Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1879-01-28
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Description : 28 janvier 1879 28 janvier 1879
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/08/2013
".ul¡aiAnÍÍè.- t. N. 2596.
PrIx du Numéro h Paris : 15 Centimes.^- Départements : 20 Centimes.-
Mardi 28 liMlii 18i9
LE E: SIÈCLE
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de 2 heures à minuit
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6, Place de la Bourse, 6
LOTEME mmE
Voir à la quatrième page
la liste complète des numé-
ros gagnants.
B "f'I_AETIN'
Paris, 27 Janvier 1879.
On n'est pas sans éprouver quelques
inquiétudes à Constantinople relative-
ment aux suites que peut avoir la cession
1te Podgoritza au Monténégro. On craint
que Hussein-Pacha, qui a été maintenu au
poste de gouverneur de Scutari sur la de-
mande des Albanais,ne se mette en rébel-
lion ouverte contre la Porte. Il règne,
d'ailleurs, une vive fermentation dans
tout le pays et surtout à Scutari, où sont
arrivés un grand nombre de réfugiés mu-
sulmans.
Le gouvernement austro-hongrois prend
d'énergiques mesures contre la peste qui
vient d'éclater en Russie. Le gouverne-
ment allemand participe à ces mesures et
une commission sanitaire vient de se réu-
nir à Tienne pour s'entendre sur les pre-
mières dispositions à prendre. La com-
mission a désigné les marchandises et les
objets venant de Russie, auxquels l'intro-
duction en Autriche et en Allemagne de-
vra être interdite ; elle a décidé que les
lettres et le papier-monnaie envoyés par la
poste seraient convenablement désinfec-
tés : elle a réglé la manière de procéder à
l'égard des provenances arrivant des ports
russes. Selon les cas, les principes éta-
blis par la commission pourront également
être appliqués aux provenances du Bas-
Danube, et les résolutions de la commis-
sion devront être communiquées au gou-
vernement roumain. Le prince Auesperg,
président du conseil des ministres, inter-
pellé à ce sujet à la Chambre des dépu-
tés de Vienne, a déclaré que, d'après les
les informations communiquées par le mi-
nistère des affaires étrangères, l'épidémie,
qu'on considère généralement comme
étant la peste, mais à laquelle les autorités
ne donnent pas ce nom, sévit dans six lo-
calités sur le Volga et dans les îles du
fleuve. Grâce aux mesures prises, on a
réussi jusqu'ici à circonscrire le foyer de
l'épidémie. Il ne pense donc pas que le
péril soit imminent et qu'il soit nécessai-
re de recourir aux moyens extrêmes.Tou-
tefois, a ajouté le ministre, le gouverne-
ment apporte la plus grande attention à
cette affaire.
Une guerre paraît imminente entre les
forces anglaises de l'Afrique méridionale
et les Zoulous. Le roi Cetywayo a repous-
sé l'ultimatum qu'on lui avait posé. Le
gouvernement anglais lui a accordé pour
faire sa soumission un dernier délai qui a
expiré le li janvier.
E. BARBIER.
Bou. dG Pari.8
5 0/0 114 fr., 113 961/4, 97 1/2.
Turc 11 fr. 27 1/2, 30.
Egypte 245 fr., 245 62.
Hongrois 70 fr. 5 8, 3/4.
Florins 63 3/4.
Russe i871. 83 5/8, 8/1, 11/16, 7/8, 13/16.
Italien, 74 fr. 25, 20.
Nous applaudissons cordialement au
décret qui nomme M. Hérold, préfet de
la Seine, en remplacement de M. Duval.
M. Hérold, que la confiance des délégués
du département de la Seine a porté au
Sénat en 1876, est un des hommes les
plus estimés de notre parti. Dévoué pas-
sionnément à la République, également
rompu à la politique et aux affaires, il
sera un administrateur habile, actif et
non suspect. Personne ne convenait
mieux que lui à ces importantes fonctions,
et personneWpfenant possession de la
préfecture de la Seine, ne recevra de la
population parisieune et de ses représen-
tants un meilleur accueil.
C'est par des choix aussi heureux pour
les autres emplois publics, de l'ordre ad-
ministratif ou judiciaire, auxquels il
doit prochainement être pourvu, que le
gouvernement, nous l'espérons, saura
donner toute satisfaction au pays et aux
Chambres. Il ne manque point, dans le
parti républicain, d'hommes instruits, stu-
dieux, probes et capables. Ce n'est point
le mérite qui fera défaut, pour peu que les
ministres prennent la peine de le décou-
vrir; mais il faut laprendre,cette peine,et
tâcher, comme disent les Anglais, de pla-
cer enfin dans chaque poste l'homme qui
doit y convenir le mieux, qu'il s'agisse
de préfets, ou de procureurs généraux,
ou de commandants de corps d'armée.
Or, voilà justement ce que nous deman-
dons, sans nous inquiéter plus que de
raison des exclamations pudibondes des
gens du 24 mai 1873 et du 16 mai 1877,
qui prétendent que les républicains veu-
lent une curée, et que toute leur poli-
tique ne tend point à une autre but. Si
la réforme du personnel se réduisait,
comme on le dit, à un nombre plus ou
moins grand de convoitises à satisfaire,
nous serions les premiers à crier :
holà ! nous qui ne voulons point qu'on
soupçonne la République d'être le règne
des solliciteurs et des délateurs. Mais la
question du personnel est heureusement
aussi simple que haute. Elle se réduit pour
nous à vouloir que la République soit ser-
vie avec autant de dévouement que les au-
tres régimes et, s'il se peut, avec plus d'in-
telligence et d'intégrité. Qui ne penserait
de même à notre place? et qui, de bonne
foi, osera se plaindre de l'excès de nos
réclamations ?
EUG. LIÉBERT.
NOS SERGENTS DE VILLE
L'émotion causée par le procès de la
Lanterne sur les révélations qui se sont
produites à l'audience a été profonde. Le
tribunal n'avait pas à examiner d'autres
faits que ceux qui lui étaient déférés par
la prévention : son rôle n'était pas de faire
une enquête, mais de juger un procès.
Plus d'une fois le tribunal a dû arrêter une
question de la défense ou interrompre la
déposition d'un témoin. Beaucoup de cho-
ses restent donc à savoir,et non des moins
graves peut-être, un coin du voile seule-
ment a été soulevé, et ce coin du voile
soulevé a suffi pour faire frémir la cons-
cience publique,qui croyait la torture dé-
finitivement abolie en France depuis la
Révolution de 1789. Maintenant les cho-
ses ne peuvent rester en l'état où elles
sont : il ne s'agit plus de la Lanterne et
de ses accusations, exactes ou non dans
tous leurs détails ; il s'agit de l'organisa-
tion d'une des institutions les plus uti-
les, les plus considérables de toute so-
ciété : la police. Il faut qu'une en-
quête soit faite ; il faut qu'elle soit
complète, et nous ajouterons publi-
que, car le pays tient à savoir la
vérité. Nous comptons bien que notre
honorable préfet de police a déjà cher-
ché à connaître toute la vérité sur de
monstrueux abus qu'on a pu lui cacher si
longtemps; nous attendons des décisions
énergiques pour le châtiment des coupa-
bles. Le conseil municipal de Paris, la
Chambre également tiendront aussi, nous
n'en doutons pas, à ce que la lumière
soit faite sur tous les points. Il n'est pas
de bons citoyens auxquels il n'importe
que la police soit respectée, et c'est à la
condition d'être respectable qu'elle sera
respecté
Mais ce que nous tenons à dire tout de
suite bien haut, ce que nous sommes heu-
reuxde dire, parce qu'il importe de ne pas
laisser s'établir des confusions fâcheu-
ses, capables de nuire à des hommes qui
comptent parmi les plus précieux et les
plus dévoués serviteurs du pays, c'est
que si de détestables pratiques sem-
blent avoir pu s'établir par malheur et
durer dans quelques coins obscurs de la
préfecture de police, rien de sem-
blable n'a été signalé dans la con-
duite de la nombreuse et vaillan-
te armée de nos sergents de ville, de nos
gardiens de la paix publique. Si, à côté
d'eux, d'autres, chargés de certaines be-
sognes spéciales, ont eu recours à cer-
tains raoyens barbares, ne les confon-
dons pas avec ces agents spéciaux, ne
faisons pas tomber sur eux la responsa-
bilité d'abus et de violences auxquelles
de près ni de loin ils n'ont aucune part.
Ceux-là n'ont pas lieu de mériter toute
notre confiance et notre estime : ceux-là
sont dignes des éloges que M. Albert Gi-
got leur adressait, il y a quelques semai-
nes, et dans lesquels il ne faisait qu'ex-
primer les sentiments de la population
de Paris. Presque tous anciens sol-
dats, ils continuent à pratiquer, au poste
de la défense sociale où ils sont placés,
qui est toujours un poste de fatigue et qui
est parfois un poste de périls, les tradi-
tions d'honneur, de discipline, de courage
qu'ils ont reçues au régiment, à l'ombre
glorieux du drapeau tricolore. La Répu-
blique a déjà fait quelque chose pour eux;
elle tiendra à honneur de faire plus en-
core, et nous, républicains, nous ne ces-
serons jamais de les défendre et de sol-
liciter pour eux une situation matérielle
et morale proportionnée à leurs bons of-
fices.
Aujourd'hui c'est à un impérieux sen-
timent d'équité que nous obéissons en
les dégageant d'une solidarité qui serait
une suprême injustice. Par le long et
rude hiver que nous traversons, par ces
nuits de gelée et de neige épaisse que
nous venons de subir, les citoyens qui
regagnent leur maison, où ils trouveront
un bon feu ou un lit bien couvert pour se
réchauffer, ne peuvent s'empêcher de
donner une pensée de reconnaissance et
d'admiration à ces sergents de ville cou-
rageux qui subissent sans se plaindre
toutes les intempéries du ciel et nous ga-
rantissent la sécurité des rues. L'argent
dont le budget les paie ne nous acquitte
pas envers eux, et vraiment il ne faut pas
que des scandales dont ils sont innocents
puissent nuire auprès de lecteurs mal
instruits à la considération dont ils jouis-
sent et à l'estime à laquelle ils ont droit.
CHARLES BIGOT.
m. i. i .—.— n, ■
L'enquête de la préfecture de police
L'article précédent était écrit quand nous
avons reçu communication de la lettre
que M. le préfet de police vient d'adres-
ser au ministre de l'intérieur :
Paris, le 26 janvier 1S79.
Monsieur le ministre,
Le tribunal corectlonnel, par son jugement
du 24 de ce mois, a condamné le gérant du
journal la Lanterne, et déclaré calomnieuses
les attaques dirigées dans ce journal contre
plusieurs fonctionnaires de mon administra-
tion. Mais en dehors des faits spéciaux qui
font l'objet de la poursuite, il a été produit
au cours des débats judiciaires des alléga-
tions dont l'opinion s'est émue et qui Inté-
ressent à un haut degré l'honneur de l'admi-
nistration que je dirige.
On a allégué que des détenus avaient été
soumis par certains agents à d'odieuses vio-
lences, qui auraient eu pour but de leur arra-
cher des aveux ; que des députés des dépar-
tements avalent été l'objet, dans la période
électorale qui a suhi le 16 Mat, d'une sur-
veillance Inquisitoriale exercée par des agents
de la préfecture de police ; que de i commu-
nications compromettant l'honneur de ci-
toyens avaient, dans l'intérêt de coupables
qu'on voulait protéger, été adressées par
des chefs de service à certains organes de la
presse ; que tout avancement avait été systé-
matiquement refusé aux agents dévoués à la
République et que les faveurs de l'adminis-
tration avaient été réservées aux ennemis du
gouvernement.
Des faits de cette nature ne constitueraient
rien moins que dectes de trahison et de
prévarication. Une grande administration
chargée de veiller à la sécurité publique et
de protéger les citoyens ne peut rester sous
le coup de telles accusations. Elle a besoin,
pour accomplir sa noble et difficile mission,
de puiser sa force dans la confiance des ci-
toyens, et de demander à l'opinion publique
l'autorité morale sans laquelle elle demeure-
rait impuissante. Elle a le droit et le devoir
de réclamer la lumière.
Je viens donc vous prier, monsieur le mi-
nistre, dans l'intérêt de l'administration à la
tête de laquelle m'a placé le gouvernement
de la République, pour l'honneur de collabo-
rateurs que je couvre de ma responsabilité et
pour le mien, de vouloir bien faire procéder
sous votre direction à une enquête sur les faits
que je viens de vous exposer.
L'opinion demande que la vérité soit con-
nue et que justice soit faite. Plus quepesonne;
je le demande avec elle.
Veuillez agréer, monsieur le ministre, l'hom-
mage de mon profond respect.
Le préfet de police,
Signé : Albert GIGOT.
Le ministre de l'intérieur a aprouvé la
proposition de M. le préfet de police.
Tout est bien qui finit bien.
M. Cotelle, le préfet des Deux-Sèvres,
a eu le courage, fort rare chez un chef
d'administration, de reconnaître son er-
reur, et le courage plus rare encore de la
réparer.
On se rappelle l'histoire de ce pauvre
petit enfant, mort sans baptême, qui avait
été d'abord enseveli, sur l'injonction de
M. le curé, dans un coin infamant du ci-
metière; puis, transporté par l'ordre du
maire, dans la partie de ce même cime-
tière où reposait sa famille ; puis exhumé
encore, et rejeté, sur un nouvel ordre du
préfet, dans ce même coin infamant d'où
il avait été tiré.
M. Cotelle, qui avait donné cet ordre,
s'est aperçu qu'il avait fait une fausse
application de la loi qui régit la police
des cimetières. Il a révoqué son ordre, et
la malheureuse petite créature, exhumée
une troisième fois, reposera enfin près
des siens, là où sa mère elle-même lui
avait choisi une place.
Le préfet des Deux-Sèvres avait eu,
dans cette affaire, le tort grave de de-
mander à un livre composé par un abbé
le soin de lui expliquer la loi française
et de lui marquer son devoir.
Il faut croire que cet abbé l'avait odieu-
sement trompé ; car le texte de loi au-
quel M. le préfet m'avait renvoyé, le texte
de loi visé par son arrêté, texte de loi
qu'il avait imprudemment emprunté d'un
ouvrage clérical, ce texte de loi disait
précisément le contraire de ce que M. le
préfet, sur la foi de M. l'abbé, affirmait y
avoir vu.
M. le préfet des Deux-Sèvres, avait si
l'on s'en souvient, allégué pour justifier
sa conduite un avis du conseil d'Etat du 29
avril 1831, qui, disait-il, commandait aux
maires de rejeter de la partie du cime-
tière communal affectée au culte catho-
lique les enfants morts sans baptême.
Je n'avais pas jugé à propos de vérifier
moi-même le texte. Aussi ai-je été stupé-
fait quand on me l'a apporté et que j'y ai
vu qu'il disait précisément le contraire
de ce que M. Cotelle avait lu dans le
livre de M. l'abbé.
Prenez le Code annoté de la police
administrative judiciaire et munici-
pale, par Napoléon Bacqua de Labarthe,
avocat (Paul Dupont, imprimeur, 1875).
C'est un livre qui a un caractère semi-
officiel, qui doit être et qui est entre les
mains de tous les préfets, sous-préfets,
maires et commissaires de police. Ou-
vrez-le à la page 364 et vous lirez ce qui
suit. Je cite textuellement :
Une difficulté s'est élevée à l'occasion de la
sépulture des enfants morts sans baptême.
Des enfants morts sans baptême 1 c'est
bien là notre cas, si je ne m'abuse. Eh
bien, continuons :
L'autorité municipale peut-elle être tenue,
sur la demande du clerg 4, d'établir dans le ci-
metière, indépendamment des divisions par
cultes prescrites par l'article 15, une subdivi-
sion spéciale pour l'inhumation des corps des
enfants dont il s'agit.
Par application des termes précis de la
loi, qui n'exige des séparations distinctes
dans les cimetières que pour les différents
cultes qui peuvent être professés dans la
même commune, un avis du conseil d'Etat
du 29 avril 183i s'est prononcé POUR LA
NEGATIVE. -
Y a-t-il rien de plus clair que ce texte?
Comment le jésuite, à qui M. Cotelle s'en
était référé, a-t-il pu prendre la négative
pour l'affirmative et le noir pour le blanc?
Je n'en sais rien; mais voilà pour les
préfets une leçon dont j'espère qu'ils
profiteront tous.
M. Cotelle s'est exécuté loyalement. Il
avait été trompé ; il est revenu sur son
ordre, dès qu'on lui a montré la loi. Il
n'y a plus rien à dire. Tous les députés
républicains de son département, MM.
Louis Tribert, Antonin Proust, Henri Gi-
raud, de Laporte et le docteur Ganne se
portent garants de son libéralisme ; voilà
qui est bien. Nous n'insisterons pas. Nous
sommes ravis que cette affaire se soit
heureusement terminée.
Il fallait qu'elle eût cette issue. Les Pa-
risiens, je le sais, n'attachent qu'une mé-
diocre importance à ces petits faits de la
vie ordinaire dans les campagnes. Un en-
fant enterré dans un coin du cimetière
plutôt que dans un autre, voilà bien de
quoi crier !
Eh mais ! savez-vous que dans tout le
pays cette aventure avait causé un émoi
profond, et que les conséquences politi-
ques en pouvaient être très fâcheuses !
Le préfet avait donné tort au maire :
tout aussitôt les idées libérales que ce
maire représentait avaient perdu du ter-
sain dans la contrée. C'était le triomphe
du parti clérical, et le curé n'avait pas
manqué de se targuer de cet avantage.
Savez-vous bien que le maire, si justice
ne lui eût,été rendue, aurait été forcé de
donner sa démission 1 On commençait à
l'insulter et à rire de lui dans la com-
mune. Il ne faut que deux ou trois lé-
gers camouflets infligés ainsi aux repré-
sentants de la cause républicaine dans
un pays, pour qu'au jour des élections,
ce soient des cléricaux qui passent.
FRANCISQUE SARCEY.
.——————————— ————————————
INFORMA TION
On lit ce matin en tête de la partie offi-
cielle du Journal officiel:
Par décret du président de la Républi-
que, en date du 25 janvier 1879, rendu sur
la proposition du ministre de l'intérieur,
M. Hérold, sénateur, a été nommé préfet
du département de la Seine, en remplace-
ment de M. Ferdinand Duval, mis en dis-
ponibilité.
Plusieurs journaux prennent plaisir à
nommer M. Calmon directeur de la Mon-
naie. Nous sommes en mesure de décla-
rer que l'honorable sénateur, après avoir
refusé le gouvernement de la Banque de
France, ne songe nullement à accepter
une situation bien moins considérable et
d'ailleurs occupée par un de nos amis po-
litiques, M. Ruau.
Parmi les nouveaux trésoriers-payeurs
généraux dont la nomination a été signée
au conseil des ministres de samedi, nous
remarquons le nom de M. A. Desplan-
ques.
M. Desplanques, élu conseiller général
du canton de Chinon, en 1867, contre le
candidat officiel, a fait partie pendant dix
ans de la fraction républicaine du conseil
général d'Indre-et-Loire.
Porté à la députation en 1876, il s'est
désisté en faveur de l'autre candidat ré-
publicain. M. Desplanques sera dans l'ad-
ministration des finances un des meilleurs
fonctionnaires du gouvernement actuel.
Un mouvement important dans le per-
sonnel des inspecteurs d'académie doit
paraître d'ici peu de jours.
M. Roucou, chef de bureau au ministère
des finances, est nommé administrateur à
la direction générale des contributions
indirectes.
Le Rappel, après avoir confirmé les ren-
seignements donnés par la République
française sur le remplacement de quatre
généraux commandants de corps, ajoute :
Un cinquième changement est très-pro
bable, c'est celui du général Montaudon, à
Amiens.
Enfin nous dirons que, pour le duc d Au-
male, il n'y aura qu'un simple déplace-
ment. Le prince-général serait envoyé, as-
sure-t-on, de Besançon à Bourges.
Les choix des nouveaux titulaires ne
sont pas encore arrêtés dénnitivement,
Par décision ministérielle du 24 3anJ
vier,
MM. Brown, capitaine adjudant-major
au 133' régiment d'infanterie ;
Altmayer, capitaine d'artillerie, adjoint
au professeur d'artillerie à l'Ecole spéciale
d'artillerie ;
Tézenas, capitaine de deuxième classe
d'état-major du génie;
Et de Lur Saluces, capitaine au 138 ré-
giment de dragons, en dernier lieu offi-
cier d'ordonnance du général de division
Borel, ont été désignés pour servir en qua-
lité d'officiers d'ordonnance auprès de M.
le général de division Gresley, ministre de
la guerre.
L'agenee Havas dit que les communicaJ
tions télégraphiques de Paris avec toutes
les villes du centre et du Midi sont entiè-
rement interrompues. ,
Les communications avec la Suisse et
l'Allemagne sont très diffiolles. Les commu-
nications avec le Nqrd et l'Ouest restent
bonnes.
Nous avons dit que désormais les ins-
tituteurs et institutrices laïques jouiraient
sur les chemins de fer, du privilége réser-
vé jusqu'à présent aux congréganistes.
Voici la lettre par laquelle le ministre
des travaux public a annoncé cette nouvel-
le à M. Schœlcher :
Paris, 22 janvier 18*9.
Monsieur le sénateur et cher collègue,
Vous avez bien voulu appeler l'attention de
mon administration sur des vœux tendant à
ce que les Instituteurs primaires des deux
sexes jouissent sur les chemins de fer de là
faveur du tarif à demi-place.
J'ai le plaisir de vous annoncer que toutes
les compagnies se sont empressées de satis-
faire à la demande que je leur al adressée
dans ce sens, et je suis vraiment heureux
d'avoir pu, dans cette circonstance, aboutir à
un résultat conforme au désir que vous avez
exprimé en faveur d'une catégorie de fonc-
tionnaires si dignes d'Intérêt.
Agréez, monsieur le sénateur et cher collè-
gue, l'assurance de ma haute considéra-
tion.
FREYCINET.
Nous avons annoncé que l'Académie
française avait procédé dans sa séance de
jeudi dernier à la nomination, par la voie
du sort, de la commission à laquelle se-
ront soumis, jeudi prochain 30 janvier, le
discours de réception de M. Renan et la
réponse de M. Mézières.
Le discours de M. Henri Martin, nommé
en remplacement de M. Thiers, a été re-
mis au secrétaire perpétuel et immédiate
ment envoyé à M. Emile Ollivier, chargé
d'y répondre comme directeur aumoment
où s'est ouverte la succession académique
de l'illustre mort.
C'est au jourd'hui lundi que se réunit
au ministère de l'intérieur, sous la prési-
dence de M. Bérenger, sénateur, le con-
seil supérieur des prisons.
Feuilleton du x/r SIÈCLE
Du 28 janvier 1879.
CAUSERIE
DRAMATIQUE
TIIÉATRB DU VAUDEVILLE : VA venture de La-
dislas Bolski, pièce en cinq actes, de M. V.
Cherbuliez. — Festival de 1 Hippodrome.
J'ai vivement regretté le contre-
temps qui a fait remettre à mardi pro-
chain la première représentation de Sa-
muel Brohl, que l'Odéon nous pro-
mettait pour hier. On avait joué lundi
dernier l'Aventure de Ladislas Bolski,
au Vaudeville, et il eût été très intéres-
sant d'avoir à juger ensemble ces œuvres
tirées toutes deux des romans de M. V.
Cherbuliez. Il faut renoncer à cette
étude, à ces comparaisons qui promet-
taient d'être utiles, et nous borner à par-
er de la seule pièce du VaudevIlle.
Le roman de M. V. Cherbuliez, l'A-
venture de Ladislas Bolski, et le drame
qu'il en a tiré, aidé, dit-on, dans cette
tâche délicate d'appropriation à la
scène, par un homme du métier ré-
puté parmi les plus habiles, ce roman et
ce drame diffèrent de la façon la plus
singulière du roman et du drame de l'As-
sommoir, que nous avions vu la veille.
Chez M. V. Cherbuliez, c'est l'idéal dans
ce qu'il y a de plus exalté, les senti-
ments humains raffinés jusqu'à la folie,
le voyage étourdissant dans le royaume
du Bleu; chez M. E. Zola, c'est la réalité
dans ce qu'elle a de plus tangible, les
maladies de l'homme exhibées' jusqu'à
l'écœurement, le voyage souvent pénible
dans les enfers de la vie ordinaire, et s'il
y a du bleu là-dedans, c'est le petit-bleu
des cabarets. Cependant ces deux œu-
vres si étrangement contrastées ont un
point de contact entre elles. Passant du
livre à la scène, elles s'atténuent, elles
se tempèrent, elles s'affadissent un peu.
Les partis pris des auteurs baissent la
tête devant les nécessités du théâtre. Il a
fallu également modérer la crudité des
tableaux et la logique exaltée des pas-
sions. Les deux romanciers ont dû met-
tre de l'eau dans leur vin, comme on dit.
L'un et l'autre a modifié le dénouement-
Ils n'ont pu aller ni au bout de la
leçon, ni au bout de la folie. Ivresse
du vin, ivresse des passions, il a fal-
lu tout refroidir. Le secret du génie
oratoire de Mirabeau et de Danton, —
j'ajouterais volontiers un troisième nom
à ceux-ci — a été, me disait un politique,
de dire violemment des choses presque
toujours modérées en soi. N'en serait-il
pas ainsi pour le théâtre? La scène ne
serait-elle pas l'endroit du monde où il
êsTie plus sûr et le plus aisé de mettre
en relief des pensées acceptées déjà de
la foule,et où il est le plus périlleux et le
plus difficile de lui faire bien accueillir la
nouveauté des aperçus, dont elle raffole
dans le roman ?
J'avais lu l'Aventure deLadislas Bolski
avant de voir le drame qu'on en a tiré,
tandis que je ne connais pas un mot (et
je m'en réjouis) de Samuel Brohl. De
plus, autrefois, à Genève et ailleurs, j'ai
connu le monde spécial que M. V. Cher-
buliez aime et excelle à peindre. J'ai pu
jeter un regard curieux dans ces malles
d'émigrés slaves, polonais et hongrois,
où l'on trouve pêle-mêle le plumet pater-
nel, les faux passeports, les portraits de
femmes, les plans de citadelles à enlever
et les adresses de balcons à escalader 1
J'ai entrevu le fort et le faible de ces ra-
ces admirables; mais mal équilibrées,
douées et impuissantes à la fois, qui sem-
blent exister surtout pour justifier les
psychologues, quand ils disent qu'on
ne peut marquer avec certitude la li-
mite - du sublime et de la folie. Aussi
n'ai-je éprouvé aucune surprise en
voyant l'Aventure de Ladislas Bolski.
Mais je me demande si un spectateur,
moins préparé par la lecture et le ha-
sard, n'aura pas trouvé à l'œuvre un
parfum d'étrangeté presque incompré-
hensible ? Il m'a semblé que le raccourci
du livre en drame était souvent trop inat-
tendu et trop violent. Dans le livre, c'est
après cinquante pages sur l'éducation du
héros que nous voyons apparaître ce plu-
met singulier, qu'il porte comme fétiche
au jeu, et quia dérouté le soir de la pre-
mière. Le caractère de Tronsko, ce rail-
leur toujours prêt au martyre, a servi à
M. V. Cherbuliez pour peindre l'antago-
nisme toujours existant entre l'élément
démocratique et l'élément aristocratique
dans les prises d'armes de la Pologne.
Cela disparaît à la scène. Nous ne som-
mes pas davantage préparés à cette ser-
vilité bizarre de conscience que nous
trouvons chez la sœur de lait de la com-
tesse de Lievitz. Rien de plus slave que
ces dévouements d'inférieurs, que oes
abnégations d'une âme entre les mains
d'un maître. Mais il me semble que le
gros public a quelque besoin encore
de se faire à ces mœurs de l'Europe
orientale, qui envahissent notre scène.
Car, si je compte bien, nous sommes à la
sept ou huitième pièce russe depuis deux
ans.Et si la comédie a jamais corrigé les
mœurs de quelqu'un, ce ne sera pas les
nôtres qu'elle amendera., tant on s'obstine
à nous offrir le spectacle unique de cel-
les des étrangers. Elle ramènera au droit
chemin quelque comtesse russe, batteuse
de buissons, capable de se convertir à
la vertu en l'entendant prêcher sur les
planches — car elles sont capables de
tout, ces créatures bizarres — surtout si
le prédicateur est joli garçon 1
Ladislas Bolski est un Polonais, de fa-
mille d'émigrés, qui, par une fiction un
peu forte à la scène et ingénieusement
établie dans le roman, est arrivé à l'âge
d'homme sans avoir su quoi que ce soit
de l'histoire de la Pologne. Il est amou-
reux de la comtesse de Lievitz, amou-
reux comme un fou ou comme un Bolski,
c'est tout un. Mais voici qu'au plus fort de
sa passion, au moment même où, à force
d'excentricités, il a fini parla faire presque
partager à la comtesse, Ladislas s'en-
flamme, à la lecture d'un livre racontant
les aventures de Tronsko, d'un beau zèle
patriotique. Ce gandin, métamorphosé
d'un coup, veut mourir pour la patrie et
sollicite le dangereux honneur d'être un
de ces émissaires que les comités po-
lonais dépêchaient en Pologne pour y
entretenir le feu sacré. Tronsko raille
ce feu de paille du petit Bolski ; sa mère
tremble et. supplie. Mais Ladislas est
fort entêté, et, pour donner une pre-
mière idée de sa force d'âme, il rompt,
à l'heure même où il espère la posséder,
avec la comtesse de Liévitz. Le troisième
acte nous montre Bolski dans son rôle
d'émissaire. Il fait la barbe, au propre
et au figuré, à tout l'état major de la ville
où il réside. Mais la comtesse ne serait
pas une Russe de M. V. Cherbuliez si le
goût passager qu'elle a éprouvé pour
Boiski ne se changeait pas en passion
quand il l'a dédaignée. Elledevine sa rési-
dence, elle y court, et, tout justement,
au débotté, elle envoie chercher un coif-
feur, qui n'est autre que Ladislas. Notre
héros coiffe consciencieusement la com-
tesse sur la scène et la décoiffe non
moins consciencieusement un instant
après. Mais, craignant de trahir ses se-
crets aux bras de la Circé russe, pris
d'ailleurs de jalousie, car il y a là un
certain prince Reschnine qui rôde au-
tour de Mme de Lievitz en entendant
qu'elle soit veuve, il se dénonce. Mis en
prison, il fait tout ce qu'il peut pouraggra-
ver sa situation, jusqu'au moment où la
comtessevientle trouver dans son cachot.
Elle lui apporte sa grâce, en échange
d'un acte de soumission au czar. Après
une belle défense, le petit Boiski, — les
Bolski sont toujours les Bolski, comme
dit Tronsko, et le père de Ladislas s'est -
déjà perdu pour une femme — signe tout
ce qu'on veut, et la comtesse lui promet,
en échange, tout ce qu'il désire. Quand
nous retournons en France, Bolski, très
penaud, y revient avec nous. La com-
tesse lui a fait faire, à Genève, un fort
pied de grue, et elle est retournée elle-
même à Paris. Bolski se rend d'abord
chez lui,où Tronsko avec sa raillerie et la
comtesse Bolska avec son désespoir in-
digné, lui font une situation terrible. En-
core si l'amour était là pour le consoler 1
Mais le malheureux reçoit de la com-
tesse l'accueil le plus froid, et quand, <
exaspéré, il lui rappelle les serments
d'amour échangés pendant la nuit qui a
suivi sa sortie de la citadelle, la belle
Russe, qui a vu jouer Mademoiselle de
Belle-Isle au Théâtre-Français de Saint-
Pétersbourg , apprend tout crûment à
Bolski qu'elle ne l'aime plus, qu'elle l'a
adoré héros et qu'elle l'a méprisé
PrIx du Numéro h Paris : 15 Centimes.^- Départements : 20 Centimes.-
Mardi 28 liMlii 18i9
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RÉDACTION
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction
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6, Place de la Bourse, 6
LOTEME mmE
Voir à la quatrième page
la liste complète des numé-
ros gagnants.
B "f'I_AETIN'
Paris, 27 Janvier 1879.
On n'est pas sans éprouver quelques
inquiétudes à Constantinople relative-
ment aux suites que peut avoir la cession
1te Podgoritza au Monténégro. On craint
que Hussein-Pacha, qui a été maintenu au
poste de gouverneur de Scutari sur la de-
mande des Albanais,ne se mette en rébel-
lion ouverte contre la Porte. Il règne,
d'ailleurs, une vive fermentation dans
tout le pays et surtout à Scutari, où sont
arrivés un grand nombre de réfugiés mu-
sulmans.
Le gouvernement austro-hongrois prend
d'énergiques mesures contre la peste qui
vient d'éclater en Russie. Le gouverne-
ment allemand participe à ces mesures et
une commission sanitaire vient de se réu-
nir à Tienne pour s'entendre sur les pre-
mières dispositions à prendre. La com-
mission a désigné les marchandises et les
objets venant de Russie, auxquels l'intro-
duction en Autriche et en Allemagne de-
vra être interdite ; elle a décidé que les
lettres et le papier-monnaie envoyés par la
poste seraient convenablement désinfec-
tés : elle a réglé la manière de procéder à
l'égard des provenances arrivant des ports
russes. Selon les cas, les principes éta-
blis par la commission pourront également
être appliqués aux provenances du Bas-
Danube, et les résolutions de la commis-
sion devront être communiquées au gou-
vernement roumain. Le prince Auesperg,
président du conseil des ministres, inter-
pellé à ce sujet à la Chambre des dépu-
tés de Vienne, a déclaré que, d'après les
les informations communiquées par le mi-
nistère des affaires étrangères, l'épidémie,
qu'on considère généralement comme
étant la peste, mais à laquelle les autorités
ne donnent pas ce nom, sévit dans six lo-
calités sur le Volga et dans les îles du
fleuve. Grâce aux mesures prises, on a
réussi jusqu'ici à circonscrire le foyer de
l'épidémie. Il ne pense donc pas que le
péril soit imminent et qu'il soit nécessai-
re de recourir aux moyens extrêmes.Tou-
tefois, a ajouté le ministre, le gouverne-
ment apporte la plus grande attention à
cette affaire.
Une guerre paraît imminente entre les
forces anglaises de l'Afrique méridionale
et les Zoulous. Le roi Cetywayo a repous-
sé l'ultimatum qu'on lui avait posé. Le
gouvernement anglais lui a accordé pour
faire sa soumission un dernier délai qui a
expiré le li janvier.
E. BARBIER.
Bou. dG Pari.8
5 0/0 114 fr., 113 961/4, 97 1/2.
Turc 11 fr. 27 1/2, 30.
Egypte 245 fr., 245 62.
Hongrois 70 fr. 5 8, 3/4.
Florins 63 3/4.
Russe i871. 83 5/8, 8/1, 11/16, 7/8, 13/16.
Italien, 74 fr. 25, 20.
Nous applaudissons cordialement au
décret qui nomme M. Hérold, préfet de
la Seine, en remplacement de M. Duval.
M. Hérold, que la confiance des délégués
du département de la Seine a porté au
Sénat en 1876, est un des hommes les
plus estimés de notre parti. Dévoué pas-
sionnément à la République, également
rompu à la politique et aux affaires, il
sera un administrateur habile, actif et
non suspect. Personne ne convenait
mieux que lui à ces importantes fonctions,
et personneWpfenant possession de la
préfecture de la Seine, ne recevra de la
population parisieune et de ses représen-
tants un meilleur accueil.
C'est par des choix aussi heureux pour
les autres emplois publics, de l'ordre ad-
ministratif ou judiciaire, auxquels il
doit prochainement être pourvu, que le
gouvernement, nous l'espérons, saura
donner toute satisfaction au pays et aux
Chambres. Il ne manque point, dans le
parti républicain, d'hommes instruits, stu-
dieux, probes et capables. Ce n'est point
le mérite qui fera défaut, pour peu que les
ministres prennent la peine de le décou-
vrir; mais il faut laprendre,cette peine,et
tâcher, comme disent les Anglais, de pla-
cer enfin dans chaque poste l'homme qui
doit y convenir le mieux, qu'il s'agisse
de préfets, ou de procureurs généraux,
ou de commandants de corps d'armée.
Or, voilà justement ce que nous deman-
dons, sans nous inquiéter plus que de
raison des exclamations pudibondes des
gens du 24 mai 1873 et du 16 mai 1877,
qui prétendent que les républicains veu-
lent une curée, et que toute leur poli-
tique ne tend point à une autre but. Si
la réforme du personnel se réduisait,
comme on le dit, à un nombre plus ou
moins grand de convoitises à satisfaire,
nous serions les premiers à crier :
holà ! nous qui ne voulons point qu'on
soupçonne la République d'être le règne
des solliciteurs et des délateurs. Mais la
question du personnel est heureusement
aussi simple que haute. Elle se réduit pour
nous à vouloir que la République soit ser-
vie avec autant de dévouement que les au-
tres régimes et, s'il se peut, avec plus d'in-
telligence et d'intégrité. Qui ne penserait
de même à notre place? et qui, de bonne
foi, osera se plaindre de l'excès de nos
réclamations ?
EUG. LIÉBERT.
NOS SERGENTS DE VILLE
L'émotion causée par le procès de la
Lanterne sur les révélations qui se sont
produites à l'audience a été profonde. Le
tribunal n'avait pas à examiner d'autres
faits que ceux qui lui étaient déférés par
la prévention : son rôle n'était pas de faire
une enquête, mais de juger un procès.
Plus d'une fois le tribunal a dû arrêter une
question de la défense ou interrompre la
déposition d'un témoin. Beaucoup de cho-
ses restent donc à savoir,et non des moins
graves peut-être, un coin du voile seule-
ment a été soulevé, et ce coin du voile
soulevé a suffi pour faire frémir la cons-
cience publique,qui croyait la torture dé-
finitivement abolie en France depuis la
Révolution de 1789. Maintenant les cho-
ses ne peuvent rester en l'état où elles
sont : il ne s'agit plus de la Lanterne et
de ses accusations, exactes ou non dans
tous leurs détails ; il s'agit de l'organisa-
tion d'une des institutions les plus uti-
les, les plus considérables de toute so-
ciété : la police. Il faut qu'une en-
quête soit faite ; il faut qu'elle soit
complète, et nous ajouterons publi-
que, car le pays tient à savoir la
vérité. Nous comptons bien que notre
honorable préfet de police a déjà cher-
ché à connaître toute la vérité sur de
monstrueux abus qu'on a pu lui cacher si
longtemps; nous attendons des décisions
énergiques pour le châtiment des coupa-
bles. Le conseil municipal de Paris, la
Chambre également tiendront aussi, nous
n'en doutons pas, à ce que la lumière
soit faite sur tous les points. Il n'est pas
de bons citoyens auxquels il n'importe
que la police soit respectée, et c'est à la
condition d'être respectable qu'elle sera
respecté
Mais ce que nous tenons à dire tout de
suite bien haut, ce que nous sommes heu-
reuxde dire, parce qu'il importe de ne pas
laisser s'établir des confusions fâcheu-
ses, capables de nuire à des hommes qui
comptent parmi les plus précieux et les
plus dévoués serviteurs du pays, c'est
que si de détestables pratiques sem-
blent avoir pu s'établir par malheur et
durer dans quelques coins obscurs de la
préfecture de police, rien de sem-
blable n'a été signalé dans la con-
duite de la nombreuse et vaillan-
te armée de nos sergents de ville, de nos
gardiens de la paix publique. Si, à côté
d'eux, d'autres, chargés de certaines be-
sognes spéciales, ont eu recours à cer-
tains raoyens barbares, ne les confon-
dons pas avec ces agents spéciaux, ne
faisons pas tomber sur eux la responsa-
bilité d'abus et de violences auxquelles
de près ni de loin ils n'ont aucune part.
Ceux-là n'ont pas lieu de mériter toute
notre confiance et notre estime : ceux-là
sont dignes des éloges que M. Albert Gi-
got leur adressait, il y a quelques semai-
nes, et dans lesquels il ne faisait qu'ex-
primer les sentiments de la population
de Paris. Presque tous anciens sol-
dats, ils continuent à pratiquer, au poste
de la défense sociale où ils sont placés,
qui est toujours un poste de fatigue et qui
est parfois un poste de périls, les tradi-
tions d'honneur, de discipline, de courage
qu'ils ont reçues au régiment, à l'ombre
glorieux du drapeau tricolore. La Répu-
blique a déjà fait quelque chose pour eux;
elle tiendra à honneur de faire plus en-
core, et nous, républicains, nous ne ces-
serons jamais de les défendre et de sol-
liciter pour eux une situation matérielle
et morale proportionnée à leurs bons of-
fices.
Aujourd'hui c'est à un impérieux sen-
timent d'équité que nous obéissons en
les dégageant d'une solidarité qui serait
une suprême injustice. Par le long et
rude hiver que nous traversons, par ces
nuits de gelée et de neige épaisse que
nous venons de subir, les citoyens qui
regagnent leur maison, où ils trouveront
un bon feu ou un lit bien couvert pour se
réchauffer, ne peuvent s'empêcher de
donner une pensée de reconnaissance et
d'admiration à ces sergents de ville cou-
rageux qui subissent sans se plaindre
toutes les intempéries du ciel et nous ga-
rantissent la sécurité des rues. L'argent
dont le budget les paie ne nous acquitte
pas envers eux, et vraiment il ne faut pas
que des scandales dont ils sont innocents
puissent nuire auprès de lecteurs mal
instruits à la considération dont ils jouis-
sent et à l'estime à laquelle ils ont droit.
CHARLES BIGOT.
m. i. i .—.— n, ■
L'enquête de la préfecture de police
L'article précédent était écrit quand nous
avons reçu communication de la lettre
que M. le préfet de police vient d'adres-
ser au ministre de l'intérieur :
Paris, le 26 janvier 1S79.
Monsieur le ministre,
Le tribunal corectlonnel, par son jugement
du 24 de ce mois, a condamné le gérant du
journal la Lanterne, et déclaré calomnieuses
les attaques dirigées dans ce journal contre
plusieurs fonctionnaires de mon administra-
tion. Mais en dehors des faits spéciaux qui
font l'objet de la poursuite, il a été produit
au cours des débats judiciaires des alléga-
tions dont l'opinion s'est émue et qui Inté-
ressent à un haut degré l'honneur de l'admi-
nistration que je dirige.
On a allégué que des détenus avaient été
soumis par certains agents à d'odieuses vio-
lences, qui auraient eu pour but de leur arra-
cher des aveux ; que des députés des dépar-
tements avalent été l'objet, dans la période
électorale qui a suhi le 16 Mat, d'une sur-
veillance Inquisitoriale exercée par des agents
de la préfecture de police ; que de i commu-
nications compromettant l'honneur de ci-
toyens avaient, dans l'intérêt de coupables
qu'on voulait protéger, été adressées par
des chefs de service à certains organes de la
presse ; que tout avancement avait été systé-
matiquement refusé aux agents dévoués à la
République et que les faveurs de l'adminis-
tration avaient été réservées aux ennemis du
gouvernement.
Des faits de cette nature ne constitueraient
rien moins que dectes de trahison et de
prévarication. Une grande administration
chargée de veiller à la sécurité publique et
de protéger les citoyens ne peut rester sous
le coup de telles accusations. Elle a besoin,
pour accomplir sa noble et difficile mission,
de puiser sa force dans la confiance des ci-
toyens, et de demander à l'opinion publique
l'autorité morale sans laquelle elle demeure-
rait impuissante. Elle a le droit et le devoir
de réclamer la lumière.
Je viens donc vous prier, monsieur le mi-
nistre, dans l'intérêt de l'administration à la
tête de laquelle m'a placé le gouvernement
de la République, pour l'honneur de collabo-
rateurs que je couvre de ma responsabilité et
pour le mien, de vouloir bien faire procéder
sous votre direction à une enquête sur les faits
que je viens de vous exposer.
L'opinion demande que la vérité soit con-
nue et que justice soit faite. Plus quepesonne;
je le demande avec elle.
Veuillez agréer, monsieur le ministre, l'hom-
mage de mon profond respect.
Le préfet de police,
Signé : Albert GIGOT.
Le ministre de l'intérieur a aprouvé la
proposition de M. le préfet de police.
Tout est bien qui finit bien.
M. Cotelle, le préfet des Deux-Sèvres,
a eu le courage, fort rare chez un chef
d'administration, de reconnaître son er-
reur, et le courage plus rare encore de la
réparer.
On se rappelle l'histoire de ce pauvre
petit enfant, mort sans baptême, qui avait
été d'abord enseveli, sur l'injonction de
M. le curé, dans un coin infamant du ci-
metière; puis, transporté par l'ordre du
maire, dans la partie de ce même cime-
tière où reposait sa famille ; puis exhumé
encore, et rejeté, sur un nouvel ordre du
préfet, dans ce même coin infamant d'où
il avait été tiré.
M. Cotelle, qui avait donné cet ordre,
s'est aperçu qu'il avait fait une fausse
application de la loi qui régit la police
des cimetières. Il a révoqué son ordre, et
la malheureuse petite créature, exhumée
une troisième fois, reposera enfin près
des siens, là où sa mère elle-même lui
avait choisi une place.
Le préfet des Deux-Sèvres avait eu,
dans cette affaire, le tort grave de de-
mander à un livre composé par un abbé
le soin de lui expliquer la loi française
et de lui marquer son devoir.
Il faut croire que cet abbé l'avait odieu-
sement trompé ; car le texte de loi au-
quel M. le préfet m'avait renvoyé, le texte
de loi visé par son arrêté, texte de loi
qu'il avait imprudemment emprunté d'un
ouvrage clérical, ce texte de loi disait
précisément le contraire de ce que M. le
préfet, sur la foi de M. l'abbé, affirmait y
avoir vu.
M. le préfet des Deux-Sèvres, avait si
l'on s'en souvient, allégué pour justifier
sa conduite un avis du conseil d'Etat du 29
avril 1831, qui, disait-il, commandait aux
maires de rejeter de la partie du cime-
tière communal affectée au culte catho-
lique les enfants morts sans baptême.
Je n'avais pas jugé à propos de vérifier
moi-même le texte. Aussi ai-je été stupé-
fait quand on me l'a apporté et que j'y ai
vu qu'il disait précisément le contraire
de ce que M. Cotelle avait lu dans le
livre de M. l'abbé.
Prenez le Code annoté de la police
administrative judiciaire et munici-
pale, par Napoléon Bacqua de Labarthe,
avocat (Paul Dupont, imprimeur, 1875).
C'est un livre qui a un caractère semi-
officiel, qui doit être et qui est entre les
mains de tous les préfets, sous-préfets,
maires et commissaires de police. Ou-
vrez-le à la page 364 et vous lirez ce qui
suit. Je cite textuellement :
Une difficulté s'est élevée à l'occasion de la
sépulture des enfants morts sans baptême.
Des enfants morts sans baptême 1 c'est
bien là notre cas, si je ne m'abuse. Eh
bien, continuons :
L'autorité municipale peut-elle être tenue,
sur la demande du clerg 4, d'établir dans le ci-
metière, indépendamment des divisions par
cultes prescrites par l'article 15, une subdivi-
sion spéciale pour l'inhumation des corps des
enfants dont il s'agit.
Par application des termes précis de la
loi, qui n'exige des séparations distinctes
dans les cimetières que pour les différents
cultes qui peuvent être professés dans la
même commune, un avis du conseil d'Etat
du 29 avril 183i s'est prononcé POUR LA
NEGATIVE. -
Y a-t-il rien de plus clair que ce texte?
Comment le jésuite, à qui M. Cotelle s'en
était référé, a-t-il pu prendre la négative
pour l'affirmative et le noir pour le blanc?
Je n'en sais rien; mais voilà pour les
préfets une leçon dont j'espère qu'ils
profiteront tous.
M. Cotelle s'est exécuté loyalement. Il
avait été trompé ; il est revenu sur son
ordre, dès qu'on lui a montré la loi. Il
n'y a plus rien à dire. Tous les députés
républicains de son département, MM.
Louis Tribert, Antonin Proust, Henri Gi-
raud, de Laporte et le docteur Ganne se
portent garants de son libéralisme ; voilà
qui est bien. Nous n'insisterons pas. Nous
sommes ravis que cette affaire se soit
heureusement terminée.
Il fallait qu'elle eût cette issue. Les Pa-
risiens, je le sais, n'attachent qu'une mé-
diocre importance à ces petits faits de la
vie ordinaire dans les campagnes. Un en-
fant enterré dans un coin du cimetière
plutôt que dans un autre, voilà bien de
quoi crier !
Eh mais ! savez-vous que dans tout le
pays cette aventure avait causé un émoi
profond, et que les conséquences politi-
ques en pouvaient être très fâcheuses !
Le préfet avait donné tort au maire :
tout aussitôt les idées libérales que ce
maire représentait avaient perdu du ter-
sain dans la contrée. C'était le triomphe
du parti clérical, et le curé n'avait pas
manqué de se targuer de cet avantage.
Savez-vous bien que le maire, si justice
ne lui eût,été rendue, aurait été forcé de
donner sa démission 1 On commençait à
l'insulter et à rire de lui dans la com-
mune. Il ne faut que deux ou trois lé-
gers camouflets infligés ainsi aux repré-
sentants de la cause républicaine dans
un pays, pour qu'au jour des élections,
ce soient des cléricaux qui passent.
FRANCISQUE SARCEY.
.——————————— ————————————
INFORMA TION
On lit ce matin en tête de la partie offi-
cielle du Journal officiel:
Par décret du président de la Républi-
que, en date du 25 janvier 1879, rendu sur
la proposition du ministre de l'intérieur,
M. Hérold, sénateur, a été nommé préfet
du département de la Seine, en remplace-
ment de M. Ferdinand Duval, mis en dis-
ponibilité.
Plusieurs journaux prennent plaisir à
nommer M. Calmon directeur de la Mon-
naie. Nous sommes en mesure de décla-
rer que l'honorable sénateur, après avoir
refusé le gouvernement de la Banque de
France, ne songe nullement à accepter
une situation bien moins considérable et
d'ailleurs occupée par un de nos amis po-
litiques, M. Ruau.
Parmi les nouveaux trésoriers-payeurs
généraux dont la nomination a été signée
au conseil des ministres de samedi, nous
remarquons le nom de M. A. Desplan-
ques.
M. Desplanques, élu conseiller général
du canton de Chinon, en 1867, contre le
candidat officiel, a fait partie pendant dix
ans de la fraction républicaine du conseil
général d'Indre-et-Loire.
Porté à la députation en 1876, il s'est
désisté en faveur de l'autre candidat ré-
publicain. M. Desplanques sera dans l'ad-
ministration des finances un des meilleurs
fonctionnaires du gouvernement actuel.
Un mouvement important dans le per-
sonnel des inspecteurs d'académie doit
paraître d'ici peu de jours.
M. Roucou, chef de bureau au ministère
des finances, est nommé administrateur à
la direction générale des contributions
indirectes.
Le Rappel, après avoir confirmé les ren-
seignements donnés par la République
française sur le remplacement de quatre
généraux commandants de corps, ajoute :
Un cinquième changement est très-pro
bable, c'est celui du général Montaudon, à
Amiens.
Enfin nous dirons que, pour le duc d Au-
male, il n'y aura qu'un simple déplace-
ment. Le prince-général serait envoyé, as-
sure-t-on, de Besançon à Bourges.
Les choix des nouveaux titulaires ne
sont pas encore arrêtés dénnitivement,
Par décision ministérielle du 24 3anJ
vier,
MM. Brown, capitaine adjudant-major
au 133' régiment d'infanterie ;
Altmayer, capitaine d'artillerie, adjoint
au professeur d'artillerie à l'Ecole spéciale
d'artillerie ;
Tézenas, capitaine de deuxième classe
d'état-major du génie;
Et de Lur Saluces, capitaine au 138 ré-
giment de dragons, en dernier lieu offi-
cier d'ordonnance du général de division
Borel, ont été désignés pour servir en qua-
lité d'officiers d'ordonnance auprès de M.
le général de division Gresley, ministre de
la guerre.
L'agenee Havas dit que les communicaJ
tions télégraphiques de Paris avec toutes
les villes du centre et du Midi sont entiè-
rement interrompues. ,
Les communications avec la Suisse et
l'Allemagne sont très diffiolles. Les commu-
nications avec le Nqrd et l'Ouest restent
bonnes.
Nous avons dit que désormais les ins-
tituteurs et institutrices laïques jouiraient
sur les chemins de fer, du privilége réser-
vé jusqu'à présent aux congréganistes.
Voici la lettre par laquelle le ministre
des travaux public a annoncé cette nouvel-
le à M. Schœlcher :
Paris, 22 janvier 18*9.
Monsieur le sénateur et cher collègue,
Vous avez bien voulu appeler l'attention de
mon administration sur des vœux tendant à
ce que les Instituteurs primaires des deux
sexes jouissent sur les chemins de fer de là
faveur du tarif à demi-place.
J'ai le plaisir de vous annoncer que toutes
les compagnies se sont empressées de satis-
faire à la demande que je leur al adressée
dans ce sens, et je suis vraiment heureux
d'avoir pu, dans cette circonstance, aboutir à
un résultat conforme au désir que vous avez
exprimé en faveur d'une catégorie de fonc-
tionnaires si dignes d'Intérêt.
Agréez, monsieur le sénateur et cher collè-
gue, l'assurance de ma haute considéra-
tion.
FREYCINET.
Nous avons annoncé que l'Académie
française avait procédé dans sa séance de
jeudi dernier à la nomination, par la voie
du sort, de la commission à laquelle se-
ront soumis, jeudi prochain 30 janvier, le
discours de réception de M. Renan et la
réponse de M. Mézières.
Le discours de M. Henri Martin, nommé
en remplacement de M. Thiers, a été re-
mis au secrétaire perpétuel et immédiate
ment envoyé à M. Emile Ollivier, chargé
d'y répondre comme directeur aumoment
où s'est ouverte la succession académique
de l'illustre mort.
C'est au jourd'hui lundi que se réunit
au ministère de l'intérieur, sous la prési-
dence de M. Bérenger, sénateur, le con-
seil supérieur des prisons.
Feuilleton du x/r SIÈCLE
Du 28 janvier 1879.
CAUSERIE
DRAMATIQUE
TIIÉATRB DU VAUDEVILLE : VA venture de La-
dislas Bolski, pièce en cinq actes, de M. V.
Cherbuliez. — Festival de 1 Hippodrome.
J'ai vivement regretté le contre-
temps qui a fait remettre à mardi pro-
chain la première représentation de Sa-
muel Brohl, que l'Odéon nous pro-
mettait pour hier. On avait joué lundi
dernier l'Aventure de Ladislas Bolski,
au Vaudeville, et il eût été très intéres-
sant d'avoir à juger ensemble ces œuvres
tirées toutes deux des romans de M. V.
Cherbuliez. Il faut renoncer à cette
étude, à ces comparaisons qui promet-
taient d'être utiles, et nous borner à par-
er de la seule pièce du VaudevIlle.
Le roman de M. V. Cherbuliez, l'A-
venture de Ladislas Bolski, et le drame
qu'il en a tiré, aidé, dit-on, dans cette
tâche délicate d'appropriation à la
scène, par un homme du métier ré-
puté parmi les plus habiles, ce roman et
ce drame diffèrent de la façon la plus
singulière du roman et du drame de l'As-
sommoir, que nous avions vu la veille.
Chez M. V. Cherbuliez, c'est l'idéal dans
ce qu'il y a de plus exalté, les senti-
ments humains raffinés jusqu'à la folie,
le voyage étourdissant dans le royaume
du Bleu; chez M. E. Zola, c'est la réalité
dans ce qu'elle a de plus tangible, les
maladies de l'homme exhibées' jusqu'à
l'écœurement, le voyage souvent pénible
dans les enfers de la vie ordinaire, et s'il
y a du bleu là-dedans, c'est le petit-bleu
des cabarets. Cependant ces deux œu-
vres si étrangement contrastées ont un
point de contact entre elles. Passant du
livre à la scène, elles s'atténuent, elles
se tempèrent, elles s'affadissent un peu.
Les partis pris des auteurs baissent la
tête devant les nécessités du théâtre. Il a
fallu également modérer la crudité des
tableaux et la logique exaltée des pas-
sions. Les deux romanciers ont dû met-
tre de l'eau dans leur vin, comme on dit.
L'un et l'autre a modifié le dénouement-
Ils n'ont pu aller ni au bout de la
leçon, ni au bout de la folie. Ivresse
du vin, ivresse des passions, il a fal-
lu tout refroidir. Le secret du génie
oratoire de Mirabeau et de Danton, —
j'ajouterais volontiers un troisième nom
à ceux-ci — a été, me disait un politique,
de dire violemment des choses presque
toujours modérées en soi. N'en serait-il
pas ainsi pour le théâtre? La scène ne
serait-elle pas l'endroit du monde où il
êsTie plus sûr et le plus aisé de mettre
en relief des pensées acceptées déjà de
la foule,et où il est le plus périlleux et le
plus difficile de lui faire bien accueillir la
nouveauté des aperçus, dont elle raffole
dans le roman ?
J'avais lu l'Aventure deLadislas Bolski
avant de voir le drame qu'on en a tiré,
tandis que je ne connais pas un mot (et
je m'en réjouis) de Samuel Brohl. De
plus, autrefois, à Genève et ailleurs, j'ai
connu le monde spécial que M. V. Cher-
buliez aime et excelle à peindre. J'ai pu
jeter un regard curieux dans ces malles
d'émigrés slaves, polonais et hongrois,
où l'on trouve pêle-mêle le plumet pater-
nel, les faux passeports, les portraits de
femmes, les plans de citadelles à enlever
et les adresses de balcons à escalader 1
J'ai entrevu le fort et le faible de ces ra-
ces admirables; mais mal équilibrées,
douées et impuissantes à la fois, qui sem-
blent exister surtout pour justifier les
psychologues, quand ils disent qu'on
ne peut marquer avec certitude la li-
mite - du sublime et de la folie. Aussi
n'ai-je éprouvé aucune surprise en
voyant l'Aventure de Ladislas Bolski.
Mais je me demande si un spectateur,
moins préparé par la lecture et le ha-
sard, n'aura pas trouvé à l'œuvre un
parfum d'étrangeté presque incompré-
hensible ? Il m'a semblé que le raccourci
du livre en drame était souvent trop inat-
tendu et trop violent. Dans le livre, c'est
après cinquante pages sur l'éducation du
héros que nous voyons apparaître ce plu-
met singulier, qu'il porte comme fétiche
au jeu, et quia dérouté le soir de la pre-
mière. Le caractère de Tronsko, ce rail-
leur toujours prêt au martyre, a servi à
M. V. Cherbuliez pour peindre l'antago-
nisme toujours existant entre l'élément
démocratique et l'élément aristocratique
dans les prises d'armes de la Pologne.
Cela disparaît à la scène. Nous ne som-
mes pas davantage préparés à cette ser-
vilité bizarre de conscience que nous
trouvons chez la sœur de lait de la com-
tesse de Lievitz. Rien de plus slave que
ces dévouements d'inférieurs, que oes
abnégations d'une âme entre les mains
d'un maître. Mais il me semble que le
gros public a quelque besoin encore
de se faire à ces mœurs de l'Europe
orientale, qui envahissent notre scène.
Car, si je compte bien, nous sommes à la
sept ou huitième pièce russe depuis deux
ans.Et si la comédie a jamais corrigé les
mœurs de quelqu'un, ce ne sera pas les
nôtres qu'elle amendera., tant on s'obstine
à nous offrir le spectacle unique de cel-
les des étrangers. Elle ramènera au droit
chemin quelque comtesse russe, batteuse
de buissons, capable de se convertir à
la vertu en l'entendant prêcher sur les
planches — car elles sont capables de
tout, ces créatures bizarres — surtout si
le prédicateur est joli garçon 1
Ladislas Bolski est un Polonais, de fa-
mille d'émigrés, qui, par une fiction un
peu forte à la scène et ingénieusement
établie dans le roman, est arrivé à l'âge
d'homme sans avoir su quoi que ce soit
de l'histoire de la Pologne. Il est amou-
reux de la comtesse de Lievitz, amou-
reux comme un fou ou comme un Bolski,
c'est tout un. Mais voici qu'au plus fort de
sa passion, au moment même où, à force
d'excentricités, il a fini parla faire presque
partager à la comtesse, Ladislas s'en-
flamme, à la lecture d'un livre racontant
les aventures de Tronsko, d'un beau zèle
patriotique. Ce gandin, métamorphosé
d'un coup, veut mourir pour la patrie et
sollicite le dangereux honneur d'être un
de ces émissaires que les comités po-
lonais dépêchaient en Pologne pour y
entretenir le feu sacré. Tronsko raille
ce feu de paille du petit Bolski ; sa mère
tremble et. supplie. Mais Ladislas est
fort entêté, et, pour donner une pre-
mière idée de sa force d'âme, il rompt,
à l'heure même où il espère la posséder,
avec la comtesse de Liévitz. Le troisième
acte nous montre Bolski dans son rôle
d'émissaire. Il fait la barbe, au propre
et au figuré, à tout l'état major de la ville
où il réside. Mais la comtesse ne serait
pas une Russe de M. V. Cherbuliez si le
goût passager qu'elle a éprouvé pour
Boiski ne se changeait pas en passion
quand il l'a dédaignée. Elledevine sa rési-
dence, elle y court, et, tout justement,
au débotté, elle envoie chercher un coif-
feur, qui n'est autre que Ladislas. Notre
héros coiffe consciencieusement la com-
tesse sur la scène et la décoiffe non
moins consciencieusement un instant
après. Mais, craignant de trahir ses se-
crets aux bras de la Circé russe, pris
d'ailleurs de jalousie, car il y a là un
certain prince Reschnine qui rôde au-
tour de Mme de Lievitz en entendant
qu'elle soit veuve, il se dénonce. Mis en
prison, il fait tout ce qu'il peut pouraggra-
ver sa situation, jusqu'au moment où la
comtessevientle trouver dans son cachot.
Elle lui apporte sa grâce, en échange
d'un acte de soumission au czar. Après
une belle défense, le petit Boiski, — les
Bolski sont toujours les Bolski, comme
dit Tronsko, et le père de Ladislas s'est -
déjà perdu pour une femme — signe tout
ce qu'on veut, et la comtesse lui promet,
en échange, tout ce qu'il désire. Quand
nous retournons en France, Bolski, très
penaud, y revient avec nous. La com-
tesse lui a fait faire, à Genève, un fort
pied de grue, et elle est retournée elle-
même à Paris. Bolski se rend d'abord
chez lui,où Tronsko avec sa raillerie et la
comtesse Bolska avec son désespoir in-
digné, lui font une situation terrible. En-
core si l'amour était là pour le consoler 1
Mais le malheureux reçoit de la com-
tesse l'accueil le plus froid, et quand, <
exaspéré, il lui rappelle les serments
d'amour échangés pendant la nuit qui a
suivi sa sortie de la citadelle, la belle
Russe, qui a vu jouer Mademoiselle de
Belle-Isle au Théâtre-Français de Saint-
Pétersbourg , apprend tout crûment à
Bolski qu'elle ne l'aime plus, qu'elle l'a
adoré héros et qu'elle l'a méprisé
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