Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1896-01-02
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32757974m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 68249 Nombre total de vues : 68249
Description : 02 janvier 1896 02 janvier 1896
Description : 1896/01/02 (N9428). 1896/01/02 (N9428).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75640683
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 29/04/2013
GINO CENTIMES le NuméroT PARts ET DÉPARTEMENTS
Le IS3" umeVo7 Cl JVO CENTI M E *3
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
.- 131, rue Montmartre, 131
Et chez MM. LAGRANGE, CERF 4 0.
6, place de la Bourse, 6,
Adresse télftralphique: XIX' SIÈCLE - PARIS
ABONNEMENTS
Paris 7..7. Tris soù, 6 f. Six (m, ilf. Il h, 20 £
Départements — 7 f. — 12 f. - 24f.
Union Postale — 9 f. — 161. - 32f.
Les Abonnements sont reçus sans irait
dans tous les Bureaux de Posto.
RÉDACTION s 131, rue Montmartre, 131
De 4 à 8 heures - du soir et de 10 heures du soir à 1 heure - du matin
N° 9428. — «JouLdi 2 Janvier 1896
13 NIVOSE AN 104
ADMINISTRATION : 131, rue Montmartre, 131
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
NOS LEADERS
FIN D'ANNÉE
Encore une année qui tombe dans
le trou sans fond du passé. Celle-ci, je
le crains, ne fera pas grande figure
dans l'histoire. Elle s'est ouverte au
milieu de scandales, et elle s'achève
au milieu de scandales. Elle est sortie
de la boue, elle y rentre. Au dehors,
elle reste marquée par une triste dé-
chéance de l'esprit national, l'hom-
mage rendu par la France au maître
de l'Alsace-Lorraine, et par les tristes
révélations sur l'organisation, ou plu-
tôt la désorganisation de notre dé-
fense, qui ont accompagné l'expé-
dition de Madagascar. Au dedans,
il ne suffit pas de noter qu'au
point de vue des réformes démo-
cratiques encore attendues par le
pays, elle ajoute sa stérilité à la lon-
gue stérilité antérieure; on peut lui
reprocher ce dont elle est remplie, au-
tant que ce dont elle est vide. Le spec-
tacle de nos malheureux soldats, qui
rentrent dévorés par la fièvre, racon-
tant leurs souffrances et l'agonie Je-
leurs compagnons, alterne avec les
hontes qui assourdissent les rues de
leur tapage. Ce tableau n'est pas gai, il
serait temps de le renouveler un peu.
Il faut convenir que quelqu'un qui
jugerait la France sur ce qui a occupé
les yeux et les oreilles du public depuis
quelques semaines s'en ferait une idée
peu flatteuse ; hâtons-nous d'ajouter :
une idée heureusement inexacte. Les
mœurs qui ont apparu à la surface ne
sont assurément pas séduisantes. D'a-
près le genre de questions qui remplis-
sent les colonnes des journaux et dont
le bruit couvre tous les autres bruits,
an serait tenté de croire que toute la
vie politique du pays se résume dans
ta recherche de ceux de nos gouver-
nants qui méritent une flétrissure spé-
?,iale. Comme l'opinion publique n'a pas
fait un grand accueil aux accusateurs
il est à présumer que le goût du scan-
dale a peut-être eu le rôle dominant
dans l'importance prise par les préoc-
cupations de cette nature. Il est regret-
table de penser que le principal objet
des discussions politiques est le triste
personnage que l'Angleterre va pro-
bablement extrader. On voit mal la
démocratie française suspendue au
nom d'un Arton. C'est pourtant le roi
incontestable de l'année. C'est à peine
s'il laisse quelque place à d'autres,
auprès de lui, dans les agitations de
l'esprit public. Ses aventures, ses
transformations, ses voyages, son ré-
cent accident accaparent l'histoire du
jour.
Quand nous réclamions, à une épo-
que antérieure, la réalisation des gran-
des idées de justice et de progrès que
la Révolution française a inscrites sur
le drapeau de la démocratie; quand
nous soulèvions ces graves problèmes
des rapports de l'Etat et de l'Eglise, de
la refonte de la justice mise en har-
monie avec les institutions électives,
de la pleine souveraineté du suffrage
universel tenu en échec par le suffrage
restreint, on nous disait que nous étions
des utopistes, des métaphysiciens, des
cerveaux hantés d'abstractions qui
voulions troubler le repos dontlanation
avait besoin avec des théories aventu-
reuses et impraticables. Quand nousde-
mandons pour les travailleurs des me-
sures d'affranchissement ; quand nous
cherchons comment on pourra assu-
rer à chacun la plus sacrée de toutes
les propriétés, celle des produits de
son travail ; quand nous réclamons
des garanties contre le pouvoir écra-
sant de la richesse, on nous dit que
nous sommes des hommes de désor-
dre, alarmant la quiétude des intérêts
les plus respectables. De ces deux
sortes de préoccupations, on se flatte
d'avoir fait à peu près oublier les pre-
mières à l'indifférence du pays; on
écarte les dernières autant que l'on
peut. On se vante de sagesse poli-
tique quand on a obtenu ces deux
résultats. Elle a de jolies conséquen-
ces, votre sagesse ! Il est fatal que
quiconque écarte les idées de la po-
litique, y fasse une place pour les
scandales. Ne vaudrait-il pas mieux,
pour tout le monde, que le bruit que
la France ferait entendre au monde
fût celui des grands débats à enga-
ger sur tous les problèmes élevés qui
ont passionné nos pères, qui, naguère
encore, passionnaient la démocratie.
Il vaudrait peut-être mieux s'occuper
du Concordat que d'Arton, et se pas-
sionner pour ou contre la revision, que
sur une liste de prétendus chéquards.
Je ne crois pas qu'on ait notablement
sauvegardé le repos public, en mettant
à la porte les idées sur lesquelles au-
trefois se faisaient les grands conflits
des partis. Nous avons des agitations
d'une autre espèce, et j'ai peine à
croire que nous ayons gagné au
shange.
..*
Avec une nouvelle sorte de eoli ti-
que, ce sont des hommes d'une espèce
spéciale qui viennent en lumière. Que
penser, par exemple, du genre de
journalisme qui vient de revêtir sa
forme la plus complète ! La calomnie
toute pure, toute crue, lancée impu-
demment, non pas même sous les ins-
pirations de la haine, mais simple-
ment dans une pensée de commerce ;
puis tous ceux qui ont monté ce coup
s'accusant les uns les autres, et cha-
cun cherchant à repasser sa part de
responsabilité à son voisin ; voilà qui
serait de nature à donner une fâcheu-
se idée de la presse française, si la
presse française pouvait être solidaire
de pareilles ignominies. Hélas! le pu-
blic, qui [accuse les écrivains, n'a-t-il
pas là sa part de responsabilité? Et
des tentatives aussi honteuses se pro-
duiraient-elles sans le succès qu'elles
obtiennent toujours ?
Mais le type du jour n'est même
plus l'homme d'affaires, n'ayant de
commun avec le journaliste que la
vente de papier imprimé, et faisant
de la presse l'instrument des plus
basses spéculations ; un personnel
nouveau a surgi et rempli toute cette
dernière période de sa récente gran-
deur. Ce personnage, c'est le mou-
chard ! Quelle que soit l'affaire qui
conquiert l'opinion publique, il est
là" bien en vue; tantôt laissant
entrevoir son action décisive, dans
les derniers jours du jeune mil-
lionnaire, qu'une mort cruelle vient
de frapper ; tantôt dressant la liste des
dénonciations contre une grande partie
du Parlement; tantôt menaçant ou
ébranlant le gouvernement de ses ré-
vélations vraies ou fausses ; partout
dominant la situation de son impor-
tance et se montrant entouré d'un cor-
tège d'interviewers.
Nous sommes loin des vieux poli-
ciers de Balzac, de ces profonds élèves
de Fouché, mêlés aux mystères les
plus redoutables de l'Etat, ayant péné-
tré tous les drames du crime, ayant
glissé leur regard perçant dans l'int-
rieur de toutes les familles ; acteurs
considérables, mais cachés dans les
choses de leur temps; mourant comme
ils ont vécu, dans leur profession d'o-
béissance ; et emportant fidèlement
dans le silence de la tombe les secrets
dont ils ont été dépositaires.
, Le mouchard, aujourd'hui, est une
puissance armée contre tout le monde,
surtout contre le gouvernement qu'il
a servi.Fier de l'indépendance avec la-
quelle il exerce tous les métiers, tout en
restant lié au pouvoir, libre de faire ses
affaires, et des affaires honteuses, d'en-
treprendre tous les commerces de
scandales, de chantages ou de faveurs
inavouables ; arrogant, à cause des
hontes dont il a le secret, ce person-
nage de demi-jour, dont on fuyait le
contact, dont le nom répugnait aux
lèvres, le voilà en pleine lumière. On
l'accepte comme une autorité. On sol-
licite ses confidences. On invoque sa
parole. Il n'est bruit que des choses
auxquelles il a été mêlé. Un mot de lui
remue profondément la politique du
jour. La presse est remplie de ses faits
et gestes. La tribune retentit de ses
actes et de ses affirmations. Quel symp-
tôme que l'apparition au premier plan
d'un pareil personnage 1
, :\'f*
Tels sont les caractères de la fin de
1895. Espérons qu'on n'en pourra pas
dire autant de l'année qui le suivra.
Ce sont les conséquences d'un état de
choses contre lequel on nous promet
de réagir. Puisse le gouvernement
comprendre sa tâche ! Puisse-t-il l'ac-
complir énergiquement, vite et bien !
Puisse-t-il débarrasser la France du
honteux cauchemar' qui pèse sur
elle 1
CAMILLE PELLETAN.
Nous publierons demain un article 1
de M. J.-L. de Lanessan I
L'IMPOT SUR LES VALEURS MOBILIÈRES
Au moment où va se poser, devant le Par-
lement, la question de l'impôt sur le revenu,
il est utile de faire connaitre la marche qu'a
suivie, dans ces dernières années, l'impôt
sur les valeurs mobilières, qui est une des
branches de l'impôt sur le revenu. Le minis-
tère des finances a fait, à ce sujet, des rele-
vés intéressants.
Cet impôt, qui a été au taux de 3 0/0 jus-
qu'à la fin de 1890, a été élevé à 4 0/0 par la
loi du 20 décembre 1890.
En 1891 il a, à ce nouveau taux, donné un
produit de 70,793,000 francs; en 1892, de
70,002,000 francs; en 1893, de 67,049,000
francs ; en 1894, de 66,208,000 francs.
Il a donc été en décroissant d'une manière
continue pendant quatre exercices. La dimi-
nution qu'on constate en 1894, par rapport à
1893, n'a affecté que le département de la
Seine. Dans le département, elle s'est élevée
à 2,369,000 francs ; mais dans le résultat
d'ensemble pour la France, elle n'apparaît
qu'à moins d'un million, parce qu'elle est
compensée par une augmentation donnée
par les autres départements.
L'année 1895, sans être bien brillante, pa-
rait cependant ne pas devoir donner des ré-
sultats inférieurs à ceux de 1894. Pour les
dix mois écoulés de l'année qui va finir,
l'impôt sur les valeurs mobilières a produit
64,179,500francs, chiffre inférieur de 1,200,000
francs environ aux prévisions budgétaires
et inférieur de la même quantité au recou-
vrement de la période correspondante de
1894. Les résultats des deux derniers mois.
ne sont pas encore connus ; mais on espère
qu'ils ramèneront l'année 1895 au chiffre de
1894. Ce qui marquerait un temps d'arrêt
dans la décroissance des produits.
A-U- TRAISVAAL
Nous disions hier, dans notre article
de l'Etranger, que les Anglais s'agi-
taient beaucoup au Transvaal et qu'ils
voulaient mettre la main sur ce riche
pays. Voici une dépêche qui permet,
d'ailleurs, de deviner leurs intentions.
Mais nous espérons bien que les bandes
à la solde de sir Cecil Rhodes recevront
une terrible leçon de la part des Boërs
et que toutes les grandes puissances
soutiendront ces derniers.
Prétoria, 31 décembre (source
allemande).
Une bande armée, forte de 800 hommes,
de la Chartered Compagnie, a pénétré dans
le Transvaal; elle a avec elle 6 mitrailieuses
Maxim et d'autres canons. La bande se
trouve déjà dans le voisinage de Rusten-
bourg, et semble vouloir avancer jusqu'à
Johannesburg. Le président Kruger a immé-
diatement donné des ordres pour qu'on re-
poussât par la force la marche en avant
des émeutiers ; il a également publié un ap-
pel à tous les citoyens, les exhortant à se
défendre. Une rencontre à main armée sem-
ble inévitable.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN:
Circoncision. Fête légale du jour de l'an.
— Réception officielle à l'Elysée, par le prési-
dent de la République, des présidents et des
membres des bureaux de la Chambre et du
Sénat.
— Durée du jour : 9 h. 34 m.
* CHEZ NOUS
- Les ministres de l'intérieur, des
finances, du commerce, de la justice et des
affaires étrangères ont reçu hier, à l'occa-
sion de la nouvelle année, dans leurs
hôtels respectifs les personnels de leurs
administrations.
- C'est avec un cordial plaisir que
nous trouvons dans la liste des nouveaux
chevaliers de la Légion d'honneur, le nom
de. notre collaborateur et ami, Charles
Bos, socialiste convaincu et qu'on trouve
toujours au premier rang des défenseurs
du faible contre le fort — est-il besoin de
rappeler ici la vaillante campagne en fa-
veurdesemployésd'omnibusettant d'autres
polémiques toujours démocratiques et po-
pulaires?— Charles Bos, désigné depuis
longtemps pour la distinction qui le ré-
compense aujourd'hui de ses écrits, de sa
parole et de ses actes, toujours et sans
défaillance dévoués à la cause de la Répu-
blique.
-—— M. José-Maria de Hérédia, membre
de l'Académie française, vient de perdre
son frère, M. Gabriel de Hérédia, qui a
succombé la nuit dernière à Paris, à l'âge
de soixante-dix ans.
- Une modification est apportée au
programme des examens pour l'obtention
du diplôme des études d'histoire et de
géographie.
Les candidats devront se mettre en me-
sure d'être interrogés, à partir de la ses-
sion de juillet 1896, sur la bibliographie
générale.
- Le musée du Luxembourg, fermé
depuis une quinzaine pour les remanie-
ments annuels, sera rouvert jeudi au
public.
Les yeux y seront frappés, dès l'entrée,
par la jolie fontaine en pâte-de verre que
le sculpteur Henry Cros exposa au Salon
dernier. Elle se dresse dans le vestibule
contre la muraille de droite. Un beau vase
de bronze, œuvre des fondeurs Thiébaut,
lui fait face.
Dans la galerie des sculptures, les vi-
trines se sont garnies d'oeuvres des mé-
dailleurs Roty et Chaplain; aux murailles,
deux ensembles qui font grand honneur à
la céramique contemporaine : une chemi-
née de Dalpayrat, en grès émaillé, et un
encadrement de porte de Delaherche.
Les galeries de peintures, remaniées,
donnent asile à bon 'nombre de pièces
nouvelles. Citons le Port d'Alger, de Bes-
nard, et de Jean-Paul Laurens, les Inquisi-
teurs blancs, rendus au Luxembourg par le
palais del'Elysée.
Dans la salle suivante est exposée la su-
perbe collection des dessins par lesquels
M. Puvis de Chavanes a préludé à ses
grandes œuvres et qu'il a offerte aux mu-
sées nationaux cet été.
- Hier, dernier jour de l'année, les
promeneurs des Buttes-Chaumont ont pu
faire, pour le jour de l'An, des bouquets
de marguerites. En effet, les pelouses du
merveilleux parc étaient constellées de ces
petites fleurettes. Ce fait, anormal pour
l'époque de l'année où nous nous trouvons,
mérite d'être signalé.
- La Société de statistique de Paris,
dans sa dernière réunion, a procédé aux
élections de son bureau qui se trouve cons-
titué, pour l'année 1896, de la façon sui-
vante :
Président : M. Yves Guyot.'
Vice-présidents : MM. le docteur Jac-
ques Bertillon, Beaurin, Gressier et Fer-
nand Faure.
Secrétaire général : M. Emile Yvernès.
Trésorier-archiviste : M. Jules Robyns.
- L'assemblée générale de la Ligue
nationale contre l'alcoolisme vient d'avoir
lieu. Le bureau pour 1896 est constitué
comme suit :
Président : docteur Semélaigne.
Vice-présidents : docteur Bouchereau,
M. Glandaz, docteur Motet, M. Van Sen-
dorpel ; secrétaire général : docteur E.
Philbert; secrétaires généraux adjoints :
docteur Audigé docteur Charpentier.
Secrétaires des séances : docteur Carra,
docteur Koubinowitch.
Bibliothécaire archiviste : docteur Cruet.
Trésorier : M. Bartinaumieux.
- L'Assistance publique :
Un concours public pour la nomination
à trois places de médecins dans les hôpi-
taux de Paris, aura lieu le lundi 24 février,
à midi, à l'administration" centrale, avenue
Victoria, 3.
Les inscriptions seront reçues de midi à
trois heures, tous les jours, du 20 janvier
au 7 février inclus.
- Le ministre de l'agriculture, con-
formément aux engagements pris à la
Chambre lors de la discussion de son bud-
get, vient de faire paraître le premier nu-
méro de la Feuille formations dit mi-
nistère.
Ce bulletin contient des renseignements
sommaires sur les faits agricoles les plus
intéressants, tant en France qu'à l'étranger.
A L'ÉTRANGER
- Fouilles à Athènes :
M. Dorpfeld, président de l'institut ar-
chéologique d'Athènes, a repris les fouilles
de la partie sud-est de l'acropole et a dé-
couvert deux petites statues en bronze. Le
gouvernement allemand aurait fourni les
sommes nécessaires pour que l'institut
puisse continuer ses recherches.
- On vient de découvrir sur le bord
de la mer Noire, à proximité de la ville de
Bourgas, des ossements fossiles apparte-
nant, sans aucun doute, à l'un des plus
énormes d'entre les colosses antédiluviens.
D'aucuns prétendent que c'est un mam-
mouth, d'autres penchent pour le masto-
donte. Les trouvailles se composent d'un
crâne énorme mesurant 1 mètre de l'os
pariétal au maxillaire inférieur et de deux
gigantesques défenses mesurant 2 m. 60
de longueur chacune.
- Le peintre anglais G.-F. Watts,
vient de faire don à la National Portrait
Gallery, de Londres, de quinze portraits
à l'huile et de deux dessins exécutés par
lui.
Ces portraits représentent des contem-
porains célèbres ou des hommes morts ré-
cemment.
- Voici M. Félix Faure parrain.
Et parrain d'un village tout entier, situé
dans l'île Vaté, une des Nouvelles-Hér
brides. Ce village, jusqu'ici s'était appelé
modestement Mêlé. Il s'appellera désor-
mais Faureville.
C'est M. Vuillod, député du Jura, qui,
parlant au nom d'un groupe d'amis qu'il a
en Océanie, a prié le président d'agréer
l'hommage qu'on lui offre.
M. Félix Faure a agréé.
A quand les dragées ?
Le Passant.
AU MINISTÈRE DU COMMERCE
LES NOUVELLES DIRECTIONS
M. Mesureur, dont on connaît les aptitu-
des spéciales pour les questions ouvrières,
vient, après une étude approfondie, de pré-
senter un rapport au président de la Répu-
blique pour lui proposer un remaniement
plus normal des services du ministère du
commerce.
Dans sa nouvelle organisation, M. Mesu-
reur donne la place la plus large à la divi-
sion du travail.
» Quant il s'agit du travail, dit le ministre,
les services du ministère du commerce doi-
vent considérer moins les objets que les per-
sonnes, moins les choses en elles-mêmes
que les énergies individuelles qui s'emploient
à les produire et à les fabriquer.
» Ce sont des femmes et des, enfants en-
grand nombre, des travailleurs de toutes
catégories, qui ont besoin de protection, et
qui méritent d'autant plus d'attirer l'atten-
tion que leur faiblesse relative rend leur
condition plus précaire.
» Ces enfants des deux sexes, à peine en-
trés dans la vie, sont au travail ; il faut, dès
le début, protéger leurs frêles initiatives,
leur intelligence et leur énergie, atin qu'elles
grandissent et se fortifient pour elles-mêmes
et pour le pays ; il faut les suivre pas à pas
dans leur carrière laborieuse, leur assurer
à chaque âge, et autant qu'il se peut, les
conditions d'hygiène physique et de dé-
veloppement intellectuel nécessaires à l'évo-
lution régulière de leur être, les préserver
des accidents, du surmenage qui anéantit en
quelques années les forces d'une génération,
au grand détriment de l'avenir du pays et de
l'industrie alle-même; il faut prévoir le temps
prochain où ces travailleurs, après l'adoles-
cence et l'âge mûr, toucheront déjà à la
vieillesse et leur préparer des retraites, leur
assurer, si c'est possible, une fin honorable
et digne d'une existence toute entière con-
sacrée au travail, digne aussi d'une société
vraiment civilisée.
» Ces travailleurs ne sont pas toujours
isolés ; il y a entre eux des liens de solida-
rité professionnelle : ils s'associent, ils for-
ment des syndicats, des groupes coopératifs,
des sociétés de prévoyance; ils fécondent
l'esprit de prudence et d'épargne, l'initiative
individuelle, et, par tout ce qu'ils font eux-
mêmes, ils allègent d'autant les soins et les
charges de l'Etat.
« Il importe de les encourager dans ces
habitudes et ces principes, de les conduire
par degrés à cette liberté complète où ils se
passeront de toute aide et de toute assis-
tance; ces syndicats, ces associations de
t avail et de placement, de secours mutuels
et de retraite, font apparaître aux hommes
de nouvelles obligations à supporter, de
nouvelles responsabilités à soutenir et im-
posent peu à peu à leur esprit l'idée des de-
voirs envers la société.
» On voit par là en quelle estime nous te-
nons la fonction du ministère du commerce
et de l'industrie en tant qu'il s'applique au
travail et et quelle importance nous enten-
dons lui attribuer ».
C'est en s'inspirant de ces idées et en sui-
vant cette méthode, que M. Mesureur a été
appelé à demander au président de la Répu-
blique de bien vouloir revêtir de sa signa-
ture un décret de réorganisation des ser-
vices.
Ce décret a Daru lundi à l'Officiel.
Nous sommes certain que chacun applau-
dira à la nouvelle organisation, beaucoup
plus normale, des services du ministère du
commerce qui marque, avec plus de netteté,
la place et le rôle qui appartiennent au tra-
vail dans le ministère.
FERNAND LEFÈVRE.
: ———————————————
LE CRIME DE LA BLANCARDE
La chambre des mises en accusation de
Riom, dans son audience, a infirmé le non
lieu prononcé par le juge d'instruction au
profit de Marie Michel.
Elle a renvoyé cette dernière devant la
cour d'assises du Puy-de-Dôme sous l'incul-
pation de faux témoignage dans l'affaire
Cauvin.
L'audience a duré cinq heures sur cette
affaire unique.
On se rappelle que Cauvin aété condamné
aux travaux forcés pour assassinat sur la
dénonciation de Marie Michel qui était en-
suite revenue sur sa dénonciation qu'elle a
avouée être fausse.
CATASTROPHE DE LA MINE WRANGEL
On mande de Waldenbourg (Allemagne),
à la Volkzeinlunq qu'une grande catastrophe
s'est produite à la mine Wrangel.
La catastrophe a été causée par le feu
grisou.
Il y a 50 victimes ; 17 personnes man-
quent encore.
LIRE PLUS LOIN :
LES DÉCORATIONS
LA VIE DE PARIS
Par HENRY FOUQUIER
Je manquerais à une vieille tradition
qui m'est chère si je ne souhaitais pas
« une bonne année, accompagnée de
plusieurs autres », comme on dit, à nos
lecteurs dont il est qui sontde véritables
amis. Car on peut devenir amis sans se
connaître, par la simple sympathie in-
tellectuelle, par une fréquente commu-
nauté d'idées. C'est même cette amitié
que :e vieil historien Salluste regar-
dait comme la plus sûre quand il écri-
vait, au début de sa Conspiration de Ca-
tilina: « Idem voile atque noll-e, ea de-
mum firma amicitia est. » Je souhaite
donc que chacun de nos fidèles, dans
sa sphère, voie se réaliser ses vœux.
Ceci deviendrait plus facile si cer-
tains vœux d'ordre général pouvaient
être exaucés, venant en aide aux vœux
particuliers. Et, pour moi, ce que je
souhaite par dessus tout, c'est de voir
l'humanité devenir meilleure et l'hom-
me cesser de mériter ce qu'on a dit de
lui quand on a dit que « l'homme est le
loup de l'homme ». Malheureusement,
ce vœu n'est pas près de se réaliser. La
cruauté de la bête humaine ne paratt
pas du tout s'apaiser dans le monde.
Tous les jours, un -fait ou une anecdote
historiques viennent nous en apporter
la triste démonstration. Il y a cinq ou
six jours, je lisais le récit d'une révolte
militaire qui vient d'éclater dans un
petit pays de l'Amérique du Sud, à la
suite de ce fait odieux : un soldat,
ayant laissé tomber son fusil pendant
une revue, le colonel de son régiment
le fit attacher à un arbre et fouetter jus-
qu'à ce qu'il mourût. Sur quoi le régi-
ment révolté fusilla le colonel et avec
lui vingt-sept officiers, dont on peut
croire que quelques-uns au moins n'ap-
prouvaient pas la férocité de leur chef.
En Amérique encore, dans l'Uruguay,
une autre triste histoire vient de se
passer. Un gamin de quinze ans ayant
introduit, malgré l'ordre donné, une
bouteille d'eau-de-vie dans une caserne,
le colonel lui donna le choix d'être
fouetté — il paraît qu'on y reste — ou
de boire d'un trait le litre d'eau de feu.
L'enfant préféra boire, et le Temps ,à
qui j'emprunte ce récit) ajoute un peu
naïvement, qu'il tomba « mort» et ne
recouvra la parole que deux jours
après. Ce sont là, dira-t-on, des faits
qui se passent dans l'Amérique du Sud.
Mais les Américains du Sud, étant des
hommes de race latine, seraient bien
vexés si on les tenait pour des sauva-
ges et non pour des civilisés comme
nous. Ce sont d'ailleurs de bien bons
catholiques, ce qui devrait faire espé-
rer qu'ils peuvent agir en chrétiens! Et
puis, hélas 1 les religions ne me parais-
sent pas avoir beaucoup fait pour atté-
nuer la sauvagerie des hommes, à qui
elles ont, au contraire, offert maintes
raisons de se manifester.
En ce moment même, y a-t-il quelque
chose de plus affreux que ce qui se
passe en Arménie? La vérité sur les
événements, sur leur origine, leur im-
portance, le résultat final qu'ils peuvent
avoir, est très difficile à connaître. Mais
ce qui me parait indiscutable, c'est que
Chrétiens et Turcs ne sont pas en reste
de barbarie. Si les Turcs tuent aisément
révoltés, femmes et enfants, les chré-
tiens arméniens ont massacré les Turcs
dans leurs mosquées. Quand on regarde
une mappemonde, on peut toujours y
voir des taches de sang ! Et je ne parle
pas seulement des guerres qui ont un
caractère inéluctable, une raison d'ê-
tre, qui sont, comme l'insurrection cu-
baine, un conflit de races, une rectifica-
tion du droit. On voit partout l'huma-
nité s'offrir des cruautés de luxe 1 Dans
nos pays, ne voyons-nous pas journel-
lement se commettre des crimes qui
sont non seulement inutiles, mais agré-
mentés d'actes de barbarie que ne com-
mettraient pas les fauves, qui ne pa-
raissent « féroces », comme nous disons
si bêtement, que lorsqu'ils ont à se dé-
fendre ou lorsqu'ils chassent pour se
repaître?
Sous auelle influence l'homme pour-
ra-t-il se guérir de cette cruauté, qu'il
paratt tenir, par atavisme, d'un instinci
primitif pire que celui des animaux qui
ignorent la méchanceté gratuite et sans
cause ? Les religions actuelles ne me
paraissent pas avoir eu, en la matière,
une influence bien puissante. Lespaïens
de la Grèce étaient, incontestablement."
de mœurs plus débonnaires que les
croyants à un Dieu unique, sémitea
chrétiens ou mahométans. La philos
phle a-t-elle été plus heureuse en SeÉ
efforts? Peut-être. Sous son influencei
les législations d'Europe se sont un peu
adoucies, quoiqu'il y reste trop de tra-
ces encore de leur première sauvage-
rie. Mais que lents et incertains sont les
progrès de la raison ? Ils sont presque
nuls sur les ignorants et, en certaines
circonstances,tout le monde les oublie.
A la guerre, la discipline seule empêv
che les hommes de redevenir d'effroya.
bles brutes. J'ai vu un peu la guerre. Il
n y a pas à le nier. On y rencontre des
combattants qui sont absolument féro-
ces, qui tuent pour tuer et qui s'expn-
sent même à des punitions sévères pour
satisfaire un instinct. Et si, des crUd-
tes physiques, naturelles, sanguinaires,
qui ne trouvent pas tous les jours occa-
sion de s exercer, on passe à un autre
ordre d'idées, à celui des cruautés so.
cialeset morales, le spectacle n'est pas
plus beau ! C'est bien là, et dans les
milieux les plus civilisés, que l'homme
est le loup de l'homme ! Combien peu
il y a de gens qui prennent en considé.
ration, avant de parler ou d'agir, le mal
que leurs actions ou leurs paroles pour-
ront causer à d'autres hommes 1 Y a-t-il
un spéculateur sur mille qui songe aux
ruines que pourra causer.en réussissant
pour lui, sa spéculation ? Y a-t il un
homme d affaires sur mille qui, avant
d'exercer ce qu'il appelle, d'un mot pr04
stitué, son droit, se demande si l'avan-
tage souvent méprisable qu'il tirera de
1 exercice de ce droit peut être comparé
à la ruine, au désespoir de celui contre
qui il 1 exerce? Prenons-nous la mesure
des peines qui peu vent naître des plaisirs
que nous cherchons pour nous-mêmes?
L'égoïsme, qui est une cruauté moins
brutale mais tout aussi redoutable et
plus répandue que la cruauté du sang,
a conquis le monde avec la liberté in-
dividuelle. C'est à ce point que je sais
des rêveurs attristés qui perdent toute
espérance, pour qui chaque année ap-
paraît comme devant être pire que celle
qui s'enfuit dans le passé, et qui se de-
mandent si l'homme connaîtra jamais
la bonté autrement que par la peur
d'un maître ou d'un Dieu ?
HENRY FOUQUIER
Demain les Jeudis littéraires, par
- Eugène Liutiîhae
TOUJOURS LES 104
Au ministère de la marine, on n'a prêtd
aucune attention aux potins qui circulaient,
t-hier, au sujet de la fameuse liste dont nous
entretenons nos lecteurs depuis quelques
jours. D'ailleurs, plusieurs de nos confrères
ont inséré déjà des démentis catégoriques,
déclarant que M. Lockroy, ni de près ni de
loin, n'a été jamais mêlé à cette affaire.
AU PARQUET
Le parquet a transmis hier à M. Espinas,
juge d'instruction, les plaintes en diffama-
tion portées contre le journal la France.
Le juge a interrogé, hier, M. de Colle-
ville, puis M. Pierre Denis, Mme Vitrac-
Desroziers et enfin M. Tollaire. Le metteur
en pages de la France s'est présenté chez le
juge, mais pour prier le magistrat de diffé-
rer sa comparution devant lui, en raison du
travail pressé qui l'appelait au journal. M.
Espinas, a proposé à ce témoin de revenir
dans la soirée, son travail terminé, ou bien
jeudi. -
Le metteur en pages du journal poursuivi
nous a affirmé à nouveau que quatre noms
auraient été enlevés de la forme sur l'ordre
de M. de Colleville, par son second, qui en
termes du métier, on appelle « un fonction-
naire ».
M. Pierre Denis a dit au juge de quelle
façon la liste, saisie à son domicile, lui avait
été apportée par Mme Vitrac-Desroziers, de
la part de son fils, alors à Bruxelles.
Après M. Pierre Denis, Mme Vitrac a été
introduite et interrogée , puis confrontée
avec M. Pierre Denis.
Devant ces témoins, le juge a alors ou-
vert l'enveloppe contenant la liste. C'est
bien la même que celle publiée par la France,
elle porte en titre : Liste des députés et per-
sonnages qui ont vendu leur vote et leur in-
fluence à la compagnie du - Panama. ----
Cette liste est entièrement écrite de la
main de M. Vitrac-Desroziers, et Mme Vi..
trac-Desroziers a reconnu parfaitement
l'écriture de son fils.
Le juge a ensuite interrogé M. Tollaire, un
ami de M. de Colleville, qui a déclaré avoir
assisté aux préliminaires de la négociation de
la fameuse liste. 11 a affirmé au juge que
M. de Colleville avait remis une lettre à
M. Bonneterre pour le mettre en rapport
avec M. Pascal.
II a aussi déclaré qu'il avait mis en garde
M. de Colle ville contre les conséquences
probables de la publication de la liste éma-
nant de M. Vitrac-Desroziers.
La France du sud-ouest, à Bordeaux, nous •
prie d'annoncer qu'elle est absolument auto.
nome, entièrement étrangère, de près ou de
loin, à la France de Paris.
MUNIR-BEY A L'ÉLYSÉE
Le président de la République a reçu hier,
à trois heures, avec le cérémoniàl habituel,
Munir-bey, le nouvel ambassadeur de Tur-
quie à Paris, qui lui a remis ses lettres de
créance.
Munir-bey a prononcé l'allocution sui-
vante :
u Monsieur le président,
» J'ai l'honneur de remettre entre les
mains de votre excellence les lettres par les-
quelles sa majesté impériale le sultan, mon
auguste maître, s'est plu à mettre fin à la
mission de mon prédécesseur, et à m'ac-
créditer auprès de la République fran-
Le IS3" umeVo7 Cl JVO CENTI M E *3
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
.- 131, rue Montmartre, 131
Et chez MM. LAGRANGE, CERF 4 0.
6, place de la Bourse, 6,
Adresse télftralphique: XIX' SIÈCLE - PARIS
ABONNEMENTS
Paris 7..7. Tris soù, 6 f. Six (m, ilf. Il h, 20 £
Départements — 7 f. — 12 f. - 24f.
Union Postale — 9 f. — 161. - 32f.
Les Abonnements sont reçus sans irait
dans tous les Bureaux de Posto.
RÉDACTION s 131, rue Montmartre, 131
De 4 à 8 heures - du soir et de 10 heures du soir à 1 heure - du matin
N° 9428. — «JouLdi 2 Janvier 1896
13 NIVOSE AN 104
ADMINISTRATION : 131, rue Montmartre, 131
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
NOS LEADERS
FIN D'ANNÉE
Encore une année qui tombe dans
le trou sans fond du passé. Celle-ci, je
le crains, ne fera pas grande figure
dans l'histoire. Elle s'est ouverte au
milieu de scandales, et elle s'achève
au milieu de scandales. Elle est sortie
de la boue, elle y rentre. Au dehors,
elle reste marquée par une triste dé-
chéance de l'esprit national, l'hom-
mage rendu par la France au maître
de l'Alsace-Lorraine, et par les tristes
révélations sur l'organisation, ou plu-
tôt la désorganisation de notre dé-
fense, qui ont accompagné l'expé-
dition de Madagascar. Au dedans,
il ne suffit pas de noter qu'au
point de vue des réformes démo-
cratiques encore attendues par le
pays, elle ajoute sa stérilité à la lon-
gue stérilité antérieure; on peut lui
reprocher ce dont elle est remplie, au-
tant que ce dont elle est vide. Le spec-
tacle de nos malheureux soldats, qui
rentrent dévorés par la fièvre, racon-
tant leurs souffrances et l'agonie Je-
leurs compagnons, alterne avec les
hontes qui assourdissent les rues de
leur tapage. Ce tableau n'est pas gai, il
serait temps de le renouveler un peu.
Il faut convenir que quelqu'un qui
jugerait la France sur ce qui a occupé
les yeux et les oreilles du public depuis
quelques semaines s'en ferait une idée
peu flatteuse ; hâtons-nous d'ajouter :
une idée heureusement inexacte. Les
mœurs qui ont apparu à la surface ne
sont assurément pas séduisantes. D'a-
près le genre de questions qui remplis-
sent les colonnes des journaux et dont
le bruit couvre tous les autres bruits,
an serait tenté de croire que toute la
vie politique du pays se résume dans
ta recherche de ceux de nos gouver-
nants qui méritent une flétrissure spé-
?,iale. Comme l'opinion publique n'a pas
fait un grand accueil aux accusateurs
il est à présumer que le goût du scan-
dale a peut-être eu le rôle dominant
dans l'importance prise par les préoc-
cupations de cette nature. Il est regret-
table de penser que le principal objet
des discussions politiques est le triste
personnage que l'Angleterre va pro-
bablement extrader. On voit mal la
démocratie française suspendue au
nom d'un Arton. C'est pourtant le roi
incontestable de l'année. C'est à peine
s'il laisse quelque place à d'autres,
auprès de lui, dans les agitations de
l'esprit public. Ses aventures, ses
transformations, ses voyages, son ré-
cent accident accaparent l'histoire du
jour.
Quand nous réclamions, à une épo-
que antérieure, la réalisation des gran-
des idées de justice et de progrès que
la Révolution française a inscrites sur
le drapeau de la démocratie; quand
nous soulèvions ces graves problèmes
des rapports de l'Etat et de l'Eglise, de
la refonte de la justice mise en har-
monie avec les institutions électives,
de la pleine souveraineté du suffrage
universel tenu en échec par le suffrage
restreint, on nous disait que nous étions
des utopistes, des métaphysiciens, des
cerveaux hantés d'abstractions qui
voulions troubler le repos dontlanation
avait besoin avec des théories aventu-
reuses et impraticables. Quand nousde-
mandons pour les travailleurs des me-
sures d'affranchissement ; quand nous
cherchons comment on pourra assu-
rer à chacun la plus sacrée de toutes
les propriétés, celle des produits de
son travail ; quand nous réclamons
des garanties contre le pouvoir écra-
sant de la richesse, on nous dit que
nous sommes des hommes de désor-
dre, alarmant la quiétude des intérêts
les plus respectables. De ces deux
sortes de préoccupations, on se flatte
d'avoir fait à peu près oublier les pre-
mières à l'indifférence du pays; on
écarte les dernières autant que l'on
peut. On se vante de sagesse poli-
tique quand on a obtenu ces deux
résultats. Elle a de jolies conséquen-
ces, votre sagesse ! Il est fatal que
quiconque écarte les idées de la po-
litique, y fasse une place pour les
scandales. Ne vaudrait-il pas mieux,
pour tout le monde, que le bruit que
la France ferait entendre au monde
fût celui des grands débats à enga-
ger sur tous les problèmes élevés qui
ont passionné nos pères, qui, naguère
encore, passionnaient la démocratie.
Il vaudrait peut-être mieux s'occuper
du Concordat que d'Arton, et se pas-
sionner pour ou contre la revision, que
sur une liste de prétendus chéquards.
Je ne crois pas qu'on ait notablement
sauvegardé le repos public, en mettant
à la porte les idées sur lesquelles au-
trefois se faisaient les grands conflits
des partis. Nous avons des agitations
d'une autre espèce, et j'ai peine à
croire que nous ayons gagné au
shange.
..*
Avec une nouvelle sorte de eoli ti-
que, ce sont des hommes d'une espèce
spéciale qui viennent en lumière. Que
penser, par exemple, du genre de
journalisme qui vient de revêtir sa
forme la plus complète ! La calomnie
toute pure, toute crue, lancée impu-
demment, non pas même sous les ins-
pirations de la haine, mais simple-
ment dans une pensée de commerce ;
puis tous ceux qui ont monté ce coup
s'accusant les uns les autres, et cha-
cun cherchant à repasser sa part de
responsabilité à son voisin ; voilà qui
serait de nature à donner une fâcheu-
se idée de la presse française, si la
presse française pouvait être solidaire
de pareilles ignominies. Hélas! le pu-
blic, qui [accuse les écrivains, n'a-t-il
pas là sa part de responsabilité? Et
des tentatives aussi honteuses se pro-
duiraient-elles sans le succès qu'elles
obtiennent toujours ?
Mais le type du jour n'est même
plus l'homme d'affaires, n'ayant de
commun avec le journaliste que la
vente de papier imprimé, et faisant
de la presse l'instrument des plus
basses spéculations ; un personnel
nouveau a surgi et rempli toute cette
dernière période de sa récente gran-
deur. Ce personnage, c'est le mou-
chard ! Quelle que soit l'affaire qui
conquiert l'opinion publique, il est
là" bien en vue; tantôt laissant
entrevoir son action décisive, dans
les derniers jours du jeune mil-
lionnaire, qu'une mort cruelle vient
de frapper ; tantôt dressant la liste des
dénonciations contre une grande partie
du Parlement; tantôt menaçant ou
ébranlant le gouvernement de ses ré-
vélations vraies ou fausses ; partout
dominant la situation de son impor-
tance et se montrant entouré d'un cor-
tège d'interviewers.
Nous sommes loin des vieux poli-
ciers de Balzac, de ces profonds élèves
de Fouché, mêlés aux mystères les
plus redoutables de l'Etat, ayant péné-
tré tous les drames du crime, ayant
glissé leur regard perçant dans l'int-
rieur de toutes les familles ; acteurs
considérables, mais cachés dans les
choses de leur temps; mourant comme
ils ont vécu, dans leur profession d'o-
béissance ; et emportant fidèlement
dans le silence de la tombe les secrets
dont ils ont été dépositaires.
, Le mouchard, aujourd'hui, est une
puissance armée contre tout le monde,
surtout contre le gouvernement qu'il
a servi.Fier de l'indépendance avec la-
quelle il exerce tous les métiers, tout en
restant lié au pouvoir, libre de faire ses
affaires, et des affaires honteuses, d'en-
treprendre tous les commerces de
scandales, de chantages ou de faveurs
inavouables ; arrogant, à cause des
hontes dont il a le secret, ce person-
nage de demi-jour, dont on fuyait le
contact, dont le nom répugnait aux
lèvres, le voilà en pleine lumière. On
l'accepte comme une autorité. On sol-
licite ses confidences. On invoque sa
parole. Il n'est bruit que des choses
auxquelles il a été mêlé. Un mot de lui
remue profondément la politique du
jour. La presse est remplie de ses faits
et gestes. La tribune retentit de ses
actes et de ses affirmations. Quel symp-
tôme que l'apparition au premier plan
d'un pareil personnage 1
, :\'f*
Tels sont les caractères de la fin de
1895. Espérons qu'on n'en pourra pas
dire autant de l'année qui le suivra.
Ce sont les conséquences d'un état de
choses contre lequel on nous promet
de réagir. Puisse le gouvernement
comprendre sa tâche ! Puisse-t-il l'ac-
complir énergiquement, vite et bien !
Puisse-t-il débarrasser la France du
honteux cauchemar' qui pèse sur
elle 1
CAMILLE PELLETAN.
Nous publierons demain un article 1
de M. J.-L. de Lanessan I
L'IMPOT SUR LES VALEURS MOBILIÈRES
Au moment où va se poser, devant le Par-
lement, la question de l'impôt sur le revenu,
il est utile de faire connaitre la marche qu'a
suivie, dans ces dernières années, l'impôt
sur les valeurs mobilières, qui est une des
branches de l'impôt sur le revenu. Le minis-
tère des finances a fait, à ce sujet, des rele-
vés intéressants.
Cet impôt, qui a été au taux de 3 0/0 jus-
qu'à la fin de 1890, a été élevé à 4 0/0 par la
loi du 20 décembre 1890.
En 1891 il a, à ce nouveau taux, donné un
produit de 70,793,000 francs; en 1892, de
70,002,000 francs; en 1893, de 67,049,000
francs ; en 1894, de 66,208,000 francs.
Il a donc été en décroissant d'une manière
continue pendant quatre exercices. La dimi-
nution qu'on constate en 1894, par rapport à
1893, n'a affecté que le département de la
Seine. Dans le département, elle s'est élevée
à 2,369,000 francs ; mais dans le résultat
d'ensemble pour la France, elle n'apparaît
qu'à moins d'un million, parce qu'elle est
compensée par une augmentation donnée
par les autres départements.
L'année 1895, sans être bien brillante, pa-
rait cependant ne pas devoir donner des ré-
sultats inférieurs à ceux de 1894. Pour les
dix mois écoulés de l'année qui va finir,
l'impôt sur les valeurs mobilières a produit
64,179,500francs, chiffre inférieur de 1,200,000
francs environ aux prévisions budgétaires
et inférieur de la même quantité au recou-
vrement de la période correspondante de
1894. Les résultats des deux derniers mois.
ne sont pas encore connus ; mais on espère
qu'ils ramèneront l'année 1895 au chiffre de
1894. Ce qui marquerait un temps d'arrêt
dans la décroissance des produits.
A-U- TRAISVAAL
Nous disions hier, dans notre article
de l'Etranger, que les Anglais s'agi-
taient beaucoup au Transvaal et qu'ils
voulaient mettre la main sur ce riche
pays. Voici une dépêche qui permet,
d'ailleurs, de deviner leurs intentions.
Mais nous espérons bien que les bandes
à la solde de sir Cecil Rhodes recevront
une terrible leçon de la part des Boërs
et que toutes les grandes puissances
soutiendront ces derniers.
Prétoria, 31 décembre (source
allemande).
Une bande armée, forte de 800 hommes,
de la Chartered Compagnie, a pénétré dans
le Transvaal; elle a avec elle 6 mitrailieuses
Maxim et d'autres canons. La bande se
trouve déjà dans le voisinage de Rusten-
bourg, et semble vouloir avancer jusqu'à
Johannesburg. Le président Kruger a immé-
diatement donné des ordres pour qu'on re-
poussât par la force la marche en avant
des émeutiers ; il a également publié un ap-
pel à tous les citoyens, les exhortant à se
défendre. Une rencontre à main armée sem-
ble inévitable.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN:
Circoncision. Fête légale du jour de l'an.
— Réception officielle à l'Elysée, par le prési-
dent de la République, des présidents et des
membres des bureaux de la Chambre et du
Sénat.
— Durée du jour : 9 h. 34 m.
* CHEZ NOUS
- Les ministres de l'intérieur, des
finances, du commerce, de la justice et des
affaires étrangères ont reçu hier, à l'occa-
sion de la nouvelle année, dans leurs
hôtels respectifs les personnels de leurs
administrations.
- C'est avec un cordial plaisir que
nous trouvons dans la liste des nouveaux
chevaliers de la Légion d'honneur, le nom
de. notre collaborateur et ami, Charles
Bos, socialiste convaincu et qu'on trouve
toujours au premier rang des défenseurs
du faible contre le fort — est-il besoin de
rappeler ici la vaillante campagne en fa-
veurdesemployésd'omnibusettant d'autres
polémiques toujours démocratiques et po-
pulaires?— Charles Bos, désigné depuis
longtemps pour la distinction qui le ré-
compense aujourd'hui de ses écrits, de sa
parole et de ses actes, toujours et sans
défaillance dévoués à la cause de la Répu-
blique.
-—— M. José-Maria de Hérédia, membre
de l'Académie française, vient de perdre
son frère, M. Gabriel de Hérédia, qui a
succombé la nuit dernière à Paris, à l'âge
de soixante-dix ans.
- Une modification est apportée au
programme des examens pour l'obtention
du diplôme des études d'histoire et de
géographie.
Les candidats devront se mettre en me-
sure d'être interrogés, à partir de la ses-
sion de juillet 1896, sur la bibliographie
générale.
- Le musée du Luxembourg, fermé
depuis une quinzaine pour les remanie-
ments annuels, sera rouvert jeudi au
public.
Les yeux y seront frappés, dès l'entrée,
par la jolie fontaine en pâte-de verre que
le sculpteur Henry Cros exposa au Salon
dernier. Elle se dresse dans le vestibule
contre la muraille de droite. Un beau vase
de bronze, œuvre des fondeurs Thiébaut,
lui fait face.
Dans la galerie des sculptures, les vi-
trines se sont garnies d'oeuvres des mé-
dailleurs Roty et Chaplain; aux murailles,
deux ensembles qui font grand honneur à
la céramique contemporaine : une chemi-
née de Dalpayrat, en grès émaillé, et un
encadrement de porte de Delaherche.
Les galeries de peintures, remaniées,
donnent asile à bon 'nombre de pièces
nouvelles. Citons le Port d'Alger, de Bes-
nard, et de Jean-Paul Laurens, les Inquisi-
teurs blancs, rendus au Luxembourg par le
palais del'Elysée.
Dans la salle suivante est exposée la su-
perbe collection des dessins par lesquels
M. Puvis de Chavanes a préludé à ses
grandes œuvres et qu'il a offerte aux mu-
sées nationaux cet été.
- Hier, dernier jour de l'année, les
promeneurs des Buttes-Chaumont ont pu
faire, pour le jour de l'An, des bouquets
de marguerites. En effet, les pelouses du
merveilleux parc étaient constellées de ces
petites fleurettes. Ce fait, anormal pour
l'époque de l'année où nous nous trouvons,
mérite d'être signalé.
- La Société de statistique de Paris,
dans sa dernière réunion, a procédé aux
élections de son bureau qui se trouve cons-
titué, pour l'année 1896, de la façon sui-
vante :
Président : M. Yves Guyot.'
Vice-présidents : MM. le docteur Jac-
ques Bertillon, Beaurin, Gressier et Fer-
nand Faure.
Secrétaire général : M. Emile Yvernès.
Trésorier-archiviste : M. Jules Robyns.
- L'assemblée générale de la Ligue
nationale contre l'alcoolisme vient d'avoir
lieu. Le bureau pour 1896 est constitué
comme suit :
Président : docteur Semélaigne.
Vice-présidents : docteur Bouchereau,
M. Glandaz, docteur Motet, M. Van Sen-
dorpel ; secrétaire général : docteur E.
Philbert; secrétaires généraux adjoints :
docteur Audigé docteur Charpentier.
Secrétaires des séances : docteur Carra,
docteur Koubinowitch.
Bibliothécaire archiviste : docteur Cruet.
Trésorier : M. Bartinaumieux.
- L'Assistance publique :
Un concours public pour la nomination
à trois places de médecins dans les hôpi-
taux de Paris, aura lieu le lundi 24 février,
à midi, à l'administration" centrale, avenue
Victoria, 3.
Les inscriptions seront reçues de midi à
trois heures, tous les jours, du 20 janvier
au 7 février inclus.
- Le ministre de l'agriculture, con-
formément aux engagements pris à la
Chambre lors de la discussion de son bud-
get, vient de faire paraître le premier nu-
méro de la Feuille formations dit mi-
nistère.
Ce bulletin contient des renseignements
sommaires sur les faits agricoles les plus
intéressants, tant en France qu'à l'étranger.
A L'ÉTRANGER
- Fouilles à Athènes :
M. Dorpfeld, président de l'institut ar-
chéologique d'Athènes, a repris les fouilles
de la partie sud-est de l'acropole et a dé-
couvert deux petites statues en bronze. Le
gouvernement allemand aurait fourni les
sommes nécessaires pour que l'institut
puisse continuer ses recherches.
- On vient de découvrir sur le bord
de la mer Noire, à proximité de la ville de
Bourgas, des ossements fossiles apparte-
nant, sans aucun doute, à l'un des plus
énormes d'entre les colosses antédiluviens.
D'aucuns prétendent que c'est un mam-
mouth, d'autres penchent pour le masto-
donte. Les trouvailles se composent d'un
crâne énorme mesurant 1 mètre de l'os
pariétal au maxillaire inférieur et de deux
gigantesques défenses mesurant 2 m. 60
de longueur chacune.
- Le peintre anglais G.-F. Watts,
vient de faire don à la National Portrait
Gallery, de Londres, de quinze portraits
à l'huile et de deux dessins exécutés par
lui.
Ces portraits représentent des contem-
porains célèbres ou des hommes morts ré-
cemment.
- Voici M. Félix Faure parrain.
Et parrain d'un village tout entier, situé
dans l'île Vaté, une des Nouvelles-Hér
brides. Ce village, jusqu'ici s'était appelé
modestement Mêlé. Il s'appellera désor-
mais Faureville.
C'est M. Vuillod, député du Jura, qui,
parlant au nom d'un groupe d'amis qu'il a
en Océanie, a prié le président d'agréer
l'hommage qu'on lui offre.
M. Félix Faure a agréé.
A quand les dragées ?
Le Passant.
AU MINISTÈRE DU COMMERCE
LES NOUVELLES DIRECTIONS
M. Mesureur, dont on connaît les aptitu-
des spéciales pour les questions ouvrières,
vient, après une étude approfondie, de pré-
senter un rapport au président de la Répu-
blique pour lui proposer un remaniement
plus normal des services du ministère du
commerce.
Dans sa nouvelle organisation, M. Mesu-
reur donne la place la plus large à la divi-
sion du travail.
» Quant il s'agit du travail, dit le ministre,
les services du ministère du commerce doi-
vent considérer moins les objets que les per-
sonnes, moins les choses en elles-mêmes
que les énergies individuelles qui s'emploient
à les produire et à les fabriquer.
» Ce sont des femmes et des, enfants en-
grand nombre, des travailleurs de toutes
catégories, qui ont besoin de protection, et
qui méritent d'autant plus d'attirer l'atten-
tion que leur faiblesse relative rend leur
condition plus précaire.
» Ces enfants des deux sexes, à peine en-
trés dans la vie, sont au travail ; il faut, dès
le début, protéger leurs frêles initiatives,
leur intelligence et leur énergie, atin qu'elles
grandissent et se fortifient pour elles-mêmes
et pour le pays ; il faut les suivre pas à pas
dans leur carrière laborieuse, leur assurer
à chaque âge, et autant qu'il se peut, les
conditions d'hygiène physique et de dé-
veloppement intellectuel nécessaires à l'évo-
lution régulière de leur être, les préserver
des accidents, du surmenage qui anéantit en
quelques années les forces d'une génération,
au grand détriment de l'avenir du pays et de
l'industrie alle-même; il faut prévoir le temps
prochain où ces travailleurs, après l'adoles-
cence et l'âge mûr, toucheront déjà à la
vieillesse et leur préparer des retraites, leur
assurer, si c'est possible, une fin honorable
et digne d'une existence toute entière con-
sacrée au travail, digne aussi d'une société
vraiment civilisée.
» Ces travailleurs ne sont pas toujours
isolés ; il y a entre eux des liens de solida-
rité professionnelle : ils s'associent, ils for-
ment des syndicats, des groupes coopératifs,
des sociétés de prévoyance; ils fécondent
l'esprit de prudence et d'épargne, l'initiative
individuelle, et, par tout ce qu'ils font eux-
mêmes, ils allègent d'autant les soins et les
charges de l'Etat.
« Il importe de les encourager dans ces
habitudes et ces principes, de les conduire
par degrés à cette liberté complète où ils se
passeront de toute aide et de toute assis-
tance; ces syndicats, ces associations de
t avail et de placement, de secours mutuels
et de retraite, font apparaître aux hommes
de nouvelles obligations à supporter, de
nouvelles responsabilités à soutenir et im-
posent peu à peu à leur esprit l'idée des de-
voirs envers la société.
» On voit par là en quelle estime nous te-
nons la fonction du ministère du commerce
et de l'industrie en tant qu'il s'applique au
travail et et quelle importance nous enten-
dons lui attribuer ».
C'est en s'inspirant de ces idées et en sui-
vant cette méthode, que M. Mesureur a été
appelé à demander au président de la Répu-
blique de bien vouloir revêtir de sa signa-
ture un décret de réorganisation des ser-
vices.
Ce décret a Daru lundi à l'Officiel.
Nous sommes certain que chacun applau-
dira à la nouvelle organisation, beaucoup
plus normale, des services du ministère du
commerce qui marque, avec plus de netteté,
la place et le rôle qui appartiennent au tra-
vail dans le ministère.
FERNAND LEFÈVRE.
: ———————————————
LE CRIME DE LA BLANCARDE
La chambre des mises en accusation de
Riom, dans son audience, a infirmé le non
lieu prononcé par le juge d'instruction au
profit de Marie Michel.
Elle a renvoyé cette dernière devant la
cour d'assises du Puy-de-Dôme sous l'incul-
pation de faux témoignage dans l'affaire
Cauvin.
L'audience a duré cinq heures sur cette
affaire unique.
On se rappelle que Cauvin aété condamné
aux travaux forcés pour assassinat sur la
dénonciation de Marie Michel qui était en-
suite revenue sur sa dénonciation qu'elle a
avouée être fausse.
CATASTROPHE DE LA MINE WRANGEL
On mande de Waldenbourg (Allemagne),
à la Volkzeinlunq qu'une grande catastrophe
s'est produite à la mine Wrangel.
La catastrophe a été causée par le feu
grisou.
Il y a 50 victimes ; 17 personnes man-
quent encore.
LIRE PLUS LOIN :
LES DÉCORATIONS
LA VIE DE PARIS
Par HENRY FOUQUIER
Je manquerais à une vieille tradition
qui m'est chère si je ne souhaitais pas
« une bonne année, accompagnée de
plusieurs autres », comme on dit, à nos
lecteurs dont il est qui sontde véritables
amis. Car on peut devenir amis sans se
connaître, par la simple sympathie in-
tellectuelle, par une fréquente commu-
nauté d'idées. C'est même cette amitié
que :e vieil historien Salluste regar-
dait comme la plus sûre quand il écri-
vait, au début de sa Conspiration de Ca-
tilina: « Idem voile atque noll-e, ea de-
mum firma amicitia est. » Je souhaite
donc que chacun de nos fidèles, dans
sa sphère, voie se réaliser ses vœux.
Ceci deviendrait plus facile si cer-
tains vœux d'ordre général pouvaient
être exaucés, venant en aide aux vœux
particuliers. Et, pour moi, ce que je
souhaite par dessus tout, c'est de voir
l'humanité devenir meilleure et l'hom-
me cesser de mériter ce qu'on a dit de
lui quand on a dit que « l'homme est le
loup de l'homme ». Malheureusement,
ce vœu n'est pas près de se réaliser. La
cruauté de la bête humaine ne paratt
pas du tout s'apaiser dans le monde.
Tous les jours, un -fait ou une anecdote
historiques viennent nous en apporter
la triste démonstration. Il y a cinq ou
six jours, je lisais le récit d'une révolte
militaire qui vient d'éclater dans un
petit pays de l'Amérique du Sud, à la
suite de ce fait odieux : un soldat,
ayant laissé tomber son fusil pendant
une revue, le colonel de son régiment
le fit attacher à un arbre et fouetter jus-
qu'à ce qu'il mourût. Sur quoi le régi-
ment révolté fusilla le colonel et avec
lui vingt-sept officiers, dont on peut
croire que quelques-uns au moins n'ap-
prouvaient pas la férocité de leur chef.
En Amérique encore, dans l'Uruguay,
une autre triste histoire vient de se
passer. Un gamin de quinze ans ayant
introduit, malgré l'ordre donné, une
bouteille d'eau-de-vie dans une caserne,
le colonel lui donna le choix d'être
fouetté — il paraît qu'on y reste — ou
de boire d'un trait le litre d'eau de feu.
L'enfant préféra boire, et le Temps ,à
qui j'emprunte ce récit) ajoute un peu
naïvement, qu'il tomba « mort» et ne
recouvra la parole que deux jours
après. Ce sont là, dira-t-on, des faits
qui se passent dans l'Amérique du Sud.
Mais les Américains du Sud, étant des
hommes de race latine, seraient bien
vexés si on les tenait pour des sauva-
ges et non pour des civilisés comme
nous. Ce sont d'ailleurs de bien bons
catholiques, ce qui devrait faire espé-
rer qu'ils peuvent agir en chrétiens! Et
puis, hélas 1 les religions ne me parais-
sent pas avoir beaucoup fait pour atté-
nuer la sauvagerie des hommes, à qui
elles ont, au contraire, offert maintes
raisons de se manifester.
En ce moment même, y a-t-il quelque
chose de plus affreux que ce qui se
passe en Arménie? La vérité sur les
événements, sur leur origine, leur im-
portance, le résultat final qu'ils peuvent
avoir, est très difficile à connaître. Mais
ce qui me parait indiscutable, c'est que
Chrétiens et Turcs ne sont pas en reste
de barbarie. Si les Turcs tuent aisément
révoltés, femmes et enfants, les chré-
tiens arméniens ont massacré les Turcs
dans leurs mosquées. Quand on regarde
une mappemonde, on peut toujours y
voir des taches de sang ! Et je ne parle
pas seulement des guerres qui ont un
caractère inéluctable, une raison d'ê-
tre, qui sont, comme l'insurrection cu-
baine, un conflit de races, une rectifica-
tion du droit. On voit partout l'huma-
nité s'offrir des cruautés de luxe 1 Dans
nos pays, ne voyons-nous pas journel-
lement se commettre des crimes qui
sont non seulement inutiles, mais agré-
mentés d'actes de barbarie que ne com-
mettraient pas les fauves, qui ne pa-
raissent « féroces », comme nous disons
si bêtement, que lorsqu'ils ont à se dé-
fendre ou lorsqu'ils chassent pour se
repaître?
Sous auelle influence l'homme pour-
ra-t-il se guérir de cette cruauté, qu'il
paratt tenir, par atavisme, d'un instinci
primitif pire que celui des animaux qui
ignorent la méchanceté gratuite et sans
cause ? Les religions actuelles ne me
paraissent pas avoir eu, en la matière,
une influence bien puissante. Lespaïens
de la Grèce étaient, incontestablement."
de mœurs plus débonnaires que les
croyants à un Dieu unique, sémitea
chrétiens ou mahométans. La philos
phle a-t-elle été plus heureuse en SeÉ
efforts? Peut-être. Sous son influencei
les législations d'Europe se sont un peu
adoucies, quoiqu'il y reste trop de tra-
ces encore de leur première sauvage-
rie. Mais que lents et incertains sont les
progrès de la raison ? Ils sont presque
nuls sur les ignorants et, en certaines
circonstances,tout le monde les oublie.
A la guerre, la discipline seule empêv
che les hommes de redevenir d'effroya.
bles brutes. J'ai vu un peu la guerre. Il
n y a pas à le nier. On y rencontre des
combattants qui sont absolument féro-
ces, qui tuent pour tuer et qui s'expn-
sent même à des punitions sévères pour
satisfaire un instinct. Et si, des crUd-
tes physiques, naturelles, sanguinaires,
qui ne trouvent pas tous les jours occa-
sion de s exercer, on passe à un autre
ordre d'idées, à celui des cruautés so.
cialeset morales, le spectacle n'est pas
plus beau ! C'est bien là, et dans les
milieux les plus civilisés, que l'homme
est le loup de l'homme ! Combien peu
il y a de gens qui prennent en considé.
ration, avant de parler ou d'agir, le mal
que leurs actions ou leurs paroles pour-
ront causer à d'autres hommes 1 Y a-t-il
un spéculateur sur mille qui songe aux
ruines que pourra causer.en réussissant
pour lui, sa spéculation ? Y a-t il un
homme d affaires sur mille qui, avant
d'exercer ce qu'il appelle, d'un mot pr04
stitué, son droit, se demande si l'avan-
tage souvent méprisable qu'il tirera de
1 exercice de ce droit peut être comparé
à la ruine, au désespoir de celui contre
qui il 1 exerce? Prenons-nous la mesure
des peines qui peu vent naître des plaisirs
que nous cherchons pour nous-mêmes?
L'égoïsme, qui est une cruauté moins
brutale mais tout aussi redoutable et
plus répandue que la cruauté du sang,
a conquis le monde avec la liberté in-
dividuelle. C'est à ce point que je sais
des rêveurs attristés qui perdent toute
espérance, pour qui chaque année ap-
paraît comme devant être pire que celle
qui s'enfuit dans le passé, et qui se de-
mandent si l'homme connaîtra jamais
la bonté autrement que par la peur
d'un maître ou d'un Dieu ?
HENRY FOUQUIER
Demain les Jeudis littéraires, par
- Eugène Liutiîhae
TOUJOURS LES 104
Au ministère de la marine, on n'a prêtd
aucune attention aux potins qui circulaient,
t-hier, au sujet de la fameuse liste dont nous
entretenons nos lecteurs depuis quelques
jours. D'ailleurs, plusieurs de nos confrères
ont inséré déjà des démentis catégoriques,
déclarant que M. Lockroy, ni de près ni de
loin, n'a été jamais mêlé à cette affaire.
AU PARQUET
Le parquet a transmis hier à M. Espinas,
juge d'instruction, les plaintes en diffama-
tion portées contre le journal la France.
Le juge a interrogé, hier, M. de Colle-
ville, puis M. Pierre Denis, Mme Vitrac-
Desroziers et enfin M. Tollaire. Le metteur
en pages de la France s'est présenté chez le
juge, mais pour prier le magistrat de diffé-
rer sa comparution devant lui, en raison du
travail pressé qui l'appelait au journal. M.
Espinas, a proposé à ce témoin de revenir
dans la soirée, son travail terminé, ou bien
jeudi. -
Le metteur en pages du journal poursuivi
nous a affirmé à nouveau que quatre noms
auraient été enlevés de la forme sur l'ordre
de M. de Colleville, par son second, qui en
termes du métier, on appelle « un fonction-
naire ».
M. Pierre Denis a dit au juge de quelle
façon la liste, saisie à son domicile, lui avait
été apportée par Mme Vitrac-Desroziers, de
la part de son fils, alors à Bruxelles.
Après M. Pierre Denis, Mme Vitrac a été
introduite et interrogée , puis confrontée
avec M. Pierre Denis.
Devant ces témoins, le juge a alors ou-
vert l'enveloppe contenant la liste. C'est
bien la même que celle publiée par la France,
elle porte en titre : Liste des députés et per-
sonnages qui ont vendu leur vote et leur in-
fluence à la compagnie du - Panama. ----
Cette liste est entièrement écrite de la
main de M. Vitrac-Desroziers, et Mme Vi..
trac-Desroziers a reconnu parfaitement
l'écriture de son fils.
Le juge a ensuite interrogé M. Tollaire, un
ami de M. de Colleville, qui a déclaré avoir
assisté aux préliminaires de la négociation de
la fameuse liste. 11 a affirmé au juge que
M. de Colleville avait remis une lettre à
M. Bonneterre pour le mettre en rapport
avec M. Pascal.
II a aussi déclaré qu'il avait mis en garde
M. de Colle ville contre les conséquences
probables de la publication de la liste éma-
nant de M. Vitrac-Desroziers.
La France du sud-ouest, à Bordeaux, nous •
prie d'annoncer qu'elle est absolument auto.
nome, entièrement étrangère, de près ou de
loin, à la France de Paris.
MUNIR-BEY A L'ÉLYSÉE
Le président de la République a reçu hier,
à trois heures, avec le cérémoniàl habituel,
Munir-bey, le nouvel ambassadeur de Tur-
quie à Paris, qui lui a remis ses lettres de
créance.
Munir-bey a prononcé l'allocution sui-
vante :
u Monsieur le président,
» J'ai l'honneur de remettre entre les
mains de votre excellence les lettres par les-
quelles sa majesté impériale le sultan, mon
auguste maître, s'est plu à mettre fin à la
mission de mon prédécesseur, et à m'ac-
créditer auprès de la République fran-
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.91%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.91%.
- Auteurs similaires Chadeuil Gustave Chadeuil Gustave /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Chadeuil Gustave" or dc.contributor adj "Chadeuil Gustave")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k75640683/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k75640683/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k75640683/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k75640683/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k75640683
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k75640683
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k75640683/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest