Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1894-10-26
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 26 octobre 1894 26 octobre 1894
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/04/2013
VINGT-ÛUATRIÊME ANNÉE. — »• 8,32a - - - 1 - LE NUMÉRO OîtQ CsmMBÎt
VENDREDI 26 OCTOBRE 189C -
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PARIS
..lECTEUR POLITIQUE
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Nicolas Àleiandrovilcli
Le monde peut regarder avec tris-
tesse cette agonie de Livadia, en se de-
mandant combien de temps encore du-
rera la lutte émouvante du tsar contre
la mort. La politique n'a plus rien à
faire là-bas ; le règne d'Alexandre III
est fini.
Si notre émotion demeure entière en
pensant à cet empereur qui se déclara
notre ami, nos préoccupations vont fa-
talement, inévitablement, vers l'avenir
qui échappe à sa main mourante. Dès à
présent son œuvre appartient au passé
et est entrée dans l'histoire.
De quoi sera fait demain dans cette
Russie qui tient une si grande place
dans les combinaisons diplomatiques ?
Quelles conséquences pourra amener
l'avènement de Nicolas Alexandrovitch
On le connaît peu et il se connaît peut-
être peu lui-même, n'ayant jamais eu
jusqu'à présent à assumer la respon-
sabilité des décisions. En montant sur
le trône à vingt-six ans, avant d'avoir
pu se préparer à cette lourde tâche, face
à face avec des difficultés intérieures et
extérieures, il déplorera certainement
son sort.
Alexandre III, succédant à un père
broyé par un crime abominable, pou-
vait imposer sa volonté d'autocrate ab-
solu. Il avait, pour légitimer cette poli-
tique, l'appui de la conscience publique
indignée contre les bombes nihilistes.
Dans sa propre famille, il n'avait à
redouter aucune critique. Plus jeunes
que lui, ses frères subissaient l'autorité
de leur ainé, aisément dominés parleur
tendresse qui s'alliait à leur respect.
Ses oncles étaient âgés et peu popu-
laires. Aucun d'eux n'exerçait une ac-
tion sur l'opinion publique. L'empereur
était tout; du consentement général.
Nicolas II sera loin de se trouver dans
la même situation.
Autour de lui il aura des parents
dans la force de l'âge et de l'intelli-
gence, dont les opinions ne sauraient
lui être indifférentes et dont il devra
écouter les avis. Le césarisme person-
nel d'Alexandre III doit disparaître
avec lui.
Puis les luttes de cour que le tsar dé-
daignait ou étouffait vont reprendre. Il
y a des grandes-duchesses jolies, spiri-
tuelles, élégantes, ayant chacune leur
entourage et les ambitions de cet entou-
rage, sans parler de l'antagonisme pro-
bable entre la mère, l'impératrice Dag-
mar, et celle qui va être tsarine, la prin-
cesse Alix de Hesse.
Ce mariage n'était pas désiré par le
tsarévitch, malgré les qualités physi-
ques et morales de cette princesse alle-
mande. Il lui a été imposé par les cir-
constances et par l'empereur.
Son goût le portait vers une union
avec la princesse Hélène, fille du comte
de Paris. Les objections politiques faites
à la réalisation-de ce projet ont pu l'em-
porter sur ses vœux, mais non sur ses
sentiments.
Il sera le mari d'une Allemande, mais
il aimait une Française, de l'affection
haute que l'on porte à celle dont on veut
faire la compagne de sa vie et la mère
de ses enfants.
Cela ne l'empêchait pas, du reste,
s'il faut en croire certaines indiscré-
tions, d'être épris d'une belle Israélite
qui, comme Esther, défendra la cause
des juifs et fera peut-être adoucir les
mesures prises contre eux en Russie.
Il ne faut donc pas s'exagérer les
conséquences de l'arrivée à Sainl-Pé-
tersbourg, comme impératrice, d'une
fille de l'Allemagne ; mais, en tout cas,
on doit se dire que l'accord franco-
russe tient à des causes supérieures aux
sympathies du souverain.
C'est en cherchant son point d'appui
en France, que le gouvernement russe
a pris une place prépondérante dans les
conseils de l'Europe. Aujourd'hui cette-
politique a donné des résultats trop im
portants pour qu'un souverain puisse y
renoncer, même s'il en avait le désir.
La Russie a des points de contact dif-
ficiles avec la triple alliance. Dans les
Balkans l'Autriche-Hongrie la combat,
et dans lamer Baltique l'empire alle-
mand la menace.
Nous avons donné aux Russes un ap-
pui financier qui leur permet le déve-
loppement do leurs immenses ressources
naturelles. En échange, ils nous ont ap-
porté la sécurité, puisqu'ils ont muselé
'ambition prussienne par l'éventualité
td'tine attaque simultanée à l'Est et à
UOuest.
Au lieu d'être à la remorque d'événe-
ments dirigés de Berlin, la diplomatie
russe sait maintenant combien elle pèse
dans les conciliabules des chancelleries.
Elle ne commettra pas la folie d'abdiquer
te rôle d'arbitre paciifque ^ui lui-per-
met de travailler tranquillement à se
fortifier pour poursuivre ultérieurement
ses destinées.
La guerre de la Chine et du Japon
peut précipiter les solutions en Extrême-
Orient, et la mort imminente du souve-
rain de l'Afghanistan est de nature à
mettre les Russes et les Anglais en pré-
sence en Asie, puisque ce pays sert de
tampon entre eux.
Dans de telles conditions, Nicolas II,
n'eût-il pas au cœur les mêmes sympa-
thies que son père, ne déraillera pas de
la voie sur laquelle la Russie est enga-
gée depuis Cronstadt.
Il sait que l'écho retentit encore des
ovations faites aux marins français en
Russie et aux marins russes en France.
En ceignant la couronne, il trouvera
notre amitié dans la succession de son
père et il acceptera l'héritage.
D'avance, la France est prête à re-
porter sur lui l'affection qu'elle avait
vouée à Alexandre III, et, dans son
deuil, le fils sera certainement impres-
sionné par les larmes sincères que le
peuple français donnera à son grand et
noble père, notre illustre et infortuné
ami le tsar.
HsXN: --
LE SUCCESSEUR DE M. FAVETTE
Ainsi que le XIXe Siècle l'a déjà annoncé,
M. Louis Favette, cet ancien secrétaire de M.
Thévenet qui s'est fait payer sur différents
budgets, en moins de 18 mois, plus de 20.000
francs de frais de voiture, va quitter le mi-
nistère du commerce, où il s'était fait oc-
troyer la direction des services de l'enseigne-
ment technique.
Hier à la commission du budget on a dis-
cuté la réorganisation de l'administration
centrale de ce ministère.
M. Lourties, qui demandait un crédit de
16,000 francs pour cette réorganisation, n'a pu
obtenir que 10,000 francs, mais cela n'empê-
chera pas la réforme projetée de s'accom-
plir.
Le ministère du commerce comptera quatre
directions : le commerce intérieur, le com-
merce extérieur, l'office du travail et la direc-
tion des œuvres d'assistance, de prévoyance
et de mutualité.
A,cette dernière direction seront concentrés
les services des syndicats professionnels, des
associations ouvrières, des secours mutuels,
l'enseignement technique et les expositions
industrielles ou ouvrières.
C'est M. Hector Depasse, ancien conseiller
municipal de Paris, ancien chef de cabinet
de M. Spuller, qui va être nommé à la tête de
cette direction.
La disparition de M. Favette n'empêchera
pas la Chambre de s'occuper de son cas, lors
de la discussion prochaine du rapport de
M. Bozérian dont nous avons eu à nous oc-
cuper à plusieurs reprises.
RÉVOCATION D'UN COMMISSAIRE
On affirme que M. Lépine, préfet de police,
aurait décidé de révoquer M. Fédée, commis-
saire de la troisième brigade des recherches,
bien connu pour ses arrestations d'anarchis-
tes.
Cette mesure serait prise à la. suite des
faits suivants : Contrairement à l'avis du
préfet, M. Fédée aurait fait sortir de prison
un individu condamné à cinq ans de prison
afin de l'employer comme indicateur et, na-
turellement, le libéré profita de l'occasion
pour prendre aussitôt la fuite et ne rendre
aucun service à M. Fédée.
L'histoire a été révélé hier au préfet de po-
lice, qui a décidé de sévir immédiatement.
COMMENT ON PROTÈGE LES MINEURS
Voici un état de frais de justice particuliè-
rement intéressant, qui nous est signalé par
un de nos abonnés : - -
En juin dernier, une brave femme meurt à
Lantosque (Alpes-Maritimes), après avoir lé-
gué sa fortune à un mineur.
Le juge de paix du canton d'Utelle vient
faire l'inventaire du mobilier, composant tout
l'avoir de la défqnte; et l'estime 66 francs.
Mais les frais de cette petite promenade
s'élevaient à. 43 francs
La mère de l'enfant a dû lui faire
nommer un subrogé-tuteur et se
faire autoriser par le conseil de
famille à accepter la succession
sous bénéfice d'inventaire, coût. 24 —
Elle a dû déclarer cette accepta-
tion au greffe du tribunal civil de
Nice. 20 —
Total. 87 francs
Heureux mineur 1
«MMBHJU * HU HW ————
UN PARRICIDE- A SAINT-OUEN
La population de Saint-Ouen a été pénible-
ment impressionnée, hier, par un terrible
drame qui s'est passé sur la place de la Mai-
rie, à huit heures du soir.
Un journalier, Jules Fousse, âgé de 17 ans,
demeurant 28, rue Anselme, se disputait avec
sa mère sur la place de la Mairie. La discus-
sion devint très vive et le jeune homme pa-
rut à plusieurs reprises sur le point de ru-
doyer sa mère. -
Tout à coup on le vit presser le ressort
d'une canne à épée, et se jeter sur la pauvre
femme qu'il frappa de son arme. Puis, il s'en-
fonça la lame dans la poitrine et tomba en-
sanglantè sur le soi.
On se hâta de soigner Mme veuve Foass,
dont la blessure est heureusement légère Son
fils a été transporté dans un état alarmant, à
l'hôpital Bichat et consigné à la disposition
du commissaire de police de Saint-Ouen,
CONDAMNATION A MORT
Perpignan, 24 octobre
La cour d'assises des Pyrénées-Orientales a
condamné à mort le nommé Agusty Joseph.
âgé de trente ans, qui, à Ponteilla près Per-
pignan, tua son père à coups de fourche en
ter et de barre en bois, lui écrasant horrible-
ment la tête, pour ne pas avoir à lui payer
une pension annuelle de 400 francs en échange
des biens que son père lui avait donnés.
Agusty s'était ensuite tiré quatre balles
dans la tète, mais il guérit rapiaqment,
Agusty sera exécuté à Perpignan. - 1
Les jurés ôht signé un recours en grâce. -
GRIEFS DE « CRÉTINS »
TAPAGE A L'ÉCOLE DE GRIGNON
Une promotion consignés. - Conspues
l'adjudant! — Les « Fagots B et l'exer-
cice militaire. — Agriculture et
- militarisme
A l'Ecole nationale d'agriculture de Gri-
gnon, il vient de se passer un petit incident
qui, pour être presque aplani, n'en vaut pas
moins la peine d'être raconté.
L'Ecole de Grignon, on la connait du moins
de réputation. Elle est située près de la gare
de Plaisir-Grignon — celle, soit dit entre pa-
renthèses, où les voyageurs manquent le plus
souvent leur train, car c'est la seule de la li-
gne de l'Ouest dans laquelle il n'y ait pas
d'horloge. — On l'a installée dans un superbe
parc de 300 hectares emmuraillés, le parc de
Grignon dont Charles X avait fait un déli-
cieux pied-à-terre, venant s'y installer parfois
en un coquet pavillon Louis XIII agréable-
ment situé, comme on dit dans les romans de
Feuillet, sur le versant d'une riante colline.
Il y a dans le parc des bois superbes, des
avenues semblables à celles de Versailles, des
prés, de l'eau, une ferme, ce qu'il faut enfin
pour que des agriculteurs futurs puissent y ap-
prendre tout ce qui concernera leur état.
De toutes les écoles agricoles du gouverne-
ment, celle de Grignon est la plus prisée,
celle dont le diplôme qu'on y peut obtenir a
le plus de poids aussi n'y entre-t-on pas faci-
lement : ce ne sont que les « bons numéros »
parmi les candidats à l'admission dans les
établissements d'enseignement agricole qui
en franchissent la porte.
Tous, pour la plupart, sont fils de £ ecrttemen
campagnards fortunés, dès jeunes gens en ré-
sume instruits et éduqués. Les uns sont in-
ternes de l'école ; les autres, externes, n'assis-
tent qu'aux cours et habitent Grignon dans
des pensions et des hôtels, dont le -yillage qui
tire ses revenus de cette petite industrie, est
plein.
LES ÉTUDES
La vie des élèves de Grignon n'est pas dure.
Ils se lèvent à cinq heures et demie du ma-
tin, vont à l'étude jusqu'à sept heures et de-
mie, déjeunent jusqu'à Tluit heures, assistent
aux cours jusqu'à onze heures, font à ce mo-
ment leur deuxième déjeuner, assistent à nou-
veau aux différentes leçons jusqu'à six heu-
res, dînent, reprennent l'étude jusqu'à sept
heures et demie, se récréent ensuite jusqu'à
neuf heures et vont se coucher.
Les études à Grignon ne se poursuivent
pas, disons-le en regara de cet ordre de tra-
vail d'aspect chargé,dans de sombres salles de
travail. C'est en plein air, la plupart, qu'elles
se font. Les élèves voient, surveillent des
labours, des moissons, les soins à donner aux
animaux domestiques, les cultures, la taille
des arbres fruitiers. L'un est à tour de rôle
chef du potager, de la vacherie, de la porche-
rie, des bergeries, des basses-cours, de la lai-
terie, du rucher, etc., etc. Rien de rebutant
dans ces études, qui sont ordonnées de façon
à ce que chacun ait sa part de responsabilité
dans les différents services de l'école et par
conséquent de façon aussi à ce qu'un amour-
propre de réussir soit mis en jeu.
Entre temps, les élèves peuvent se récréer
de la façon la plus libérale. Ils ont journaux,
bibliothèque, salle de billard, d'escrime, peu-
vent se promener à gogo, la cigarette ou la
pipe aux lèvres, dans le merveilleux parc, re-
cevoir des visiteurs, faire ce qu'ils * veulent
en un mot dans les limites de la discipline
courtoise que leur applique d'une façon quasi
paternelle le directeur de l'école, M. Philip-
par, un ancien élève de la maison, bon
comme du pain et savant avec ça, que les
deux cents jeunes gens qu'il a sous ses ordres
adorent comme un seul homme.
L'EXERCICE MILITAIRE
Eh bien, de quoi ont-ils à se plaindre, allez-
vous nous dire, ces jeunes gens si heureux ?
Ah ! voilà ! En outre de leurs études, on
leur inflige deux fois par semaine, le mercredi
et le samedi, de deux heures à quatre heures,
un exercice militaire que dirige un adjudant
du 5e génie et trois caporaux du même régi-
ment en garnison à Versailles.
Les élèves de Grignon,comme les étudiants,
comme les normaliens, ne font, d'après l'arti-
cle 23 de la loi militaire, qu'un an de service,
mais, pour les préparer aux rudesses de la vie
de soldat, pendant quatre heures hebdomadai-
rement on les exerce dans le but de les rendre
prêts à faire de bons militaires quand ils de-
vront payer leur dette à la patie.
Ni étudiants, ni normaliens, ni élèves des
autres écoles supérieures de l'Etat ne sont as-
treints à cette obligation.
Ils ne font qu'un an de service militaire en
tout et pour tout, sans aucune préparation.
De là, un premier mécontentement assez jus-
tifié de la part des étudiants de Grignon. *
Mais ils ont un autre grief. L'admission à
leur école ayant lieu sans limite d'âge, il se
trouve que de leurs camarades qui ont ac-
compli leur service militaire ne sont plus
astreints aux exercices qu'on leur impose
et ont de plus qu'eux quatre heures par se-
maine à consacrer à l'etude.
Or, à Grignon on est zélé, on ne perd pas
- de temps; quatre heures par semaines sont
précieuses à ce point qu'elles ont une sé-
rieuse influence sur la « cote » que rempor-
tent les dispensés de tout exercice de soldat
à leur sortie de l'école. Et jugez de l'impor-
tance d'un bon classement dans les concours
de fin d'études : les quatre premiers reçoi-
vent une médaille, des félicitations ministé-
rielles et, ce qui a presque autant de prix,
la faveur gratuite d'aller, aux frais du gou-
vernement. passer deux ans dans un paya
à leur choix, étudier l'agriculture locale sur
place.
Volià déjà de quoi aigrir les élèves de GrI.
gnan contre une petite anomalÏe\du règlement
qui les règit; mais Il y a plus, ces exercices
militaires qui leur sont imposés; ils le3 doi-
vent accomplir militairement, sous la direc-
tion de l'adjudant vertiaillais. M. Larocb.
qui a la main un peu lourde, qui, dans le
parc de Grignon, se croit encore dans la ca.
serne du 5e génie, et voilà d'où est né l'ln.
cident qui vient de se produire.
LE CHAHUT
Mercredi dernier, les élèves des trois pro.
motions de l'école les crétins (Ire .année), les
abtulis (2e année) et les idiots (3e année),
manœuvraient dans la grande cour de réta-
blissement, chassepot sur l'épaule, baïonnette
au cCté, revêtus de l'uniforme de Grignon :
casquette ornée de lauriers d'argent et petite
blouse bieue.
Ce jour-là, l'adjudant Laroche n'avait que
deux caporaux de son régiment comme auxi-
liaires et c'était un caporal du 1er de génie,
M. Bruneau, qui remplaçait son camarade
absent, quand le caporal « à l'extraordinaire It
commanda un mouvement d'une manière au-
tre que cela se fait d'habitude dans le 5e.
— C'est comme ça que vous commandez un
demi-tour, interrompit l'adjudant Laroche,
en voilà des façons de commander 1
- — Mon Dieu! mon .lieutenant» répondit le
caporal, au-an le cornaiandè ainsi. < -
— D'abord je ne suis pas lieutenant, mais
adjudant, et ensuite ce n'est pas le 1er qui
donnera des leçons au 5e, et, pour vous
l'apprendre, vous me ferez quatre jours de
salle, de police,'et maintenant, rompez!
Cela fut dit à haute voix derfôc&la promo-
tion les crétins que commandait le caporal
Bruneau.
Il y eut assitôt devant cette sévérité et cet
affront une révolte dans l'âme juvénile des
trente-cinq jeunes gens qui composaient le
petit détachement ; on se consulta de l'œil et
subitement ce même cri : « Conspuez l'adju-
dant ! conspuez l'adjudant 1 » sortit de toutes
les poitrines.
Le sous-officier pâlit un peu, esquissa une
menace, mais elle fut vaine; les choses se cor-
sèrent, des huées partirent et se continuèrent
vigoureusement ; ce fut un vrai désordre, des
clameurs devant lesquelles l'adjudant battit en
retraite, allant prévenir le directeur qui arriva
et fit cesser le tapage, du moins dans l'en-
ceinte de l'école.
Mais, les exercices finis, les externes étaient
libres et le détachement des militaires-ins-
tructeurs devait s'en retourner à la gare. Les
externes firent la conduite à l'adjudant de
façon peu flatteuse pour lui, en jeunes gens
impitoyables et au gosier vigoureux.
L'adjudant Larochè rendit compte aussitôt
des faits à son colonel, M. Delannes, qui de-
manda à M. Philippar de sévir contre les
turbulents.
C'était déjà fait. Aussitôt après le petit
scandale, le directeur avait fait afficher au
lieu ordinaire des ordres du jour adressés aux
élèves, celui-ci :
ORDRE DU JOUR
A la fin des exercices militaires qui ont eu lieu
ce soir, les élèves de première année d'études qui
y ient part ont prôftttlMks -cris et des paroles
grossières à l'adresse du chef de détachement chargé
du commandement.
Oubliant les égards et le respect qui sont dus à
l'armée française, ils ont commis un acte très grave
d'indiscipline.
En conséquence, les élèves dont les noms suivent
sont punis d'une réprimande prononcée par le
conseil d'ordre de l'Ecole et consignés j u?qa'au di-
manche 18 novembre inclusivement, y compris les
congés de la Toussaint.
Ce sont MM. :
Berger, Bœuf, Baignes, Bruslon, Brutus, Cas-
tel, Châtaignier, Coustignon, Goyola, Coze, Dard,
Delplangne, Dulac, Dumas, Duval, Gadaut, Gais-
set, Ganot, Genêt, Goinard, Granday, Le Bihau,
Lefort, LeXrânc, Lç Maire, Le Noach, Marteau,
Mathieu, Nicot, Olivier, Pasquier, Raisin, Roussy,
Thouxet et Villafd.
Le directeur rappelle aux élèves que pendant les
manœuvres ils sont absolument soumis à la dis-
cipline militaire et que, par conséquent, toute in-
fraction à cette discipline sera punie avec la der-
nière sévérité.
Trente jours de consigne par conséquent,
c'est-à-dire pour les/internes la privation de
toute sortie et pour les externés l'obligation
de se présenter à- trois appels les dimanches
et les jours de congé de la Toussaint, plus une
réprimande du conseil de l'ordre — et il en
faut trois pour être exclu de l'école — la pu-
nition est sévère, en le voit.
Le colonel du régiment, en apprenant ces
faits, avait supprimé l'exercice de samedi,
craignant de nouveaux troubles. Ce n'est
qu'hier qu'il s'est résolu à 1& rétablir et à ren-
voyer à Grignon l'adjudant Laroche et les
trois caporaux, moins toutefois le malheu-
reux Bruneau, dont la punition a fait des pe-
tits et qui, sur la planche de la salle de po-
lice, fait des comparaisons mélancoliques
entre les commandements du 1er génie et
deux du 5e.
Tout s'est bien passé, les élèves de la 1re
année, les crétins, se sont rendus aux bonnes
raisons que leur a données M. Philippar,
qu'ils surnomment Ruta Baga, à cause d'un
ouvrage de ce nom dont il est l'auteur et qui
traite d'un choux à vaches dont ces précieux
animaux lui doivent la découverte, et hier les
exercices militaires se sont poursuivis dans le
plus grand ordre, si bien que l'adjudant La-
roche, très penaud au fond, a demandé au
directeur de Grignon de lever la punition qui
frappe les pauvres créiins.
M. Philippar n'a pas eu l'air de vouloir
cela tout de suite, mais en réalité il ne de-
mandait pas mieux ; et un peu du bout des
lèvres, mais de bon cœur, il a laissé entendre
que les espiègles reverraient leurs parents
éplorés dimanche prochain.
LA SANTE DU TSAR
[Bien que les nouvelles de Livadia soient
toujours mauvaises, le mieux constaté avant-
hier dans l'état de santé du tsar s'est main-
tenu. L'auguste malade a pu dormir quel-
ques heures la nuit dernière. Au sujet du
mariage du tsarévitch, on ne sait rien de
précis. Les dépêches sont des plus contradic-
toires.] -
Saint-Pétersbourg, 24 octobre,
12 h. 15 matin.
Bulletin du 23 octobre, à 7 heures du
soir: -
« Dans le courant de la journée, le malade
a éprouvé un peu le besoin de dormir et a
montré dç légers phénomènes de contractions
spasmodiques. L'appétit est meilleur qu'hier. \)
Saint-Pétersbourg, 24 octobre.
Bulletin du 24 octobre, dix heures du ma-
tin ;
« L'empereur a dormi quelques heures cette
Duit; on ne remarque pas de somnolence ; le
malade a de l'appétit. »
Londres, 24 octobre.
Le correspondant à Livadia du British mé-
dical Journal télégraphie cette après-midi les
renseignements suivants :
Des ponctions ont été faites aujourd'hui au
tsar dans les jambes pour réduire l'œdème.
Le malade a éprouvé un grand soulagement
Le correspondant du journal médical an-
glais ajoute qu'au moment où U télégraphiait,
eu se préparait à effectuer l'opération de la
thoracoceutése pour enlever l'eau et les ma-
tières séreuses qui se trouvaient dans la ca-
vité thoracique On était convaincu que te
tsar s'en trouverait beaucoup soulagé. L'ac-
tion du cœur redeviendrait plus libre et la
respiration plus Caclle.
Un soulagement momentané a été obtenu
par des inhalations d'oxygène qui ont fortifié
l'action du cœur.
L'empereur a gardé sa pleine connaissance
pendant longtemps. 11 est moins abattu. L'a-
mélioration momentanée obtenue lui a rendu
ourage, mais ta maladie n'a p%e diminué,
ou du moins bien peu.
Londres, 24 octobre.
On assure que si l'état du tsar ne s'améliore
pas, les lêtes préparées à Sandringhaœ en
l'honneur de l'anniversaire du prince de Gal-
les seront ajournées.
DOUBLE ASSASSINA T
Basas, 2S octobre.
Les époux Dumertq, vieillards de 60 ans, suber-
pistes et marchands de journaux à Bassanne, ont
été trouvès ce matin assassinés dans leur cham-
bré. - -
Le mari était mort, mais la foiew alqwait en-
core; èo^ijat est désçspérëi i
Le'xéî à été le mobile du srtme»
Tablettes du Progrès
LE SIROÎ> DE CH3&AL ..,
Point n'est besoin d'être maître passé
en fait de pratique médicale pour com-
prendre combien il est important, avant
d'administrer à un malade le vaccin anti-
diphtérique du docteur Roux, de savoir si
l'on est vraiment en présence d'un cas de
diphtérie authentique. -
Or, à cet égard, l'examen clinique le
plus attentif et le plus perspicace reste
parfois stérile, la simultanéité des symp-
tômes classiques eux-mêmes, tels que l'in-
flammation de la gorge, l'engorgement
ganglionnaire, la fièvre, l'apparition de
Eoints blancs et même de fausses mem-
ranes sur les muqueuses, etc., ne suffi-
sant pas toujours pour caractériser défini-
nitivement l'insidieux fléau. Seul, la con-
tre-épreuve bactériologique, en décelant la
présence dans lesdites fausses membra-
nes ou dans les exsudats du terrible ba-
cille de Loeffler, reconnu pour être l'agent
efficient et responsable de la diphtérie,
peut fixer le diagnostic d'une manière po-
sitive et rigoureuse, et cela dans un temps
très court, variant entre dix-huit et vingt-
quatre heures.
L analyse bactériologique s'impose donc
à tout médecin soucieux d'acquérir la
preuve expérimentale que son examen
clinique-était juste et ses présomptions
fondées.
Malheureusement, l'analyse bactériolo-
gique, dont la nécessité n'est pas discuta-
ble, suppose un outillage spécial, délicat
et compliqué, en même temps qu'elle exige
un temps dont, en .général, ne peuvent
guère disposer les médecins absorbés par
les exigences de la clientèle, et dont la
plupart, d'ailleurs, n'ont pas eu l'occasion
de s'initier aux subtilités de la méthode
pastorienne.
C'est là, en quelque sorte, besogne de
spécialistes — une besogne dont on aurait
mauvaise grâce, cependant, à prétendre
charger exclusivement M. Roux et ses
collaborateurs, lesquels ont assez à faire
avec la préparation du vaccin.
Aussi, pour combler cette lacune dont
les inconvénients sont de toute évidence,
la Presse médicale (une excellente revue
qui se publie chez l'éditeur G. Carré,sous le
patronage de MM. les docteurs Brun, Lan-
douzy, Roger, Letulle, Ollivier, Bonnaire,
Lermoyez et de Lavarenne) a-t-elle eu
l'heureuse idée d'organiser un service
gratuit de diagnostic bactériologique de
la diphtérie et de créer dans ce bu t un la-
boratoire spécial.
D'ici à peu de jours, il n'y aura qu'à
prendre l'un de ces tubes de culture con-
tenant, avec le « bouillon » et les menus
instruments traditionnels, toutes les ins-
tructions nécessaires, comme on en trouve
dans toutes les pharmacies, à y ensemen-
cer les choses suspectes recueillies dans
la gorge du malade et à l'expédier aux
bureaux de la Presse nédicale"J 3, rue
Racine, ou des microbiologistes de profes-
sion feront gratuitement l'expérience re-
quise, dont ils adresseront dans les vingt-
quatre heures les résultats à l'intéressé.
Et si lesdits microbiologistes ont conclu
à la genèse bacillaire de la maladie, s'ils
ont, en d'autres termes, trouvé le microbe
diphtérique en train de pulluler dans les
tubes de culture qu'on leur aura soumis,
l'intéressé n'a plus qu'une chose à faire :
se retourner vers M. Roux et se procurer
d'urgence le sérum sauveur.
Le malheur est que M. Roux on man-
que et que, malgré ses efforts infatigables
et des prodiges de bonne volonté, il ne
sera pas en mesure, AVANT DEUX MOIS ET
DEMI, de satisfaire aux demandes, toutes
plus pressantes les unes que- les autres,
qui pleuvent à verse sur lui des quatre
points cardinaux. Le meilleur est donc
encore, jusqu'à ce que l'an de grâce 1894
ait passé la main a l'an (non moins de
grâce) 1895, de s'arranger de façon à ne
« piger » ni le croup ni l'angine couen-
neuse.
Les profanes s'étonneront peut-être
qu'il faille tant de temps pour préparer un
médicament qui n'est, en fin de compte,
qu'un produit chimique. Je pourrais ré-
pondre qu'il en faut encore bien davan-
tage pour tanner un morceau de cuir; mais
je préfère fournir quelques explications
techniques, lesquelles, comme on dit
vulgairement, ne seront pas « de luxe ».
On sait que le vaccin antidiphtérique
se fabrique dans un récipient vivant,
c'est-à-dire dans le corps d'un cheval,
d'un vrai cheval en chair et en os, préala-
blement immunisé contre la diphtérie. On
avait essayé, avant de s'arrêter définitive-
ment au cheval, de plusieurs autres ani-
maux. Mais force a été de revenir au che-
val, sacré cette fois pour de bon et sans
appel
La plus nobre conquête
Que l'homme ait jamais faite.
comme étant le seul intermédiaire capable
de fournir une grande quantité de sang (2
litres par mois, 24 ou 25 litres par an) sans
en être incommodé, et dont, en outre, le
sérum en injections ne détermine pas d'ac-
cidents, tels que phlegmons, abcès, etc.
Or, le cheval n'est pas réfractaire par
nature à la diphtérie. Il faut donc le ren-
dre tel par artifice. Gomment ? Oh ! c'est
bien simple : en lui faisant prendre du
« poil de la bête a - si je répète à tout
boufde champ cette formule triviale, c'est
qu'elle a le mérite d'être supérieusement
claire et suggestive — c'est-à-dire en lui
inoculant, à doses fractionnées, le virus
diphtérique jusqu'à ce qu'il ait acquis
ainsi, par une sorte de mithridatisme,
l'accoutumance et l'immunité.
Voici, au surplus, comment on pro-
cède :
On prend une parcelle d'une fausse
membrane râclée dans la gorge d'un en-
fant notoirement atteint de diphtérie, et
on l'ensemence dans un bouillon de cul-
ture, c'est à dire dans un liquide nourri-
cier où le bacille de Lœffler puisse vivre
et se développer à l'aise. Vingt-quatre
heures après, U bouillen est envahi ar
un grouillement de colonies microbiennea,
ui n'ont rien de plus pressé que de dis-
tiller à jet continu leurs redoutables
toxines. Ces toxines — constituant le vé-
ritable poison diphtérique, le virus par
excellence — on les recueille soigneuse-
ment au sein du bouillon filtré et on les
dépose, mélangées à une solution alcaline
peptonisée, dans une étuve chauffée à 37
degrés. Il faut qu'elles restent là un mois.'
après quoi on en contrôle la virulence en
partant de ce principe qu'une bonne toxi-
ne doit, à la dose de 1/10« de centimètre
cube, tuer en 48 heures un cochon d'Inde
pesant une livre.
C'est cette toxine qui va servir à vacci-
ner le cheval « sérogene ».
On n'inocule pas cependant, au moins
au début, la toxine pure : ce serait jouer
trop gros jeu. On a soin de l'atténuer en
l'additionnant d'iode (liqueur de Gram) au
tiers. Puis, on commence les inoculations
avec une sage lenteur et en augmentant
graduellement les doses. On en arrive
ainsi à injecter la toxine à la dose d'un
centimètre cube tous les cinq jours, puis
de deux centimètres cubes tous les cinq,
jours, puis de cinq centimètres cubes tous
les deux jours, de manière à saturer litté-
ralement l'animal de toxine atténuée ou
même de toxine pure.
La toxine, dont la même quantité ad-
ministrée d'emblée et d'un coup aurait in-
failliblement tué le cheval le plus vigou-
reux en quelques heures, s'est transmuée
en antitoxine. Que s'est-il passé ? La
toxine a-t-elle été modifiée dans sa compo-
sition chimique par l'action des tissus
et des liquides vivants en présence des-
quels elle s'est trouvée? A-t-elle successi-
vement stimulé les cellules défensives de
l'organisme en les obligeant, en vertu d'un
processus mystérieux, à sécréter l'anti-
dote nécessaire à sa propre neutralisa-
tion ? Nul n'en sait rien encore. Mais ce
qu'il y a de certain, c'est non seulement
que le cheval est désormais vacciné, mais
encore que son sang a acquis la vertu vatf-
cinatrice. - -
Lorsqu on le juge immunisé a point; u*
n'y a plus qu'à lui ouvrir la veine jugu- ;
laire et à recueillir le sang, qui gicle danst.
un flacon stérilisé. On décante, on laisser
coaguler, le sérum se sépare du cruor, e
il n'y a plus qu'à le soutirer et à le mettre!
en tubes. Le cheval ne s'en porte pas plus'
mal, mais les « croupiers » (que le « Vieux:
Ponte » me pardonne 1) vont s'en porter;
infiniment mieux.
On peut aussi dessécher le sérum dans:
le vide, de façon à le transformer en cris-
taux faciles à conserver à perte de vue et
à expédier au bout du monde où, pour les
employer, il n'y aura plus qu'à les dissou-
dre dans six fois leur poids d'eau bouillie:
Mais toute cette série d'opérations ne
s'accomplit pas en un clin d'œil : un moisJ
pour la concentration de la toxine in vitro,
six semaines pour l'immunisation du che-
val, cela fait bien, si je ne m'abuse, queK
que chose comme deux mois et demi.
Voilà pourquoi d'ici à la Noël, même en
mettant les choses au mieux, les diphté-
riques trop pressés risquent de demeurer.
soumis à l'ancien régime. Nul ne saurait
aller en ce bas monde plus vite que les
violons 1 -
Raoul Luoet.
A MADAGASCAR
Dépêche secrète
Le gouvernement a reçu mardi, dans la @
nuit, une dépêche de M. Le Myre de Vilers,
député de la Gochinchine. ;
Notre envoyé extraordinaire auprès de la
reine des Hovas est arrivé à Tananarive le
13 octobre, a expédié le 20 cette dépêche quSfv
a été portée par l'aviso Papin de Tamatavè à
Port-Louis (île Maurice) d'où elle a été trans-
mise en France par câble.
Cette dépêche qui est fort longue a été tra-
duite hier matin en présence de MM. Ha no-
taux, ministre dea affaires étrangères, et Del-
cassé, ministre -des colonies.
Communiqué ensuite au président de la Ré..
publique et au président du conseil, ce télé*
gramme devait être transmis dans l'après-
midi, à trois heures, au ministère des affaires
étrangères. Mais à cette heure-là le gouver-
nement avait changé d'avis ; le texte de la d&
pêche o&trestà secret. ,
Il nous semble que cette façon de procéder
a beaucoup plus d inconvénients que d'avan-
tages. En effet, elle laisse supposer une foule
de choses qu'une communication officielle
n'aurait pas permise. C'est ainsi que dans lesr
couloirs de la Chambre on a prétendu que M.
Le Myre de Vilers annonçait qu'il avait
échoue dans sa mission; on annonçait encore
que le gouvernement soumettrait la question
aujourd'hui au Parlement, plus une demandé
de crédits extraordinaires pour faire une ex-
pédition à Madagascar, et bien d'autres racon-
tars dont nous ne voulons pas nous faire
l'écho, mais qui ressemblent beaucoup à ceux
qui ont compromis tant de fois nos opérations
au Tonkin et en Tunisie.
Quoi qu'il en soit et en attendant que le mÉ-
nistère comprenne qu'il est imprudent et sou-
vent dangereux de garder pour soi certaines
dépêches dont la connaissance peut être
utile à certaines personnes, nous pouvons an-
noncer qu'une réponse immédiate a été trans-
mise à M. Le Myre de Vilers. Le Papin at-
tendait du reste de nouvelles instructions du
gouvernement français pour les porter à
notre envoyé extraordinaire.
l'ACCAPAREMENT DU SUCRE
Nous recevons la lettre suivante :
Monsieur le directeur,
J'ai lu avec joie votre article relatif à l'aCe
caparement du sucre par ces millionnairet
effrontés que sont les raffineurs. Il est scan-
daleux qu au siècle où nous vivons et soua
une République (pas assez république, hélas 1)
ce vol organisé ne soit combattu par aucun
député.
On gémit sans cesse sur la difficulté d'équi-
librer le budget. La Chambre a cependant
trois éléments qui lui permettraient de faire
aisément face à toutes les dépenses :
le Supprimer les raffineurs; 20 supprimer
les rectificateurs d'alcool, en donnant à l'Etat
le monopole de leur industrie; 30 supprimer
les bouilleurs de cru. -, -
Mais la Chambre est trop molle pour s'atta-
quer à eu gros capitalistes.
Ajréei. etc. -
Une tiétime des raffineurs,
Va leeUurs nsidu. - Merci de votre très iiftfr
VENANTE ttttro itir l'Egypte. DéBirOM TOU» WIR.
VENDREDI 26 OCTOBRE 189C -
":' MMCTtOMETMMMSTMTMM
142, Rue Montmartré
PARIS
..lECTEUR POLITIQUE
A.-EDOUARD PORTAUS
AHeMe télégraphique : XIX. SIÈOLB—PABI»
Téléphone : 30.289 bi..
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Ch. MM. LAGRANGB, CBRP et fil
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Pwie 1M> Iw, 6f.; Sh là, fi L; fe il, 20F
Départements — 7 f.; - 12 f.; - 241
Union Postale — 9f. - 161; - 32 i
Les Abonnements sont reçus sans frais claM.
tout les Bureaux de Poste.
Nicolas Àleiandrovilcli
Le monde peut regarder avec tris-
tesse cette agonie de Livadia, en se de-
mandant combien de temps encore du-
rera la lutte émouvante du tsar contre
la mort. La politique n'a plus rien à
faire là-bas ; le règne d'Alexandre III
est fini.
Si notre émotion demeure entière en
pensant à cet empereur qui se déclara
notre ami, nos préoccupations vont fa-
talement, inévitablement, vers l'avenir
qui échappe à sa main mourante. Dès à
présent son œuvre appartient au passé
et est entrée dans l'histoire.
De quoi sera fait demain dans cette
Russie qui tient une si grande place
dans les combinaisons diplomatiques ?
Quelles conséquences pourra amener
l'avènement de Nicolas Alexandrovitch
On le connaît peu et il se connaît peut-
être peu lui-même, n'ayant jamais eu
jusqu'à présent à assumer la respon-
sabilité des décisions. En montant sur
le trône à vingt-six ans, avant d'avoir
pu se préparer à cette lourde tâche, face
à face avec des difficultés intérieures et
extérieures, il déplorera certainement
son sort.
Alexandre III, succédant à un père
broyé par un crime abominable, pou-
vait imposer sa volonté d'autocrate ab-
solu. Il avait, pour légitimer cette poli-
tique, l'appui de la conscience publique
indignée contre les bombes nihilistes.
Dans sa propre famille, il n'avait à
redouter aucune critique. Plus jeunes
que lui, ses frères subissaient l'autorité
de leur ainé, aisément dominés parleur
tendresse qui s'alliait à leur respect.
Ses oncles étaient âgés et peu popu-
laires. Aucun d'eux n'exerçait une ac-
tion sur l'opinion publique. L'empereur
était tout; du consentement général.
Nicolas II sera loin de se trouver dans
la même situation.
Autour de lui il aura des parents
dans la force de l'âge et de l'intelli-
gence, dont les opinions ne sauraient
lui être indifférentes et dont il devra
écouter les avis. Le césarisme person-
nel d'Alexandre III doit disparaître
avec lui.
Puis les luttes de cour que le tsar dé-
daignait ou étouffait vont reprendre. Il
y a des grandes-duchesses jolies, spiri-
tuelles, élégantes, ayant chacune leur
entourage et les ambitions de cet entou-
rage, sans parler de l'antagonisme pro-
bable entre la mère, l'impératrice Dag-
mar, et celle qui va être tsarine, la prin-
cesse Alix de Hesse.
Ce mariage n'était pas désiré par le
tsarévitch, malgré les qualités physi-
ques et morales de cette princesse alle-
mande. Il lui a été imposé par les cir-
constances et par l'empereur.
Son goût le portait vers une union
avec la princesse Hélène, fille du comte
de Paris. Les objections politiques faites
à la réalisation-de ce projet ont pu l'em-
porter sur ses vœux, mais non sur ses
sentiments.
Il sera le mari d'une Allemande, mais
il aimait une Française, de l'affection
haute que l'on porte à celle dont on veut
faire la compagne de sa vie et la mère
de ses enfants.
Cela ne l'empêchait pas, du reste,
s'il faut en croire certaines indiscré-
tions, d'être épris d'une belle Israélite
qui, comme Esther, défendra la cause
des juifs et fera peut-être adoucir les
mesures prises contre eux en Russie.
Il ne faut donc pas s'exagérer les
conséquences de l'arrivée à Sainl-Pé-
tersbourg, comme impératrice, d'une
fille de l'Allemagne ; mais, en tout cas,
on doit se dire que l'accord franco-
russe tient à des causes supérieures aux
sympathies du souverain.
C'est en cherchant son point d'appui
en France, que le gouvernement russe
a pris une place prépondérante dans les
conseils de l'Europe. Aujourd'hui cette-
politique a donné des résultats trop im
portants pour qu'un souverain puisse y
renoncer, même s'il en avait le désir.
La Russie a des points de contact dif-
ficiles avec la triple alliance. Dans les
Balkans l'Autriche-Hongrie la combat,
et dans lamer Baltique l'empire alle-
mand la menace.
Nous avons donné aux Russes un ap-
pui financier qui leur permet le déve-
loppement do leurs immenses ressources
naturelles. En échange, ils nous ont ap-
porté la sécurité, puisqu'ils ont muselé
'ambition prussienne par l'éventualité
td'tine attaque simultanée à l'Est et à
UOuest.
Au lieu d'être à la remorque d'événe-
ments dirigés de Berlin, la diplomatie
russe sait maintenant combien elle pèse
dans les conciliabules des chancelleries.
Elle ne commettra pas la folie d'abdiquer
te rôle d'arbitre paciifque ^ui lui-per-
met de travailler tranquillement à se
fortifier pour poursuivre ultérieurement
ses destinées.
La guerre de la Chine et du Japon
peut précipiter les solutions en Extrême-
Orient, et la mort imminente du souve-
rain de l'Afghanistan est de nature à
mettre les Russes et les Anglais en pré-
sence en Asie, puisque ce pays sert de
tampon entre eux.
Dans de telles conditions, Nicolas II,
n'eût-il pas au cœur les mêmes sympa-
thies que son père, ne déraillera pas de
la voie sur laquelle la Russie est enga-
gée depuis Cronstadt.
Il sait que l'écho retentit encore des
ovations faites aux marins français en
Russie et aux marins russes en France.
En ceignant la couronne, il trouvera
notre amitié dans la succession de son
père et il acceptera l'héritage.
D'avance, la France est prête à re-
porter sur lui l'affection qu'elle avait
vouée à Alexandre III, et, dans son
deuil, le fils sera certainement impres-
sionné par les larmes sincères que le
peuple français donnera à son grand et
noble père, notre illustre et infortuné
ami le tsar.
HsXN: --
LE SUCCESSEUR DE M. FAVETTE
Ainsi que le XIXe Siècle l'a déjà annoncé,
M. Louis Favette, cet ancien secrétaire de M.
Thévenet qui s'est fait payer sur différents
budgets, en moins de 18 mois, plus de 20.000
francs de frais de voiture, va quitter le mi-
nistère du commerce, où il s'était fait oc-
troyer la direction des services de l'enseigne-
ment technique.
Hier à la commission du budget on a dis-
cuté la réorganisation de l'administration
centrale de ce ministère.
M. Lourties, qui demandait un crédit de
16,000 francs pour cette réorganisation, n'a pu
obtenir que 10,000 francs, mais cela n'empê-
chera pas la réforme projetée de s'accom-
plir.
Le ministère du commerce comptera quatre
directions : le commerce intérieur, le com-
merce extérieur, l'office du travail et la direc-
tion des œuvres d'assistance, de prévoyance
et de mutualité.
A,cette dernière direction seront concentrés
les services des syndicats professionnels, des
associations ouvrières, des secours mutuels,
l'enseignement technique et les expositions
industrielles ou ouvrières.
C'est M. Hector Depasse, ancien conseiller
municipal de Paris, ancien chef de cabinet
de M. Spuller, qui va être nommé à la tête de
cette direction.
La disparition de M. Favette n'empêchera
pas la Chambre de s'occuper de son cas, lors
de la discussion prochaine du rapport de
M. Bozérian dont nous avons eu à nous oc-
cuper à plusieurs reprises.
RÉVOCATION D'UN COMMISSAIRE
On affirme que M. Lépine, préfet de police,
aurait décidé de révoquer M. Fédée, commis-
saire de la troisième brigade des recherches,
bien connu pour ses arrestations d'anarchis-
tes.
Cette mesure serait prise à la. suite des
faits suivants : Contrairement à l'avis du
préfet, M. Fédée aurait fait sortir de prison
un individu condamné à cinq ans de prison
afin de l'employer comme indicateur et, na-
turellement, le libéré profita de l'occasion
pour prendre aussitôt la fuite et ne rendre
aucun service à M. Fédée.
L'histoire a été révélé hier au préfet de po-
lice, qui a décidé de sévir immédiatement.
COMMENT ON PROTÈGE LES MINEURS
Voici un état de frais de justice particuliè-
rement intéressant, qui nous est signalé par
un de nos abonnés : - -
En juin dernier, une brave femme meurt à
Lantosque (Alpes-Maritimes), après avoir lé-
gué sa fortune à un mineur.
Le juge de paix du canton d'Utelle vient
faire l'inventaire du mobilier, composant tout
l'avoir de la défqnte; et l'estime 66 francs.
Mais les frais de cette petite promenade
s'élevaient à. 43 francs
La mère de l'enfant a dû lui faire
nommer un subrogé-tuteur et se
faire autoriser par le conseil de
famille à accepter la succession
sous bénéfice d'inventaire, coût. 24 —
Elle a dû déclarer cette accepta-
tion au greffe du tribunal civil de
Nice. 20 —
Total. 87 francs
Heureux mineur 1
«MMBHJU * HU HW ————
UN PARRICIDE- A SAINT-OUEN
La population de Saint-Ouen a été pénible-
ment impressionnée, hier, par un terrible
drame qui s'est passé sur la place de la Mai-
rie, à huit heures du soir.
Un journalier, Jules Fousse, âgé de 17 ans,
demeurant 28, rue Anselme, se disputait avec
sa mère sur la place de la Mairie. La discus-
sion devint très vive et le jeune homme pa-
rut à plusieurs reprises sur le point de ru-
doyer sa mère. -
Tout à coup on le vit presser le ressort
d'une canne à épée, et se jeter sur la pauvre
femme qu'il frappa de son arme. Puis, il s'en-
fonça la lame dans la poitrine et tomba en-
sanglantè sur le soi.
On se hâta de soigner Mme veuve Foass,
dont la blessure est heureusement légère Son
fils a été transporté dans un état alarmant, à
l'hôpital Bichat et consigné à la disposition
du commissaire de police de Saint-Ouen,
CONDAMNATION A MORT
Perpignan, 24 octobre
La cour d'assises des Pyrénées-Orientales a
condamné à mort le nommé Agusty Joseph.
âgé de trente ans, qui, à Ponteilla près Per-
pignan, tua son père à coups de fourche en
ter et de barre en bois, lui écrasant horrible-
ment la tête, pour ne pas avoir à lui payer
une pension annuelle de 400 francs en échange
des biens que son père lui avait donnés.
Agusty s'était ensuite tiré quatre balles
dans la tète, mais il guérit rapiaqment,
Agusty sera exécuté à Perpignan. - 1
Les jurés ôht signé un recours en grâce. -
GRIEFS DE « CRÉTINS »
TAPAGE A L'ÉCOLE DE GRIGNON
Une promotion consignés. - Conspues
l'adjudant! — Les « Fagots B et l'exer-
cice militaire. — Agriculture et
- militarisme
A l'Ecole nationale d'agriculture de Gri-
gnon, il vient de se passer un petit incident
qui, pour être presque aplani, n'en vaut pas
moins la peine d'être raconté.
L'Ecole de Grignon, on la connait du moins
de réputation. Elle est située près de la gare
de Plaisir-Grignon — celle, soit dit entre pa-
renthèses, où les voyageurs manquent le plus
souvent leur train, car c'est la seule de la li-
gne de l'Ouest dans laquelle il n'y ait pas
d'horloge. — On l'a installée dans un superbe
parc de 300 hectares emmuraillés, le parc de
Grignon dont Charles X avait fait un déli-
cieux pied-à-terre, venant s'y installer parfois
en un coquet pavillon Louis XIII agréable-
ment situé, comme on dit dans les romans de
Feuillet, sur le versant d'une riante colline.
Il y a dans le parc des bois superbes, des
avenues semblables à celles de Versailles, des
prés, de l'eau, une ferme, ce qu'il faut enfin
pour que des agriculteurs futurs puissent y ap-
prendre tout ce qui concernera leur état.
De toutes les écoles agricoles du gouverne-
ment, celle de Grignon est la plus prisée,
celle dont le diplôme qu'on y peut obtenir a
le plus de poids aussi n'y entre-t-on pas faci-
lement : ce ne sont que les « bons numéros »
parmi les candidats à l'admission dans les
établissements d'enseignement agricole qui
en franchissent la porte.
Tous, pour la plupart, sont fils de £ ecrttemen
campagnards fortunés, dès jeunes gens en ré-
sume instruits et éduqués. Les uns sont in-
ternes de l'école ; les autres, externes, n'assis-
tent qu'aux cours et habitent Grignon dans
des pensions et des hôtels, dont le -yillage qui
tire ses revenus de cette petite industrie, est
plein.
LES ÉTUDES
La vie des élèves de Grignon n'est pas dure.
Ils se lèvent à cinq heures et demie du ma-
tin, vont à l'étude jusqu'à sept heures et de-
mie, déjeunent jusqu'à Tluit heures, assistent
aux cours jusqu'à onze heures, font à ce mo-
ment leur deuxième déjeuner, assistent à nou-
veau aux différentes leçons jusqu'à six heu-
res, dînent, reprennent l'étude jusqu'à sept
heures et demie, se récréent ensuite jusqu'à
neuf heures et vont se coucher.
Les études à Grignon ne se poursuivent
pas, disons-le en regara de cet ordre de tra-
vail d'aspect chargé,dans de sombres salles de
travail. C'est en plein air, la plupart, qu'elles
se font. Les élèves voient, surveillent des
labours, des moissons, les soins à donner aux
animaux domestiques, les cultures, la taille
des arbres fruitiers. L'un est à tour de rôle
chef du potager, de la vacherie, de la porche-
rie, des bergeries, des basses-cours, de la lai-
terie, du rucher, etc., etc. Rien de rebutant
dans ces études, qui sont ordonnées de façon
à ce que chacun ait sa part de responsabilité
dans les différents services de l'école et par
conséquent de façon aussi à ce qu'un amour-
propre de réussir soit mis en jeu.
Entre temps, les élèves peuvent se récréer
de la façon la plus libérale. Ils ont journaux,
bibliothèque, salle de billard, d'escrime, peu-
vent se promener à gogo, la cigarette ou la
pipe aux lèvres, dans le merveilleux parc, re-
cevoir des visiteurs, faire ce qu'ils * veulent
en un mot dans les limites de la discipline
courtoise que leur applique d'une façon quasi
paternelle le directeur de l'école, M. Philip-
par, un ancien élève de la maison, bon
comme du pain et savant avec ça, que les
deux cents jeunes gens qu'il a sous ses ordres
adorent comme un seul homme.
L'EXERCICE MILITAIRE
Eh bien, de quoi ont-ils à se plaindre, allez-
vous nous dire, ces jeunes gens si heureux ?
Ah ! voilà ! En outre de leurs études, on
leur inflige deux fois par semaine, le mercredi
et le samedi, de deux heures à quatre heures,
un exercice militaire que dirige un adjudant
du 5e génie et trois caporaux du même régi-
ment en garnison à Versailles.
Les élèves de Grignon,comme les étudiants,
comme les normaliens, ne font, d'après l'arti-
cle 23 de la loi militaire, qu'un an de service,
mais, pour les préparer aux rudesses de la vie
de soldat, pendant quatre heures hebdomadai-
rement on les exerce dans le but de les rendre
prêts à faire de bons militaires quand ils de-
vront payer leur dette à la patie.
Ni étudiants, ni normaliens, ni élèves des
autres écoles supérieures de l'Etat ne sont as-
treints à cette obligation.
Ils ne font qu'un an de service militaire en
tout et pour tout, sans aucune préparation.
De là, un premier mécontentement assez jus-
tifié de la part des étudiants de Grignon. *
Mais ils ont un autre grief. L'admission à
leur école ayant lieu sans limite d'âge, il se
trouve que de leurs camarades qui ont ac-
compli leur service militaire ne sont plus
astreints aux exercices qu'on leur impose
et ont de plus qu'eux quatre heures par se-
maine à consacrer à l'etude.
Or, à Grignon on est zélé, on ne perd pas
- de temps; quatre heures par semaines sont
précieuses à ce point qu'elles ont une sé-
rieuse influence sur la « cote » que rempor-
tent les dispensés de tout exercice de soldat
à leur sortie de l'école. Et jugez de l'impor-
tance d'un bon classement dans les concours
de fin d'études : les quatre premiers reçoi-
vent une médaille, des félicitations ministé-
rielles et, ce qui a presque autant de prix,
la faveur gratuite d'aller, aux frais du gou-
vernement. passer deux ans dans un paya
à leur choix, étudier l'agriculture locale sur
place.
Volià déjà de quoi aigrir les élèves de GrI.
gnan contre une petite anomalÏe\du règlement
qui les règit; mais Il y a plus, ces exercices
militaires qui leur sont imposés; ils le3 doi-
vent accomplir militairement, sous la direc-
tion de l'adjudant vertiaillais. M. Larocb.
qui a la main un peu lourde, qui, dans le
parc de Grignon, se croit encore dans la ca.
serne du 5e génie, et voilà d'où est né l'ln.
cident qui vient de se produire.
LE CHAHUT
Mercredi dernier, les élèves des trois pro.
motions de l'école les crétins (Ire .année), les
abtulis (2e année) et les idiots (3e année),
manœuvraient dans la grande cour de réta-
blissement, chassepot sur l'épaule, baïonnette
au cCté, revêtus de l'uniforme de Grignon :
casquette ornée de lauriers d'argent et petite
blouse bieue.
Ce jour-là, l'adjudant Laroche n'avait que
deux caporaux de son régiment comme auxi-
liaires et c'était un caporal du 1er de génie,
M. Bruneau, qui remplaçait son camarade
absent, quand le caporal « à l'extraordinaire It
commanda un mouvement d'une manière au-
tre que cela se fait d'habitude dans le 5e.
— C'est comme ça que vous commandez un
demi-tour, interrompit l'adjudant Laroche,
en voilà des façons de commander 1
- — Mon Dieu! mon .lieutenant» répondit le
caporal, au-an le cornaiandè ainsi. < -
— D'abord je ne suis pas lieutenant, mais
adjudant, et ensuite ce n'est pas le 1er qui
donnera des leçons au 5e, et, pour vous
l'apprendre, vous me ferez quatre jours de
salle, de police,'et maintenant, rompez!
Cela fut dit à haute voix derfôc&la promo-
tion les crétins que commandait le caporal
Bruneau.
Il y eut assitôt devant cette sévérité et cet
affront une révolte dans l'âme juvénile des
trente-cinq jeunes gens qui composaient le
petit détachement ; on se consulta de l'œil et
subitement ce même cri : « Conspuez l'adju-
dant ! conspuez l'adjudant 1 » sortit de toutes
les poitrines.
Le sous-officier pâlit un peu, esquissa une
menace, mais elle fut vaine; les choses se cor-
sèrent, des huées partirent et se continuèrent
vigoureusement ; ce fut un vrai désordre, des
clameurs devant lesquelles l'adjudant battit en
retraite, allant prévenir le directeur qui arriva
et fit cesser le tapage, du moins dans l'en-
ceinte de l'école.
Mais, les exercices finis, les externes étaient
libres et le détachement des militaires-ins-
tructeurs devait s'en retourner à la gare. Les
externes firent la conduite à l'adjudant de
façon peu flatteuse pour lui, en jeunes gens
impitoyables et au gosier vigoureux.
L'adjudant Larochè rendit compte aussitôt
des faits à son colonel, M. Delannes, qui de-
manda à M. Philippar de sévir contre les
turbulents.
C'était déjà fait. Aussitôt après le petit
scandale, le directeur avait fait afficher au
lieu ordinaire des ordres du jour adressés aux
élèves, celui-ci :
ORDRE DU JOUR
A la fin des exercices militaires qui ont eu lieu
ce soir, les élèves de première année d'études qui
y ient part ont prôftttlMks -cris et des paroles
grossières à l'adresse du chef de détachement chargé
du commandement.
Oubliant les égards et le respect qui sont dus à
l'armée française, ils ont commis un acte très grave
d'indiscipline.
En conséquence, les élèves dont les noms suivent
sont punis d'une réprimande prononcée par le
conseil d'ordre de l'Ecole et consignés j u?qa'au di-
manche 18 novembre inclusivement, y compris les
congés de la Toussaint.
Ce sont MM. :
Berger, Bœuf, Baignes, Bruslon, Brutus, Cas-
tel, Châtaignier, Coustignon, Goyola, Coze, Dard,
Delplangne, Dulac, Dumas, Duval, Gadaut, Gais-
set, Ganot, Genêt, Goinard, Granday, Le Bihau,
Lefort, LeXrânc, Lç Maire, Le Noach, Marteau,
Mathieu, Nicot, Olivier, Pasquier, Raisin, Roussy,
Thouxet et Villafd.
Le directeur rappelle aux élèves que pendant les
manœuvres ils sont absolument soumis à la dis-
cipline militaire et que, par conséquent, toute in-
fraction à cette discipline sera punie avec la der-
nière sévérité.
Trente jours de consigne par conséquent,
c'est-à-dire pour les/internes la privation de
toute sortie et pour les externés l'obligation
de se présenter à- trois appels les dimanches
et les jours de congé de la Toussaint, plus une
réprimande du conseil de l'ordre — et il en
faut trois pour être exclu de l'école — la pu-
nition est sévère, en le voit.
Le colonel du régiment, en apprenant ces
faits, avait supprimé l'exercice de samedi,
craignant de nouveaux troubles. Ce n'est
qu'hier qu'il s'est résolu à 1& rétablir et à ren-
voyer à Grignon l'adjudant Laroche et les
trois caporaux, moins toutefois le malheu-
reux Bruneau, dont la punition a fait des pe-
tits et qui, sur la planche de la salle de po-
lice, fait des comparaisons mélancoliques
entre les commandements du 1er génie et
deux du 5e.
Tout s'est bien passé, les élèves de la 1re
année, les crétins, se sont rendus aux bonnes
raisons que leur a données M. Philippar,
qu'ils surnomment Ruta Baga, à cause d'un
ouvrage de ce nom dont il est l'auteur et qui
traite d'un choux à vaches dont ces précieux
animaux lui doivent la découverte, et hier les
exercices militaires se sont poursuivis dans le
plus grand ordre, si bien que l'adjudant La-
roche, très penaud au fond, a demandé au
directeur de Grignon de lever la punition qui
frappe les pauvres créiins.
M. Philippar n'a pas eu l'air de vouloir
cela tout de suite, mais en réalité il ne de-
mandait pas mieux ; et un peu du bout des
lèvres, mais de bon cœur, il a laissé entendre
que les espiègles reverraient leurs parents
éplorés dimanche prochain.
LA SANTE DU TSAR
[Bien que les nouvelles de Livadia soient
toujours mauvaises, le mieux constaté avant-
hier dans l'état de santé du tsar s'est main-
tenu. L'auguste malade a pu dormir quel-
ques heures la nuit dernière. Au sujet du
mariage du tsarévitch, on ne sait rien de
précis. Les dépêches sont des plus contradic-
toires.] -
Saint-Pétersbourg, 24 octobre,
12 h. 15 matin.
Bulletin du 23 octobre, à 7 heures du
soir: -
« Dans le courant de la journée, le malade
a éprouvé un peu le besoin de dormir et a
montré dç légers phénomènes de contractions
spasmodiques. L'appétit est meilleur qu'hier. \)
Saint-Pétersbourg, 24 octobre.
Bulletin du 24 octobre, dix heures du ma-
tin ;
« L'empereur a dormi quelques heures cette
Duit; on ne remarque pas de somnolence ; le
malade a de l'appétit. »
Londres, 24 octobre.
Le correspondant à Livadia du British mé-
dical Journal télégraphie cette après-midi les
renseignements suivants :
Des ponctions ont été faites aujourd'hui au
tsar dans les jambes pour réduire l'œdème.
Le malade a éprouvé un grand soulagement
Le correspondant du journal médical an-
glais ajoute qu'au moment où U télégraphiait,
eu se préparait à effectuer l'opération de la
thoracoceutése pour enlever l'eau et les ma-
tières séreuses qui se trouvaient dans la ca-
vité thoracique On était convaincu que te
tsar s'en trouverait beaucoup soulagé. L'ac-
tion du cœur redeviendrait plus libre et la
respiration plus Caclle.
Un soulagement momentané a été obtenu
par des inhalations d'oxygène qui ont fortifié
l'action du cœur.
L'empereur a gardé sa pleine connaissance
pendant longtemps. 11 est moins abattu. L'a-
mélioration momentanée obtenue lui a rendu
ourage, mais ta maladie n'a p%e diminué,
ou du moins bien peu.
Londres, 24 octobre.
On assure que si l'état du tsar ne s'améliore
pas, les lêtes préparées à Sandringhaœ en
l'honneur de l'anniversaire du prince de Gal-
les seront ajournées.
DOUBLE ASSASSINA T
Basas, 2S octobre.
Les époux Dumertq, vieillards de 60 ans, suber-
pistes et marchands de journaux à Bassanne, ont
été trouvès ce matin assassinés dans leur cham-
bré. - -
Le mari était mort, mais la foiew alqwait en-
core; èo^ijat est désçspérëi i
Le'xéî à été le mobile du srtme»
Tablettes du Progrès
LE SIROÎ> DE CH3&AL ..,
Point n'est besoin d'être maître passé
en fait de pratique médicale pour com-
prendre combien il est important, avant
d'administrer à un malade le vaccin anti-
diphtérique du docteur Roux, de savoir si
l'on est vraiment en présence d'un cas de
diphtérie authentique. -
Or, à cet égard, l'examen clinique le
plus attentif et le plus perspicace reste
parfois stérile, la simultanéité des symp-
tômes classiques eux-mêmes, tels que l'in-
flammation de la gorge, l'engorgement
ganglionnaire, la fièvre, l'apparition de
Eoints blancs et même de fausses mem-
ranes sur les muqueuses, etc., ne suffi-
sant pas toujours pour caractériser défini-
nitivement l'insidieux fléau. Seul, la con-
tre-épreuve bactériologique, en décelant la
présence dans lesdites fausses membra-
nes ou dans les exsudats du terrible ba-
cille de Loeffler, reconnu pour être l'agent
efficient et responsable de la diphtérie,
peut fixer le diagnostic d'une manière po-
sitive et rigoureuse, et cela dans un temps
très court, variant entre dix-huit et vingt-
quatre heures.
L analyse bactériologique s'impose donc
à tout médecin soucieux d'acquérir la
preuve expérimentale que son examen
clinique-était juste et ses présomptions
fondées.
Malheureusement, l'analyse bactériolo-
gique, dont la nécessité n'est pas discuta-
ble, suppose un outillage spécial, délicat
et compliqué, en même temps qu'elle exige
un temps dont, en .général, ne peuvent
guère disposer les médecins absorbés par
les exigences de la clientèle, et dont la
plupart, d'ailleurs, n'ont pas eu l'occasion
de s'initier aux subtilités de la méthode
pastorienne.
C'est là, en quelque sorte, besogne de
spécialistes — une besogne dont on aurait
mauvaise grâce, cependant, à prétendre
charger exclusivement M. Roux et ses
collaborateurs, lesquels ont assez à faire
avec la préparation du vaccin.
Aussi, pour combler cette lacune dont
les inconvénients sont de toute évidence,
la Presse médicale (une excellente revue
qui se publie chez l'éditeur G. Carré,sous le
patronage de MM. les docteurs Brun, Lan-
douzy, Roger, Letulle, Ollivier, Bonnaire,
Lermoyez et de Lavarenne) a-t-elle eu
l'heureuse idée d'organiser un service
gratuit de diagnostic bactériologique de
la diphtérie et de créer dans ce bu t un la-
boratoire spécial.
D'ici à peu de jours, il n'y aura qu'à
prendre l'un de ces tubes de culture con-
tenant, avec le « bouillon » et les menus
instruments traditionnels, toutes les ins-
tructions nécessaires, comme on en trouve
dans toutes les pharmacies, à y ensemen-
cer les choses suspectes recueillies dans
la gorge du malade et à l'expédier aux
bureaux de la Presse nédicale"J 3, rue
Racine, ou des microbiologistes de profes-
sion feront gratuitement l'expérience re-
quise, dont ils adresseront dans les vingt-
quatre heures les résultats à l'intéressé.
Et si lesdits microbiologistes ont conclu
à la genèse bacillaire de la maladie, s'ils
ont, en d'autres termes, trouvé le microbe
diphtérique en train de pulluler dans les
tubes de culture qu'on leur aura soumis,
l'intéressé n'a plus qu'une chose à faire :
se retourner vers M. Roux et se procurer
d'urgence le sérum sauveur.
Le malheur est que M. Roux on man-
que et que, malgré ses efforts infatigables
et des prodiges de bonne volonté, il ne
sera pas en mesure, AVANT DEUX MOIS ET
DEMI, de satisfaire aux demandes, toutes
plus pressantes les unes que- les autres,
qui pleuvent à verse sur lui des quatre
points cardinaux. Le meilleur est donc
encore, jusqu'à ce que l'an de grâce 1894
ait passé la main a l'an (non moins de
grâce) 1895, de s'arranger de façon à ne
« piger » ni le croup ni l'angine couen-
neuse.
Les profanes s'étonneront peut-être
qu'il faille tant de temps pour préparer un
médicament qui n'est, en fin de compte,
qu'un produit chimique. Je pourrais ré-
pondre qu'il en faut encore bien davan-
tage pour tanner un morceau de cuir; mais
je préfère fournir quelques explications
techniques, lesquelles, comme on dit
vulgairement, ne seront pas « de luxe ».
On sait que le vaccin antidiphtérique
se fabrique dans un récipient vivant,
c'est-à-dire dans le corps d'un cheval,
d'un vrai cheval en chair et en os, préala-
blement immunisé contre la diphtérie. On
avait essayé, avant de s'arrêter définitive-
ment au cheval, de plusieurs autres ani-
maux. Mais force a été de revenir au che-
val, sacré cette fois pour de bon et sans
appel
La plus nobre conquête
Que l'homme ait jamais faite.
comme étant le seul intermédiaire capable
de fournir une grande quantité de sang (2
litres par mois, 24 ou 25 litres par an) sans
en être incommodé, et dont, en outre, le
sérum en injections ne détermine pas d'ac-
cidents, tels que phlegmons, abcès, etc.
Or, le cheval n'est pas réfractaire par
nature à la diphtérie. Il faut donc le ren-
dre tel par artifice. Gomment ? Oh ! c'est
bien simple : en lui faisant prendre du
« poil de la bête a - si je répète à tout
boufde champ cette formule triviale, c'est
qu'elle a le mérite d'être supérieusement
claire et suggestive — c'est-à-dire en lui
inoculant, à doses fractionnées, le virus
diphtérique jusqu'à ce qu'il ait acquis
ainsi, par une sorte de mithridatisme,
l'accoutumance et l'immunité.
Voici, au surplus, comment on pro-
cède :
On prend une parcelle d'une fausse
membrane râclée dans la gorge d'un en-
fant notoirement atteint de diphtérie, et
on l'ensemence dans un bouillon de cul-
ture, c'est à dire dans un liquide nourri-
cier où le bacille de Lœffler puisse vivre
et se développer à l'aise. Vingt-quatre
heures après, U bouillen est envahi ar
un grouillement de colonies microbiennea,
ui n'ont rien de plus pressé que de dis-
tiller à jet continu leurs redoutables
toxines. Ces toxines — constituant le vé-
ritable poison diphtérique, le virus par
excellence — on les recueille soigneuse-
ment au sein du bouillon filtré et on les
dépose, mélangées à une solution alcaline
peptonisée, dans une étuve chauffée à 37
degrés. Il faut qu'elles restent là un mois.'
après quoi on en contrôle la virulence en
partant de ce principe qu'une bonne toxi-
ne doit, à la dose de 1/10« de centimètre
cube, tuer en 48 heures un cochon d'Inde
pesant une livre.
C'est cette toxine qui va servir à vacci-
ner le cheval « sérogene ».
On n'inocule pas cependant, au moins
au début, la toxine pure : ce serait jouer
trop gros jeu. On a soin de l'atténuer en
l'additionnant d'iode (liqueur de Gram) au
tiers. Puis, on commence les inoculations
avec une sage lenteur et en augmentant
graduellement les doses. On en arrive
ainsi à injecter la toxine à la dose d'un
centimètre cube tous les cinq jours, puis
de deux centimètres cubes tous les cinq,
jours, puis de cinq centimètres cubes tous
les deux jours, de manière à saturer litté-
ralement l'animal de toxine atténuée ou
même de toxine pure.
La toxine, dont la même quantité ad-
ministrée d'emblée et d'un coup aurait in-
failliblement tué le cheval le plus vigou-
reux en quelques heures, s'est transmuée
en antitoxine. Que s'est-il passé ? La
toxine a-t-elle été modifiée dans sa compo-
sition chimique par l'action des tissus
et des liquides vivants en présence des-
quels elle s'est trouvée? A-t-elle successi-
vement stimulé les cellules défensives de
l'organisme en les obligeant, en vertu d'un
processus mystérieux, à sécréter l'anti-
dote nécessaire à sa propre neutralisa-
tion ? Nul n'en sait rien encore. Mais ce
qu'il y a de certain, c'est non seulement
que le cheval est désormais vacciné, mais
encore que son sang a acquis la vertu vatf-
cinatrice. - -
Lorsqu on le juge immunisé a point; u*
n'y a plus qu'à lui ouvrir la veine jugu- ;
laire et à recueillir le sang, qui gicle danst.
un flacon stérilisé. On décante, on laisser
coaguler, le sérum se sépare du cruor, e
il n'y a plus qu'à le soutirer et à le mettre!
en tubes. Le cheval ne s'en porte pas plus'
mal, mais les « croupiers » (que le « Vieux:
Ponte » me pardonne 1) vont s'en porter;
infiniment mieux.
On peut aussi dessécher le sérum dans:
le vide, de façon à le transformer en cris-
taux faciles à conserver à perte de vue et
à expédier au bout du monde où, pour les
employer, il n'y aura plus qu'à les dissou-
dre dans six fois leur poids d'eau bouillie:
Mais toute cette série d'opérations ne
s'accomplit pas en un clin d'œil : un moisJ
pour la concentration de la toxine in vitro,
six semaines pour l'immunisation du che-
val, cela fait bien, si je ne m'abuse, queK
que chose comme deux mois et demi.
Voilà pourquoi d'ici à la Noël, même en
mettant les choses au mieux, les diphté-
riques trop pressés risquent de demeurer.
soumis à l'ancien régime. Nul ne saurait
aller en ce bas monde plus vite que les
violons 1 -
Raoul Luoet.
A MADAGASCAR
Dépêche secrète
Le gouvernement a reçu mardi, dans la @
nuit, une dépêche de M. Le Myre de Vilers,
député de la Gochinchine. ;
Notre envoyé extraordinaire auprès de la
reine des Hovas est arrivé à Tananarive le
13 octobre, a expédié le 20 cette dépêche quSfv
a été portée par l'aviso Papin de Tamatavè à
Port-Louis (île Maurice) d'où elle a été trans-
mise en France par câble.
Cette dépêche qui est fort longue a été tra-
duite hier matin en présence de MM. Ha no-
taux, ministre dea affaires étrangères, et Del-
cassé, ministre -des colonies.
Communiqué ensuite au président de la Ré..
publique et au président du conseil, ce télé*
gramme devait être transmis dans l'après-
midi, à trois heures, au ministère des affaires
étrangères. Mais à cette heure-là le gouver-
nement avait changé d'avis ; le texte de la d&
pêche o&trestà secret. ,
Il nous semble que cette façon de procéder
a beaucoup plus d inconvénients que d'avan-
tages. En effet, elle laisse supposer une foule
de choses qu'une communication officielle
n'aurait pas permise. C'est ainsi que dans lesr
couloirs de la Chambre on a prétendu que M.
Le Myre de Vilers annonçait qu'il avait
échoue dans sa mission; on annonçait encore
que le gouvernement soumettrait la question
aujourd'hui au Parlement, plus une demandé
de crédits extraordinaires pour faire une ex-
pédition à Madagascar, et bien d'autres racon-
tars dont nous ne voulons pas nous faire
l'écho, mais qui ressemblent beaucoup à ceux
qui ont compromis tant de fois nos opérations
au Tonkin et en Tunisie.
Quoi qu'il en soit et en attendant que le mÉ-
nistère comprenne qu'il est imprudent et sou-
vent dangereux de garder pour soi certaines
dépêches dont la connaissance peut être
utile à certaines personnes, nous pouvons an-
noncer qu'une réponse immédiate a été trans-
mise à M. Le Myre de Vilers. Le Papin at-
tendait du reste de nouvelles instructions du
gouvernement français pour les porter à
notre envoyé extraordinaire.
l'ACCAPAREMENT DU SUCRE
Nous recevons la lettre suivante :
Monsieur le directeur,
J'ai lu avec joie votre article relatif à l'aCe
caparement du sucre par ces millionnairet
effrontés que sont les raffineurs. Il est scan-
daleux qu au siècle où nous vivons et soua
une République (pas assez république, hélas 1)
ce vol organisé ne soit combattu par aucun
député.
On gémit sans cesse sur la difficulté d'équi-
librer le budget. La Chambre a cependant
trois éléments qui lui permettraient de faire
aisément face à toutes les dépenses :
le Supprimer les raffineurs; 20 supprimer
les rectificateurs d'alcool, en donnant à l'Etat
le monopole de leur industrie; 30 supprimer
les bouilleurs de cru. -, -
Mais la Chambre est trop molle pour s'atta-
quer à eu gros capitalistes.
Ajréei. etc. -
Une tiétime des raffineurs,
Va leeUurs nsidu. - Merci de votre très iiftfr
VENANTE ttttro itir l'Egypte. DéBirOM TOU» WIR.
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