Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1894-09-18
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 18 septembre 1894 18 septembre 1894
Description : 1894/09/18 (A24,N8282). 1894/09/18 (A24,N8282).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/04/2013
TINGT-QUATRIÈME ANNÉE. — N* 8,282
LE NUMÉRO eN !!le i dm
MARDI 48 SEPTEMBRE 1894 "-
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L RéiJnc cs Boissons
M. Poincaré a eu son heure de gloire.
C'était ad mois de mai dernier, après la
chûte du cabinet Casimir-Périer. La
réussite des combinaisons ministérielles
était suspendue aux décisions du jeune
député de la Meuse. Tous ceux qui étaient
appelés pour former un cabinet avaient
pour premier soin de se préoccuper de
savoir si M. Poincaré accepterait d'en-
trer dans leur ministère, et quand il
avait refusé, ils s'en allaient, navrés,
dire à M. Garnot : « Rien à faire, Poin-
caré ne veut pas ?. Il fallut que M. Car-
not joignît ses instances à celles de
M. Dupuy pour vaincre ses résistances.
Sans cela nous n'aurions peut-être pas
encore de ministère, car dans les deux
Chambres il n'y avait décidément per-
sonne autre que lui qui pût prendre le
ministère des finances.
Un homme qui fait tant de fàçons ne
peut être qu'un homme qui ne veut pas
galvauder ses mérites, et l'on avait ré
pandu le bruit que ceux de M. Poincaré
étaient extraordinaires. La Chambre avait
un peu fait la grimace au projet de bud-
get de M. Burdeau. M. Poincaré allait
lui présenter le budget idéal, celui
que la commission du budget sou-
haitait, et la question financière allait
être résolue comme par enchantement.
C'est avec une certaine hésitation que
l'on a vu que le nouveau ministre
éprouvait de grandes surprises et qu'il
annonçait tout d'abord qu'il ne songeait
pas à retirer le projet de budget pré-
senté par son prédécesseur, mais qu'il
se proposait simplement de le modifier
sur certains points. C'est avec une sur-
prise plus vive encore que l'on a cons-
taté que la session se terminait sans
que le ministre des finances eût déposé
les proj ets rectificatifs qu'il avait an-
noncés, de telle sorte que nous nous
trouvons, cette année, beaucoup moins
avancés qu'on ne l'est ordinairement S
pareille époque. La commission du
budget est saisie d'un budget, mais
elle est prévenue que ce budget sera:
modifié. Par conséquent, elle ne peut
consacrer à son. un temps qui
serait du temps perdu^et jusqu'à ces
derniers jours elle ignorait' par quoi$.
Poincaré - remplacerait les parties du
projet de M, Burcfeau qu'il" n'accepte
Das.
Sur un point, maintenant, nous som-
mes renseignés. M. Poincaré a fait dis-
tribuer, ces jours-ci, son projet sur la
réforme du régime des boissons. Nous
en avons déjà donné une analyse.: On
était en droit de penser que ce projet,
produit de quatre mois dâ méditations}
allait se distinguer par une originalité
puissante. Il décevra un peu cette opi-
nion. M. Poincaré dira pour son ex-
cuse qu'il n'a pas trouvé la question
entière. Elle a été bien souvent agitée.
Peu même s'en est fallu qu'elle n'arri-
vât à solution dans la dernière législa-
ture. La Chambre l'avait incorporée au
budget de 1893. Le Sénat l'en disjoi-
gnit, ce qui motiva.la chute du cabinet
Ribot. Mais le Sénat reprit la question
un peu plus tard ; il émit des votes et
peut-être serait-on arrivé à un accord, si,
la législature étant presque à son terme,
on n'avait pensé qu'il valait mieux lais-
ser à la Chambre actuelle le soin de ré-
gler la question.
M. Poincaré a repris dans le projet
ainsi élaboré les dispositions sur les-
quelles l'accord s'était fait, et il est ainsi
arrivé à dégrever les boissons hygiéni-
ques, vins, bières et cidres de 91 mil-
lions et demi, et il prendra les mesures
nécessaires pour préparer la future sup-
pression des droits d'octroi. Pour com-
penser cette perte de recettes, il a recours
à trois moyens : l'augmentation du droit
sur l'alcool, qu'il porte à 200 francs ;
un remaniement du tarif des licences et
une réglementation du privilège des
bouilleurs de cru. Il estime que la pre-
mière de ces mesures lui procurera une
recette de 75 millions et demi, la se-
conde 16 millions et la troisième 3 mil-
lions. C'est donc 94 millions et demi,
soit un excédent de 3 millions sur le
rendement actuel des droits sur les bois-
sons.
Mais M. Poincaré, qui est de la Meuse,
s'est bien gardé de supprimer, comme
le faisait M. Burdeau, le privilège des
bouilleurs de cru. S'il l'entoure de cer-
taines garanties qui doivent, suivant lui.
empêcher la fraude, il entend av* lit tout
le conserver, et c'est Ti ià surtout que
la réforme qu'il propose a de grandes
chances dé procurer des mécomptes au
Trésor. C'est un fait admis générale-
ment, en effet, que s'il convient de lais-
serait petit récoltant la liberté de fajr
les quelques litres d'alcool utiles pour la
consommation de la famille, C'est ce-
pendant par le privilège des bouilleurs
1 de cru que la fraude se trouve facilitée
et certains n'ont pas hésité à évaluer à
cent millions la perte qui résultait de la
fraude pour le Trésor.
Le projet de réforme de M. Poincaré
donne un stimulant nouveau aux frau-
deurs, puisqu'il élève le droit sur l'al-
cool de cinquante francs et que, par
conséquent, pour chaque hectolitre d'al-
cool fabriqué en fraude, il y a une sur-
prime de même importance. Il faut pré-
voir en outre que l'augmentation du
'droit restreindra dans une mesure ap-
préciable la consommation, tandis que
la suppression des droits sur les vins,
bières et cidres, jointe à l'abondance
des dernières récoltes, aura pour effet
d'élever la consommation de ces liqui-
des.
Que reste-t-il, dans ces conditions, de
la plus-value de rendement du droit sur
l'alcool prévue pour 75 millions? On
peut penser que le Trésor sera fort loin
d'encaisser tout ce que M. Poincaré lui
promet et qu'il se produira par consé-
quent un déficit budgétaire. C'est une
perspective qui n'a rien de séduisant.
LE « CABINET » DE LA MARINE
Tous les détails publias par certains jour-
naux sur l'organisation du cabinet civil du
ministre de la marine sont au moins préma-
turés.
Cette réforme, comme toutes celles qui s'ap-
pliquent au personnel des ministères, em-
porte un règlement d'administration publi-
que et devra être soumise à l'examen du con-
seil d'Etat, Il faudra, par conséquent, atten-
dre la fin des vacances de cette haute assem-
blée.
Disons, en attendant, qu'il ne peut être
question de confier les emplois nouveaux à
des attachés purement civils, ignorants des
rouages et du fonctionnement des services
¡maJi.time8 Ce sont des inspecteurs des servi-
ces administratifs f et des commissaires qui
formeront Te principal noyau du cabinet ci-
vil et qui pourront ainsi lutter enfin contre
les tendances rétrogrades et l'omnipotence du
corps dés officiers de vaisseau représentées
par les' « archevêques » de la rue Royale et
l'étfit-major général, ce prodigua sahs con-
trôle: des ressources budgétaires. ,;";',!'
:::.. : r'¡ -
f "l MORT' ';"j, j ",
pU CONTRE-AMIRAL LE BOURGEOIS
Le contre-amiral Le Bourgeois, comman-
dant en sous-ordre une des divisions de l'esca-
çlré active de la: Méditertannée" vient de suc-
comber à we, malaw.e dont il souffrait cruel-
lement depuis un mois, :
Petié-fils d'un pair de France, le contre-
àmiraLLe Bourgeois était âgé de soixante
n8;; il était entré à L'école navale en 1852 et
avait été promu enseigne de vaisseau. le 1er
avril 1858. Lieutenant ; en 1862,
Capitaine de frégate en 1875 et- capitaine de
vaifeseau le 31 décembre 1883, il avait dans ce
grade commandé la division de: équipages de
la flotte à Toulon. : ., -.,: i -, -.
En 1885, il fut nommé an commandement
de la Dévastation, qui portait: le pavillon du
contre-amiral Rallier dans l'escadre d'évolu-.
tions; il prit ensuite, le 28 juin 1888, le com-
mandement de la division navale du Tonkin,
comme chef de division ensous-ordiie dans la
division navale de l'Indo-Ghine, commandée
en chef par le contre-amiral de la Jaille ; il
avait son guidon sur VAclour.
C'est dans ce commandement qu'il reçut les
deux étoiles, le 17 mai 1890, et, rentrée en
France, il fut nommé comme contre-amiral
aux fonctions de major général à Toulon,
puis, le 1er janvier 1892, chef d'état-major du
5e arrondissement maritime.
hé 17 février; 1893, nommé, au commande-
ment d'une des divisions dé' l'escadre active
de la Méditerranée, il arborait son pavillon
sur le cuirassé Hoche. On sait que, dans les
premiers mois de cette année, if conduisit sa
division dans les échelles du Levant et visita
'es côtes d'Egypte, de Tunisie et de l'Algérie ;
à peine rentre à Toulgu, Il dut à nouveau
lever l'ancre pour se rendre là Mers-el-Kébir,
en raison des événements du Maroc. Le Hoche
devant se rendre à Brest pour le changement
de son artillerie, il avait arboré, le 1er sep-
tembre, son pavillon sur le Magenta. C'était
un officier distingué, et les missions flatteuses
qu'il a reçues montrent combien il était estimé
dans la marine.
Le contre-amiral Le Bourgeois était com-
mandeur de la Légion d'honneur.
Les obsèques auront lieu mardi ; l'escadre
active, arrivée hier soir à Toulon, leur don-
nera un caractère de grande solennité.
REGICIDE A L'AGONIE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Rome. 16 septembre.
Le cuisinier Passanante qui, le 17 novembre
1878, a attenté aux jours du roiHumbert, est à l'a-
gonie. Enfermé depuis longtemps dans l'asile d'a-
liénés d'Ambrogiana, Passanante a été frappé ces
temps derniers d'une paralysie cérébrale com-
plète.
LA VIANDE FOURNIE AUX SOLDATS
Saint-Affrique, 16 septembre.
On signale la fourniture de viande au 142" régi-
ment comme étant très mauvaise à Saint-Affri-
que.
A Millau, les vétérinaires inspecteurs des abat-
toirs ont refusé les bêtes présentées pour l'approvi-
sionnement dudit régiment. Ces bêtes ont quand
même été abattues et consommées par les hom-
mes.
Les vétérinaires inspecteurs ont adressé au
ministre de la guerre un rapport relatant les faits
ci-dessus.
LA DYNAMITE EN ESPAGNE
Séville, 16 septembre.
Op. a trouvé derrière Un rayon de la librairie Fc
une boîte en fer-blanc contenant cent cartouches de
dynamite chargées à balles.
Le libraire affirme qu'il ignore absolument com
ment cette boîte a pu être apportée dans sa bou-
tique.
Cette découverte cause une assez vive émotion
dans la ville.
M. TRANCHAU TRESORiER-PAYEUR GENERAL
M. Paul Tranchau, chef de bureau hors cadres
à l'administration centrale des finances, est nom-
mé trésorier-payeur du département des Hautes-
Pyrénées.
M. Ps$4 Tranchau était charge des fonctions de
cheï du secrétariat particulier du président Caraot.
LE
TESTAMENT POLITIQUE
DU
COMTE DE PARIS
Le dernier écrit du prétendant. — Plus
catholique encore que monarchiste.—
La profession de foi de Philippe VII.
Il n'y a pas cinq jours que le petit-fils de
Louis-Philippe 1er repose dans le caveau où
son grand-père fut déposé avant d'être ramené
dans la chapelle de Dreux, et c'est à peine si
l'on pense encore à celui dont le hasard des
circonstances aurait peut-être pu faire un roi
de France.
Les morts vont vite, dit-on. Jamais on ne
s'en était si bien aperçu et vraiment on n'a
pas beaucoup exagéré quand on a prétendu
que l'événement qui mettait en deuil la fa-
mille d'Orléans et presque toutes les maisons
princières d'Europe n'était guère qu'un « fait
divers ».
Pourtant, on ne lira point sans quelque in-
térêt ou pour mieux dire sans quelque curio-
sité le document que nous publions plus loin
et qui nous est adressé par notre correspon-
dant de Londres. C'est le testament politique
que M. le comte de Paris laisse à ses parti-
sans et qu'il a écrit quelques semaines seule-
ment avant de mourir, le 21 juillet.
Il rappellera bien pendant vingt-quatre
heures au moins l'attention sur sa personne-
et sur la cause qu'il représentait.
« Il m'a toujours paru fort imprudent,
même pour les princes et les hommes d'Etat
qui ont joué un grand rôle parmi leurs con-
temporains, d'écrire un testament politique.
PoUr qu'un tel document puisse "-'tte vrai-
ment utile à leurs successeurs, il faudrait
qu'ils eussent reçu le don de lire dans l'ave-
nir, don qu'il faut remercier Dieu de nous
avoir refusé.
» Aussi, au moment où je me prépare tout
particulièrement à comparaître devant le sou-
verain juge, je n'ai pas l'intention de tracer
une ligne de conduite à mon fils. Il connaît
mes pensées, mes sentiments, mes espéran-
ces; il aura toujours pour guide la conscience
de ses devoirs et l'amour passionné de la
France, qui est la tradition invariable de no-
tre maisôn.
» C'est à mes amis que je tiens à dire un
dernier adieu au moment de terminer une vie,
que je n'ai pu consacrer aussi utilement que
je l'aurais voulu, au service de notre pays. Et
je ne m'adresse pas seulement à ceux avec
qui j'ai été en relation directe. J'appelle amis
Ou amies toutes les personnes, quelle que
soit leur condition sociale, qui, de mon vi-
vant, ont fait des vœux "poûr le succès de la
cause monarchique et qui prieront Dieu pour
moi au jour de ma mon.
» Ce m'est une consolation de songer qu'elles
èe souviendront de moi lorsque des jours plus
peureux luiront sur la France., lorsque,
comme je le souhaite avec ardeur, l'es passions
politiques et religieuses qui divisent en ce
moment si profondément les eniants d'un
même pays seront apaisées. ;'
» Cet apaisement ne pourra être que l'œuvre
de la monarchie nationale et traditionnelle.
Seule elle pourra réunir dans un effort com-
Uiun tous les dévouements, tous les élans
généreux, qui à l'honneur de notre paya ne
sont le-monopole d'aucun parti. ', :'
; » Lorsque je ne serai plus; j'espère que la
France rendra justice aux -efforts que j'ai
faits au lendemain de ses désastres pour
l'aider à chercher le moyen de se relever en
revenant au principe monarchique. En 1873,
j'ai été à Frohsdorf pour écarter tous les
obstacles personnels et pour donner l'exem-
ple du respect absolu, du, principe héréditaire
dans la maison de Franco. Dix ans après, le
pajeti monarchique montrait sa 'vitalité et, son-
esprit politique, en ne-se laissant pas ébranler
par la transmission du dépôt traditionnel qui
passait du représentant de la branche aînée
au représentant de la branche cadette. >
» J'ai cherché à répondre à la confiance
que ce grand parti avait montrée, à son nou-
veau chef en travaillant à fusionner les élé-
ments divers donHl se composait. Le résultat
des élections de 1885 montra que ce travail
n'avait pas-été inutile. Nos adversaires poli-
tiques y répondirent par l'exil. Je n'avais rien
fait pour le provoquer, si ce n'est d'exciter
leurs a larmes. Je ne fit rien pour l'éviter et je
le subis comme l'une des plus dures consé-j
quences de la situation que me faisait ma
naissance. -
» J'ai poursuivi sans relàche dans l'exil
l'œuvre commencée sur. le sol français, au
milieu des circonstances les plus difficiles.
J'ai pu me tromper parfois sur les hommes
et les choses, mais je l'ai toujours fait de
bonne foi et j'ai le droit de dire que tous mes
actes n'ont jamais été inspirés que par mon
dévouement à la France et à la cause que je
représente. Mon but a toujours été de conser-
ver le dépôt du principe traditionnel dont ma
naissance m'avait constitué le gardien et de
prouver à la France que ce principe n'avait
rien d'incompatible avec les idées modernes,
avec notre état social actuel.
» En transmettant cet héritage à mon fils
aÎnÔ, je demande à tous mes amis de se ser-
rer autour de lui. J'ai confiance dans l'ave-
nir et j'espère qu'ils partageront cette con-
fiance. Elle sera leur soutien au milieu de
toutes les épreuves et le gage de leur succès
final.
» Je ne puis pas croire, en effet, que Dieu
ait pour toujours abandonné la France, le
pays auquel il a donné saint Louis et Jeanne
d'Arc. Or, pour qu'elle se relève, il faut qu'elle
redevienne une nation chrétienne. Une nation
qui a perdu le sentiment religieux, où les
passions ne sont plus retenues par un frein
moral, où ceux qui souffrent ne trouvent pas
un motif de résignation dans l'espoir de la
vie future, est destinée à se diviser, à se dé-
chirer, à devenir la proie de ses ennemis inté-
rieurs et extérieurs.
i) Le premier devoir de mes amis est donc
d'arracher la France à la voie funeste qui la
conduirait à une telle catastrophe. J'espère
que, dans cette œuvre de salut, ils verront se
réunir à eux tous les honnêtes gens que l'ex-
périence ne peut manquer d'éclairer un jour.
C'est le dernier vœu de l'exilé pour une patrie
à laquelle il recommande à ses enfants de
rester dévoués et fidèles.
» Stowe-liúu::;e, 21 juillet 189t
» PHILIPPE, comte de Paris. »
Nous ne voulons pas apprécier pour l'ins-
tant ce document, où le comte de Paris se
révèle plus catholique peut-être encore que
monarchiste, et où rien ne reste, en tout cas,
de l'esprit libéral de ses ancêtres.
Mais, malgré soi, on ne peut s'empêcher de
comparer à co testament,plus digne du comte
de Chambord que du petit-fils du roi-citoyen.
les dernières recommandations que le duc
d'Orléans adressait à son fils :
« Que le comte de Paris, disait le duc d'Or
léans, soit un de ces Instruments brisés avant
qu'ils aient servi ou qu'il devienne l'un des ou-
vriers de cette régénération sociale qu'on
n'entrevoit encore qu'à travers tant d'obsta-
cles; qu'il soit roi ou «ju'il 4çtneure défen-
seur inconnu et obscur d'une cause à la-
quelle nous appartenons tous, il faut qu'il
soit avant tout un homme de son temps et
de la nation, serviteur passionné et exclusif
de la France et de la Révolution. »
On avait déjà eu bien des fois l'occasion de
remarquer que le comte de Paris n'avait guère
écouté les conseils de son père. Jamais, ce-
pendant, il ne s'était montré aussi peu
« hommede son temps» que dans ce suprême
et dernier manifeste, qui prêterait à sourire
s'il n'avait été écrit à la veille de sa mort.
LA PRÉSENCE D'ARTDN A TURIN
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Turin, 16 septembre.
La Gazzetla di Torino publie des détails
curieux sur le séjour d'Arton à Turin.
« Arton, dit notre confrère, parle assez cou-
ramment l'italien. Il est accrédité par une
banque anglaise auprès d'un des banquiers
turinois les plus connus ; bien entendu il a
eu la précaution de prendre un faux nom.
» D'ailleurs Arton ne cherche pas trop à se
cacher. A peine arrivé à Turin, il a songé à
lancer une grosse affaire et à se procurer une
commande de charbon. Un industriel mila-
nais, qui était déjà autrefois en rapport avec
Arton, aurait figuré comme prête-nom dans
cette affaire à laquelle, d'ailleurs, Arton a
renoncé en dernière heure, on ne sait pas trop
pourquoi. »
La Gazzelta, à laquelle nous laissons toute
la: responsabilité de ce récit, ajoute encore les
réflexions suivantes :
« A ce qu'il paraît, la police française avait
perdu depuis six mois les traces d'Arton. Elle
n'a d'ailleurs aucun intérêt à. l'arrêter; son
activité se borne à ne pas le perdre de vue de
crainte qu'il ne soulève quelque scandale.
» Quand la police française apprend par
quelque agent secret qu'Arton se trouve dans
tel ou tel pays, elle s'empresse d'en signa-
ler la présence aux autorités locales. Mais
dans ces « notes officielles », la police fran-
çaise se garde toujours de faire mention du
nom d'Arton. Elle dénonce l'arrivée d'un es-
croc ou d'un anarchiste sans demander l'ar-
restation de l'invidu en question. Elle le re-
commande simplement à la plus rigoureuse
surveillance. -
» Ainsi, on a la certude qu'Arton se sentant
surveillé ne tenteta jamais de faire un coup
de tête. »
UN PHTISIQUE CENTENAIRE
: (DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Auxerre, 16 septembre.
On a annoncé ces jours derniers que M.
Victor Baillot, de Carisey, en faisant part du
mariage de son petit-fils, M. Jolly,. avec Mlle
Philippart, faisait suivre son. nom du titre de
« cçîntèn.^ë.et médaillé de Sainte-Hélène ».
; Ce vénérable Ètiryivant de la Grande Ar-
mè~/qui est tré§ valide, se propose d'assister
au mariage de son petits-nls. A ce propos,
voici quelques notes biographiques sur ce
vieux de la vieille :
Victor Baillot est né le 22 avril 1792 à Per-
cey, canton de Flogny ; il a donc aujourd'hui
cent un ans et cinq mois.
Il était à la bataille de Waterloo où, en
défendant le drapeau du 105e de ligne dont il
faisait partie/il reçut un coup de sabre sur
son shako. Il'fut fait, prisonnier parles An-
glais. A sa rentrée de captivité, on le réforma
à Auxerre le 16 août 1816. Son congé, que j'ai
pu voir, porte ; Piéformé comme phtisique
au 20 degré. :. ',
Chose bizarre, ce phtisique au- 2e degré, qui
a ujourdui, plus, d'un sièele d'âge, a fait
epo-..e;CQ jours derniers, et à pied, chaussé
de sabots, une promenade de. plus de 5 kilo-
mètres. y -
Et dire, .que ce jvieux brave s'éteindra sans
avoir le bonheur, si envié par les héros de la
Grande Armée, de voir briller sur sa poitrine
lè ruban de la Légion d'honneur, instituée par
Naoléon Ier pour récompenser la bravoure
et rhônneur de ses soldats.
M. Victor Baillot y aurait, ce nous semble,
quelque droit, lui qui fut grièvement blessé
en défendant le drapeau du 105e régiment de
ligne.
L'occasion est bonne. Qu'en pense le mi-
nistré de là guerre ?
LES -
DÉLÉGATIONS AUSTRO-HONGROISES
, ;', Budapest, 16 septembre.
Les présidents des Délégations,qui viennent
de se réunir à Budapest, ont tour à tour pré-
senté leurs adresses'à l'empereur.
Le baron J. de Chlumocky, président de la
Délégation autrichienne, a affirmé que l'on
peut voter sans danger pour l'équilibre du
budget les dispositions militaires indispensa-
bles pour le développement de la mobilisation
et va dépeint en termes chaleureux l'activité
infatigable et paternelle de l'empereur.
Le comte Ladislas Tisza, président de la
Délégation hongroise, s'est attaché surtout à
montrer de bienfaits de la triple alliance,
« qui présente une importance double en face
des nouveaux- courants qui s'observent au
sujet de l'organisation de l'Etat et de la so-
ciété et qui permet à tous les Etats de consacrer
à l'intérieur tous leurs efforts à la conciliation
de leurs éléments contradictoires ».
Dans sa réponse, l'empereur a dit entre au.
-très choses :
« J'éprouve une vive satisfaction de voir
que la confiance dans le maintien et la conso-
lidation de la paix, exprimé par moi lors de
la dernière réunion des Délégations, trouve
sa confirmation dans la situation actuelle
de l'Europe.
» Je suis heureux aussi que les rapports
très amicaux que nous entretenons avec
toutes les puissances justifient l'espérance
que nous pourrons nous vouer dans l'avenir
et sans interruption au développement du
bien-être de-nos peuples.
» Toutefois, il reste nécessaire, et mon
gouvernement juge qu'il est de son devoir
d'agir en cela à l'exemple de toutes les autres
puissances, de n'apporter aucune interruption
dans le développement des forces militaires
de la monarchie. »
L'empereur fait ressortir ensuite que le
budget de la guerre se renferme dans les
limites de la progression organisée et approu-
vée par les dernières Délégations, Le budget
tient consciencieusement compte de la si-
tuation financière.
Le discours constate enfin que la Bosnie et
l'Herzégovine couvriront leurs dépenses en
1895 entièrement par leurs propres recettes.
La réponse de l'empereur a été accueillie
avec de vifs applaudissements, tant par la
délégation du Reichsrath qu'il a reçue à midi
que par la délégation hongroise qu'il a reçue
à une heure.
UNE QUESTION
M. Adrien de Montebello, député de la 2e circons-
cription de Reims, vient d'écrire au ministre du
commerce aulil le questionnerait, lors de la rentrée,
sur l'interprétation étroite donnée par l'administra-
tion locale des télégraphes au décret du 12 janvier
187f. - '-
Talites du Progras
INTERFÉRENCES MILITAIRES
Il n'est peut-être pas absolument correct
que les rédacteurs du même journal, qui
servent la même cause, en des postes dif-
férents, sous le même pavillon et appar-
tiennent à la même famille professionnelle,
se congratulent réciproquement coram
populo. Ça n'est pas « reçu », comme dit
l'autre, et ça ne se fait guère — pour res-
sembler un peu trop à un échange entre
compères de rhubarbe et de séné.
Mais ça m'est égal ! Né dans la peau
— meurtrie — d'un enfant terrible, et des-
tiné probablement à y mourir, je m'as-
sieds volontiers sur les traditions gênantes.
Honni soit qui mal y pense !
On ne s'étonnera donc pas, et je compte
même bien qu'on me donnera raison, si je
me permets de faire part aux lecteurs du
XIXe Siècle (dont j'ai la conviction, au
surplus, d'être l'interprète) de l'énorme
intérêt que je trouve et que je prends à
l'histoire au jour le jour du siège — pour
rire — de Paris, telle que nous la conte,
au courant de la plume, avec la compé-
tence, la précision et la bonne foi qu'on
lui connaît, mon cher camarade H. Ro-
maze. En vérité, je vous le dis, ces sim-
ples notes sans prétention, bâclées sur le
terrain, supérieurement documentées et
toutes vibrantes de crânerie patriotique et
d'optimiste Sincérité, sont peut-être ce
qu'on aura pu lire de plus suggestif sur
cette passionnante répétition générale
d'une tragédie redoutée. Romaze voit juste
et parle clair — ce qui est beaucoup plus
difficile et plus rare qu'on ne le suppose.
Rien ne lui échappe parmi les détails
vraiment caractéristiques de l'action, et il
est telle de ses feuilles volantes dont la
portée philosophique dépasse singulière-
ment, aux yeux du penseur que préoccupe
avant tout le jeu des lois de l'esprit hu-
main, la mesure des enseignements immé-
diats que peuvent offrir aux stratégistes et
aux tacticiens de métier les péripéties ar-
rangées à l'avance d'une parade mili-
taire.
C'est ainsi que j'ai été particulièrement
frappé par les quelques lignes qu'il consa-
crait samedi dernier à ces prodigieux pro-
jecteurs électriques dont l'usage, exclusi-
vement réservé autrefois aux surprises de
la guerre navale, vient d'être pour la
première fois (si je ne m'abuse) expéri-
menté à terre, en vue des nécessités de
l'attaque et de la défense des places. Peu
de spécialistes, à ma connaissance, au
moins dans la presse quotidienne, avaient
songé & souligner aussi nettement cette
curieuse innovation, grosse de consé-
quences, et qui soulève dépendant les
problèmes les plus palpitants et les plus
délicats. -
Souffrez ici que je m'explique.
Après avoir décrit, avec son souci d'exac-
titude ordinaire, les projecteurs électri-
ques modernes, si supérieurs aux tour-
teaux goudronnés, aux pots à feu et aux
étoiles éclairantes de nos pères, Romaze
ajoute — simplement :
Chaque progrès porte avec lui ses inconvé-
nients. Les projections lumineuses, dont il
est superflu de faire ressortir les avantages,
ont, en reyanche, le tort de donner toute fa-
cilité à l'ènnemi pour ïe réglage de son tir.
Il a fallu parer à ce danger.
On réussit parfaitement à mettre toute une
région à l'abri des investigations optiques dé
l'ennemi en produisant en avant, à l'aide
d'autres projecteurs commandés à distance,
un faisceau transversal convenablement dis-
persé. La nappe lumineuse ainsi produite
intercepte de la sorte tous les rayons des
projecteurs indiscrets, en empêchant absolu-
ment la visibilité de loin.
C'est-à-dire qu'il se fait, entre assié-
geants et assiégés, comme un duel optique,
un duel au rayon de lumière — un duel
dans lequel on oppose au glaivé de flamme
un bouclier de feu f
Eh bien! je le demande à ceux des con-
frères de Romaze qui n'ont même pas
remarqué le phénomene, est-ce qu'il n'y a
pas quelque chose de fantastique, de fabu,1
leux, de « sorcier », dans cette escrime
paradoxale, dont les bottes et les parades
se dessinent, à distance, avec ce qu'il y a
de plus ténu et de plus impalpable au
monde, avec la lumière ? Je déclare, en ce
qui me concerne, que je ne conçois rien
d'aussi saisissant, rien d'aussi magique,
rien qui en dise aussi long sur la puis-
sance et la subtilité du génie de la
science. Réfléchissez donc à ceci : étein-
dre une lueur avec une lueur, faire des
ténèbres avec de la clarté ! Savez-vous
que c'est autre chose que les mitrailleuses
automatiques et que la poudre sans fumée?
Mon Dieu ! je ne me dissimule pas que
cela ressemble vaguement à un phéno-
mène optiqye connu depuis belle lurette
— l'interférence. Mais qui diable aurait
rêvé d'appliquer l'interférence, cette me-
nue curiosité de laboratoire, à l'art de la
guerre ?
Depuis les expériences célèbres de Tho-
mas Young et de FresneJ, on connaissait
ce fait étrange, entrevu déjà il y a plus de
deux siècles par le savant jésuiteGrimaldi,
que lorsque deux rayons lumineux s'in-
terfèrent, c'est-à-dire se rencontrent, se
coupent et s'enchevêtrent, dans certaines
conditions déterminées, il arrive qu'ils
exercent l'un sur l'autre une action sui
generis dont l'effet peut aller jusqu'à
leur extinction plus ou moins complète.
Voilà vraiment qui est pour bouleverser
toutes les données de l'arithmétique vul-
gaire, parfois aussi malaisément concilia-
bles avec les lois de la physique et de la
chimie qu'avec celles de la biologie ou de
la mécanique sociale !
Quand on ajoutç des sous, des écus ou
des livres sterling à des guinées, à des
piastres ou à des centimes, ça finit tou-
jours par faire la forte somme. Quand on
ajoute des hommes à des hommes, ça finit
toujours par faire une foule. Quand on
ajoute du mouvement à du mouvement, il
semble qu'on devrait toujours finir égale-
j ment par obtenir une quantité supérieure
d'énergie, de puissance, de force dlSpOJij-
ble. Ce pendant, avec la lumière — et
quoique la lumière ne soit qu'un mode par-
ticulier du mouvement — il y a des réser-
ves à faire, car il peut arriver que de la
lumière ajoutée à de la lumière produise,
non pas plus de lumière, mais de l'obs-
curité.
C'est que, en matière de mouvement, la
quantité n'est pas tout, il y a aussi la qua-
lité, le rhytme des vibrations, leur ampli-
tude et leur forme.
On n'est pas encore définitivement fixé
sur la nature et la genèse des phénomènes
lumineux.
A ce propos, deux théories principales
sont en présence : la théorie de l'émission
— qui a beaucoup vieilli depuis Newton
et ne compte pour ainsi dire plus aucun
partisan — et la théorie de l'ondulation.
Suivant la théorie de l'émission, la lu-
mière serait formée de molécules maté-
rielles d'une infinie petitesse, que les
sources lumineuses éjaculeraient à flux
continu ; ces particules seraient douées de
forces attractives et répulsives considé-
rables, et ce serait de leur choc sur le nerf
optique que naîtraient nos sensations vi-
suelles.
La théorie de l'ondulation, imaginée par
Huyghens, suppose, au contraire, l'espace
rempli par une substance impondérable,
mais pourtant élastique, l'éther, qui pénè-
tre tous les corps. Les substances lumi-
neuses seraient celles qui, étant dans un
état continuel de vibration, communique-
raient leur frémissement ondulatoire à
l'éther; qui transmettrait ce mouvement
en tous sens, avec une vitesse de 300,000
kilomètres à la seconde.
Dans son livre si extraordinaire sur la •
Formation des Mondes, Turpin (qui ad-
met la matérialité de la lumière, assimilée
par lui à la matière radiante de Faraday
et de Crokes) prétend concilier les deux
hypothèses, lesquelles ne seraient, à l'en
croire, que deux aspects différents d'un
seul et même phénomène.
Mais, quoi qu'il en soit, ce qu'il y a de
plus probable, c'est que la lumière n'est
autre chose qu'un mouvement vibratoire,
dont, par conséquent, les radiations af-
fectent tour à tour, comme tous les mou- ;
tements vibratoires quelconques, des con-
vexités et des concavités, des reliefs et des
dépressions — des « ventres » et des
« nœuds ». Il s'ensuit que lorsque deux
rayons se croisent, il peut se faire que
leurs saillants et leurs rentrants respec-
tifs s'engrènent et s'harmonisent de façon,
si certaines conditions numériques — qu'on
a calculées — se réalisent, à se faire équi-
librent à s'annuler, absolument comme, au
point de conflit de deux systèmes de rides
concentriques produits par la chute de
pierres à la sùrfaee de l'eau, il apparaît
des régions où les molécules liquides de-
meurent en repos, absolument comme
deux sons (qui sont également des vibra-
tions ondulatoires) peuvent, dans telles ou
telles circonstances, se contredire et s'é-
tonnera. - r
Est-ce ainsi que les choses se passent
dans la bataille dé lumières signalée par
Romaze, ou plus simplement résulte-t-il
du frottement des rayons contrariés des
projecteurs antagoniques un éblouisse-
ment tel que le regard le plus perçant et le
mieux exercé s'y hypnotise et s'y égare ?
Je n'en sais rien, mais le résultat pratique
est toujours le même. M'est avis qu'il y a
dans le fait brutal, scientifiquement expli-
qué ou non, de quoi fournir abondante pâ-
ture aux imaginations les plus aventu-
reuses et les plus exigeantes.
.Connaissez-vous beaucoup de comptes
rendus des manœuvres de Vaujours qui
donnent autant - et aussi haut - à
penser ?
Raoul Lucet.
Lettres d'un ViOUI Fonte
Un témoignage d'un ancien fonctionnaire
et une séance du conseil municipal
de Vichy
Paris, le 16 septembre.
Monsieur le rédacteur,
Flânant l'autre jour sur le boulevard, j<
rencontre un âneien chef du cabinet d(
M. le baron de Nervo, à l'époque où lfv
baron de Nervo était préfet de l'Allieiv
Son premier mot fut pour me demander si
je lisais les « Lettres du Vieux Ponte ». Je
lui répondis que je ne les avais pas lues,
mais que j'en avais entendu parier.
— Lisez-les, reprit l'ancien chef de cabi-
net avec vivacité, lisez-les, et me prenant-
par le bouton de mon paletot il ajouta:
Vous qui êtes ce qu'on appelle un pilier de
tripot et qui croyez qu'avec l'argent que
vous avez perdu au jeu vous avez acheta
la science de tous les trucs en usage dans
les cercles ouverts et les casinos pour
dévaliser les joueurs, vous serez obligé
de reconnaître, quand vous aurez lu les
« Lettres du Vieux Ponte », que vous
n'êtes en matière de jeu, malgré votre ex-
périence, qu'un ignorant, un naïf, en un
mot, un innocent.
— Bah! dis-je à mon tour, il doit bien
y avoir dans ces lettres un peu d'exagéra-
tion.
— Pas la moindre, reprit l'ancien fonc-
tionnaire. J'ai pu m'en rendre compte en
lisant les dernières,entièrement consacrées
aux tripots de Vichy, car vous n'êtes pas,
sans savoir que j'ai été chef du cabinet du
baron de Nervo quand il était préfet de
l'Allier. Contrairement au préfet actuel M.
Guérin, M. le baron de Nervo n'admettait
pas qu'on dévalisât les baigneurs qui en-
trent pour se distraire dans les cercles et
casinos autorisés par le gouvernement, et
il avait entrepris - d'y mettre bon ordre.
Chargé par lui de la surveillance des jeux
et des croupiers de Vichy, j'avais fait ve-
nir une escouade d'agents de la sûreté,
et j'expulsai pour mes débuts 73 grecs en
une seulej ournée. Après une telle épuration !
et après huit jours d'activé surveillance, !
mes agents n'hésitèrent pas à me déclarée -,
que tout se passait le plus correctement du 1
monde au Cercle international sans aucune
crainte d'être voté. La perspective de joue*;
LE NUMÉRO eN !!le i dm
MARDI 48 SEPTEMBRE 1894 "-
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.:. - RÉDACTION ET AOWHUSTMTKMI =
142, Rue Mo-ntmartre i
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tous les Bureaux de Poste.
L RéiJnc cs Boissons
M. Poincaré a eu son heure de gloire.
C'était ad mois de mai dernier, après la
chûte du cabinet Casimir-Périer. La
réussite des combinaisons ministérielles
était suspendue aux décisions du jeune
député de la Meuse. Tous ceux qui étaient
appelés pour former un cabinet avaient
pour premier soin de se préoccuper de
savoir si M. Poincaré accepterait d'en-
trer dans leur ministère, et quand il
avait refusé, ils s'en allaient, navrés,
dire à M. Garnot : « Rien à faire, Poin-
caré ne veut pas ?. Il fallut que M. Car-
not joignît ses instances à celles de
M. Dupuy pour vaincre ses résistances.
Sans cela nous n'aurions peut-être pas
encore de ministère, car dans les deux
Chambres il n'y avait décidément per-
sonne autre que lui qui pût prendre le
ministère des finances.
Un homme qui fait tant de fàçons ne
peut être qu'un homme qui ne veut pas
galvauder ses mérites, et l'on avait ré
pandu le bruit que ceux de M. Poincaré
étaient extraordinaires. La Chambre avait
un peu fait la grimace au projet de bud-
get de M. Burdeau. M. Poincaré allait
lui présenter le budget idéal, celui
que la commission du budget sou-
haitait, et la question financière allait
être résolue comme par enchantement.
C'est avec une certaine hésitation que
l'on a vu que le nouveau ministre
éprouvait de grandes surprises et qu'il
annonçait tout d'abord qu'il ne songeait
pas à retirer le projet de budget pré-
senté par son prédécesseur, mais qu'il
se proposait simplement de le modifier
sur certains points. C'est avec une sur-
prise plus vive encore que l'on a cons-
taté que la session se terminait sans
que le ministre des finances eût déposé
les proj ets rectificatifs qu'il avait an-
noncés, de telle sorte que nous nous
trouvons, cette année, beaucoup moins
avancés qu'on ne l'est ordinairement S
pareille époque. La commission du
budget est saisie d'un budget, mais
elle est prévenue que ce budget sera:
modifié. Par conséquent, elle ne peut
consacrer à son. un temps qui
serait du temps perdu^et jusqu'à ces
derniers jours elle ignorait' par quoi$.
Poincaré - remplacerait les parties du
projet de M, Burcfeau qu'il" n'accepte
Das.
Sur un point, maintenant, nous som-
mes renseignés. M. Poincaré a fait dis-
tribuer, ces jours-ci, son projet sur la
réforme du régime des boissons. Nous
en avons déjà donné une analyse.: On
était en droit de penser que ce projet,
produit de quatre mois dâ méditations}
allait se distinguer par une originalité
puissante. Il décevra un peu cette opi-
nion. M. Poincaré dira pour son ex-
cuse qu'il n'a pas trouvé la question
entière. Elle a été bien souvent agitée.
Peu même s'en est fallu qu'elle n'arri-
vât à solution dans la dernière législa-
ture. La Chambre l'avait incorporée au
budget de 1893. Le Sénat l'en disjoi-
gnit, ce qui motiva.la chute du cabinet
Ribot. Mais le Sénat reprit la question
un peu plus tard ; il émit des votes et
peut-être serait-on arrivé à un accord, si,
la législature étant presque à son terme,
on n'avait pensé qu'il valait mieux lais-
ser à la Chambre actuelle le soin de ré-
gler la question.
M. Poincaré a repris dans le projet
ainsi élaboré les dispositions sur les-
quelles l'accord s'était fait, et il est ainsi
arrivé à dégrever les boissons hygiéni-
ques, vins, bières et cidres de 91 mil-
lions et demi, et il prendra les mesures
nécessaires pour préparer la future sup-
pression des droits d'octroi. Pour com-
penser cette perte de recettes, il a recours
à trois moyens : l'augmentation du droit
sur l'alcool, qu'il porte à 200 francs ;
un remaniement du tarif des licences et
une réglementation du privilège des
bouilleurs de cru. Il estime que la pre-
mière de ces mesures lui procurera une
recette de 75 millions et demi, la se-
conde 16 millions et la troisième 3 mil-
lions. C'est donc 94 millions et demi,
soit un excédent de 3 millions sur le
rendement actuel des droits sur les bois-
sons.
Mais M. Poincaré, qui est de la Meuse,
s'est bien gardé de supprimer, comme
le faisait M. Burdeau, le privilège des
bouilleurs de cru. S'il l'entoure de cer-
taines garanties qui doivent, suivant lui.
empêcher la fraude, il entend av* lit tout
le conserver, et c'est Ti ià surtout que
la réforme qu'il propose a de grandes
chances dé procurer des mécomptes au
Trésor. C'est un fait admis générale-
ment, en effet, que s'il convient de lais-
serait petit récoltant la liberté de fajr
les quelques litres d'alcool utiles pour la
consommation de la famille, C'est ce-
pendant par le privilège des bouilleurs
1 de cru que la fraude se trouve facilitée
et certains n'ont pas hésité à évaluer à
cent millions la perte qui résultait de la
fraude pour le Trésor.
Le projet de réforme de M. Poincaré
donne un stimulant nouveau aux frau-
deurs, puisqu'il élève le droit sur l'al-
cool de cinquante francs et que, par
conséquent, pour chaque hectolitre d'al-
cool fabriqué en fraude, il y a une sur-
prime de même importance. Il faut pré-
voir en outre que l'augmentation du
'droit restreindra dans une mesure ap-
préciable la consommation, tandis que
la suppression des droits sur les vins,
bières et cidres, jointe à l'abondance
des dernières récoltes, aura pour effet
d'élever la consommation de ces liqui-
des.
Que reste-t-il, dans ces conditions, de
la plus-value de rendement du droit sur
l'alcool prévue pour 75 millions? On
peut penser que le Trésor sera fort loin
d'encaisser tout ce que M. Poincaré lui
promet et qu'il se produira par consé-
quent un déficit budgétaire. C'est une
perspective qui n'a rien de séduisant.
LE « CABINET » DE LA MARINE
Tous les détails publias par certains jour-
naux sur l'organisation du cabinet civil du
ministre de la marine sont au moins préma-
turés.
Cette réforme, comme toutes celles qui s'ap-
pliquent au personnel des ministères, em-
porte un règlement d'administration publi-
que et devra être soumise à l'examen du con-
seil d'Etat, Il faudra, par conséquent, atten-
dre la fin des vacances de cette haute assem-
blée.
Disons, en attendant, qu'il ne peut être
question de confier les emplois nouveaux à
des attachés purement civils, ignorants des
rouages et du fonctionnement des services
¡maJi.time8 Ce sont des inspecteurs des servi-
ces administratifs f et des commissaires qui
formeront Te principal noyau du cabinet ci-
vil et qui pourront ainsi lutter enfin contre
les tendances rétrogrades et l'omnipotence du
corps dés officiers de vaisseau représentées
par les' « archevêques » de la rue Royale et
l'étfit-major général, ce prodigua sahs con-
trôle: des ressources budgétaires. ,;";',!'
:::.. : r'¡ -
f "l MORT' ';"j, j ",
pU CONTRE-AMIRAL LE BOURGEOIS
Le contre-amiral Le Bourgeois, comman-
dant en sous-ordre une des divisions de l'esca-
çlré active de la: Méditertannée" vient de suc-
comber à we, malaw.e dont il souffrait cruel-
lement depuis un mois, :
Petié-fils d'un pair de France, le contre-
àmiraLLe Bourgeois était âgé de soixante
n8;; il était entré à L'école navale en 1852 et
avait été promu enseigne de vaisseau. le 1er
avril 1858. Lieutenant ; en 1862,
Capitaine de frégate en 1875 et- capitaine de
vaifeseau le 31 décembre 1883, il avait dans ce
grade commandé la division de: équipages de
la flotte à Toulon. : ., -.,: i -, -.
En 1885, il fut nommé an commandement
de la Dévastation, qui portait: le pavillon du
contre-amiral Rallier dans l'escadre d'évolu-.
tions; il prit ensuite, le 28 juin 1888, le com-
mandement de la division navale du Tonkin,
comme chef de division ensous-ordiie dans la
division navale de l'Indo-Ghine, commandée
en chef par le contre-amiral de la Jaille ; il
avait son guidon sur VAclour.
C'est dans ce commandement qu'il reçut les
deux étoiles, le 17 mai 1890, et, rentrée en
France, il fut nommé comme contre-amiral
aux fonctions de major général à Toulon,
puis, le 1er janvier 1892, chef d'état-major du
5e arrondissement maritime.
hé 17 février; 1893, nommé, au commande-
ment d'une des divisions dé' l'escadre active
de la Méditerranée, il arborait son pavillon
sur le cuirassé Hoche. On sait que, dans les
premiers mois de cette année, if conduisit sa
division dans les échelles du Levant et visita
'es côtes d'Egypte, de Tunisie et de l'Algérie ;
à peine rentre à Toulgu, Il dut à nouveau
lever l'ancre pour se rendre là Mers-el-Kébir,
en raison des événements du Maroc. Le Hoche
devant se rendre à Brest pour le changement
de son artillerie, il avait arboré, le 1er sep-
tembre, son pavillon sur le Magenta. C'était
un officier distingué, et les missions flatteuses
qu'il a reçues montrent combien il était estimé
dans la marine.
Le contre-amiral Le Bourgeois était com-
mandeur de la Légion d'honneur.
Les obsèques auront lieu mardi ; l'escadre
active, arrivée hier soir à Toulon, leur don-
nera un caractère de grande solennité.
REGICIDE A L'AGONIE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Rome. 16 septembre.
Le cuisinier Passanante qui, le 17 novembre
1878, a attenté aux jours du roiHumbert, est à l'a-
gonie. Enfermé depuis longtemps dans l'asile d'a-
liénés d'Ambrogiana, Passanante a été frappé ces
temps derniers d'une paralysie cérébrale com-
plète.
LA VIANDE FOURNIE AUX SOLDATS
Saint-Affrique, 16 septembre.
On signale la fourniture de viande au 142" régi-
ment comme étant très mauvaise à Saint-Affri-
que.
A Millau, les vétérinaires inspecteurs des abat-
toirs ont refusé les bêtes présentées pour l'approvi-
sionnement dudit régiment. Ces bêtes ont quand
même été abattues et consommées par les hom-
mes.
Les vétérinaires inspecteurs ont adressé au
ministre de la guerre un rapport relatant les faits
ci-dessus.
LA DYNAMITE EN ESPAGNE
Séville, 16 septembre.
Op. a trouvé derrière Un rayon de la librairie Fc
une boîte en fer-blanc contenant cent cartouches de
dynamite chargées à balles.
Le libraire affirme qu'il ignore absolument com
ment cette boîte a pu être apportée dans sa bou-
tique.
Cette découverte cause une assez vive émotion
dans la ville.
M. TRANCHAU TRESORiER-PAYEUR GENERAL
M. Paul Tranchau, chef de bureau hors cadres
à l'administration centrale des finances, est nom-
mé trésorier-payeur du département des Hautes-
Pyrénées.
M. Ps$4 Tranchau était charge des fonctions de
cheï du secrétariat particulier du président Caraot.
LE
TESTAMENT POLITIQUE
DU
COMTE DE PARIS
Le dernier écrit du prétendant. — Plus
catholique encore que monarchiste.—
La profession de foi de Philippe VII.
Il n'y a pas cinq jours que le petit-fils de
Louis-Philippe 1er repose dans le caveau où
son grand-père fut déposé avant d'être ramené
dans la chapelle de Dreux, et c'est à peine si
l'on pense encore à celui dont le hasard des
circonstances aurait peut-être pu faire un roi
de France.
Les morts vont vite, dit-on. Jamais on ne
s'en était si bien aperçu et vraiment on n'a
pas beaucoup exagéré quand on a prétendu
que l'événement qui mettait en deuil la fa-
mille d'Orléans et presque toutes les maisons
princières d'Europe n'était guère qu'un « fait
divers ».
Pourtant, on ne lira point sans quelque in-
térêt ou pour mieux dire sans quelque curio-
sité le document que nous publions plus loin
et qui nous est adressé par notre correspon-
dant de Londres. C'est le testament politique
que M. le comte de Paris laisse à ses parti-
sans et qu'il a écrit quelques semaines seule-
ment avant de mourir, le 21 juillet.
Il rappellera bien pendant vingt-quatre
heures au moins l'attention sur sa personne-
et sur la cause qu'il représentait.
« Il m'a toujours paru fort imprudent,
même pour les princes et les hommes d'Etat
qui ont joué un grand rôle parmi leurs con-
temporains, d'écrire un testament politique.
PoUr qu'un tel document puisse "-'tte vrai-
ment utile à leurs successeurs, il faudrait
qu'ils eussent reçu le don de lire dans l'ave-
nir, don qu'il faut remercier Dieu de nous
avoir refusé.
» Aussi, au moment où je me prépare tout
particulièrement à comparaître devant le sou-
verain juge, je n'ai pas l'intention de tracer
une ligne de conduite à mon fils. Il connaît
mes pensées, mes sentiments, mes espéran-
ces; il aura toujours pour guide la conscience
de ses devoirs et l'amour passionné de la
France, qui est la tradition invariable de no-
tre maisôn.
» C'est à mes amis que je tiens à dire un
dernier adieu au moment de terminer une vie,
que je n'ai pu consacrer aussi utilement que
je l'aurais voulu, au service de notre pays. Et
je ne m'adresse pas seulement à ceux avec
qui j'ai été en relation directe. J'appelle amis
Ou amies toutes les personnes, quelle que
soit leur condition sociale, qui, de mon vi-
vant, ont fait des vœux "poûr le succès de la
cause monarchique et qui prieront Dieu pour
moi au jour de ma mon.
» Ce m'est une consolation de songer qu'elles
èe souviendront de moi lorsque des jours plus
peureux luiront sur la France., lorsque,
comme je le souhaite avec ardeur, l'es passions
politiques et religieuses qui divisent en ce
moment si profondément les eniants d'un
même pays seront apaisées. ;'
» Cet apaisement ne pourra être que l'œuvre
de la monarchie nationale et traditionnelle.
Seule elle pourra réunir dans un effort com-
Uiun tous les dévouements, tous les élans
généreux, qui à l'honneur de notre paya ne
sont le-monopole d'aucun parti. ', :'
; » Lorsque je ne serai plus; j'espère que la
France rendra justice aux -efforts que j'ai
faits au lendemain de ses désastres pour
l'aider à chercher le moyen de se relever en
revenant au principe monarchique. En 1873,
j'ai été à Frohsdorf pour écarter tous les
obstacles personnels et pour donner l'exem-
ple du respect absolu, du, principe héréditaire
dans la maison de Franco. Dix ans après, le
pajeti monarchique montrait sa 'vitalité et, son-
esprit politique, en ne-se laissant pas ébranler
par la transmission du dépôt traditionnel qui
passait du représentant de la branche aînée
au représentant de la branche cadette. >
» J'ai cherché à répondre à la confiance
que ce grand parti avait montrée, à son nou-
veau chef en travaillant à fusionner les élé-
ments divers donHl se composait. Le résultat
des élections de 1885 montra que ce travail
n'avait pas-été inutile. Nos adversaires poli-
tiques y répondirent par l'exil. Je n'avais rien
fait pour le provoquer, si ce n'est d'exciter
leurs a larmes. Je ne fit rien pour l'éviter et je
le subis comme l'une des plus dures consé-j
quences de la situation que me faisait ma
naissance. -
» J'ai poursuivi sans relàche dans l'exil
l'œuvre commencée sur. le sol français, au
milieu des circonstances les plus difficiles.
J'ai pu me tromper parfois sur les hommes
et les choses, mais je l'ai toujours fait de
bonne foi et j'ai le droit de dire que tous mes
actes n'ont jamais été inspirés que par mon
dévouement à la France et à la cause que je
représente. Mon but a toujours été de conser-
ver le dépôt du principe traditionnel dont ma
naissance m'avait constitué le gardien et de
prouver à la France que ce principe n'avait
rien d'incompatible avec les idées modernes,
avec notre état social actuel.
» En transmettant cet héritage à mon fils
aÎnÔ, je demande à tous mes amis de se ser-
rer autour de lui. J'ai confiance dans l'ave-
nir et j'espère qu'ils partageront cette con-
fiance. Elle sera leur soutien au milieu de
toutes les épreuves et le gage de leur succès
final.
» Je ne puis pas croire, en effet, que Dieu
ait pour toujours abandonné la France, le
pays auquel il a donné saint Louis et Jeanne
d'Arc. Or, pour qu'elle se relève, il faut qu'elle
redevienne une nation chrétienne. Une nation
qui a perdu le sentiment religieux, où les
passions ne sont plus retenues par un frein
moral, où ceux qui souffrent ne trouvent pas
un motif de résignation dans l'espoir de la
vie future, est destinée à se diviser, à se dé-
chirer, à devenir la proie de ses ennemis inté-
rieurs et extérieurs.
i) Le premier devoir de mes amis est donc
d'arracher la France à la voie funeste qui la
conduirait à une telle catastrophe. J'espère
que, dans cette œuvre de salut, ils verront se
réunir à eux tous les honnêtes gens que l'ex-
périence ne peut manquer d'éclairer un jour.
C'est le dernier vœu de l'exilé pour une patrie
à laquelle il recommande à ses enfants de
rester dévoués et fidèles.
» Stowe-liúu::;e, 21 juillet 189t
» PHILIPPE, comte de Paris. »
Nous ne voulons pas apprécier pour l'ins-
tant ce document, où le comte de Paris se
révèle plus catholique peut-être encore que
monarchiste, et où rien ne reste, en tout cas,
de l'esprit libéral de ses ancêtres.
Mais, malgré soi, on ne peut s'empêcher de
comparer à co testament,plus digne du comte
de Chambord que du petit-fils du roi-citoyen.
les dernières recommandations que le duc
d'Orléans adressait à son fils :
« Que le comte de Paris, disait le duc d'Or
léans, soit un de ces Instruments brisés avant
qu'ils aient servi ou qu'il devienne l'un des ou-
vriers de cette régénération sociale qu'on
n'entrevoit encore qu'à travers tant d'obsta-
cles; qu'il soit roi ou «ju'il 4çtneure défen-
seur inconnu et obscur d'une cause à la-
quelle nous appartenons tous, il faut qu'il
soit avant tout un homme de son temps et
de la nation, serviteur passionné et exclusif
de la France et de la Révolution. »
On avait déjà eu bien des fois l'occasion de
remarquer que le comte de Paris n'avait guère
écouté les conseils de son père. Jamais, ce-
pendant, il ne s'était montré aussi peu
« hommede son temps» que dans ce suprême
et dernier manifeste, qui prêterait à sourire
s'il n'avait été écrit à la veille de sa mort.
LA PRÉSENCE D'ARTDN A TURIN
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Turin, 16 septembre.
La Gazzetla di Torino publie des détails
curieux sur le séjour d'Arton à Turin.
« Arton, dit notre confrère, parle assez cou-
ramment l'italien. Il est accrédité par une
banque anglaise auprès d'un des banquiers
turinois les plus connus ; bien entendu il a
eu la précaution de prendre un faux nom.
» D'ailleurs Arton ne cherche pas trop à se
cacher. A peine arrivé à Turin, il a songé à
lancer une grosse affaire et à se procurer une
commande de charbon. Un industriel mila-
nais, qui était déjà autrefois en rapport avec
Arton, aurait figuré comme prête-nom dans
cette affaire à laquelle, d'ailleurs, Arton a
renoncé en dernière heure, on ne sait pas trop
pourquoi. »
La Gazzelta, à laquelle nous laissons toute
la: responsabilité de ce récit, ajoute encore les
réflexions suivantes :
« A ce qu'il paraît, la police française avait
perdu depuis six mois les traces d'Arton. Elle
n'a d'ailleurs aucun intérêt à. l'arrêter; son
activité se borne à ne pas le perdre de vue de
crainte qu'il ne soulève quelque scandale.
» Quand la police française apprend par
quelque agent secret qu'Arton se trouve dans
tel ou tel pays, elle s'empresse d'en signa-
ler la présence aux autorités locales. Mais
dans ces « notes officielles », la police fran-
çaise se garde toujours de faire mention du
nom d'Arton. Elle dénonce l'arrivée d'un es-
croc ou d'un anarchiste sans demander l'ar-
restation de l'invidu en question. Elle le re-
commande simplement à la plus rigoureuse
surveillance. -
» Ainsi, on a la certude qu'Arton se sentant
surveillé ne tenteta jamais de faire un coup
de tête. »
UN PHTISIQUE CENTENAIRE
: (DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Auxerre, 16 septembre.
On a annoncé ces jours derniers que M.
Victor Baillot, de Carisey, en faisant part du
mariage de son petit-fils, M. Jolly,. avec Mlle
Philippart, faisait suivre son. nom du titre de
« cçîntèn.^ë.et médaillé de Sainte-Hélène ».
; Ce vénérable Ètiryivant de la Grande Ar-
mè~/qui est tré§ valide, se propose d'assister
au mariage de son petits-nls. A ce propos,
voici quelques notes biographiques sur ce
vieux de la vieille :
Victor Baillot est né le 22 avril 1792 à Per-
cey, canton de Flogny ; il a donc aujourd'hui
cent un ans et cinq mois.
Il était à la bataille de Waterloo où, en
défendant le drapeau du 105e de ligne dont il
faisait partie/il reçut un coup de sabre sur
son shako. Il'fut fait, prisonnier parles An-
glais. A sa rentrée de captivité, on le réforma
à Auxerre le 16 août 1816. Son congé, que j'ai
pu voir, porte ; Piéformé comme phtisique
au 20 degré. :. ',
Chose bizarre, ce phtisique au- 2e degré, qui
a ujourdui, plus, d'un sièele d'âge, a fait
epo-..e;CQ jours derniers, et à pied, chaussé
de sabots, une promenade de. plus de 5 kilo-
mètres. y -
Et dire, .que ce jvieux brave s'éteindra sans
avoir le bonheur, si envié par les héros de la
Grande Armée, de voir briller sur sa poitrine
lè ruban de la Légion d'honneur, instituée par
Naoléon Ier pour récompenser la bravoure
et rhônneur de ses soldats.
M. Victor Baillot y aurait, ce nous semble,
quelque droit, lui qui fut grièvement blessé
en défendant le drapeau du 105e régiment de
ligne.
L'occasion est bonne. Qu'en pense le mi-
nistré de là guerre ?
LES -
DÉLÉGATIONS AUSTRO-HONGROISES
, ;', Budapest, 16 septembre.
Les présidents des Délégations,qui viennent
de se réunir à Budapest, ont tour à tour pré-
senté leurs adresses'à l'empereur.
Le baron J. de Chlumocky, président de la
Délégation autrichienne, a affirmé que l'on
peut voter sans danger pour l'équilibre du
budget les dispositions militaires indispensa-
bles pour le développement de la mobilisation
et va dépeint en termes chaleureux l'activité
infatigable et paternelle de l'empereur.
Le comte Ladislas Tisza, président de la
Délégation hongroise, s'est attaché surtout à
montrer de bienfaits de la triple alliance,
« qui présente une importance double en face
des nouveaux- courants qui s'observent au
sujet de l'organisation de l'Etat et de la so-
ciété et qui permet à tous les Etats de consacrer
à l'intérieur tous leurs efforts à la conciliation
de leurs éléments contradictoires ».
Dans sa réponse, l'empereur a dit entre au.
-très choses :
« J'éprouve une vive satisfaction de voir
que la confiance dans le maintien et la conso-
lidation de la paix, exprimé par moi lors de
la dernière réunion des Délégations, trouve
sa confirmation dans la situation actuelle
de l'Europe.
» Je suis heureux aussi que les rapports
très amicaux que nous entretenons avec
toutes les puissances justifient l'espérance
que nous pourrons nous vouer dans l'avenir
et sans interruption au développement du
bien-être de-nos peuples.
» Toutefois, il reste nécessaire, et mon
gouvernement juge qu'il est de son devoir
d'agir en cela à l'exemple de toutes les autres
puissances, de n'apporter aucune interruption
dans le développement des forces militaires
de la monarchie. »
L'empereur fait ressortir ensuite que le
budget de la guerre se renferme dans les
limites de la progression organisée et approu-
vée par les dernières Délégations, Le budget
tient consciencieusement compte de la si-
tuation financière.
Le discours constate enfin que la Bosnie et
l'Herzégovine couvriront leurs dépenses en
1895 entièrement par leurs propres recettes.
La réponse de l'empereur a été accueillie
avec de vifs applaudissements, tant par la
délégation du Reichsrath qu'il a reçue à midi
que par la délégation hongroise qu'il a reçue
à une heure.
UNE QUESTION
M. Adrien de Montebello, député de la 2e circons-
cription de Reims, vient d'écrire au ministre du
commerce aulil le questionnerait, lors de la rentrée,
sur l'interprétation étroite donnée par l'administra-
tion locale des télégraphes au décret du 12 janvier
187f. - '-
Talites du Progras
INTERFÉRENCES MILITAIRES
Il n'est peut-être pas absolument correct
que les rédacteurs du même journal, qui
servent la même cause, en des postes dif-
férents, sous le même pavillon et appar-
tiennent à la même famille professionnelle,
se congratulent réciproquement coram
populo. Ça n'est pas « reçu », comme dit
l'autre, et ça ne se fait guère — pour res-
sembler un peu trop à un échange entre
compères de rhubarbe et de séné.
Mais ça m'est égal ! Né dans la peau
— meurtrie — d'un enfant terrible, et des-
tiné probablement à y mourir, je m'as-
sieds volontiers sur les traditions gênantes.
Honni soit qui mal y pense !
On ne s'étonnera donc pas, et je compte
même bien qu'on me donnera raison, si je
me permets de faire part aux lecteurs du
XIXe Siècle (dont j'ai la conviction, au
surplus, d'être l'interprète) de l'énorme
intérêt que je trouve et que je prends à
l'histoire au jour le jour du siège — pour
rire — de Paris, telle que nous la conte,
au courant de la plume, avec la compé-
tence, la précision et la bonne foi qu'on
lui connaît, mon cher camarade H. Ro-
maze. En vérité, je vous le dis, ces sim-
ples notes sans prétention, bâclées sur le
terrain, supérieurement documentées et
toutes vibrantes de crânerie patriotique et
d'optimiste Sincérité, sont peut-être ce
qu'on aura pu lire de plus suggestif sur
cette passionnante répétition générale
d'une tragédie redoutée. Romaze voit juste
et parle clair — ce qui est beaucoup plus
difficile et plus rare qu'on ne le suppose.
Rien ne lui échappe parmi les détails
vraiment caractéristiques de l'action, et il
est telle de ses feuilles volantes dont la
portée philosophique dépasse singulière-
ment, aux yeux du penseur que préoccupe
avant tout le jeu des lois de l'esprit hu-
main, la mesure des enseignements immé-
diats que peuvent offrir aux stratégistes et
aux tacticiens de métier les péripéties ar-
rangées à l'avance d'une parade mili-
taire.
C'est ainsi que j'ai été particulièrement
frappé par les quelques lignes qu'il consa-
crait samedi dernier à ces prodigieux pro-
jecteurs électriques dont l'usage, exclusi-
vement réservé autrefois aux surprises de
la guerre navale, vient d'être pour la
première fois (si je ne m'abuse) expéri-
menté à terre, en vue des nécessités de
l'attaque et de la défense des places. Peu
de spécialistes, à ma connaissance, au
moins dans la presse quotidienne, avaient
songé & souligner aussi nettement cette
curieuse innovation, grosse de consé-
quences, et qui soulève dépendant les
problèmes les plus palpitants et les plus
délicats. -
Souffrez ici que je m'explique.
Après avoir décrit, avec son souci d'exac-
titude ordinaire, les projecteurs électri-
ques modernes, si supérieurs aux tour-
teaux goudronnés, aux pots à feu et aux
étoiles éclairantes de nos pères, Romaze
ajoute — simplement :
Chaque progrès porte avec lui ses inconvé-
nients. Les projections lumineuses, dont il
est superflu de faire ressortir les avantages,
ont, en reyanche, le tort de donner toute fa-
cilité à l'ènnemi pour ïe réglage de son tir.
Il a fallu parer à ce danger.
On réussit parfaitement à mettre toute une
région à l'abri des investigations optiques dé
l'ennemi en produisant en avant, à l'aide
d'autres projecteurs commandés à distance,
un faisceau transversal convenablement dis-
persé. La nappe lumineuse ainsi produite
intercepte de la sorte tous les rayons des
projecteurs indiscrets, en empêchant absolu-
ment la visibilité de loin.
C'est-à-dire qu'il se fait, entre assié-
geants et assiégés, comme un duel optique,
un duel au rayon de lumière — un duel
dans lequel on oppose au glaivé de flamme
un bouclier de feu f
Eh bien! je le demande à ceux des con-
frères de Romaze qui n'ont même pas
remarqué le phénomene, est-ce qu'il n'y a
pas quelque chose de fantastique, de fabu,1
leux, de « sorcier », dans cette escrime
paradoxale, dont les bottes et les parades
se dessinent, à distance, avec ce qu'il y a
de plus ténu et de plus impalpable au
monde, avec la lumière ? Je déclare, en ce
qui me concerne, que je ne conçois rien
d'aussi saisissant, rien d'aussi magique,
rien qui en dise aussi long sur la puis-
sance et la subtilité du génie de la
science. Réfléchissez donc à ceci : étein-
dre une lueur avec une lueur, faire des
ténèbres avec de la clarté ! Savez-vous
que c'est autre chose que les mitrailleuses
automatiques et que la poudre sans fumée?
Mon Dieu ! je ne me dissimule pas que
cela ressemble vaguement à un phéno-
mène optiqye connu depuis belle lurette
— l'interférence. Mais qui diable aurait
rêvé d'appliquer l'interférence, cette me-
nue curiosité de laboratoire, à l'art de la
guerre ?
Depuis les expériences célèbres de Tho-
mas Young et de FresneJ, on connaissait
ce fait étrange, entrevu déjà il y a plus de
deux siècles par le savant jésuiteGrimaldi,
que lorsque deux rayons lumineux s'in-
terfèrent, c'est-à-dire se rencontrent, se
coupent et s'enchevêtrent, dans certaines
conditions déterminées, il arrive qu'ils
exercent l'un sur l'autre une action sui
generis dont l'effet peut aller jusqu'à
leur extinction plus ou moins complète.
Voilà vraiment qui est pour bouleverser
toutes les données de l'arithmétique vul-
gaire, parfois aussi malaisément concilia-
bles avec les lois de la physique et de la
chimie qu'avec celles de la biologie ou de
la mécanique sociale !
Quand on ajoutç des sous, des écus ou
des livres sterling à des guinées, à des
piastres ou à des centimes, ça finit tou-
jours par faire la forte somme. Quand on
ajoute des hommes à des hommes, ça finit
toujours par faire une foule. Quand on
ajoute du mouvement à du mouvement, il
semble qu'on devrait toujours finir égale-
j ment par obtenir une quantité supérieure
d'énergie, de puissance, de force dlSpOJij-
ble. Ce pendant, avec la lumière — et
quoique la lumière ne soit qu'un mode par-
ticulier du mouvement — il y a des réser-
ves à faire, car il peut arriver que de la
lumière ajoutée à de la lumière produise,
non pas plus de lumière, mais de l'obs-
curité.
C'est que, en matière de mouvement, la
quantité n'est pas tout, il y a aussi la qua-
lité, le rhytme des vibrations, leur ampli-
tude et leur forme.
On n'est pas encore définitivement fixé
sur la nature et la genèse des phénomènes
lumineux.
A ce propos, deux théories principales
sont en présence : la théorie de l'émission
— qui a beaucoup vieilli depuis Newton
et ne compte pour ainsi dire plus aucun
partisan — et la théorie de l'ondulation.
Suivant la théorie de l'émission, la lu-
mière serait formée de molécules maté-
rielles d'une infinie petitesse, que les
sources lumineuses éjaculeraient à flux
continu ; ces particules seraient douées de
forces attractives et répulsives considé-
rables, et ce serait de leur choc sur le nerf
optique que naîtraient nos sensations vi-
suelles.
La théorie de l'ondulation, imaginée par
Huyghens, suppose, au contraire, l'espace
rempli par une substance impondérable,
mais pourtant élastique, l'éther, qui pénè-
tre tous les corps. Les substances lumi-
neuses seraient celles qui, étant dans un
état continuel de vibration, communique-
raient leur frémissement ondulatoire à
l'éther; qui transmettrait ce mouvement
en tous sens, avec une vitesse de 300,000
kilomètres à la seconde.
Dans son livre si extraordinaire sur la •
Formation des Mondes, Turpin (qui ad-
met la matérialité de la lumière, assimilée
par lui à la matière radiante de Faraday
et de Crokes) prétend concilier les deux
hypothèses, lesquelles ne seraient, à l'en
croire, que deux aspects différents d'un
seul et même phénomène.
Mais, quoi qu'il en soit, ce qu'il y a de
plus probable, c'est que la lumière n'est
autre chose qu'un mouvement vibratoire,
dont, par conséquent, les radiations af-
fectent tour à tour, comme tous les mou- ;
tements vibratoires quelconques, des con-
vexités et des concavités, des reliefs et des
dépressions — des « ventres » et des
« nœuds ». Il s'ensuit que lorsque deux
rayons se croisent, il peut se faire que
leurs saillants et leurs rentrants respec-
tifs s'engrènent et s'harmonisent de façon,
si certaines conditions numériques — qu'on
a calculées — se réalisent, à se faire équi-
librent à s'annuler, absolument comme, au
point de conflit de deux systèmes de rides
concentriques produits par la chute de
pierres à la sùrfaee de l'eau, il apparaît
des régions où les molécules liquides de-
meurent en repos, absolument comme
deux sons (qui sont également des vibra-
tions ondulatoires) peuvent, dans telles ou
telles circonstances, se contredire et s'é-
tonnera. - r
Est-ce ainsi que les choses se passent
dans la bataille dé lumières signalée par
Romaze, ou plus simplement résulte-t-il
du frottement des rayons contrariés des
projecteurs antagoniques un éblouisse-
ment tel que le regard le plus perçant et le
mieux exercé s'y hypnotise et s'y égare ?
Je n'en sais rien, mais le résultat pratique
est toujours le même. M'est avis qu'il y a
dans le fait brutal, scientifiquement expli-
qué ou non, de quoi fournir abondante pâ-
ture aux imaginations les plus aventu-
reuses et les plus exigeantes.
.Connaissez-vous beaucoup de comptes
rendus des manœuvres de Vaujours qui
donnent autant - et aussi haut - à
penser ?
Raoul Lucet.
Lettres d'un ViOUI Fonte
Un témoignage d'un ancien fonctionnaire
et une séance du conseil municipal
de Vichy
Paris, le 16 septembre.
Monsieur le rédacteur,
Flânant l'autre jour sur le boulevard, j<
rencontre un âneien chef du cabinet d(
M. le baron de Nervo, à l'époque où lfv
baron de Nervo était préfet de l'Allieiv
Son premier mot fut pour me demander si
je lisais les « Lettres du Vieux Ponte ». Je
lui répondis que je ne les avais pas lues,
mais que j'en avais entendu parier.
— Lisez-les, reprit l'ancien chef de cabi-
net avec vivacité, lisez-les, et me prenant-
par le bouton de mon paletot il ajouta:
Vous qui êtes ce qu'on appelle un pilier de
tripot et qui croyez qu'avec l'argent que
vous avez perdu au jeu vous avez acheta
la science de tous les trucs en usage dans
les cercles ouverts et les casinos pour
dévaliser les joueurs, vous serez obligé
de reconnaître, quand vous aurez lu les
« Lettres du Vieux Ponte », que vous
n'êtes en matière de jeu, malgré votre ex-
périence, qu'un ignorant, un naïf, en un
mot, un innocent.
— Bah! dis-je à mon tour, il doit bien
y avoir dans ces lettres un peu d'exagéra-
tion.
— Pas la moindre, reprit l'ancien fonc-
tionnaire. J'ai pu m'en rendre compte en
lisant les dernières,entièrement consacrées
aux tripots de Vichy, car vous n'êtes pas,
sans savoir que j'ai été chef du cabinet du
baron de Nervo quand il était préfet de
l'Allier. Contrairement au préfet actuel M.
Guérin, M. le baron de Nervo n'admettait
pas qu'on dévalisât les baigneurs qui en-
trent pour se distraire dans les cercles et
casinos autorisés par le gouvernement, et
il avait entrepris - d'y mettre bon ordre.
Chargé par lui de la surveillance des jeux
et des croupiers de Vichy, j'avais fait ve-
nir une escouade d'agents de la sûreté,
et j'expulsai pour mes débuts 73 grecs en
une seulej ournée. Après une telle épuration !
et après huit jours d'activé surveillance, !
mes agents n'hésitèrent pas à me déclarée -,
que tout se passait le plus correctement du 1
monde au Cercle international sans aucune
crainte d'être voté. La perspective de joue*;
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