Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1894-11-30
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Description : 30 novembre 1894 30 novembre 1894
Description : 1894/11/30 (A24,N8355). 1894/11/30 (A24,N8355).
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/04/2013
VINGT-QUATRIÈME ANNÉE. — N8 8,355
LE NUMÉRO CINQ CENTIMES
YENïïaÈftt 30 NOVEMBRE 1894
RÉDACTION ET ADMINISTRATION
2 42, Rue Montmartre
PARIS
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Chez MM. LAGRANGE, CERF et CIO
6, place de la Bourse, 6
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Départements - 7 f.; — t2 f.1 — 241
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LE RiPPROCHEilT
ANGLO-RUSSE
Depuis la chute de Napoléon Ier, qui
avait réuni toute l'Europe contre lui,
l'antagonisme de la Russie et de l'Angle-
terre a plané sur la diplomatie de notre
siècle.
Le duel de la baleine et de l'éléphant,
prédit par M. de Bismarck, serait-il à la
veille de se terminer par une réconci-
liation? Quoique improbable, la chose
paraît possible, et elle se produirait si
les alliances de famille et les désirs per-
sonnels des souverains étaient de na-
ture à changer la marche des destinées
des peuples.
Le mariage de Nicolas II avec une
petite-fille de la reine Victoria, très
particulièrement aimée de sa grand-
mère, établit entre les cours de Saint-
Pétersbourg et de Londres des relations
d'un caractère nouveau et affectueux.
On l'a vu pendant les funérailles d'A-
lexandre III. Depuis la maison mor-
tuaire de Livadia jusqu'à la basilique
des bords ; de la Néva, le prince de
Galles a tenu à se montrer à côté du
jeune empereur et à lui témoigner une
extrême sympathie.
Ces faits ont une valeur incontestable,
et il n'est pas douteux que les diplo-
mates des deux pays y trouveront un
encouragement à des tentatives d'ac-
cord. On parle déjà de négociations
pour abroger ce qui reste encore du
traité de Paris et permettre aux navires
de guerre de tous les pays de circuler li-
brement dans le Bosphore et dans les
Dardanelles.
La défense avait été stipulée princi-
palement à l'instigation des Anglais qui
voulaient bloquer les Russes dans la
mer Noire. S'ils sont disposés aujour-
d'hui à faire tomber ces barrières di-
plomatiques, nous n'avons aucun motif
pour nous y opposer, et nous avons des
raisons pour nous montrer satisfaits.
En droit naturel, on ne voit pas du
reste pourquoi les détroits de la Tur-
quie sont ainsi fermés, alors que les
passages communiquant de la mer du
Nord dans la Baltique sont sillonnés
avec indifférence par tous les pavillons,
Il n'y a aucun argument à faire valoir
pour Sébastopol qui ne puisse s'appli-
quer à Cronstadt. Le cas est identique.
En supprimant, en 1857, les droits
de péage dans le Sund et dans les deux
Belt, l'Europe a montré combien elle
tenait à la liberté des mers. Pourquoi
avoir violé ce principe à Constanti-
nople, alors qu'on le proclamait à Co-
penhague?
Il ne faut pas, d'ailleurs, attacher à
des interdictions diplomatiques une por-
tée qu'elles ne sauraient avoir. Le pre-
mier coup de canon déchire les traités,
* et ce n'est pas avec une phrase écrite
sur un parchemin qu'on barre la route
à une armée ou à une flotte.
La Constitution qui fut violée par le
général Bonaparte, le 18 brumaire, dé-
tendait à tout corps de troupes d'appro-
cher du palais législatif. Les grenadiers
s'en souciaient infiniment peu en péné-
trant dans l'orangerie de Saint-Cloud.
En temps de paix, ces choses-là
gênent et ennuient. L'état de guerre les
ignore.
C'est comme la fameuse neutralité
du canal de Suez. En vérité, voilà un
bon billet, comme celui de La Châtre.
La puissance maîtresse des océans ne
laisserait passer que ceux auxquels elle
- accorderait cette autorisation : un cui-
rassé, à quelques milles au large, fer-
merait à sa guise l'entrée du fossé
creusé dans le sable égyptien. Une porte
ne peut jamais être neutre, puisqu'il
suffit d'y placer une sentinelle.
Aussi l'Angleterre ne ferait-elle pas
une concession valant un grand prix en
ne s'opposant plus au transit des vais-
seaux de guerre russes dans les détroits.
Nous, en revanche, nous aurions lieu,
de nous en féliciter, comme nous nous
sommes félicités déjà, lors de l'arrivée
de l'escadre de l'amiral Avelane dans la
Méditerranée.
Le rêve du lac français n'existe plus.
Il s'agit, maintenant, d'empêcher qu'il
n'y ait là un lac anglo-italien. Le pa-
villon russe n'y flottera jamais trop, au
gré de nos désirs qui cadrent avec nos
intérêts.
Nos sentiments pour la Russie n'ont
rien à voir du reste, avec la jalousie. Il
no saurait nous, déplaire que notre ami
entraînât l'Angleterre hors de l'orbite
de U; r:pîe alliance.
Si jamais les Anglais ont envie de
u ;.lire du nuage où leur commerce
iJFPl'llaLHJILd se complaît, nous serons
Cu^ ait-;, qu'ils prennent terre chez les
! t -ses.
C'est cela que nous répondons en
toute sincérité aux journaux anglais.
Mais, très sincèrement aussi, nous dou-
tons de cette tendresse subite entre deux
peuples qui ne s'aiment pas, qui se
heurtent en Asie, et dont les génies
n'ont aucun point de contact.
L'Angleterre est une puissance étran-
ge. Les autres luttent quand elles y ont
un avantage. Elle, elle se met en tra-
vers des autres, même lorsque cela ne
lui sert à rien.
En un mot, la nation anglaise est
grande, mais insupportable. Si elle se
laisse aller aux séductions slaves, ce
sera un triomphe pour la coquetterie
russe.
Usait.
msmaÊmmmMwmmiaamm lisait.
L'AFFAIRE DREYFUS
Hier, dans les couloirs de la Chambre, on
se montrait préoccupé d'un article paru dans
le Figaro du matin et dont voici le principal
passage :
« Lorsque le ministre de la guerre eut sous
les yeux les preuves « criantes » de la trahison
du capitaine Dreyfus, il fut tellement cons-
terné — tant les conséquences de cette trahi-
son pouvaient être terribles — qu'il téléphona
sur l'heure à M. Dupuy et que le président
du conseil convoqua ses collègues pour le
lendemain matin, en séance extraordinaire.
» J'ai soumis à M. le président du conseil
et à mes collègues, aie disait récemment le
général Mercier, les rapports accablants qui
m'avaient été communiqués, et, sans aucun
retard, l'arrestation du capitaine Dreyfus a
été ordonnée. On a écrit, à ce sujet, beaucoup
d'inexactitudes : on a dit, notamment, que le
capitaine Dreyfus avait offert des documents
secrets au gouvernement italien.
» C'est une erreur. Il ne m'est pas permis
d'en dire davantage, puisque l'instruction
n'est pas close. Tout ce que l'on peut répéter,
c'est que la culpabilité de cet officier est ab-
solument certaine et qu'il a eu des complices
civils. »
Voici, d'autre part, la note publiée par le
Temps au sujet de l'article du Figaro :
« Le ministre n'a pas tenu ces propos. Il ne
pouvait émettre un avis sur la solution d'une
cause déférée à la justice militaire. D'autre
part, il n'a pas pu parler de complices civils,
puisque cette complicité, si elle eût existé,
eût rendu la cause justiciable de la cour d'as-
sises et non plus du conseil de guerre. »
Ajoutons qu'il était question d'un incident
qui devait se produire à la Chambre, mais il
paraît probable que le démenti du Temps le
rendra inutile. On prétend aussi que le con
seil des ministres de ce matin s occupera à
nouveau de l'affaire Dreyfus,
BOMBANCE
A l'inauguration du nouveau Reichstag
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Berlin, 28 novembre.
Le soir de l'inauguration du nouveau pa-
lais du Reichstag, on inaugurera aussi le
buffet.
Des dons de toutes sortes sont envoyés à cet
effet de tous les côtés au bureau du Reichs-
tag.
Une grande brasserie de Bavière a offert
10 hectolitres de bière ; un grand fabricant
de vins mousseux a envoyé 500 bouteilles de
Champagne ; un Allemand établi en Havane
a fait parvenir au Parlement une caisse rem-
plie de 2,000 cigares. Il espère sans doute
que sur les 300 députés que compte l'assem-
blée, il y en aura beaucoup qui s'en fourre-
ront dans la poche.
Enfin un grand boucher bavarrois à livré
en holocauste cinq veaux. Il a joint à ce don
un billet contenant ce verset très en cours
pendant la dernière période électorale :
Nur die allergroessten Kaelber
Wachlen ihre Metzger selber.
(Seuls les plus grands veaux choisissent
eux-mêmes leurs bouchers.)
LA RUSSIE AU BOSPHORE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Berlin, 28 novembre.
La Gazette de Voss prétend tenir de bonne
source que pendant son séj our à Constantinople,
l'amiral Avelane a demandé au grand-vizir d'aban-
donner à la Russie une station de charbon sur le
Bosphore.
Le gouvernement russe a proposé le choix entre
quatre localités, dont deux sur la côte européenne
et deux sur la rive asiatique. Le grand-vizir a
tout d'abord refusé de communiquer cette de-
mande au sultan, mais il a été finalement décidé
à le faire. Jusqu'ici la Russie n'a encore reçu au-
cune réponse.
Mme CARNOT A GRASSE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Nice, 28 novembre.
Mme Carnot est à Grasse depuis quelques jours.
La veuve du regretté président de la République
passera l'hiver dans cette ville auprès de son fils
et de sa belle-fille.
LE « VIEUX GAMIN CHÉRI »
DE CLERGYMAN
Londres, 28 novembre.
Un curieux procès en divorce se déroule en
ce moment devant les tribunaux londoniens.
Il s'agit d'un action intentée par un grand
industriel, M. Worrall, à sa femme, qu'il
accuse d'avoir commis adultère avec le cler-
gyman de leur paroisse, M. Hugh-William
Johnes ; cette accusation n'est qu'une riposte,
car Mme Worrall plaide de son côté en sépa-
ration, à raison d'actes de cruauté qu'elle re-
proche à son mari.
Dans l'audience d'hier, lecture a été donnée
d'une lettre dans laquelle Mme Worrall
s'adressait au révérend Hugh-William Jones
en ces termes : « Mon vieux gamin chéri.
tout ce que je puis dire, c'est que jamais, ja-
mais, jamais il n'a existé ni n'existera votre
pareil à mes yeux. » Et elle signait : « Votre
pauvre vieille Fuzbuz (appellation familière
que nous traduirions par « chien-chien »).
Mme Worrall a déclaré que cette lettre
avait été écrite à seule fin de chicaner son
mari, mais qu'elle n'avait aucune intention
de l'envoyer à son adresse. De son côté, le
révérend H.-W. Jones s'est vivement défendu
d'avoir commis adultère avec l'accusée pen-
dant trois jours qu'ils passèrent dans le
même hôtel à Saltburn ; il a ajouté que, si
elle venait le voir en son domicile particulier,
à Crimswarth, c'était pour s'occuper des
affaires de la paroisse.
LEVEE DE BISTOURIS
MÉDECINS ET MALADES
Les tarifs des hôpitaux. - Maladespayants.
— Chez le professeur Cornil.
Un conflit assez bizarre menace d'éclater
entre les médecins de Paris et l'administra-
tion de l'Assistance publique.
On sait que les hôpitaux de Paris reçoivent
des malades payants qui, moyennant une
pension fixée jusqu'alors à 3 fr. 50 par jour,
peuvent se faire opérer par nos meilleurs
chirurgiens et recevoir tous les soins qu'exige
leur état.
L'Assistance publique, qui ne recule pas de-
vant les petits moyens pour équilibrer son
budget, et trouvant peut-être que les malades
payants deviennent trop nombreux, vient de
porter à 5 francs le prix des journées de sé-
jour dans les hôpitaux.
Les médecins sont consternés. D'après eux,
les bourgeois qui auraient eu honte d'aller à
l'hôpital pour 9 francs trouveront très chic
de s'y faire soigner pour cent sous; la profes-
sion est perdue ; encore quelques mois, et les
trois quarts des docteurs seront réduits à la
mendicité. Ces doléances ont été très sérieu-
sement formulées à un banquet récent par
les docteurs Le Blond, Le Baron et Fauvel.
L'INTÉRÊT DES MALADES
Nous avons causé de cette histoire avec
M. le professeur Cornil.
— Il semble, nous dit-il, que si quelqu'un
avait à se plaindre dans la circonstance, ce
seraient surtout les malades, dont l'intérêt
doit primer celui des médecins.
L'augmentation des tarifs de l'Assistance
publique ne lui produira guère d'excédents
de recettes, et elle gênera beaucoup de per-
sonnes qui, pour ne pas être indigentes, ne
sont pas moins dignes de sollicitude. La
plupart du temps, en effet, les malades qui se
résignent à entrer à l'hôpital comme malades
payants y sont contraints par l'impossi-
bilité où ils se trouvent de payer les hono-
raires fantastiques réclamés par les chirur-
giens.
Le moindre coup de bistouri se vend au-
jourd'hui 500 francs, et les praticiens sérieùx
demandent vite deux ou trois mille francs
pour une opération.
En outre, depuis que l'on a reconnu l'im-
portance de l'antisepsie, les malades ne peu-
vent obtenir de se faire opérer chez eux ;
force leur est de se laisser installer dans une
maison de santé où on leur fait payer au mi-
nimum 20 ou 25 francs par jour.
Il semble donc peu opportun de rendre l'en-
trée de l'hôpital moins facile aux personnes
n'ayant pas les ressources suffisantes pour
s'offrir ces traitements de luxe. Et à ce point
de vue, mais à celui-là seul, le changement
introduit par l'Assistance publique pourrait
être critiqué.
L'INTÉRÊT DES MÉDECINS
En ce qui concerne les médecins, il est évi-
dent que le métier devient de plus en plus
dur.
Songez au nombre de citoyens français ins-
crits aux bureaux de bienfaisance, membres
de sociétés de secours mutuels, employés d'in-
dustrie et d'administration qui sont soignés
sans bourse délier. Dénombrez les malades
qui sont aux cliniques gratuites comptez les
camarades, les amis et les connaissances dont
un médecin ne saurait recevoir d'honoraires,
et vous verrez à combien se réduit le nombre
des malades payant individuellement la visite
qu'on leur fait ou la consultation qu'on leur
donne.
Avec cela la concurrence est énorme. On
compte aujourd'hui 4,000 étudiants en méde-
cine à Paris, alors qu'il y en avait 2,000 il y
a vingt ans. Et parmi ces jeunes gens, aucun
de ceux qui paraissent avoir quelque avenir
ne veut quitter la capitale. On cite à peine
un interne sur cent qui aille en province.
Dans ces conditions la vie devient très diffi-
cile, mais les médecins ne sauraient s'en
prendre qu'à eux-mêmes.
D'autant plus difficile qu'à cet accroisse-
ment continu du nombre des médecins corres-
pond une diminution très marquée de celui
des malades. Les statistiques démontrent, en
effet, que le développement de l'hygiène de-
puis quelques années, a amené une améliora-
tion notable de la santé publique.
Et le docteur Cornil conclut : Que les jeunes
médecins quittent Paris, c'est le seul re-
mède.
LE REMÈDE
Ajoutons que le docteur Fauvel en propose un
autre : c'est de faire voter une loi interdisant
à l'administration de l'Assistance publique de
soigner et d'héberger d'autres malades que
de vrais indigents.
Il demande, en outre, que les praticiens
ayant dans Paris des cliniques libres établis-
sent une distinet;on franche entre ces clini-
ques qui devraient toujours être gratuites, et
leur cabinet de consultation qui devrait pres-
que toujours être payant. -
Il nous semble qu'il y aurait une autre so-
lution. Si les médecins trouvent qu'il n'y a
plus assez de malades, que ne se font-ils vé-
térinaires 1
La Dotto ao la Ville de Paris
ET
• LE CRÉDIT FONCIER
Vote du projet de conversion
La difficulté que rencontre le conseil muni-
cipal pour équilibrer le budget depuis quel-
ques années, par suite de l'augmentation
considérable des services publics, aussi bien
que des nouvelles charges de police imposées
à la Ville de Paris par l'Etat, ont amené les
différents rapporteurs du budget à rechercher
des ressources nouvelles dans une conversion
partielle de la dette municipale. Dans cet or-
dre d'idées, le remboursement anticipé de la
dette de la Ville envers le Crédit foncier sem-
blait indiqué.
Dans son rapport général sur le budget de
1894, M. Pierre Baudin 'avait conclu au rem-
boursement immédiat de cette dette au moyen
d'un emprunt remboursable en soixante-
quinze années.
M. Alpy déposait, dans la séance du 6 no-
vembre 1893, une proposition concluant ah
remboursement anticipé. Le comité du con-
tentieux consulté a conclu nettement en ce
sens.
La question a donc été étudiée par les
commissions du conseil municipal.
La conversion décidée en principe
Le comité du budget — qui n'est autre que
l'assemblée municipale tout entière délibérant
en séance privée — a émis, hier, un vote
favorable à cette conversion, après une longue
discussion à laquelle ont pris part MM. Pa-
tenne, Alpy, Caron, Pierre Baudin, rappor-
teur général, Paul Strauss, Daguilhon-Pujol,
Santon, Grébauval, Picau, Landrin, G. Vil-
laln, Chausse, Alfred Lamouroux, Hattat. j
Rousselle et le préfet de la Seine. Le comité
a approuvé le projet de délibération suivant,
présenté par M. Patenne, rapporteur, au nom
de la commission des finances :
Le conseil,
Délibère :
M. le préfet de la Seine est autorisé à passer, au
nom de la ville de Paris, avec le Crédit foncier de
France, un traité d'après les bases suivantes :
Article premier. - La ville de Paris rembourse
au Crédit foncier de France le capital de 255,928,613
francs 93 c. restant dû à la date du 31 juillet 1894
sur l'emprunt de 282,926,352 fr. 89 c. qui a fait
l'objet du traité du 30 juin 1879.
A la même date du 31 juillet 1894, le Crédit fon-
cier de France fait à la ville de Paris un prê t
d'égale somme qui sera remboursé à ladite société
en soixante-quinze ans, au moyen de cent cinquante
payements semestriels de 4,706,200 fr. 94 chacuu
(comprenant, outre l'amortissement, l'intérêt au
taux de 3 38 010 par an), que la ville de Paris fera
au Crédit foncier les 31 janvier et 31 juillet de
chaque année et dont le premier aura lieu le 31
janvier 1895.
Toutefois, la Ville s'engage à tenir compte au
Crédit foncier de l'intérêt ancien au taux de
3 762 0i0 jusqu'au 31 décembre 1894, à moins que
le traité ne soit devenu définitif avant cette date.
Art. 2. — La ville de Paris aura toujours la fa-
culté d'anticiper un ou plusieurs des payements
semestriels qui font l'objet de la présente conven-
tion en suivant l'ordre des annuités à compter de
la plus rapprochée.
Toutefois, jusqu'au 31 janvier 1910, la Ville ne
pourra avoir en cours de payements anticipés plus
de six anuuités à la fois.
Sur les annuités ainsi payées par anticipation
pendant cette période, il sera bonifié à la Ville un
escompte en dedans, capitalisé par semestre et ré-
glé au taux même de l'intérêt du prêt.
Art. 3. — A partir du 31 janvier 1910, la ville
pourra anticiper tout ou partie des annuités, l'an-
ticipation portant toujours sur les premières an-
nuités à échoir. L'escompte bonifié à la Ville sera
réglé en dedans au taux même de l'intérêt du prêt,
avec çapitalisation par semestre, et ce sans indem-
nité. ,
Art, 4. — Ledit traité ne deviendra définitif
entre les parties qu'après avoir été ratifié par les
pouvoirs publics.
Quel emploi fera-t-on du boni ?
Diverses propositions additionnelles ont
été déposées par MM. Chausse, Landrin, Ca-
ron, Daguilhon-Pujol, Paul Strauss, Girou,
Alpy, touchant l'emploi des fonds à provenir
de cette conversion. La priorité a été accordée
à celle de M. Paul Strauss. Elle est ainsi
conçue :
« Il sera fait deux parts du bénéfice résul-
tant de la conversion de la dette du Crédit
foncier.
» Le bénéfice produit par la diminution du
taux d'intérêt sera acquis au budget ordi-
naire dans la forme d'une diminution de
l'annuité ;
» Le boni que laissera la prorogation d'é-
chéance aura une affectation spéciale pour
travaux extraordinaires, soit qu'il doive être
inscrit annuellement en recettes extraordi-
naires, soit qu'il doive être capitalisé. »
Cette proposition est adoptée.
Les autres propositions sont renvoyées à la
commission.
Le conseil municipal se prononcera dans
une de ses prochaines séances sur le projet
de convention adopté hier au comité du bud-
get. Etant donné que ce comité ne fait qu'un
avec le conseil lui-même, on peut considérer
comme certaine l'acceptation de la conven-
tion. Elle est fort avantageuse pour la ville
de Paris qui pourra, grâce au boni résultant
de cette conversion d'une partie de sa dette,
équilibrer plus facilement son budget.
L'affaire de Cempuis au Conseil général
Rapport et contre-rapport
La commission du conseil général chargée
d'enquêter sur les faits reprochés à M.Robin,
ex-directeur de l'orphelinat Prévost à Cem-
puis et qui ont motivé sa révocation, a ter-
miné ses travaux. Elle vient de choisir son
rapDOl'teur, M. Laurent-Cély. Ce n'est pas
rapporteur, L'histoire vaut d'être contée:
sans peine. L'histoire vaut d'être contée:
Il n'y a pas eu pour cette désignation moins
de quatre scrutins. Le premier donnait à M.
LamDué, disposé à conclure tout en faveur
de l\t: Robin, 7 voix contre 7 et 1 bulletin
blanc.
Entre le premier et le second tour de scru-
tin, quelques membres proposèrent la candi-
dature à M. Gervais qui déclarait que M. Ro-
bin, n'était pas exempt de. tout reproche, mais
que l'administration l'avait frappé trop rude-
ment et qu'elle eût dû simplement le mettre
à la retraite.
Ce second tour de scrutin donna encore à
M. Lampué 7 voix contre 7 et un bulletin
blanc.
Quelques amis de ce dernier lui firent
comprendre qu'il y. avait contre lui un parti
pris évident, qu'on le tiouvait trop radical.
M. Lampué retira sa candidature. M. Lau-
rent-Cély, un radical plus doux de tempéra-
ment, moins intransigeant obtint également
7 voix contre 7 et — toujours, un bulletin
blanc.
Finalement M. Laurent-Cély a été chargé
du rapport, avec mission de conclure au vote
d'une indemnité équivalente à la somme qu'au-
rait eue M. Robin si sa retraite avait été li-
quidée.
Le plus curieux de l'histoire de ce scrutin,
c'est que le bulletin blanc qui a empêché la
majorité de se former appartient à un conseil-
ler plutôt défavorable à M. Robin. Si bien
que la moitié de la commission d'enquête qui
n'a pas de rapporteur va on choisir un qui
présentera un contre-rapport!
La lutte, il y a lieu de le supposer, sera
chaude le jour de la discussion publique de
ces deux documents. contradictoires.
A L'ACADÉMIE
Ce n'est pas aujourd'hui, ainsi que plusieurs
de nos confrères l'ont annoncé, qu'aura lieu
l'élection académique en remplacement de M.
Leconte de Lisle, mais jeudi 6 décembre pro-
chain.
Plusieurs candidats sont en présence. Ce
sont MM. Henry Houssaye, Emile Deschanel,
qui sont les deux seuls candidats sérieux, et
MM. Emile Zola et Paul Verlaine.
M, Stephen Liégeard, qui s'était mis sur les
rangs à la demande de plusieurs immortels,
n'a pas voulu maintenir sa candidature : il
l'a momentanément retirée et se représen-
tera une autre fois, très probablement à
l'élection en remplacement de Victor Du-
ruy.
Quant à M. Léon Dierx, dont on avait à
tort annoncé la candidature, il se réserve
pour l'avenir.
La lutte restera donc circonscrite entre
MM. Henry Houssaye et Emile Deschanel.
Selon toute probabilité, c'est M. Henry Hous-
saye qui l'emportera et succédera à l'illustre
auteur des Poèmes barbares.
GUILLAUME II
Potsdam, 28 novembre.
L'empereur, qui souffre d'un léger refroidisse-
ment, a renonce à assister aux obsèques du grand-
duc héritier de Saxe-Weimar et à se rendre à
Kuchelna, en Silésie» eu devaient avoir heu des
chasses.
CHRONIQUE
C'est bien fait, ce qui arrive à Rodin. Il
n'aurait pas dû accepter de créer une sta-
tue pour place publique sur commande
d'une compagnie de fabricants de romans.
Il vaut mieux que ça. Son génie incertain
et laborieux, fait de tâtonnements et de
rages contre sa propre gaucherie, n'admet
pas la livraison de l'ouvrage à un délai
quelconque. Rodin est de ces hommes
en qui les questions d'argent, même s'il y
va de leur subsistance, n'entrent pas en
balance avec le contentement de soi. Con-
tentement relatif, s'entend : car à vouloir,
comme il le veut, que le marbre projette
une illusion de mouvement et de vie, on
use sa pensée et ses ongles sans jamais être
satisfait. Rodin était destiné au martyre.
Il est travaillé, en tant qu'artiste, par des
scrupules de conscience aussi minutieux
que ceux qui font baisser au religieux le
front sur les dalles de son couvent.
Quel naïf, a dû dire de lui maint sculp-
teur, en apprenant par les journaux qu'en
vue de se former une image de Balzac à
statufier, Rodin avait lu d'abord les qua-
rante volumes de la Comédie humaine,
plus maint document, qu'il s'était informé
de l'homme auprès de ceux qui l'ont
connu, qu'il avait cherché trace de ses por-
traits, et enfin visité son pays d'origine,
la Touraine 1 Cette lenteur d'investigation
n'est pas de notre temps. Nous sommes
plus pressés que cela.
A quarante ans un écrivain- doit avoir
publié ses vingt volumes et un sculp-
teur semé de monuments un certain nom-
bre de pouces de notre territoire. Nous ne
voulons que des génies faciles, de produc-
tion régulière, méthodique. Et M. Zola qui
interviewé aujourd'hui, par exemple, 'an-
nonce que le 25 juin prochain, à six heu-
res du soir, il mettra le mot fin à son ro-
man, M. Zola est notre homme. Il donne
à croire aux bonnes gens que la réalisa-
tion de ses conceptions enlignes d'écriture
est régie par des lois mécaniques dont le
jeu n'est plus qu'à démontrer. De fait, j'ai
connaissance d une municipalité qui, com-
mandant à un sculpteur certaine statue de
son goût, stipula que si à telle date elle
n'était pas livrée, fondue, prête, à planter
sur la place publique, chaque jour de re-
tard entraînerait une diminution du for-
fait. Styie commercial. -
On ne lit pas assez à Paris les journaux
de province. Autrement on aurait ces
jours-ci remarqué dans ceux de Lille un
blâme voté par le conseil municipal de
cette ville au sculpteur Mercié, pour son
retard à exécuter un monument de la Dé-
fense nationale de 1870-71. M. Mercié
traité avec tant de désinvolture ? Eh oui !
Et c'est sa faute aussi et pour une cause
opposée à celle de Rodin.
M. Mercié est un de nos plus grands
fournisseurs de statues. Il est, lui, je ne
dirai pas un génie, mais un talent merveil-
leux et aisé. Des délégués de municipali-
tés viennent le voir, font leur proposi-
tion de statue. Il accepte presque toujours.
Visitez son atelier. Dans un coin c'est
un poète qui s'ébauche, dans un autre
c'est un homme politique, un philan-
thrope.
Les délégués reviennent, c'est pour exa-
miner la maquette de leur monument.
Elle ne leur plaît pas tout à fait. Ils indi-
quent des retouches. Ils désirent une sur-
charge de personnages. Ils en veulent pour
leur argent. M. Mercié- se prête à ces fan-
taisies. Voilà la maquette retravaillée. Ne
trouvez-vous pas que M. Mercié est vrai-
ment un bon garçon et qu'il conduit son
art dans une compagnie .qui n'est pas la
sienne ? N'a-t-il pas encouragé la munici-
palité de Lille à le traiter du haut en bas,
et n'a-t-il pas ce qu'il mérite ? Est-il digne
de ses dons rares et de sa haute situation
de laisser discuter ce à quoi il se connaît
par des gens qui ne s'y connaissent point?
Il est vrai qu'une fois au fait de ses conces-
sions, je ne m'étonne plus si tant de sta-
tues signées de lui sont disgracieuses,
alors qu'il a, avant tout, la grâce. Elles ne
sont pas de lui. Elles relèvent de l'art mu-
nicipal.
Par cet exemple, imaginez à quelle dé-
pendance sont acculés les sculpteurs de
moindre renommée. J'en sais un qui,
ayant à soumettre un croquis de statue
allégorique pour un monument aux morts
de 1870-1871, se le vit renvoyer par la mu-
nicipalité avec cette remarque : « Nous
voulons que la République qui surmon-
tera ait des ailes. — Ce sera donc une Vic-
toire? — Une Victoire, si vous voulez. —
Il faudra lui ôter son bonnet phrygien?
- - Ah ! c'est juste, diable 1 Enfin dé-
coiffez-la. - Il faudra aussi modifier son
attitude. Je l'avais faite reposant ses deux
mains sur une épée dont la pointe est ap-
puyée sur le sol. Comment accorder cette
fermeté de plantation avec un apprêt de
s'envoler ? » Enervantes disputes qui ont
pour effet de déchirer la personnalité de
l'artiste et de le désintéresser d'une œuvre
qui n'est plus sienne complètement. Vaille
que vaille, on érige, on inaugure ; on dis-
tribue des rubans rouges et des rubans
violets. Du sculpteur pas un mot dans les
discours, ou si peu 1 Enfin, la municipa-
lité a l'art qu'elle mérite.
La seule excuse de ces compromissions
c'est qu'il faut vivre. M. Mercié ne l'a pas,
cette excuse. M. Rodin l'a-t-il? Je n'en sais
rien. Car j'assimile à une municipalité ce
bureau de la Société des gens de lettres,
qui -- les démissionnaires d'avant-hier
exceptés — veut presser Rodin. « Eh bien!
monsieur Rodin, quel jour comptez-vous
finir? Pouvons-nous annoncer l'inaugura-
tion, préparer nos discours, demander au
ministre les décorations de circonstance ?»
M. Rodin a d'autant plus besoin de cette
excuse, que son admirable indépendance
doit le placer au-dessus du mercantilisme
des statues courantes.
Il y a des artistes qu'un délai fixé sti-
mule, d'autres qu'elle abat, par la compa-
raison entre le temps qui leur reste et les
exigences de leur souci de perfection. Ro-
din est de ces derniers. Le Salon ne le
trouve jamais prêt. Son buste de Puvis de
Chavannes exposé il y a trois ans au Champ-
de-Mars, il le reprit après l'exposition. L*
ne l'avait envoyé que pour ne pas çjjinquei
à l'invitation des camarades.
De même Carriès est mort sans avoir
achevé une porte décorative qu'une dame
très riche lui avait depuis dix ans com-
mandée. Elle allait lui faire un procès
quand il est mort. A l'exposition récente
qui a précédé la vente des tableaux im-
pressionnistes appartenant à M. Théo-
dore Duret, on a remarqué un portrait
inachevé d'Albert Wolf, par Manet, qu'Al-
bert Wolf interrompant de poser avail
laissé en plan parce que Manet revenait
sur son premier dessin.
Il y aurait bien d'autres traits à citer de
cette belle intransigeance d'art opposée à
la hâte du monsieur qui veut être servi.
L'éminent sculpteur M.Dubois à quelqu'un
qui lui demande son buste répond tran-
quillement, s'il accepte. « Soit, mais je
vous préviens que je ne pourrai le com-
mencer que dans dix ans. J'ai des travaux
en train. » Aussi ne voit-on pas lourd
de lui sur nos places publiques. L'art
municipal ne l'a jamais compté parmi ses
sujets. Il me parait être le type du sculp-
teur altier.
Edouard Conte.
Le Petit Châteauneuf-du-Pape doit sare-
nommée au fin bouquet qu'il acquiert en bou-
teille. Le propriétaire des Fines-Roches à Chà-
teauneuf-du-Pape l'expédie à 133 ir. les 225 lit,
LES
Franaes Óloctoralos" aB TonIuuss
Toulouse, 28 novembre.
La neige n'a cessé de tomber depuis
24 heures.
L'audience de la cour d'assises est ouverte
à 11 h. 1^2. La salle est presque vide.
Deux jurés, tombés subitement malades,
sont remplaces parles deux jurés supplémen-
taires. Le président invite très aimablement
les douze jurés restants à conserver leur
santé; autrement, dit-il, nous serions obligés
de renvoyer l'affaire à huitaine. (Hilarité.)
Les témoins
La cour va procéder à l'audition des témoins
de l'accusation.
M. Llagone, adjoint au nmire. révoqué, a
travaillé à la révision de la îistp des élections
municipales.
Il nie avoir prescrit à Mascaras de porter de
fausses inscriptions après la clôture de la
liste.
Le témoin,qui est un ancien capitaine d'ha-
billement de* l'infanterie de marine, déclare
hautement avoir recommandé au chef de bu-
reau des élections d'agir avec la plus absolue
loyauté. J'ignorais ses agissements délic-
tueux, dit-il.
Le président fait observer au témoin qu'il est
en contradiction avec plusieurs témoins
quand il affirme n'avoir donné l'ordre d'ins-
crire aucun nom postérieurement à la clôture
des listes.
Me Rousselle, partie civile, interpellant M.
Llagone, lui dit : « Vous êtes un tancien offi-
cier, vous êtes décoré de la Légion d'hon-
neur ; je vous demande de dire, par oui ou
par non, si vous avez remis votre carte à M.
Glaize, avec mention de la faire inscrire sur
la liste. »
— Non, répond le témoin, très visiblement
troublé.
De son côté, Mascaras affirme, au sujet
d'un autre nom faussement inscrit, que l'ad-
joint lui aurait dit : « Le mort ayant pris la
place du vivant, le vivant peut bien prendre
celle du mort. ».
- C'est faux, s'écrie M. Llagone, je n'ai
jamais tenu pareil propos. (Mouvements di-
vers.)
On se rappelle que l'instruction a établi la
substitution de noms d'électeurs décédés à
ceux dont les opinions étaient suspectes.
M. -Llagone fournit ensuite des explications
assez vagues sur les motifs de la révocation
de Mascaras, dont il était le chef direct.
Le président constate lui-même que ces ex-
plications sont nuageuses. L'établissement
des faux mandats de payement par Mascaras
ne parait pas, en effet, lavoir été la cause dé-
terminante de son renvoi de la mairie.
M. Debax et M. Bacquié, conseiller muni-
cipal, membres de la commission de revi-
sion, déclarent n'avoir jamais constaté d'irré.
gularités apparentes sur les listes éècto-
rales.
Les électeurs
Défilent ensuite une série d'électeurs qui
se plaignent d'avoir été radiés sans motifs
plausibles. Sur leurs réclamations ils furent
réinscrits. D'autres noms avaient été substi-
tués aux leurs sur les listes.
Le témoin Mercier, concierge à l'Ecole des
beaux-arts, déclare, au milieu de l'hilarité
générale, avoir reçu de la mairie avis de son
décès. « J'ai protesté, dit-il, et l'on m'a réins-
crit postérieurement à la clôture de là lista
électorale. »
L'accusé prétend avoir fait procéder à ces
inscriptions sur l'ordre même de M. Couderc,
secrétaire général de la mairie.
Les témoins affirment, de leur côté, ne pas
connaître M. Couderc.
Un autre témoin, le sieur Bazière, dit
qu'au bureau des élections on lui a répondu
qu'il était porté mort. Il s'en plaignit à
M. Serres, le maire, qui lui dit qu'on avise-
rait.
La série des chlores
Nous passons maintenant, dit l'avocat gé«
néral, à la-série des chlores.
En effet, un grand nombre de témoins vien-
nent déclarer qu'ils ont été portés sur les
listes comme étant décédés.
Leurs noms étaient enlevés à l'aide du
chlore et remplacés par d'autres.
Quatorze témoins faisant défaut sont con-
damnés chacun à cent francs d'amende.
Il résulte des déclarations d'autres témoins
que, soit en 1892, soit en 1893, une quaran-
taine d'électeurs ont été irrégulièrement ins-
crits sur les listes. Certains noms ont été
placés en interligne avec un numéro bis ;
d'autres se trouvaient placés en fin de liste et
en dehors du rang que l'ordre alphabétique
leur assignait.
Le témoin Artié affirme, ce qui concorde
avec les déclarations de l'accusé Mascaras,
que, réclamant contre sa non-inscription,
radjoint Llagone aurait dit à Mascaras:
« Il faut faire voter cet homme, il est de nos
amis. »
Le président, interpellant M. Llagone qui
se trouve dans la salle : « Vous le voyez, dit-
il, le témoin donne un démenti formel à voa
affirmations. »
L'adjoint Llagone balbutie quelques rpon.
s embarrassées qui soulèvent les murmure.
de l'auditoire.
M. Bois, chef de division à la préfecture 4h
la Haute-Garonne, est appelé.
LE NUMÉRO CINQ CENTIMES
YENïïaÈftt 30 NOVEMBRE 1894
RÉDACTION ET ADMINISTRATION
2 42, Rue Montmartre
PARIS
ANNONCES
Chez MM. LAGRANGE, CERF et CIO
6, place de la Bourse, 6
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Départements - 7 f.; — t2 f.1 — 241
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Les Abonnements sont reçus sans frais dan.
tous les Bureaux de Poste.
Adresse télégraphique : XîX- SIÈCLE-PARIS
Téléphotio : 30.289 bis.
LE RiPPROCHEilT
ANGLO-RUSSE
Depuis la chute de Napoléon Ier, qui
avait réuni toute l'Europe contre lui,
l'antagonisme de la Russie et de l'Angle-
terre a plané sur la diplomatie de notre
siècle.
Le duel de la baleine et de l'éléphant,
prédit par M. de Bismarck, serait-il à la
veille de se terminer par une réconci-
liation? Quoique improbable, la chose
paraît possible, et elle se produirait si
les alliances de famille et les désirs per-
sonnels des souverains étaient de na-
ture à changer la marche des destinées
des peuples.
Le mariage de Nicolas II avec une
petite-fille de la reine Victoria, très
particulièrement aimée de sa grand-
mère, établit entre les cours de Saint-
Pétersbourg et de Londres des relations
d'un caractère nouveau et affectueux.
On l'a vu pendant les funérailles d'A-
lexandre III. Depuis la maison mor-
tuaire de Livadia jusqu'à la basilique
des bords ; de la Néva, le prince de
Galles a tenu à se montrer à côté du
jeune empereur et à lui témoigner une
extrême sympathie.
Ces faits ont une valeur incontestable,
et il n'est pas douteux que les diplo-
mates des deux pays y trouveront un
encouragement à des tentatives d'ac-
cord. On parle déjà de négociations
pour abroger ce qui reste encore du
traité de Paris et permettre aux navires
de guerre de tous les pays de circuler li-
brement dans le Bosphore et dans les
Dardanelles.
La défense avait été stipulée princi-
palement à l'instigation des Anglais qui
voulaient bloquer les Russes dans la
mer Noire. S'ils sont disposés aujour-
d'hui à faire tomber ces barrières di-
plomatiques, nous n'avons aucun motif
pour nous y opposer, et nous avons des
raisons pour nous montrer satisfaits.
En droit naturel, on ne voit pas du
reste pourquoi les détroits de la Tur-
quie sont ainsi fermés, alors que les
passages communiquant de la mer du
Nord dans la Baltique sont sillonnés
avec indifférence par tous les pavillons,
Il n'y a aucun argument à faire valoir
pour Sébastopol qui ne puisse s'appli-
quer à Cronstadt. Le cas est identique.
En supprimant, en 1857, les droits
de péage dans le Sund et dans les deux
Belt, l'Europe a montré combien elle
tenait à la liberté des mers. Pourquoi
avoir violé ce principe à Constanti-
nople, alors qu'on le proclamait à Co-
penhague?
Il ne faut pas, d'ailleurs, attacher à
des interdictions diplomatiques une por-
tée qu'elles ne sauraient avoir. Le pre-
mier coup de canon déchire les traités,
* et ce n'est pas avec une phrase écrite
sur un parchemin qu'on barre la route
à une armée ou à une flotte.
La Constitution qui fut violée par le
général Bonaparte, le 18 brumaire, dé-
tendait à tout corps de troupes d'appro-
cher du palais législatif. Les grenadiers
s'en souciaient infiniment peu en péné-
trant dans l'orangerie de Saint-Cloud.
En temps de paix, ces choses-là
gênent et ennuient. L'état de guerre les
ignore.
C'est comme la fameuse neutralité
du canal de Suez. En vérité, voilà un
bon billet, comme celui de La Châtre.
La puissance maîtresse des océans ne
laisserait passer que ceux auxquels elle
- accorderait cette autorisation : un cui-
rassé, à quelques milles au large, fer-
merait à sa guise l'entrée du fossé
creusé dans le sable égyptien. Une porte
ne peut jamais être neutre, puisqu'il
suffit d'y placer une sentinelle.
Aussi l'Angleterre ne ferait-elle pas
une concession valant un grand prix en
ne s'opposant plus au transit des vais-
seaux de guerre russes dans les détroits.
Nous, en revanche, nous aurions lieu,
de nous en féliciter, comme nous nous
sommes félicités déjà, lors de l'arrivée
de l'escadre de l'amiral Avelane dans la
Méditerranée.
Le rêve du lac français n'existe plus.
Il s'agit, maintenant, d'empêcher qu'il
n'y ait là un lac anglo-italien. Le pa-
villon russe n'y flottera jamais trop, au
gré de nos désirs qui cadrent avec nos
intérêts.
Nos sentiments pour la Russie n'ont
rien à voir du reste, avec la jalousie. Il
no saurait nous, déplaire que notre ami
entraînât l'Angleterre hors de l'orbite
de U; r:pîe alliance.
Si jamais les Anglais ont envie de
u ;.lire du nuage où leur commerce
iJFPl'llaLHJILd se complaît, nous serons
Cu^ ait-;, qu'ils prennent terre chez les
! t -ses.
C'est cela que nous répondons en
toute sincérité aux journaux anglais.
Mais, très sincèrement aussi, nous dou-
tons de cette tendresse subite entre deux
peuples qui ne s'aiment pas, qui se
heurtent en Asie, et dont les génies
n'ont aucun point de contact.
L'Angleterre est une puissance étran-
ge. Les autres luttent quand elles y ont
un avantage. Elle, elle se met en tra-
vers des autres, même lorsque cela ne
lui sert à rien.
En un mot, la nation anglaise est
grande, mais insupportable. Si elle se
laisse aller aux séductions slaves, ce
sera un triomphe pour la coquetterie
russe.
Usait.
msmaÊmmmMwmmiaamm lisait.
L'AFFAIRE DREYFUS
Hier, dans les couloirs de la Chambre, on
se montrait préoccupé d'un article paru dans
le Figaro du matin et dont voici le principal
passage :
« Lorsque le ministre de la guerre eut sous
les yeux les preuves « criantes » de la trahison
du capitaine Dreyfus, il fut tellement cons-
terné — tant les conséquences de cette trahi-
son pouvaient être terribles — qu'il téléphona
sur l'heure à M. Dupuy et que le président
du conseil convoqua ses collègues pour le
lendemain matin, en séance extraordinaire.
» J'ai soumis à M. le président du conseil
et à mes collègues, aie disait récemment le
général Mercier, les rapports accablants qui
m'avaient été communiqués, et, sans aucun
retard, l'arrestation du capitaine Dreyfus a
été ordonnée. On a écrit, à ce sujet, beaucoup
d'inexactitudes : on a dit, notamment, que le
capitaine Dreyfus avait offert des documents
secrets au gouvernement italien.
» C'est une erreur. Il ne m'est pas permis
d'en dire davantage, puisque l'instruction
n'est pas close. Tout ce que l'on peut répéter,
c'est que la culpabilité de cet officier est ab-
solument certaine et qu'il a eu des complices
civils. »
Voici, d'autre part, la note publiée par le
Temps au sujet de l'article du Figaro :
« Le ministre n'a pas tenu ces propos. Il ne
pouvait émettre un avis sur la solution d'une
cause déférée à la justice militaire. D'autre
part, il n'a pas pu parler de complices civils,
puisque cette complicité, si elle eût existé,
eût rendu la cause justiciable de la cour d'as-
sises et non plus du conseil de guerre. »
Ajoutons qu'il était question d'un incident
qui devait se produire à la Chambre, mais il
paraît probable que le démenti du Temps le
rendra inutile. On prétend aussi que le con
seil des ministres de ce matin s occupera à
nouveau de l'affaire Dreyfus,
BOMBANCE
A l'inauguration du nouveau Reichstag
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Berlin, 28 novembre.
Le soir de l'inauguration du nouveau pa-
lais du Reichstag, on inaugurera aussi le
buffet.
Des dons de toutes sortes sont envoyés à cet
effet de tous les côtés au bureau du Reichs-
tag.
Une grande brasserie de Bavière a offert
10 hectolitres de bière ; un grand fabricant
de vins mousseux a envoyé 500 bouteilles de
Champagne ; un Allemand établi en Havane
a fait parvenir au Parlement une caisse rem-
plie de 2,000 cigares. Il espère sans doute
que sur les 300 députés que compte l'assem-
blée, il y en aura beaucoup qui s'en fourre-
ront dans la poche.
Enfin un grand boucher bavarrois à livré
en holocauste cinq veaux. Il a joint à ce don
un billet contenant ce verset très en cours
pendant la dernière période électorale :
Nur die allergroessten Kaelber
Wachlen ihre Metzger selber.
(Seuls les plus grands veaux choisissent
eux-mêmes leurs bouchers.)
LA RUSSIE AU BOSPHORE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Berlin, 28 novembre.
La Gazette de Voss prétend tenir de bonne
source que pendant son séj our à Constantinople,
l'amiral Avelane a demandé au grand-vizir d'aban-
donner à la Russie une station de charbon sur le
Bosphore.
Le gouvernement russe a proposé le choix entre
quatre localités, dont deux sur la côte européenne
et deux sur la rive asiatique. Le grand-vizir a
tout d'abord refusé de communiquer cette de-
mande au sultan, mais il a été finalement décidé
à le faire. Jusqu'ici la Russie n'a encore reçu au-
cune réponse.
Mme CARNOT A GRASSE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Nice, 28 novembre.
Mme Carnot est à Grasse depuis quelques jours.
La veuve du regretté président de la République
passera l'hiver dans cette ville auprès de son fils
et de sa belle-fille.
LE « VIEUX GAMIN CHÉRI »
DE CLERGYMAN
Londres, 28 novembre.
Un curieux procès en divorce se déroule en
ce moment devant les tribunaux londoniens.
Il s'agit d'un action intentée par un grand
industriel, M. Worrall, à sa femme, qu'il
accuse d'avoir commis adultère avec le cler-
gyman de leur paroisse, M. Hugh-William
Johnes ; cette accusation n'est qu'une riposte,
car Mme Worrall plaide de son côté en sépa-
ration, à raison d'actes de cruauté qu'elle re-
proche à son mari.
Dans l'audience d'hier, lecture a été donnée
d'une lettre dans laquelle Mme Worrall
s'adressait au révérend Hugh-William Jones
en ces termes : « Mon vieux gamin chéri.
tout ce que je puis dire, c'est que jamais, ja-
mais, jamais il n'a existé ni n'existera votre
pareil à mes yeux. » Et elle signait : « Votre
pauvre vieille Fuzbuz (appellation familière
que nous traduirions par « chien-chien »).
Mme Worrall a déclaré que cette lettre
avait été écrite à seule fin de chicaner son
mari, mais qu'elle n'avait aucune intention
de l'envoyer à son adresse. De son côté, le
révérend H.-W. Jones s'est vivement défendu
d'avoir commis adultère avec l'accusée pen-
dant trois jours qu'ils passèrent dans le
même hôtel à Saltburn ; il a ajouté que, si
elle venait le voir en son domicile particulier,
à Crimswarth, c'était pour s'occuper des
affaires de la paroisse.
LEVEE DE BISTOURIS
MÉDECINS ET MALADES
Les tarifs des hôpitaux. - Maladespayants.
— Chez le professeur Cornil.
Un conflit assez bizarre menace d'éclater
entre les médecins de Paris et l'administra-
tion de l'Assistance publique.
On sait que les hôpitaux de Paris reçoivent
des malades payants qui, moyennant une
pension fixée jusqu'alors à 3 fr. 50 par jour,
peuvent se faire opérer par nos meilleurs
chirurgiens et recevoir tous les soins qu'exige
leur état.
L'Assistance publique, qui ne recule pas de-
vant les petits moyens pour équilibrer son
budget, et trouvant peut-être que les malades
payants deviennent trop nombreux, vient de
porter à 5 francs le prix des journées de sé-
jour dans les hôpitaux.
Les médecins sont consternés. D'après eux,
les bourgeois qui auraient eu honte d'aller à
l'hôpital pour 9 francs trouveront très chic
de s'y faire soigner pour cent sous; la profes-
sion est perdue ; encore quelques mois, et les
trois quarts des docteurs seront réduits à la
mendicité. Ces doléances ont été très sérieu-
sement formulées à un banquet récent par
les docteurs Le Blond, Le Baron et Fauvel.
L'INTÉRÊT DES MALADES
Nous avons causé de cette histoire avec
M. le professeur Cornil.
— Il semble, nous dit-il, que si quelqu'un
avait à se plaindre dans la circonstance, ce
seraient surtout les malades, dont l'intérêt
doit primer celui des médecins.
L'augmentation des tarifs de l'Assistance
publique ne lui produira guère d'excédents
de recettes, et elle gênera beaucoup de per-
sonnes qui, pour ne pas être indigentes, ne
sont pas moins dignes de sollicitude. La
plupart du temps, en effet, les malades qui se
résignent à entrer à l'hôpital comme malades
payants y sont contraints par l'impossi-
bilité où ils se trouvent de payer les hono-
raires fantastiques réclamés par les chirur-
giens.
Le moindre coup de bistouri se vend au-
jourd'hui 500 francs, et les praticiens sérieùx
demandent vite deux ou trois mille francs
pour une opération.
En outre, depuis que l'on a reconnu l'im-
portance de l'antisepsie, les malades ne peu-
vent obtenir de se faire opérer chez eux ;
force leur est de se laisser installer dans une
maison de santé où on leur fait payer au mi-
nimum 20 ou 25 francs par jour.
Il semble donc peu opportun de rendre l'en-
trée de l'hôpital moins facile aux personnes
n'ayant pas les ressources suffisantes pour
s'offrir ces traitements de luxe. Et à ce point
de vue, mais à celui-là seul, le changement
introduit par l'Assistance publique pourrait
être critiqué.
L'INTÉRÊT DES MÉDECINS
En ce qui concerne les médecins, il est évi-
dent que le métier devient de plus en plus
dur.
Songez au nombre de citoyens français ins-
crits aux bureaux de bienfaisance, membres
de sociétés de secours mutuels, employés d'in-
dustrie et d'administration qui sont soignés
sans bourse délier. Dénombrez les malades
qui sont aux cliniques gratuites comptez les
camarades, les amis et les connaissances dont
un médecin ne saurait recevoir d'honoraires,
et vous verrez à combien se réduit le nombre
des malades payant individuellement la visite
qu'on leur fait ou la consultation qu'on leur
donne.
Avec cela la concurrence est énorme. On
compte aujourd'hui 4,000 étudiants en méde-
cine à Paris, alors qu'il y en avait 2,000 il y
a vingt ans. Et parmi ces jeunes gens, aucun
de ceux qui paraissent avoir quelque avenir
ne veut quitter la capitale. On cite à peine
un interne sur cent qui aille en province.
Dans ces conditions la vie devient très diffi-
cile, mais les médecins ne sauraient s'en
prendre qu'à eux-mêmes.
D'autant plus difficile qu'à cet accroisse-
ment continu du nombre des médecins corres-
pond une diminution très marquée de celui
des malades. Les statistiques démontrent, en
effet, que le développement de l'hygiène de-
puis quelques années, a amené une améliora-
tion notable de la santé publique.
Et le docteur Cornil conclut : Que les jeunes
médecins quittent Paris, c'est le seul re-
mède.
LE REMÈDE
Ajoutons que le docteur Fauvel en propose un
autre : c'est de faire voter une loi interdisant
à l'administration de l'Assistance publique de
soigner et d'héberger d'autres malades que
de vrais indigents.
Il demande, en outre, que les praticiens
ayant dans Paris des cliniques libres établis-
sent une distinet;on franche entre ces clini-
ques qui devraient toujours être gratuites, et
leur cabinet de consultation qui devrait pres-
que toujours être payant. -
Il nous semble qu'il y aurait une autre so-
lution. Si les médecins trouvent qu'il n'y a
plus assez de malades, que ne se font-ils vé-
térinaires 1
La Dotto ao la Ville de Paris
ET
• LE CRÉDIT FONCIER
Vote du projet de conversion
La difficulté que rencontre le conseil muni-
cipal pour équilibrer le budget depuis quel-
ques années, par suite de l'augmentation
considérable des services publics, aussi bien
que des nouvelles charges de police imposées
à la Ville de Paris par l'Etat, ont amené les
différents rapporteurs du budget à rechercher
des ressources nouvelles dans une conversion
partielle de la dette municipale. Dans cet or-
dre d'idées, le remboursement anticipé de la
dette de la Ville envers le Crédit foncier sem-
blait indiqué.
Dans son rapport général sur le budget de
1894, M. Pierre Baudin 'avait conclu au rem-
boursement immédiat de cette dette au moyen
d'un emprunt remboursable en soixante-
quinze années.
M. Alpy déposait, dans la séance du 6 no-
vembre 1893, une proposition concluant ah
remboursement anticipé. Le comité du con-
tentieux consulté a conclu nettement en ce
sens.
La question a donc été étudiée par les
commissions du conseil municipal.
La conversion décidée en principe
Le comité du budget — qui n'est autre que
l'assemblée municipale tout entière délibérant
en séance privée — a émis, hier, un vote
favorable à cette conversion, après une longue
discussion à laquelle ont pris part MM. Pa-
tenne, Alpy, Caron, Pierre Baudin, rappor-
teur général, Paul Strauss, Daguilhon-Pujol,
Santon, Grébauval, Picau, Landrin, G. Vil-
laln, Chausse, Alfred Lamouroux, Hattat. j
Rousselle et le préfet de la Seine. Le comité
a approuvé le projet de délibération suivant,
présenté par M. Patenne, rapporteur, au nom
de la commission des finances :
Le conseil,
Délibère :
M. le préfet de la Seine est autorisé à passer, au
nom de la ville de Paris, avec le Crédit foncier de
France, un traité d'après les bases suivantes :
Article premier. - La ville de Paris rembourse
au Crédit foncier de France le capital de 255,928,613
francs 93 c. restant dû à la date du 31 juillet 1894
sur l'emprunt de 282,926,352 fr. 89 c. qui a fait
l'objet du traité du 30 juin 1879.
A la même date du 31 juillet 1894, le Crédit fon-
cier de France fait à la ville de Paris un prê t
d'égale somme qui sera remboursé à ladite société
en soixante-quinze ans, au moyen de cent cinquante
payements semestriels de 4,706,200 fr. 94 chacuu
(comprenant, outre l'amortissement, l'intérêt au
taux de 3 38 010 par an), que la ville de Paris fera
au Crédit foncier les 31 janvier et 31 juillet de
chaque année et dont le premier aura lieu le 31
janvier 1895.
Toutefois, la Ville s'engage à tenir compte au
Crédit foncier de l'intérêt ancien au taux de
3 762 0i0 jusqu'au 31 décembre 1894, à moins que
le traité ne soit devenu définitif avant cette date.
Art. 2. — La ville de Paris aura toujours la fa-
culté d'anticiper un ou plusieurs des payements
semestriels qui font l'objet de la présente conven-
tion en suivant l'ordre des annuités à compter de
la plus rapprochée.
Toutefois, jusqu'au 31 janvier 1910, la Ville ne
pourra avoir en cours de payements anticipés plus
de six anuuités à la fois.
Sur les annuités ainsi payées par anticipation
pendant cette période, il sera bonifié à la Ville un
escompte en dedans, capitalisé par semestre et ré-
glé au taux même de l'intérêt du prêt.
Art. 3. — A partir du 31 janvier 1910, la ville
pourra anticiper tout ou partie des annuités, l'an-
ticipation portant toujours sur les premières an-
nuités à échoir. L'escompte bonifié à la Ville sera
réglé en dedans au taux même de l'intérêt du prêt,
avec çapitalisation par semestre, et ce sans indem-
nité. ,
Art, 4. — Ledit traité ne deviendra définitif
entre les parties qu'après avoir été ratifié par les
pouvoirs publics.
Quel emploi fera-t-on du boni ?
Diverses propositions additionnelles ont
été déposées par MM. Chausse, Landrin, Ca-
ron, Daguilhon-Pujol, Paul Strauss, Girou,
Alpy, touchant l'emploi des fonds à provenir
de cette conversion. La priorité a été accordée
à celle de M. Paul Strauss. Elle est ainsi
conçue :
« Il sera fait deux parts du bénéfice résul-
tant de la conversion de la dette du Crédit
foncier.
» Le bénéfice produit par la diminution du
taux d'intérêt sera acquis au budget ordi-
naire dans la forme d'une diminution de
l'annuité ;
» Le boni que laissera la prorogation d'é-
chéance aura une affectation spéciale pour
travaux extraordinaires, soit qu'il doive être
inscrit annuellement en recettes extraordi-
naires, soit qu'il doive être capitalisé. »
Cette proposition est adoptée.
Les autres propositions sont renvoyées à la
commission.
Le conseil municipal se prononcera dans
une de ses prochaines séances sur le projet
de convention adopté hier au comité du bud-
get. Etant donné que ce comité ne fait qu'un
avec le conseil lui-même, on peut considérer
comme certaine l'acceptation de la conven-
tion. Elle est fort avantageuse pour la ville
de Paris qui pourra, grâce au boni résultant
de cette conversion d'une partie de sa dette,
équilibrer plus facilement son budget.
L'affaire de Cempuis au Conseil général
Rapport et contre-rapport
La commission du conseil général chargée
d'enquêter sur les faits reprochés à M.Robin,
ex-directeur de l'orphelinat Prévost à Cem-
puis et qui ont motivé sa révocation, a ter-
miné ses travaux. Elle vient de choisir son
rapDOl'teur, M. Laurent-Cély. Ce n'est pas
rapporteur, L'histoire vaut d'être contée:
sans peine. L'histoire vaut d'être contée:
Il n'y a pas eu pour cette désignation moins
de quatre scrutins. Le premier donnait à M.
LamDué, disposé à conclure tout en faveur
de l\t: Robin, 7 voix contre 7 et 1 bulletin
blanc.
Entre le premier et le second tour de scru-
tin, quelques membres proposèrent la candi-
dature à M. Gervais qui déclarait que M. Ro-
bin, n'était pas exempt de. tout reproche, mais
que l'administration l'avait frappé trop rude-
ment et qu'elle eût dû simplement le mettre
à la retraite.
Ce second tour de scrutin donna encore à
M. Lampué 7 voix contre 7 et un bulletin
blanc.
Quelques amis de ce dernier lui firent
comprendre qu'il y. avait contre lui un parti
pris évident, qu'on le tiouvait trop radical.
M. Lampué retira sa candidature. M. Lau-
rent-Cély, un radical plus doux de tempéra-
ment, moins intransigeant obtint également
7 voix contre 7 et — toujours, un bulletin
blanc.
Finalement M. Laurent-Cély a été chargé
du rapport, avec mission de conclure au vote
d'une indemnité équivalente à la somme qu'au-
rait eue M. Robin si sa retraite avait été li-
quidée.
Le plus curieux de l'histoire de ce scrutin,
c'est que le bulletin blanc qui a empêché la
majorité de se former appartient à un conseil-
ler plutôt défavorable à M. Robin. Si bien
que la moitié de la commission d'enquête qui
n'a pas de rapporteur va on choisir un qui
présentera un contre-rapport!
La lutte, il y a lieu de le supposer, sera
chaude le jour de la discussion publique de
ces deux documents. contradictoires.
A L'ACADÉMIE
Ce n'est pas aujourd'hui, ainsi que plusieurs
de nos confrères l'ont annoncé, qu'aura lieu
l'élection académique en remplacement de M.
Leconte de Lisle, mais jeudi 6 décembre pro-
chain.
Plusieurs candidats sont en présence. Ce
sont MM. Henry Houssaye, Emile Deschanel,
qui sont les deux seuls candidats sérieux, et
MM. Emile Zola et Paul Verlaine.
M, Stephen Liégeard, qui s'était mis sur les
rangs à la demande de plusieurs immortels,
n'a pas voulu maintenir sa candidature : il
l'a momentanément retirée et se représen-
tera une autre fois, très probablement à
l'élection en remplacement de Victor Du-
ruy.
Quant à M. Léon Dierx, dont on avait à
tort annoncé la candidature, il se réserve
pour l'avenir.
La lutte restera donc circonscrite entre
MM. Henry Houssaye et Emile Deschanel.
Selon toute probabilité, c'est M. Henry Hous-
saye qui l'emportera et succédera à l'illustre
auteur des Poèmes barbares.
GUILLAUME II
Potsdam, 28 novembre.
L'empereur, qui souffre d'un léger refroidisse-
ment, a renonce à assister aux obsèques du grand-
duc héritier de Saxe-Weimar et à se rendre à
Kuchelna, en Silésie» eu devaient avoir heu des
chasses.
CHRONIQUE
C'est bien fait, ce qui arrive à Rodin. Il
n'aurait pas dû accepter de créer une sta-
tue pour place publique sur commande
d'une compagnie de fabricants de romans.
Il vaut mieux que ça. Son génie incertain
et laborieux, fait de tâtonnements et de
rages contre sa propre gaucherie, n'admet
pas la livraison de l'ouvrage à un délai
quelconque. Rodin est de ces hommes
en qui les questions d'argent, même s'il y
va de leur subsistance, n'entrent pas en
balance avec le contentement de soi. Con-
tentement relatif, s'entend : car à vouloir,
comme il le veut, que le marbre projette
une illusion de mouvement et de vie, on
use sa pensée et ses ongles sans jamais être
satisfait. Rodin était destiné au martyre.
Il est travaillé, en tant qu'artiste, par des
scrupules de conscience aussi minutieux
que ceux qui font baisser au religieux le
front sur les dalles de son couvent.
Quel naïf, a dû dire de lui maint sculp-
teur, en apprenant par les journaux qu'en
vue de se former une image de Balzac à
statufier, Rodin avait lu d'abord les qua-
rante volumes de la Comédie humaine,
plus maint document, qu'il s'était informé
de l'homme auprès de ceux qui l'ont
connu, qu'il avait cherché trace de ses por-
traits, et enfin visité son pays d'origine,
la Touraine 1 Cette lenteur d'investigation
n'est pas de notre temps. Nous sommes
plus pressés que cela.
A quarante ans un écrivain- doit avoir
publié ses vingt volumes et un sculp-
teur semé de monuments un certain nom-
bre de pouces de notre territoire. Nous ne
voulons que des génies faciles, de produc-
tion régulière, méthodique. Et M. Zola qui
interviewé aujourd'hui, par exemple, 'an-
nonce que le 25 juin prochain, à six heu-
res du soir, il mettra le mot fin à son ro-
man, M. Zola est notre homme. Il donne
à croire aux bonnes gens que la réalisa-
tion de ses conceptions enlignes d'écriture
est régie par des lois mécaniques dont le
jeu n'est plus qu'à démontrer. De fait, j'ai
connaissance d une municipalité qui, com-
mandant à un sculpteur certaine statue de
son goût, stipula que si à telle date elle
n'était pas livrée, fondue, prête, à planter
sur la place publique, chaque jour de re-
tard entraînerait une diminution du for-
fait. Styie commercial. -
On ne lit pas assez à Paris les journaux
de province. Autrement on aurait ces
jours-ci remarqué dans ceux de Lille un
blâme voté par le conseil municipal de
cette ville au sculpteur Mercié, pour son
retard à exécuter un monument de la Dé-
fense nationale de 1870-71. M. Mercié
traité avec tant de désinvolture ? Eh oui !
Et c'est sa faute aussi et pour une cause
opposée à celle de Rodin.
M. Mercié est un de nos plus grands
fournisseurs de statues. Il est, lui, je ne
dirai pas un génie, mais un talent merveil-
leux et aisé. Des délégués de municipali-
tés viennent le voir, font leur proposi-
tion de statue. Il accepte presque toujours.
Visitez son atelier. Dans un coin c'est
un poète qui s'ébauche, dans un autre
c'est un homme politique, un philan-
thrope.
Les délégués reviennent, c'est pour exa-
miner la maquette de leur monument.
Elle ne leur plaît pas tout à fait. Ils indi-
quent des retouches. Ils désirent une sur-
charge de personnages. Ils en veulent pour
leur argent. M. Mercié- se prête à ces fan-
taisies. Voilà la maquette retravaillée. Ne
trouvez-vous pas que M. Mercié est vrai-
ment un bon garçon et qu'il conduit son
art dans une compagnie .qui n'est pas la
sienne ? N'a-t-il pas encouragé la munici-
palité de Lille à le traiter du haut en bas,
et n'a-t-il pas ce qu'il mérite ? Est-il digne
de ses dons rares et de sa haute situation
de laisser discuter ce à quoi il se connaît
par des gens qui ne s'y connaissent point?
Il est vrai qu'une fois au fait de ses conces-
sions, je ne m'étonne plus si tant de sta-
tues signées de lui sont disgracieuses,
alors qu'il a, avant tout, la grâce. Elles ne
sont pas de lui. Elles relèvent de l'art mu-
nicipal.
Par cet exemple, imaginez à quelle dé-
pendance sont acculés les sculpteurs de
moindre renommée. J'en sais un qui,
ayant à soumettre un croquis de statue
allégorique pour un monument aux morts
de 1870-1871, se le vit renvoyer par la mu-
nicipalité avec cette remarque : « Nous
voulons que la République qui surmon-
tera ait des ailes. — Ce sera donc une Vic-
toire? — Une Victoire, si vous voulez. —
Il faudra lui ôter son bonnet phrygien?
- - Ah ! c'est juste, diable 1 Enfin dé-
coiffez-la. - Il faudra aussi modifier son
attitude. Je l'avais faite reposant ses deux
mains sur une épée dont la pointe est ap-
puyée sur le sol. Comment accorder cette
fermeté de plantation avec un apprêt de
s'envoler ? » Enervantes disputes qui ont
pour effet de déchirer la personnalité de
l'artiste et de le désintéresser d'une œuvre
qui n'est plus sienne complètement. Vaille
que vaille, on érige, on inaugure ; on dis-
tribue des rubans rouges et des rubans
violets. Du sculpteur pas un mot dans les
discours, ou si peu 1 Enfin, la municipa-
lité a l'art qu'elle mérite.
La seule excuse de ces compromissions
c'est qu'il faut vivre. M. Mercié ne l'a pas,
cette excuse. M. Rodin l'a-t-il? Je n'en sais
rien. Car j'assimile à une municipalité ce
bureau de la Société des gens de lettres,
qui -- les démissionnaires d'avant-hier
exceptés — veut presser Rodin. « Eh bien!
monsieur Rodin, quel jour comptez-vous
finir? Pouvons-nous annoncer l'inaugura-
tion, préparer nos discours, demander au
ministre les décorations de circonstance ?»
M. Rodin a d'autant plus besoin de cette
excuse, que son admirable indépendance
doit le placer au-dessus du mercantilisme
des statues courantes.
Il y a des artistes qu'un délai fixé sti-
mule, d'autres qu'elle abat, par la compa-
raison entre le temps qui leur reste et les
exigences de leur souci de perfection. Ro-
din est de ces derniers. Le Salon ne le
trouve jamais prêt. Son buste de Puvis de
Chavannes exposé il y a trois ans au Champ-
de-Mars, il le reprit après l'exposition. L*
ne l'avait envoyé que pour ne pas çjjinquei
à l'invitation des camarades.
De même Carriès est mort sans avoir
achevé une porte décorative qu'une dame
très riche lui avait depuis dix ans com-
mandée. Elle allait lui faire un procès
quand il est mort. A l'exposition récente
qui a précédé la vente des tableaux im-
pressionnistes appartenant à M. Théo-
dore Duret, on a remarqué un portrait
inachevé d'Albert Wolf, par Manet, qu'Al-
bert Wolf interrompant de poser avail
laissé en plan parce que Manet revenait
sur son premier dessin.
Il y aurait bien d'autres traits à citer de
cette belle intransigeance d'art opposée à
la hâte du monsieur qui veut être servi.
L'éminent sculpteur M.Dubois à quelqu'un
qui lui demande son buste répond tran-
quillement, s'il accepte. « Soit, mais je
vous préviens que je ne pourrai le com-
mencer que dans dix ans. J'ai des travaux
en train. » Aussi ne voit-on pas lourd
de lui sur nos places publiques. L'art
municipal ne l'a jamais compté parmi ses
sujets. Il me parait être le type du sculp-
teur altier.
Edouard Conte.
Le Petit Châteauneuf-du-Pape doit sare-
nommée au fin bouquet qu'il acquiert en bou-
teille. Le propriétaire des Fines-Roches à Chà-
teauneuf-du-Pape l'expédie à 133 ir. les 225 lit,
LES
Franaes Óloctoralos" aB TonIuuss
Toulouse, 28 novembre.
La neige n'a cessé de tomber depuis
24 heures.
L'audience de la cour d'assises est ouverte
à 11 h. 1^2. La salle est presque vide.
Deux jurés, tombés subitement malades,
sont remplaces parles deux jurés supplémen-
taires. Le président invite très aimablement
les douze jurés restants à conserver leur
santé; autrement, dit-il, nous serions obligés
de renvoyer l'affaire à huitaine. (Hilarité.)
Les témoins
La cour va procéder à l'audition des témoins
de l'accusation.
M. Llagone, adjoint au nmire. révoqué, a
travaillé à la révision de la îistp des élections
municipales.
Il nie avoir prescrit à Mascaras de porter de
fausses inscriptions après la clôture de la
liste.
Le témoin,qui est un ancien capitaine d'ha-
billement de* l'infanterie de marine, déclare
hautement avoir recommandé au chef de bu-
reau des élections d'agir avec la plus absolue
loyauté. J'ignorais ses agissements délic-
tueux, dit-il.
Le président fait observer au témoin qu'il est
en contradiction avec plusieurs témoins
quand il affirme n'avoir donné l'ordre d'ins-
crire aucun nom postérieurement à la clôture
des listes.
Me Rousselle, partie civile, interpellant M.
Llagone, lui dit : « Vous êtes un tancien offi-
cier, vous êtes décoré de la Légion d'hon-
neur ; je vous demande de dire, par oui ou
par non, si vous avez remis votre carte à M.
Glaize, avec mention de la faire inscrire sur
la liste. »
— Non, répond le témoin, très visiblement
troublé.
De son côté, Mascaras affirme, au sujet
d'un autre nom faussement inscrit, que l'ad-
joint lui aurait dit : « Le mort ayant pris la
place du vivant, le vivant peut bien prendre
celle du mort. ».
- C'est faux, s'écrie M. Llagone, je n'ai
jamais tenu pareil propos. (Mouvements di-
vers.)
On se rappelle que l'instruction a établi la
substitution de noms d'électeurs décédés à
ceux dont les opinions étaient suspectes.
M. -Llagone fournit ensuite des explications
assez vagues sur les motifs de la révocation
de Mascaras, dont il était le chef direct.
Le président constate lui-même que ces ex-
plications sont nuageuses. L'établissement
des faux mandats de payement par Mascaras
ne parait pas, en effet, lavoir été la cause dé-
terminante de son renvoi de la mairie.
M. Debax et M. Bacquié, conseiller muni-
cipal, membres de la commission de revi-
sion, déclarent n'avoir jamais constaté d'irré.
gularités apparentes sur les listes éècto-
rales.
Les électeurs
Défilent ensuite une série d'électeurs qui
se plaignent d'avoir été radiés sans motifs
plausibles. Sur leurs réclamations ils furent
réinscrits. D'autres noms avaient été substi-
tués aux leurs sur les listes.
Le témoin Mercier, concierge à l'Ecole des
beaux-arts, déclare, au milieu de l'hilarité
générale, avoir reçu de la mairie avis de son
décès. « J'ai protesté, dit-il, et l'on m'a réins-
crit postérieurement à la clôture de là lista
électorale. »
L'accusé prétend avoir fait procéder à ces
inscriptions sur l'ordre même de M. Couderc,
secrétaire général de la mairie.
Les témoins affirment, de leur côté, ne pas
connaître M. Couderc.
Un autre témoin, le sieur Bazière, dit
qu'au bureau des élections on lui a répondu
qu'il était porté mort. Il s'en plaignit à
M. Serres, le maire, qui lui dit qu'on avise-
rait.
La série des chlores
Nous passons maintenant, dit l'avocat gé«
néral, à la-série des chlores.
En effet, un grand nombre de témoins vien-
nent déclarer qu'ils ont été portés sur les
listes comme étant décédés.
Leurs noms étaient enlevés à l'aide du
chlore et remplacés par d'autres.
Quatorze témoins faisant défaut sont con-
damnés chacun à cent francs d'amende.
Il résulte des déclarations d'autres témoins
que, soit en 1892, soit en 1893, une quaran-
taine d'électeurs ont été irrégulièrement ins-
crits sur les listes. Certains noms ont été
placés en interligne avec un numéro bis ;
d'autres se trouvaient placés en fin de liste et
en dehors du rang que l'ordre alphabétique
leur assignait.
Le témoin Artié affirme, ce qui concorde
avec les déclarations de l'accusé Mascaras,
que, réclamant contre sa non-inscription,
radjoint Llagone aurait dit à Mascaras:
« Il faut faire voter cet homme, il est de nos
amis. »
Le président, interpellant M. Llagone qui
se trouve dans la salle : « Vous le voyez, dit-
il, le témoin donne un démenti formel à voa
affirmations. »
L'adjoint Llagone balbutie quelques rpon.
s embarrassées qui soulèvent les murmure.
de l'auditoire.
M. Bois, chef de division à la préfecture 4h
la Haute-Garonne, est appelé.
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