Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1894-11-21
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32757974m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 68249 Nombre total de vues : 68249
Description : 21 novembre 1894 21 novembre 1894
Description : 1894/11/21 (A24,N8346). 1894/11/21 (A24,N8346).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7562574x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/04/2013
VINGT-QUATRIÈME ANNÉE. — N* 8,346
LE NUMBaO CDVQ CENTIMES
MERCREDI 21 NOVEMBRE i894
a RÉDACTION ET IDIIIISTRI TIOI "1
r 142, Rue Montmartre
l,à42 PARtt V
DIRECTEUR POLlTlfttf*
TA.-EDOUARD PORTALIS
Hnwii télégraphique : XIX- SIÈCLX- PAM
Téléphone : 30.289 bit.
MMRCIS
ObM MM. LAGRANGE, CHRP « OU
6, place de la Bottrtt, 0
ABONNEMENTS
Paris Tnb lois, 6 f.; Si lois, 11 f.; Il la.
Départements — 7 f.; — 12 f.; — 24 t
Union Postale — 9f.; — 16 f.; — 32 fc
Les Abonnements sont reçus sans frais dans
tous les Bureaux de Poste.
Programme lircliiste
Malgré les annonces des premiers
jours, le duc d'Orléans ne paraît pas
très pressé de « se faire casser la tête ».
Il a l'air, tout au contraire, d'un pré-
tendant bien sage, avec lequel on peut
causer, auquel même on peu\ faire en-
tendre de bons avis, et l'un de ses amis
profite de ces gentilles dispositions pour
lui donner des conseils qui ont au
moins le charme de l'imprévu. Ce con-
seiller n'est pas un indifférent: c'est un
de nos confrères du Soleil, M. Urbain
Gohier, et le zèle avec lequel ce jour-
nal, dont il est un des collaborateurs
politiques, a toujours défendu la mo-
narchie nous est un sûr garant que dans
le programme monarchiste dont il pro-
pose au prince deux articles, il ne s'est
glissé ni ironie ni intention perfide.
Ces deux articles du programme, M.
Gohier les formule ainsi : « Il faut dé-
barrasser la cause monarchique des dé-
bris du parti légitimiste et réactionnaire.
Il faut la débarrasser de la faction clé-
ricale dont les ambitions n'ont rien de
commun avec la religion. » M. Gohier
ne se montre tendre ni pour les uns ni
pour les autres. Les débris du parti lé-
gitimiste sont, à ses yeux, des « héri-
tiers inutiles du passé »; ils ne « forment
plus qu'une végétation parasite imper-
ceptible sur l'énorme corps social ». Ce
Bont des « émigrés à l'intérieur qui
prennent leurs opinions préhistoriques
pour le sentiment actuel du pays ».
Quant aux ralliés, M. Gohier leur dé-
clare cruellement que, « devenus pour
leurs anciens amis un objet de mépris,
ils sont pour le public des fantoches ».
Il n'est pas moins impitoyable pour les
hommes qui ont siégé sur les bancs de la
droite depuis l'avènement de la Répu-
blique :
« Nous les avons vus quinze ans, dans le
Parlement républicain où les envoyaient
de courageux citoyens, courtiser tous les
gouvernements qu'ils avaient mission
de combattre. Nous les avons vus, men-
diants éternels, assiéger le banc des
ministres, quels que fussent les minis-
tres. Pour gagner la bienveillance du
premier sot pourvu d'un maroquin, ils
se sont faits les chefs de claque des
majorités les plus serviles. Nulle com-
promission, nulle capitulation ne leur
a coûté. »
Aux cléricaux, M. Gohier dit gracieu-
sement : « La cause monarchique a
traîné trop longtemps le boulet clérical »,
et l'Eglise même ne trouve pas le con-
seiller bénévole du prince mieux dis-
posé à son égard : « On ne l'a jamais
pour alliée, dit-il, qu'à la condition de
se résigner d'avance à devenir sa dupe »,
opinion qui nous semble fort juste et
que nous avons souvent soutenue, mais
dont nous ne nous attendions pas à re-
cevoir la confirmation d'un rédacteur
du Soleil.
Les catholiques de la nuance de M. de
Mun ont aussi leur tour. Ce sont de
« louches alliés » : ils avaient, lors de
l'aventure boulangiste, « lancé la cause
monarchique contre l'opinion des vrais
monarchistes et tâché de se glisser dans
l'autre camp ». Et M. Gohier conclut à
leur égard : « Puisqu'ils sont une bonne
fois sortis de notre camp, laissez-les
dehors et fermez bien la porte. »
Donc, il faut se débarrasser de tous
ceux qui, depuis quinze ans, ont été
considérés comme les chefs du parti
monarchiste, de tous ceux qui ont in-
carné en eux, avec plus ou moins d'au-
torité, l'idée monarchique. « Il faut
choisir entre les millions de citoyens
vivant et pensant qui composent la na-
tion et six douzaines de fossiles. » Les
remplaçants de ces fossiles, il faut les
chercher « dans ces classes moyennes,
réfléchies, qui sont l'élite et la force de
la nation ». Et M. Gohier formule ainsi
sa pensée : « Ou la monarchie ne sera
pas — ce qui est encore bien possible —
ou la monarchie sera laïque, démocra-
tique et fidèle au noble esprit de la Ré-
volution. »
M. Gohier ne se fait sans doute pas
de grandes illusions sur l'accueil qui
attend ses conseils. Le programme qu'il
ébauche dans sa brochure n'est pas nou-
veau. C'est le programme de ceux qui,
en 1830, firent la monarchie constitu-
tionnelle après avoir, dans les journées
de Juillet, mis à la porte la monarchie
légitime parce qu'elle était réaction-
naire et cléricale. C'a été le programme
du gouvernement autour duquel s'é-
taient groupés ceux qui, encore inquiétés
par les souvenirs de la première Répu-
blique, par les désordres du Directoire,
cherchaient dans la forme monarchique
des garanties de stabilité sans renoncer
cependant à l'esprit de la Révolution et
aux idées libérale8, (
Mais depuis vingt ans il s'est pro-
duit entre les libéraux de cette nuance
et le représentant de l'idée monarchique
une rupture de plus en plus profonde.
Le comte de Paris a consacré tous ses
soins à rallier autour de lui tous ces
fossiles, et pour leur donner satisfac-
tion, il a de plus en plus solidarisé la
cause de la monarchie avec celle de
l'Eglise, jusqu'au jour où entre elles
deux une rupture s'est produite, l'Eglise
ayant considéré l'idée monarchique
comme un poids mort qui la gênait
dans ses mouvements et qui éloignait
les électeurs au lieu de les attirer.
Pendant ce temps, tout ce qui avait
quelque libéralisme dans l'esprit s'est
de plus en plus séparé de la monarchie,
trouvant dans la République les garan-
ties que leurs devanciers avaient appré-
hendé de n'y pas rencontrer. Ce n'est
pas ce qu'ils savent de M. le duc d'Or-
léans, de ses dispositions d'esprit, de
son éducation, qui peut les déterminer
à se séparer de la République pour se
convertir à la monarchie.
Ceux qui ont, dans le parti monar-
chique, les sentiments de liberté et de
justice dont s'inspire M. Gohier sont, au
contraire, fatalement destinés, malgré
les sympathies personnelles ou les con-
sidérations qui les ont retenus, à sortir
du camp monarchique et à donner à la
République une adhésion d'autant plus
sincère qu'elle aura été plus réfléchie
et qu'ils auront mieux reconnu l'impos-
sibilité de ramener la monarchie dans
les voies où ils voudraient la diriger.
Peut-être, il y a vingt ans, l'expérience
eût pu être tentée avec quelque succès.
Aujourd'hui, on ne peut que répéter
le mot de Lanlartine : « Il est trop
tard. »
LES INSTITUTEURS
Détachés dans les Établissements d'Assistancé
Un décret du président de la République
vient de décider que les écoles de tous les
établissements d assistance ou de bienfai-
sance seraient soumises au même régime
que toutes les autres écoles publiques.
Si l'établissement constitue un service de
l'Etat, la création dé l'école ne peut être déci-
dée qu'après avis du conseil supérieur de
l'instruction publique. Si l'établissement cons-
titue un service départemental ou communal,
l'école ne peut être créée que sur la demande
du conseil général ou du conseil munici-
pal.
Les instituteurs et institutrices appelés à
exercer dans ces écoles jouiront des mêmes
droits et avantages et seront soumis aux
mêmes règles que les autres instituteurs pu-
blics. Ils continueront à figurer dans leur
cadre d'origine et y conserveront leurs droits
à l'avancement. Les maîtres nourris dans
l'établissement n'auront paa droit à l'indem-
nité de résidence.
Les maîtres actuellement en exercice seront
classés par arrêté ministériel dans le person-
nel primaire du département auquel se ratta-
che l'administration qui a fondé l'école. Ils
ne subiront les retenues pour pensions civiles
que sur les traitements et suppléments de
traitements légaux qui leur seront assignés.
Dans le cas où le montant de ces traitements
et des indemnités accessoires serait inférieur
aux avantages dont ils jouissent, il leur sera
alloué une indemnité complémentaire jus-
qu'à ce que leurs émoluments aient atteint le
chiffre de ceux qui leur sont actuellement at-
tribués.
UN ÈTUDIANT MINISTRE
Un changement de ministère vient de se
produire dans République de l'Uruguay, et
parmi les nouveaux ministres se trouve M.
Jean Castro, étudiant de l'école des ponts et
chaussées, à qui on a confié le portefeuille de
l'instruction publique.
L'étudiant bombardé grand maître de l'Uni-
versité a tenu à régulariser sa situation. Il
s'est présenté récemment pour passer son
examen, afin d'obtenir un diplôme.
Il est probable que les professeurs de la
commission d'examen ne se montreront pas
trop sévères pour un candidat qui peut, comme
celui-ci, nommer et révoquer à son gré ces
professeurs.
BATAILLE
ENTRE
PROTESTANTS ET CATHOLIQUES
(DB NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIBR)
Munich, 19 novembre.
A l'occasion des élections municipales, il y
a eu, dans la commune de Hassloch, une ba-
taille en règle entre protestants et catholi-
ques.
Les paysans des deux camps étaient armés
de fusils ; les catholiques, en signe de rallie-
ment, ont fait sonner le tocsin le soir à huit
heures. Une fusillade très vive s'est engagée
et une lutte acharnée a eu lieu dans les rues.
Les protestants, en minorité, ont été refoulés.
Le combat a duré jusqu'à onze heures du soir,
lorsqu'un fort détachement de troupes est ar-
rivé sur place et a rétabli l'ordre.
Il y a de nombreux blessés et même quel-
ques morts.
LE RHONE MONTE
Pont-Saint-Esprit, 19 novembre.
Le niveau du Rhône, qui se trouvait à zéro il y a
trois jours, est ce matin à l'ètiage de 4 mètres 50
centimètres.
Les quais commencent à être envahis par les
eaux.
Cette crue est causée par l'Isère et l'Ardèche
grossies par les pluies.
MORT DU « PROFESSEUR » BEN FULLER
Londres, 19 novembre.
Un ancien fort de la halle aux poissons, devenu,
pour le public de l'Aquarium de Londres le c pro-
fesseur n Ben Fuller, s'est tué hier en plongeant
du plus haut point du pont de la Tour de Londres
dans la Tamise, soit d'une hauteur de 340 pieds.
Il est revenu un instant à la surface, puis a dis.
Mru tout à coup. Son cadavre n'a pu été n-
CHRONIQUE
Je reçois le rapport du dernier exercice
de l'Association Valentin Haüy pour le
bien des aveugles. C'est une œuvre bien
intéressante et bien touchante, et il est
malaisé de ne pas suivre ses travaux avec
une curiosité émue. Le beau livre de Lu-
cien Descaves, les Emmurés, plein de pi-
tié, mais non de pitié stérile, semble d'ail-
leurs avoir déterminé un courant de sym-
pathie pour la cause des aveugles.
Ceux-ci ont été assez longtemps plaints
uniquement. Ils sont las de cette commi-
sération qui fait d'eux, pour ainsi dire, des
êtres à part, séparés, retranchés de la so-
ciété s'ils restent des humbles, ou des
« phénomènes » si, malgré toutes les diffi-
cultés amoncelées sur leur route, ils attes-
tent dans quelque branche de l'activité
humaine une supériorité. Ils protestent
contre les préjugés qui pèsent toujours sur
eux et ils demandent que, par l'abandon
de ces préjugés, il leur soit permis de prou-
ver qu'ils peuvent jouer un rôle utile.
Assurément, ils se trouvent dans des con-
ditions où ils ont besoin de plus de cou-
rage que d'autres, mais il n'y a, répètent-
ils vaillamment, d'infirmité irrémédiable
que celle qui atteint l'intelligence. Au sens
de la vue qui leur manque, ils suppléent
par une éducation spéciale qui les empê-
che d'être les déshérités complets que
l'on croit trop communément qu'ils sont,
et ils acceptent leur malheur avec une sé-
rénité brave.
Les idées toutes faites que l'on a à leur
égard leur nuisent plus, en fait, que le
malheur lui-même. C'est contre ces idées-
là qu'il faut présentement, sans cesse, es-
sayer de réagir. Ce sont elles qui rendent
encore si difficile l'assistance. Le jour où
l'opinion sera assez avancée pour que, en
présence d'un aveugle, on dise d'abord,
non pas « le pauvre homme 1 » mais « que
sait-il faire? » La question sera résolue.
Dans notre pays généreux, il est étrange,
quand on y pense, qu'on ait créé entre les
aveugles et les clairvoyants des abîmes
plus grands que ceux qu'a creusés la na-
ture. Nous autres, gens d'une race aux
instincts spontanés, hardis, nous avons
les plus routinières préventions, parfois.
Les sourds-muets, qui s'émancipent peu
à peu, n'ont-ils pas été aussi, pendant très
longtemps, tenus pour ainsi dire en suspi-
cion ?
Il y a naturellement nombre d'occupa-
tions" forcément interdites aux aveugles,
mais il y en a beaucoup d'autres, aussi,
où ils peuvent s'occuper très convenable-
ment, aussi bien que des voyants, où ils
peuvent même exceller. Ainsi les aveugles
sont-ils généralement bcns musiciens, en
raison de la délicatesse particulière qu'ac-
quiert chez eux le sens de l'ouïe. Malheu-
reusement, les situations auxquelles ils
ont, très légitimement, le droit de pré-
tendre dans tout ce qui relève de la mu-
sique sont assez restreintes et il y a beau-
coup plus de candidats que d'emplois.
C'est ce qu a très justement indiqué M.
Descaves dans son livre, en demandant à
l'institution nationale du boulevard des
Invalides de ne préparer aux professions
musicales que les sujets tout à fait doués.
Sinon, on s'exposera à créer une sorte de
bohème, composée des aveugles auxquels
une éducation permet certaines préten-
tions et qui ne trouvent pas, cependant,
à gagner leur vie.
Il faudrait faire une plus large part à
l'enseignement de métiers pratiques et
sûrs, fussent-ils moins relevés. Il vaut
mieux être un bon ouvrier qu'un artiste
exposé à tous les hasards. Au reste, le dé-
veloppement de cet enseignement manuel,
donnant de bons résultats, attesterait que
les aveugles sont propres à une foule de
choses, et, parla, les tenaces préjugés se-
raient peu à peu vaincus. A l'institution,
on tient aussi les élèves un peu trop isolés
d'un monde avec lequel il faudrait, au
contraire, qu'ils fussent en perpétuel con-
tact. Ils en sortent instruits, mais ayant
véritablement à faire l'apprentissage de la
vie, à détruire, chacun pour son compte,
les idées courantes, à triompher de ces
surprises blessantes pour eux, qui se ma-
nifestent, plus ou moins discrètement,
quand on les voit adroits, prestes, se ti-
rant d'affaire, en beaucoup de circons-
tances, sans avoir besoin de personne. La
défaveur contre laquelle ils se débattent
encore quand ils cherchent à tirer des
ressources de ce qu'ils ont appris vient,
pour une grande part, de ce qu'ils n'ont
pas été assez mêlés à ceux qui exercent la
même industrie qu'eux. -
Ce sont là des réflexions générales. Il y
a trop de sensiblerie à l'égard des aveu-
gles et pas assez de véritable fraternité. Il
ne s'-agit plus, maintenant, de s'étonner de
ce qu'ils sont capables de faire ; il s'agit,
en abandonnant l'antique routine, de les
essayer, de les mettre à l'œuvre et, s'ils
sont à même d'accomplir les travaux qu'on
leur confie, de les employer dans des con-
ditions d'égalité avec les voyants.
Si les vieilles défiances cessaient — et
elles devraient cesser en présence de la
preuve faite de leur habileté — la Société
pour le bien des aveugles n'aurait pas sur
les bras une aussi lourde tâche, dans
l'œuvre de patronage qu'elle poursuit, en
tentant de mettre une besogne, leur assu-
rant quelque salaire, entre les mains de
ses protégés. C'est une œuvre qui n'est pas
bien riche, surtout, quand on songe à tout
ce qu'elle aurait à faire. Dans le dernier
exercice elle n'a pu dépenser que vingt-
deux mille francs. Et pourtant, avec ces
ressources bornées, elle a fait beaucoup
de choses. Il serait à souhaiter que nos
finances publiques fussent administrées
avec une aussi sage économie.
La Société a à secourir les aveugles pour
lesquels l'existence a été le plus dure, qui,
de refus en refus, leur bonne volonté
n'ayant pu être mise à l'épreuve, ont été
contraints à l'inaction, sont tombés dans
le dénuement absolu. Pour ceux-là, il est
trop tard pour qu'on leur enseigne un mé-
tier vraiment rémunérateur. Il a fallu sln-
génier à leur 4ooaer une occupation fa-
cile. Ah 1 dame, ils ne gagnent pas grand'-
chose ! Mais le grand point, c'était de les
arracher à la déshonorante mendicité, de
montrer qu'on ne doit jamais désespérer.
Aust' l'association a-t-elle fondé un
atelier où des aveugles âgés, débiles, qui
souffrirent le plus de l'infériorité dont on
persista à les taxer, confectionnent des
sacs en papier trouvant un écoulement
relativement facile dans le quartier des
Halles. C'est un travail purement machi-
nal, mais — le fait a surtout, présente-
ment, une importance morale — c'est tou-
jours du travail. Sur le mince budget dont
on dispose, cette fondation a lourdement
pesé, avec quelque prudence que l'on ait
marché. Il y a des détails qui sont un peu
tristes : pendant l'hiver, on n'a pas eu de
quoi faire du feu dans l'atelier. Dame 1
c'était un luxe qu'on ne pouvait se per-
mettre. Est-ce que, cette année, il ne se
trouvera pas quelques personnes géné-
reuses, voulant empêcher que les ouvriers
aveugles de la rue Bailleul aient les doigts
engourdis par le froid? En attendant,
l'œuvre réclame les vieux papiers servant
à fabriquer les sacs. Le papier fait tant de
mal parfois, ou il contient tant de choses
inutiles et vides 1 C'est une façon de se
réhabiliter, pour lui, que de servir à
faire vivre ces pauvres gens.
L'Association Valentin Haüy a créé pour
les femmes-aveugles, pour qui l'assistance
est surtout urgente (que gagnent, hélas 1
les ouvrières qui ont leurs yeux et leurs
bras, et, à plus forte raison, combien la
situation des autres est difficile 1), un ate-
lier de brosserie qui donne d'assez bons
résultats et un autre où on fait du tricot.
Ce sont là des tentatives qui auraient bien
besoin d'être encouragées. Pour le mo-
ment, on est quelquefois forcé d'hésiter
devant les achats, cependant indispen-
sables, de matière première. Le vaillant
conseil d'administration, en regardant
avec un peu d'inquiétude ce qu'il y a en
caisse, trouve notamment que la laine
qu'il faudrait donner à ses ouvrières coûte
cher. Il en faut, pourtant, pour le tri-
cotage.
Malgré les embarras où l'on se trouve
parfois, voici donc des débouchés créés
pour le travail des aveugles, même les
plus malheureux. C'est dire que les au-
tres, ayant une instruction professionnelle
sérieuse, se devraient tirer d'affaire si l'on
avait généralement des idées plus larges.
L'Etat devrait donner l'exemple, à ce qu'il
semble ; il fait pourtant, plus que tout le
monde, la sourds oreille. Ainsi, alors
qu'on démontrait qu'elles pourraient ren-
dre là des services, après un bref appren-
tissage, la manufacture des tabacs, solli-
citée, a-t-elle jusqu'à présent refusé d'ac-
cepter des ouvrières aveugles. Il eût suffi
cependant d'un peu de bonne volonté pour
que ce travail mécanique leur fût accordé,
et l'épreuve aurait été intéressante de
l'emploi des aveugles concurremment avec
les autres.
N'est-ce pas à l'Etat, pourtant, qu'il ap-
partiendrait de commencer la réaction né-
cessaire contre les préjugés qui accablent1
les aveugles ?. Quelle chose singulière 1
il consent à d'assez sérieux sacrifices pour
les élever, pour les mener jusqu'à l'âge
adulte. Puis, alors, il les abandonne brus-
quement, et il se donne un étrange dé-
menti à lui-même en se montrant encore
plus routinier que les particuliers !
Paul Ginisty.
Pour déguster le délicieux vin des Papes,
écrire au propriétaire des Fines-Roches, M.
Henri Constantin, à Châteauneuf-du-Pape
(Vaucluse).
LE MARIAGE DE NICOLAS Il
Saint-Pétersbourg, 19 novembre.
Demain, toute la cour, les princes et les
missions étrangères assisteront au service
funèbre du vingtième jour dans l'église de la
forteresse.
Le mariage de l'empereur et de la princesse
Alexandra sera probablement annoncé mer-
credi pour une date très rapprochée. Mainte-
nant que les obsèques ont eu lieu, il n'existe
plus aucune question de convenance. Le ma-
riage aura lieu vraisemblablement lundi.
Un grand cortège composé de carrosses de
gala conduira la fiancée depuis le palais du
grand-duc Serge jusqu'au Palais-d'Hiver,dans
la chapelle duquel se célébrera le mariage en
présence seulement de la famille impériale et
des princes parents. Ainsi l'archiduc d'Au-
triche repartira demain et les missions extra-
ordinaires repartiront aussi avant le mariage.
Les ambassadeurs n'y assisteront pas non
plus. 1 d't 1 t .¡Ob'
Si, comme on le dit, le mariage est célébré
lundi, la cérémonie aura lieu le matin, car le
carême commence lundi à deux heures et la
cérémonie devra être terminée avant.
Le deuil sera suspendu le jour du mariage.
La cérémonie sera suivie d'un dîner de fa-
mille.
L'empereur et la nouvelle impératrice habi-
teront le Palais-d'Hiver quand ils seront à
Saint-Pétersbourg. On dit qu'après leur ma-
riage ils iront habiter Tsarskoë-Selo pendant
quelque temps.
L'impératrice douairière, à laquelle vont les
sympathies du monde entier, se rendra, dit-
on, aussitôt après le mariage, auprès du
grand-duc Georges.
L'EMPEREUR ET SES MINISTRES
Francfort, 19 novembre.
On mande de Saint-Pétersbourg à la Ga-
zelle de Francfort que M. de Giers, ministre
des affaires étrangères, et le général Van-
novski, ministre de la guerre, ont donné leur
démission.
On ajoute que l'empereur a répondu au gé-
néral Vannoski que c'était trop tôt ; mais
on ne sait pas la réponse qu'il a faH à
M. de Giera.
LES OBSÈQUES DE M. MAGNARD
Nous avons dit que les obsèques de M. Fran-
cis Magnard auraient lieu aujourd'hui, à midi,
àNotre-Dame-de-Lorette. L'inhumation se fera
au cimetière de Passy. Des discours seront
prononcés par MM. François Coppée, ami de
la famille; Mézières, député, membre de l'A-
cadémie française, président de l'Association
des journalistes parisiens, au nom de la
presse; Claretie, au nom des anciens colla-
borateurs du Figaro; de* Rodays, au nom du
Figaro.
LES OBSÈQUES DU TSAR
LA DERNIÈRE CÉRÉMONIE
A la cathédrale des Saints Pierre et Paul.
Une grandiose manifestation.
Saint-Pétersbourg, 19 novembre.
Le brouillard couvre la ville comme un
manteau de deuil.
La foule qui s'est massée sur les quais de
la Néva, en face de la forteresse, ne peut rien
apercevoir; néanmoins elle augmente cons-
tamment.
Pendant que la cérémonie commence à l'in-
térieur de l'eglise, les troupes de la garde et
les élèves des écoles militaires viennent s'é-
tablir sur les quais depuis le pont Nicolas
jusqu'au pont Alexandre.
Dès les premières heures, des voitures par-
tent de tous les points de la ville, allant dans
la direction de la Néva. Une foule énorme
garnit le parcours que doit suivre la famille
impériale pour se rendre à la cathédrale.
Les correspondants de journaux ayant ob-
tenu l'autorisation d'assister à la cérémonie
sont partis du ministère de la cour à huit
heures et demie, sous la conduite de M. Ces-
lovine, attaché à ce ministère et qui est
chargé de veiller à ce que toutes les facilités
possibles leur soient accordées.
M. Ceslovine accomplit sa mission avec
une courtoisie et un tact parfaits dont nous
lui sommes tous reconnaissants. Il nous a
conduits à l'église de la forteresse où nous
sommes arrivés à neuf heures. Plusieurs
d'entre les correspondants ont pu entrer à la
sacristie où le P. Jean s'est entretenu avec
eux, les a bénis et les a embrasses.
LES COURONNES
L'église contenait encore peu de monde ; on
procédait aux derniers préparatifs et l'on ar-
rangeait tout pour que le cercueil pût être
fermé de suite. L'église contient une quantité
innombrable de couronnes qui sont très artis-
tement réparties : une masse énorme en en-
toure le catafalque, les piliers en sont revê-
tus ; elles tapissent les murs, formant de gra-
cieux dessins ; elles envahissent les tombeaux
des anciens tsars et sont déposées de tous les
côtés dans l'église.
On remarque beaucoup celles du président
de la République française, des ministres,
du général de Boisdeffre, chef de la mission
française, des membres de la mission fran-
çaise, de 'la presse parisienne, de l'Ecole
militaire de Saint-Cyr, de l'Association des
dames françaises, celles de la colonie fran-
çaise de Saint-Pétersbourg surmontée d'une
couronne impériale en immortelles et des diffé-
rentes villes de France ; parmi les autres cou-
ronnes, à signaler celles de la reine d'Angle-
terre, du roi d'Italie, du roi des Belges, de la
reine de Hollande, du roi de Danemark, du
duc d'Orléans, en lilas blancs et mauves et
orchidées et portant comme inscription: « Le
duc d'Orléans » ; du prince de Galles, etc.
L'église se remplit d'officiers, tous en grand
uniforme et portant le deuil à l'épée et à
l'épaulette. Les officiers étrangers arrivent en
grand nombre et portent également le deuil.
Seuls, les correspondants de journaux sont
en habit noir.
Deux hérauts d'armes se tiennent à la porte
de la cathédrale des Saints Pierre-et-Paul.
LA CÉRÉMONIE
A 10 heures et demie, trois coups de canon
tirés à la forteresse annoncent le commence-
ment de la cérémonie.
Quand tous.les fonctionnaires, les missions
étrangères, les officiers de la cour, les dépu-
tations sont arrivés, le cortège impérial fait
son entrée.
Il est reçu par Mgr Palladius, métropolite
de Saint-Pétersbourg, par les membres du
saint-synode, avec la croix et l'eau bénite.
L'ordre du cortège est celui indiqué par le
cérémonial officiel :
L'empereur, conduisant l'impératrice, la
famille impériale, les souverains, le roi de
Danemark, le roi et la reine de Grèce, le roi
de Serbie, le grand-duc régnant de Hesse ; les
princes étrangers viennent ensuite : le duc et
la duchesse de Cobourg, le prince de Monté-
négro, le prince et la princesse de Galles, le
prince de Naples, l'archiduc Charles-Louis,
le prince héréditaire de Roumanie, le grand-
duc héréditaire d'Oldenbourg, le grand-duc
héréditaire de Luxembourg, le duc d'York, le
prince Valdemar de Danemark, le prince
Georges de Grèce, le prince et la princesse
Henri de Prusse, le duc Jean-Albert de Mec-
klembourg-Schwerin, le prince Guillaume de
Bade, la princesse Vera de Wurtemberg, le
duc Albert de Wurtemberg, le prince Frédé-
ric-Auguste de Saxe, le prince Albert de Saxe,
le prince de Saxe-Altenbourg.
La famille impériale, les souverains et les
princes prennent place à gauche du cata-
falque.
Le corps diplomatique, les représentants
des souverains et des gouvernements étran-
gers, les députations prennent place à droite.
Avant l'arrivée du cortège impérial, le clergé
récito les psaumes.
Dès que le cortège est arrivé, commence le
service funèbre, accompagné de chants exé-
cutés par les chœurs et les chantres de la cour.
Cette musique simple et grandiose produit
une impression profonde.
Quand le seivice est terminé, les officiers
qui montaient la garde auprès du catafalque
se retirent, faisant place au clergé qui entoure
le cercueil. - -
Une nouvelle cérémonie a lieu. Tous les
assistants reçoivent des cierges allumés.
Le métropolite place sur la tête de l'empe-
reur mort un riche bandeau de soie orné des
saintes images, suivant la coutume russe. Les
familles pauvres elles-mêmes, en effet,placent
sur le front de leurs morts ces bandeaux, si
modestes qu'ils soient ; quelquefois même ils
sont simplement en papier.
Puis le métropolite met entre les mains du
tsar défunt un document contenant des in-
dulgences.
Quand cette cérémonie est terminée, l'em-
pereur s'avance le premier, puis viennent
l'impératrice, la familla impériale, les rois,
les princes, afin de donner le dernier adieu
au défunt, en lui baisant la main et le vi.
sage.
Cette scène silencieuse et solennelle produit
une impression poignante Les assistants ne
peuvent retenir leurs larmes.
Puis l'empereur place le manteau impérial
dans le cercueil Huit généraux apportent ie
couvercle, qui est acellé.
LA FIN
Le cercueil est enlevé par l'empereur, les
membres de la famille impériale. les princes
étrangers, les ministres de la cour, les aides
de camp, les généraux et les hauts fonction-
naires de la cour.
Le funèbre cortège, précédé du métropolite
et de son clergé, se dirige lentement vers le
tombeau.
Le cercueil est déposé au bord de la tombe,
autour de laquelle la famille impériale s'est
agenouillée.
Pendant le transfert du cercueil, le canon
de la forteresse tonne à intervalles réguliers,
comme un glas. On l'entend de l'intérieur de
l'église.
Les prières suprêmes sont dites devant 1*
tombe. A ce moment l'impératrice, qui jus-
que-là a fait preuve d'un courage surhumain,
ne peut plus résister à son immense douleui
et fond en larmes.
L'empereur et tous les membres de la famille
impériale ont les yeux mouillés de larmes.
C'est une scène navrante indescriptible
d'angoisse et de douleur.
Quand tout est fini, les grenadiers du palais
et des sergents-majors de tous les régiments
dont Alexandre III était le chef descendent
le cercueil dans la tombe.
L'empereur, l'impératrice, la famille impé.
riale, les rois, les princes, se retirent, suivis
des grands dignitaires.
A ce moment, les nombreux assistants qui
restent dans l'église se précipitent vers la
tombe, dont les parois sont tapissées de
fleurs. Chacun en demande une, afin de la
garder en souvenir du tsar Alexandre.
On les distribue à la foule.
Tous ceux qui peuvent approcher jettent
une pelletée de terre sur la tombe.
Tout est fini. La foule, silencieuse et morne,
s'écoule lentement.
Cependant l'empereur est sorti de l'église.
Sur son passage, les troupes massées dans
la forteresse présentent les armes, pendant
que les musiques jouent le Boje Tsara
Krani.
LES FLEURS DU SOUVENIR
Pétersbourg, 19 novembre.
Les fleurs du Souvenir seront distribuées
demain à l'asile français aux personnes qui
se présenteront.
Mille seront envoyées à Moscou. Une Gen..
taine ont été distribuées à la presse russe.
L'ambassadrice a accepté gracieusement
d'en distribuer deux cents.
Cinq mille seulement ont été reçues de Pa-
ris. On en annonce un nouvel et prochain
envoi sur lequel mille autres seront envoyées
à Moscou Ces fleurs sont très demandées de
tous côtés.
De nombreuses villes de France ont en-
voyé des couronnes : le Havre, Toulon, Lyon,
Arras, Toulouse, etc. Cette dernière ville a
même envoyé un délégué spécial, M. Labit.
A PARIS
La cérémonie à l'église russe
La brume intense qui enveloppait Parli
hier matin n'avait pas empêché la population
de se porter en masse assez considérable aux
abords de l'église russe.
Dès huit heures, la foule encombre les rues
Daru, Pierrele-Grnd, de la Néva; elle de<
vient bientôt si compacte, que toutes les voies
donnant accès à la chapelle sont barrées, et
les curieux qui espéraient pouvoir y station-
ner sont obligés de se réfugier dans la rue da
Courcelles et dans l'avenue Hoche. A dix heu.
res, la circulation des voitures est interdite
dans un périmètre assez étendu, les omnibus
eux-mêmes changent leur itinéraire.
Les troupes, sous les ordres du général Ma-
delor, commandant la5e division d'infanterie,
se massent le long des trottoirs. Seule la com-
pagnie de fuiiliers marins venus de Lorient et
une compagnie du 29e chasseurs se tiennent
dans la cour de l'église dont le perron est
garni d'une double haie de cavaliers de la
garde républicaine en grande tenue. La mu-
sique de la garde républicaine est massée à
l'extrémité de la rue Pierre-le-Grand, en face
de la grille.
Sur le terre-plein de l'Etoile, deux piècell
d'artillerie sont en batterie pour la salve ré-
glementaire de cent un coups de canon qui
se succéderont tout à l'heure de minute eq
minute.
Dans toutes ces rues les réverbères allumés
sont voilés de crêpe ; un grand nombre de
fenêtres sont pavoisées aux couleurs russes et
françaises.
Le silence n'est même troublé que parles
cris des camelots offrant le Dernier souvenir
franco-russe : une lithographie représentant
les drapeaux français et russe entrecroisés.
surmontés des portraits des deux chefs d'Etat
défunts et d'une pensée ; d'autres vendent
la photographie d'Alexandre III.
Dans l'église
La décoration de l'église est très simple ;
une immense draperie noire, rehaussée de
deux écussons aux couleurs impériales garnis
de franges d'argent, couvre la façade, ne lais.
sant apercevoir que les clochetons dorés. A
l'intérieur, aucune fleur, aucune draperie,
suivant le rite du culte orthodoxe.
Les prières des morts ont commencé à huit
heures et demie, en présence des membres de
l'ambassade et d'une grande partie de la colo.
nie russe, dont beaucoup de dames, presque
toutes en costume de deuil. Les prêtres sont
cachés derrière l'iconostase. Leur psalmodie
parvient en sons assourdis par la grille d'oi
qui sépare le sanctuaire de la nef réservée
aux fidèles et alterne avec les répons chantés
par les choristes ordinaires de la chapelle ;
l'effet est d'un lugubre que n'atteint aucune
des cérémonies funèbres de l'Eglise catho-
lique.
A mesure que l'heure s'avance, la petite
église se remplit; il n'est bientôt plus de
place pour faire les génuflexions. Les membre,
du corps diplomatique et les délégués offi-
ciels se glissent dans la foule, qui semble
sortir de son recueillement pour regarder les
nouveaux arrivants. Le frac écarlate de lord
Dufferin, l'uniforme blanc du ministre du
Japon, précédant de quelques pas les deux
représentants de la Chine vêtus de magni-
fiques robes de soie à boutons de cristal, sont
surtout remarqués. p
Les uns après les autres, les ministres, con..
duits par M. Mollard et reçus par M. Nicolas
de Giers, chargé d'affaires de Russie, vont
occuper les places qui leur sont destinées.
Tous les membres du gouvernement sont pré.
sents à la cérémonie : le président du conseil,
M. Charles Dupuy, avec son chef de cabinet;
M. Hanotaux, ministre des affaires étran.
gères ; le général Mercier, accompagné des
généraux directeurs du ministère et -de sec
officiers d'ordonnance ;
M. Félix Faure, ministre de la marine, suivi
des amiraux Duperré, Rieunier et Vignes, du
général de division Bégin, du capitaine dt
vaisseau Richard, chef du cabinet militaire ;
M Viger, ministre de l'agriculture ; M. Poin.
caré, ministre des finances; M. Barthou, mi.
nistre des travaux publics ; M. Lourties, mi.
nistre du commerce; M. Delcassé, ministre
des colonies ; M. Leygues, ministre de l'ins-
truction publique.
Derrière eux avaient pris place les députa.
tions de l'armée de terre et de mer, les géné-
raux Billot, Coiffé, Jamont, Caillot, d'Es-
peuilles. Cramezel de Kérué, et le vice-amiral
Human, chef de l'état-major général de la
marine.
Les membres du bureau du Sénat et de li
Chambre arrivent dans lesvoitures officielles,
précédés d'un peloton de dragons armés de
a lance.
Ils prennent place immédiatenit nt dénigre
le siège du président de la République;le
délégations sont composées de M. Ghalleu û
LE NUMBaO CDVQ CENTIMES
MERCREDI 21 NOVEMBRE i894
a RÉDACTION ET IDIIIISTRI TIOI "1
r 142, Rue Montmartre
l,à42 PARtt V
DIRECTEUR POLlTlfttf*
TA.-EDOUARD PORTALIS
Hnwii télégraphique : XIX- SIÈCLX- PAM
Téléphone : 30.289 bit.
MMRCIS
ObM MM. LAGRANGE, CHRP « OU
6, place de la Bottrtt, 0
ABONNEMENTS
Paris Tnb lois, 6 f.; Si lois, 11 f.; Il la.
Départements — 7 f.; — 12 f.; — 24 t
Union Postale — 9f.; — 16 f.; — 32 fc
Les Abonnements sont reçus sans frais dans
tous les Bureaux de Poste.
Programme lircliiste
Malgré les annonces des premiers
jours, le duc d'Orléans ne paraît pas
très pressé de « se faire casser la tête ».
Il a l'air, tout au contraire, d'un pré-
tendant bien sage, avec lequel on peut
causer, auquel même on peu\ faire en-
tendre de bons avis, et l'un de ses amis
profite de ces gentilles dispositions pour
lui donner des conseils qui ont au
moins le charme de l'imprévu. Ce con-
seiller n'est pas un indifférent: c'est un
de nos confrères du Soleil, M. Urbain
Gohier, et le zèle avec lequel ce jour-
nal, dont il est un des collaborateurs
politiques, a toujours défendu la mo-
narchie nous est un sûr garant que dans
le programme monarchiste dont il pro-
pose au prince deux articles, il ne s'est
glissé ni ironie ni intention perfide.
Ces deux articles du programme, M.
Gohier les formule ainsi : « Il faut dé-
barrasser la cause monarchique des dé-
bris du parti légitimiste et réactionnaire.
Il faut la débarrasser de la faction clé-
ricale dont les ambitions n'ont rien de
commun avec la religion. » M. Gohier
ne se montre tendre ni pour les uns ni
pour les autres. Les débris du parti lé-
gitimiste sont, à ses yeux, des « héri-
tiers inutiles du passé »; ils ne « forment
plus qu'une végétation parasite imper-
ceptible sur l'énorme corps social ». Ce
Bont des « émigrés à l'intérieur qui
prennent leurs opinions préhistoriques
pour le sentiment actuel du pays ».
Quant aux ralliés, M. Gohier leur dé-
clare cruellement que, « devenus pour
leurs anciens amis un objet de mépris,
ils sont pour le public des fantoches ».
Il n'est pas moins impitoyable pour les
hommes qui ont siégé sur les bancs de la
droite depuis l'avènement de la Répu-
blique :
« Nous les avons vus quinze ans, dans le
Parlement républicain où les envoyaient
de courageux citoyens, courtiser tous les
gouvernements qu'ils avaient mission
de combattre. Nous les avons vus, men-
diants éternels, assiéger le banc des
ministres, quels que fussent les minis-
tres. Pour gagner la bienveillance du
premier sot pourvu d'un maroquin, ils
se sont faits les chefs de claque des
majorités les plus serviles. Nulle com-
promission, nulle capitulation ne leur
a coûté. »
Aux cléricaux, M. Gohier dit gracieu-
sement : « La cause monarchique a
traîné trop longtemps le boulet clérical »,
et l'Eglise même ne trouve pas le con-
seiller bénévole du prince mieux dis-
posé à son égard : « On ne l'a jamais
pour alliée, dit-il, qu'à la condition de
se résigner d'avance à devenir sa dupe »,
opinion qui nous semble fort juste et
que nous avons souvent soutenue, mais
dont nous ne nous attendions pas à re-
cevoir la confirmation d'un rédacteur
du Soleil.
Les catholiques de la nuance de M. de
Mun ont aussi leur tour. Ce sont de
« louches alliés » : ils avaient, lors de
l'aventure boulangiste, « lancé la cause
monarchique contre l'opinion des vrais
monarchistes et tâché de se glisser dans
l'autre camp ». Et M. Gohier conclut à
leur égard : « Puisqu'ils sont une bonne
fois sortis de notre camp, laissez-les
dehors et fermez bien la porte. »
Donc, il faut se débarrasser de tous
ceux qui, depuis quinze ans, ont été
considérés comme les chefs du parti
monarchiste, de tous ceux qui ont in-
carné en eux, avec plus ou moins d'au-
torité, l'idée monarchique. « Il faut
choisir entre les millions de citoyens
vivant et pensant qui composent la na-
tion et six douzaines de fossiles. » Les
remplaçants de ces fossiles, il faut les
chercher « dans ces classes moyennes,
réfléchies, qui sont l'élite et la force de
la nation ». Et M. Gohier formule ainsi
sa pensée : « Ou la monarchie ne sera
pas — ce qui est encore bien possible —
ou la monarchie sera laïque, démocra-
tique et fidèle au noble esprit de la Ré-
volution. »
M. Gohier ne se fait sans doute pas
de grandes illusions sur l'accueil qui
attend ses conseils. Le programme qu'il
ébauche dans sa brochure n'est pas nou-
veau. C'est le programme de ceux qui,
en 1830, firent la monarchie constitu-
tionnelle après avoir, dans les journées
de Juillet, mis à la porte la monarchie
légitime parce qu'elle était réaction-
naire et cléricale. C'a été le programme
du gouvernement autour duquel s'é-
taient groupés ceux qui, encore inquiétés
par les souvenirs de la première Répu-
blique, par les désordres du Directoire,
cherchaient dans la forme monarchique
des garanties de stabilité sans renoncer
cependant à l'esprit de la Révolution et
aux idées libérale8, (
Mais depuis vingt ans il s'est pro-
duit entre les libéraux de cette nuance
et le représentant de l'idée monarchique
une rupture de plus en plus profonde.
Le comte de Paris a consacré tous ses
soins à rallier autour de lui tous ces
fossiles, et pour leur donner satisfac-
tion, il a de plus en plus solidarisé la
cause de la monarchie avec celle de
l'Eglise, jusqu'au jour où entre elles
deux une rupture s'est produite, l'Eglise
ayant considéré l'idée monarchique
comme un poids mort qui la gênait
dans ses mouvements et qui éloignait
les électeurs au lieu de les attirer.
Pendant ce temps, tout ce qui avait
quelque libéralisme dans l'esprit s'est
de plus en plus séparé de la monarchie,
trouvant dans la République les garan-
ties que leurs devanciers avaient appré-
hendé de n'y pas rencontrer. Ce n'est
pas ce qu'ils savent de M. le duc d'Or-
léans, de ses dispositions d'esprit, de
son éducation, qui peut les déterminer
à se séparer de la République pour se
convertir à la monarchie.
Ceux qui ont, dans le parti monar-
chique, les sentiments de liberté et de
justice dont s'inspire M. Gohier sont, au
contraire, fatalement destinés, malgré
les sympathies personnelles ou les con-
sidérations qui les ont retenus, à sortir
du camp monarchique et à donner à la
République une adhésion d'autant plus
sincère qu'elle aura été plus réfléchie
et qu'ils auront mieux reconnu l'impos-
sibilité de ramener la monarchie dans
les voies où ils voudraient la diriger.
Peut-être, il y a vingt ans, l'expérience
eût pu être tentée avec quelque succès.
Aujourd'hui, on ne peut que répéter
le mot de Lanlartine : « Il est trop
tard. »
LES INSTITUTEURS
Détachés dans les Établissements d'Assistancé
Un décret du président de la République
vient de décider que les écoles de tous les
établissements d assistance ou de bienfai-
sance seraient soumises au même régime
que toutes les autres écoles publiques.
Si l'établissement constitue un service de
l'Etat, la création dé l'école ne peut être déci-
dée qu'après avis du conseil supérieur de
l'instruction publique. Si l'établissement cons-
titue un service départemental ou communal,
l'école ne peut être créée que sur la demande
du conseil général ou du conseil munici-
pal.
Les instituteurs et institutrices appelés à
exercer dans ces écoles jouiront des mêmes
droits et avantages et seront soumis aux
mêmes règles que les autres instituteurs pu-
blics. Ils continueront à figurer dans leur
cadre d'origine et y conserveront leurs droits
à l'avancement. Les maîtres nourris dans
l'établissement n'auront paa droit à l'indem-
nité de résidence.
Les maîtres actuellement en exercice seront
classés par arrêté ministériel dans le person-
nel primaire du département auquel se ratta-
che l'administration qui a fondé l'école. Ils
ne subiront les retenues pour pensions civiles
que sur les traitements et suppléments de
traitements légaux qui leur seront assignés.
Dans le cas où le montant de ces traitements
et des indemnités accessoires serait inférieur
aux avantages dont ils jouissent, il leur sera
alloué une indemnité complémentaire jus-
qu'à ce que leurs émoluments aient atteint le
chiffre de ceux qui leur sont actuellement at-
tribués.
UN ÈTUDIANT MINISTRE
Un changement de ministère vient de se
produire dans République de l'Uruguay, et
parmi les nouveaux ministres se trouve M.
Jean Castro, étudiant de l'école des ponts et
chaussées, à qui on a confié le portefeuille de
l'instruction publique.
L'étudiant bombardé grand maître de l'Uni-
versité a tenu à régulariser sa situation. Il
s'est présenté récemment pour passer son
examen, afin d'obtenir un diplôme.
Il est probable que les professeurs de la
commission d'examen ne se montreront pas
trop sévères pour un candidat qui peut, comme
celui-ci, nommer et révoquer à son gré ces
professeurs.
BATAILLE
ENTRE
PROTESTANTS ET CATHOLIQUES
(DB NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIBR)
Munich, 19 novembre.
A l'occasion des élections municipales, il y
a eu, dans la commune de Hassloch, une ba-
taille en règle entre protestants et catholi-
ques.
Les paysans des deux camps étaient armés
de fusils ; les catholiques, en signe de rallie-
ment, ont fait sonner le tocsin le soir à huit
heures. Une fusillade très vive s'est engagée
et une lutte acharnée a eu lieu dans les rues.
Les protestants, en minorité, ont été refoulés.
Le combat a duré jusqu'à onze heures du soir,
lorsqu'un fort détachement de troupes est ar-
rivé sur place et a rétabli l'ordre.
Il y a de nombreux blessés et même quel-
ques morts.
LE RHONE MONTE
Pont-Saint-Esprit, 19 novembre.
Le niveau du Rhône, qui se trouvait à zéro il y a
trois jours, est ce matin à l'ètiage de 4 mètres 50
centimètres.
Les quais commencent à être envahis par les
eaux.
Cette crue est causée par l'Isère et l'Ardèche
grossies par les pluies.
MORT DU « PROFESSEUR » BEN FULLER
Londres, 19 novembre.
Un ancien fort de la halle aux poissons, devenu,
pour le public de l'Aquarium de Londres le c pro-
fesseur n Ben Fuller, s'est tué hier en plongeant
du plus haut point du pont de la Tour de Londres
dans la Tamise, soit d'une hauteur de 340 pieds.
Il est revenu un instant à la surface, puis a dis.
Mru tout à coup. Son cadavre n'a pu été n-
CHRONIQUE
Je reçois le rapport du dernier exercice
de l'Association Valentin Haüy pour le
bien des aveugles. C'est une œuvre bien
intéressante et bien touchante, et il est
malaisé de ne pas suivre ses travaux avec
une curiosité émue. Le beau livre de Lu-
cien Descaves, les Emmurés, plein de pi-
tié, mais non de pitié stérile, semble d'ail-
leurs avoir déterminé un courant de sym-
pathie pour la cause des aveugles.
Ceux-ci ont été assez longtemps plaints
uniquement. Ils sont las de cette commi-
sération qui fait d'eux, pour ainsi dire, des
êtres à part, séparés, retranchés de la so-
ciété s'ils restent des humbles, ou des
« phénomènes » si, malgré toutes les diffi-
cultés amoncelées sur leur route, ils attes-
tent dans quelque branche de l'activité
humaine une supériorité. Ils protestent
contre les préjugés qui pèsent toujours sur
eux et ils demandent que, par l'abandon
de ces préjugés, il leur soit permis de prou-
ver qu'ils peuvent jouer un rôle utile.
Assurément, ils se trouvent dans des con-
ditions où ils ont besoin de plus de cou-
rage que d'autres, mais il n'y a, répètent-
ils vaillamment, d'infirmité irrémédiable
que celle qui atteint l'intelligence. Au sens
de la vue qui leur manque, ils suppléent
par une éducation spéciale qui les empê-
che d'être les déshérités complets que
l'on croit trop communément qu'ils sont,
et ils acceptent leur malheur avec une sé-
rénité brave.
Les idées toutes faites que l'on a à leur
égard leur nuisent plus, en fait, que le
malheur lui-même. C'est contre ces idées-
là qu'il faut présentement, sans cesse, es-
sayer de réagir. Ce sont elles qui rendent
encore si difficile l'assistance. Le jour où
l'opinion sera assez avancée pour que, en
présence d'un aveugle, on dise d'abord,
non pas « le pauvre homme 1 » mais « que
sait-il faire? » La question sera résolue.
Dans notre pays généreux, il est étrange,
quand on y pense, qu'on ait créé entre les
aveugles et les clairvoyants des abîmes
plus grands que ceux qu'a creusés la na-
ture. Nous autres, gens d'une race aux
instincts spontanés, hardis, nous avons
les plus routinières préventions, parfois.
Les sourds-muets, qui s'émancipent peu
à peu, n'ont-ils pas été aussi, pendant très
longtemps, tenus pour ainsi dire en suspi-
cion ?
Il y a naturellement nombre d'occupa-
tions" forcément interdites aux aveugles,
mais il y en a beaucoup d'autres, aussi,
où ils peuvent s'occuper très convenable-
ment, aussi bien que des voyants, où ils
peuvent même exceller. Ainsi les aveugles
sont-ils généralement bcns musiciens, en
raison de la délicatesse particulière qu'ac-
quiert chez eux le sens de l'ouïe. Malheu-
reusement, les situations auxquelles ils
ont, très légitimement, le droit de pré-
tendre dans tout ce qui relève de la mu-
sique sont assez restreintes et il y a beau-
coup plus de candidats que d'emplois.
C'est ce qu a très justement indiqué M.
Descaves dans son livre, en demandant à
l'institution nationale du boulevard des
Invalides de ne préparer aux professions
musicales que les sujets tout à fait doués.
Sinon, on s'exposera à créer une sorte de
bohème, composée des aveugles auxquels
une éducation permet certaines préten-
tions et qui ne trouvent pas, cependant,
à gagner leur vie.
Il faudrait faire une plus large part à
l'enseignement de métiers pratiques et
sûrs, fussent-ils moins relevés. Il vaut
mieux être un bon ouvrier qu'un artiste
exposé à tous les hasards. Au reste, le dé-
veloppement de cet enseignement manuel,
donnant de bons résultats, attesterait que
les aveugles sont propres à une foule de
choses, et, parla, les tenaces préjugés se-
raient peu à peu vaincus. A l'institution,
on tient aussi les élèves un peu trop isolés
d'un monde avec lequel il faudrait, au
contraire, qu'ils fussent en perpétuel con-
tact. Ils en sortent instruits, mais ayant
véritablement à faire l'apprentissage de la
vie, à détruire, chacun pour son compte,
les idées courantes, à triompher de ces
surprises blessantes pour eux, qui se ma-
nifestent, plus ou moins discrètement,
quand on les voit adroits, prestes, se ti-
rant d'affaire, en beaucoup de circons-
tances, sans avoir besoin de personne. La
défaveur contre laquelle ils se débattent
encore quand ils cherchent à tirer des
ressources de ce qu'ils ont appris vient,
pour une grande part, de ce qu'ils n'ont
pas été assez mêlés à ceux qui exercent la
même industrie qu'eux. -
Ce sont là des réflexions générales. Il y
a trop de sensiblerie à l'égard des aveu-
gles et pas assez de véritable fraternité. Il
ne s'-agit plus, maintenant, de s'étonner de
ce qu'ils sont capables de faire ; il s'agit,
en abandonnant l'antique routine, de les
essayer, de les mettre à l'œuvre et, s'ils
sont à même d'accomplir les travaux qu'on
leur confie, de les employer dans des con-
ditions d'égalité avec les voyants.
Si les vieilles défiances cessaient — et
elles devraient cesser en présence de la
preuve faite de leur habileté — la Société
pour le bien des aveugles n'aurait pas sur
les bras une aussi lourde tâche, dans
l'œuvre de patronage qu'elle poursuit, en
tentant de mettre une besogne, leur assu-
rant quelque salaire, entre les mains de
ses protégés. C'est une œuvre qui n'est pas
bien riche, surtout, quand on songe à tout
ce qu'elle aurait à faire. Dans le dernier
exercice elle n'a pu dépenser que vingt-
deux mille francs. Et pourtant, avec ces
ressources bornées, elle a fait beaucoup
de choses. Il serait à souhaiter que nos
finances publiques fussent administrées
avec une aussi sage économie.
La Société a à secourir les aveugles pour
lesquels l'existence a été le plus dure, qui,
de refus en refus, leur bonne volonté
n'ayant pu être mise à l'épreuve, ont été
contraints à l'inaction, sont tombés dans
le dénuement absolu. Pour ceux-là, il est
trop tard pour qu'on leur enseigne un mé-
tier vraiment rémunérateur. Il a fallu sln-
génier à leur 4ooaer une occupation fa-
cile. Ah 1 dame, ils ne gagnent pas grand'-
chose ! Mais le grand point, c'était de les
arracher à la déshonorante mendicité, de
montrer qu'on ne doit jamais désespérer.
Aust' l'association a-t-elle fondé un
atelier où des aveugles âgés, débiles, qui
souffrirent le plus de l'infériorité dont on
persista à les taxer, confectionnent des
sacs en papier trouvant un écoulement
relativement facile dans le quartier des
Halles. C'est un travail purement machi-
nal, mais — le fait a surtout, présente-
ment, une importance morale — c'est tou-
jours du travail. Sur le mince budget dont
on dispose, cette fondation a lourdement
pesé, avec quelque prudence que l'on ait
marché. Il y a des détails qui sont un peu
tristes : pendant l'hiver, on n'a pas eu de
quoi faire du feu dans l'atelier. Dame 1
c'était un luxe qu'on ne pouvait se per-
mettre. Est-ce que, cette année, il ne se
trouvera pas quelques personnes géné-
reuses, voulant empêcher que les ouvriers
aveugles de la rue Bailleul aient les doigts
engourdis par le froid? En attendant,
l'œuvre réclame les vieux papiers servant
à fabriquer les sacs. Le papier fait tant de
mal parfois, ou il contient tant de choses
inutiles et vides 1 C'est une façon de se
réhabiliter, pour lui, que de servir à
faire vivre ces pauvres gens.
L'Association Valentin Haüy a créé pour
les femmes-aveugles, pour qui l'assistance
est surtout urgente (que gagnent, hélas 1
les ouvrières qui ont leurs yeux et leurs
bras, et, à plus forte raison, combien la
situation des autres est difficile 1), un ate-
lier de brosserie qui donne d'assez bons
résultats et un autre où on fait du tricot.
Ce sont là des tentatives qui auraient bien
besoin d'être encouragées. Pour le mo-
ment, on est quelquefois forcé d'hésiter
devant les achats, cependant indispen-
sables, de matière première. Le vaillant
conseil d'administration, en regardant
avec un peu d'inquiétude ce qu'il y a en
caisse, trouve notamment que la laine
qu'il faudrait donner à ses ouvrières coûte
cher. Il en faut, pourtant, pour le tri-
cotage.
Malgré les embarras où l'on se trouve
parfois, voici donc des débouchés créés
pour le travail des aveugles, même les
plus malheureux. C'est dire que les au-
tres, ayant une instruction professionnelle
sérieuse, se devraient tirer d'affaire si l'on
avait généralement des idées plus larges.
L'Etat devrait donner l'exemple, à ce qu'il
semble ; il fait pourtant, plus que tout le
monde, la sourds oreille. Ainsi, alors
qu'on démontrait qu'elles pourraient ren-
dre là des services, après un bref appren-
tissage, la manufacture des tabacs, solli-
citée, a-t-elle jusqu'à présent refusé d'ac-
cepter des ouvrières aveugles. Il eût suffi
cependant d'un peu de bonne volonté pour
que ce travail mécanique leur fût accordé,
et l'épreuve aurait été intéressante de
l'emploi des aveugles concurremment avec
les autres.
N'est-ce pas à l'Etat, pourtant, qu'il ap-
partiendrait de commencer la réaction né-
cessaire contre les préjugés qui accablent1
les aveugles ?. Quelle chose singulière 1
il consent à d'assez sérieux sacrifices pour
les élever, pour les mener jusqu'à l'âge
adulte. Puis, alors, il les abandonne brus-
quement, et il se donne un étrange dé-
menti à lui-même en se montrant encore
plus routinier que les particuliers !
Paul Ginisty.
Pour déguster le délicieux vin des Papes,
écrire au propriétaire des Fines-Roches, M.
Henri Constantin, à Châteauneuf-du-Pape
(Vaucluse).
LE MARIAGE DE NICOLAS Il
Saint-Pétersbourg, 19 novembre.
Demain, toute la cour, les princes et les
missions étrangères assisteront au service
funèbre du vingtième jour dans l'église de la
forteresse.
Le mariage de l'empereur et de la princesse
Alexandra sera probablement annoncé mer-
credi pour une date très rapprochée. Mainte-
nant que les obsèques ont eu lieu, il n'existe
plus aucune question de convenance. Le ma-
riage aura lieu vraisemblablement lundi.
Un grand cortège composé de carrosses de
gala conduira la fiancée depuis le palais du
grand-duc Serge jusqu'au Palais-d'Hiver,dans
la chapelle duquel se célébrera le mariage en
présence seulement de la famille impériale et
des princes parents. Ainsi l'archiduc d'Au-
triche repartira demain et les missions extra-
ordinaires repartiront aussi avant le mariage.
Les ambassadeurs n'y assisteront pas non
plus. 1 d't 1 t .¡Ob'
Si, comme on le dit, le mariage est célébré
lundi, la cérémonie aura lieu le matin, car le
carême commence lundi à deux heures et la
cérémonie devra être terminée avant.
Le deuil sera suspendu le jour du mariage.
La cérémonie sera suivie d'un dîner de fa-
mille.
L'empereur et la nouvelle impératrice habi-
teront le Palais-d'Hiver quand ils seront à
Saint-Pétersbourg. On dit qu'après leur ma-
riage ils iront habiter Tsarskoë-Selo pendant
quelque temps.
L'impératrice douairière, à laquelle vont les
sympathies du monde entier, se rendra, dit-
on, aussitôt après le mariage, auprès du
grand-duc Georges.
L'EMPEREUR ET SES MINISTRES
Francfort, 19 novembre.
On mande de Saint-Pétersbourg à la Ga-
zelle de Francfort que M. de Giers, ministre
des affaires étrangères, et le général Van-
novski, ministre de la guerre, ont donné leur
démission.
On ajoute que l'empereur a répondu au gé-
néral Vannoski que c'était trop tôt ; mais
on ne sait pas la réponse qu'il a faH à
M. de Giera.
LES OBSÈQUES DE M. MAGNARD
Nous avons dit que les obsèques de M. Fran-
cis Magnard auraient lieu aujourd'hui, à midi,
àNotre-Dame-de-Lorette. L'inhumation se fera
au cimetière de Passy. Des discours seront
prononcés par MM. François Coppée, ami de
la famille; Mézières, député, membre de l'A-
cadémie française, président de l'Association
des journalistes parisiens, au nom de la
presse; Claretie, au nom des anciens colla-
borateurs du Figaro; de* Rodays, au nom du
Figaro.
LES OBSÈQUES DU TSAR
LA DERNIÈRE CÉRÉMONIE
A la cathédrale des Saints Pierre et Paul.
Une grandiose manifestation.
Saint-Pétersbourg, 19 novembre.
Le brouillard couvre la ville comme un
manteau de deuil.
La foule qui s'est massée sur les quais de
la Néva, en face de la forteresse, ne peut rien
apercevoir; néanmoins elle augmente cons-
tamment.
Pendant que la cérémonie commence à l'in-
térieur de l'eglise, les troupes de la garde et
les élèves des écoles militaires viennent s'é-
tablir sur les quais depuis le pont Nicolas
jusqu'au pont Alexandre.
Dès les premières heures, des voitures par-
tent de tous les points de la ville, allant dans
la direction de la Néva. Une foule énorme
garnit le parcours que doit suivre la famille
impériale pour se rendre à la cathédrale.
Les correspondants de journaux ayant ob-
tenu l'autorisation d'assister à la cérémonie
sont partis du ministère de la cour à huit
heures et demie, sous la conduite de M. Ces-
lovine, attaché à ce ministère et qui est
chargé de veiller à ce que toutes les facilités
possibles leur soient accordées.
M. Ceslovine accomplit sa mission avec
une courtoisie et un tact parfaits dont nous
lui sommes tous reconnaissants. Il nous a
conduits à l'église de la forteresse où nous
sommes arrivés à neuf heures. Plusieurs
d'entre les correspondants ont pu entrer à la
sacristie où le P. Jean s'est entretenu avec
eux, les a bénis et les a embrasses.
LES COURONNES
L'église contenait encore peu de monde ; on
procédait aux derniers préparatifs et l'on ar-
rangeait tout pour que le cercueil pût être
fermé de suite. L'église contient une quantité
innombrable de couronnes qui sont très artis-
tement réparties : une masse énorme en en-
toure le catafalque, les piliers en sont revê-
tus ; elles tapissent les murs, formant de gra-
cieux dessins ; elles envahissent les tombeaux
des anciens tsars et sont déposées de tous les
côtés dans l'église.
On remarque beaucoup celles du président
de la République française, des ministres,
du général de Boisdeffre, chef de la mission
française, des membres de la mission fran-
çaise, de 'la presse parisienne, de l'Ecole
militaire de Saint-Cyr, de l'Association des
dames françaises, celles de la colonie fran-
çaise de Saint-Pétersbourg surmontée d'une
couronne impériale en immortelles et des diffé-
rentes villes de France ; parmi les autres cou-
ronnes, à signaler celles de la reine d'Angle-
terre, du roi d'Italie, du roi des Belges, de la
reine de Hollande, du roi de Danemark, du
duc d'Orléans, en lilas blancs et mauves et
orchidées et portant comme inscription: « Le
duc d'Orléans » ; du prince de Galles, etc.
L'église se remplit d'officiers, tous en grand
uniforme et portant le deuil à l'épée et à
l'épaulette. Les officiers étrangers arrivent en
grand nombre et portent également le deuil.
Seuls, les correspondants de journaux sont
en habit noir.
Deux hérauts d'armes se tiennent à la porte
de la cathédrale des Saints Pierre-et-Paul.
LA CÉRÉMONIE
A 10 heures et demie, trois coups de canon
tirés à la forteresse annoncent le commence-
ment de la cérémonie.
Quand tous.les fonctionnaires, les missions
étrangères, les officiers de la cour, les dépu-
tations sont arrivés, le cortège impérial fait
son entrée.
Il est reçu par Mgr Palladius, métropolite
de Saint-Pétersbourg, par les membres du
saint-synode, avec la croix et l'eau bénite.
L'ordre du cortège est celui indiqué par le
cérémonial officiel :
L'empereur, conduisant l'impératrice, la
famille impériale, les souverains, le roi de
Danemark, le roi et la reine de Grèce, le roi
de Serbie, le grand-duc régnant de Hesse ; les
princes étrangers viennent ensuite : le duc et
la duchesse de Cobourg, le prince de Monté-
négro, le prince et la princesse de Galles, le
prince de Naples, l'archiduc Charles-Louis,
le prince héréditaire de Roumanie, le grand-
duc héréditaire d'Oldenbourg, le grand-duc
héréditaire de Luxembourg, le duc d'York, le
prince Valdemar de Danemark, le prince
Georges de Grèce, le prince et la princesse
Henri de Prusse, le duc Jean-Albert de Mec-
klembourg-Schwerin, le prince Guillaume de
Bade, la princesse Vera de Wurtemberg, le
duc Albert de Wurtemberg, le prince Frédé-
ric-Auguste de Saxe, le prince Albert de Saxe,
le prince de Saxe-Altenbourg.
La famille impériale, les souverains et les
princes prennent place à gauche du cata-
falque.
Le corps diplomatique, les représentants
des souverains et des gouvernements étran-
gers, les députations prennent place à droite.
Avant l'arrivée du cortège impérial, le clergé
récito les psaumes.
Dès que le cortège est arrivé, commence le
service funèbre, accompagné de chants exé-
cutés par les chœurs et les chantres de la cour.
Cette musique simple et grandiose produit
une impression profonde.
Quand le seivice est terminé, les officiers
qui montaient la garde auprès du catafalque
se retirent, faisant place au clergé qui entoure
le cercueil. - -
Une nouvelle cérémonie a lieu. Tous les
assistants reçoivent des cierges allumés.
Le métropolite place sur la tête de l'empe-
reur mort un riche bandeau de soie orné des
saintes images, suivant la coutume russe. Les
familles pauvres elles-mêmes, en effet,placent
sur le front de leurs morts ces bandeaux, si
modestes qu'ils soient ; quelquefois même ils
sont simplement en papier.
Puis le métropolite met entre les mains du
tsar défunt un document contenant des in-
dulgences.
Quand cette cérémonie est terminée, l'em-
pereur s'avance le premier, puis viennent
l'impératrice, la familla impériale, les rois,
les princes, afin de donner le dernier adieu
au défunt, en lui baisant la main et le vi.
sage.
Cette scène silencieuse et solennelle produit
une impression poignante Les assistants ne
peuvent retenir leurs larmes.
Puis l'empereur place le manteau impérial
dans le cercueil Huit généraux apportent ie
couvercle, qui est acellé.
LA FIN
Le cercueil est enlevé par l'empereur, les
membres de la famille impériale. les princes
étrangers, les ministres de la cour, les aides
de camp, les généraux et les hauts fonction-
naires de la cour.
Le funèbre cortège, précédé du métropolite
et de son clergé, se dirige lentement vers le
tombeau.
Le cercueil est déposé au bord de la tombe,
autour de laquelle la famille impériale s'est
agenouillée.
Pendant le transfert du cercueil, le canon
de la forteresse tonne à intervalles réguliers,
comme un glas. On l'entend de l'intérieur de
l'église.
Les prières suprêmes sont dites devant 1*
tombe. A ce moment l'impératrice, qui jus-
que-là a fait preuve d'un courage surhumain,
ne peut plus résister à son immense douleui
et fond en larmes.
L'empereur et tous les membres de la famille
impériale ont les yeux mouillés de larmes.
C'est une scène navrante indescriptible
d'angoisse et de douleur.
Quand tout est fini, les grenadiers du palais
et des sergents-majors de tous les régiments
dont Alexandre III était le chef descendent
le cercueil dans la tombe.
L'empereur, l'impératrice, la famille impé.
riale, les rois, les princes, se retirent, suivis
des grands dignitaires.
A ce moment, les nombreux assistants qui
restent dans l'église se précipitent vers la
tombe, dont les parois sont tapissées de
fleurs. Chacun en demande une, afin de la
garder en souvenir du tsar Alexandre.
On les distribue à la foule.
Tous ceux qui peuvent approcher jettent
une pelletée de terre sur la tombe.
Tout est fini. La foule, silencieuse et morne,
s'écoule lentement.
Cependant l'empereur est sorti de l'église.
Sur son passage, les troupes massées dans
la forteresse présentent les armes, pendant
que les musiques jouent le Boje Tsara
Krani.
LES FLEURS DU SOUVENIR
Pétersbourg, 19 novembre.
Les fleurs du Souvenir seront distribuées
demain à l'asile français aux personnes qui
se présenteront.
Mille seront envoyées à Moscou. Une Gen..
taine ont été distribuées à la presse russe.
L'ambassadrice a accepté gracieusement
d'en distribuer deux cents.
Cinq mille seulement ont été reçues de Pa-
ris. On en annonce un nouvel et prochain
envoi sur lequel mille autres seront envoyées
à Moscou Ces fleurs sont très demandées de
tous côtés.
De nombreuses villes de France ont en-
voyé des couronnes : le Havre, Toulon, Lyon,
Arras, Toulouse, etc. Cette dernière ville a
même envoyé un délégué spécial, M. Labit.
A PARIS
La cérémonie à l'église russe
La brume intense qui enveloppait Parli
hier matin n'avait pas empêché la population
de se porter en masse assez considérable aux
abords de l'église russe.
Dès huit heures, la foule encombre les rues
Daru, Pierrele-Grnd, de la Néva; elle de<
vient bientôt si compacte, que toutes les voies
donnant accès à la chapelle sont barrées, et
les curieux qui espéraient pouvoir y station-
ner sont obligés de se réfugier dans la rue da
Courcelles et dans l'avenue Hoche. A dix heu.
res, la circulation des voitures est interdite
dans un périmètre assez étendu, les omnibus
eux-mêmes changent leur itinéraire.
Les troupes, sous les ordres du général Ma-
delor, commandant la5e division d'infanterie,
se massent le long des trottoirs. Seule la com-
pagnie de fuiiliers marins venus de Lorient et
une compagnie du 29e chasseurs se tiennent
dans la cour de l'église dont le perron est
garni d'une double haie de cavaliers de la
garde républicaine en grande tenue. La mu-
sique de la garde républicaine est massée à
l'extrémité de la rue Pierre-le-Grand, en face
de la grille.
Sur le terre-plein de l'Etoile, deux piècell
d'artillerie sont en batterie pour la salve ré-
glementaire de cent un coups de canon qui
se succéderont tout à l'heure de minute eq
minute.
Dans toutes ces rues les réverbères allumés
sont voilés de crêpe ; un grand nombre de
fenêtres sont pavoisées aux couleurs russes et
françaises.
Le silence n'est même troublé que parles
cris des camelots offrant le Dernier souvenir
franco-russe : une lithographie représentant
les drapeaux français et russe entrecroisés.
surmontés des portraits des deux chefs d'Etat
défunts et d'une pensée ; d'autres vendent
la photographie d'Alexandre III.
Dans l'église
La décoration de l'église est très simple ;
une immense draperie noire, rehaussée de
deux écussons aux couleurs impériales garnis
de franges d'argent, couvre la façade, ne lais.
sant apercevoir que les clochetons dorés. A
l'intérieur, aucune fleur, aucune draperie,
suivant le rite du culte orthodoxe.
Les prières des morts ont commencé à huit
heures et demie, en présence des membres de
l'ambassade et d'une grande partie de la colo.
nie russe, dont beaucoup de dames, presque
toutes en costume de deuil. Les prêtres sont
cachés derrière l'iconostase. Leur psalmodie
parvient en sons assourdis par la grille d'oi
qui sépare le sanctuaire de la nef réservée
aux fidèles et alterne avec les répons chantés
par les choristes ordinaires de la chapelle ;
l'effet est d'un lugubre que n'atteint aucune
des cérémonies funèbres de l'Eglise catho-
lique.
A mesure que l'heure s'avance, la petite
église se remplit; il n'est bientôt plus de
place pour faire les génuflexions. Les membre,
du corps diplomatique et les délégués offi-
ciels se glissent dans la foule, qui semble
sortir de son recueillement pour regarder les
nouveaux arrivants. Le frac écarlate de lord
Dufferin, l'uniforme blanc du ministre du
Japon, précédant de quelques pas les deux
représentants de la Chine vêtus de magni-
fiques robes de soie à boutons de cristal, sont
surtout remarqués. p
Les uns après les autres, les ministres, con..
duits par M. Mollard et reçus par M. Nicolas
de Giers, chargé d'affaires de Russie, vont
occuper les places qui leur sont destinées.
Tous les membres du gouvernement sont pré.
sents à la cérémonie : le président du conseil,
M. Charles Dupuy, avec son chef de cabinet;
M. Hanotaux, ministre des affaires étran.
gères ; le général Mercier, accompagné des
généraux directeurs du ministère et -de sec
officiers d'ordonnance ;
M. Félix Faure, ministre de la marine, suivi
des amiraux Duperré, Rieunier et Vignes, du
général de division Bégin, du capitaine dt
vaisseau Richard, chef du cabinet militaire ;
M Viger, ministre de l'agriculture ; M. Poin.
caré, ministre des finances; M. Barthou, mi.
nistre des travaux publics ; M. Lourties, mi.
nistre du commerce; M. Delcassé, ministre
des colonies ; M. Leygues, ministre de l'ins-
truction publique.
Derrière eux avaient pris place les députa.
tions de l'armée de terre et de mer, les géné-
raux Billot, Coiffé, Jamont, Caillot, d'Es-
peuilles. Cramezel de Kérué, et le vice-amiral
Human, chef de l'état-major général de la
marine.
Les membres du bureau du Sénat et de li
Chambre arrivent dans lesvoitures officielles,
précédés d'un peloton de dragons armés de
a lance.
Ils prennent place immédiatenit nt dénigre
le siège du président de la République;le
délégations sont composées de M. Ghalleu û
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
- Auteurs similaires Chadeuil Gustave Chadeuil Gustave /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Chadeuil Gustave" or dc.contributor adj "Chadeuil Gustave")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7562574x/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7562574x/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7562574x/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7562574x/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7562574x
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7562574x
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7562574x/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest