Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1894-11-20
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 20 novembre 1894 20 novembre 1894
Description : 1894/11/20 (A24,N8345). 1894/11/20 (A24,N8345).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/04/2013
1 VINGT-QUATRIÈME ANNÉE. - N', 8,344 LE NTTB&RO QBQ CBTOHES
HARDI 20 NOVEMBRB 1894
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B42, Rue Montmartre
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LES FUNERAILLES
Après la traversée suprême de rem.
pire au milieu du deuil d'un peuple
immense, Alexandre III va, tout à
l'heure, prendre sa place dans le mau-
solée. de l'église des Saints Pierre et
Paul, à côté de ses prédécesseurs et des
fondateurs de la dynastie des Romanof.
Pendant que se déroulera sur les bords
de la Neva le cortège officiel dans le-
quel toutes les puissances auront des
représentants, d'autres cérémonies au-
ront lieu en France qui n'auront leurs
semblables nulle part, et la journée qui
s'ouvre sera pour nous, comme pour la
nation russe, une journée de deuil.
Sans tomber dans les exagérations
théâtrales, sans qu'une parole que l'on
puisse regretter comme déplacée ou
JCOmme manquant de dignité, ait été
dite, la France a montré dans ces
circonstances douloureuses qu'elle me-
surait à sa juste valeur la perte qu'elle
vient de faire, et elle a donné à l'expres-
sion de ses sentiments la forme la plus
sympatique comme la plus correcte. La
journée d'aujourd'hui ne sera pas la
moins éloquente des manifestations qui
se sont produites depuis huit jours. La
présence du chef de l'Etat, des membres
du gouvernement et des représentants
des pouvoirs publics à la cérémonie de
la rue Daru est déjà un témoignage
d'amitié qui dépasse les règles ordi-
naires du protocole. Mais la participa-
tion de l'armée à cette cérémonie lui
donne un caractère particulier. Elle res-
serre encore le lien qui unissait le dra-
peau tricolore à l'étendard moscovite.
C'est une heureuse idée d'avoir as-
socié dans cette manifestation les troupes
de la marine à l'armée de terre autre-
ment que par la mise en berne des
pavillons des navires et d'avoir fait ve-
nir à Paris un détachement de fusi-
liers marins. La marine a eu, dans le
rapprochement des deux peuples, qui
a été l'acte politique le plus important
.: de ces dernières années, une part pré-
pondérante. C'est elle qui a reçu à
Cronstadt et à Saint-Pétersbourg les
ovations de la nation russe ; c'est à la
marine russe que la France faisait, il
n'y a guère plus d'un an, cette récep-
tion enthousiaste dont le souvenir est
encore dans tous les esprits. Comme
elle a eu sa part des fêtes, comme elle a
été le trait d'union des amitiés nais-
santes, il est juste qu'elle ait sa place
marquée aux jours de deuil.
Mais, à côté de ces manifestations of-
ficielles, il s'en est produit et il s'en
produit d'autres qui montrent bien que
les sympathies ne sont pas seulement
entre les gouvernements et que la na-
tion s'associe aux pouvoirs publics, que
c'est avec une réelle douleur qu'elle a
vu disparaître l'un des auteurs de l'en-
tente internationale si peu de temps
après que l'autre avait péri sous le cou-
teau d'un assassin.
L'énorme quantité de couronnes en-
voyées à Saint-Pétersbourg par les mu-
nicipalités, par les associations de, tout
genre, par de simples particuliers, le
nombre considérable de dépêches de
condoléance échangées entre les deux
pays, les témoignages d'amitié dont les
esprits se sont ingéniés à multiplier la
nature, tout cela montre bien à quel
point la nation a ressenti la douleur de
la mort d'Alexandre III et est la marque
d'une amitié qui dépasse les bornes or-
dinaires des amitiés politiques entre
gouvernements.
C'est, croyons-nous, un fait sans
exemple dans l'histoire, que celui de
deux peuples et de deux gouvernements,
séparés l'un de l'autre par tant de rai-
sons, par la distance géographique
comme par la différence des institu-
tions, des mœurs, du génie national, de
la langue, et surmontant tant d'obstacles
accumulés pour se jeter par la pensée
dans les bras l'an de l'autre, pour s'unir
dans la joie et resserrer dans la douleur
leurs liens d'amitié.
Ils l'ont fait spontanément, ratifiant
avec un élan admirable les accords poli-
tiques sans que l'un des deux prît à un
moment quelconque une attitude pro-
tectrice, sans que l'autre s'humiliât ou
parût solliciter une protection. Ils l'ont
fait dans un sentiment d'estime réci-
proque et avec la conscience d'une égale
dignité. Rien ne s'est glissé dans ces
manifestations d'amitié, dans cette ré-
conciliation de peuples qui ont pu se
trouver jadis en lutte, mais qui avaient
dès ces époques lointaines conservé
l'un de l'autre un souvenir de loyauté et
d'estime, qui puisse, dans l'avenir, être
un germe de rancune ou ralentir les
sympathies.
Républicains, nous nous inclinons
une dernière fois devant le cercueil im-
périal et nous saluons l'aurore du DOU-
veau règne avec la confiance que l'ave-
nir ne fera que cimenter indissoluble-
ment une union dont les débuts ont été
en si peu de temps tour à tour si joyeux,
si émouvants et si tragiques.
M. FRANCIS MAGNARD
La journée d'hier a été marquée par un
triste événement parisien : la mort de M.
Francis Magnard, rédacteur en chef du
journal le Figaro.
M. Magnard s'était fait une célébrité avec
son filet politique quotidien. Sur le boule-
vard on avait fini par appeler ses filets des
« Magnard ». Il y jugeait les hommes et
les choses en sceptique parfois maussade,
mais spirituel et lettré. Il a été beaucoup
imité, mais on ne l'a ni surpassé ni égalé
dans le genre qu'il avait créé et dont il
avait la spécialité.
Le rôle politique de M. Magnard a aussi
son originalité et mérite d'être signalé.
Rédacteur en chef d'un journal mondain,
royaliste et conservateur, il a été pour le
parti royaliste et conservateur un actif
ferment de dissolution. Personne moins
que lui n'a eu la foi dans le succès du parti
dont le Figaro était autrefois l'organe et
jamais il n'a perdu l'occasion de blaguer
doucement ceux qui l'avaient.
La politique de ralliement, prêchée
d'abord par M. Etienne Lamy qui la prêche
encore, puis par M. Raoul-Duval, ensuite
par M. Piou, et adoptée enfin par l'immense
majorité des conservateurs, a toujours été
la sienne. C'était un rallié avant la lettre.
Il a la malechance de mourir juste au mo-
ment où les idées qu'il a si longtemps dé-
fendues sont devenues tout à fait à la
mode.
M. Francis Magnard enfin était person-
nellement, pour ses adversaires politiques,
un confrère aimable et toujours courtois,
dont la disparition fera dans nos rangs un
vide d'autant plus sensible qu'il était, dans
toute l'acception du mot, un vrai journa-
liste.
A.-E. P.
ÉLECTIONS A SAliT-DENIS
Démission des conseillers élus
Les électeurs de la commune de St-Denis
étaient convoqués hier à l'effet d'élire dix
conseillers municipaux en remplacement de
MM. Quintainne, Adam, H. Leroy, Thivet-
Anctin, Coutanceau, Remy, Aubigant, Jovi-
net, Portai, Faulcon, démissionnaires.
neCt, 'était la troisième fois que ces dix conseil-
lers, déjà élus deux fois précédemment sur
un programme de dissolution, se présentaient
aux suffrages des habitants de Saint-Denis.
Trois listes se trouvaient en présence : la
liste socialiste révolutionnaire, la liste répu-
blicaine indépendante et la liste de l'union
des groupes républicains socialistes. C'est
cette dernière qui l'a emporté.
Voici le nombre des voix obtenues par cha-
cune des listes en présence :
Union des groupes républicains socialistes.
MM. Quintainne 4,006, Adam 3,985, Henri Le-
roy 3,944, Thivet-Anctin 3,987, Coutanceau
3.976, Remy 3,978, Aubigant 3.978, Jovinet
3,959, Portal 3,942, Faulcon 3,96i.
Liste socialiste révolutionnaire :
MM. Gambier 3,205, Devillers 3,055, Blan-
chot 3,189, Julien 3,183, Hersant 3,156, Per-
rot 3,169, Jehannin 3,170, Robert 2,953, Mis-
sonnier 3,177, Girousse 2,923.
Liste républicaine indépendante :
MM. Debeaupuis 214, Wolff 239, Josse 239,
V. Prouvier 240, Dumas 237, Louis Leroy 243,
Masson 237, Beaudard 236, Gerbois 239, Vi-
daux, 245.
Les conseillers municipaux réélus pour la
troisième fois ont, aussitôt qu'ils ont su le
résultat des élections, envoye pour la troi-
sième fois leur démission au préfet de la
Seine. Voici le texte de la lettre :
Monsieur le préfet de la Seine,
Nous soussignés, conseillers municipaux de la
ville de Saint-Denis, élus pour la troisième fois
sur un programme de dissolution, avec une majo-
rité de 7 à 800 voix sur nos adversaires, avons
l'honneur de vous adresser notre démission de
conseillers municipaux de la ville de Saint-Denis.
Nous vous prions d'agréer, monsieur le préfet,
etc., etc.
--MT Signé : GUINTAINNE, ADAM, H. LEROY,
THIVET-ANCTIN, COUTANCEAU, AUBI-
GANT, REMY, JOVINET, PORTAL,
FAULCON.
ENFANT ABANDONNE EN CHEMIN DE FER
Versailles, 18 novembre.
Une mystérieuse découverte a été faite hier soir
à la gare rive droite, à l'arrivée du train de
10 h. 20.
Un conducteur du train a trouvé sur l'impériale
d'un wagon un jeune enfant âgé d'environ trois
semaines, entouré de langes sur lesquels était épin-
gle le billet suivant: « Si j'abandonne ce pauvre
petit enfant, c'est poussée par la misère. Ayez
pitié de lui. »
Une information est commencée.
ACCIDENTS MORTELS AUX COURSES
(DE NOTRE CORRESPONDANTPÀRTICULIER)
Bordeaux, 18 novembre.
Un épouvantable accident s'est produit cette
après-midi aux courses de steeple-chase du
Bouscat.
Dans le prix de la Ville de Bordeaux, deux
jockeys justement appréciés du monde spor-
tif, Bordenave et Lightfoot, ont fait une chute
terrible en sautant une haie.
On les transporta immédiatement à l'am-
bulance installée sur la pelouse, où Borde-
nave rendit quelques instants après le der-
nier soupir sans avoir pu reprendre connais-
sance.
Quant à Lightfoot, il a été transporté mou-
rant à l'hôpital Saint-André dans une voiture
des ambulances urbaines : il a une plaie con-
tuse qui a déterminé une commotion céré-
brale et une paralysie du côté droit. Son état
est absolument désespéré.
Inutile de dire quelle émotion ce triste évé-
ment a jetée dans la foule qui assistait aux
courses. La Société des steeplchases a ouvert
une souscription au profit des familles des
deux jockeys. Bordedave, qui était âgé de 40
ans, laisse, en effet, une femme et un enfant,
et Lightfoot, qui a dix ans de moins, est père
de quatre enfants.
ABDUL-HAMID ET GUILLAUME
Gouatantiaople, 18 novembre.
Le sultan enverra a 1 empereur Quillaumo II
trois sabres d'honneur enrichit de pierreries ; ua
$9
LEancation à FEcote Drimairo
CHEZ M. CLAIRIN
La proposition Clairin-Bompard-Baudin.—
Instruction et éducation. — Toujours
la paperasserie administrative.
— Réformes à faire.
Depuis quelques jours, on parle dans le
monde qui s'occupe d'instruction publique
et d'éducation nationale d'une proposition
qui doit être incessamment soumise au con-
seil municipal par MM. Clairin, Bompard et
Baudin. Plusieurs de nos confrères en ont
même parlé sans qu'il ressortit de leurs ex-
plications une idée nette du but auquel ten-
dent les auteurs du projet. Dans ces condi-
tions, nous nous sommes décidés à aller en
causer avec M. Clairin. Sa réponse a été ca-
tégorique :
- Mais amis et moi, nous a dit l'honorable
conseiller du quartier des Batignolles, nous
pensons que le vœu du législateur de 1882
n'est pas rempli. La loi sur l'instruction obli-
gatoire, laïque et gratuite a entendu créer des
établissements où l'on formerait des hommes
pour l'avenir. Certes, au point de vue de
l'instruction, nous n'avons pas trop à nous
plaindre; mais au point de vue de l'éduca-
tion, ce sont de simples garderies d'enfants,
et les éternels adversaires de la République
et du progrès s'en servent pour accuser
la loi elle-même et essayer de la battre en
brèche.
— Cependant, avons-nous répondu, il nous
semble que, depuis douze ans, le» -ascriôce»
faits par la nation ont été considérables.
— Certainement, ils l'ont été, et ce sera une
des gloires de notre temps, croyez-le bien.
Mais les choses qui intéressent cette question
délicate de l'école primaire ne s'improvisent
pas. Voilà douze ans que la loi est édictée, et
l'effort qu'elle exigeait était si considérable à
Paris que nous n'avons pas encore le nombre
d'écoles nécessaires pour recevoir la popula-
tion enfantine; les quarante millions d'em-
prunt qui vont être dépensés de ce chef, sur
le rapport très étudié et très bien compris de
notre collègue M. Blondel, ne suffiront même
pas encore pour satisfaire à tous les besoins.
En un mot, on s'est préoccupé jusqu'à pré-
sent de créer des écoles et 1 on a bien fait.
MM. Baudin, Bompard et moi-même nous
pensons cependant qu'il faut commencer à
les outiller pour leur véritable mission, qui
est de faire de l'éducation morale et de l'en-
seignement civique.
— Elles ne le sont donc pas ?
— Hélas non 1 La machine administrative
est si compliquée chez nous qu'elle absorbe
les forces de tous les rouages en les détour-
nant de leur véritable fonction. Vous ver-
rez dans la proposition que nous faisons au
conseil la liste, très incomplète d'ailleurs, des
écritures auxquelles doit se livrer un direc-
teur d'école et des nombreuses inspections et
sous-inspections auxquelles il est soumis, et
vous vous demanderez comme moi s'il est
possible dans ces conditions à un directeur
ou à une directrice de remplir exactement
ses premiers devoirs, de s'occuper des en-
fants, de les connaître même chacun d'eux
en particulier, ce qui est indispensable pour
les diriger.
LES PROGRAMMES
— Cependant les programmes font une
part à cet enseignement moral et civique ?
— Certainement : ces programmes contien-
nent tout ce qu'il faut, ils sont même trop
chargés, et comme l'enseignement dont nous
nous occupons n'a aucune sanction à l'exa-
men du certificat d'études, les maîtres, dont
le guide véritable, le directeur de l'école, est
perpétuellement occupé, soit à écrivasser des
documents administratifs, soit à répondre aux
inspecteurs ou aux contrôleurs du matériel,
s'occupent surtout d'enseigner aux enfants
les matières de l'examen. Dans nos écoles,
c'est à qui aura le plus d'élèves reçus au
certificat. C'est là une émulation utile, sans
doute ; mais elle est bien secondaire, vous l'a-
vouerez, étant donné le but à atteindre. Encore
une fois, il ne s'agit pas de faire des lettrés
ou des mandarins de la dernière catégorie :
il s'agit de faire des hommes et des citoyens.
La proposition que mes collègues Baudin
et Bompard ont signée avec moi tend à re-
mettre chaque chose en sa place et à confier
au directeur ou à la directrice le soin de faire
dans les classes de son école, de l'élémentaire
au cours supérieur, l'enseignement moral et
civique; et on les déchargerait de toute la
paperasserie administrative, en leur adjoi-
gnant une suppléante à poste fixe dans les
écoles de filles et un élève aspirant à l'école
normale dans les écoles de garçons.
TROP DE CANDIDATES
Ce système aura un double avantage. Pour
les écoles de filles, les suppléantes seront
choisies au concours et nous en terminerons
ainsi avec les demandes de toutes ces jeunes
personnes (il y en a 8,500 à l'heure actuelle)
qui, munies d'un brevet soit supérieur, soit
élémentaire, viennent demander d'abord des
suppléances dans les écoles, puis une place
dans les écoles de la banlieue, puis une titu-
larisation à Paris. Sur 8.500, 150 à 200 re-
çoiveut satisfaction après avoir mis en
œuvre toutes les influences ; les autres atten-
dent un an, deux ans, quelquefois dix ans,
que leur tour arrive, et ce tour ne vient
jamais.
Ajoutez à cela que ces jeunes personnes, si
estimables soient-elles, n'ont pas voulu, n'ont
pas osé ou n'ont pas réussi à passer par l'é-
cole normale. Elles arrivent au même but que
les normaliennes, quelquefois dans un délai
moins grand, mais la plupart du temps sans
la préparation nécessaire pour remplir utile-
ment leur mission. De là des non-valeurs qui
se glissent dans le corps enseignant, qui en-
travent la carrière de sujets distingués et
amènent des découragements. Il faut on finir
avec cette situation, tant au point de vue gé-
néral de l'utilité sociale qu'à celui, qui nous
intéresse particulièrement, de la sélection de
notre personnel enseignant.
— J'ai bien entendu que cette partie de vo-
tre projet concerne les écoles de filles, mais
les ecoles de garçons ?
— La situation n'est pas la même ; ici nous
manquons de personnel. Notre école normale
d'Auteuil se recrute difficilement et il ne se
présente guère d'hommes capables ou dignes
de remplir même le rôle de suppléant dans
nos écoles. C'est ce personnel qu'il faut for-
mer avec des élèves aspirants à l'école nor-
male. Ces derniers prépareront leurs examens
et feront l'office de secrétaires du directeur,
moyennant une légère rétribution annuelle.
LA JOIE DES PARENTS
Mais le grand avantage que mes collègues
et moi avons vu dans cette institution, en
dehors de la liberté d'esprit que nous rendons
aux directeurs et directrices, c'est de permet-
tre aux parents de laisser leurs enfants à l'é-
cole de sept heures et demie du matin à sept
heures du soir. L'école ouvre à huit heures et
convoie les enfants à quatre heures. Que vou-
igz-Yvud e deviennent ces petits etrw pen-
dant le reste du temps, lorsque les parents
sont au travail ? Ils restent dans la rue ;
quelquefois ils y contractent de désastreuses
habitudes, ils perdent les bienfaits de l'école,
et nous les retrouvons à l'âge de seize ans,
non pas à l'atelier ou à l'école primaire supé-
rieure, mais sur les boulevards extérieurs ou
en police correctionnelle.
— N'est-ce pas une bien lourde charge que
vous demandez au budget de la ville ?
— Certes on ne peut réformer, c'eEt-à-dire
faire mieux, sans dépenser de l'argent. C'est
une augmentation de 280,000 fr. pour le bud-
get scolaire, mais je pense que l'administra-
tion pourra trouver des économies d'un autre
côté pour pallier en grande partie à la dépense.
Mais ne pourrait-elle le faire, que nous de-
manderions quand même au conseil de voter
le projet à cause des avantages moraux et
matériels qu'il présente. L'enseignement pri-
maire à Paris présente des difficultés énor-
mes : il faut savoir les envisager en face si
on veut les vaincre. Dans un village, l'insti-
tuteur a peut-être plus de peines matérielles,
mais il connaît tous les enfants, tous les pa-
rents, et combien son rôle d'éducateur se
trouve ainsi simplifié 1
Il faudrait qu'à Paris nous pussions arri-
ver au même résultat. Il était impossible au
directeur seul d'y arriver. Voilà pourquoi à
l'intérieur de l'école nous voulons lui donner
l'aide nécessaire. A l'extérieur, c'est-à-dire
auprès des familles, il faudra l'aider aussi par
les délégations cantonales.
Mais c'est là, pour ainsi dire, la seconde
partie de notre projet, plus difficile que la
première. Le conseil départemental, le conseil
supérieur de l'instruction publique et le mi-
nistre lui-même devront nous faciliter la
tàche. Si vous voulez bien, nous en reparle-
rons plus tard. »
Sur ces mots, nous avons quitté notre in-
terlocuteur, souhaitant qu'il réussisse pour le
bien des enfants du peuple et l'avenir de la
République.
MORT BE M. FRANCIS MAGNARD
Hier, à deux heures, dans une maison de
Neuilly, M. Francis Magnard est mort.
En dehors des bureaux de rédaction, de
rares personnes savaient, à Paris, que le ré-
dacteur en chef du Figaro fût malade. Con-
naissant trop la vanité d'un grand nombre
des lecteurs de son journal, volontiers en
quête de réclame et d'échos mondains, M.
Magnard aimait peu le bruit.
Ses collaborateurs n'ignoraient pas que rien
au monde ne lui eût été désagréable comme
une publicité indiscrète autour de sa personne
et de son nom. Aussi fallait-il être de la mai-
son pour savoir que de temps en temps, si,
plusieurs jours de suite, le petit article poli-
tique signé F. M. manquait en tête des échos
du Figaro, c'est que le successeur - de M. de
Villemessant souffrait, plus que de coutume,
d'une maladie chronique.
Exclusivement journaliste, après quelques
années de première jeunesse passées dans une
administration, il y avait un peu plus de
trente ans que M. Francis Magnard était entré
au Figaro, sous les auspices (ralbérie Second,
le parrain de son fils. Il y écrivit d'abord un
peu sur tous les sujets : articles de fantaisie,
articles politiques, faits divers à l'occasion,
pourimaginerplus tard un erevue de lapresse
qui est restée parmi les rubriques du Figaro.
Une légende s'était formée au sujet de M.
Magnard et nous ne croyons pas qu'elle ait
tout à fait disparu. On le disait de nationalité
belge, ce qui n'aurait eu, au surplus, rien de
particulièrement fâcheux, mais ne manquait
pas quelquefois de l'agacer un peu. En réa-
lité, si M. Francis Magnard était né à
Bruxelles, le 11 février 1837, il était né de pa-
rents français ayant conservé la nationalité
française, et, comme tous les Français de son
âge, il monta sa faction de garde national en
1870, pendant le siège de Paris.
Bien qu'ancien collaborateur du Figaro,
c'est seulement en 1876 que M. Magnard de-
vint l'une des puissances du journal. M. de
Villemessant lui confia la délicate fonction
de rédacteur en chef, et lorsque, en 1879, M.
de Villemessant mourut, à l'autorité souve-
raine du fondateur du Figaro succéda un
triumvirat dont, jusqu'à ces jours derniers,
M. Magnard pouvait être considéré comme le
premier consul.
Les trois gérants, — c'est leur qualificatif
officiel, — MM- Magnard, de Rodays et Péri-
vier, se partagèrent le sceptre directorial. M.
Magnard, avec le titre de rédacteur en chef,
eut la direction politique, M. de Rodays la
direction administrative et M. Périvier le
secrétariat nominal de la rédaction, avec la
direction effective du supplément littéraire
du journal.
En vertu de l'acte de société qui fut alors
dressé, c'est sur la tête des deux survivants
d'abord, puis sur celle du dernier survivant,
que doivent s'accumuler les pouvoirs et les
avantages sti pulés à l'origine au profit de
la gérance collective.
La mort de M. Magnard, qui constitue un
événement parisien, a donc en outre, pour le
Figaro, une importance considérable.
Il ne nous appartient pas d'apprécier ici le
rôle que M. Magnard, comme polémiste,
comme écrivain très lu et fort goûté, a pu
jouer au point de vue politique.
Sa mort imprévue a vraiment mis en deuil
la maison de la rue Drouot, où samedi en-
core on croyait à une prochaine guérison.
Atteint depuis longtemps d'une maladie de
vessie, M. Magnard, qui avait son hôtel à
Paris rue Condorcet, s'était fait transporter il
y a i une dizaine de jours à Neuilly, dans une
maison spéciale, pour y subir une opération.
L'opération, faite vendredi, avait parfaite-
ment réussi; mais, ainsi qu'il advient fort
souvent après une opération chirurgicale, le
malade, que l'on croit sauvé, meurt quelques
jours plus tard emporté par un fièvre urémi-
que, ou plus simplement par suite de l'em-
poisonnement du sang.
Samedi soir, comme M. le chirurgien Poncet,
celui-là même qui assista M. Carnot le soir de
l'attentat de Lyon, insistait pour revoir M.
Magnard, avec qui il s'était entretenu dans
la journée, le rédacteur en chef du Figaro,
qui se trouvait fatigué, fit prier le chirurgien
de le laisser dormir.
Cependant le docteur Poncet insistait. Alors
M. Magnard, souriant presque, dit aux per-
sonnes qui l'entouraient : « Puisqu'il insiste,
et pour qu'il me laisse tranquille, eh bien,
dites-lui que je suis mort. »
Ce furent ses dernières paroles, son mot de
la fin de chroniqueur aimable, car il s'endor-
mit et ne reprit plus connaissance jusqu'à
l'heure où, sans souffrir, hier, il s'éteignait
doucement.
M. Magnard laisse une veuve et un fils, M.
Albéric Magnard, musicien distingué. Nous
adressons à sa famille, ainsi qu'à nos con-
frères du Figaro, l'expression de tous nos
regrets. 1
Nota. — Les obsèques de M. Magnard au-
ront lieu mardi à midi, à Notre-Dame-de-
Lorette, où l'on se réunira. L'inhumation se
fera au cimetière de Passy.
fins é Progrès
LJINFRA-ROUGE
Tout le monde sait que quand on fait
traverser un prisme transparent par un
rayon de lumière, ce rayon se décompose
et se disperse en rayons multicolores, qui
s'étalent et se classent infailliblement dans
l'ordre suivant : Violet, indigo, bleu, vert,
jaune, orangé, rouge.
C'est-à-dire que la lumière, qui nous
paraît blanche, est réellement formée de
la combinaison de ces rayons colorés,
dont la polychromie résulte de mysté-
rieuses différences dans le nombre et la
vitesse des vibrations ondulatoires de
l'éther. Cela est si vrai que si, après avoir
disposé tout autour de la surface plane
d'un disque sept secteurs colorés en vio-
let, en indigo, en bleu, etc:, dans l'ordre
de leur distribution réglementaire, l'on
imprime à ce disque un mouvement de
rotation suffisamment vif, il arrive un
moment où les couleurs se fondent et où
l'on ne distingue plus qu'un tourbillon
uniformément blanchâtre.
Ce phénomène s'opère spontanément
dans la nature lorsque, par exemple, un
rayon de soleil est obligé de traverser un
rideau de gouttelettes tombant en pluie
d'un nuage orageux. La lumière se dé-
compose alors en conformité des lois que
je viens d'indiquer, pour constituer le ma-
gnifique spectacle connu sous le nom
d'arc-en-ciel. Mais on peut obtenir artifi-
ciellement le même résultat en recevant
un pinceau de lumière sur un prisme
triangulaire de cristal. On fait apparaître
ainsi une image multicolore, qui n'est au-
tre chose qu'un pan d'arc-en-ciel, facile à
projeter sur un écran : c'est le spectre so-
laire, dont l'observation méthodique a en-
fanté toute une science nouvelle — la
spectroscopie — dont les conséquences et
les applications sont infiniment curieu-
ses et fécondes.
A la condition, en effet, d'obliger le
rayon lumineux à traverser plusieurs
prismes successifs, ou bien encore en
substituant au cristal une substance, telle
que le sulfure de carbone, douée d'un pou-
voir dispersif et réfringent supérieur, on
peut élargir à volonté sur l'écran l'image
du spectre solaire, de manière à en rendre
l'examen commode et sûr. On est arrivé
ainsi à donner au morceau d'arc-en-ciel
étudié une étendue d'une trentaine de
mètres, c'est-à-dire un développement
permettant de saisir les moindres nuances,
les moindres détails, les moindres traits
caractéristiques du spectre.
C'est de cette façon qu'on a fini par re-
marquer que le spectre est invariable-
ment sillonné par une multitude de raies
transversales plus ou moins nettes, bril-
lantes et fines, qu'on a baptisées raies de
Fraunhofer, du nom du savant physi-
cien qui les a découvertes. Malgré l'appa-
rence de leur disposition fortuite, ces
raies sont d'une fixité absolue et consti-
tuent quelque chose comme un caractère
indélébile, au moyen duquel on peut se
rendre un compte parfaitement exact et
certain de la présence ou de l'absence de
telle ou telle substance au foyer lumi-
neux.
L'expérience a démontré, en effet, que
chaque corps porté à l'incandescence se
révélait par des raies spéciales de teintes
et de positions particulières, dont on a
dressé la liste. On est parvenu de la sorte
à créer un procédé d'analyse chimique
d'une délicatesse inouïe, puisqu'il permet
de reconnaître la présence, dans une flam-
me, de moins d'un vingt-millionième de
milligramme de sodium. C'est encore l'ana-
lyse spectrale qui nous fournit le moyen
de savoir quelle est la composition chi-
mique des astres inaccessibles, et d'affir-
mer que l'atmosphère en ignition, du so-
leil par exemple, renferme non seulement
tous les métaux terrestres, mais encore
d'autres métaux et d'autres métalloïdes,
dont on n'a pas encore découvert le moin-
dre échantillon en ce bas monde. L'ana-
lyse spectrale accomplit même, comme 1
en se jouant, d'autres miracles, singuliè-
rement plus extraordinaires et plus stupé-
fiants encore, que je me propose d'expli-
quer, au prochain jour, par le menu.
- Tout cela, diront es superficiels et les
pédants, c'èst de la physique élémentaire.
On n'est pas des écoliers. -
Patience, mes maîtres ! J'avais besoin,
pour éclairer ma lanterne, de rappeler et
de fixer ces souvenirs, qui sont effective-
ment des « truismes ». Mais, à présent,
nous allons faire un pas de plus.
A vue de nez, sans doute, le spectre a
l'air de commencer au rouge pour finir au
violet. Mais ce n'est là qu'une fallacieuse
illusion d'optique. La vérité est que, sans
qu'il y paraisse, il s'étend beaucoup plus
loin de part et d'autre. Sur un assez grand
espace au-delà du violet, là où l'œil ne
discerne plus rien, se dispersent et s'éta-
lent encore un grand nombre de rayons
qui, pour être invisibles, n'en sont pas
moins d'une réalité incontestable et d'un
intérêt égal, sinon même supérieurs aux
rayons visibles. Ce sont les rayons chimi-
ques, dont les révélations sui generis
n'ont rien à envier aux surprises des
rayons simplement lumineux. A défaut de
l'œil, c'est la plaque photographique —
cette « rétine du savant », comme on l'a
appelée d'après une formule aussi sugges-
tive que pittoresque — qui se charge de
recueillir et d'interpréter ces révélations
curieuses. En d'autres termes, c'est dans
cette partie obscure du spectre, c'est dans
l'ultra-violet que s'accomplissent les mer-
veilles de la photographie. Rien que cela !
Mais ce n'est pas tout. On soupçonnait
depuis longtemps qu'il devait symétrique-
ment se passer quelque chose d'analogue
à l'autre bord extrême du spectre, dans
l'infrà-rouge. Là, se devaient également
étaler incognito d'autres rayons invisibles,
doués de pouvoirs occultes et pourvus de
« tuyaux » inédits. Seulement, je le répète,
jusqu'à ces derniers temps, ce n'était là
qu'une hypothèse problématique, mal as-
sise sur des observations incomplètes ou
de vagues et flottantes présomptions.
Mais voici qu'un illustre savant améri-
cain, M. Langley, qui n'a pas hésité à en"
treprendre résolument la reconnaissance
de ces régions inconnues, vient nous ou<
vrir à l'improviste de mirifiques horizons.
Il paraîtrait, à l'en croire (et c'est un mon-
sieur qui ne parle pas à la légère et ne
s'embarque pas sans biscuit), il paraîtrait
que l'infrà-rouge serait encore cent fois
plus intéressant et de plus fructueuse
exploitation que Yultrà-violet.
Par exemple, ici, la photographie n'est
plus d'aucun secours, les rayons infra-
rouges manquant absolument de vertu
photogénique. Pour se reconnaître au mi-
lieu de ces ténèbres inexplorées, il faut
faire appel à un autre auxiliaire. Cet autre
auxiliaire, c'est — on l'a pressenti — l'é-
lectricité, l'omnipotente, omnisciente et
ubiquiste magicienne, la bonne fée à tout
faire des âges nouveaux !
A cet effet, M. le professeur Langley a
dû inventer un instrument nouveau, qu'il
nomme le bolomètre.
C'est — tout simplement — un mince
ruban métallique relié à l'aiguille aimantée
d'un galvanomètre. Ce ruban a respecti-
vement 5 centièmes de millimètre de lar-
geur et 2 millièmes de millimètre d'épais-
seur — comme la plus soyeuse et la plus
frêle des feuilles de papier. Lorsque sur
ce ruban on fait passer tour à tour les dif-
férentes parties du spectre, ce galvano-
mètre, dont la sensibilité est exquise, n'a
plus un instant de repos, et, par ses oscil-
lations, accuse toutes les raies que contient
le spectre, leur intensité, leur largeur, etc.
Un mouvement d'horlogerie actionne tout
à la fois un prisme, dont la révolution fait
successivement sur le ruban toutes les
parties du spectre, et une sérielle plaques
photographiques destinées à enregistrer les
images des déviations de l'aiguille du gal-
vanomètre. On a ainsi, en quelque sorte,
la mesure de l'équivalent électrique de la
lumière.
C'est ainsi que le « bolomètre » montre
avec une précision et une limpidité in-
croyables, dans la région du jaune, entre
les deux raies bien connues du sodium, la
raie du nickel que, seuls, deux ou trois
spectroscopes d'une puissance exception-
nelle avaient jusqu'ici permis d'aperce-
voir.
Mais le plus singulier, c'est que le « bo-
lomètre » parle également dans la région
de l'infrà-rouge ainsi convaincue ipso
facto de n'être pas aussi neutre qu'elle en
a l'air ! Déjà M. Langley y a constaté de
cette façon certains phénomènes inatten-
dus : comme le reste du spectre, l'infrà-
rouge a ses raies caractéristiques et dis,
tinctives, qui avaient échappé aux regardi
des plus perspicaces observateurs et doni
il n'y a plus qu'à trouver l'interprétatiou
vraie.
Nous touchons peut-être au seuil d'une
série de découvertes prodigieusement sur-
prenantes et prodigieusement fécondes. Il
est d'autant plus excusable d'y compter
que le procédé, purement automatique,
perd tout caractère personnel à partir de
sa mise en marche, et présente, par consé-
quent, les meilleures garanties de sincé-
rité, d'exactitude et d'autorité.
L'ultrà-violet nous a déjà donné la
photographie, dont les miracles ne se comp-
tent plus. Que nous donnera l'infrà,
rouge ? Je vous dirai ça dans cinquante
ans, — si j'y suis encore l
Raoul Luce
L'excellente renommée dont jouit le Petit
Châteauneuf-du-Pape provient surtout du fin
bouquet qu'il acquiert en bouteilles. Le pro-
priétaire des Fines-Roches à Châteauneuf-du-
Pape l'expédie pour 135 fr. les 225 litres.
LA QUESTION
, DE
LA SÉDUCTION DES HOMES
UNE LEVÉE DE TABLIERS BLANCS
A L'HORIZON
Comment « elles » succombent. - L'or-
dinaire promesse de mariage des
séducteurs. — Satiété et uni-
formes militaires mêlés.
La question de la séduction des bonnes est
une question quasi-sociale, si grosse, à tous
les points de vue, de conséquences qu'on l'a-
bandonne volontiers aux vaudevillistes, les
gens sérieux se réservant jalousement pour
traiter de l'opportunité ou de la non-orJ>ortu-
nité de la conversion du 3 en 2 it2 0)U sans
augmentation du capital de la dette.
Mais une bonne vient de se rencontrer
(comme dirait Bossuet), qui a cru devoir sou-
mettre brutalement son cas à la première
chambre du tribunal de la Seine.
LE ROMAN BANAL DE Mlle E. LEVY
Voici à peu près de quelle façon la de-
manderesse expose les faits :
« Tout d'abord, je dois dire immédiatement
que j'ai vingt-sept ans bien sonnés. Je me
nomme Eugénie Levy.
» Je suis d'origine juive. Mes parents sont
marchands de bestiaux en Alsace.
» En 1890* un de nos voisins et coreligion-
naires, M. Alexandre Blumsee, nous annonça
que son frère, qui était riche à plusieurs cen-
taines de mille francs et qui habitait Troyes,
venant de perdre sa femme, désirait uns
bonne. Mes parents flairèrent là tout aussitôt
une bonne place où je pourrais honnêtement
m'amasser une petite dot. Aussi me décidèr
rent-ils à quitter le pays et à me rendre à
Troyes. C'est ce que je fis sans aucun ennui,-
car je songeais depuis longtemps à me faire
une position.
» Au bout de quelque temps, mon maître,
M. Blumsée, qui avait quarante-neuf ans, lni
manifesta par des signes non équivoques qu'il
me trouvait à son goût. Je fis semblant de ne
pas comprendre. Je savais, en effet, qu'une
jeune fille qui a fauté et qui n'a pas de dot
pour trouver un épouseur ne se marie jamais.
Autant par sentiment personnel que par
crainte de mes parents, je souhaitais avant
tout une position régulière. Je repoussai donc
énergiquement les avances qui m'étaient fai-
tes jusqu'au jour où mon maltre me dit :
a Mais laissez-vous donc faire, Eugénie.
Après je vous épouserai !. » Il me répéta la
chose si souvent et sur un ton si convaincant,
que je finis par croire ce qu'il me disait et qus
je me laissai séduire. Mais je ne succombe!
HARDI 20 NOVEMBRB 1894
t -. -. --
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tous les Bureaux de Poste.
LES FUNERAILLES
Après la traversée suprême de rem.
pire au milieu du deuil d'un peuple
immense, Alexandre III va, tout à
l'heure, prendre sa place dans le mau-
solée. de l'église des Saints Pierre et
Paul, à côté de ses prédécesseurs et des
fondateurs de la dynastie des Romanof.
Pendant que se déroulera sur les bords
de la Neva le cortège officiel dans le-
quel toutes les puissances auront des
représentants, d'autres cérémonies au-
ront lieu en France qui n'auront leurs
semblables nulle part, et la journée qui
s'ouvre sera pour nous, comme pour la
nation russe, une journée de deuil.
Sans tomber dans les exagérations
théâtrales, sans qu'une parole que l'on
puisse regretter comme déplacée ou
JCOmme manquant de dignité, ait été
dite, la France a montré dans ces
circonstances douloureuses qu'elle me-
surait à sa juste valeur la perte qu'elle
vient de faire, et elle a donné à l'expres-
sion de ses sentiments la forme la plus
sympatique comme la plus correcte. La
journée d'aujourd'hui ne sera pas la
moins éloquente des manifestations qui
se sont produites depuis huit jours. La
présence du chef de l'Etat, des membres
du gouvernement et des représentants
des pouvoirs publics à la cérémonie de
la rue Daru est déjà un témoignage
d'amitié qui dépasse les règles ordi-
naires du protocole. Mais la participa-
tion de l'armée à cette cérémonie lui
donne un caractère particulier. Elle res-
serre encore le lien qui unissait le dra-
peau tricolore à l'étendard moscovite.
C'est une heureuse idée d'avoir as-
socié dans cette manifestation les troupes
de la marine à l'armée de terre autre-
ment que par la mise en berne des
pavillons des navires et d'avoir fait ve-
nir à Paris un détachement de fusi-
liers marins. La marine a eu, dans le
rapprochement des deux peuples, qui
a été l'acte politique le plus important
.: de ces dernières années, une part pré-
pondérante. C'est elle qui a reçu à
Cronstadt et à Saint-Pétersbourg les
ovations de la nation russe ; c'est à la
marine russe que la France faisait, il
n'y a guère plus d'un an, cette récep-
tion enthousiaste dont le souvenir est
encore dans tous les esprits. Comme
elle a eu sa part des fêtes, comme elle a
été le trait d'union des amitiés nais-
santes, il est juste qu'elle ait sa place
marquée aux jours de deuil.
Mais, à côté de ces manifestations of-
ficielles, il s'en est produit et il s'en
produit d'autres qui montrent bien que
les sympathies ne sont pas seulement
entre les gouvernements et que la na-
tion s'associe aux pouvoirs publics, que
c'est avec une réelle douleur qu'elle a
vu disparaître l'un des auteurs de l'en-
tente internationale si peu de temps
après que l'autre avait péri sous le cou-
teau d'un assassin.
L'énorme quantité de couronnes en-
voyées à Saint-Pétersbourg par les mu-
nicipalités, par les associations de, tout
genre, par de simples particuliers, le
nombre considérable de dépêches de
condoléance échangées entre les deux
pays, les témoignages d'amitié dont les
esprits se sont ingéniés à multiplier la
nature, tout cela montre bien à quel
point la nation a ressenti la douleur de
la mort d'Alexandre III et est la marque
d'une amitié qui dépasse les bornes or-
dinaires des amitiés politiques entre
gouvernements.
C'est, croyons-nous, un fait sans
exemple dans l'histoire, que celui de
deux peuples et de deux gouvernements,
séparés l'un de l'autre par tant de rai-
sons, par la distance géographique
comme par la différence des institu-
tions, des mœurs, du génie national, de
la langue, et surmontant tant d'obstacles
accumulés pour se jeter par la pensée
dans les bras l'an de l'autre, pour s'unir
dans la joie et resserrer dans la douleur
leurs liens d'amitié.
Ils l'ont fait spontanément, ratifiant
avec un élan admirable les accords poli-
tiques sans que l'un des deux prît à un
moment quelconque une attitude pro-
tectrice, sans que l'autre s'humiliât ou
parût solliciter une protection. Ils l'ont
fait dans un sentiment d'estime réci-
proque et avec la conscience d'une égale
dignité. Rien ne s'est glissé dans ces
manifestations d'amitié, dans cette ré-
conciliation de peuples qui ont pu se
trouver jadis en lutte, mais qui avaient
dès ces époques lointaines conservé
l'un de l'autre un souvenir de loyauté et
d'estime, qui puisse, dans l'avenir, être
un germe de rancune ou ralentir les
sympathies.
Républicains, nous nous inclinons
une dernière fois devant le cercueil im-
périal et nous saluons l'aurore du DOU-
veau règne avec la confiance que l'ave-
nir ne fera que cimenter indissoluble-
ment une union dont les débuts ont été
en si peu de temps tour à tour si joyeux,
si émouvants et si tragiques.
M. FRANCIS MAGNARD
La journée d'hier a été marquée par un
triste événement parisien : la mort de M.
Francis Magnard, rédacteur en chef du
journal le Figaro.
M. Magnard s'était fait une célébrité avec
son filet politique quotidien. Sur le boule-
vard on avait fini par appeler ses filets des
« Magnard ». Il y jugeait les hommes et
les choses en sceptique parfois maussade,
mais spirituel et lettré. Il a été beaucoup
imité, mais on ne l'a ni surpassé ni égalé
dans le genre qu'il avait créé et dont il
avait la spécialité.
Le rôle politique de M. Magnard a aussi
son originalité et mérite d'être signalé.
Rédacteur en chef d'un journal mondain,
royaliste et conservateur, il a été pour le
parti royaliste et conservateur un actif
ferment de dissolution. Personne moins
que lui n'a eu la foi dans le succès du parti
dont le Figaro était autrefois l'organe et
jamais il n'a perdu l'occasion de blaguer
doucement ceux qui l'avaient.
La politique de ralliement, prêchée
d'abord par M. Etienne Lamy qui la prêche
encore, puis par M. Raoul-Duval, ensuite
par M. Piou, et adoptée enfin par l'immense
majorité des conservateurs, a toujours été
la sienne. C'était un rallié avant la lettre.
Il a la malechance de mourir juste au mo-
ment où les idées qu'il a si longtemps dé-
fendues sont devenues tout à fait à la
mode.
M. Francis Magnard enfin était person-
nellement, pour ses adversaires politiques,
un confrère aimable et toujours courtois,
dont la disparition fera dans nos rangs un
vide d'autant plus sensible qu'il était, dans
toute l'acception du mot, un vrai journa-
liste.
A.-E. P.
ÉLECTIONS A SAliT-DENIS
Démission des conseillers élus
Les électeurs de la commune de St-Denis
étaient convoqués hier à l'effet d'élire dix
conseillers municipaux en remplacement de
MM. Quintainne, Adam, H. Leroy, Thivet-
Anctin, Coutanceau, Remy, Aubigant, Jovi-
net, Portai, Faulcon, démissionnaires.
neCt, 'était la troisième fois que ces dix conseil-
lers, déjà élus deux fois précédemment sur
un programme de dissolution, se présentaient
aux suffrages des habitants de Saint-Denis.
Trois listes se trouvaient en présence : la
liste socialiste révolutionnaire, la liste répu-
blicaine indépendante et la liste de l'union
des groupes républicains socialistes. C'est
cette dernière qui l'a emporté.
Voici le nombre des voix obtenues par cha-
cune des listes en présence :
Union des groupes républicains socialistes.
MM. Quintainne 4,006, Adam 3,985, Henri Le-
roy 3,944, Thivet-Anctin 3,987, Coutanceau
3.976, Remy 3,978, Aubigant 3.978, Jovinet
3,959, Portal 3,942, Faulcon 3,96i.
Liste socialiste révolutionnaire :
MM. Gambier 3,205, Devillers 3,055, Blan-
chot 3,189, Julien 3,183, Hersant 3,156, Per-
rot 3,169, Jehannin 3,170, Robert 2,953, Mis-
sonnier 3,177, Girousse 2,923.
Liste républicaine indépendante :
MM. Debeaupuis 214, Wolff 239, Josse 239,
V. Prouvier 240, Dumas 237, Louis Leroy 243,
Masson 237, Beaudard 236, Gerbois 239, Vi-
daux, 245.
Les conseillers municipaux réélus pour la
troisième fois ont, aussitôt qu'ils ont su le
résultat des élections, envoye pour la troi-
sième fois leur démission au préfet de la
Seine. Voici le texte de la lettre :
Monsieur le préfet de la Seine,
Nous soussignés, conseillers municipaux de la
ville de Saint-Denis, élus pour la troisième fois
sur un programme de dissolution, avec une majo-
rité de 7 à 800 voix sur nos adversaires, avons
l'honneur de vous adresser notre démission de
conseillers municipaux de la ville de Saint-Denis.
Nous vous prions d'agréer, monsieur le préfet,
etc., etc.
--MT Signé : GUINTAINNE, ADAM, H. LEROY,
THIVET-ANCTIN, COUTANCEAU, AUBI-
GANT, REMY, JOVINET, PORTAL,
FAULCON.
ENFANT ABANDONNE EN CHEMIN DE FER
Versailles, 18 novembre.
Une mystérieuse découverte a été faite hier soir
à la gare rive droite, à l'arrivée du train de
10 h. 20.
Un conducteur du train a trouvé sur l'impériale
d'un wagon un jeune enfant âgé d'environ trois
semaines, entouré de langes sur lesquels était épin-
gle le billet suivant: « Si j'abandonne ce pauvre
petit enfant, c'est poussée par la misère. Ayez
pitié de lui. »
Une information est commencée.
ACCIDENTS MORTELS AUX COURSES
(DE NOTRE CORRESPONDANTPÀRTICULIER)
Bordeaux, 18 novembre.
Un épouvantable accident s'est produit cette
après-midi aux courses de steeple-chase du
Bouscat.
Dans le prix de la Ville de Bordeaux, deux
jockeys justement appréciés du monde spor-
tif, Bordenave et Lightfoot, ont fait une chute
terrible en sautant une haie.
On les transporta immédiatement à l'am-
bulance installée sur la pelouse, où Borde-
nave rendit quelques instants après le der-
nier soupir sans avoir pu reprendre connais-
sance.
Quant à Lightfoot, il a été transporté mou-
rant à l'hôpital Saint-André dans une voiture
des ambulances urbaines : il a une plaie con-
tuse qui a déterminé une commotion céré-
brale et une paralysie du côté droit. Son état
est absolument désespéré.
Inutile de dire quelle émotion ce triste évé-
ment a jetée dans la foule qui assistait aux
courses. La Société des steeplchases a ouvert
une souscription au profit des familles des
deux jockeys. Bordedave, qui était âgé de 40
ans, laisse, en effet, une femme et un enfant,
et Lightfoot, qui a dix ans de moins, est père
de quatre enfants.
ABDUL-HAMID ET GUILLAUME
Gouatantiaople, 18 novembre.
Le sultan enverra a 1 empereur Quillaumo II
trois sabres d'honneur enrichit de pierreries ; ua
$9
LEancation à FEcote Drimairo
CHEZ M. CLAIRIN
La proposition Clairin-Bompard-Baudin.—
Instruction et éducation. — Toujours
la paperasserie administrative.
— Réformes à faire.
Depuis quelques jours, on parle dans le
monde qui s'occupe d'instruction publique
et d'éducation nationale d'une proposition
qui doit être incessamment soumise au con-
seil municipal par MM. Clairin, Bompard et
Baudin. Plusieurs de nos confrères en ont
même parlé sans qu'il ressortit de leurs ex-
plications une idée nette du but auquel ten-
dent les auteurs du projet. Dans ces condi-
tions, nous nous sommes décidés à aller en
causer avec M. Clairin. Sa réponse a été ca-
tégorique :
- Mais amis et moi, nous a dit l'honorable
conseiller du quartier des Batignolles, nous
pensons que le vœu du législateur de 1882
n'est pas rempli. La loi sur l'instruction obli-
gatoire, laïque et gratuite a entendu créer des
établissements où l'on formerait des hommes
pour l'avenir. Certes, au point de vue de
l'instruction, nous n'avons pas trop à nous
plaindre; mais au point de vue de l'éduca-
tion, ce sont de simples garderies d'enfants,
et les éternels adversaires de la République
et du progrès s'en servent pour accuser
la loi elle-même et essayer de la battre en
brèche.
— Cependant, avons-nous répondu, il nous
semble que, depuis douze ans, le» -ascriôce»
faits par la nation ont été considérables.
— Certainement, ils l'ont été, et ce sera une
des gloires de notre temps, croyez-le bien.
Mais les choses qui intéressent cette question
délicate de l'école primaire ne s'improvisent
pas. Voilà douze ans que la loi est édictée, et
l'effort qu'elle exigeait était si considérable à
Paris que nous n'avons pas encore le nombre
d'écoles nécessaires pour recevoir la popula-
tion enfantine; les quarante millions d'em-
prunt qui vont être dépensés de ce chef, sur
le rapport très étudié et très bien compris de
notre collègue M. Blondel, ne suffiront même
pas encore pour satisfaire à tous les besoins.
En un mot, on s'est préoccupé jusqu'à pré-
sent de créer des écoles et 1 on a bien fait.
MM. Baudin, Bompard et moi-même nous
pensons cependant qu'il faut commencer à
les outiller pour leur véritable mission, qui
est de faire de l'éducation morale et de l'en-
seignement civique.
— Elles ne le sont donc pas ?
— Hélas non 1 La machine administrative
est si compliquée chez nous qu'elle absorbe
les forces de tous les rouages en les détour-
nant de leur véritable fonction. Vous ver-
rez dans la proposition que nous faisons au
conseil la liste, très incomplète d'ailleurs, des
écritures auxquelles doit se livrer un direc-
teur d'école et des nombreuses inspections et
sous-inspections auxquelles il est soumis, et
vous vous demanderez comme moi s'il est
possible dans ces conditions à un directeur
ou à une directrice de remplir exactement
ses premiers devoirs, de s'occuper des en-
fants, de les connaître même chacun d'eux
en particulier, ce qui est indispensable pour
les diriger.
LES PROGRAMMES
— Cependant les programmes font une
part à cet enseignement moral et civique ?
— Certainement : ces programmes contien-
nent tout ce qu'il faut, ils sont même trop
chargés, et comme l'enseignement dont nous
nous occupons n'a aucune sanction à l'exa-
men du certificat d'études, les maîtres, dont
le guide véritable, le directeur de l'école, est
perpétuellement occupé, soit à écrivasser des
documents administratifs, soit à répondre aux
inspecteurs ou aux contrôleurs du matériel,
s'occupent surtout d'enseigner aux enfants
les matières de l'examen. Dans nos écoles,
c'est à qui aura le plus d'élèves reçus au
certificat. C'est là une émulation utile, sans
doute ; mais elle est bien secondaire, vous l'a-
vouerez, étant donné le but à atteindre. Encore
une fois, il ne s'agit pas de faire des lettrés
ou des mandarins de la dernière catégorie :
il s'agit de faire des hommes et des citoyens.
La proposition que mes collègues Baudin
et Bompard ont signée avec moi tend à re-
mettre chaque chose en sa place et à confier
au directeur ou à la directrice le soin de faire
dans les classes de son école, de l'élémentaire
au cours supérieur, l'enseignement moral et
civique; et on les déchargerait de toute la
paperasserie administrative, en leur adjoi-
gnant une suppléante à poste fixe dans les
écoles de filles et un élève aspirant à l'école
normale dans les écoles de garçons.
TROP DE CANDIDATES
Ce système aura un double avantage. Pour
les écoles de filles, les suppléantes seront
choisies au concours et nous en terminerons
ainsi avec les demandes de toutes ces jeunes
personnes (il y en a 8,500 à l'heure actuelle)
qui, munies d'un brevet soit supérieur, soit
élémentaire, viennent demander d'abord des
suppléances dans les écoles, puis une place
dans les écoles de la banlieue, puis une titu-
larisation à Paris. Sur 8.500, 150 à 200 re-
çoiveut satisfaction après avoir mis en
œuvre toutes les influences ; les autres atten-
dent un an, deux ans, quelquefois dix ans,
que leur tour arrive, et ce tour ne vient
jamais.
Ajoutez à cela que ces jeunes personnes, si
estimables soient-elles, n'ont pas voulu, n'ont
pas osé ou n'ont pas réussi à passer par l'é-
cole normale. Elles arrivent au même but que
les normaliennes, quelquefois dans un délai
moins grand, mais la plupart du temps sans
la préparation nécessaire pour remplir utile-
ment leur mission. De là des non-valeurs qui
se glissent dans le corps enseignant, qui en-
travent la carrière de sujets distingués et
amènent des découragements. Il faut on finir
avec cette situation, tant au point de vue gé-
néral de l'utilité sociale qu'à celui, qui nous
intéresse particulièrement, de la sélection de
notre personnel enseignant.
— J'ai bien entendu que cette partie de vo-
tre projet concerne les écoles de filles, mais
les ecoles de garçons ?
— La situation n'est pas la même ; ici nous
manquons de personnel. Notre école normale
d'Auteuil se recrute difficilement et il ne se
présente guère d'hommes capables ou dignes
de remplir même le rôle de suppléant dans
nos écoles. C'est ce personnel qu'il faut for-
mer avec des élèves aspirants à l'école nor-
male. Ces derniers prépareront leurs examens
et feront l'office de secrétaires du directeur,
moyennant une légère rétribution annuelle.
LA JOIE DES PARENTS
Mais le grand avantage que mes collègues
et moi avons vu dans cette institution, en
dehors de la liberté d'esprit que nous rendons
aux directeurs et directrices, c'est de permet-
tre aux parents de laisser leurs enfants à l'é-
cole de sept heures et demie du matin à sept
heures du soir. L'école ouvre à huit heures et
convoie les enfants à quatre heures. Que vou-
igz-Yvud e deviennent ces petits etrw pen-
dant le reste du temps, lorsque les parents
sont au travail ? Ils restent dans la rue ;
quelquefois ils y contractent de désastreuses
habitudes, ils perdent les bienfaits de l'école,
et nous les retrouvons à l'âge de seize ans,
non pas à l'atelier ou à l'école primaire supé-
rieure, mais sur les boulevards extérieurs ou
en police correctionnelle.
— N'est-ce pas une bien lourde charge que
vous demandez au budget de la ville ?
— Certes on ne peut réformer, c'eEt-à-dire
faire mieux, sans dépenser de l'argent. C'est
une augmentation de 280,000 fr. pour le bud-
get scolaire, mais je pense que l'administra-
tion pourra trouver des économies d'un autre
côté pour pallier en grande partie à la dépense.
Mais ne pourrait-elle le faire, que nous de-
manderions quand même au conseil de voter
le projet à cause des avantages moraux et
matériels qu'il présente. L'enseignement pri-
maire à Paris présente des difficultés énor-
mes : il faut savoir les envisager en face si
on veut les vaincre. Dans un village, l'insti-
tuteur a peut-être plus de peines matérielles,
mais il connaît tous les enfants, tous les pa-
rents, et combien son rôle d'éducateur se
trouve ainsi simplifié 1
Il faudrait qu'à Paris nous pussions arri-
ver au même résultat. Il était impossible au
directeur seul d'y arriver. Voilà pourquoi à
l'intérieur de l'école nous voulons lui donner
l'aide nécessaire. A l'extérieur, c'est-à-dire
auprès des familles, il faudra l'aider aussi par
les délégations cantonales.
Mais c'est là, pour ainsi dire, la seconde
partie de notre projet, plus difficile que la
première. Le conseil départemental, le conseil
supérieur de l'instruction publique et le mi-
nistre lui-même devront nous faciliter la
tàche. Si vous voulez bien, nous en reparle-
rons plus tard. »
Sur ces mots, nous avons quitté notre in-
terlocuteur, souhaitant qu'il réussisse pour le
bien des enfants du peuple et l'avenir de la
République.
MORT BE M. FRANCIS MAGNARD
Hier, à deux heures, dans une maison de
Neuilly, M. Francis Magnard est mort.
En dehors des bureaux de rédaction, de
rares personnes savaient, à Paris, que le ré-
dacteur en chef du Figaro fût malade. Con-
naissant trop la vanité d'un grand nombre
des lecteurs de son journal, volontiers en
quête de réclame et d'échos mondains, M.
Magnard aimait peu le bruit.
Ses collaborateurs n'ignoraient pas que rien
au monde ne lui eût été désagréable comme
une publicité indiscrète autour de sa personne
et de son nom. Aussi fallait-il être de la mai-
son pour savoir que de temps en temps, si,
plusieurs jours de suite, le petit article poli-
tique signé F. M. manquait en tête des échos
du Figaro, c'est que le successeur - de M. de
Villemessant souffrait, plus que de coutume,
d'une maladie chronique.
Exclusivement journaliste, après quelques
années de première jeunesse passées dans une
administration, il y avait un peu plus de
trente ans que M. Francis Magnard était entré
au Figaro, sous les auspices (ralbérie Second,
le parrain de son fils. Il y écrivit d'abord un
peu sur tous les sujets : articles de fantaisie,
articles politiques, faits divers à l'occasion,
pourimaginerplus tard un erevue de lapresse
qui est restée parmi les rubriques du Figaro.
Une légende s'était formée au sujet de M.
Magnard et nous ne croyons pas qu'elle ait
tout à fait disparu. On le disait de nationalité
belge, ce qui n'aurait eu, au surplus, rien de
particulièrement fâcheux, mais ne manquait
pas quelquefois de l'agacer un peu. En réa-
lité, si M. Francis Magnard était né à
Bruxelles, le 11 février 1837, il était né de pa-
rents français ayant conservé la nationalité
française, et, comme tous les Français de son
âge, il monta sa faction de garde national en
1870, pendant le siège de Paris.
Bien qu'ancien collaborateur du Figaro,
c'est seulement en 1876 que M. Magnard de-
vint l'une des puissances du journal. M. de
Villemessant lui confia la délicate fonction
de rédacteur en chef, et lorsque, en 1879, M.
de Villemessant mourut, à l'autorité souve-
raine du fondateur du Figaro succéda un
triumvirat dont, jusqu'à ces jours derniers,
M. Magnard pouvait être considéré comme le
premier consul.
Les trois gérants, — c'est leur qualificatif
officiel, — MM- Magnard, de Rodays et Péri-
vier, se partagèrent le sceptre directorial. M.
Magnard, avec le titre de rédacteur en chef,
eut la direction politique, M. de Rodays la
direction administrative et M. Périvier le
secrétariat nominal de la rédaction, avec la
direction effective du supplément littéraire
du journal.
En vertu de l'acte de société qui fut alors
dressé, c'est sur la tête des deux survivants
d'abord, puis sur celle du dernier survivant,
que doivent s'accumuler les pouvoirs et les
avantages sti pulés à l'origine au profit de
la gérance collective.
La mort de M. Magnard, qui constitue un
événement parisien, a donc en outre, pour le
Figaro, une importance considérable.
Il ne nous appartient pas d'apprécier ici le
rôle que M. Magnard, comme polémiste,
comme écrivain très lu et fort goûté, a pu
jouer au point de vue politique.
Sa mort imprévue a vraiment mis en deuil
la maison de la rue Drouot, où samedi en-
core on croyait à une prochaine guérison.
Atteint depuis longtemps d'une maladie de
vessie, M. Magnard, qui avait son hôtel à
Paris rue Condorcet, s'était fait transporter il
y a i une dizaine de jours à Neuilly, dans une
maison spéciale, pour y subir une opération.
L'opération, faite vendredi, avait parfaite-
ment réussi; mais, ainsi qu'il advient fort
souvent après une opération chirurgicale, le
malade, que l'on croit sauvé, meurt quelques
jours plus tard emporté par un fièvre urémi-
que, ou plus simplement par suite de l'em-
poisonnement du sang.
Samedi soir, comme M. le chirurgien Poncet,
celui-là même qui assista M. Carnot le soir de
l'attentat de Lyon, insistait pour revoir M.
Magnard, avec qui il s'était entretenu dans
la journée, le rédacteur en chef du Figaro,
qui se trouvait fatigué, fit prier le chirurgien
de le laisser dormir.
Cependant le docteur Poncet insistait. Alors
M. Magnard, souriant presque, dit aux per-
sonnes qui l'entouraient : « Puisqu'il insiste,
et pour qu'il me laisse tranquille, eh bien,
dites-lui que je suis mort. »
Ce furent ses dernières paroles, son mot de
la fin de chroniqueur aimable, car il s'endor-
mit et ne reprit plus connaissance jusqu'à
l'heure où, sans souffrir, hier, il s'éteignait
doucement.
M. Magnard laisse une veuve et un fils, M.
Albéric Magnard, musicien distingué. Nous
adressons à sa famille, ainsi qu'à nos con-
frères du Figaro, l'expression de tous nos
regrets. 1
Nota. — Les obsèques de M. Magnard au-
ront lieu mardi à midi, à Notre-Dame-de-
Lorette, où l'on se réunira. L'inhumation se
fera au cimetière de Passy.
fins é Progrès
LJINFRA-ROUGE
Tout le monde sait que quand on fait
traverser un prisme transparent par un
rayon de lumière, ce rayon se décompose
et se disperse en rayons multicolores, qui
s'étalent et se classent infailliblement dans
l'ordre suivant : Violet, indigo, bleu, vert,
jaune, orangé, rouge.
C'est-à-dire que la lumière, qui nous
paraît blanche, est réellement formée de
la combinaison de ces rayons colorés,
dont la polychromie résulte de mysté-
rieuses différences dans le nombre et la
vitesse des vibrations ondulatoires de
l'éther. Cela est si vrai que si, après avoir
disposé tout autour de la surface plane
d'un disque sept secteurs colorés en vio-
let, en indigo, en bleu, etc:, dans l'ordre
de leur distribution réglementaire, l'on
imprime à ce disque un mouvement de
rotation suffisamment vif, il arrive un
moment où les couleurs se fondent et où
l'on ne distingue plus qu'un tourbillon
uniformément blanchâtre.
Ce phénomène s'opère spontanément
dans la nature lorsque, par exemple, un
rayon de soleil est obligé de traverser un
rideau de gouttelettes tombant en pluie
d'un nuage orageux. La lumière se dé-
compose alors en conformité des lois que
je viens d'indiquer, pour constituer le ma-
gnifique spectacle connu sous le nom
d'arc-en-ciel. Mais on peut obtenir artifi-
ciellement le même résultat en recevant
un pinceau de lumière sur un prisme
triangulaire de cristal. On fait apparaître
ainsi une image multicolore, qui n'est au-
tre chose qu'un pan d'arc-en-ciel, facile à
projeter sur un écran : c'est le spectre so-
laire, dont l'observation méthodique a en-
fanté toute une science nouvelle — la
spectroscopie — dont les conséquences et
les applications sont infiniment curieu-
ses et fécondes.
A la condition, en effet, d'obliger le
rayon lumineux à traverser plusieurs
prismes successifs, ou bien encore en
substituant au cristal une substance, telle
que le sulfure de carbone, douée d'un pou-
voir dispersif et réfringent supérieur, on
peut élargir à volonté sur l'écran l'image
du spectre solaire, de manière à en rendre
l'examen commode et sûr. On est arrivé
ainsi à donner au morceau d'arc-en-ciel
étudié une étendue d'une trentaine de
mètres, c'est-à-dire un développement
permettant de saisir les moindres nuances,
les moindres détails, les moindres traits
caractéristiques du spectre.
C'est de cette façon qu'on a fini par re-
marquer que le spectre est invariable-
ment sillonné par une multitude de raies
transversales plus ou moins nettes, bril-
lantes et fines, qu'on a baptisées raies de
Fraunhofer, du nom du savant physi-
cien qui les a découvertes. Malgré l'appa-
rence de leur disposition fortuite, ces
raies sont d'une fixité absolue et consti-
tuent quelque chose comme un caractère
indélébile, au moyen duquel on peut se
rendre un compte parfaitement exact et
certain de la présence ou de l'absence de
telle ou telle substance au foyer lumi-
neux.
L'expérience a démontré, en effet, que
chaque corps porté à l'incandescence se
révélait par des raies spéciales de teintes
et de positions particulières, dont on a
dressé la liste. On est parvenu de la sorte
à créer un procédé d'analyse chimique
d'une délicatesse inouïe, puisqu'il permet
de reconnaître la présence, dans une flam-
me, de moins d'un vingt-millionième de
milligramme de sodium. C'est encore l'ana-
lyse spectrale qui nous fournit le moyen
de savoir quelle est la composition chi-
mique des astres inaccessibles, et d'affir-
mer que l'atmosphère en ignition, du so-
leil par exemple, renferme non seulement
tous les métaux terrestres, mais encore
d'autres métaux et d'autres métalloïdes,
dont on n'a pas encore découvert le moin-
dre échantillon en ce bas monde. L'ana-
lyse spectrale accomplit même, comme 1
en se jouant, d'autres miracles, singuliè-
rement plus extraordinaires et plus stupé-
fiants encore, que je me propose d'expli-
quer, au prochain jour, par le menu.
- Tout cela, diront es superficiels et les
pédants, c'èst de la physique élémentaire.
On n'est pas des écoliers. -
Patience, mes maîtres ! J'avais besoin,
pour éclairer ma lanterne, de rappeler et
de fixer ces souvenirs, qui sont effective-
ment des « truismes ». Mais, à présent,
nous allons faire un pas de plus.
A vue de nez, sans doute, le spectre a
l'air de commencer au rouge pour finir au
violet. Mais ce n'est là qu'une fallacieuse
illusion d'optique. La vérité est que, sans
qu'il y paraisse, il s'étend beaucoup plus
loin de part et d'autre. Sur un assez grand
espace au-delà du violet, là où l'œil ne
discerne plus rien, se dispersent et s'éta-
lent encore un grand nombre de rayons
qui, pour être invisibles, n'en sont pas
moins d'une réalité incontestable et d'un
intérêt égal, sinon même supérieurs aux
rayons visibles. Ce sont les rayons chimi-
ques, dont les révélations sui generis
n'ont rien à envier aux surprises des
rayons simplement lumineux. A défaut de
l'œil, c'est la plaque photographique —
cette « rétine du savant », comme on l'a
appelée d'après une formule aussi sugges-
tive que pittoresque — qui se charge de
recueillir et d'interpréter ces révélations
curieuses. En d'autres termes, c'est dans
cette partie obscure du spectre, c'est dans
l'ultra-violet que s'accomplissent les mer-
veilles de la photographie. Rien que cela !
Mais ce n'est pas tout. On soupçonnait
depuis longtemps qu'il devait symétrique-
ment se passer quelque chose d'analogue
à l'autre bord extrême du spectre, dans
l'infrà-rouge. Là, se devaient également
étaler incognito d'autres rayons invisibles,
doués de pouvoirs occultes et pourvus de
« tuyaux » inédits. Seulement, je le répète,
jusqu'à ces derniers temps, ce n'était là
qu'une hypothèse problématique, mal as-
sise sur des observations incomplètes ou
de vagues et flottantes présomptions.
Mais voici qu'un illustre savant améri-
cain, M. Langley, qui n'a pas hésité à en"
treprendre résolument la reconnaissance
de ces régions inconnues, vient nous ou<
vrir à l'improviste de mirifiques horizons.
Il paraîtrait, à l'en croire (et c'est un mon-
sieur qui ne parle pas à la légère et ne
s'embarque pas sans biscuit), il paraîtrait
que l'infrà-rouge serait encore cent fois
plus intéressant et de plus fructueuse
exploitation que Yultrà-violet.
Par exemple, ici, la photographie n'est
plus d'aucun secours, les rayons infra-
rouges manquant absolument de vertu
photogénique. Pour se reconnaître au mi-
lieu de ces ténèbres inexplorées, il faut
faire appel à un autre auxiliaire. Cet autre
auxiliaire, c'est — on l'a pressenti — l'é-
lectricité, l'omnipotente, omnisciente et
ubiquiste magicienne, la bonne fée à tout
faire des âges nouveaux !
A cet effet, M. le professeur Langley a
dû inventer un instrument nouveau, qu'il
nomme le bolomètre.
C'est — tout simplement — un mince
ruban métallique relié à l'aiguille aimantée
d'un galvanomètre. Ce ruban a respecti-
vement 5 centièmes de millimètre de lar-
geur et 2 millièmes de millimètre d'épais-
seur — comme la plus soyeuse et la plus
frêle des feuilles de papier. Lorsque sur
ce ruban on fait passer tour à tour les dif-
férentes parties du spectre, ce galvano-
mètre, dont la sensibilité est exquise, n'a
plus un instant de repos, et, par ses oscil-
lations, accuse toutes les raies que contient
le spectre, leur intensité, leur largeur, etc.
Un mouvement d'horlogerie actionne tout
à la fois un prisme, dont la révolution fait
successivement sur le ruban toutes les
parties du spectre, et une sérielle plaques
photographiques destinées à enregistrer les
images des déviations de l'aiguille du gal-
vanomètre. On a ainsi, en quelque sorte,
la mesure de l'équivalent électrique de la
lumière.
C'est ainsi que le « bolomètre » montre
avec une précision et une limpidité in-
croyables, dans la région du jaune, entre
les deux raies bien connues du sodium, la
raie du nickel que, seuls, deux ou trois
spectroscopes d'une puissance exception-
nelle avaient jusqu'ici permis d'aperce-
voir.
Mais le plus singulier, c'est que le « bo-
lomètre » parle également dans la région
de l'infrà-rouge ainsi convaincue ipso
facto de n'être pas aussi neutre qu'elle en
a l'air ! Déjà M. Langley y a constaté de
cette façon certains phénomènes inatten-
dus : comme le reste du spectre, l'infrà-
rouge a ses raies caractéristiques et dis,
tinctives, qui avaient échappé aux regardi
des plus perspicaces observateurs et doni
il n'y a plus qu'à trouver l'interprétatiou
vraie.
Nous touchons peut-être au seuil d'une
série de découvertes prodigieusement sur-
prenantes et prodigieusement fécondes. Il
est d'autant plus excusable d'y compter
que le procédé, purement automatique,
perd tout caractère personnel à partir de
sa mise en marche, et présente, par consé-
quent, les meilleures garanties de sincé-
rité, d'exactitude et d'autorité.
L'ultrà-violet nous a déjà donné la
photographie, dont les miracles ne se comp-
tent plus. Que nous donnera l'infrà,
rouge ? Je vous dirai ça dans cinquante
ans, — si j'y suis encore l
Raoul Luce
L'excellente renommée dont jouit le Petit
Châteauneuf-du-Pape provient surtout du fin
bouquet qu'il acquiert en bouteilles. Le pro-
priétaire des Fines-Roches à Châteauneuf-du-
Pape l'expédie pour 135 fr. les 225 litres.
LA QUESTION
, DE
LA SÉDUCTION DES HOMES
UNE LEVÉE DE TABLIERS BLANCS
A L'HORIZON
Comment « elles » succombent. - L'or-
dinaire promesse de mariage des
séducteurs. — Satiété et uni-
formes militaires mêlés.
La question de la séduction des bonnes est
une question quasi-sociale, si grosse, à tous
les points de vue, de conséquences qu'on l'a-
bandonne volontiers aux vaudevillistes, les
gens sérieux se réservant jalousement pour
traiter de l'opportunité ou de la non-orJ>ortu-
nité de la conversion du 3 en 2 it2 0)U sans
augmentation du capital de la dette.
Mais une bonne vient de se rencontrer
(comme dirait Bossuet), qui a cru devoir sou-
mettre brutalement son cas à la première
chambre du tribunal de la Seine.
LE ROMAN BANAL DE Mlle E. LEVY
Voici à peu près de quelle façon la de-
manderesse expose les faits :
« Tout d'abord, je dois dire immédiatement
que j'ai vingt-sept ans bien sonnés. Je me
nomme Eugénie Levy.
» Je suis d'origine juive. Mes parents sont
marchands de bestiaux en Alsace.
» En 1890* un de nos voisins et coreligion-
naires, M. Alexandre Blumsee, nous annonça
que son frère, qui était riche à plusieurs cen-
taines de mille francs et qui habitait Troyes,
venant de perdre sa femme, désirait uns
bonne. Mes parents flairèrent là tout aussitôt
une bonne place où je pourrais honnêtement
m'amasser une petite dot. Aussi me décidèr
rent-ils à quitter le pays et à me rendre à
Troyes. C'est ce que je fis sans aucun ennui,-
car je songeais depuis longtemps à me faire
une position.
» Au bout de quelque temps, mon maître,
M. Blumsée, qui avait quarante-neuf ans, lni
manifesta par des signes non équivoques qu'il
me trouvait à son goût. Je fis semblant de ne
pas comprendre. Je savais, en effet, qu'une
jeune fille qui a fauté et qui n'a pas de dot
pour trouver un épouseur ne se marie jamais.
Autant par sentiment personnel que par
crainte de mes parents, je souhaitais avant
tout une position régulière. Je repoussai donc
énergiquement les avances qui m'étaient fai-
tes jusqu'au jour où mon maltre me dit :
a Mais laissez-vous donc faire, Eugénie.
Après je vous épouserai !. » Il me répéta la
chose si souvent et sur un ton si convaincant,
que je finis par croire ce qu'il me disait et qus
je me laissai séduire. Mais je ne succombe!
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