Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1896-02-08
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 08 février 1896 08 février 1896
Description : 1896/02/08 (N9465). 1896/02/08 (N9465).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 29/04/2013
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N° 9465. - Samedi S Février 1896
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NOS LEADERS
LA SITUATION
Il faut bien le dire : Partout, dans
ce pays, les ennemis de la République
démocratique relèvent la tête. Rare-
ment même, ils ont eu autant d'audace.
Il doit y avoir un mot d'ordre, car de
tous côtés, on n'entend parler que de
conspirations. On coiispire à la. Cham-
bre; on conspire au Sénat; on cons-
pire dans l'administration ; on conspire
ans le monde clérical. Et bien des
ictes démontrent cette entente. C'est
j'abord l'attitude des élus du suffrage
restreint; c'est ensuite le bruit que
font les conservateurs du palais Bour-
bon autour de leurs projets contre le
ministère Bourgeois; c'est encore la
ligne de conduite que, dans la pro-
vince, le clergé a adoptée, avec l'appui
avéré, patent, de la magistrature, pour
créer des difficultés au gouvernement.
Le clergé est surtout d'une insolence
invraisemblable. Nous assistons, en
ce moment, à une véritable insurrec-
tion des tonsurés contre la presse et
contre la République. Ne touchez pas
aux curés, ne critiquez pas les prati-
ques religieuses et ne nez pas de la
propagande cléricale, eu bien prenez
garde aux tribunaux. Tous les prêtres
d'un département se coaliseront contre
vous et vous assigneront devant leurs
bons amis les juges. Pour mettre de
l'argent dans leurs poches, sous forme
de dommages et intérêts? Non pas,
quoique l'envie ne leur en fasse pas
défaut. Mais pour essayer de vous dé-
considérer et de vous ruiner; pour
vous procurer mille ennuis, pour faire
pièce au gouvernement.
#**
Ainsi, vous connaissez le procès in-
tenté à l'Echo de Paris, par les prêtres
de l'arrondissement de Tarbes, et
les trois autres que font à d'autres
confrères les curés de la Savoie. Mais
l'exemple que je veux donner est en-
core plus typique.
Il existe, dans l'arrondissement de
Saint-Flour (Cantal), un vaillant petit
journal, la Haute Auvergne, dont le di-
recteur s'appelle Mathieu. Depuis qu'il
en est propriétaire, M. Mathieu mène
une vive campagne contre le clérica-
lisme tout-puissant dans ce petit coin
du massif central. Aussi les prêtres lui
ont-ils voué une haine irréconciliable.
Mais M. Mathieu est marié à une
jeune femme, catholique pratiquante
que, d'ailleurs, il laisse très volontiers
remplir ses devoirs religieux. Cette
jeune femme est, paraît-il, atteinte
d'une maladie de cœur;lamoindre émo-
tion pourrait lui être fatale ; à cette
heure même, elle est tellement ma-
lade que le curé de sa paroisse lui a
administré l'extrême-onction, sur sa
demande.
Après cela, le clergé de l'arrondisse-
ment a considéré qu'il était en règle
avec le seigneur, puisque si Mme Ma-
thieu, par malheur, venait à mourir,
elle irait tout droit au paradis. Et,
alors, il s'est attaqué au mari.
Quelques jours auparavant, M.
Mathieu avait écrit un article de polé-
mique assez vive contre les ecclésias-
tiques en général. En aucune façon, il
n'avait attaqué les curés de l'arrondis-
sement de Saint-Flour. N'empêche que
ces derniers, au nombre de 415, se
sont unis pour l'assigner devant le
tribunal correctionnel. Ils lui repro-
chent de les avoir diffamés collective-
ment et lui réclament 40,000 fr. de
dommages-intérêts.
Le procès a été déjà appelé. Et le
président du tribunal, réactionnaire
militant, l'a renvoyé, pour être plaidé
au fond et en jouant sur le nom de
Mathieu, à 1 audience qui sera te-
nue le jour de la Saint-Mathieu. Que
dites-vous de cette ironie de juge ina-
movible ?
On m'affirme que c'est la Croix, la
feuille cléricale bien connue, qui a
donné à tous les tonsurés le conseil de
traduire en justice les journalistes
coupables d'irrévérenco à l'égard de
la religion et de ses prêtres. J'ignore
le nom du jurisconsulte que la Croix a
consulté, mais je me permettrai de
lui faire remarquer que ces procès suc-
cessifs ne tiennent pas debout. La loi
sur la presse exige, pour qu'il y ait
diffamation, à l'égard d'une ou plu-
sieurs personnes, que ces personnes
aient été suffisamment désignées.
La Croix le sait sans aucun doute,
mais tout le temps que le procès dure,
celui contre qui il est fait dépense de
l'argent, est ennuyé au delà de toute
expression. Dans les petites villes,
pour peu qu'il soit de l'endroit, les
dévots le regardent comme un pesti-
féré et lui suscitent mille misères.
Dans le cas de M. Mathieu — ah!
que M. Viviani qui va le défendre aura
de jolies révélations à faire !—le calcul
est beaucoup plus cruel. Maintenantqae
Mme Mathieu a reçu les derniers sacre-
ments etqu'elle est sûre d'éviter l'enfer,
inême le purgatoire, elle peut mourir.
Si elle apprend ce que les curés font à
son mari, elle éprouvera un tel saisis-
sement qu'elle est capable d'en tré-
passer. Or, M. Mathieu l'adore et tous
les républicains de la petite ville sou-
tiennent que les prêtres qui le pour-
suivent seraient heureux de sa pro-
fonde douleur.
.*
N'est-ce pas une honte? Et la raison,
je vous prie, de ces menées cléricales
Je n'en vois pas d'autre que celle-ci :
.Lorsque le ministère Bourgeois a été
formé, les adversaires de la Républi-
que ont cru qu'il allait, en peu de
temps, remplacer les fonctionnaires
que la réaction avait nommés par des
fonctionnaires républicains. Or, le mi-
nistère Bourgeois a hésité ; il n'a pris
des mesures sévères que contre quel-
ques administrateurs trop compromis.
Sans doute, il était bien décidé à faire
une épuration sérieuse, mais il s'occu-
perait plus tard de cette épuration.
Je suis persuadé que M. Bourgeois
avait de bons motifs pour agir de cette
façon. Le malheur est que les ralliés
et les conservateurs ne l'ont pas jugé
ainsi. Là où il n'y avait qu'une tacti-
que gouvernementale, ils ont vu, eux,
une prouve de la faiblesse du gouver-
nement. De tous côtés, ils ont repris
courage; les fonctionnaires qui les
protégeaient sous l'ancien ministère
les ont imités et voilà pourquoi M.
Bourgeois, ses collaborateurs, les radi-
caux et la République radicale sont
combattus à outrance.
Et voilà pourquoi encore le Sénat
s'insurge;'les modérés de la Chambre
recommencent leurs complots, les
réactionnaires s'agitent. Le ministère
n'ayant pas voulu foncer sur eux et
leur enlever les appuis dont ils dispo-
sent en province, ils en concluent que
le ministère a peur et ils escomptent
sa chute prochaine.
*
Oh! le mal n'est pas encore bien
grand et le ministère n'est pas encore
à terre! Pourtant, celui-ci aurait tort,
selon moi, de négliger ces avertisse-
ments, car ils sont symptomatiques.
Qu'il aille donc droit à l'ennemi.
Qu'une fois pour toutes, il se dise bien
qu'on ne gouverne qu'avec son parti.
Que chaque ministre s'empare d'une
hache et pratique des coupes sombres
dans le monde des fonctionnaires où
les cabinets conservateurs ont intro-
duit tant d'adversaires de nos institu-
tions. C'est urgent. Si le ministère ne
le fait pas, un beau jour il sera pris
dans un traquenard et on lui coupera
doucement la gorge entre deux portes.
Si, au contraire, il le fait, vous ver-
rez tout aussitôt le Sénat devenir doux
comme un mouton, la colère des dé-
putés conservateurs tomber d'un seul
coup pour faire place à la crainte, les
curés rentrer dans le rang.
Du courage, monsieur Bourgeois,
l'opinion publique est avec vous. Mon-
trez à la réaction que ce n'est plus le
pape qui est le maître de ce pays.
CHARLES BOS.
Nous publierons demain un article
de HI. Camille Peiletan.
LES SCANDALES FINANCIERS
Ce que fait la justice
Chemins de fer du Sud- Les affaires
de Cornélius Herz
Depuis plusieurs jours, le parquet de la
Seine a procédé à une série de perquisitions
et d'interrogatoires relatifs à des affaires
sur lesquelles les journaux ont été jusqu'à
présent imparfaitement renseignés.
Nous croyons être en mesure de mettre
un peu de lumière dans les opérations que
poursuit actuellement la justice.
On a dit que les perquisitions qui ont eu
lieu dans la journée de mercredi, soit chez
May, soit à la Banque internationale, se rat-
tachaient à l'affaire des chemins de fer
du Sud.
C'est la vérité, mais nos renseignements
nous permettent d'affirmer que les papiers
saisis ont mis les magistrats instructeurs
sur plusieurs voies qui vont être suivies.
D'abord il convient de dire que la semaine
dernière le gouvernement, dans le conseil
de cabinet qu'il tient le jeudi, aurait décidé
d'ouvrir une instruction judiciaire générale
sur toutes les affaires auxquelles a été mêlé
Cornélius Herz, aussi bien celles sur les-
quelles des informations avaient été ouvertes
que sur celles qui n'ont donné lieu à aucune
investigation de la justice.
Or, la nature des papiers saisis dans di-
verses perquisitions ont donné la conviction
à la justice que l'affaire de la cession du
monopole de la compagnie des Téléphones à
l'Etat pouvait être une affaire à instruire.
C'est ce qui expliqua la perquisition qui a eu
lieu à l'ancienne compagnie des Téléphones.
Il est donc certain aujourd'hui que le garde
des sceaux a donné l'ordre au procureur
général de rechercher, dans un certain nom-
bre d'affaires où a été mêlé le malade de
Bournemouth — et elles sont nombreuses
— les délits ou les aimes qui auraient pu cire
commis.
Pour ne parler que de deux ou trois af-
faires, qu'on a appelées couramment à l'épo-
que les affaires de Cornélius Herz, citons
justement cette affaire des téléphones et l'af-
faire du câble des Antilles. 11 y a encore,
qu'on le veuille ou non, l'affaire de Panama,
où Cornélius Herz joua un rôle considé-
rable.
Pour nous résumer et pour mettre un peu
d'ordre dans ce fatras d'informations et
do suppositions, nous pouvons affirmer qu'à
côté de l'affaire des chemins de fer du Sud
qui est poussée très activement, il y a une
information — peuMtre préliminaire — sur
les actes de Cornôlius fiera-
A ce propos, il est atile de faire un rap-
prochement. Hier, dans les couloirs de la
Chambre, on prétendait que lé gouverne-
ment avait décidé de faire une enquête sur
ces faits, après avoir pris connaissance d'un
dossier, communiqué au conseil, par le mi-
ni sère des affaires étrangères.
On se demandait si ce dossier ne conte-
nait pas les papiers du docteur Herz, saisis
par la police anglaise et qui enfin auraient
été remis à notre gouvernement.
Nous n'affirmons pas que ce renseigne-
ment soit entièrement exact, mais il nous
était impossible de ne pas le signaler.
M. Le Poittevin, qui n'a pas encore dé-
pouillé la correspondance saisie au cours des
perquisitions et qui n'a pu, jusqu'à ce jour,
prendre connaissance des livres placés sous
scellés, ne peut donc se faire encore une
conviction complète au sujet du rôle exact
joué par les intermédiaires.
Le juge d instruction avait convoqué à son
cabinet MM. Christophle, ex-gouverneur du
Crédit foncier, le comte Lemercier, Rouvier
et Passy, ayant exercé les fonctions d'admi-
nistrateurs des sociétés intermédiaires.
Seuls MM. Christophle et le comte Lemer-
cier se sont rendus chez le juge. MM. Rou-
vier et Passy, actuellement absents de Paris,
n'ayant pu être touchés par la convocation.
M. Le Poittevin doit entendre aujourd'hui
M. Jules Roche, dont le nom avait déjà été
prononcé plusieurs fois, au sujet de l'instruc-
tion qu'avait commencée M. Rempler et qu'il
a remise entre les mains de M. Le Poittevin.
« Dans une affaire de cette nature, a dit
M. Le Poittevin aux informateurs qui l'in-
terrogeaient, on no peut procéder qu'avec
lenteur, en raison même de la prudence
qu'il convient d'apporter à son instruction ».
Aussi ne s'attend-on pas à de nouvelles
opérations avant que, par l'examen des dos-
siers dont il a la matière entre les mains,
M. Le Poittevin n'ait absolument éclairé sa
religion et se soit fait une conviction pro-
fonde.
LES CHEMINS DE FER DU SUD
On prétendait hier dans les couloirs de la
Chambre que M. Louis Barthou allait inter-
peller le gouvernement sur la nomination
de M. Le Poittevin comme juge d'instruc-
tion de l'affaire des chemins de fer du Sud,
en remplacement de M. Rempler, qui en a
été dessaisi.
Cette nouvelle est inexacte, M. Barthou
n'a jamais eu l'intention qu'on lui a prêtée.
————————————
LES PHOSPHATES D'ALGÉRIE
On a nommé hier à la Chambre la com-
mission qui doit examiner le projet de loi
réglementant les conditions dans lesquelles
seront faites à l'avenir les concessions de
phosphates algériens. Ont été élus : MM.
Noël, Samary, Théophile Goujon, le Troa-
dec, Marcel Habert, Néron, Berteaux, Cha-
voix, Lesage, André Roille et Sonnery-
Martin.
La majorité de la commission est favo-
rable aux principales dispositions du projet
du goavernement.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN :
Ouverture de la fête foraine de la place Dau-
mesnil.
— Dernier délai pour l'envoi aux sous-préfets
du rapport des maires sur le service admi-
nistratif et la surveillance des prisons.
— Durée du jour : 10 h. 50 m.
CHEZ NOUS
- Séance hier à l'Académie française,
présidée par M. Cherbuliez, directeur, as-
sisté de MM. Henry Houssaye, chancelier,
et Gaston Boissier, secrétaire perpétuel.
La compagnie a accepté le legs fait par
Mme Pecqueux née Salomon, d'une maison
sise à Saint-Omer.
Deux prix — les prix Salomon, en mé-
moire de M. Jean-Baptiste Salomon, oncle
de la testatrice — seront fondés avec le
revenu ou les intérêts du prix en cas de
vente de la dite maison, et décernés à deux
personnes pauvres qui se seront distinguées
par des actes de dévouement.
- L'affaire Cardane-Lalou :
Nous avons raconté comment l'un des
témoins de M. Lalou avait informé mer-
credi les témoins de M. Cardane, le co-
lonel Dérué et M. Mazereau, que M. Au-
bey, son collègue, était matériellement
empêché de se rendre au rendez-vous
qui devait avoir lieu ce soir-là.
L'entrevue avait donc été remise à hier
trois heures et demie.
A quatre heures moins cinq, les témoins
de M. Lalou ne s'étant pas présentés, les
amis de M. Cardane ont décidé qu'ils con-
sidéraient l'affaire comme terminée.
-- Hier a été célébré à Saint-Honoré-
d'Eylau, au milieu d'une affluence de per-
sonnalités artistiques et littéraires, le ma-
riage de Mlle Leroy-Beaulieu avec M.
Maxime Renaudin, inspecteur des fi-
nances.
- Hier matin, a été célébré le ma-
riage de M. Henry Béclard, fils du regretté
doyen de la Faculté de médecine, avec
Mlle Marie-Rose Granet, fille de M. Ro-
bert Granet, contrôleur de l'administration
de l'armée.
- Le président de la République a
reçu hier matin les députés, le préfet de la
Loire-Inférieure et le maire de Nantes,
qui l'ont invité à visiter cette année le
département.
M. Félix Faure a déclaré qu'il ne pour-
rait pas comprendre la Loire-Inférieure
dans l'itinéraire de son prochain voyage en
Bretagne. Mais il a laissé espérer qu'il se-
rait possible de faire figurer la ville de
Nantes dans le programme du voyage qui
sera organisé vraisemblablement dans le
courant de septembre.
Les sénateurs, députés et préfet de la
Seine-Inférieure, la municipalité et les co-
mités des expositions nationale, coloniale
et ouvrière de Rouen, en 1896, sont venus
renouveler au président de la République
l'invitation de visiter ces expositions.
Le président a aççeuté cette invitation ;
mais il n'a pu fixer l'époque à laquelle il
pourra effectuer ce déplacement.
M. Félix Faure à reçu enfin le bureau de
la société « les Parisiens de Paris », qui lui
a remis un exemplaire de l'annuaire de
cette société ; les préfets de l'Yonne et de
la Lozère; M. Frandin, chargé d'affaires de
France à Bogota ; le contre-amiral de Cour-
tilles; M. Dubreuil, procureur général à
Tananarive.
- On a célébré hier, au cimetière
Montparnasse, l'anniversaire de la mort de
Maria Deraismes.
Différents discoùrs ont été prononcés
sur la tombe de la regrettée libre penseuse,
par Mme A. Valette, Mme Paule Minck,
MM. Jean Bernard, Georges Martin, Jules
Gerbaud, Ed. Boulard, etc.
—Hier ont eu lieu à Notre-Dame-de-
Lorette, les obsèques de notre ancien et
très distingué confrère M. Jacques Bullier,
l'un des fondateurs de l'agence Havas qui,
au début, portait le nom d'agence Havas-
Bullier.
M. Bullier était âgé de soixante et onze
ans. Il était le beau-père de M. Reynaud,
maître des requêtes au conseil d'Etat
- On annonce la mort du sculpteur
et graveur en médailles Auguste Barre.
Jean-Auguste Barre était né à Paris d'un
père également médailleur et qui devint en
1842 graveur général des monnaies, après
avoir exécuté les coins de la plupart des
médailles commémoratives frappées sous
Louis-Philippe.
Auguste Barre n'était pas, comme l'ont
dit certains de nos confrères, le graveur
des monnaies du second empire, c'était
son frère, Désiré-Albert Barre, mort en
1878, qui fut chargé de ces travaux. Au-
guste Barre était âgé de quatrevingt-cinq
ans.
-- Nos confrères Avonde, Aubry, Bé-
chet et Noilhan ont été élus, hier, au pa-
lais Bourbon, syndics de l'Association des
journalistes parlementaires.
Un nouveau char vient de s'ajouter
à ceux déjà nombreux qui feront, durant
le carnaval, cortège au triomphe du bœuf
gras : le char de la Bière française.
Gambrinus, en effet, défilera dans sa
bonne ville de Paris, traîné sur un énorme
camion de brasseur décoré de gerbes
d'orges, de rameaux, de houblons et char-
gé de jolies Alsaciennes, Lorraines et Fla-
mandes, qui seront groupées autour d'un
foudre colossal rempli de bière.
Un porte-enseigne à cheval escorté de
huit garçons brasseurs précédera Gambri-
nus et sa cour.
- On se prépare, à l'Ecole d'Alfort, à
parodier joyeusement l'automobilisme le
jour de la mi-carême.
Suivant nos futurs vétérinaires, le sys-
tème de locomotion à la mode mettra les
chevaux, non « à pied à, mais en voiture.
Aussi verra-t-on, dans la cavalcade des
étudiants, un landau classique où trône-
ront deux superbes représentants de l'es-
pèce chevaline, savourant gravement un
énorme londrès.
Façon ultra-moderne de rééditer les
« coursiers fumants » dont parle le poète.
A L'ETRANGER
L'arrestation du fils d'un important
parlementaire allemand, feu Schrorlemer
Alst, pour mise en circulation de fausses
traites, fait en ce moment un bruit énorme
à Berlin.
- Les cigognes ont fait leur appari-
tion en Alsace ; elles sont en avance de
trois semaines. De plus, on a vu des
bandes d'alouettes se diriger vers le Nord.
Autant de signes — à en croire l'opinion
des cultivateurs — que l'hiver est terminé
et que le printemps est tout proche.
Le Passant.
L'AFFAIRE FRIBOURG
Au ministère des postes et télégraphes,
on se montre très surpris des notes parues
dans les journaux, annonçant la fuite de M.
Fribourg, inspecteur général des postes et
télégraphes.
Ce haut fonctionnaire s'est éloigné, en ef-
fet, de Paris depuis quelques jours, mais
avec un congé régulier pour accompagner à
Nice sa femme souffrante.
Nous croyons savoir que M. Fribourg est
encore actuellement à Nice.
Quant à l'affaire de la Société des télépho-
nes, à laquelle se serait rattaché, d'après
nos confrères, le départ de M. Fribourg, on
déclare, à la direction des postes et télégra-
phes, n'en avoir aucune connaissance.
L'AFFAIRE LEBAUDY
M. Meyer met la dernière main à son rap-
port. Il interrogera, comme nous l'avons dit
hier encore, quelques témoins avant de
transmettre son rapport au parquet, mais
nous pouvons d'ores et déjà affirmer que la
conviction du juge est faite et bien faite et
que les derniers témoignages entendus ne la
pourront changer.
On croit donc qu'avant une semaine l'af-
faire Max Lebaudy sera complètement ins-
truite et mise à point pour la comparution
des inculpés devant le tribunal correctionnel.
UN DÉPUTÉ POURSUIVI
Le président de la Chambre a annoncé
hier, à la fin de la séance, qu'il était saisi
d'une demande en autorisation de poursuites
qui va être renvoyée aux bureaux.
Cette demande qui est basée sur un article
du Révei de Bazat, jugé diffamatoire par le
plaignant, vise M. Constant, député républi-
cain de la Gironde, gérant de ce journal.
L'AFFAIRE PAPILUl-GMAB DE BALZAN
On sait qu'à la suite de l'agression à la-
quelle s'est livré M. Garran de Balzan, sé-
nateur des Deux-Sèvres, contre M. Papil-
laud, celui-ci a demandé au Sénat l'autorisa-
tion de le poursuivre.
La commission qui examinera la requête
du rédacteur de la Libre Parole a été nom-
mée hier. Elle est composée de MM. Thurel,
Tézenas, Loul'ties, Tiflaye, Alexandre Le-
fèvre, général Grévy, Delpech, Coste, oppo-
sés à la demande, et Anglès, favorable.
La Correspondance de Victor Hugo
Un de nos confrères avait annoncé la pu-
blication prochaine du premier volume de la
Correspondance de Victor Hugo. Cette nou-
velle n'avait pas été sans nous étonner. Nous
nous sommes rendu auprès de la personna-
lité qui pouvait, mieux que toute autre, nous
donner des renseignements précis à ce sujet;
nous avons été sonner à la porte de M. Paul
Meurice, qui, depuis la mort d'Auguste Vac-
querie, reste seul chargé de la publication
des œuvres posthumes de Victor Hugo.
On sait avec quel dévouement, double de
quelle activité, les exécuteurs testamen-
taires du grand poète ont rempli leur tâche.
Victor Hugo, disait, en une expression éner-
gique, notre regretté rédacteur en chef, Vic-
tor Hugo, depuis sa mort, fait un livre par
an. En admirant la virilité dont fait preuve,
jusque par delà la tombe, le puissant auteur
de la Légende des siècles, encore faut-il ren-
dre hommage à ceux qui savent mettre au
jour les chefs-d'œuvre répandus dans l'am-
vre éparse laissée par Hugo : M. Paul Mcu-
rice s est donné tout entier à ce vaste travail.
Après quelques minutes d'attente dans un
cabinet, dont la décoration nous donne l'oc-
casion d'apprécier Io goût artiste bien connu
du maître du logis, nous sommes introduit
auprès de lui.
— Je sais, expliquc-t-il, qu'on a annoncé
la publication de la Correspondance de Vic-
torHugo. C'est un journal anglais, je crois,
qui en a parlé le premier. Mais la nouvelle
est bien prématurée. Je suis, en co moment,
dans la partie préparatoire de mon travail.
Passer en revue toute cette volumineuse
correspondance, si compacte et si diverse à
la fois, mettre un ordre dans ce monceau de
documents, suivre à travers les écarts et les
digressions ces pensées-mères dont sera
faite la composition solide qu'on a tou-
jours admirée daRs les œuvres les plus
familières du poèto, rechercher, s'il y a lieu,
les lettres qui peuvent manquer, celles sur-
tout dont l'absence ferait trou et empêche-
rait de suivre dans leur développement pro-
gressif, la logique généreuse de cet esprit, et
la raison et la règle de cette vie de citoyen,
c'est une tâche trop sérieuse pour que je
veuille la hâter.
Les grandes divisions seront celles qui
sont indiquées par la méthode chronologique
que je veux suivre. Le premier volume nous
mènerai' sans doute jusqu/en 1835.
Mais, a ajouté M. Paul Meurice, je vous
le répète, pour donner à la légitime curio-
sité du public des renseignements sur l'inti-
mité du livre, ce serait vraiment trop tôt.
Nous en reparlerons.
H. D.
00--
L'INCENDIE DE LA DUE DE TUAIS
Un violent incendie a éclaté, hier soir, rue
de Tunis, n° 4. Seize lances ont été mises en.
manœuvre.
Le feu s'était déclaré au quatrième étage
de la maison Finot, fabricant de papiers
peints ; les débuts de l'incendie avaient été
si violents que l'on craignait pour les im-
meubles voisins.
MM. Lépine, préfet de police, Varigaut,
colonel des pompiers, étaient présents.
Le sinistre énergiquement combattu a été
maîtrisé à dix heures du soir.
Un service d'ordre très important était
commandé par l'officier de paix de l'arron-
dissement.
Les dégâts très importants ne sont pas en-
core évalués.
LE PÈRE VOIGNIER
Comme on le sait, les débats de l'affaire
du père Voignier, l'ouvrier sellier de la rue
Julien-Lacroix, commenceront devant la
cour d'assises de la Seine mercredi prochain
12 février et occuperont quatre audiences
consécutives.
Voignier est accusé : 1° d'attentats à la
pudeur, commis en 1890, sur trois jeunes
tilles, Mlles Marie Dargent, Anna Steer-
mans et Marie Baucher, alors âgées de
moins de treize ans ; 2° d'attentat à la pu-
deur et d'assassinat sur la personne d'Alice
Neux.
En ce qui concerne les attentats à la pu-
deur sur Mlles Marie Dargent, Anna Steer-
mans et Marie Baucher, toutes trois actuel-
lement détenues dans les maisons de cor-
rection de Rouen, de Nanterre et de Mont-
pellier, l'accusation semble très solidement
établie.
Il n'en est pas de même en ce qui touche
l'assassinat de la petite Neux. Si, sur ce
point, des preuves morales accablantes
pèsent sur le père Voignier, les preuves
matérielles indiscutables font tout à fait
défaut.
L'unique témoin affirmant avoir vu le père
Voignier en compagnie d'Alice Neut, est un
témoin absolument suspect. C'est le jeune
Robin, le cambrioleur condamné, il y a
quelques mois, par la cour d'assises de la
Seine, à sept ans de travaux forcés. Robin,
en sa qualité même d'ami et de quasi com-
plice du père Voignier, ne peut être cru sur
parole. Ce jeune homme, en eff et, reconnait
avoir été le pourvoyeur ordinaire de Voi-
gnier auquel, moyennant de très légères ré-
tributions, il « amenait » des petits garçons
et des petites filles. C'est lui qui aurait con-
duit Alice Neut dans la chambre même de
Voignier.
La déposition de Robin , légitimement
écartée, que reste-t-il 'pour prouver que
le père Voignier est l'assassin d'Alice Neut ?
Rien ou presque rien.
Malgré ses cinquante témoins, l'accusa-
tion sera hors d'état de fournir la preuve
indiscutable de la culpabilité de l'accusé.
On établira facilement que l'ouvrier sellier
de la rue Julien-Lacroix — ancien facteur
des postes en Algérie — avait des mœurs
honteuses. Ce sera tout.
La fameuse preuve « par le cordon de
store » de l'assassinat de la petite Neut est
loin d'être péremptoire. Il est indiscutable
que les bras d'Alice Neut, lorsqu'on a re-
trouvé le cadavre de la fillette sous l'un des
ponts des abattoirs de la Villette, étaient
serrés contre le corps à l'aide d'un cordon
de store et que précisément le cordon man-
que au store dont Voignier a fait cadeau à
un de ses amis. Mais on ne peut sérieuse-
ment conclure de là que Voignier est l'as-
sassin de la petite Neut. Rien en effet ne
ressemble plus à un cordon vert de store
qu'un autre cordon vert de store. Ce que l'on
a appelé la preuve par le cordon de store
n'est donc aucune simple présomption tout
à insuffisante pour motiver une con-
damnation capitale.
En somme, à raison même de l'absence de
preuves matérielles directes de culpabilité,
le procès Voignier sera un procès extrême-
ment intéressant et qui aura chance de dis-
traire, vingt-quatre heures durant, J'opinioa
publique dos scandales on cours.
M. MAGNIER
w^!S £ ze-J"our8' M. Magnler, l'ex-direc-
teur do J'Ewnement, sera en état d'obtenir
sa libération conditionnelle.
En effet, l'ancien sénateur du Var est à la
Conciergerie depuis le 3 octobre dernier.
Condàmné par la cour d'assises de la
Seine, pour complicité do corruption de fonc-
tionnaire, à un an de prison, il aura, le 18
février courant, fait en cellule quatre mois
et demi de prison préventive qui, comme on
sait, équivalent à six mois de prison ordi-
naire.
C'est-à-dire qu'ayant accompli la moitié de
sa peine, M. Magnier sera en droit de solli-
citer sa mise en libération conditionnelle.
LIRE PLUS LOIN :
LE SECOND PROCÈS DES 104
LA VIE DE PARIS
Par HENRY FOUQUIER
il y a vraiment quelque chose de sin-
gulièrement attristant dans ce qui se
passe en ce moment autour de nous.
Dans ce Paris, aimé quand même, que
Molière appelait déjà « la grand'ville »
et Victor Hugo « la ville-lumière », il
n'est plus question que de scandales
et des scandales les plus plats et les
plus tristes I De tous les monuments de
la capitale, églises, palais, théâtres, il
n'en est qu'un qui attire l'attention, il
n'en est qu'un qui rayonne, pour ainsi
dire et s'illumtne, c'est le Palais de Jus-
tice. Le Parlement lui-même semble ne
travailler que pour lui. Les journaux-
canards, criés par les camelots à la voix
rauque, gardent le cliché de leur titre
de chaque jour : « Un nouveau scan-
dale 1 ». On remuelps vieilles histoires
et on en découvre de nouvelles. Et des
gens se trouvent pour se réjouir de
toutes ces aventures l
Le règne de l'argent, en moins de
vingt ans, a porté ses fruits. C'est en
vain que notre pays, avec la Répu-
blique, s'est donné la forme de gouvér-
ment incontestablement la plus noble,
par définition ; c'est en vain que la dé-
faite de 1870-71 a laissé dans les cœurs
une crainte salutaire, dont la douleur
doit tenir notre patriotisme en éveil.
Rien n'y a fait. Il faudrait être aveugle
et d'un aveuglement tellement inexpli-
cable, qu'il faudrait qu'il fût volontaire,
pour ne pas constater l'abaissement des
caractères. Et cet abaissement, on ne
peut lui trouver une autre cause que la
nécessité à3 l'argent qui domine, cor-
rompt, perd la vie de la nation, sacri-
fiant constamment le travail au jeu sous
toutes ses formes. Car, de tous les
joueurs, les joueurs au baccara sont
les plus prudents, les plus honnêtes.
Et c'est encore une des formes de l'hy
pocrisie pharisienne de notre temps de
les honnir, quand les joueurs véritables
sont les gens d'affaires, les lanceurs
d'entreprises, les habitués de la Bourse
les courtiers douteux, les marchands
de leur influence qui, eux, perdent
l'argent des autres !
Si le pouvoir sait, dans la besogne
entreprise et qu'on a appelée « la les-
sive », rester impartial, aller jusqu'au
bout quand il le l'a. t, s'arrêter quand la
justice le veut, et, surtout, se montrer
égalitaire ; si, comme on commence à
le craindre, il n'applique pas une fois
de plus la détestable méthode du peu-
ple d'Israël qui chargeait de ces ini-
quités un malheureux boue émissaire,
choisi au hasard, on pourra espérer
quelque bien, chèrement acheté par le
scandale. Mais je ne crois pas qu'on
arrive à un résultat bien définitif et qui
soit de durée quand on aura ruiné,
déshonoré et condamné deux ou trois
douzaines d'individus, parmi lesquels il
y a peut-être des innocents ou des
quasi-innocents, pris parmi les journa-
listes aventureux, les faiseurs d'af-
faires et les députés prévaricateurs. En
fait de sociologie surtout, si on veut
arriver à quelque chose, il faut moins
punir que prévenir. Si on veut que nos
mœurs changent, il faut changer les
conditions de nos existences. Si on
souhaite que l'argent ne soit pas une
source de crimes, de fautes, de mat-
heurs, il faut tout faire pour mettre un
terme à sa tyrannie et pour aider à une
plus équitable distribution de ses bien.
faits, qui sont aussi incontestables.
Ceci est particulièrement vrai en ma-
tière d'usure. Il parait que, sur la
plainte du ministre de la guerre, agis-
sant au nom de la magistrature pater-
nelle qu'il exerce sur l'armée, le par-
quet poursuit en ce moment une paire
d'usuriers, qui ne sont pas des moins
farouches.Leur dossier,eff royablement
chargé, les montre exploitant les offi-
ciers et les élèves de Saint-Cyr d'une
telle façon que presque tous leur,
clients ont mal fini. Quelques-uns de
ces pauvres jeunes gens ont été expé-
diés aux compagnies de discipline ; il y
en a qui se sont suicidés. Qu'on ait mis
la main de la justice sur les auteurs de
tous ces maux, c'est bien. Mais ces
usuriers sont-ils exceptionnels? Arri-
vent-ils même à atteindre, en leurs bri-
gandages, le taux de l'usure telle que
la pratiquent légalement le fisc et le
ministère de la justice lui-même quand
il exerce des poursuites - contre les
débiteurs malheureux? Pas le moins
-~ -&, - * -
-'V
r PARIS DRTEII1:NTS-
rre ivumèro, CiKQ CE^rTIMES
ANNONCES- • •
dlux BUREAUX DU JOURNAL
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Et chez MM. LAGRANGE, CERF Il Cie
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De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 heure du matin
N° 9465. - Samedi S Février 1896
20 PLUVIOSE AU 104
-
ADMINISTRATION s 131, rue MODtmartre. lai
Adresser lettres et mandats à ldministrateur
NOS LEADERS
LA SITUATION
Il faut bien le dire : Partout, dans
ce pays, les ennemis de la République
démocratique relèvent la tête. Rare-
ment même, ils ont eu autant d'audace.
Il doit y avoir un mot d'ordre, car de
tous côtés, on n'entend parler que de
conspirations. On coiispire à la. Cham-
bre; on conspire au Sénat; on cons-
pire dans l'administration ; on conspire
ans le monde clérical. Et bien des
ictes démontrent cette entente. C'est
j'abord l'attitude des élus du suffrage
restreint; c'est ensuite le bruit que
font les conservateurs du palais Bour-
bon autour de leurs projets contre le
ministère Bourgeois; c'est encore la
ligne de conduite que, dans la pro-
vince, le clergé a adoptée, avec l'appui
avéré, patent, de la magistrature, pour
créer des difficultés au gouvernement.
Le clergé est surtout d'une insolence
invraisemblable. Nous assistons, en
ce moment, à une véritable insurrec-
tion des tonsurés contre la presse et
contre la République. Ne touchez pas
aux curés, ne critiquez pas les prati-
ques religieuses et ne nez pas de la
propagande cléricale, eu bien prenez
garde aux tribunaux. Tous les prêtres
d'un département se coaliseront contre
vous et vous assigneront devant leurs
bons amis les juges. Pour mettre de
l'argent dans leurs poches, sous forme
de dommages et intérêts? Non pas,
quoique l'envie ne leur en fasse pas
défaut. Mais pour essayer de vous dé-
considérer et de vous ruiner; pour
vous procurer mille ennuis, pour faire
pièce au gouvernement.
#**
Ainsi, vous connaissez le procès in-
tenté à l'Echo de Paris, par les prêtres
de l'arrondissement de Tarbes, et
les trois autres que font à d'autres
confrères les curés de la Savoie. Mais
l'exemple que je veux donner est en-
core plus typique.
Il existe, dans l'arrondissement de
Saint-Flour (Cantal), un vaillant petit
journal, la Haute Auvergne, dont le di-
recteur s'appelle Mathieu. Depuis qu'il
en est propriétaire, M. Mathieu mène
une vive campagne contre le clérica-
lisme tout-puissant dans ce petit coin
du massif central. Aussi les prêtres lui
ont-ils voué une haine irréconciliable.
Mais M. Mathieu est marié à une
jeune femme, catholique pratiquante
que, d'ailleurs, il laisse très volontiers
remplir ses devoirs religieux. Cette
jeune femme est, paraît-il, atteinte
d'une maladie de cœur;lamoindre émo-
tion pourrait lui être fatale ; à cette
heure même, elle est tellement ma-
lade que le curé de sa paroisse lui a
administré l'extrême-onction, sur sa
demande.
Après cela, le clergé de l'arrondisse-
ment a considéré qu'il était en règle
avec le seigneur, puisque si Mme Ma-
thieu, par malheur, venait à mourir,
elle irait tout droit au paradis. Et,
alors, il s'est attaqué au mari.
Quelques jours auparavant, M.
Mathieu avait écrit un article de polé-
mique assez vive contre les ecclésias-
tiques en général. En aucune façon, il
n'avait attaqué les curés de l'arrondis-
sement de Saint-Flour. N'empêche que
ces derniers, au nombre de 415, se
sont unis pour l'assigner devant le
tribunal correctionnel. Ils lui repro-
chent de les avoir diffamés collective-
ment et lui réclament 40,000 fr. de
dommages-intérêts.
Le procès a été déjà appelé. Et le
président du tribunal, réactionnaire
militant, l'a renvoyé, pour être plaidé
au fond et en jouant sur le nom de
Mathieu, à 1 audience qui sera te-
nue le jour de la Saint-Mathieu. Que
dites-vous de cette ironie de juge ina-
movible ?
On m'affirme que c'est la Croix, la
feuille cléricale bien connue, qui a
donné à tous les tonsurés le conseil de
traduire en justice les journalistes
coupables d'irrévérenco à l'égard de
la religion et de ses prêtres. J'ignore
le nom du jurisconsulte que la Croix a
consulté, mais je me permettrai de
lui faire remarquer que ces procès suc-
cessifs ne tiennent pas debout. La loi
sur la presse exige, pour qu'il y ait
diffamation, à l'égard d'une ou plu-
sieurs personnes, que ces personnes
aient été suffisamment désignées.
La Croix le sait sans aucun doute,
mais tout le temps que le procès dure,
celui contre qui il est fait dépense de
l'argent, est ennuyé au delà de toute
expression. Dans les petites villes,
pour peu qu'il soit de l'endroit, les
dévots le regardent comme un pesti-
féré et lui suscitent mille misères.
Dans le cas de M. Mathieu — ah!
que M. Viviani qui va le défendre aura
de jolies révélations à faire !—le calcul
est beaucoup plus cruel. Maintenantqae
Mme Mathieu a reçu les derniers sacre-
ments etqu'elle est sûre d'éviter l'enfer,
inême le purgatoire, elle peut mourir.
Si elle apprend ce que les curés font à
son mari, elle éprouvera un tel saisis-
sement qu'elle est capable d'en tré-
passer. Or, M. Mathieu l'adore et tous
les républicains de la petite ville sou-
tiennent que les prêtres qui le pour-
suivent seraient heureux de sa pro-
fonde douleur.
.*
N'est-ce pas une honte? Et la raison,
je vous prie, de ces menées cléricales
Je n'en vois pas d'autre que celle-ci :
.Lorsque le ministère Bourgeois a été
formé, les adversaires de la Républi-
que ont cru qu'il allait, en peu de
temps, remplacer les fonctionnaires
que la réaction avait nommés par des
fonctionnaires républicains. Or, le mi-
nistère Bourgeois a hésité ; il n'a pris
des mesures sévères que contre quel-
ques administrateurs trop compromis.
Sans doute, il était bien décidé à faire
une épuration sérieuse, mais il s'occu-
perait plus tard de cette épuration.
Je suis persuadé que M. Bourgeois
avait de bons motifs pour agir de cette
façon. Le malheur est que les ralliés
et les conservateurs ne l'ont pas jugé
ainsi. Là où il n'y avait qu'une tacti-
que gouvernementale, ils ont vu, eux,
une prouve de la faiblesse du gouver-
nement. De tous côtés, ils ont repris
courage; les fonctionnaires qui les
protégeaient sous l'ancien ministère
les ont imités et voilà pourquoi M.
Bourgeois, ses collaborateurs, les radi-
caux et la République radicale sont
combattus à outrance.
Et voilà pourquoi encore le Sénat
s'insurge;'les modérés de la Chambre
recommencent leurs complots, les
réactionnaires s'agitent. Le ministère
n'ayant pas voulu foncer sur eux et
leur enlever les appuis dont ils dispo-
sent en province, ils en concluent que
le ministère a peur et ils escomptent
sa chute prochaine.
*
Oh! le mal n'est pas encore bien
grand et le ministère n'est pas encore
à terre! Pourtant, celui-ci aurait tort,
selon moi, de négliger ces avertisse-
ments, car ils sont symptomatiques.
Qu'il aille donc droit à l'ennemi.
Qu'une fois pour toutes, il se dise bien
qu'on ne gouverne qu'avec son parti.
Que chaque ministre s'empare d'une
hache et pratique des coupes sombres
dans le monde des fonctionnaires où
les cabinets conservateurs ont intro-
duit tant d'adversaires de nos institu-
tions. C'est urgent. Si le ministère ne
le fait pas, un beau jour il sera pris
dans un traquenard et on lui coupera
doucement la gorge entre deux portes.
Si, au contraire, il le fait, vous ver-
rez tout aussitôt le Sénat devenir doux
comme un mouton, la colère des dé-
putés conservateurs tomber d'un seul
coup pour faire place à la crainte, les
curés rentrer dans le rang.
Du courage, monsieur Bourgeois,
l'opinion publique est avec vous. Mon-
trez à la réaction que ce n'est plus le
pape qui est le maître de ce pays.
CHARLES BOS.
Nous publierons demain un article
de HI. Camille Peiletan.
LES SCANDALES FINANCIERS
Ce que fait la justice
Chemins de fer du Sud- Les affaires
de Cornélius Herz
Depuis plusieurs jours, le parquet de la
Seine a procédé à une série de perquisitions
et d'interrogatoires relatifs à des affaires
sur lesquelles les journaux ont été jusqu'à
présent imparfaitement renseignés.
Nous croyons être en mesure de mettre
un peu de lumière dans les opérations que
poursuit actuellement la justice.
On a dit que les perquisitions qui ont eu
lieu dans la journée de mercredi, soit chez
May, soit à la Banque internationale, se rat-
tachaient à l'affaire des chemins de fer
du Sud.
C'est la vérité, mais nos renseignements
nous permettent d'affirmer que les papiers
saisis ont mis les magistrats instructeurs
sur plusieurs voies qui vont être suivies.
D'abord il convient de dire que la semaine
dernière le gouvernement, dans le conseil
de cabinet qu'il tient le jeudi, aurait décidé
d'ouvrir une instruction judiciaire générale
sur toutes les affaires auxquelles a été mêlé
Cornélius Herz, aussi bien celles sur les-
quelles des informations avaient été ouvertes
que sur celles qui n'ont donné lieu à aucune
investigation de la justice.
Or, la nature des papiers saisis dans di-
verses perquisitions ont donné la conviction
à la justice que l'affaire de la cession du
monopole de la compagnie des Téléphones à
l'Etat pouvait être une affaire à instruire.
C'est ce qui expliqua la perquisition qui a eu
lieu à l'ancienne compagnie des Téléphones.
Il est donc certain aujourd'hui que le garde
des sceaux a donné l'ordre au procureur
général de rechercher, dans un certain nom-
bre d'affaires où a été mêlé le malade de
Bournemouth — et elles sont nombreuses
— les délits ou les aimes qui auraient pu cire
commis.
Pour ne parler que de deux ou trois af-
faires, qu'on a appelées couramment à l'épo-
que les affaires de Cornélius Herz, citons
justement cette affaire des téléphones et l'af-
faire du câble des Antilles. 11 y a encore,
qu'on le veuille ou non, l'affaire de Panama,
où Cornélius Herz joua un rôle considé-
rable.
Pour nous résumer et pour mettre un peu
d'ordre dans ce fatras d'informations et
do suppositions, nous pouvons affirmer qu'à
côté de l'affaire des chemins de fer du Sud
qui est poussée très activement, il y a une
information — peuMtre préliminaire — sur
les actes de Cornôlius fiera-
A ce propos, il est atile de faire un rap-
prochement. Hier, dans les couloirs de la
Chambre, on prétendait que lé gouverne-
ment avait décidé de faire une enquête sur
ces faits, après avoir pris connaissance d'un
dossier, communiqué au conseil, par le mi-
ni sère des affaires étrangères.
On se demandait si ce dossier ne conte-
nait pas les papiers du docteur Herz, saisis
par la police anglaise et qui enfin auraient
été remis à notre gouvernement.
Nous n'affirmons pas que ce renseigne-
ment soit entièrement exact, mais il nous
était impossible de ne pas le signaler.
M. Le Poittevin, qui n'a pas encore dé-
pouillé la correspondance saisie au cours des
perquisitions et qui n'a pu, jusqu'à ce jour,
prendre connaissance des livres placés sous
scellés, ne peut donc se faire encore une
conviction complète au sujet du rôle exact
joué par les intermédiaires.
Le juge d instruction avait convoqué à son
cabinet MM. Christophle, ex-gouverneur du
Crédit foncier, le comte Lemercier, Rouvier
et Passy, ayant exercé les fonctions d'admi-
nistrateurs des sociétés intermédiaires.
Seuls MM. Christophle et le comte Lemer-
cier se sont rendus chez le juge. MM. Rou-
vier et Passy, actuellement absents de Paris,
n'ayant pu être touchés par la convocation.
M. Le Poittevin doit entendre aujourd'hui
M. Jules Roche, dont le nom avait déjà été
prononcé plusieurs fois, au sujet de l'instruc-
tion qu'avait commencée M. Rempler et qu'il
a remise entre les mains de M. Le Poittevin.
« Dans une affaire de cette nature, a dit
M. Le Poittevin aux informateurs qui l'in-
terrogeaient, on no peut procéder qu'avec
lenteur, en raison même de la prudence
qu'il convient d'apporter à son instruction ».
Aussi ne s'attend-on pas à de nouvelles
opérations avant que, par l'examen des dos-
siers dont il a la matière entre les mains,
M. Le Poittevin n'ait absolument éclairé sa
religion et se soit fait une conviction pro-
fonde.
LES CHEMINS DE FER DU SUD
On prétendait hier dans les couloirs de la
Chambre que M. Louis Barthou allait inter-
peller le gouvernement sur la nomination
de M. Le Poittevin comme juge d'instruc-
tion de l'affaire des chemins de fer du Sud,
en remplacement de M. Rempler, qui en a
été dessaisi.
Cette nouvelle est inexacte, M. Barthou
n'a jamais eu l'intention qu'on lui a prêtée.
————————————
LES PHOSPHATES D'ALGÉRIE
On a nommé hier à la Chambre la com-
mission qui doit examiner le projet de loi
réglementant les conditions dans lesquelles
seront faites à l'avenir les concessions de
phosphates algériens. Ont été élus : MM.
Noël, Samary, Théophile Goujon, le Troa-
dec, Marcel Habert, Néron, Berteaux, Cha-
voix, Lesage, André Roille et Sonnery-
Martin.
La majorité de la commission est favo-
rable aux principales dispositions du projet
du goavernement.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN :
Ouverture de la fête foraine de la place Dau-
mesnil.
— Dernier délai pour l'envoi aux sous-préfets
du rapport des maires sur le service admi-
nistratif et la surveillance des prisons.
— Durée du jour : 10 h. 50 m.
CHEZ NOUS
- Séance hier à l'Académie française,
présidée par M. Cherbuliez, directeur, as-
sisté de MM. Henry Houssaye, chancelier,
et Gaston Boissier, secrétaire perpétuel.
La compagnie a accepté le legs fait par
Mme Pecqueux née Salomon, d'une maison
sise à Saint-Omer.
Deux prix — les prix Salomon, en mé-
moire de M. Jean-Baptiste Salomon, oncle
de la testatrice — seront fondés avec le
revenu ou les intérêts du prix en cas de
vente de la dite maison, et décernés à deux
personnes pauvres qui se seront distinguées
par des actes de dévouement.
- L'affaire Cardane-Lalou :
Nous avons raconté comment l'un des
témoins de M. Lalou avait informé mer-
credi les témoins de M. Cardane, le co-
lonel Dérué et M. Mazereau, que M. Au-
bey, son collègue, était matériellement
empêché de se rendre au rendez-vous
qui devait avoir lieu ce soir-là.
L'entrevue avait donc été remise à hier
trois heures et demie.
A quatre heures moins cinq, les témoins
de M. Lalou ne s'étant pas présentés, les
amis de M. Cardane ont décidé qu'ils con-
sidéraient l'affaire comme terminée.
-- Hier a été célébré à Saint-Honoré-
d'Eylau, au milieu d'une affluence de per-
sonnalités artistiques et littéraires, le ma-
riage de Mlle Leroy-Beaulieu avec M.
Maxime Renaudin, inspecteur des fi-
nances.
- Hier matin, a été célébré le ma-
riage de M. Henry Béclard, fils du regretté
doyen de la Faculté de médecine, avec
Mlle Marie-Rose Granet, fille de M. Ro-
bert Granet, contrôleur de l'administration
de l'armée.
- Le président de la République a
reçu hier matin les députés, le préfet de la
Loire-Inférieure et le maire de Nantes,
qui l'ont invité à visiter cette année le
département.
M. Félix Faure a déclaré qu'il ne pour-
rait pas comprendre la Loire-Inférieure
dans l'itinéraire de son prochain voyage en
Bretagne. Mais il a laissé espérer qu'il se-
rait possible de faire figurer la ville de
Nantes dans le programme du voyage qui
sera organisé vraisemblablement dans le
courant de septembre.
Les sénateurs, députés et préfet de la
Seine-Inférieure, la municipalité et les co-
mités des expositions nationale, coloniale
et ouvrière de Rouen, en 1896, sont venus
renouveler au président de la République
l'invitation de visiter ces expositions.
Le président a aççeuté cette invitation ;
mais il n'a pu fixer l'époque à laquelle il
pourra effectuer ce déplacement.
M. Félix Faure à reçu enfin le bureau de
la société « les Parisiens de Paris », qui lui
a remis un exemplaire de l'annuaire de
cette société ; les préfets de l'Yonne et de
la Lozère; M. Frandin, chargé d'affaires de
France à Bogota ; le contre-amiral de Cour-
tilles; M. Dubreuil, procureur général à
Tananarive.
- On a célébré hier, au cimetière
Montparnasse, l'anniversaire de la mort de
Maria Deraismes.
Différents discoùrs ont été prononcés
sur la tombe de la regrettée libre penseuse,
par Mme A. Valette, Mme Paule Minck,
MM. Jean Bernard, Georges Martin, Jules
Gerbaud, Ed. Boulard, etc.
—Hier ont eu lieu à Notre-Dame-de-
Lorette, les obsèques de notre ancien et
très distingué confrère M. Jacques Bullier,
l'un des fondateurs de l'agence Havas qui,
au début, portait le nom d'agence Havas-
Bullier.
M. Bullier était âgé de soixante et onze
ans. Il était le beau-père de M. Reynaud,
maître des requêtes au conseil d'Etat
- On annonce la mort du sculpteur
et graveur en médailles Auguste Barre.
Jean-Auguste Barre était né à Paris d'un
père également médailleur et qui devint en
1842 graveur général des monnaies, après
avoir exécuté les coins de la plupart des
médailles commémoratives frappées sous
Louis-Philippe.
Auguste Barre n'était pas, comme l'ont
dit certains de nos confrères, le graveur
des monnaies du second empire, c'était
son frère, Désiré-Albert Barre, mort en
1878, qui fut chargé de ces travaux. Au-
guste Barre était âgé de quatrevingt-cinq
ans.
-- Nos confrères Avonde, Aubry, Bé-
chet et Noilhan ont été élus, hier, au pa-
lais Bourbon, syndics de l'Association des
journalistes parlementaires.
Un nouveau char vient de s'ajouter
à ceux déjà nombreux qui feront, durant
le carnaval, cortège au triomphe du bœuf
gras : le char de la Bière française.
Gambrinus, en effet, défilera dans sa
bonne ville de Paris, traîné sur un énorme
camion de brasseur décoré de gerbes
d'orges, de rameaux, de houblons et char-
gé de jolies Alsaciennes, Lorraines et Fla-
mandes, qui seront groupées autour d'un
foudre colossal rempli de bière.
Un porte-enseigne à cheval escorté de
huit garçons brasseurs précédera Gambri-
nus et sa cour.
- On se prépare, à l'Ecole d'Alfort, à
parodier joyeusement l'automobilisme le
jour de la mi-carême.
Suivant nos futurs vétérinaires, le sys-
tème de locomotion à la mode mettra les
chevaux, non « à pied à, mais en voiture.
Aussi verra-t-on, dans la cavalcade des
étudiants, un landau classique où trône-
ront deux superbes représentants de l'es-
pèce chevaline, savourant gravement un
énorme londrès.
Façon ultra-moderne de rééditer les
« coursiers fumants » dont parle le poète.
A L'ETRANGER
L'arrestation du fils d'un important
parlementaire allemand, feu Schrorlemer
Alst, pour mise en circulation de fausses
traites, fait en ce moment un bruit énorme
à Berlin.
- Les cigognes ont fait leur appari-
tion en Alsace ; elles sont en avance de
trois semaines. De plus, on a vu des
bandes d'alouettes se diriger vers le Nord.
Autant de signes — à en croire l'opinion
des cultivateurs — que l'hiver est terminé
et que le printemps est tout proche.
Le Passant.
L'AFFAIRE FRIBOURG
Au ministère des postes et télégraphes,
on se montre très surpris des notes parues
dans les journaux, annonçant la fuite de M.
Fribourg, inspecteur général des postes et
télégraphes.
Ce haut fonctionnaire s'est éloigné, en ef-
fet, de Paris depuis quelques jours, mais
avec un congé régulier pour accompagner à
Nice sa femme souffrante.
Nous croyons savoir que M. Fribourg est
encore actuellement à Nice.
Quant à l'affaire de la Société des télépho-
nes, à laquelle se serait rattaché, d'après
nos confrères, le départ de M. Fribourg, on
déclare, à la direction des postes et télégra-
phes, n'en avoir aucune connaissance.
L'AFFAIRE LEBAUDY
M. Meyer met la dernière main à son rap-
port. Il interrogera, comme nous l'avons dit
hier encore, quelques témoins avant de
transmettre son rapport au parquet, mais
nous pouvons d'ores et déjà affirmer que la
conviction du juge est faite et bien faite et
que les derniers témoignages entendus ne la
pourront changer.
On croit donc qu'avant une semaine l'af-
faire Max Lebaudy sera complètement ins-
truite et mise à point pour la comparution
des inculpés devant le tribunal correctionnel.
UN DÉPUTÉ POURSUIVI
Le président de la Chambre a annoncé
hier, à la fin de la séance, qu'il était saisi
d'une demande en autorisation de poursuites
qui va être renvoyée aux bureaux.
Cette demande qui est basée sur un article
du Révei de Bazat, jugé diffamatoire par le
plaignant, vise M. Constant, député républi-
cain de la Gironde, gérant de ce journal.
L'AFFAIRE PAPILUl-GMAB DE BALZAN
On sait qu'à la suite de l'agression à la-
quelle s'est livré M. Garran de Balzan, sé-
nateur des Deux-Sèvres, contre M. Papil-
laud, celui-ci a demandé au Sénat l'autorisa-
tion de le poursuivre.
La commission qui examinera la requête
du rédacteur de la Libre Parole a été nom-
mée hier. Elle est composée de MM. Thurel,
Tézenas, Loul'ties, Tiflaye, Alexandre Le-
fèvre, général Grévy, Delpech, Coste, oppo-
sés à la demande, et Anglès, favorable.
La Correspondance de Victor Hugo
Un de nos confrères avait annoncé la pu-
blication prochaine du premier volume de la
Correspondance de Victor Hugo. Cette nou-
velle n'avait pas été sans nous étonner. Nous
nous sommes rendu auprès de la personna-
lité qui pouvait, mieux que toute autre, nous
donner des renseignements précis à ce sujet;
nous avons été sonner à la porte de M. Paul
Meurice, qui, depuis la mort d'Auguste Vac-
querie, reste seul chargé de la publication
des œuvres posthumes de Victor Hugo.
On sait avec quel dévouement, double de
quelle activité, les exécuteurs testamen-
taires du grand poète ont rempli leur tâche.
Victor Hugo, disait, en une expression éner-
gique, notre regretté rédacteur en chef, Vic-
tor Hugo, depuis sa mort, fait un livre par
an. En admirant la virilité dont fait preuve,
jusque par delà la tombe, le puissant auteur
de la Légende des siècles, encore faut-il ren-
dre hommage à ceux qui savent mettre au
jour les chefs-d'œuvre répandus dans l'am-
vre éparse laissée par Hugo : M. Paul Mcu-
rice s est donné tout entier à ce vaste travail.
Après quelques minutes d'attente dans un
cabinet, dont la décoration nous donne l'oc-
casion d'apprécier Io goût artiste bien connu
du maître du logis, nous sommes introduit
auprès de lui.
— Je sais, expliquc-t-il, qu'on a annoncé
la publication de la Correspondance de Vic-
torHugo. C'est un journal anglais, je crois,
qui en a parlé le premier. Mais la nouvelle
est bien prématurée. Je suis, en co moment,
dans la partie préparatoire de mon travail.
Passer en revue toute cette volumineuse
correspondance, si compacte et si diverse à
la fois, mettre un ordre dans ce monceau de
documents, suivre à travers les écarts et les
digressions ces pensées-mères dont sera
faite la composition solide qu'on a tou-
jours admirée daRs les œuvres les plus
familières du poèto, rechercher, s'il y a lieu,
les lettres qui peuvent manquer, celles sur-
tout dont l'absence ferait trou et empêche-
rait de suivre dans leur développement pro-
gressif, la logique généreuse de cet esprit, et
la raison et la règle de cette vie de citoyen,
c'est une tâche trop sérieuse pour que je
veuille la hâter.
Les grandes divisions seront celles qui
sont indiquées par la méthode chronologique
que je veux suivre. Le premier volume nous
mènerai' sans doute jusqu/en 1835.
Mais, a ajouté M. Paul Meurice, je vous
le répète, pour donner à la légitime curio-
sité du public des renseignements sur l'inti-
mité du livre, ce serait vraiment trop tôt.
Nous en reparlerons.
H. D.
00--
L'INCENDIE DE LA DUE DE TUAIS
Un violent incendie a éclaté, hier soir, rue
de Tunis, n° 4. Seize lances ont été mises en.
manœuvre.
Le feu s'était déclaré au quatrième étage
de la maison Finot, fabricant de papiers
peints ; les débuts de l'incendie avaient été
si violents que l'on craignait pour les im-
meubles voisins.
MM. Lépine, préfet de police, Varigaut,
colonel des pompiers, étaient présents.
Le sinistre énergiquement combattu a été
maîtrisé à dix heures du soir.
Un service d'ordre très important était
commandé par l'officier de paix de l'arron-
dissement.
Les dégâts très importants ne sont pas en-
core évalués.
LE PÈRE VOIGNIER
Comme on le sait, les débats de l'affaire
du père Voignier, l'ouvrier sellier de la rue
Julien-Lacroix, commenceront devant la
cour d'assises de la Seine mercredi prochain
12 février et occuperont quatre audiences
consécutives.
Voignier est accusé : 1° d'attentats à la
pudeur, commis en 1890, sur trois jeunes
tilles, Mlles Marie Dargent, Anna Steer-
mans et Marie Baucher, alors âgées de
moins de treize ans ; 2° d'attentat à la pu-
deur et d'assassinat sur la personne d'Alice
Neux.
En ce qui concerne les attentats à la pu-
deur sur Mlles Marie Dargent, Anna Steer-
mans et Marie Baucher, toutes trois actuel-
lement détenues dans les maisons de cor-
rection de Rouen, de Nanterre et de Mont-
pellier, l'accusation semble très solidement
établie.
Il n'en est pas de même en ce qui touche
l'assassinat de la petite Neux. Si, sur ce
point, des preuves morales accablantes
pèsent sur le père Voignier, les preuves
matérielles indiscutables font tout à fait
défaut.
L'unique témoin affirmant avoir vu le père
Voignier en compagnie d'Alice Neut, est un
témoin absolument suspect. C'est le jeune
Robin, le cambrioleur condamné, il y a
quelques mois, par la cour d'assises de la
Seine, à sept ans de travaux forcés. Robin,
en sa qualité même d'ami et de quasi com-
plice du père Voignier, ne peut être cru sur
parole. Ce jeune homme, en eff et, reconnait
avoir été le pourvoyeur ordinaire de Voi-
gnier auquel, moyennant de très légères ré-
tributions, il « amenait » des petits garçons
et des petites filles. C'est lui qui aurait con-
duit Alice Neut dans la chambre même de
Voignier.
La déposition de Robin , légitimement
écartée, que reste-t-il 'pour prouver que
le père Voignier est l'assassin d'Alice Neut ?
Rien ou presque rien.
Malgré ses cinquante témoins, l'accusa-
tion sera hors d'état de fournir la preuve
indiscutable de la culpabilité de l'accusé.
On établira facilement que l'ouvrier sellier
de la rue Julien-Lacroix — ancien facteur
des postes en Algérie — avait des mœurs
honteuses. Ce sera tout.
La fameuse preuve « par le cordon de
store » de l'assassinat de la petite Neut est
loin d'être péremptoire. Il est indiscutable
que les bras d'Alice Neut, lorsqu'on a re-
trouvé le cadavre de la fillette sous l'un des
ponts des abattoirs de la Villette, étaient
serrés contre le corps à l'aide d'un cordon
de store et que précisément le cordon man-
que au store dont Voignier a fait cadeau à
un de ses amis. Mais on ne peut sérieuse-
ment conclure de là que Voignier est l'as-
sassin de la petite Neut. Rien en effet ne
ressemble plus à un cordon vert de store
qu'un autre cordon vert de store. Ce que l'on
a appelé la preuve par le cordon de store
n'est donc aucune simple présomption tout
à insuffisante pour motiver une con-
damnation capitale.
En somme, à raison même de l'absence de
preuves matérielles directes de culpabilité,
le procès Voignier sera un procès extrême-
ment intéressant et qui aura chance de dis-
traire, vingt-quatre heures durant, J'opinioa
publique dos scandales on cours.
M. MAGNIER
w^!S £ ze-J"our8' M. Magnler, l'ex-direc-
teur do J'Ewnement, sera en état d'obtenir
sa libération conditionnelle.
En effet, l'ancien sénateur du Var est à la
Conciergerie depuis le 3 octobre dernier.
Condàmné par la cour d'assises de la
Seine, pour complicité do corruption de fonc-
tionnaire, à un an de prison, il aura, le 18
février courant, fait en cellule quatre mois
et demi de prison préventive qui, comme on
sait, équivalent à six mois de prison ordi-
naire.
C'est-à-dire qu'ayant accompli la moitié de
sa peine, M. Magnier sera en droit de solli-
citer sa mise en libération conditionnelle.
LIRE PLUS LOIN :
LE SECOND PROCÈS DES 104
LA VIE DE PARIS
Par HENRY FOUQUIER
il y a vraiment quelque chose de sin-
gulièrement attristant dans ce qui se
passe en ce moment autour de nous.
Dans ce Paris, aimé quand même, que
Molière appelait déjà « la grand'ville »
et Victor Hugo « la ville-lumière », il
n'est plus question que de scandales
et des scandales les plus plats et les
plus tristes I De tous les monuments de
la capitale, églises, palais, théâtres, il
n'en est qu'un qui attire l'attention, il
n'en est qu'un qui rayonne, pour ainsi
dire et s'illumtne, c'est le Palais de Jus-
tice. Le Parlement lui-même semble ne
travailler que pour lui. Les journaux-
canards, criés par les camelots à la voix
rauque, gardent le cliché de leur titre
de chaque jour : « Un nouveau scan-
dale 1 ». On remuelps vieilles histoires
et on en découvre de nouvelles. Et des
gens se trouvent pour se réjouir de
toutes ces aventures l
Le règne de l'argent, en moins de
vingt ans, a porté ses fruits. C'est en
vain que notre pays, avec la Répu-
blique, s'est donné la forme de gouvér-
ment incontestablement la plus noble,
par définition ; c'est en vain que la dé-
faite de 1870-71 a laissé dans les cœurs
une crainte salutaire, dont la douleur
doit tenir notre patriotisme en éveil.
Rien n'y a fait. Il faudrait être aveugle
et d'un aveuglement tellement inexpli-
cable, qu'il faudrait qu'il fût volontaire,
pour ne pas constater l'abaissement des
caractères. Et cet abaissement, on ne
peut lui trouver une autre cause que la
nécessité à3 l'argent qui domine, cor-
rompt, perd la vie de la nation, sacri-
fiant constamment le travail au jeu sous
toutes ses formes. Car, de tous les
joueurs, les joueurs au baccara sont
les plus prudents, les plus honnêtes.
Et c'est encore une des formes de l'hy
pocrisie pharisienne de notre temps de
les honnir, quand les joueurs véritables
sont les gens d'affaires, les lanceurs
d'entreprises, les habitués de la Bourse
les courtiers douteux, les marchands
de leur influence qui, eux, perdent
l'argent des autres !
Si le pouvoir sait, dans la besogne
entreprise et qu'on a appelée « la les-
sive », rester impartial, aller jusqu'au
bout quand il le l'a. t, s'arrêter quand la
justice le veut, et, surtout, se montrer
égalitaire ; si, comme on commence à
le craindre, il n'applique pas une fois
de plus la détestable méthode du peu-
ple d'Israël qui chargeait de ces ini-
quités un malheureux boue émissaire,
choisi au hasard, on pourra espérer
quelque bien, chèrement acheté par le
scandale. Mais je ne crois pas qu'on
arrive à un résultat bien définitif et qui
soit de durée quand on aura ruiné,
déshonoré et condamné deux ou trois
douzaines d'individus, parmi lesquels il
y a peut-être des innocents ou des
quasi-innocents, pris parmi les journa-
listes aventureux, les faiseurs d'af-
faires et les députés prévaricateurs. En
fait de sociologie surtout, si on veut
arriver à quelque chose, il faut moins
punir que prévenir. Si on veut que nos
mœurs changent, il faut changer les
conditions de nos existences. Si on
souhaite que l'argent ne soit pas une
source de crimes, de fautes, de mat-
heurs, il faut tout faire pour mettre un
terme à sa tyrannie et pour aider à une
plus équitable distribution de ses bien.
faits, qui sont aussi incontestables.
Ceci est particulièrement vrai en ma-
tière d'usure. Il parait que, sur la
plainte du ministre de la guerre, agis-
sant au nom de la magistrature pater-
nelle qu'il exerce sur l'armée, le par-
quet poursuit en ce moment une paire
d'usuriers, qui ne sont pas des moins
farouches.Leur dossier,eff royablement
chargé, les montre exploitant les offi-
ciers et les élèves de Saint-Cyr d'une
telle façon que presque tous leur,
clients ont mal fini. Quelques-uns de
ces pauvres jeunes gens ont été expé-
diés aux compagnies de discipline ; il y
en a qui se sont suicidés. Qu'on ait mis
la main de la justice sur les auteurs de
tous ces maux, c'est bien. Mais ces
usuriers sont-ils exceptionnels? Arri-
vent-ils même à atteindre, en leurs bri-
gandages, le taux de l'usure telle que
la pratiquent légalement le fisc et le
ministère de la justice lui-même quand
il exerce des poursuites - contre les
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