à Paris,
sortis des serres de 1 Etat, des cen-
taines d'artistes sans emploi à qui on
dit que, pour se faire connaître, il faut
commencer par être connu ! Je ne vou-
drais pas être un pessimiste découra-
géant. Mais je ne' saurais trop répéter
que quiconque veut aborder le théâtre
de notre temps doit, après un examen
sévère de sa vocation et de ses moyens,
s'assurer enc re d une force de vo-
lonté et d'un c urage de caractère qui
ne doivent pas être ordinaires l
HER y FOUQUIER.
Nous publierons leuiain la Chronique
de U. An iré liaiz.
LES ENFANTS NATURELS
Est-ce que tous les enfants ne sont pas
naturels? C'est la question que posait jadis
M. Edouard Palll.'i'l.n dans le Monde où L'on
s'ennuie, cette comédie de mœurs si char-
mante et d'une si line et cruelle observa-
lion. ,.
Bellac eût pu en prendre texte pour la dé-
velopper, et le prolesseur n eût pas manqué
alors de nous faire l'hi:..tùrique de la condi-
tion juridique des enfants naturels, d'abord
à Rome, puis dans le droit intermédiaire et
et enfin dans notru- droit civil.
Cette dissertation eut convenu à son pé-
dantisme. D'au ant mieux que, dans une
question aussi seniimenta e, il eût pu faire
apprécier le charme et la majesté de son élo-
quence. Il n'y a pas, (n effet, de sujet qui
se prête mi ux aux développements ora.
toires.
On peut y exercer sa sensibilité. Je vous
assure que beaucoup n y ull. pas manqué
depuis de 1 ngue" années. Mais soit que
leur argumentation manquât de solidité ou
de persuasion, soit que par eux la question
fût mal présentée, ia condition certes vrai-
ment douloureuse et in éressante des ew
fants naturels restait toujours la même, lors-
qu'il y a quelques annees un publiciste dou-
blé d'un avocat de grand, talent, M. Henri
Coulon, prit en main la question des enfants
naturels, et dans une brochure sensation-
nelle intitulée : De la Condition des enfants
naturels reconnus dans tu succession de leurs
père et mère. — Ce qa'elte a été. — Ce qu'elle
est. — Ce qu'elle devrait être, — plaida leur
cause avec la même (halêUr- la même força
de dialectique, la même hardiesse d'esprit
que nous éLions habitués à rencontrer dans
les plaidoyers du IV. mment avocat.
Un peut dire qu'à partir de ce jour la cause
des enfants naturel* fut gagnée.
Dans le monde parlementaire où l'on a
— tiop rarement hélas ! — la bonne pensée
de renoncer pour quelques instants aux
luttas politiques sténjt's pour s'attacher à
quelque loi généreuse et humanitaire, on
s émut du sort qui était fait depuis si long-
temps aux enfants naturels dans notre juri-
diction civile à QHe époque ou suuffle de
tous cô és un vent d'égaliié et de miséri-
corde sociale. Des esprlt excell. nts tels que
M. DemOle, M. Julhen, se dévouèrent à cette
question et de leur activité bienfaisante est
enlin sortie la loi du 25 m:lrs dernier qui a
apporté a la condition des enfant- naturels
une première moditicatiun importante ; celle
d'en faire des héritiers réservataires et de
leur attribuer dans la succession de leurs
père et mère une part beaucoup plus grande
que celle qui leur était dévolue jusqu'à ce
jour.
Depuis la loi du 25 mars 1896 les enfants
naturels sont héritiers. Avant, ils ne l'é-
taient pas. Vous n'attendez pas de moi que
je vous explique toutes les conséquences
juridiques qui découlaient de cette situation
de non-héritiers. Qu'il vous suftise de savoir
que c'était là une véritable source de pro-
cès. Sous l'empire de la loi nouvelle ils sont
en outre héritiers réservataires, c'est-à-dire
que s ils ont été reconnus par leur père on
leur mère ces derniers ne pourront pas les
deshérit er entièrement. Voici d ailleurs les
principaux articles de la dernière loi où vous
trouverez en substance les droits des en-
fants naturels reconnus dan» la succession
de leurs père et mère :
Article 758 du code civil. — « Le droit hé-
rèditaire de l'enfant naturel dans la succes-
sion de ses père et mère est fixé ainsi qcffl
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