Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1896-07-14
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 14 juillet 1896 14 juillet 1896
Description : 1896/07/14 (N9622). 1896/07/14 (N9622).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/05/2013
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PARIS ET DÉPARTEMENTS
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1Je 4 B heures du soir et de 10 heuru du soir à 1 heure du matin
Wo 9622. — Mardi 14 juillet 1886
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27 MESSIDOR AN 104 -.
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•- p -
NOS LE A DBjRS
LETTRES LIBRES
La Surenchère des promesses
¡'hlition dans laquelle le gouver-
nement s'est trouvé d'ajourner le pro-
jet de réforme des contributions di-
metes de M. Cochery n'a étonné per-
sonne. Ce projet avait soulevé tant
d'apposition , même parmi les plus
,fidèles partisans du ministère qu'il ne
pouvait pas avoir un autre sort. Mais
aussi pourquoi M. Cochery s'était-il
mi5 en tête de chausser les bottes de
Jtf. Doumer? Pourquoi vouloir sumi-
chénsr sur les projets du ministre ra-
scal, au poiM que pour l'impôt sur la
rente, M. Doumer a pu accuser son
successeur d'être plus radical et plus
socialiste que lui-même et que les col-
lectivistes ont pris M. Cochery sous
leur protection, parce qu'il portait la
-------,'!-_- 1. J I
première aivemie au « uroit ue pro-
priété ». Ce sont ces procédés de su-
renchère qui avaient entraîné la chute
de M. Bourgeois ; ce sont eux qui dé-
termineront celle de M. Méline.
On a raconté que le projet d'impôt
global sur le revenu, avec taxation et
déclaration de M. Doumer était né du
désir d'accentuer le caraetère socialiste
que quelques membres du cabinet
Bourgeois voulaient donner à ce cabi-
net, malgré son chef. D'autres minis-
tres auraient préféré, dit-on, prendre
comme drapeau la séparation des
Eglises et de l'Etat, mais on leur fit
observer que cette question avait beau-
coup vieilli depuis quelques années et
qu'elle était indifférente aux collecti-
vistes auxquels on désirait particuliè-
rement faire plaisir, tandis qu'elle
soulèverait des discussions dans les
campagnes. Mieux valait prendre pour
enseigne une réforme autour de la-
quelle tous les socialistes se groupe-
raient et qui permettrait de faire luire
aux yeux des paysans la promesse que
plusieurs millions de contribuables
ne payeraient à l'avenir, ni l'impôt
nouveau, ni ceux qu'il remplacerait.
C'était, pensait-on, la popularité assu-
rée et les députés enchainés au cabinet
par les promesses qu'ils avaient prodi-
guées à leurs électeurs et qu'ils seraient
obligés de tenir.
On avait calculé sans l'effet que pro-
duisirent la taxation, la déclaration,
l'inquisition blessante et la violation
de toutes les libertés individuelles et
de la conscience humaine que la glo-
balité entraîne fatalement après elle.
il y eut une révolte de l'opinion et de
la Chambre et, dans la séance du 26
mars, M. Bourgeois, pour sauver son
ministère, dût jeter par dessus bord le
projet de son ministre des finances et
se contenter d'un vote platonique en
faveur du principe d'un « impôt géné-
ral sur le revenu » que l'on étudierait
plus tard. Il étaitvisible, en effet,.qu'on
ne parviendrait jamais à s'entendre
sur les détails du projet de M. Dou-
mer.
Celui-ci a essayé de remettre à son
flot son impôt global en l'allégeant de
la déclaration ; le seul résultat qu'il ait
obtenu a été de lui faire subir un nou-
vel échec et de sauver le cabinet Mé-
line qu'il s'était proposé de renverser.
C'est que si les principes généraux
suffisent pour indiquer l'orientation
d'une politique et l'esprit d'un minis-
tère, ils sont insuffisants pour l'édifi-
cation d'une loi ; surtout quand il s'a-
git de la refonte complète de notre
système de contributions directes.
M. Bourgeois en fit l'expérience au
mois de mars, M. Meline vient de la
faire à son tour et pour les mêmes
motifs. -
.*
La pensée dominante de M. Méline
était de soulager la propriété immobi-
lière d'une partie des charges trop
lourdes dont elle est accablée, afin de
la réhabiliter, en quelque sorte, et
d'arrêter le mouvement d'émigration
des campagnes vers les villes.
Cette pensée est juste, éminemment
politique et d'une grande portée so-
ciale. Il fallait s'y borner et en cher-
cher la réalisation par des moyens
aussi simples que possible, sur lesquels
ie cabinet aurait fait porter tous ses
efforts. Le succès, dans ces conditions,
était assuré. M. Cochery l'a transformé
en un premier échec par le projet trop
alàmbiqué où il a noyé la pensée du
président du conseil et par le désir
trop manifeste d'emboîter le pas à son
prédécesseur et de courtiser la même
clientèle parlementaire et électorale.
S'il persiste dans cette voie, il en-
traînera, au retour des vacances, la 1
chute du ministère dont il fait partie,
comme M. Doumer a été l'agent non
douteux de la chute du cabinet Bour-
geois. Et il en sera ainsi de tous les
ministres des finances qui voudront
.imiter MM. Doumer et Cochery ; tous
succomberont et entraîneront à leur
mite les ministères assez fous pour
te® suivre. ,
.*
Pourquoi? D'abord parce qu'il est
impossible à un ministre des finances,
quel qu'il soit, de préparer en un mois
une réforme sérieuse de nos contribu-
tions directes, et ensuite parce qu'en
admettant qui! le pût, le projet le plus
sage et le mieux agencé ne pourrait
pas, avec nos mœurs parlementaires,
les ambitions et les appétits qu'elles
provoquent, trouver une. majorité
dans la Chambre.
Dès qu'on soulève la question d'une
réforme plus ou moins complète de
nos contributions directes, si lourdes
aux contribuables, on fait naitre au-
tant de convoitises électorales que de
passions parlementaires, et l'on donne
le signal de toutes les surenchères de
promesses et de projets.
Chaque député fait aussitôt le compte
des voix qu'il pourra s'assurer aux
élections prochaines en promettant
aux contribuables de sa circonscrip-
tion une réduction de leurs charges
fiscales; et c'est à qui en promettra le
plus, sans que personne s'occupe ni
du désordre qu'il en pourra résulter
dans les finances de l'Etat, ni d-e la
surcharge qu'il faudra imposera d'au-
tres citoyens.
Le candidat des paysans ne s'oc-
cupe que des paysans ; celui des ou-
vriers ne pense qu'aux ouvriers ; celui
des bourgeois ne se soucie que des
bourgeois; chacun en fait ne songe
qu'à soi-même et chacun promet la
lune en échange d'un bulletin de vote.
En couvrant tout cela de grandes for-
mules patriotiques ou sociales et de
déclamations plus ou moins bruyan-
tes, on passe pour des réformateurs à
tous crins et l'on s'assure quatre nou-
velles années de potinage parlemen-
taire.
Quand arrive la discussion publique
des projets, chacun surenchérit sur les
propositions du gouvernement, cha-
cun fait publiquement le compte des
millions de contribuables qu'il dé-
grève, jusqu'à ce que la vanité de ces
promesses éclate à tous les yeux.
Alors, on s'empresse de « disjoindre »
ou « d'ajourner » et l'on va respirer
l'air frais des champs, sous les fron-
daisons touffues des ruisseaux où se
jouent la truite et le goujon.
.**
Comme cela se produit chaque an-
née, à des époques déterminées, les
électeurs ne doivent plus avoir beau-
coup d'illusions, et je suppose qu'ils
mettent dans le même sac tous les pro-
jets de tous les ministères.
Il serait pourtant bien facile d'opérer
des réformes : on y parviendra le jour
où les députés et les ministres feront
passer les intérêts du pays et de la Ré-
publique avant les leurs et remplace-
ront la surenchère des promesses et
des projets retentissants par l'étude
sérieuse des questions.
Ce jour-là, avant d'aborder la ré-
forme des impôts, on réduira les dé-
penses et tout le monde bénira la Ré-
publique.
J.-L. DE LANESSAN.
Nous publierons demain un article
de M. Charles Bos.
LES ON-DIT
CARNET QUQT10ISN:
Les courses : A Vincennes (plates).
— Durée du jour : 17 h. 10 m.
CHEZ NOUS
■BOBHBEHnnBMn
Le président de la République a
offert hier soir le dîner annuel donné à
l'Elysée à l'occasion de la revue du 14
juillet.
La table comprenait cent couverts.
Mme Félix Faure avait à sa droite le mi-
nistre de la guerre et à sa gauche le minis-
tre de la marine.
Le président avait à sa droite le général
Davout, grand-chancelier de la Légion
d'honneur, et à sa gauche le général Saus-
sier, gouverneur militaire de Paris.
Etaient également invités : les princi-
paux chefs du service des ministères de la
guerre et de la marine, les généraux et
chefs de corps devant prendre part à la re-
vue, tous les officiers de la maison mili-
taire du président.
Le dîner a été suivi d'une réception.
- -- Les grâces du 14 juillet :
A l'occasion de la fête nationale, le pré-
sident de la République a, par plusieurs
décrets rendus sur la proposition du mi-
nistre de la guerre, accordé des grâces,
commutations ou réductions de peines à
1,047 condamnés, détenus dans divers éta-
blissements pénitentiaires militaires ou
civils, en vertu de jugements prononcés
contre eux par des conseils de guerre.
- Nous avons le très vif regret d'ap-
prendre la mort de notre confrère Prosper-
Louis Docteur, ancien consul de l'Uruguay
et du Venezuela.
M. Louis Docteur est décédé à Menton,
à l'âge de cinquante-trois ans. Il était le
beau-frère du poète excellent et du vail-
lant républicain Adolphe Pelleport, qui fut
si longtemps gérant du Rappel, et qu'une
mort prématurée enleva, il y a plusieurs
années déjà, à l'affection de ses nombreux
amis. * ,
- Hier matin ont eu lieu les obsèques
de M. Félix Levêque, ancien secrétaire de
M. Bourgeois.
De nombreux amis sont venus jusqu'au
cimetière, accompagner la dépouille mor-
telle, de celui qui n'avait cessé d'être pen-
dant sa vie le plus ndde, la plus dévoué et
le plus honnête camarade. En l'absence
de M. Bourgeois, pris par un engagement
antérieur à Lisieux, M. Ribierre, ancien
directeur du personnel au ministère de
l'intérieur, a pris la parole sur la tombe
encore ouverte, et dans un discours plein
d'une émotion que toute l'assistance a par-
tagée, l'ancien chef et camarade de Levêque
a rappelé quelle fut toute cette vie d'hon-
neur - et de probité, brusquement inter-
rompue au moment où il allait rentrer
dans la vie publique.
On sait, en effet, que Félix Levêque
devait être nommé percepteur dans le dé-
partement de la Seine.
- Les peintures de Delacroix , au
nombre de vingt-deux, qui décorent la bi-
bliothèque du palais Bourbon vont. subir
d'importants travaux de restauration.
Parmi ces œuvres se trouvent la Paix et la
Guerre.
- Le président de la République pas-
sera au Havre la plus grande partie de ses
vacances.
M. Félix Faure quittera Paris le 20 juillet
se rendant au Havre.
Il partira de cette ville le 3 août pour
entreprendre son voyage en Bretagne qui
prendra fin le 13 août à Laval.
Le président rentrera de Laval à Paris
dans la nuit du 13 au 14 août et présidera
le 14 août à l'Elysée un conseil des minis-
tres. Il repartira de Paris ce même jour, à
midi, pour rentrer au Havre en s'arrêtant
quelques heures à Rouen, où il visitera
l'exposition.
M. Félix Faure séjournera au Havre jus-
qu'au 16 septembre. Entre temps, il ira in-
cognito assister à une partie des grandes
manœuvres exécutées par les 12' et 178
corps d'armée. Le 17 septembre, il passera
la revue qui clôturera les grandes manœu-
vres. -'
Il ira ensuite s'installer au château de
Rambouillet jusqu'aux premiers jours d'oc-
tobre,
Au cours de l'une des dernières
séances du conseil municipal, notre dis-
tingué collaborateur M. Charles Bos a pré-
senté à ses collègues le très intéressant
volume les Rayons x et la photographie de
l'invisible que notre, ami M. Georges Vi-
toux a récemment publié chez l'éditeur
Chamuel.
En réponse à cet envoi, M. Georges Vi-
toux vient de recevoir de M. Pierre Bau-
din, président du conseil municipal, une
lettre de remerciement l'informant que son
livre allait être placé dans la bibliothèque
spéciale du conseil. - - 1
- Un concours pour l'admissibilité à
deux emplois de chef de clinique à la Cli-
nique nationale ophthalmologique des
Quinze-Vingts aura lieu le vendredi 7 août
à neuf heures du matin.
Les candidats pourront se faire inscrire
jusqu'au 30 juillet inclusivement au secré-
tariat de l'hospice, tous les jours non fériés
de une à quatre heures.
A L'ETRANGER
Le mariage du prince Charles de
Danemarck et de la princesse Marie de
Galles aura lieu le 22 de ce mois dans la
chapelle du palais de Buckingham. Le
jeune ménage jouira d'un revenu d'environ
400,000 fr.
- L'artillerie en papier :
C'est un ingénieur de la maison Krupp
qui vient de l'inventer. Il a construit, pa-
raît-il, un modèle de petit canon portatif
en papier comprimé pour le service de
l'infanterie, dont le poids serait si réduit
qu'un homme pourrait facilement le porter
en guise de havresac.
La résistance de ce canon, dont le cali-
bre est de 5 centimètres, serait supérieure
à celle d'un canon en acier de même dia-
mètre, et son emploi rendrait de grands
services sur les champs de bataille acci-
dentés, où les manœuvres de l'artillerie
de campagne ordinaire sont toujours dif-
ficiles.
Le journal allemand auquel nous em-
pruntons ces détails ajoute que des essais
ont été faits avec ce canon dans le batail-
lon-école et que les résultats ont été très
satisfaisants.
L'inspecteur des fouilles archéo-
logiques de Thyra (Turqtiie), a envoyé au
conservateur des antiquités son rapport
sur les récentes découvertes faites dans
cette île.
A l'endroit dit « Tris Sykiès » on a mis
au jour une partie de la muraille de la ville
construite au moyen d'énormes pierres
carrées, ainsi que d'étroits portiques au
sud et au nord. On a, en outre, découvert
une colonne ou autel quadrangulaire d'une
nauteur ae 30 eentimetres portant a un
angle Hermès , à l'autre Hercule armé
d'une massue, au troisième une corne (au
quatrième, il n'existe aucun signe), un au-
tel grandiose d'Auguste César, orné de
têtes de bœufs ; un autre autel brisé, sur
lequel sont sculptées une tête de cerf et
partie d'une inscription qui fait mention
de Ptolémée III ou d'un Evergète et de ses
soldats ; une tête de bœuf de dimensions
naturelles qui est un ornement d'archi-
tecture ; un buste de statue d'homme et
une foule de menus objets.
Mystère et magie aux Etats-Unis:
Le recorder John W. Goff, de New-
York, est bien embarrassé. On lui amenait
avant-hier un nommé Macdonald, accusé
d'un vol avec effraction dans une maison
de la ville, d'où l'avaient vu sortir une
quantité de témoins dignes de foi. Mais. à
ïheure même où son corps se livrai ta cette
^coupable opération, MaedonaM se trouvait
en état de sommeil hypnotique dans une
salle de conférence où le professeur Wein
présentait cet intéressant sujet à un audi-
toire 'de curieux. On juge de la surprise du
Ihagîstrat, qui ne peut contester la validité
de cet alibi. psychique, mais qui ne peut,
d'autre part, récuser les témoignages pro-
duits contre Macdonald.
- M. Goff a prudemment ajourné cette cu-
rieuse affaire, sur laquelle il veti; consul-
ter un certain nombre de-savants et d'ex-
perts en occultisme. Le professeur Wein
lui-même ne doute pas que les deux Mac-
donald, le voleur et l'endormi, soient un
seul et même être dédoublé.
A vous, mon cher Jules Bois.
Le Passant.
Le Drame de Levallois-Perrei
Le « divan » Bauer — Bal-musette
Un mort et trois blessés
M. et Mme Bauer tiennent à Levallois,
40 ter, rue de CoUrceHes, une maison très
achalandée, surtout la nuit, où les clients
s'attardent.
Une première pièce sur la rue sert de café
ou bar ; au fond de cette pièce une porte
donne accès à une salle assez exiguë où il y
a bal le dimanche et le jeudi.
La rixe sanglante qui a eu lieu hier soir
11 juillet, à onze heures, a jeté l'émoi dans
ce quartier, qui est un des plus animés de
Levallois.
Quatre jeunes gens, tous ouvriers du pays,
venaient de quitter le bal-musette Bauer et
avant de se séparer allaient prendre une
côiisomxnation à la terrasse du café tenu
par M. Bouissès, quand quelques instants
après une bande d une douzaine de drôles,
qui eux-mêmes sortaient du bal, se ruèrent
sur eux.
Bans cette attaque soudaine, Jean Chau-
meton reçut un coup de couteau d'une telle
violence que l'arme, traversant l'os frontal
au-dessus de l'œil gauche, pénétra à 8 cen-
timètres de profondeur dans la boite crà-
nionno
Conduit chez le pharmacien, M. Lesage,
71, rue Valtier, ce dernier jugea l'extrac-
tion impossible sans l'opération du trépan.
Le blessé put répondre à quelques ques-
tions touchant les souffrances qu'il endu-
rait, mais il fut d'urgence et sans désem-
parer conduit à l'hospice Beaujon.
Nous ne connaissons pas le résultat de
l'extraction du couteau du crâne du malheu-
reux Chaumeton.
Des bruits persistants courent qu'il serait
mort à cette heure.
La victime était ouvrier cimentier chez
M. MaiHori, maître maçon, 3, rue Camille-
Desmoulins.
Le fils Maillori a eu la lèvre supérieure
coupée, et Edouard Joanie et Jules Débeau
ont reçu des coups dans la bagarre.
Le plus étrange, c'est que, le coup fait,
les douze gredins ont pu s'enfuir en prenant
les rues Vallier et FaziHau et les fortifica-
tions sans être inquiétés. -f~
On dit qu'ils sont totalement inconnus.
Le commissaire de police, M. Brunet, fait
l'enquôe.
Peut-être, et cela nous parait vraisem-
blable, y a-t-il là une vengeance ; en tous
cas, le coupable doit être retrouvé.
LES CORRIDAS DE fEBPlGNkN
Quatre toréadors blessés
Des courses de taureaux mouvementées
ont eu lieu hier dimanche aux deux arènes
de Perpignan.
Aux arènes de la Gare, le toréador espa-
gnol Tito a été renversé par un taureau qui
lui a ensuite planté une corne dans le
ventre et l'a fait tournoyer dans les airs.
Le chef du quadrille Chutero a été cul*
JJUIIC a son tour, llicua ÙCWIS uit-aauic.
Tito, au contraire, a dû être transporté
immédiatement à l'hôpital dans un état
alarmant. La corne du taureau qui a péné-
tré dans le ventre a perforé l'intestin ; on
conserve peu d'espoir de le sauver. Le pu-
blic exaspéré par ces accidents a réclamé
avec violence la mort des taureaux qui n'a
pas été autorisée.
Aux arènes de l'Alcazar, le toréador espa-
gnol Metodo a reçu un coup de corne sérieux
à l'aine et un toréador français a été blessé
à la cheville, mais peu grièvement.
UN DRAME DANS UNE ÉGLISE
Le bourg de Seilhan, commune de Gour-
dan, canton de Barbazan, a été le théâtre
d'un drame qui a produit une profonde émo-
tion.
Il s'est déroulé dans la sacristie de l'église
de Seilhan, le prêtre venait de dire la messe
et de eonfesser une de ses paroissiennes,
lorsqu'un individll ht irruption et s écria
sans préambule : « Main-tenant, à nous deux,
il faut nous confesser », et comme il était
repoussé par le prêtre qui l'invitait à sortir,
il brandit un pistolet au-dessus de la tête de
celui-ci et fit feu.
Heureusement le prêtre put détourner
l'arme en imprimant de sa main un vigou-
reux mouvement sur le bras du meurtrier.
Ayant échoué dans sa tentative, le meurtrier
a retourné le pistolet et a frappé sa victime
de plusieurs coups de crosse à la tôte. Il
s'est ensuite enfui.
Les blessures du prêtre ne sont pas gra-
ves; c'est un vieillard de quatre vingt-trois
ans, nommé Jean Clave, qui dessert la pa-
roisse depuis cinquante-cinq ans.
Le meurtrier est un autre vieillard de
quatrevingt-cinq ans, Baptiste Luent, dit
Bourges, père de quatre filles.
Le mobile du crime serait l'argent.
Luent, qui aime la vie facile et fréquente
les cabarets, voulait forcer le prêtre à lui
donner une soe de mille francs. Il a été
arrêté et conduit à la prison de Saint-Gau-
dens.
UN TRAIN DANS UNE RIVIÈRE
D'après une dépêche de Spokane (Etat de
Washington, Amérique), un terrible accident
s'est produit sur la ligne du Great Northern
Railway, près de Kootenai Falls (Idaho). Un
train de marchandises s'est heurté à un
monceau de terre et de rochers provenant
d'un éboulement, et a déraillé.
Douze wagons ont été précipités dans la
rivière Kootenai, juste en amont des chutes.
Dans l'un des wagons se trouvaient une
douzaine de vagabonds qui s'y étaient ca-
chés pour se faite transporter gratuite-
ment.
Ce wagon justement a flotté pendant quel-
ques instants, et quelques-uns des vaga-
bonds, qui savaient pas été blessés, sont
montés sur le toit en criant au secours.
Quelques personnes qui se trouvaient sur
la rive ont essayé de leur lancer des cordes;
mais ayant qu'aucun des malheureux put
être sauvé, le wagon, comme les onze au-
tres, était entraîné par le courant jusqu'aux
chutes et précipité dans l'abîme. Quelques-
uns des vagabonds ont eu la présence d'es-
prit de sauter à l'eau au moment même où
le wagon arrivait aux chutes, mais le cou-
rant était si fort qu'aucun n'a pu gagner la
rive et tous ont péri.
——————————— —————————.——
LA VIE DE PARIS
Par HENRY FOUQUIER
Sous le titre plutôt gai de « un com-
bat naval en Seine », la plupart des
journaux ont raconté un fait-divers
assez bizarre. Deux membres du syndi-
cat formé par les pêcheurs à la ligne
pour la répression du braconnage flu-
vial qui dépeuple la Seine — sans par-
ler de l'empoisonnement de la rivière
par les égouts et les eaux de fabrique
— se promenant en bateau, leurs can-
nes à pêche, en mains, rencontrene
deux braconniers jetant l'épervier. Ils
veulent dresser procès-verbal. Les bra-
conniers tirent au large et les faiseurs
de contraventions prennent la chasse.
Là-dessus, les braconniers ouvrent le
feu à coups de revolver et les poursui-
vants ripostent de leur mieux. Voilà,
sur la tranquille rivière, par la douceur
reposée de l'aube, l'image de la guerre
évoquée et quelques hommes qui, sans
s'atteindre d'ailleurs, se tirent cons-
cieusement dessus, à propos d'ablettes
et de barbillons.
Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on a re-
marqué les violentes passions que sou-
levaient les questions de chasse et de
pêche. Je suis bien convaincu que si les
paysans de France sont venus à la
Révolution de 89, c'est principalement
à cause des lois qui leur interdisaient
la chasse et qui les irritaient plus que
les lourdes charges fiscales. - Et, d'autre
part, on peut remarquer que, bien sou-
vent, les seigneurs et les maîtres les
plus libéraux se montraient intraitables
sur cette question du gibier. Le grand
Henri IV voulait bien que chaque pay-
san pût mettre la poule au pot le di-
manche. Mais je n'aurais conseillé à
personne, sous le règne de ce roi chas-
seur, de remplacer la poule de basse-
coup par un faisan du bois voisin. Il y
allait des galères. Un faisan a sous
l'aile, disait le dicton populaire, une
rame de galère. Aujourd'hui, comme
la juste mesure des choses est ce que
eonnait le moins notre pauvre huma-
nité, on verse dans un sens contraire à
celui d'autrefois. Le paysan n'était pas
assez défendu contre le gibier. Aujour-
d'hui, le gibier n'est pas assez défendu
contre le braconnier. Sans les très gros
sacrifices d'argent que font les gens
riches pour entretenir des réserves et
faire de l'élève de gibier artificiel, il
n'y aurait plus moyen de tirer un coup
de fusil en France, tout au moins dans
un rayon de quinze à vingt lieues au-
tour des grands centres. Dans les en-
droits mêmes où la chasse est com-
mune et libre, le gibier est détruit par
les braconniers. De là. fureur des
chasseurs réguliers, et, comme c'est la
même chose pour le poisson, aven-
tures comme celle qui vient de se
passer.
Mais, même en dehors de cette exci-
tation particulière aux choses de sport,
il faut reconnaître qu'on a, chez nous,
le revolver facile. Il parait qu'il en est
de même aux Etats-Unis. Mais nous
aurions bien pu emprunter aux Yankees
autre chose que leur variante de l'Evan-
gile : « Tirez-vous dessus les uns les
autres 1 » Heureusement, on se manque
beaucoup à coups de revolyer. Sans
cela, je ne crois pas exagérer en disant
qu'à Paris seulement, chaque jour, on
ramasserait une douzaine de cadavres.
C'est bien le chiffre des balles qui s'é-
changent. L'été, d'ailleurs, parait pous-
ser aux violences, aux suicides. On en
compte plusieurs ces jours-ci, et la se-
maine est tragique.
Ce qu'il faut noter encore, c'est le
goût passionné qu'ont certaines gens
à risquer très gros parfois pour satis-
faire à l'envie qu'ils ont de commettre
quelque fraude, quelque irrégularité.
Aujourd'hui, dans une gare de chemin
de fer, en attendant un train qui était
en retard (naturellement!) je m'amu-
sais à lire le tableau où sont affichées
les condamnations prononcées pour
contraventions et fraudes aux dépens
des compagnies. Je ne les défends pas,
les compagnies! Elles sont pétries d'a-
bus, et il n'est pas de minute ou le voya-
geur n'ait à se plaindre de quelque chi-
noiserie et de quelque taquinerie inu-
tile du règlement! Mais ce n'est pas
une raison pour frauder. Or, la liste
des fraudes constatées et poursuivies
en un trimestre est singulièrement lon-
gue. Dans celle que je parcourais
tantôt, les délinquants (doilt on ne
donne pas les noms, ce qui est plus
convenable et ce qu'on doit aux protes-
tations de la presse) sont très nom-
breux, punis, en général, d'amendes
assez légères, 25 à 100 fr., sauf le cas,
qui se présente parfois, qu'ils ont un
peu rossé les agents, ce qui vaut de la
prison. Mais, sur ce tableau, je vis un
fraudeur puni de mille francs d'a-
mende, et, quinze jours après, de six
mille francs et d'un mois de prison. Cet
homme en était à sa quarante-deuxième
et quarante-troisième condamnation!
Ceci, sur la même ligne, faisant le même
trajet. Il est clair que tous les employés
Aevaient le comaaltre comme le loup
blanc et qu il n'avait pas de chance da
leur echapper.Ceci indique un état d'es-
prit tout particulier, une véritable ma-
nie. On comprend,et dans bien des cas.
je serais disposé à excuser le pauvro
diable qui, ayant absolument besoin de
faire un trajet, de rentrer chez lui, d'al-'
1er trouver du travail et n'ayant pas la
sou dans sa poche, essaie de faire Uft
voyage « à 1 œil ». Mais l'homme qui se
fait prendre quarante-trois fois à
voyager sans avoir payé sa place est:
un systématique. Ce qu'il y a, d'ail-
leurs, d'extraordinaire dans son cast.
c est l'application excessive et répétée.
du désir de la fraude. Car le désir eS
lui-même, nous en avons tous quelque
chose dans la cervelle. Et ce désir qui;
nous tient de frauder les administra-
tions ou 1 Etat quand nous en trouvons;
quelque occasion offerte par le basardl
ne vient pas d'un sentiment d'im-
probité ou d'avarice. Au fond,
en cas pareil, il y a dans nos esprits)
comme un sentiment de revanche et do,
révolté contre une administratinn iiili,,
de son côté, traite le public en ennemi.,
La Fontaine avait déjà conté la chose -
et ce sentiment n'a fait que grandir à*
mesure que l'administration est deve-
nue plus organisée, plus nombreus
par ses agents, plus oppressive, à me-
sure aussi que nous avons une idéck
plus forte de nos droits et que nousi
savons, mieux ce que nous coûtent nosi
maîtres. Mais il ne faut pas se laÍsser
entraîner dans cette voie des repr:
sailles individuelles. Il faut, légalement,
tâcher d'améliorer les choses et essayé
d arriver à avoir une administration
vraiment démocratique et équitable,,
qui nous serve, si bien que nous ayonst
ce sentiment supérieur et nécessaires
que voler l'Etat, c'est voler nous-mêmes
et nos concitoyens.
\<'- HENRY FOUOUIER.
Nous publierons demain la Chronique
de M. Paul Ginisty
Les « nécessités prolessionaelles te journaliste à
A signaler, en matière de presse, quelques
attendus d'un très important jugement que.
vient de rendre le -tribunal de Versailles,
présidé par le distingué M. Paisaux, l'an-
cien juge au tribunal de la Seine.
Ce jugement établit d'abord :
1° Que la divulgation de faits diffamatoires
en eux-mêmes ne peut entraîner la responsabi-
Iite de celui qui en est l'auteur que si elle a été
faite dans le but de nuire;
20 Qu'il ne peut exister de préjudice dans una
espèce ou le dommage allégué et même jastithS
a été causé par une accumulation de faits ou
d accusations se produisant de tous côtés, aveq
plus ou moins de justice, mais dans une tella
confusion qu'il est impossible au juge de faire.
le départ de ce qui peut être attribué ài l'inteW
venljon de tel ou tel organe de la presse.
Puis le jugement contient cet attendu
capital : -
Attendu que les nécessités professionnelles du
journaliste avec ses besoins modernes d'infor-
mation à outrance et rapide lui donnent de fait
certaines exemptions, quand il est démontri
qu'il est resté dans son rôle, qu'il n'a pas voulii
servir des intérêts personnels ou les rancunsa
des tiers, ou encore qu'il n'a pas falsifié les ren-,,
seignements qui lui ont été plus ou moins vor
loatairement donnés;
Voilà donc enfin fixées d'une façon aussi
précise que juridique les obligations du
journaliste en matière d'informations.
M. BOURGEOIS A LISIEUX >
A l'occasion du 14 juillet, la ville de Lfi-
sieux a organisé une série de fêtes qui ont
commencé samedi soir.
Hier à midi a eu lieu un banquet dont la.
présidence avait été offerte à M. Léen Bour-
geois, alors qu'il était président du conseil ;
cette ofire a été renouvelée tout récemmeit,
à l'honorable député de la Marne qui a*
maintenu son acceptation.
Le préfet du Calvados et le sous-préfet da.
Lisieux ont décliné l'invitation qui lem?i
avait été adressée, sans doute pour ne paa
se compromettre auprès du ministère ac-
tuel.
M. Léon Bourgeois, a'ccompagné de trois
députés, MM. Abeille, Bazille et Vival, est
arrivé par le train de onze heures; H a éti
reçu sur le quai de la gare par M. Chéron,
maire, et les membres du conseil munici-
pal.
Aux abords de la gart, la foule compaete
a poussé des acclamations; les cris de :
Vive la revision! vive la République! domi-
naient.
M. - Léon Bourgeois est monté dans un
landau découvert avec M. Bazille et un ad-
joint; des jeunes gens ont escorté la voiture
en chantant la Marseillaise.
Après un court arrêt à la mairie, le cor-
tège s'est rendu à la halle au beurre où a
eu lieu le déjeuner.
A midi a eu lieu le banquet. Environ
quatre cents convives étaient présents.
M. Chéron, maire, a bu à la santé de M.
Léon Bourgeois, « ancien et futur président
du conseil ».
M. Bazille a porté un toast au maire de
Lisieux.
M. Abeille, député de la Haute-Garonne,
s'est associé à ce toast en son nom et au
nom de son collègue du Lot, M. Vival.
M. Léon Bourgeois a pris ensuite la pa-
role.
Faisant allusion à l'absence des représen-
tants officiels de l'administration, le députe
de la Marne a dit :
« C'est la première fois qu'il m'arrive
d'être considéré comme un homme séditieux.
J'ai connu, moi aussi, pendant que j'avais
l'honneur d'être à la tête du gouvernement
de la République, des réunions comme celte
ci, dans lesquelles de bons républicains
croyaient en conscience devoir combattre
certaines de nos idées. Eh bien, jamais je
n'ai songé à interdire aux fonctionnaires d'y
venir, car j'estimais qu'en même temps
qu'ils sont fonctionnaires ils demeurent ci-
toyens. »
M. Bourgeois rappelle ensuite qu'il a étâi
plaisanté att sujet de la concentration répu-
blicaine dont il fut un des plus chauds par-
tisans. Il n'a pas changé de sentiment sur
ce point. Il faut que la porte soit toujours
ouverte, ainsi que le disait Gambetta, à
ceux qui ont à la foi& l'esprit républicain et
les entrailles démocratiques.
M. Bourgeois a levé enBu son verre eft
J
PARIS ET DÉPARTEMENTS
H.Q Numéro; - ^fWQ CfSÎ'XTrïSîeffli;
AUX BOBEAEX DU JOUJlNKL
lu, rm amnmwtm 13,
pt elxe* MM. LAGRANGE, CERF4 O
* t '-jo
*.dr«8M télégraphique : XIX' SIÈCLE — PARIS
JUKI$!ÏE99B1T9
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RÉDACTION : f 31, rue Montmartre, 191
1Je 4 B heures du soir et de 10 heuru du soir à 1 heure du matin
Wo 9622. — Mardi 14 juillet 1886
i
27 MESSIDOR AN 104 -.
ADMINISTRATIONS 191, roe Montmartre, 131
Adresser lettres et mandats à VAdministrâtes
•- p -
NOS LE A DBjRS
LETTRES LIBRES
La Surenchère des promesses
¡'hlition dans laquelle le gouver-
nement s'est trouvé d'ajourner le pro-
jet de réforme des contributions di-
metes de M. Cochery n'a étonné per-
sonne. Ce projet avait soulevé tant
d'apposition , même parmi les plus
,fidèles partisans du ministère qu'il ne
pouvait pas avoir un autre sort. Mais
aussi pourquoi M. Cochery s'était-il
mi5 en tête de chausser les bottes de
Jtf. Doumer? Pourquoi vouloir sumi-
chénsr sur les projets du ministre ra-
scal, au poiM que pour l'impôt sur la
rente, M. Doumer a pu accuser son
successeur d'être plus radical et plus
socialiste que lui-même et que les col-
lectivistes ont pris M. Cochery sous
leur protection, parce qu'il portait la
-------,'!-_- 1. J I
première aivemie au « uroit ue pro-
priété ». Ce sont ces procédés de su-
renchère qui avaient entraîné la chute
de M. Bourgeois ; ce sont eux qui dé-
termineront celle de M. Méline.
On a raconté que le projet d'impôt
global sur le revenu, avec taxation et
déclaration de M. Doumer était né du
désir d'accentuer le caraetère socialiste
que quelques membres du cabinet
Bourgeois voulaient donner à ce cabi-
net, malgré son chef. D'autres minis-
tres auraient préféré, dit-on, prendre
comme drapeau la séparation des
Eglises et de l'Etat, mais on leur fit
observer que cette question avait beau-
coup vieilli depuis quelques années et
qu'elle était indifférente aux collecti-
vistes auxquels on désirait particuliè-
rement faire plaisir, tandis qu'elle
soulèverait des discussions dans les
campagnes. Mieux valait prendre pour
enseigne une réforme autour de la-
quelle tous les socialistes se groupe-
raient et qui permettrait de faire luire
aux yeux des paysans la promesse que
plusieurs millions de contribuables
ne payeraient à l'avenir, ni l'impôt
nouveau, ni ceux qu'il remplacerait.
C'était, pensait-on, la popularité assu-
rée et les députés enchainés au cabinet
par les promesses qu'ils avaient prodi-
guées à leurs électeurs et qu'ils seraient
obligés de tenir.
On avait calculé sans l'effet que pro-
duisirent la taxation, la déclaration,
l'inquisition blessante et la violation
de toutes les libertés individuelles et
de la conscience humaine que la glo-
balité entraîne fatalement après elle.
il y eut une révolte de l'opinion et de
la Chambre et, dans la séance du 26
mars, M. Bourgeois, pour sauver son
ministère, dût jeter par dessus bord le
projet de son ministre des finances et
se contenter d'un vote platonique en
faveur du principe d'un « impôt géné-
ral sur le revenu » que l'on étudierait
plus tard. Il étaitvisible, en effet,.qu'on
ne parviendrait jamais à s'entendre
sur les détails du projet de M. Dou-
mer.
Celui-ci a essayé de remettre à son
flot son impôt global en l'allégeant de
la déclaration ; le seul résultat qu'il ait
obtenu a été de lui faire subir un nou-
vel échec et de sauver le cabinet Mé-
line qu'il s'était proposé de renverser.
C'est que si les principes généraux
suffisent pour indiquer l'orientation
d'une politique et l'esprit d'un minis-
tère, ils sont insuffisants pour l'édifi-
cation d'une loi ; surtout quand il s'a-
git de la refonte complète de notre
système de contributions directes.
M. Bourgeois en fit l'expérience au
mois de mars, M. Meline vient de la
faire à son tour et pour les mêmes
motifs. -
.*
La pensée dominante de M. Méline
était de soulager la propriété immobi-
lière d'une partie des charges trop
lourdes dont elle est accablée, afin de
la réhabiliter, en quelque sorte, et
d'arrêter le mouvement d'émigration
des campagnes vers les villes.
Cette pensée est juste, éminemment
politique et d'une grande portée so-
ciale. Il fallait s'y borner et en cher-
cher la réalisation par des moyens
aussi simples que possible, sur lesquels
ie cabinet aurait fait porter tous ses
efforts. Le succès, dans ces conditions,
était assuré. M. Cochery l'a transformé
en un premier échec par le projet trop
alàmbiqué où il a noyé la pensée du
président du conseil et par le désir
trop manifeste d'emboîter le pas à son
prédécesseur et de courtiser la même
clientèle parlementaire et électorale.
S'il persiste dans cette voie, il en-
traînera, au retour des vacances, la 1
chute du ministère dont il fait partie,
comme M. Doumer a été l'agent non
douteux de la chute du cabinet Bour-
geois. Et il en sera ainsi de tous les
ministres des finances qui voudront
.imiter MM. Doumer et Cochery ; tous
succomberont et entraîneront à leur
mite les ministères assez fous pour
te® suivre. ,
.*
Pourquoi? D'abord parce qu'il est
impossible à un ministre des finances,
quel qu'il soit, de préparer en un mois
une réforme sérieuse de nos contribu-
tions directes, et ensuite parce qu'en
admettant qui! le pût, le projet le plus
sage et le mieux agencé ne pourrait
pas, avec nos mœurs parlementaires,
les ambitions et les appétits qu'elles
provoquent, trouver une. majorité
dans la Chambre.
Dès qu'on soulève la question d'une
réforme plus ou moins complète de
nos contributions directes, si lourdes
aux contribuables, on fait naitre au-
tant de convoitises électorales que de
passions parlementaires, et l'on donne
le signal de toutes les surenchères de
promesses et de projets.
Chaque député fait aussitôt le compte
des voix qu'il pourra s'assurer aux
élections prochaines en promettant
aux contribuables de sa circonscrip-
tion une réduction de leurs charges
fiscales; et c'est à qui en promettra le
plus, sans que personne s'occupe ni
du désordre qu'il en pourra résulter
dans les finances de l'Etat, ni d-e la
surcharge qu'il faudra imposera d'au-
tres citoyens.
Le candidat des paysans ne s'oc-
cupe que des paysans ; celui des ou-
vriers ne pense qu'aux ouvriers ; celui
des bourgeois ne se soucie que des
bourgeois; chacun en fait ne songe
qu'à soi-même et chacun promet la
lune en échange d'un bulletin de vote.
En couvrant tout cela de grandes for-
mules patriotiques ou sociales et de
déclamations plus ou moins bruyan-
tes, on passe pour des réformateurs à
tous crins et l'on s'assure quatre nou-
velles années de potinage parlemen-
taire.
Quand arrive la discussion publique
des projets, chacun surenchérit sur les
propositions du gouvernement, cha-
cun fait publiquement le compte des
millions de contribuables qu'il dé-
grève, jusqu'à ce que la vanité de ces
promesses éclate à tous les yeux.
Alors, on s'empresse de « disjoindre »
ou « d'ajourner » et l'on va respirer
l'air frais des champs, sous les fron-
daisons touffues des ruisseaux où se
jouent la truite et le goujon.
.**
Comme cela se produit chaque an-
née, à des époques déterminées, les
électeurs ne doivent plus avoir beau-
coup d'illusions, et je suppose qu'ils
mettent dans le même sac tous les pro-
jets de tous les ministères.
Il serait pourtant bien facile d'opérer
des réformes : on y parviendra le jour
où les députés et les ministres feront
passer les intérêts du pays et de la Ré-
publique avant les leurs et remplace-
ront la surenchère des promesses et
des projets retentissants par l'étude
sérieuse des questions.
Ce jour-là, avant d'aborder la ré-
forme des impôts, on réduira les dé-
penses et tout le monde bénira la Ré-
publique.
J.-L. DE LANESSAN.
Nous publierons demain un article
de M. Charles Bos.
LES ON-DIT
CARNET QUQT10ISN:
Les courses : A Vincennes (plates).
— Durée du jour : 17 h. 10 m.
CHEZ NOUS
■BOBHBEHnnBMn
Le président de la République a
offert hier soir le dîner annuel donné à
l'Elysée à l'occasion de la revue du 14
juillet.
La table comprenait cent couverts.
Mme Félix Faure avait à sa droite le mi-
nistre de la guerre et à sa gauche le minis-
tre de la marine.
Le président avait à sa droite le général
Davout, grand-chancelier de la Légion
d'honneur, et à sa gauche le général Saus-
sier, gouverneur militaire de Paris.
Etaient également invités : les princi-
paux chefs du service des ministères de la
guerre et de la marine, les généraux et
chefs de corps devant prendre part à la re-
vue, tous les officiers de la maison mili-
taire du président.
Le dîner a été suivi d'une réception.
- -- Les grâces du 14 juillet :
A l'occasion de la fête nationale, le pré-
sident de la République a, par plusieurs
décrets rendus sur la proposition du mi-
nistre de la guerre, accordé des grâces,
commutations ou réductions de peines à
1,047 condamnés, détenus dans divers éta-
blissements pénitentiaires militaires ou
civils, en vertu de jugements prononcés
contre eux par des conseils de guerre.
- Nous avons le très vif regret d'ap-
prendre la mort de notre confrère Prosper-
Louis Docteur, ancien consul de l'Uruguay
et du Venezuela.
M. Louis Docteur est décédé à Menton,
à l'âge de cinquante-trois ans. Il était le
beau-frère du poète excellent et du vail-
lant républicain Adolphe Pelleport, qui fut
si longtemps gérant du Rappel, et qu'une
mort prématurée enleva, il y a plusieurs
années déjà, à l'affection de ses nombreux
amis. * ,
- Hier matin ont eu lieu les obsèques
de M. Félix Levêque, ancien secrétaire de
M. Bourgeois.
De nombreux amis sont venus jusqu'au
cimetière, accompagner la dépouille mor-
telle, de celui qui n'avait cessé d'être pen-
dant sa vie le plus ndde, la plus dévoué et
le plus honnête camarade. En l'absence
de M. Bourgeois, pris par un engagement
antérieur à Lisieux, M. Ribierre, ancien
directeur du personnel au ministère de
l'intérieur, a pris la parole sur la tombe
encore ouverte, et dans un discours plein
d'une émotion que toute l'assistance a par-
tagée, l'ancien chef et camarade de Levêque
a rappelé quelle fut toute cette vie d'hon-
neur - et de probité, brusquement inter-
rompue au moment où il allait rentrer
dans la vie publique.
On sait, en effet, que Félix Levêque
devait être nommé percepteur dans le dé-
partement de la Seine.
- Les peintures de Delacroix , au
nombre de vingt-deux, qui décorent la bi-
bliothèque du palais Bourbon vont. subir
d'importants travaux de restauration.
Parmi ces œuvres se trouvent la Paix et la
Guerre.
- Le président de la République pas-
sera au Havre la plus grande partie de ses
vacances.
M. Félix Faure quittera Paris le 20 juillet
se rendant au Havre.
Il partira de cette ville le 3 août pour
entreprendre son voyage en Bretagne qui
prendra fin le 13 août à Laval.
Le président rentrera de Laval à Paris
dans la nuit du 13 au 14 août et présidera
le 14 août à l'Elysée un conseil des minis-
tres. Il repartira de Paris ce même jour, à
midi, pour rentrer au Havre en s'arrêtant
quelques heures à Rouen, où il visitera
l'exposition.
M. Félix Faure séjournera au Havre jus-
qu'au 16 septembre. Entre temps, il ira in-
cognito assister à une partie des grandes
manœuvres exécutées par les 12' et 178
corps d'armée. Le 17 septembre, il passera
la revue qui clôturera les grandes manœu-
vres. -'
Il ira ensuite s'installer au château de
Rambouillet jusqu'aux premiers jours d'oc-
tobre,
Au cours de l'une des dernières
séances du conseil municipal, notre dis-
tingué collaborateur M. Charles Bos a pré-
senté à ses collègues le très intéressant
volume les Rayons x et la photographie de
l'invisible que notre, ami M. Georges Vi-
toux a récemment publié chez l'éditeur
Chamuel.
En réponse à cet envoi, M. Georges Vi-
toux vient de recevoir de M. Pierre Bau-
din, président du conseil municipal, une
lettre de remerciement l'informant que son
livre allait être placé dans la bibliothèque
spéciale du conseil. - - 1
- Un concours pour l'admissibilité à
deux emplois de chef de clinique à la Cli-
nique nationale ophthalmologique des
Quinze-Vingts aura lieu le vendredi 7 août
à neuf heures du matin.
Les candidats pourront se faire inscrire
jusqu'au 30 juillet inclusivement au secré-
tariat de l'hospice, tous les jours non fériés
de une à quatre heures.
A L'ETRANGER
Le mariage du prince Charles de
Danemarck et de la princesse Marie de
Galles aura lieu le 22 de ce mois dans la
chapelle du palais de Buckingham. Le
jeune ménage jouira d'un revenu d'environ
400,000 fr.
- L'artillerie en papier :
C'est un ingénieur de la maison Krupp
qui vient de l'inventer. Il a construit, pa-
raît-il, un modèle de petit canon portatif
en papier comprimé pour le service de
l'infanterie, dont le poids serait si réduit
qu'un homme pourrait facilement le porter
en guise de havresac.
La résistance de ce canon, dont le cali-
bre est de 5 centimètres, serait supérieure
à celle d'un canon en acier de même dia-
mètre, et son emploi rendrait de grands
services sur les champs de bataille acci-
dentés, où les manœuvres de l'artillerie
de campagne ordinaire sont toujours dif-
ficiles.
Le journal allemand auquel nous em-
pruntons ces détails ajoute que des essais
ont été faits avec ce canon dans le batail-
lon-école et que les résultats ont été très
satisfaisants.
L'inspecteur des fouilles archéo-
logiques de Thyra (Turqtiie), a envoyé au
conservateur des antiquités son rapport
sur les récentes découvertes faites dans
cette île.
A l'endroit dit « Tris Sykiès » on a mis
au jour une partie de la muraille de la ville
construite au moyen d'énormes pierres
carrées, ainsi que d'étroits portiques au
sud et au nord. On a, en outre, découvert
une colonne ou autel quadrangulaire d'une
nauteur ae 30 eentimetres portant a un
angle Hermès , à l'autre Hercule armé
d'une massue, au troisième une corne (au
quatrième, il n'existe aucun signe), un au-
tel grandiose d'Auguste César, orné de
têtes de bœufs ; un autre autel brisé, sur
lequel sont sculptées une tête de cerf et
partie d'une inscription qui fait mention
de Ptolémée III ou d'un Evergète et de ses
soldats ; une tête de bœuf de dimensions
naturelles qui est un ornement d'archi-
tecture ; un buste de statue d'homme et
une foule de menus objets.
Mystère et magie aux Etats-Unis:
Le recorder John W. Goff, de New-
York, est bien embarrassé. On lui amenait
avant-hier un nommé Macdonald, accusé
d'un vol avec effraction dans une maison
de la ville, d'où l'avaient vu sortir une
quantité de témoins dignes de foi. Mais. à
ïheure même où son corps se livrai ta cette
^coupable opération, MaedonaM se trouvait
en état de sommeil hypnotique dans une
salle de conférence où le professeur Wein
présentait cet intéressant sujet à un audi-
toire 'de curieux. On juge de la surprise du
Ihagîstrat, qui ne peut contester la validité
de cet alibi. psychique, mais qui ne peut,
d'autre part, récuser les témoignages pro-
duits contre Macdonald.
- M. Goff a prudemment ajourné cette cu-
rieuse affaire, sur laquelle il veti; consul-
ter un certain nombre de-savants et d'ex-
perts en occultisme. Le professeur Wein
lui-même ne doute pas que les deux Mac-
donald, le voleur et l'endormi, soient un
seul et même être dédoublé.
A vous, mon cher Jules Bois.
Le Passant.
Le Drame de Levallois-Perrei
Le « divan » Bauer — Bal-musette
Un mort et trois blessés
M. et Mme Bauer tiennent à Levallois,
40 ter, rue de CoUrceHes, une maison très
achalandée, surtout la nuit, où les clients
s'attardent.
Une première pièce sur la rue sert de café
ou bar ; au fond de cette pièce une porte
donne accès à une salle assez exiguë où il y
a bal le dimanche et le jeudi.
La rixe sanglante qui a eu lieu hier soir
11 juillet, à onze heures, a jeté l'émoi dans
ce quartier, qui est un des plus animés de
Levallois.
Quatre jeunes gens, tous ouvriers du pays,
venaient de quitter le bal-musette Bauer et
avant de se séparer allaient prendre une
côiisomxnation à la terrasse du café tenu
par M. Bouissès, quand quelques instants
après une bande d une douzaine de drôles,
qui eux-mêmes sortaient du bal, se ruèrent
sur eux.
Bans cette attaque soudaine, Jean Chau-
meton reçut un coup de couteau d'une telle
violence que l'arme, traversant l'os frontal
au-dessus de l'œil gauche, pénétra à 8 cen-
timètres de profondeur dans la boite crà-
nionno
Conduit chez le pharmacien, M. Lesage,
71, rue Valtier, ce dernier jugea l'extrac-
tion impossible sans l'opération du trépan.
Le blessé put répondre à quelques ques-
tions touchant les souffrances qu'il endu-
rait, mais il fut d'urgence et sans désem-
parer conduit à l'hospice Beaujon.
Nous ne connaissons pas le résultat de
l'extraction du couteau du crâne du malheu-
reux Chaumeton.
Des bruits persistants courent qu'il serait
mort à cette heure.
La victime était ouvrier cimentier chez
M. MaiHori, maître maçon, 3, rue Camille-
Desmoulins.
Le fils Maillori a eu la lèvre supérieure
coupée, et Edouard Joanie et Jules Débeau
ont reçu des coups dans la bagarre.
Le plus étrange, c'est que, le coup fait,
les douze gredins ont pu s'enfuir en prenant
les rues Vallier et FaziHau et les fortifica-
tions sans être inquiétés. -f~
On dit qu'ils sont totalement inconnus.
Le commissaire de police, M. Brunet, fait
l'enquôe.
Peut-être, et cela nous parait vraisem-
blable, y a-t-il là une vengeance ; en tous
cas, le coupable doit être retrouvé.
LES CORRIDAS DE fEBPlGNkN
Quatre toréadors blessés
Des courses de taureaux mouvementées
ont eu lieu hier dimanche aux deux arènes
de Perpignan.
Aux arènes de la Gare, le toréador espa-
gnol Tito a été renversé par un taureau qui
lui a ensuite planté une corne dans le
ventre et l'a fait tournoyer dans les airs.
Le chef du quadrille Chutero a été cul*
JJUIIC a son tour, llicua ÙCWIS uit-aauic.
Tito, au contraire, a dû être transporté
immédiatement à l'hôpital dans un état
alarmant. La corne du taureau qui a péné-
tré dans le ventre a perforé l'intestin ; on
conserve peu d'espoir de le sauver. Le pu-
blic exaspéré par ces accidents a réclamé
avec violence la mort des taureaux qui n'a
pas été autorisée.
Aux arènes de l'Alcazar, le toréador espa-
gnol Metodo a reçu un coup de corne sérieux
à l'aine et un toréador français a été blessé
à la cheville, mais peu grièvement.
UN DRAME DANS UNE ÉGLISE
Le bourg de Seilhan, commune de Gour-
dan, canton de Barbazan, a été le théâtre
d'un drame qui a produit une profonde émo-
tion.
Il s'est déroulé dans la sacristie de l'église
de Seilhan, le prêtre venait de dire la messe
et de eonfesser une de ses paroissiennes,
lorsqu'un individll ht irruption et s écria
sans préambule : « Main-tenant, à nous deux,
il faut nous confesser », et comme il était
repoussé par le prêtre qui l'invitait à sortir,
il brandit un pistolet au-dessus de la tête de
celui-ci et fit feu.
Heureusement le prêtre put détourner
l'arme en imprimant de sa main un vigou-
reux mouvement sur le bras du meurtrier.
Ayant échoué dans sa tentative, le meurtrier
a retourné le pistolet et a frappé sa victime
de plusieurs coups de crosse à la tôte. Il
s'est ensuite enfui.
Les blessures du prêtre ne sont pas gra-
ves; c'est un vieillard de quatre vingt-trois
ans, nommé Jean Clave, qui dessert la pa-
roisse depuis cinquante-cinq ans.
Le meurtrier est un autre vieillard de
quatrevingt-cinq ans, Baptiste Luent, dit
Bourges, père de quatre filles.
Le mobile du crime serait l'argent.
Luent, qui aime la vie facile et fréquente
les cabarets, voulait forcer le prêtre à lui
donner une soe de mille francs. Il a été
arrêté et conduit à la prison de Saint-Gau-
dens.
UN TRAIN DANS UNE RIVIÈRE
D'après une dépêche de Spokane (Etat de
Washington, Amérique), un terrible accident
s'est produit sur la ligne du Great Northern
Railway, près de Kootenai Falls (Idaho). Un
train de marchandises s'est heurté à un
monceau de terre et de rochers provenant
d'un éboulement, et a déraillé.
Douze wagons ont été précipités dans la
rivière Kootenai, juste en amont des chutes.
Dans l'un des wagons se trouvaient une
douzaine de vagabonds qui s'y étaient ca-
chés pour se faite transporter gratuite-
ment.
Ce wagon justement a flotté pendant quel-
ques instants, et quelques-uns des vaga-
bonds, qui savaient pas été blessés, sont
montés sur le toit en criant au secours.
Quelques personnes qui se trouvaient sur
la rive ont essayé de leur lancer des cordes;
mais ayant qu'aucun des malheureux put
être sauvé, le wagon, comme les onze au-
tres, était entraîné par le courant jusqu'aux
chutes et précipité dans l'abîme. Quelques-
uns des vagabonds ont eu la présence d'es-
prit de sauter à l'eau au moment même où
le wagon arrivait aux chutes, mais le cou-
rant était si fort qu'aucun n'a pu gagner la
rive et tous ont péri.
——————————— —————————.——
LA VIE DE PARIS
Par HENRY FOUQUIER
Sous le titre plutôt gai de « un com-
bat naval en Seine », la plupart des
journaux ont raconté un fait-divers
assez bizarre. Deux membres du syndi-
cat formé par les pêcheurs à la ligne
pour la répression du braconnage flu-
vial qui dépeuple la Seine — sans par-
ler de l'empoisonnement de la rivière
par les égouts et les eaux de fabrique
— se promenant en bateau, leurs can-
nes à pêche, en mains, rencontrene
deux braconniers jetant l'épervier. Ils
veulent dresser procès-verbal. Les bra-
conniers tirent au large et les faiseurs
de contraventions prennent la chasse.
Là-dessus, les braconniers ouvrent le
feu à coups de revolver et les poursui-
vants ripostent de leur mieux. Voilà,
sur la tranquille rivière, par la douceur
reposée de l'aube, l'image de la guerre
évoquée et quelques hommes qui, sans
s'atteindre d'ailleurs, se tirent cons-
cieusement dessus, à propos d'ablettes
et de barbillons.
Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on a re-
marqué les violentes passions que sou-
levaient les questions de chasse et de
pêche. Je suis bien convaincu que si les
paysans de France sont venus à la
Révolution de 89, c'est principalement
à cause des lois qui leur interdisaient
la chasse et qui les irritaient plus que
les lourdes charges fiscales. - Et, d'autre
part, on peut remarquer que, bien sou-
vent, les seigneurs et les maîtres les
plus libéraux se montraient intraitables
sur cette question du gibier. Le grand
Henri IV voulait bien que chaque pay-
san pût mettre la poule au pot le di-
manche. Mais je n'aurais conseillé à
personne, sous le règne de ce roi chas-
seur, de remplacer la poule de basse-
coup par un faisan du bois voisin. Il y
allait des galères. Un faisan a sous
l'aile, disait le dicton populaire, une
rame de galère. Aujourd'hui, comme
la juste mesure des choses est ce que
eonnait le moins notre pauvre huma-
nité, on verse dans un sens contraire à
celui d'autrefois. Le paysan n'était pas
assez défendu contre le gibier. Aujour-
d'hui, le gibier n'est pas assez défendu
contre le braconnier. Sans les très gros
sacrifices d'argent que font les gens
riches pour entretenir des réserves et
faire de l'élève de gibier artificiel, il
n'y aurait plus moyen de tirer un coup
de fusil en France, tout au moins dans
un rayon de quinze à vingt lieues au-
tour des grands centres. Dans les en-
droits mêmes où la chasse est com-
mune et libre, le gibier est détruit par
les braconniers. De là. fureur des
chasseurs réguliers, et, comme c'est la
même chose pour le poisson, aven-
tures comme celle qui vient de se
passer.
Mais, même en dehors de cette exci-
tation particulière aux choses de sport,
il faut reconnaître qu'on a, chez nous,
le revolver facile. Il parait qu'il en est
de même aux Etats-Unis. Mais nous
aurions bien pu emprunter aux Yankees
autre chose que leur variante de l'Evan-
gile : « Tirez-vous dessus les uns les
autres 1 » Heureusement, on se manque
beaucoup à coups de revolyer. Sans
cela, je ne crois pas exagérer en disant
qu'à Paris seulement, chaque jour, on
ramasserait une douzaine de cadavres.
C'est bien le chiffre des balles qui s'é-
changent. L'été, d'ailleurs, parait pous-
ser aux violences, aux suicides. On en
compte plusieurs ces jours-ci, et la se-
maine est tragique.
Ce qu'il faut noter encore, c'est le
goût passionné qu'ont certaines gens
à risquer très gros parfois pour satis-
faire à l'envie qu'ils ont de commettre
quelque fraude, quelque irrégularité.
Aujourd'hui, dans une gare de chemin
de fer, en attendant un train qui était
en retard (naturellement!) je m'amu-
sais à lire le tableau où sont affichées
les condamnations prononcées pour
contraventions et fraudes aux dépens
des compagnies. Je ne les défends pas,
les compagnies! Elles sont pétries d'a-
bus, et il n'est pas de minute ou le voya-
geur n'ait à se plaindre de quelque chi-
noiserie et de quelque taquinerie inu-
tile du règlement! Mais ce n'est pas
une raison pour frauder. Or, la liste
des fraudes constatées et poursuivies
en un trimestre est singulièrement lon-
gue. Dans celle que je parcourais
tantôt, les délinquants (doilt on ne
donne pas les noms, ce qui est plus
convenable et ce qu'on doit aux protes-
tations de la presse) sont très nom-
breux, punis, en général, d'amendes
assez légères, 25 à 100 fr., sauf le cas,
qui se présente parfois, qu'ils ont un
peu rossé les agents, ce qui vaut de la
prison. Mais, sur ce tableau, je vis un
fraudeur puni de mille francs d'a-
mende, et, quinze jours après, de six
mille francs et d'un mois de prison. Cet
homme en était à sa quarante-deuxième
et quarante-troisième condamnation!
Ceci, sur la même ligne, faisant le même
trajet. Il est clair que tous les employés
Aevaient le comaaltre comme le loup
blanc et qu il n'avait pas de chance da
leur echapper.Ceci indique un état d'es-
prit tout particulier, une véritable ma-
nie. On comprend,et dans bien des cas.
je serais disposé à excuser le pauvro
diable qui, ayant absolument besoin de
faire un trajet, de rentrer chez lui, d'al-'
1er trouver du travail et n'ayant pas la
sou dans sa poche, essaie de faire Uft
voyage « à 1 œil ». Mais l'homme qui se
fait prendre quarante-trois fois à
voyager sans avoir payé sa place est:
un systématique. Ce qu'il y a, d'ail-
leurs, d'extraordinaire dans son cast.
c est l'application excessive et répétée.
du désir de la fraude. Car le désir eS
lui-même, nous en avons tous quelque
chose dans la cervelle. Et ce désir qui;
nous tient de frauder les administra-
tions ou 1 Etat quand nous en trouvons;
quelque occasion offerte par le basardl
ne vient pas d'un sentiment d'im-
probité ou d'avarice. Au fond,
en cas pareil, il y a dans nos esprits)
comme un sentiment de revanche et do,
révolté contre une administratinn iiili,,
de son côté, traite le public en ennemi.,
La Fontaine avait déjà conté la chose -
et ce sentiment n'a fait que grandir à*
mesure que l'administration est deve-
nue plus organisée, plus nombreus
par ses agents, plus oppressive, à me-
sure aussi que nous avons une idéck
plus forte de nos droits et que nousi
savons, mieux ce que nous coûtent nosi
maîtres. Mais il ne faut pas se laÍsser
entraîner dans cette voie des repr:
sailles individuelles. Il faut, légalement,
tâcher d'améliorer les choses et essayé
d arriver à avoir une administration
vraiment démocratique et équitable,,
qui nous serve, si bien que nous ayonst
ce sentiment supérieur et nécessaires
que voler l'Etat, c'est voler nous-mêmes
et nos concitoyens.
\<'- HENRY FOUOUIER.
Nous publierons demain la Chronique
de M. Paul Ginisty
Les « nécessités prolessionaelles te journaliste à
A signaler, en matière de presse, quelques
attendus d'un très important jugement que.
vient de rendre le -tribunal de Versailles,
présidé par le distingué M. Paisaux, l'an-
cien juge au tribunal de la Seine.
Ce jugement établit d'abord :
1° Que la divulgation de faits diffamatoires
en eux-mêmes ne peut entraîner la responsabi-
Iite de celui qui en est l'auteur que si elle a été
faite dans le but de nuire;
20 Qu'il ne peut exister de préjudice dans una
espèce ou le dommage allégué et même jastithS
a été causé par une accumulation de faits ou
d accusations se produisant de tous côtés, aveq
plus ou moins de justice, mais dans une tella
confusion qu'il est impossible au juge de faire.
le départ de ce qui peut être attribué ài l'inteW
venljon de tel ou tel organe de la presse.
Puis le jugement contient cet attendu
capital : -
Attendu que les nécessités professionnelles du
journaliste avec ses besoins modernes d'infor-
mation à outrance et rapide lui donnent de fait
certaines exemptions, quand il est démontri
qu'il est resté dans son rôle, qu'il n'a pas voulii
servir des intérêts personnels ou les rancunsa
des tiers, ou encore qu'il n'a pas falsifié les ren-,,
seignements qui lui ont été plus ou moins vor
loatairement donnés;
Voilà donc enfin fixées d'une façon aussi
précise que juridique les obligations du
journaliste en matière d'informations.
M. BOURGEOIS A LISIEUX >
A l'occasion du 14 juillet, la ville de Lfi-
sieux a organisé une série de fêtes qui ont
commencé samedi soir.
Hier à midi a eu lieu un banquet dont la.
présidence avait été offerte à M. Léen Bour-
geois, alors qu'il était président du conseil ;
cette ofire a été renouvelée tout récemmeit,
à l'honorable député de la Marne qui a*
maintenu son acceptation.
Le préfet du Calvados et le sous-préfet da.
Lisieux ont décliné l'invitation qui lem?i
avait été adressée, sans doute pour ne paa
se compromettre auprès du ministère ac-
tuel.
M. Léon Bourgeois, a'ccompagné de trois
députés, MM. Abeille, Bazille et Vival, est
arrivé par le train de onze heures; H a éti
reçu sur le quai de la gare par M. Chéron,
maire, et les membres du conseil munici-
pal.
Aux abords de la gart, la foule compaete
a poussé des acclamations; les cris de :
Vive la revision! vive la République! domi-
naient.
M. - Léon Bourgeois est monté dans un
landau découvert avec M. Bazille et un ad-
joint; des jeunes gens ont escorté la voiture
en chantant la Marseillaise.
Après un court arrêt à la mairie, le cor-
tège s'est rendu à la halle au beurre où a
eu lieu le déjeuner.
A midi a eu lieu le banquet. Environ
quatre cents convives étaient présents.
M. Chéron, maire, a bu à la santé de M.
Léon Bourgeois, « ancien et futur président
du conseil ».
M. Bazille a porté un toast au maire de
Lisieux.
M. Abeille, député de la Haute-Garonne,
s'est associé à ce toast en son nom et au
nom de son collègue du Lot, M. Vival.
M. Léon Bourgeois a pris ensuite la pa-
role.
Faisant allusion à l'absence des représen-
tants officiels de l'administration, le députe
de la Marne a dit :
« C'est la première fois qu'il m'arrive
d'être considéré comme un homme séditieux.
J'ai connu, moi aussi, pendant que j'avais
l'honneur d'être à la tête du gouvernement
de la République, des réunions comme celte
ci, dans lesquelles de bons républicains
croyaient en conscience devoir combattre
certaines de nos idées. Eh bien, jamais je
n'ai songé à interdire aux fonctionnaires d'y
venir, car j'estimais qu'en même temps
qu'ils sont fonctionnaires ils demeurent ci-
toyens. »
M. Bourgeois rappelle ensuite qu'il a étâi
plaisanté att sujet de la concentration répu-
blicaine dont il fut un des plus chauds par-
tisans. Il n'a pas changé de sentiment sur
ce point. Il faut que la porte soit toujours
ouverte, ainsi que le disait Gambetta, à
ceux qui ont à la foi& l'esprit républicain et
les entrailles démocratiques.
M. Bourgeois a levé enBu son verre eft
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