Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1893-10-09
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Description : 09 octobre 1893 09 octobre 1893
Description : 1893/10/09 (A23,N7938). 1893/10/09 (A23,N7938).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/05/2013
Vingt-troisième année. — Ne 7,938
CINQ Centimes — Paris et Départements — CIITO Centimes
LUNDI 9 OCTOBRE 1893
J, *~s~
ri
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PARIS
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A.-Edouard PORTALIS
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Lttti fle rlne
Que le suffrage universel, tel qu'il
fonctionne en France, ait ses imperfec-
tions et permette des fraudes, c'est une
vérité banale, et toutes les vérifications
de pouvoirs la mettent encore plus en
lumière. Mais ce n'est rien à côté des
abus qui se produisent aux colonies.
Les choses s'y passent de la façon la
plus extraordinaire, et ce n'est pas le
moindre des arguments que l'on a sou-
vent invoqués pour demander la sup-
pression de la représentation coloniale
dans la Chambre.
Ce n'est pas l'élection récente de l'Inde
qui peut faire revenir sur l'opinion peu
avantageuse que nous avons du suf-
frage universel dans les colonies. Elle
paraît s'être passée avec une aimable
fantaisie. On a déjà conté que, dans une
section, un curieux, installé pendant
toute la durée du scrutin, avait vu neuf
électeurs déposer leur bulletin dans
l'urne. Le soir, de cette même urne sor-
taient onze cents suffrages. Nous avons
aussi annoncé que la commission de
recensement, réunie une première fois,
avait proclamé M. Pierre Alype élu.
Trois semaines plus tard, cette même
commission de recensement se réunit
une seconde fois et elle déclare qu'il y
a ballottage. Entre ces deux réunions,
on avait retrouvé huit ou dix mille
bulletins de vote, chiffre assez impor-
tant, en effet, pour modifier le résultat
du scrutin.
D'où sortaient ces huit ou dix mille
bulletins? Comment s'étaient-ils trouvés
en état de vagabondage ? Qui les avait
ramenés au bercail ? Autant de points
mystérieux. Tout cela nous étonne;
mais les habitants de l'Inde ne s'émeu-
vent pas pour si peu. Puisqu'il y avait
ballottage, ils étaient tout disposés à re-
commencer le vote.
On ne les a pas laissés faire. La com-
mission avait prononcé une première
fois; l'administration ne lui reconnut
pas le droit de se contredire et elle sou-
tint que si sa décision était entachée
d'erreur, s'il y avait des suffrages en
rupture de ban, c'était à la Chambre à
s'assurer du fait et à annuler, s'il y
avait lieu, l'élection de l'Inde.
Mais le plus étonnant de l'affaire ne
s'est pas passé sur les bords du Gange.
C'est à Paris que l'histoire est devenue
le plus invraisemblable. M. Casimir
Perier, président de la Chambre ac-
tuelle, a éprouvé le besoin d'informer
M. Pierre Alype qu'il ne le considérait
pas comme élu et qu'il ne lui permet-
trait pas d'entrer dans la Chambre tant
que l'élection n'aurait pas été validée.
Une première question est soulevée
par cette décision. De quel droit M. Ca-
simir-Perier annonce-t-il qu'il interdira
l'entrée du Palais-Bourbon à qui que
ce soit? M. Casimir-Perier est bien pré-
sident de la Chambre actuelle, mais ses
pouvoirs présidentiels expirent en même
temps que son mandat législatif, le
14 de ce mois. Le 15 octobre, il n'est
plus qu'un simple député, éventuel
tant que la Chambre ne l'a pas validé ;
à partir de cette même date, la Cham-
bre n'a pas d'autre président que son
doyen d'âge jusqu'au moment où elle
aura procédé à l'élection d'un nouveau
bureau, dont M. Casimir-Perier ne fera
pas nécessairement partie. Par consé-
quent, M. Casimir-Perier annonce l'in-
tention de commettre une usurpation
de fonctions.
Fût-il même président, son acte se-
rait encore parfaitement arbitraire. De
deux choses l'une : ou le premier tour
de scrutin a donné un résultat et M.
Pierre Alype a été déclaré élu, sous ré-
serve de son admission par la Chambre;
ou il y avait lieu à un ballottage auquel
il fallait procéder. Puisqu'il n'a pas été
procédé à un ballottage, c'est que l'on
a considéré que le premier tour avait
donné un résultat. Le siège de député
de l'Inde ne peut pas être à la fois va-
cant et occupé.
Que l'élection soit contestée, cela
nous paraît assez naturel ; que même
la Chambre l'annule, après ce que nous
savons, nous n'en éprouverons guère de
surprise. Mais il serait beaucoup plus
étonnant que M. Casimir-Perier eût la
prétention d'introduire dans la juris-
prudence parlementaire cette nouveauté
de faire prononcer le jugement par dé-
faut et d'empêcher les députés dont
l'élection est attaquée de présenter un
moyen de défense. Comment pour-
raient-ils le faire, en effet, si les huis-
siers leur" interdisaient l'entrée de la
salle des séances ?
Tant que la Chambre n'a pas statué
sur. l'élection, M. Pierre Alype a le
même droit d'occuper son siège que
tous ceux dont les pouvoirs ne sont pas
encore vérifiés. M. Casimir-Perier au
rait sagement fait de réfléchir avant de
signifier sa décision à son collègue de
l'Inde. Il se serait épargné à la fois une
brutalité et une sottise. M. Casimir-Pe-
rier se croit-il déjà le maître incontesté
de la Chambre future, pour exagérer
encore à l'égard de certains de ses
membres les allures de sous-officier qui
le caractérisent ?
LES PROPOS DU GÉNÉRAL DE COOLS
3Nous apprenons que M. Bazille, député de
Poitiers, a avisé le ministre de la guerre qu'il
avait l'intention de l'interpeller dès le début
de la session sur l'affaire du général de Cools.
LA CHAMBRE ET LES FÊTES RUSSES
M. Casimir-Perier vient de convoquer le
bureau de la Chambre des députés pour mardi
prochain à deux heures.
Cette réunion est motivée par la situation
particulière que créent les fêtes franco-russes
à un moment où l'ancienne Chambre dispa-
raît et où la nouvelle n'est pas encore consti-
tuée.
Il paraît probable que le bureau déclarera
que, le mandat de la Chambre élue en 1889
expirant le 14 octobre, il n'a plus qualité pour
prendre une décision quelconque.
LA RÉFORME DE L'IMPOT
On se souvient peut-être qu'au cours de la
dernière session, la Chambre avait chargé
une commission de trente-trois membres d'é-
tudier un projet relatif à la réforme générale
de l'impôt.
Cette commission, présidée par M. Maujan,
n'a pas terminé son travail avant la fin de la
session.
Seuls trois députés, plus laborieux que les
autres, ont soumis à la Chambre, avant sa
séparation leurs rapports sur trois questions
qu'ils avaient été chargés d'examiner, celles
de l'impôt sur l'alcool, de l'impôt sur le ca-
pital et des frais de justice.
MM. Dupuy-Dutemps, Guillemet et Mer-
]ou, auteurs de ces trois rapports, les repren-
dront devant la prochaine Chambre, sous
forme de propositions de lois spéciales.
Ils espèrent ainsi que leur travail ne sera
pas entièrement perdu. Ils demanderont la
déclaration d'urgence. ¡
UNE IDÉE PRATIQUE
Décidément on est très pratique à Saint-
Maur. On se rappelle qu'il y a un an, pour
mettre fin aux exploits des rôdeurs et des
malfaiteurs, c'est dans cette commune que
fut créée, sous les auspices de la municipa-
lité, une brigade de sûreté dont la direction
fut confiée à un ancien brigadier du service
de la Sûreté de Paris.
Ces agents salariés par la commune étaient
placés sous les ordres du commissaire de po-
lice de Joinville-le-Pont et les services qu'ils
ont rendus dans la circonscription ne se
comptent plus.
Les habitants de Saint-Maur ne s'en sont
pas tenus là et ils viennent de créer, aidés
par les ressources municipales, une caisse
destinée à récompenser non seulement les
agents, mais aussi les simples particuliers qui
pourraient aider ou même procéder à l'arres-
tation d'un malfaiteur.
Voici comment opèrent les administrateurs
de cette cnisse de primes :
Par exemple, on a dévalisé, la nuit dernière,
la villa de M. X. Un des administrateurs se
rend près de celui-ci et lui demande l'estima-
tion du vol dont il vient d'être victime. Ceci
fait, il lui propose de verser dans la caisse des
primes une somme de. par tête de malfai-
teurs arrêtés, plus une deuxième somme de.
selon l'importance du vol, si la police locale
ou même des particuliers lui font retrouver
tout ou partie des sommes ou des objets qui
lui ont été volés.
Personne n'est forcé d'accepter et pourtant,
jusqu'à présent, on ne compte pas un seul
refus de la part d'un propriétaire spolié, ou
même d'un commerçant volé par un employé
indélicat. -
La certitude, en cas de réussite, de toucher
une prime stimule le zèle des agents et nous
savons qu'ils ont eu à trois à se partager une
prime de 600 francs, à la suite d'une double
arrestation suivie de la découverte de la ma-
jeure partie des objets volés dans la pro-
priété de M. Raphel à la Pie.
MOUVEMENT JUDICIAIRE
Sont nommés :
Conseiller à la cour d'appel de Besançon, M. Bla-
che, substitut du procureur général près la même
cour.
Substitut du procureur général à Besançon, M.
Martin, procureur de la République à Lons-le-
Saunier.
Procureurs de la République :
A Lons-le-Saunier, M. Thuriet, procureur à
Baume-les Dames.
A. Bauuie-les-Dames, M. Rencker, substitut à Be-
sançon.
Substituts du procureur de la République :
A Besançon, M. Aron, substitut à Lons-le-Sau-
nier.
A Lons-le-Saunier, M. Frachat, substitut à Pon-
tarlier.
A Pontarlier, M. Husson, juge suppléant à Be-
sançon.
Président du tribunal de Segré, M. Bernardeau,
juge d'instruction à Angers.
Juges au tribunal :
D'Angers, M. Chauveau, juge d'instruction à
Saumur.
De Saumur, M. Maynier, juge suppléant au
même siège. -
De Sarlat, M. Michelot, juge suppléant au même
siège.
Juge suppléant à Chàtellerault, M. Touchard,
avocat.
Les démissions de MM. Lecouturier et Cargue,
juges suppléants à Argentan et à Saint-Gaudens,
sont acceptées.
LA DYNAMITE A SAINT-ETIENNE
Saint-Etienne, 7 octohre.
Vers midi, un individu, ayant la mise d'un mi-
neur endimanché, qui rôdait depuis quelques ins-
tants autour d'un commissionnaire établi place de
l'Hôtel-de-Ville, s'adressa subitement à lui et lui
dit : « Gardez-moi ce panier, je viendrai le pren-
dre dans quelques heures; mais surtout ne le mon-
trez à personne. » Puis, tirant de sa poche une
pièce de monnaie, il la remit au commissionnaire.
En même temps, il laissait tomber des liasses de
billets de banque et de nombreuses pièces d'or. Il
les ramassa et disparut.
Le commissionnaire, déjà intrigué par les allu-
res de cet individu, ne le voyant pas revenir à
quatre heures, porta le panier au bureau de po-
lice
Le commissaire constata que le panier contenait
150 cartouches de dynamite. Il prit le signalement
du dépositaire et lança immédiatement des agents
à sa recherche. -
LES
ÉTUDIANTS ET VELLEDA
LES NEUF STATUES A
Les statues des Tuileries. — Une péti-
tion originale. — Le stock du
dépôt des marbres.
Dans le jardin des Tuileries on travaille
depuis un bon mois, et assez lentement, à l'élé-
vation de neuf socles en pierre blanche que
surmonteront,la semaine prochaine,neuf œu-
vres d'art prises dans le Dépôt des marbres
où elles croupissaient depuis longtemps.
Le choix de ces neuf statues a été on ne
peut plus difficile à établir. Aucun crédit ne
permettant à M. Guillaume, l'architecte du
jardin, d'en faire faire qui soient appropriées
au milieu où elles figureront, qui soient en
rapport avec l'aspect grandiose des bâtiments
voisins, il a dû se rabattre, pour garnir ses
neuf socles, sur des œuvres commandées ja-
dis à des artistes maintenant « arrivés » et
qui ne répondent que de très loin au but
qu'elles doivent remplir. -
On ne se préoccupe jamais là-bas, où l'on
commande des œuvres d'art pour le seul
plaisir, louable d'ailleurs, d'encourager les
artistes, du moyen qu'il y aurait d'utiliser
leurs travaux. On achète, on achète, et quand
ce qu'on a acheté devrait pouvoir servir à
quelque chose, on s'aperçoit un peu tard que
cela ne peut servir à rien du tout.
CHOIX BANAL
Finalement, après bien des recherches dans
le Dépôt des marbres, où languit toujours le
Marat de M. Baffier dont nous avons an-
noncé les premiers le clandestin enlèvement
du parc de Montsouris, on s'est arrêté au
choix suivant :
Le Réveil, de Maze ; Ganymède, de Bar-
thélémy; Elégie, de Caille; le Secret d'en
haut (1) de Moulin ; Judith et Holopherne, de
Landon ; Pénélope, de Maniglier ; Agrippine,
de Maillet; Eve, de la Planche, et enfin,
Velleda, de Mandrat.
Au milieu du jardin, dans la ligne du mo-
nument de Gambetta, de l'obélisque et de l'Arc
de Triomphe, figurera le Quand même ! de
Mercier, avec les médaillons de Thiers et du
colonel Denfert. On le fait en ce moment cou-
ler en bronze.
Il sera de la même taille que celui qui figure
sur la Grand'Place de Belfort. Là, il serait
déjà très petit; ici, venant après le monu-
ment de Gambetta, et moins proportionné en-
core à ce qui l'entoure, il sera piteux.
On le voit, dans le groupe des statues de
marbre que nous venons d'énumérer, rien
n'est bien nouveau : des Judith, des Péné-
lope, des Eve, cela n'est pas bien méchant et
a été fait quelquefois ; mais ce qui a soulevé
une pétition assez originale, c'est l'annonce
d'une nouvelle Velleda devant figurer en pu-
blic.
--- ------ PROTESTATION
! Il y en a déjà une au Louvre, une autre au
Luxembourg (jardio) ; cette dernière rempla-
çant, on ne sait pourquoi, une Jeanne d'Arc
qui y chevauchait jadis. En apprenant
qu'une troisième Velleda allait être offerte à
l'admiration décidément sans borne des Pa-
risiens, les étudiants et les élèves de l'Ecole
des beaux-arts ont protesté auprès de M.
Guillaume par une pétition aux termes assez
énergiques :
« Rendez-nous la Jeanne d'Arc du Luxem-
» bourg, y dit-on, et f -nous la paix avec
» vos Velleda ! »
M. Guillaume n'a pu répondre que ce que
nous venons de dire, qu'il n'avait rien de
mieux dans son sac.
Il paraît en outre que l'on ne se préoccupe
jamais de la qualité de la matière dans la-
quelle sont exécutées les œuvres qui pour-
raient servir à la décoration de nos jardins
publics, et c'est un tort, car les marbres dont
sont faites les statues étant pour la plupart
non « gelives » c'est-à-dire à l'abri des ou-
trages du froid, il est impossible de les lais-
ser exposés à l'air pendant l'hiver. Aussi
dans le jardin de l'Empereur, un bras d'une
autre Judith s'en est allé l'hiver dernier, lâ-
chant la tête d'Holopherne, et deux jolis bas-
reliefs de Coustou et de Coysevox sont d'an-
née en année plus détériorés par le froid.
Les nouvelles statues résisteront peut-être,
mais M. Guillaume ne répond de rien.
LE CONGRÈS OUVRIER
Hier matin s'est ouvert, à la salle du Com-
merce, le 11e congrès national du parti ouvrier
français (Agglomération parisienne), ordinai-
rement appelé parti guesdiste, du nom de son
fondateur, le nouveau député de Roubaix. -
Nous avons donné, il y a quelques semai-
nes, l'ordre du jour des séances. Il porte, on
s'en souvient, 5 paragraphes :
lo Le parti ouvrier et les dernières élections
législatives;
20 De l'action des élus du parti à la Cham-
bre et dans le pays ;
30 De la propagande et de l'organisation
socialiste dans les campagnes ;
4° Des finances du parti (propositions des
congrès régionaux de Libourne et d'Armen-
tières) ;
5o Renouvellement du conseil national.
Les délégués sont au nombre de 85, repré-
sentant 105 villes et 419 syndicats ou groupes.
Parmi ces délégués se trouvent 6 députés :
MM. Chauvin, Jules Guesde, Jourde, Sau-
vanet, Salis, Pierre Vaux;
1 conseiller général : M. Cousteau;
3 conseillers municipaux : MM. Delcluze
(Calais), Marliot, Saleinbier ;
1 maire : M. Dormoy (Montluçon).
La séance du matin, présidée par M. Paul
Lafargue assisté de MM. Chauvin et Ferroul,
a été consacrée à la vérification des pouvoirs.
Dans l'après-midi, immédiatement après la
constitution du bureau, composé de MM.Fer-
roul, président. Chauvin et Pierre Vaux, as-
sesseurs, M. Jules Guesde a déposé les deux
propositions résolutoires suivantes, qui ont
été adoptées sans discussion :
Première résolution
Avant toute délibération et acclamation, le
XI- congrès national du Parti ouvrier français se
solidarise avec les mineurs en grève de France et
de Belgique ; proteste conre l'armée détournée de
son rôle de défense nationale et transformée contre
la nation ouvrière en garde du corp3 et des biens
de la elasse capitaliste,
Et voue à l'exécration populaire les auteurs res-
ponsables de la fusillade de Featherstone et de la
drag 'iinadede Drocourt.
Le congrès envoie l'expression de ses plus vives
sympathies aux députés socialistes allemands, à
Bueb, jeté en prison pour avoir déploré une fois
de plus l'annexion de l'Alsace et de la Lorraine, et
aux socialistes et révolutionnaires polonais et
russes frappés dans leur lutte héroïque contre le
despotisme tsiris'.e.
Le congrès félicite les travailleurs socialistes
d'Uola qui, reportant la responsabilité des scènes
sanglantos d'A'gues-Mortes sur le système capita-
liste, se sont mis en travers de toutes les incita-
tions chauvines et il les assure des sentiments
fraternels du prolétariat français décidé à ne voir
d'ennemis que dans le patronat quelle que soit sa
nationalité.
Deaxième résolution
-- En réponse à la campagne de calomnies menée
contre lui par une presse à la solde du ministère de
l'intérieur, de l'ambassade impériale de Russie et
de la haute banque, le parti ouvrier français, par
l'organe de son XIe congrès national, affirme plus
haut que jamais la nécessité pour les prolétaires
de s'organiser et d'agir internationalement contre
l'internationale capitaliste, gouvernementale et po-
licière.
L'exploitation du travai] ne connaît pas de fron-
tières. L'affranchissement du travail ne saurait
être poursuivi et ebtenu que par-dessus les fron-
tières supprimées entre les exploités de tous les
pays.
Mais, pas plus que la solidarité ouvrière nex-
clut ou ne limite le droit et le devoir pour les ou-
vriers de se défendre contre les ouvriers traîtres
à leur classe, la solidarité internationale n'exclut
ni ne limite le droit et le devoir d'une nation de
se défendre contre un gouvernement quel qu'il soit
traître à la paix europeenne.
La France attaquée n'aurait pas de plus ardents
défenseurs que les socialistes du parti ouvrier, con-
vaincus du grand rôle qui leur est réservé à la
prochaine révolution sociale.
Le neuvième congrès national ne peut donc que
s'en référer au manifeste du congres national en
date de juin 1893, qu'il confirme dans toutes ses
parties.
1- Discours de M. Jules Guesde
M. Jules Guesde a ensuite présenté au nom
du comité national du parti le rapport sur
l'année écoulée. Le leader du parti ouvrier a
rappelé les succès obtenus depuis le dernier
congrès de Marseille et exprimé le regret que
« le milieu parisien ait été réfractaire jus-
» qu'ici à l'intransigeance du programme du
» parti ».
Parlant de la manifestation du 1er mai
dernier, M. Jules Guesde a affirmé la néces-
sité « d'un échange de représentants socia-
listes militants dans les différents pays, cha-
que année, à cette date ».
« Le jour, s'est écrié M. Guesde, où des
» socialistes français marcheront en tête de la
.»'manifestation du lc-r mai à Berlin et où des
» socialistes allemands marcheront en tête de
» la manifestation du 1er mai à Paris, la vic-
» toire sera bien proche. »
Lecture a été faite de nombreuses adresses
venant d'Allemagne, de Belgique, d'Espagne,
puis les divers délégués ont rendu compte de
la situation électorale dans leurs régions res-
pectives. Tous ont été d'avis qu'il fallait pré-
parer dès maintenant avec ardeur les élec-
tions de 1898.
Une quête au profit des mineurs en grève a
produit 168 fr. 45.
LE POTAGE
AUX AILERONS DE REQUIN
Plusieurs de nos lecteurs et de nos lectrices
nous demandent la recette du potage aux ai-
lerons de requin, qui figure dans le menu du
diner qu'offrira, à Toulon, l'amiral Rieunier
aux officiers de l'escadre russe.
La voici, telle qu'a bien voulu nous la four-
nir M. Lasson, propriétaire de la maison Po-
tel et Chabot :
Potage pour vingt personnes
Faire un très bon consommé en prenant
deux poules qu'on poète, c'est-à-dire qu'on
passe au feu dans une casserole garnie d'un
morceau de beurre. On mouille ensuite avec
une bouteille d'excellent vin blanc, du cha-
blis de préférence, puis on ajoute deux litres
et demi" d'eau, quatre pieds de veau (ce qui
donne un peu de gélatineux au potage), et les
légumes habituels du pot-au-feu, plus deux
branches de céleri. On laisse cuire environ
trois heures. Jaunâtre, de la surface d'une
main, l'aileron de requin ressemble à de la
corne et nous arrive, séché, de Chine. Aussi
faut-ii les mettre à l'eau froide la veille
du jour où ils doivent être employés. Sortis
de cette eau, on les cuit, à raison de un pour
trois personnes, dans un bouillon bien pré-
paré où ils restent sept heures.
Une heure avant de servir, le consommé,
dont nous avons indiqué plus haut la prépa-
ration, est dégraissé et passé, de façon qu'il
soit très clair.
Les ailerons de requin sont alors ver-
sés dans le consommé où ils cuisent une heure
de plus, ce qui leur fait huit heures de cuis-
son.
Enfin, au moment de servir, on verse dans
le potage une demi-bouteille de madère.
UN GROS SCANDALE A BERLIN
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Berlin, 7 octobre.
Le Berliner Tageblatt publiait, il y a quel-
ques mois, une nouvelle qui fit grand bruit
à l'époque dans le monde militaire et dans
la haute société de Berlin.
Il y était dit, de la façon la moins déguisée
qui soit, que la fille d'un officier supérieur, le
général-lieutenant von Kirchhof,commandant
la division de Brandebourg, n'avait pas été
insensible aux charmes d'un jeune soldat
attaché au service de son père en qualité
d'ordonnance, et que, touchée de sa bonne
mine et de sa bonne tournure, elle avait fini
par lui accorder, avec une générosité qui, en
l'espèce, n'était peut-être pas très louable, ce
qu'on est convenu d'appeler, quand il s'agit
de personnes bien nées, ses « faveurs ».
Et le journal berlinois ajoutait que l'intri-
gue ayant été découverte, Mlle de Kirchhof
s'était enfuie de la maison paternelle, tandis
que l'objet de son amour était tout simple-
ment réintégré dans sa compagnie.
Cette information aussi sensationnelle que
scandaleuse coûta 1,000 marcs d'amende au
gérant, ou plus exactement au rédacteur res-
ponsable du Tageblatt, M. Harich.
M. Harich avait bien offert de faire la preuve
de son dire, mais le tribunal n'avait vu, avec
juste raison, dans sa proposition qu'un man-
que absolu de tout respect des convenances.
Quoi qu'il en soit, l'oubli commençait à se
faire sur les escapades amoureuses de Mlle
de Kirchhof, quand un incident à la fois
tragique et imprévu vient de ramener l'at-
tention sur cette affaire.
Cet après-midi, en effet, le général-lieute-
nant Von Kirchhof, le père de l'héroïne de
l'histoire, se présentait au domicile de M. Ha-
rich et lui demandait, avec force injures à
la clé, de lui écrire une lettre d'excuses dont
il avait par avance rédigé le brouillon et dans
laquelle le signataire devait reconnaître en
propres termes qu'il était une « franche ca-
naille ».
Cette prétention parut naturellement exces-
sive à M. Harich, qui se refusa aussitôt à
toute explication. Furieux, la général sortit
un revolver de sa poche et, braquant
son arme sur le rédacteur du Tageblatt, tira
sur lui deux coups presque à bout portant.
Par un hasard miraculeux, M. Harich ne
fut pas blessé. Une balle s'était amortie sur
un bouton de chemise et l'autre s'était égarée.
Le général Von Kirchhof le mettait cepen-
dant encore en joue, lorsque M, Harich, pris
d'une syncope, chancela et tomba à la ren-
verse.
Croyant l'avoir tué, son agresseur s'éloi-
gna, alla au commissariat de police faire sa
déclaration et se rendit à l'état-major de la
place se constituer prisonnier.
Il est inutile d'ajouter que cet attentat a
causé une profonde sensation à Berlin, et que
l'empereur en aété prévenu par dépêche.
CHRONIQUE
En ce temps de choses franco-russes,
voici une question qui est piquante. Il
paraît que les Russes, encore qu'ils aient
une merveilleuse facilité pour les langues,
encore qu'ils manifestent un goût parti-
culier pour la langue française, sont en
train de très mal l'apprendre. Ceux d'en-
tre eux qui parlent le français avec une
aisance et une pureté qui nous étonnent vo-
lontiers, nous autres, — qui, malgré une
amélioration notable dans cette situation,
ne possédons guère les langues étran-
gères, — ceux-là sont des initiés d'autre-
fois. Mais la nouvelle génération risque
de posséder des principes déplorables, et,
malgré toute la peine qu'elle se donne,
ne n'avoir à son service qu'un étrange
charabia.
Ce n'est pas sa faute, certes, les circons-
tances actuelles n'étant pas, d'ailleurs,
pour diminuer l'affection des Russes pour
les Français. C'est celle de ses éduca-
teurs. En une étude, tout ce qu'il y a de
plus « documentée », qui m'a paru fort
curieuse, un homme bien au fait ae tout
ce qui concerne la Russie, M. Portier
d'Arc, vient de jeter le cri d'alarme, et,
spirituellement, il déclare que, à ce point
de vue spécial, la vision de l'avenir est de
nature à faire frémir.
C'est que l'enseignement du français,
en Russie, actuellement, est presque ex-
clusivement entre les mains de Suisses!
Ces Suisses peuvent être de fort braves
gens, mais ils emploient généralement un
français lourd, plein de tournures spé-
ciales, quelquefois bizarres. Le suisse
comme le belge (il ne s'agit pas naturel-
lement du flamand) est une espèce de
langue particulière.
Les élèves, en écoutant leurs précep-
teurs dans les gymnases, croient appren-
dre toutes les finesses du français : ce
sont celles du vaudois et du genevois qu'on
leur inculque, avec l'accent traînant qu'ont
les « natifs » de ces pays. Ce n'est pas du
tout la même chose. 1
Ceux des Russes qui viennent à Paris
en sont quittes, quand ils se sont aperçus
qu'on ne leur enseigna qu'un singulier
idiome, n'ayant pas - cours (heureuse-
ment 1) sur les bords de la Seine, en sont
quittes, dis-je, pour une nouvelle éduca-
tion linguistique, que leur don très re-
marquable d'assimilation leur rend aisée.
Mais les autres, ceux qui n'ont pas fait le
voyage, demeurent les victimes d'une es-
pèce de mystification. Ils parlent. suisse.
D'où vient cette invasion de maîtres
helvètes et ce quasi-renoncement des pro-
fesseurs d'authentique origine française,
eux qui, par tradition, étaient les bienve-
nns en Russie? Cela tient à plusieurs cau-
ses qu'expose subtilement M. Portier
d'Arc. D'abord, les exigences du service
militaire retiennent longtemps chez eux
les Français et ont pour résultat de dé-
tourner leurs idées de l'émigration. Puis,
en France même, on a beaucoup fait (bien
que ce ne soit pas encore assez) pour les
fonctionnaires de l'instruction publique,
qui ont moins besoin qu'autrefois de cher-
cher des ressources a 1 étranger. Il y a
aussi un motif qui tient à de récentes lois
russes, lesquelles exigent des étrangers
au service de l'Etat, la connaissance de la
langue nationale. Enfin, dans les établis-
sements publics russes, les honoraires des
professeurs n'ont pas augmenté en pro-
portion de la cherté de la vie et ils sont,
présentement, assez peu rémunérateurs.
Ce n'est pas la peine de quitter son pays
si l'existence ne doit pas être meilleure
ailleurs.
Qu'est-il arrive ? Ce sont les jeunes gens
suisses, pédagogues blonds à lunettes
d'or, qui se sont précipités vers la Rus-
sie. Ils ne sont point gênés par les obli-
gations militaires ; ils n'ont pas grand'-
chose à perdre, puisque leur petite patrie
ne leur offre pas beaucoup de débouchés,
et, nés dans un pays où l'on est générale-
ment un peu plus qu'économe, ils se con-
tentent d'appointements insuffisants pour
des Français. Ils sont aussi plus simples
qu'eux; ils ne sont pas portés à discuter
les méthodes d'enseignement qu'on leur
impose, leur semblassent-elles vicieuses.
Ils ne sont peut-être pas de fameux pro-
fesseurs, mais ils deviennent de parfaits
fonctionnaires. Voilà comment ils ont ac-
caparé les élèves.
Ces marchands de français en appren-
nent un drôle à leurs disciples, et il suffit
d'avoir passé quelques jours dans la cité
de Calvin ou sur les rives du Léman
(qu'on prononce Lemin, là-bas, entre pa-
renthèses), pour se faire une idée de ce
que peuvent être ces cours fallacieux.
C'est cela qui doit donner une crâne idée
de notre langue, de sa légèreté, de ses
traits aiguisés, de -- sa -- franche - allure, aux
jeunes Russes 1 M. Portier d'Arc a rai-
son : c'est à faire frémir 1 L'harmonie
de notre doux français, sa vivacité, son
pittoresque, que devient tout cela en pas-
sant par la bouche des grammairiens hel-
vètes !
Il paraît qu'ils l'ont simplifié à leur ma-
nière, le français ! Ils ont imaginé six
conjugaisons de verbes, par exemple, en
des manuels baroques, où ce qui est le
plus clair et le plus simple du monde se
hérisse de difficultés insurmontables.
C'est à les dégoûter d'une langue qu'ils ai-
ment d'instinct, les pauvres petits Mos-
coves!
On leur apprend qu'on dit « restaura-
tion » au lieu de restaurant, qu'un anni-
versaire s'appelle « la fête de nom », que
le premier étage d'une maison se désigne
par le mot de « bel-étage », que, pour un
timbre-poste, on dit « une marque », que,
quand on va deux à deux, on « marche
par paire ». que « va-t'-y en » remplace
avantageusement « va-t'en », qu'on ne fait
pas un voyage, mais « une course », qu'on
ne demande pas le prix d'une chose, mais
sa «finance », ou que l'interjection fami-
lière qui répond à tous les besoins de la
conversation. française, est : « Pas plus ! »
Et la prononciation! On leur assure
qu'il est élégant de dire : longuemfnt,
passablemint, agréable, un fusile..,.
Qu'est-ce que vous voulez que fassent les
jeunes Russes contre les assertions de
leuro professeurs, d'autant plus redouta-
bles qu'elles sont convaincues ?
Et si ce n'était que cela, encore ! Mais
ce sont de prodigieux « classiques » que
les maîtres suisses proposent aux écoliers
qu'ils éduquent. Dame ! ils gardent, à l'é-
tranger, un faible pour leurs auteurs na-
tionaux, et, pour eux, le genevois Toepfer
dégote joliment Bossuet, Racine ou Vol-
taire. Ils sont condamnés au Toepfer à
perpétuité, en guise densouverain maître
de notre langue, les infortunés adolescents
slaves, et, quelle que soit leur légitime
incrédulité naturelle, il faut qu'ils se per-
suadent que la Bibliothèque de mon oncle
et M. Cryptogame sont ce qui a été écrit
de plus accompli en français.
C'est que nos auteurs, ils les trouvent,
dans leur pudibonderie protestante, un
peu légers ! M. Portier d'Arc cite, entre
autres exemples, un recueil de morceaux
choisis où, .à côté de pages tirées des plus
endormants pasteurs suisses, figure ce-
pendant le Lac, de Lamartine. Mais
c'est un Lac édulcoré, arrangé et expurgé
soigneusement. Au lieu de :
Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire.
Tout dise : ils ont aimé !
l'austère pédagogue a imprimé :
* Tout dise : ils ont rêvé J
La rime n'y est plus, mais qu'importe t
La morale — cette morale particulière, ne
se souciant plus, dans son zèle, de la rai-
son, qu'on a exaltée au récent congrès de
Lausanne — est sauve.
Voici les révélations assez singulières
qui nous sont faites par un homme qui
connaît bien tout ce qui se passe en Rus-
sie. Les Suisses insidieux sont tout sim-
plement en train d'y déshonorer la langue
et la littérature françaises, apprises avec
tant de bonne volonté par les collégiens
russes, qui croient ingénument être ins-
truits pour de bon.
Mon Dieu f je ne veux aucun mal aux
Suisses. à la condition qu'ils ne s'en
prennent pas, fût-ce inconsciemment,
aussi férocement au français. Cette si-
tuation valait la peine d'être signalée.
Est-ce que, en ce moment de relations
particulièrement cordiales, les Russes ne
pourraient pas faire un petit effort pour
posséder des professeurs de français qui
sachent vraiment notre langue ? Nous
autres, quand, dans nos lycées, nous
avons ouvert des cours de russe, nous
n'avons pas été chercher, pour l'ensei-
gner, d'autres maîtres que des Russes au-
thentiques.
- Paul Ginisty.
LES SUCCESSIONS
M. Barodet, député de la Seine, se propose de
déposer, dès la rentrée, une proposition de loi ten-
dant à modifier la législation actuelle sur l'héri-
tage en ligne collatérale.
MYSTÉRIEUSE DISPARITION
On parle beaucoup en ce moment, dans le monde
policier, de la disparition d'un secretaire de com-
missaire de police. Il n'a pas paru à son bureau
depuis deux jours et à son domicile on ne sait ce
qu'il est devenu.
DESSOUS DE CARTES n)
LETTRE D'UN VIEUX PONTE
IV
Au rédacteur du XIXe Siècle.
Monsieur le rédacteur, -
Fermera-t-on, ne fermera-t-on pas ses tri-
pots ? Le Bertrand du Washington, qui a le
défaut d'être vantard, affirme qu'on ne fer-
mera jamais le Washington. Il annonce qu'on
fermera quelques tripots de bas étage et peut-
être le Betting de son frère ; mais il est trop
bien, dit-il, avec la préfecture, il lui a rendu
trop de services de toute espèce, pour qu'on
touche au Washington. --'
Je n'ai pas l'honneur de connaître M. Lé-
pine, mais je suis bien sûr qu'il serait peu
flatté s'il savait dans quels termes et sur quel
ton parle de lui ce Bertrand. Cet ancien do-
mestique se vante d'avoir, à son tour, domes-
tiqué à son profit le gouvernement et la pré-
fecture de police, ni plus ni moins. A l'en-
tendte, toutes les autorités seraient à ses
tendre, Ah ! il se moque pas mal de la police.
gages.
Elle peut d'ailleurs venir dans son tripot, il
la défie bien de découvrir ses trucs 1
Le Bertrand du Betting est moins fier. Il
avait, vous le savez, donné sa démission à la
suite de son affaire avec M. Schwob et il s'é-
tait fait remplacer par son associé Porte,
qui a été, je crois, président de la Société des
courses de Maisons-Laffitte, et qui n'a pas,
autant qu'il m'en souvient, quitté cette situa-
tion précisément de son plein gré.
Depuis, ce Porte, à son tour, a disparu oa
fait semblant de disparaître; mais Cuvellier,
le secrétaire de Bertrand, est resté, mais
Combe, autre créature de Bertrand, est
également resté. Henry d'ailleurs, c'est ainsi
qu'on appelle familièrement le propriétaire
du Betting, n'est pas loin. Le Betting est au
no 4 de la rue Mogador. Henry est là tout
près, dans sa boutique à l'enseigne de la Ro-
sée-Crème, — tant pis pour la réclame ! —
46, boulevard Haussmann, presque au coin de
la même rue Mogador.
La Rosée-Crème, direz-vous, qu'est-ce que
cela peut bien être ? Eh ! parbleu, c'est l'en-
seigne de la parfumerie d'Henry Bertrand.
Les tenanciers de tripots ont la manie de la
parfumerie. Ils croient que ça porte bonheur.
Bloch, de l'Escrime, a la sienne.
Charles Bertrand à la Rosée-Crème, nom
délicieux 1 Aussitôt que la partie est com-
mencés avec le banquier de la maison, c'est
un perpétuel va-et-vient du Betting à la Rosée-
Crème pour prendre les ordres du vrai, du
seul patron, d'Henry Bertrand. — A celui-ci on
peut prêter tant, à celui-là tant, — et l'on
continue à signer des acceptations en blane
dans le « confessionnal ». -
Le « confessionnal », c'est la pièce qui se
trouve à côté de « l'écurie » — l'écurie, dans
le langage des habitués, cela veut dire la cour
vitrée dont Bertrand a fait la salle de jeu du
Betting.
Voici, M. Lépine, comment on respecte le
paragraphe 2 de votre ukase, « d'avoir à
supprimer absolument les prêts de quelque
nature qu'ils soient que l'administration
fait aux joueurs D.
(1) Voir les numéros du XIX* Siècle datés des
6, 7, et 8 octobre. - -
CINQ Centimes — Paris et Départements — CIITO Centimes
LUNDI 9 OCTOBRE 1893
J, *~s~
ri
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tous les Bureaux de Poste.
Lttti fle rlne
Que le suffrage universel, tel qu'il
fonctionne en France, ait ses imperfec-
tions et permette des fraudes, c'est une
vérité banale, et toutes les vérifications
de pouvoirs la mettent encore plus en
lumière. Mais ce n'est rien à côté des
abus qui se produisent aux colonies.
Les choses s'y passent de la façon la
plus extraordinaire, et ce n'est pas le
moindre des arguments que l'on a sou-
vent invoqués pour demander la sup-
pression de la représentation coloniale
dans la Chambre.
Ce n'est pas l'élection récente de l'Inde
qui peut faire revenir sur l'opinion peu
avantageuse que nous avons du suf-
frage universel dans les colonies. Elle
paraît s'être passée avec une aimable
fantaisie. On a déjà conté que, dans une
section, un curieux, installé pendant
toute la durée du scrutin, avait vu neuf
électeurs déposer leur bulletin dans
l'urne. Le soir, de cette même urne sor-
taient onze cents suffrages. Nous avons
aussi annoncé que la commission de
recensement, réunie une première fois,
avait proclamé M. Pierre Alype élu.
Trois semaines plus tard, cette même
commission de recensement se réunit
une seconde fois et elle déclare qu'il y
a ballottage. Entre ces deux réunions,
on avait retrouvé huit ou dix mille
bulletins de vote, chiffre assez impor-
tant, en effet, pour modifier le résultat
du scrutin.
D'où sortaient ces huit ou dix mille
bulletins? Comment s'étaient-ils trouvés
en état de vagabondage ? Qui les avait
ramenés au bercail ? Autant de points
mystérieux. Tout cela nous étonne;
mais les habitants de l'Inde ne s'émeu-
vent pas pour si peu. Puisqu'il y avait
ballottage, ils étaient tout disposés à re-
commencer le vote.
On ne les a pas laissés faire. La com-
mission avait prononcé une première
fois; l'administration ne lui reconnut
pas le droit de se contredire et elle sou-
tint que si sa décision était entachée
d'erreur, s'il y avait des suffrages en
rupture de ban, c'était à la Chambre à
s'assurer du fait et à annuler, s'il y
avait lieu, l'élection de l'Inde.
Mais le plus étonnant de l'affaire ne
s'est pas passé sur les bords du Gange.
C'est à Paris que l'histoire est devenue
le plus invraisemblable. M. Casimir
Perier, président de la Chambre ac-
tuelle, a éprouvé le besoin d'informer
M. Pierre Alype qu'il ne le considérait
pas comme élu et qu'il ne lui permet-
trait pas d'entrer dans la Chambre tant
que l'élection n'aurait pas été validée.
Une première question est soulevée
par cette décision. De quel droit M. Ca-
simir-Perier annonce-t-il qu'il interdira
l'entrée du Palais-Bourbon à qui que
ce soit? M. Casimir-Perier est bien pré-
sident de la Chambre actuelle, mais ses
pouvoirs présidentiels expirent en même
temps que son mandat législatif, le
14 de ce mois. Le 15 octobre, il n'est
plus qu'un simple député, éventuel
tant que la Chambre ne l'a pas validé ;
à partir de cette même date, la Cham-
bre n'a pas d'autre président que son
doyen d'âge jusqu'au moment où elle
aura procédé à l'élection d'un nouveau
bureau, dont M. Casimir-Perier ne fera
pas nécessairement partie. Par consé-
quent, M. Casimir-Perier annonce l'in-
tention de commettre une usurpation
de fonctions.
Fût-il même président, son acte se-
rait encore parfaitement arbitraire. De
deux choses l'une : ou le premier tour
de scrutin a donné un résultat et M.
Pierre Alype a été déclaré élu, sous ré-
serve de son admission par la Chambre;
ou il y avait lieu à un ballottage auquel
il fallait procéder. Puisqu'il n'a pas été
procédé à un ballottage, c'est que l'on
a considéré que le premier tour avait
donné un résultat. Le siège de député
de l'Inde ne peut pas être à la fois va-
cant et occupé.
Que l'élection soit contestée, cela
nous paraît assez naturel ; que même
la Chambre l'annule, après ce que nous
savons, nous n'en éprouverons guère de
surprise. Mais il serait beaucoup plus
étonnant que M. Casimir-Perier eût la
prétention d'introduire dans la juris-
prudence parlementaire cette nouveauté
de faire prononcer le jugement par dé-
faut et d'empêcher les députés dont
l'élection est attaquée de présenter un
moyen de défense. Comment pour-
raient-ils le faire, en effet, si les huis-
siers leur" interdisaient l'entrée de la
salle des séances ?
Tant que la Chambre n'a pas statué
sur. l'élection, M. Pierre Alype a le
même droit d'occuper son siège que
tous ceux dont les pouvoirs ne sont pas
encore vérifiés. M. Casimir-Perier au
rait sagement fait de réfléchir avant de
signifier sa décision à son collègue de
l'Inde. Il se serait épargné à la fois une
brutalité et une sottise. M. Casimir-Pe-
rier se croit-il déjà le maître incontesté
de la Chambre future, pour exagérer
encore à l'égard de certains de ses
membres les allures de sous-officier qui
le caractérisent ?
LES PROPOS DU GÉNÉRAL DE COOLS
3Nous apprenons que M. Bazille, député de
Poitiers, a avisé le ministre de la guerre qu'il
avait l'intention de l'interpeller dès le début
de la session sur l'affaire du général de Cools.
LA CHAMBRE ET LES FÊTES RUSSES
M. Casimir-Perier vient de convoquer le
bureau de la Chambre des députés pour mardi
prochain à deux heures.
Cette réunion est motivée par la situation
particulière que créent les fêtes franco-russes
à un moment où l'ancienne Chambre dispa-
raît et où la nouvelle n'est pas encore consti-
tuée.
Il paraît probable que le bureau déclarera
que, le mandat de la Chambre élue en 1889
expirant le 14 octobre, il n'a plus qualité pour
prendre une décision quelconque.
LA RÉFORME DE L'IMPOT
On se souvient peut-être qu'au cours de la
dernière session, la Chambre avait chargé
une commission de trente-trois membres d'é-
tudier un projet relatif à la réforme générale
de l'impôt.
Cette commission, présidée par M. Maujan,
n'a pas terminé son travail avant la fin de la
session.
Seuls trois députés, plus laborieux que les
autres, ont soumis à la Chambre, avant sa
séparation leurs rapports sur trois questions
qu'ils avaient été chargés d'examiner, celles
de l'impôt sur l'alcool, de l'impôt sur le ca-
pital et des frais de justice.
MM. Dupuy-Dutemps, Guillemet et Mer-
]ou, auteurs de ces trois rapports, les repren-
dront devant la prochaine Chambre, sous
forme de propositions de lois spéciales.
Ils espèrent ainsi que leur travail ne sera
pas entièrement perdu. Ils demanderont la
déclaration d'urgence. ¡
UNE IDÉE PRATIQUE
Décidément on est très pratique à Saint-
Maur. On se rappelle qu'il y a un an, pour
mettre fin aux exploits des rôdeurs et des
malfaiteurs, c'est dans cette commune que
fut créée, sous les auspices de la municipa-
lité, une brigade de sûreté dont la direction
fut confiée à un ancien brigadier du service
de la Sûreté de Paris.
Ces agents salariés par la commune étaient
placés sous les ordres du commissaire de po-
lice de Joinville-le-Pont et les services qu'ils
ont rendus dans la circonscription ne se
comptent plus.
Les habitants de Saint-Maur ne s'en sont
pas tenus là et ils viennent de créer, aidés
par les ressources municipales, une caisse
destinée à récompenser non seulement les
agents, mais aussi les simples particuliers qui
pourraient aider ou même procéder à l'arres-
tation d'un malfaiteur.
Voici comment opèrent les administrateurs
de cette cnisse de primes :
Par exemple, on a dévalisé, la nuit dernière,
la villa de M. X. Un des administrateurs se
rend près de celui-ci et lui demande l'estima-
tion du vol dont il vient d'être victime. Ceci
fait, il lui propose de verser dans la caisse des
primes une somme de. par tête de malfai-
teurs arrêtés, plus une deuxième somme de.
selon l'importance du vol, si la police locale
ou même des particuliers lui font retrouver
tout ou partie des sommes ou des objets qui
lui ont été volés.
Personne n'est forcé d'accepter et pourtant,
jusqu'à présent, on ne compte pas un seul
refus de la part d'un propriétaire spolié, ou
même d'un commerçant volé par un employé
indélicat. -
La certitude, en cas de réussite, de toucher
une prime stimule le zèle des agents et nous
savons qu'ils ont eu à trois à se partager une
prime de 600 francs, à la suite d'une double
arrestation suivie de la découverte de la ma-
jeure partie des objets volés dans la pro-
priété de M. Raphel à la Pie.
MOUVEMENT JUDICIAIRE
Sont nommés :
Conseiller à la cour d'appel de Besançon, M. Bla-
che, substitut du procureur général près la même
cour.
Substitut du procureur général à Besançon, M.
Martin, procureur de la République à Lons-le-
Saunier.
Procureurs de la République :
A Lons-le-Saunier, M. Thuriet, procureur à
Baume-les Dames.
A. Bauuie-les-Dames, M. Rencker, substitut à Be-
sançon.
Substituts du procureur de la République :
A Besançon, M. Aron, substitut à Lons-le-Sau-
nier.
A Lons-le-Saunier, M. Frachat, substitut à Pon-
tarlier.
A Pontarlier, M. Husson, juge suppléant à Be-
sançon.
Président du tribunal de Segré, M. Bernardeau,
juge d'instruction à Angers.
Juges au tribunal :
D'Angers, M. Chauveau, juge d'instruction à
Saumur.
De Saumur, M. Maynier, juge suppléant au
même siège. -
De Sarlat, M. Michelot, juge suppléant au même
siège.
Juge suppléant à Chàtellerault, M. Touchard,
avocat.
Les démissions de MM. Lecouturier et Cargue,
juges suppléants à Argentan et à Saint-Gaudens,
sont acceptées.
LA DYNAMITE A SAINT-ETIENNE
Saint-Etienne, 7 octohre.
Vers midi, un individu, ayant la mise d'un mi-
neur endimanché, qui rôdait depuis quelques ins-
tants autour d'un commissionnaire établi place de
l'Hôtel-de-Ville, s'adressa subitement à lui et lui
dit : « Gardez-moi ce panier, je viendrai le pren-
dre dans quelques heures; mais surtout ne le mon-
trez à personne. » Puis, tirant de sa poche une
pièce de monnaie, il la remit au commissionnaire.
En même temps, il laissait tomber des liasses de
billets de banque et de nombreuses pièces d'or. Il
les ramassa et disparut.
Le commissionnaire, déjà intrigué par les allu-
res de cet individu, ne le voyant pas revenir à
quatre heures, porta le panier au bureau de po-
lice
Le commissaire constata que le panier contenait
150 cartouches de dynamite. Il prit le signalement
du dépositaire et lança immédiatement des agents
à sa recherche. -
LES
ÉTUDIANTS ET VELLEDA
LES NEUF STATUES A
Les statues des Tuileries. — Une péti-
tion originale. — Le stock du
dépôt des marbres.
Dans le jardin des Tuileries on travaille
depuis un bon mois, et assez lentement, à l'élé-
vation de neuf socles en pierre blanche que
surmonteront,la semaine prochaine,neuf œu-
vres d'art prises dans le Dépôt des marbres
où elles croupissaient depuis longtemps.
Le choix de ces neuf statues a été on ne
peut plus difficile à établir. Aucun crédit ne
permettant à M. Guillaume, l'architecte du
jardin, d'en faire faire qui soient appropriées
au milieu où elles figureront, qui soient en
rapport avec l'aspect grandiose des bâtiments
voisins, il a dû se rabattre, pour garnir ses
neuf socles, sur des œuvres commandées ja-
dis à des artistes maintenant « arrivés » et
qui ne répondent que de très loin au but
qu'elles doivent remplir. -
On ne se préoccupe jamais là-bas, où l'on
commande des œuvres d'art pour le seul
plaisir, louable d'ailleurs, d'encourager les
artistes, du moyen qu'il y aurait d'utiliser
leurs travaux. On achète, on achète, et quand
ce qu'on a acheté devrait pouvoir servir à
quelque chose, on s'aperçoit un peu tard que
cela ne peut servir à rien du tout.
CHOIX BANAL
Finalement, après bien des recherches dans
le Dépôt des marbres, où languit toujours le
Marat de M. Baffier dont nous avons an-
noncé les premiers le clandestin enlèvement
du parc de Montsouris, on s'est arrêté au
choix suivant :
Le Réveil, de Maze ; Ganymède, de Bar-
thélémy; Elégie, de Caille; le Secret d'en
haut (1) de Moulin ; Judith et Holopherne, de
Landon ; Pénélope, de Maniglier ; Agrippine,
de Maillet; Eve, de la Planche, et enfin,
Velleda, de Mandrat.
Au milieu du jardin, dans la ligne du mo-
nument de Gambetta, de l'obélisque et de l'Arc
de Triomphe, figurera le Quand même ! de
Mercier, avec les médaillons de Thiers et du
colonel Denfert. On le fait en ce moment cou-
ler en bronze.
Il sera de la même taille que celui qui figure
sur la Grand'Place de Belfort. Là, il serait
déjà très petit; ici, venant après le monu-
ment de Gambetta, et moins proportionné en-
core à ce qui l'entoure, il sera piteux.
On le voit, dans le groupe des statues de
marbre que nous venons d'énumérer, rien
n'est bien nouveau : des Judith, des Péné-
lope, des Eve, cela n'est pas bien méchant et
a été fait quelquefois ; mais ce qui a soulevé
une pétition assez originale, c'est l'annonce
d'une nouvelle Velleda devant figurer en pu-
blic.
--- ------ PROTESTATION
! Il y en a déjà une au Louvre, une autre au
Luxembourg (jardio) ; cette dernière rempla-
çant, on ne sait pourquoi, une Jeanne d'Arc
qui y chevauchait jadis. En apprenant
qu'une troisième Velleda allait être offerte à
l'admiration décidément sans borne des Pa-
risiens, les étudiants et les élèves de l'Ecole
des beaux-arts ont protesté auprès de M.
Guillaume par une pétition aux termes assez
énergiques :
« Rendez-nous la Jeanne d'Arc du Luxem-
» bourg, y dit-on, et f -nous la paix avec
» vos Velleda ! »
M. Guillaume n'a pu répondre que ce que
nous venons de dire, qu'il n'avait rien de
mieux dans son sac.
Il paraît en outre que l'on ne se préoccupe
jamais de la qualité de la matière dans la-
quelle sont exécutées les œuvres qui pour-
raient servir à la décoration de nos jardins
publics, et c'est un tort, car les marbres dont
sont faites les statues étant pour la plupart
non « gelives » c'est-à-dire à l'abri des ou-
trages du froid, il est impossible de les lais-
ser exposés à l'air pendant l'hiver. Aussi
dans le jardin de l'Empereur, un bras d'une
autre Judith s'en est allé l'hiver dernier, lâ-
chant la tête d'Holopherne, et deux jolis bas-
reliefs de Coustou et de Coysevox sont d'an-
née en année plus détériorés par le froid.
Les nouvelles statues résisteront peut-être,
mais M. Guillaume ne répond de rien.
LE CONGRÈS OUVRIER
Hier matin s'est ouvert, à la salle du Com-
merce, le 11e congrès national du parti ouvrier
français (Agglomération parisienne), ordinai-
rement appelé parti guesdiste, du nom de son
fondateur, le nouveau député de Roubaix. -
Nous avons donné, il y a quelques semai-
nes, l'ordre du jour des séances. Il porte, on
s'en souvient, 5 paragraphes :
lo Le parti ouvrier et les dernières élections
législatives;
20 De l'action des élus du parti à la Cham-
bre et dans le pays ;
30 De la propagande et de l'organisation
socialiste dans les campagnes ;
4° Des finances du parti (propositions des
congrès régionaux de Libourne et d'Armen-
tières) ;
5o Renouvellement du conseil national.
Les délégués sont au nombre de 85, repré-
sentant 105 villes et 419 syndicats ou groupes.
Parmi ces délégués se trouvent 6 députés :
MM. Chauvin, Jules Guesde, Jourde, Sau-
vanet, Salis, Pierre Vaux;
1 conseiller général : M. Cousteau;
3 conseillers municipaux : MM. Delcluze
(Calais), Marliot, Saleinbier ;
1 maire : M. Dormoy (Montluçon).
La séance du matin, présidée par M. Paul
Lafargue assisté de MM. Chauvin et Ferroul,
a été consacrée à la vérification des pouvoirs.
Dans l'après-midi, immédiatement après la
constitution du bureau, composé de MM.Fer-
roul, président. Chauvin et Pierre Vaux, as-
sesseurs, M. Jules Guesde a déposé les deux
propositions résolutoires suivantes, qui ont
été adoptées sans discussion :
Première résolution
Avant toute délibération et acclamation, le
XI- congrès national du Parti ouvrier français se
solidarise avec les mineurs en grève de France et
de Belgique ; proteste conre l'armée détournée de
son rôle de défense nationale et transformée contre
la nation ouvrière en garde du corp3 et des biens
de la elasse capitaliste,
Et voue à l'exécration populaire les auteurs res-
ponsables de la fusillade de Featherstone et de la
drag 'iinadede Drocourt.
Le congrès envoie l'expression de ses plus vives
sympathies aux députés socialistes allemands, à
Bueb, jeté en prison pour avoir déploré une fois
de plus l'annexion de l'Alsace et de la Lorraine, et
aux socialistes et révolutionnaires polonais et
russes frappés dans leur lutte héroïque contre le
despotisme tsiris'.e.
Le congrès félicite les travailleurs socialistes
d'Uola qui, reportant la responsabilité des scènes
sanglantos d'A'gues-Mortes sur le système capita-
liste, se sont mis en travers de toutes les incita-
tions chauvines et il les assure des sentiments
fraternels du prolétariat français décidé à ne voir
d'ennemis que dans le patronat quelle que soit sa
nationalité.
Deaxième résolution
-- En réponse à la campagne de calomnies menée
contre lui par une presse à la solde du ministère de
l'intérieur, de l'ambassade impériale de Russie et
de la haute banque, le parti ouvrier français, par
l'organe de son XIe congrès national, affirme plus
haut que jamais la nécessité pour les prolétaires
de s'organiser et d'agir internationalement contre
l'internationale capitaliste, gouvernementale et po-
licière.
L'exploitation du travai] ne connaît pas de fron-
tières. L'affranchissement du travail ne saurait
être poursuivi et ebtenu que par-dessus les fron-
tières supprimées entre les exploités de tous les
pays.
Mais, pas plus que la solidarité ouvrière nex-
clut ou ne limite le droit et le devoir pour les ou-
vriers de se défendre contre les ouvriers traîtres
à leur classe, la solidarité internationale n'exclut
ni ne limite le droit et le devoir d'une nation de
se défendre contre un gouvernement quel qu'il soit
traître à la paix europeenne.
La France attaquée n'aurait pas de plus ardents
défenseurs que les socialistes du parti ouvrier, con-
vaincus du grand rôle qui leur est réservé à la
prochaine révolution sociale.
Le neuvième congrès national ne peut donc que
s'en référer au manifeste du congres national en
date de juin 1893, qu'il confirme dans toutes ses
parties.
1- Discours de M. Jules Guesde
M. Jules Guesde a ensuite présenté au nom
du comité national du parti le rapport sur
l'année écoulée. Le leader du parti ouvrier a
rappelé les succès obtenus depuis le dernier
congrès de Marseille et exprimé le regret que
« le milieu parisien ait été réfractaire jus-
» qu'ici à l'intransigeance du programme du
» parti ».
Parlant de la manifestation du 1er mai
dernier, M. Jules Guesde a affirmé la néces-
sité « d'un échange de représentants socia-
listes militants dans les différents pays, cha-
que année, à cette date ».
« Le jour, s'est écrié M. Guesde, où des
» socialistes français marcheront en tête de la
.»'manifestation du lc-r mai à Berlin et où des
» socialistes allemands marcheront en tête de
» la manifestation du 1er mai à Paris, la vic-
» toire sera bien proche. »
Lecture a été faite de nombreuses adresses
venant d'Allemagne, de Belgique, d'Espagne,
puis les divers délégués ont rendu compte de
la situation électorale dans leurs régions res-
pectives. Tous ont été d'avis qu'il fallait pré-
parer dès maintenant avec ardeur les élec-
tions de 1898.
Une quête au profit des mineurs en grève a
produit 168 fr. 45.
LE POTAGE
AUX AILERONS DE REQUIN
Plusieurs de nos lecteurs et de nos lectrices
nous demandent la recette du potage aux ai-
lerons de requin, qui figure dans le menu du
diner qu'offrira, à Toulon, l'amiral Rieunier
aux officiers de l'escadre russe.
La voici, telle qu'a bien voulu nous la four-
nir M. Lasson, propriétaire de la maison Po-
tel et Chabot :
Potage pour vingt personnes
Faire un très bon consommé en prenant
deux poules qu'on poète, c'est-à-dire qu'on
passe au feu dans une casserole garnie d'un
morceau de beurre. On mouille ensuite avec
une bouteille d'excellent vin blanc, du cha-
blis de préférence, puis on ajoute deux litres
et demi" d'eau, quatre pieds de veau (ce qui
donne un peu de gélatineux au potage), et les
légumes habituels du pot-au-feu, plus deux
branches de céleri. On laisse cuire environ
trois heures. Jaunâtre, de la surface d'une
main, l'aileron de requin ressemble à de la
corne et nous arrive, séché, de Chine. Aussi
faut-ii les mettre à l'eau froide la veille
du jour où ils doivent être employés. Sortis
de cette eau, on les cuit, à raison de un pour
trois personnes, dans un bouillon bien pré-
paré où ils restent sept heures.
Une heure avant de servir, le consommé,
dont nous avons indiqué plus haut la prépa-
ration, est dégraissé et passé, de façon qu'il
soit très clair.
Les ailerons de requin sont alors ver-
sés dans le consommé où ils cuisent une heure
de plus, ce qui leur fait huit heures de cuis-
son.
Enfin, au moment de servir, on verse dans
le potage une demi-bouteille de madère.
UN GROS SCANDALE A BERLIN
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Berlin, 7 octobre.
Le Berliner Tageblatt publiait, il y a quel-
ques mois, une nouvelle qui fit grand bruit
à l'époque dans le monde militaire et dans
la haute société de Berlin.
Il y était dit, de la façon la moins déguisée
qui soit, que la fille d'un officier supérieur, le
général-lieutenant von Kirchhof,commandant
la division de Brandebourg, n'avait pas été
insensible aux charmes d'un jeune soldat
attaché au service de son père en qualité
d'ordonnance, et que, touchée de sa bonne
mine et de sa bonne tournure, elle avait fini
par lui accorder, avec une générosité qui, en
l'espèce, n'était peut-être pas très louable, ce
qu'on est convenu d'appeler, quand il s'agit
de personnes bien nées, ses « faveurs ».
Et le journal berlinois ajoutait que l'intri-
gue ayant été découverte, Mlle de Kirchhof
s'était enfuie de la maison paternelle, tandis
que l'objet de son amour était tout simple-
ment réintégré dans sa compagnie.
Cette information aussi sensationnelle que
scandaleuse coûta 1,000 marcs d'amende au
gérant, ou plus exactement au rédacteur res-
ponsable du Tageblatt, M. Harich.
M. Harich avait bien offert de faire la preuve
de son dire, mais le tribunal n'avait vu, avec
juste raison, dans sa proposition qu'un man-
que absolu de tout respect des convenances.
Quoi qu'il en soit, l'oubli commençait à se
faire sur les escapades amoureuses de Mlle
de Kirchhof, quand un incident à la fois
tragique et imprévu vient de ramener l'at-
tention sur cette affaire.
Cet après-midi, en effet, le général-lieute-
nant Von Kirchhof, le père de l'héroïne de
l'histoire, se présentait au domicile de M. Ha-
rich et lui demandait, avec force injures à
la clé, de lui écrire une lettre d'excuses dont
il avait par avance rédigé le brouillon et dans
laquelle le signataire devait reconnaître en
propres termes qu'il était une « franche ca-
naille ».
Cette prétention parut naturellement exces-
sive à M. Harich, qui se refusa aussitôt à
toute explication. Furieux, la général sortit
un revolver de sa poche et, braquant
son arme sur le rédacteur du Tageblatt, tira
sur lui deux coups presque à bout portant.
Par un hasard miraculeux, M. Harich ne
fut pas blessé. Une balle s'était amortie sur
un bouton de chemise et l'autre s'était égarée.
Le général Von Kirchhof le mettait cepen-
dant encore en joue, lorsque M, Harich, pris
d'une syncope, chancela et tomba à la ren-
verse.
Croyant l'avoir tué, son agresseur s'éloi-
gna, alla au commissariat de police faire sa
déclaration et se rendit à l'état-major de la
place se constituer prisonnier.
Il est inutile d'ajouter que cet attentat a
causé une profonde sensation à Berlin, et que
l'empereur en aété prévenu par dépêche.
CHRONIQUE
En ce temps de choses franco-russes,
voici une question qui est piquante. Il
paraît que les Russes, encore qu'ils aient
une merveilleuse facilité pour les langues,
encore qu'ils manifestent un goût parti-
culier pour la langue française, sont en
train de très mal l'apprendre. Ceux d'en-
tre eux qui parlent le français avec une
aisance et une pureté qui nous étonnent vo-
lontiers, nous autres, — qui, malgré une
amélioration notable dans cette situation,
ne possédons guère les langues étran-
gères, — ceux-là sont des initiés d'autre-
fois. Mais la nouvelle génération risque
de posséder des principes déplorables, et,
malgré toute la peine qu'elle se donne,
ne n'avoir à son service qu'un étrange
charabia.
Ce n'est pas sa faute, certes, les circons-
tances actuelles n'étant pas, d'ailleurs,
pour diminuer l'affection des Russes pour
les Français. C'est celle de ses éduca-
teurs. En une étude, tout ce qu'il y a de
plus « documentée », qui m'a paru fort
curieuse, un homme bien au fait ae tout
ce qui concerne la Russie, M. Portier
d'Arc, vient de jeter le cri d'alarme, et,
spirituellement, il déclare que, à ce point
de vue spécial, la vision de l'avenir est de
nature à faire frémir.
C'est que l'enseignement du français,
en Russie, actuellement, est presque ex-
clusivement entre les mains de Suisses!
Ces Suisses peuvent être de fort braves
gens, mais ils emploient généralement un
français lourd, plein de tournures spé-
ciales, quelquefois bizarres. Le suisse
comme le belge (il ne s'agit pas naturel-
lement du flamand) est une espèce de
langue particulière.
Les élèves, en écoutant leurs précep-
teurs dans les gymnases, croient appren-
dre toutes les finesses du français : ce
sont celles du vaudois et du genevois qu'on
leur inculque, avec l'accent traînant qu'ont
les « natifs » de ces pays. Ce n'est pas du
tout la même chose. 1
Ceux des Russes qui viennent à Paris
en sont quittes, quand ils se sont aperçus
qu'on ne leur enseigna qu'un singulier
idiome, n'ayant pas - cours (heureuse-
ment 1) sur les bords de la Seine, en sont
quittes, dis-je, pour une nouvelle éduca-
tion linguistique, que leur don très re-
marquable d'assimilation leur rend aisée.
Mais les autres, ceux qui n'ont pas fait le
voyage, demeurent les victimes d'une es-
pèce de mystification. Ils parlent. suisse.
D'où vient cette invasion de maîtres
helvètes et ce quasi-renoncement des pro-
fesseurs d'authentique origine française,
eux qui, par tradition, étaient les bienve-
nns en Russie? Cela tient à plusieurs cau-
ses qu'expose subtilement M. Portier
d'Arc. D'abord, les exigences du service
militaire retiennent longtemps chez eux
les Français et ont pour résultat de dé-
tourner leurs idées de l'émigration. Puis,
en France même, on a beaucoup fait (bien
que ce ne soit pas encore assez) pour les
fonctionnaires de l'instruction publique,
qui ont moins besoin qu'autrefois de cher-
cher des ressources a 1 étranger. Il y a
aussi un motif qui tient à de récentes lois
russes, lesquelles exigent des étrangers
au service de l'Etat, la connaissance de la
langue nationale. Enfin, dans les établis-
sements publics russes, les honoraires des
professeurs n'ont pas augmenté en pro-
portion de la cherté de la vie et ils sont,
présentement, assez peu rémunérateurs.
Ce n'est pas la peine de quitter son pays
si l'existence ne doit pas être meilleure
ailleurs.
Qu'est-il arrive ? Ce sont les jeunes gens
suisses, pédagogues blonds à lunettes
d'or, qui se sont précipités vers la Rus-
sie. Ils ne sont point gênés par les obli-
gations militaires ; ils n'ont pas grand'-
chose à perdre, puisque leur petite patrie
ne leur offre pas beaucoup de débouchés,
et, nés dans un pays où l'on est générale-
ment un peu plus qu'économe, ils se con-
tentent d'appointements insuffisants pour
des Français. Ils sont aussi plus simples
qu'eux; ils ne sont pas portés à discuter
les méthodes d'enseignement qu'on leur
impose, leur semblassent-elles vicieuses.
Ils ne sont peut-être pas de fameux pro-
fesseurs, mais ils deviennent de parfaits
fonctionnaires. Voilà comment ils ont ac-
caparé les élèves.
Ces marchands de français en appren-
nent un drôle à leurs disciples, et il suffit
d'avoir passé quelques jours dans la cité
de Calvin ou sur les rives du Léman
(qu'on prononce Lemin, là-bas, entre pa-
renthèses), pour se faire une idée de ce
que peuvent être ces cours fallacieux.
C'est cela qui doit donner une crâne idée
de notre langue, de sa légèreté, de ses
traits aiguisés, de -- sa -- franche - allure, aux
jeunes Russes 1 M. Portier d'Arc a rai-
son : c'est à faire frémir 1 L'harmonie
de notre doux français, sa vivacité, son
pittoresque, que devient tout cela en pas-
sant par la bouche des grammairiens hel-
vètes !
Il paraît qu'ils l'ont simplifié à leur ma-
nière, le français ! Ils ont imaginé six
conjugaisons de verbes, par exemple, en
des manuels baroques, où ce qui est le
plus clair et le plus simple du monde se
hérisse de difficultés insurmontables.
C'est à les dégoûter d'une langue qu'ils ai-
ment d'instinct, les pauvres petits Mos-
coves!
On leur apprend qu'on dit « restaura-
tion » au lieu de restaurant, qu'un anni-
versaire s'appelle « la fête de nom », que
le premier étage d'une maison se désigne
par le mot de « bel-étage », que, pour un
timbre-poste, on dit « une marque », que,
quand on va deux à deux, on « marche
par paire ». que « va-t'-y en » remplace
avantageusement « va-t'en », qu'on ne fait
pas un voyage, mais « une course », qu'on
ne demande pas le prix d'une chose, mais
sa «finance », ou que l'interjection fami-
lière qui répond à tous les besoins de la
conversation. française, est : « Pas plus ! »
Et la prononciation! On leur assure
qu'il est élégant de dire : longuemfnt,
passablemint, agréable, un fusile..,.
Qu'est-ce que vous voulez que fassent les
jeunes Russes contre les assertions de
leuro professeurs, d'autant plus redouta-
bles qu'elles sont convaincues ?
Et si ce n'était que cela, encore ! Mais
ce sont de prodigieux « classiques » que
les maîtres suisses proposent aux écoliers
qu'ils éduquent. Dame ! ils gardent, à l'é-
tranger, un faible pour leurs auteurs na-
tionaux, et, pour eux, le genevois Toepfer
dégote joliment Bossuet, Racine ou Vol-
taire. Ils sont condamnés au Toepfer à
perpétuité, en guise densouverain maître
de notre langue, les infortunés adolescents
slaves, et, quelle que soit leur légitime
incrédulité naturelle, il faut qu'ils se per-
suadent que la Bibliothèque de mon oncle
et M. Cryptogame sont ce qui a été écrit
de plus accompli en français.
C'est que nos auteurs, ils les trouvent,
dans leur pudibonderie protestante, un
peu légers ! M. Portier d'Arc cite, entre
autres exemples, un recueil de morceaux
choisis où, .à côté de pages tirées des plus
endormants pasteurs suisses, figure ce-
pendant le Lac, de Lamartine. Mais
c'est un Lac édulcoré, arrangé et expurgé
soigneusement. Au lieu de :
Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire.
Tout dise : ils ont aimé !
l'austère pédagogue a imprimé :
* Tout dise : ils ont rêvé J
La rime n'y est plus, mais qu'importe t
La morale — cette morale particulière, ne
se souciant plus, dans son zèle, de la rai-
son, qu'on a exaltée au récent congrès de
Lausanne — est sauve.
Voici les révélations assez singulières
qui nous sont faites par un homme qui
connaît bien tout ce qui se passe en Rus-
sie. Les Suisses insidieux sont tout sim-
plement en train d'y déshonorer la langue
et la littérature françaises, apprises avec
tant de bonne volonté par les collégiens
russes, qui croient ingénument être ins-
truits pour de bon.
Mon Dieu f je ne veux aucun mal aux
Suisses. à la condition qu'ils ne s'en
prennent pas, fût-ce inconsciemment,
aussi férocement au français. Cette si-
tuation valait la peine d'être signalée.
Est-ce que, en ce moment de relations
particulièrement cordiales, les Russes ne
pourraient pas faire un petit effort pour
posséder des professeurs de français qui
sachent vraiment notre langue ? Nous
autres, quand, dans nos lycées, nous
avons ouvert des cours de russe, nous
n'avons pas été chercher, pour l'ensei-
gner, d'autres maîtres que des Russes au-
thentiques.
- Paul Ginisty.
LES SUCCESSIONS
M. Barodet, député de la Seine, se propose de
déposer, dès la rentrée, une proposition de loi ten-
dant à modifier la législation actuelle sur l'héri-
tage en ligne collatérale.
MYSTÉRIEUSE DISPARITION
On parle beaucoup en ce moment, dans le monde
policier, de la disparition d'un secretaire de com-
missaire de police. Il n'a pas paru à son bureau
depuis deux jours et à son domicile on ne sait ce
qu'il est devenu.
DESSOUS DE CARTES n)
LETTRE D'UN VIEUX PONTE
IV
Au rédacteur du XIXe Siècle.
Monsieur le rédacteur, -
Fermera-t-on, ne fermera-t-on pas ses tri-
pots ? Le Bertrand du Washington, qui a le
défaut d'être vantard, affirme qu'on ne fer-
mera jamais le Washington. Il annonce qu'on
fermera quelques tripots de bas étage et peut-
être le Betting de son frère ; mais il est trop
bien, dit-il, avec la préfecture, il lui a rendu
trop de services de toute espèce, pour qu'on
touche au Washington. --'
Je n'ai pas l'honneur de connaître M. Lé-
pine, mais je suis bien sûr qu'il serait peu
flatté s'il savait dans quels termes et sur quel
ton parle de lui ce Bertrand. Cet ancien do-
mestique se vante d'avoir, à son tour, domes-
tiqué à son profit le gouvernement et la pré-
fecture de police, ni plus ni moins. A l'en-
tendte, toutes les autorités seraient à ses
tendre, Ah ! il se moque pas mal de la police.
gages.
Elle peut d'ailleurs venir dans son tripot, il
la défie bien de découvrir ses trucs 1
Le Bertrand du Betting est moins fier. Il
avait, vous le savez, donné sa démission à la
suite de son affaire avec M. Schwob et il s'é-
tait fait remplacer par son associé Porte,
qui a été, je crois, président de la Société des
courses de Maisons-Laffitte, et qui n'a pas,
autant qu'il m'en souvient, quitté cette situa-
tion précisément de son plein gré.
Depuis, ce Porte, à son tour, a disparu oa
fait semblant de disparaître; mais Cuvellier,
le secrétaire de Bertrand, est resté, mais
Combe, autre créature de Bertrand, est
également resté. Henry d'ailleurs, c'est ainsi
qu'on appelle familièrement le propriétaire
du Betting, n'est pas loin. Le Betting est au
no 4 de la rue Mogador. Henry est là tout
près, dans sa boutique à l'enseigne de la Ro-
sée-Crème, — tant pis pour la réclame ! —
46, boulevard Haussmann, presque au coin de
la même rue Mogador.
La Rosée-Crème, direz-vous, qu'est-ce que
cela peut bien être ? Eh ! parbleu, c'est l'en-
seigne de la parfumerie d'Henry Bertrand.
Les tenanciers de tripots ont la manie de la
parfumerie. Ils croient que ça porte bonheur.
Bloch, de l'Escrime, a la sienne.
Charles Bertrand à la Rosée-Crème, nom
délicieux 1 Aussitôt que la partie est com-
mencés avec le banquier de la maison, c'est
un perpétuel va-et-vient du Betting à la Rosée-
Crème pour prendre les ordres du vrai, du
seul patron, d'Henry Bertrand. — A celui-ci on
peut prêter tant, à celui-là tant, — et l'on
continue à signer des acceptations en blane
dans le « confessionnal ». -
Le « confessionnal », c'est la pièce qui se
trouve à côté de « l'écurie » — l'écurie, dans
le langage des habitués, cela veut dire la cour
vitrée dont Bertrand a fait la salle de jeu du
Betting.
Voici, M. Lépine, comment on respecte le
paragraphe 2 de votre ukase, « d'avoir à
supprimer absolument les prêts de quelque
nature qu'ils soient que l'administration
fait aux joueurs D.
(1) Voir les numéros du XIX* Siècle datés des
6, 7, et 8 octobre. - -
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