Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1894-09-16
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 16 septembre 1894 16 septembre 1894
Description : 1894/09/16 (A24,N8280). 1894/09/16 (A24,N8280).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/04/2013
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LES
nnts de Pkilippc VIII
La France a un nouveau roi. M. Cor-
îtély disait hier que « ce pays a besoin
: d'un rajeunissement », et il ne voulait
pas mettre en doute « qu'il s'éprît bien-
tôt de ce prince Charmant qui vient pour
la première fois de lui parler avec des
mots de vigueur et d'amour ». Sur le
besoin de rajeunissement, M. le duc
'd'Orléans paraît bien près de s'entendre
'avec le rédacteur du Gaulois. Il a même
semblé croire que ce besoin était ur-
gent, si l'on en juge par la hâte avec la-
quelle, avant même que son père fût
mort, il s'est emparé du rôle de préten-
dant. Il y a pour les héritiers des dy-
nasties royales des grâces d'état, et la
;ptSp tthêtde in partibus, adoucit singulière-
fTQpit les Couleurs qu'éprouve le commun
tesmortels.
A peine la pierre du tombeau scellée
fsur le cercueil de son père, M. le duc
d'Orléans garaissait assez consolé, et l'on
imaginerait difficilement quelque chose
de pllis sec que l'allocution de ce jeune
homme de vingt-cinq ans. A lire ce pe-
tit discours du « prince Charmant », on
est fort tenté de croire que, pour les im-
patiences brouillonnes de la jeunesse
royaliste et de son nouveau chef, le
comte de Paris n'apparaissait guère que
comme un obstacle. Vieilli loin du
trône, celui-ci s'était assez résigné à son
sort. Ceux même qui le connaissaient
laissaient entendre qu'il s'y serait ré-
signé tout à fait, sans certaines ambi-
tions qui s'agitaient autour de lui et
auxquelles il était parfois contraint de
donner quelque apparence de satisfac-
tion.
Manifestement, le duc d'Orléans s'i-
magine que la mort de son père sup-
prime un obstacle et que, sous son im-
pulsion, les choses vont prendre une
autre allure. L'empressement qu'il a mis
à se séparer de M. d'Haussonville, l'é-
loignement dans lequel il a su, malgré
une cordialité apparente, tenir les amis,
les anciens conseillers de son père,
montrent assez son intention de ra-
jeunir la direction de son parti. Mais
que sera ce parti raj euni ? A lire
la liste de. ceux dont, dès la pre-
mière heure, le duc d'Orléans s'est en-
touré, on peut croire que si les noms
changent, la cause de la jeunesse n'y
gagne guère. Seulement, c'est l'élimi-
nation définitive de tout ce qui pouvait
rappeler les idées libérales, de tout ce qui
éprouvait dans une certaine mesure
l'influence du mouvement d'où était
sortie la monarchie révolutionnaire de
1830.
Les journées de Juillet sont rayées
de l'histoire par l'arrière-petit-fils de
Louis-Philippe. Le petit-fils du duc
d'Orléans renie la Révolution dont Phi-
lippe-Egalité fut un des auteurs. Il n'a
même plus, comme son père, la préten-
tion de concilier en lui le principe ré-
volutionnaire et le principe du droit di-
vin. Il est l'héritier pur et simple de la
monarchie légitime et du comte de
Chambord. C'est de cette monarchie que
se sont toujours réclamés les amis du
nouveau prétendant, le duc de La Ro-
chefoucauld, le duc de Luynes et la
coterie qui s'agite autour de Mme la
duchesse d'Uzès.
Tout l'effort du comte de Paris avait
tendu à maintenir autour de lui les an-
ciens orléanistes avec les royalistes. Il
y avait médiocrement réussi, car de la
visite à Frohsdorf, en 1873, date la
rupture avec les amis les plus considé-
rables de la monarchie de 1830, et
parmi les autres, beaucoup, sans doute,
ne seraient-pas allés jusqu'où on au-
rait voulu les entraîner au lendemain
d'une restauration. Néanmoins, le souci
de mettre d'accord les deux fractions du
parti royaliste inspirait au comte de
Paris et à ses lieutenants de la prudence
et de la circonspection. Bien qu'il eût
fortement dévié vers l'extrême droite, il
comprenait la nécessité de. faire cer-
taines concessions à la gauche de son
parti, à ceux qui se souvenaient de la
monarchie de 1830 et pour lesquels le
testament de son père était resté une
sorte de catéchisme politique.
Avec le duc d'Orléans, dès la pre-
mière heure ces anciens du parti se
trouvent en conflit. Ils se voient en pré-
sence d'un jeune homme qui, avec une
ignorance complète de son temps, leur
parle de ses « droits », de sa « mis-
sion », qui se fait fort d'obtenir « l'aide
de Dieu » et qui paraît disposer de la
nation comme si elle était sa chose.
C'est la monarchie autoritaire et de
droit divin. Ceux qui ont l'expérience
de la vie ne peuvent que sQurire en
voyaut la confiance dont çe jeûne
homme fait parade, et les anciens orléa-
nistes se trouvent assez désorientés par
ce langage d'un autre temps et d'autres
circonstances. Entre la monarchie que
le duc d'Orléans paraît représenter et
eux-mêmes il y a un abîme, et ce ne
sont assurément pas les débuts du pré-
tendant qui lui attireront les sympa-
thies générales que M. Cornély lui pro-
met. Les légitimistes, (fui acceptaient
avec une mauvaise grâce à peine dissi-
mulée la direction du comte de Paris,
salueront en son fils le « véritable des-
cendant de nos rois». Mais ce n'est pas
cela qui augmentera sa clientèle. Bien
loin delà.
■—B—BWB_gB—_M_
Après les Obsèques du Comte de Paris
Londres, 14 septembre.
Sur l'ordre de la comtesse de Paris, les
couronnes, les croix et les fleurs qui restaient
à Stowe-house ont été transportées à Wey-
bridge par deux fourgons spéciaux. On re-
marquait, parmi les couronnes transportées
aujourd'hui, celle des officiers de l'armée
américaine, en roses artificielles. Cette cou-
rone mesure huit pieds de diamètre.
Le prince de Galles, qui avait reçu hier la
visite du duc d'Orléans, est allé aujourd'hui
à 'Stowe-house. Il , en est revenu cette après-
midi, accompagné jusqu'à la gare de Buckin-
gham par le duc d'Orléans.
La duchesse de Montpensier est partie ce
matin de Stowe-house pour Londres.
LA RETRAITE DE M. D'HAUSSONVILLE
Nous avons annoncé hier que M. le comte
d'Haussonville abandonnait ses fonctions de
chef du parti royaliste.
Le Soleil publie à ce sujet la petite note
suivante dont le caractère officieux ne saurait
être mis en doute :
M. le comte d'Haussonville, en arrivant à Stowe,
samedi soir, a offert immédiatement à monseigneur
le duc d'Orléans sa démission des fonctions qu'il
remplissait auprès de monseigneur le comte de
Paris, et il a insisté pour qu'elle fut acceptée, en
faisant remarquer au prince que le changement de
la situation rendait nécessaire un changement de
personne. Son dévouement, a-t-il dit, restait le
même, mais il ne pouvait pas être utilement le re-
présentant direct du duc d'Orléans comme il avait
été le représentant direct de son père.
Le prince a apprécié la jlistesse de ces réflexions ;
il a demandé seulement à M. d'Haussonville de
garder ses fonctions jusqu'aux funérailles de Mon-
sieur le eomte de Paris.
En effet, M. d'Haussonville a assisté le duc d Or-
léans, le jour dés funérailles, dans la réception des
Français à Grosvenor-hotel. Il accompagnait -le
prince et lui nommait* les personne que le duc
d'Orléans ne connaissait pas encore. Le prince a
témoigné à M. d'Haussonville une confiance abso-
lue et lui a prodigué les témoignages d'une cordia-
lité marquée.
Le duc d'Orléans ne paraît pas avoir l'inten-
tion de pourvoir au remplacement de M. d'Haus-
sonville. Sa pensée serait de ne pas avoir de repré-
sentant direct et d'entretenir lui-même les rap-
ports avec ses partisans. Toutefois le bureau de la
rue Saint-Honoré restera bureau de correspondance
et de renseignements sous la direction de M. Eu-
gène Dufeuille.
Ainsi donc, désormais, le roi n'aura pas d'in-
termédiaire entre lui et ses sujets.
L'AFFAIRE DES ESCLAVES EN ÉGYPTE
Le Caire, 14 septembre.
Voici le verdict du conseil de guerre dans
l'affaire du trafic d'esclaves :
Les deux pachas sont acquittés.
Les marchands d'esclaves et les intermé-
diaires sont condamnés à 18 mois de travaux
forcés.
Un Bédouin et le nommé Abd-ul-Hamid, in-
dividus qui se sont reconnus coupables, sont
condamnés à.six mois de la même peine.
Le major Kitchener a ratifié les condamna-
tions du conseil de guerre, mais il refuse
d'admettre l'acquittement des deux pachas,
car, à son avis, les témoignages produits éta-
blissent leur complicité.
ACCIDENT A UN GÉNÉRAL
Artenay, 14 septembre.
Le général de Verdiére, qui, à partir d'au-
jourd'hui, devait prendre le commandement
de l'ennemi figuré, vient d'être victime d'un
fâcheux accident.
Il avait voulu, profitant du jour de repos
accordé à l'armée par le général de Galliffet,
gagner immédiatement de nouveaux canton-
nements en vue des opérations'à engager à
partir de demain.
En traversant le village de Loigny, il avait
décidé que des honneurs particuliers seraient
rendus devant l'église romane construite en
mémoire de la bataille du 2 décembre 1870,
derrière laquelle un ossuaire a été élevé.
Les musiques des 115e et 117e régiments se
placèrent devant l'église pendant que défi-
laient, rendant les honneurs prescrits, toutes
les troupes de la 16e brigade.
Le général de Verdiére défila lui-même, le
sabre à la main.
Subitement effrayé par la musique, le grand
et superbe cheval bai que montait le général
s'emballa et, dans un vertigineux galop, se
précipita au fond d'une ruelLe close par un
mur d'un mètre cinquante. Il franchit l'obsta
ele, traversa un pré, sauta une haie et voulut
bondir par-dessus un fossé d'une grande lar-
geur. Il se reçut mal, tomba sur les genoux
et projeta le général à plus de dix mètres.
Aussitôt relevé, le général fut l'objet de
soins empressés.
On craignait tout d'abord de graves com-
plications. Les consultations des médecins
rassurèrent bientôt les nombreux amis du gé-
néral de Verdiére. Le général avait, il est
vrai, une fracture du poignet, une fracture de
la clavicule et quelques contusions au-dessous
du cœur, mais aucune de ces blessures ne
présentait de gravité.
Le général, qui, on le sait, doit être admis
l'année prochaine dans le cadre de réserve, a
demandé aussitôt après sa chute à conserver
le commandement de l'ennemi.
Il a dû y renoncer sur le conseil des méde-
cins.
Transporté en voiture à Orgères, le géné-
ral rentrera ce soir à Paris. Il aura le général
Baillod pour successeur dans le commande-
ment de l'ennemi figuré.
C'est le général Haubt, commandant la 5e
brigade de dragons, qui remplacera le géné-
ral Baillod au commandement de la lre divi-
sion de cavalerie.
Le général Bichot, de l'infanterie de ma-
rine, a pris le commandement de la 8e di-
vision d'infanterie, en remplacement du gé-
néral de Verdiére, qui était placé à sa tête
depuis le commeDcemenf des manœuvres jus-
--au'&là côûstitu&Qïi de l'ennemi
."- "-" ..! < --"' ;
M. DUPUY A VERNET
PETITS FAITS D'HISTOIRE
RÉTROSPECTIVE
Comment M. Dupuy était gardé à Vernet-
les-Bains. — Un magistrat passé à
tabac. — Un pays ruiné.
Un de nos amis qui arrive des Pyrénées
nous a fourni de piquants renseignements
sur le séjour de M. Charles Dupuy à Vernet-
les-Bains. Peut-être serviront-ils quelque jour
à fixer l'histoire de la villégiature dans ce
joli pays du président du conseil.
Pour bien comprendre une partie du récit
qui va suivre, il est nécessaire de connaître,
au point de vué topographique, le pays qui
nous occupe.
Le village de Vernet-les-Bains, réputé pour
ses eaux thermales sulfureuses sodiques, est
situé au pied du Canjgou.
L'hôtel de Portugal où était descendu M.
Dupuy se trouve sur le versant de la monta-
gne à plus de 600 mètres d'aititude. Il se com-
pose d'un corps de bâtiment principal entouré
d'un parc très. grand. M. Dupuy s'était ré-
servé la jouissance exclusive de l'hôtel et de
ses dépendances.
L'hôtel se compose d'un premier étage,
d'un entresol, d'un rez-de-chaussée, d'un sclas-
sol, au-dessous duquél un autre étage, celui
des bains. M. Dupuy habitait avec sa famille
le premier étage.
A peine arrivé, il se préoccupa de sa sûreté
personnelle. Un moment il songea à appeler
le génie pour construire des ouvrages de
défense autour de Thôtel de Portugal, des
reiriparts. H renonça bientôt à ce projet pour
celui-ci :
fi installa dans les salles à arcades du rez-
de-chaussée quarante douaniers et dans le
sous-sol, à l'étage des bains, ce qu'on appelait
la grande garde.
Puis, autour du château, quatre lignes de
douaniers distantes res unes !p ..,autroà- düne
quinzaine de iftetres. La garde qui valait agx
barrières de l'hôtel de Portugal avaft'ses AAn-
signes, son mot d'ordre. LesdtfuaÉiers cppt JaJ
composaient devaient toujours s'entendre et
se voir.
Ces précautions contre un danger exagéré af-
folaient l'entourage de M. 0uf)1iy, étjèfe poyij
qu'un jour, vers cinq heures, la beljerfîpé dii
président du conseil, âgée de trejge â^qgiatofze
ans, ayant vu courir un homme dans le parc,
s'imagina qu'on venait pour assassiner son ;
beau-père. La pauvre enfant se précipita .clans
l'appartement et faillit s'y trouver rrlL;r;./ltm-
me qu'elle avait pris pow un anarchiste dange-
reux était un brave douanier de garfle qui
revenait au pas gymnastique à son poste
qu'il avait quitté un instant,
Pour chercher un endroit écarté
Ou d'être homme d'honneur il eût la liberté !
Le ministre deFinLérieur, chargé delà sûreté
générale, prenait, comme on le voit, grand
soin de la sienne.
MAGISTRATS A TOUT FAIRE
Cela ne l'empêchait pas d'avoir des inquié-
tudes. Quelque anarchiste habile ne parvien-
drait-il pas, à la faveur de la nuit, à Se glis-
ser jusqu'à l'hôtel? La surveillance des
douaniers ne se ralentissait-elle pas quelque-
fois ?
Il voulut le savoir, car ses nuits étaient
sans sommeil. Il pria donc M. Hapcher, sub-
stitut du procureur de la République à Per-
pignan, de jouer un soir le rôle d'anarchiste,
c'est-à-dire de chercher à franchir, par ruse
- ou par force, la quadruple ligne de douaniers
qui entourait l'hôtel de Portugal. Le magis-
trat fut-il très heureux d'avoir été choisi pour
cet emploi ? On en peut douter. Mais le prési-
dent du conseil est le dispensateur des biens
de la République, sièges de procureur, croix,
etc. M. le substitut Hapcher obéit. Déguisé,
un soir, vers huit heures, il tenta l'expé-
rience convenue. Il n'alla pas loin.
Deux douaniers l'aperçurent, lui jetèrent un
manteau sur la tête et l'emmenèrent en le
bourrant, absolument comme nos bons gar-
diens de la paix à Paris, et en lui serrant si
fortement les poignets qu'il en souffrit pen-
dant plusieurs jours.
Ce ne fut qu'au poste qu'il put se faire re-
connaître. Il félicita, cela va sans dire, les
agents de la façon dont ils exerçaient le ur
surveillance, et M. Dupuy, à son tour, le re-
mercia,, mais ne le' guérit pas des blessures
qui lui avaient été faites aux poignets.
Cette expérience n'aurait pas été la seule,
nous assure-t-on. M. Puig, président du tri-
bunal, aurait servi de sujet pour une seconde,
M. Dupuy ne jugeant sans doute pas la pre-
mière assez concluante.
LA TERREUR A VERNET
Dans le village de Vernet et dans ceux des
environs la terreur régnait. Impossible de se
promener dans les rues avec une canne ou un
parapluie sans être suspect. Or, aussitôt sus-
pecte, on était arrêté. Chez soi-même on n'é-
tait pas à l'abri des investigations policières.
Pour un oui, pour un non, le touriste le plus
innocent était appréhendé et conduit en pri-
son.
A la table d'hôte de M. Martin-Bonneil,
restaurateur à Molitch, grande fut la stupé-
faction, un jour, à l'heure du déjeuner. Un
malade est prié de suivre les gendarmes. En
vain il proteste, se nomme, offre de prouver
son honorabilité. On ne l'écoute pas. Menottes
aux mains, ce malade est conduit à pied à
Prades, distant de 9 kilomètres, d'où, l'erreur
constatée, il revint, toujours à pied, à Mo-
litch, ayant fait par conséquent 18 kilomè-
tres. C'est en pleurant qu'il racontait son
odyssée à ses voisins d'hôtel.
Ce régime a tout simplement ruiné les com-
merçants de cette région. Dans les trois hôtels
de Vernet-les-Bains il n'y a pas eu en août et
septembre plus d'une douzaine de baigneurs,
au lieu de 250, chiffre des autres années. A
Molitch, il y avait 7 voyageurs, alors qu'à la
même époque ils étaien 150 les années précé-
dentes.
Rien de moins étonnant, puisqu'ils ne pou-
vaient se promener sans risquer d'être arrê-
tés. A Vernet, les baigneurs du Chàteau-
d'Europe, qui payaient 8 francs par jour,
n'avaient même pas le droit d'entrer dans le
parc avec une autorisation.
Les restaurateurs, les maîtres d'hôtel sont
navrés. Il faut croire que leurs plaintes n'ont
pas été faciles à étouffer, car M. Dupuy a
promis une compensation à ceux que sa pré-
sence a ruinés en partie, puisque bien des tou-
ristes ont juré de ne plus mettre les pieds à
Vernet.
Sera-ce le ministre de l'intérieur qui répa-
rera les - dommages causés par M. Dupuy
baigneur ?
LES CÈPES ANARCHISTES
Une dernière histoire ou, plus exactement,
un dernier point d'histoire, car ce que nous
venons de raconter est exact en tous points :
Les journaux officieux ont parlé à mots
couverts d'une tentative d'empoisonnement
dont le président du conseil aurait eu à souf-
frir, tentative mise sur le compte des anar-
chistes.
M. Dupuy a bien failli être empoisonné,
mais ,est pas des cepes et non par vengeance
■ d'aaarchiste, - , : i -
te président aime beaucoup' les cèpes, il
en est très gourmand, à ce point qu'il en
mangeait à déjeuner tous les jours. Le
paysan qui avait l'habitude d'aller les lui
cueillir se trompa-t-il une fois ? prit-il,
comme cela arrive quelquefois des cèpes
vénéneux pour de bons cèpes ? Très proba-
blement, car M. M. Dupuy ressentit «ertaÙMi
après-midi de très vives coliques et tous les'
symptômes d'un empoisonnement par les
champignons. Seuls les cèpes étaient cause du
mal, puisque la famille du président qui n'en
avait pas mangé ne souffrait pas.
Ce sont là des accidents qui arrivent cha-
que jour au commun des mortels. Mais M.
Dupuy ne manqua pas de tirer profit de ce
qui lui était arrivé. On répandit le bruit d'un
mystérieux empoisonnement.
LE RÉGIME DES BOISSONS
Le projet du gouvernement modifiant le
régime des boissons sera distribué aujourd'hui
aux membres du Parlement.
D'après une note communiquée par le mi-
nistère des finances, ce projet vise les points
suivants de la législation actuelle :
Suppression de l'exercice des débits de bois-
sons ;
Abolition du droit de détail qui pèse sur les pe-
tits consommateurs ;
Dégrèvement et unification du droit de circula-
tion ; -
Réduction des droits perçus à l'entrée des villes
au profit de FEtat et des communes. Adoption
d'un système constituant un acheminement vers la
suppression totale des droits;
Abaissement de îa limite à partir de laquelle les
vins sont imposables à raison dé leur force alcooli-
que et modification du régime des vins de liqueur
et des vins d'imitation ;
Facilités nouvelles accordées aux propriétaires et
fermièrs pour Mstransports des vins et des cidres
de leurs recoltes;
Faculté concédée aux entrepositaires de se sous-
traire aux inventaires ;
Mesures déâtiiiées à alléger dans divers cas la
responsabilité des soumissionnaires d'acquits à
caution ;
Maintien des immunités légales accordées aux
bouilleaur de cru ;
dans l'intérêt du Trésor et du
comière honnête, aéj^moye'tts propres à cpmbà^-
tre la fraude et, en particulier, survier, surveillance mieux
assuré de la production industrie de l'alcool;
Reforme deTimpôt sur les vinaigré; 1
Refonte de la législation sur les bièrfes.
On pourrait croire, après avoir lu cette énu-
mératioh, que M. Poincaré présente une ré-
forme d'ensemble absolument nouvelle, il
n'en est rien. En voulant faire du même ;coup
le dégrèvement de l'impôt qui pèse actuelle-
ment sur les boissons hygiéniques et amorcer
une réforme non moins importante, celle de
la s\Jti)rcessï-tre dés finances a voulu montrer sa sollici-
tude poïur les réformes démocraticrues.
Mais on remarquera, comme nous l'avons
signalé à plusieurs reprises, que le projet
nouveau de réforme des boissons est incom-
plet ou mal conçu. Pour parfaire le dégrève-
ment de quatre-vingt-onze millions créé par
sa réforme, M. Poincaré propose une série de
mesures que beaucoup de députés jugent déjà
inacceptables.
Pour éviter de frapper les bouilleurs de cru
qui, dans le projet de M. Burdeau, fournis-
saient une partie des recettes nouvelles, le
ministre des finances a imaginé une série de
nouveaux impôts qui seront aussi impopulai-
res et vexatoires que les taxes qu'il veut sup-
primer. De plus, le projet de M. Poincaré,
ainsi que nous l'avons dit, élève à 200 francs
les droits sur l'alcool.
LE DÉPART DE M. LE MYRE DE VILERS
POUR MADAGASCAR
M. Le Myre de Vilers s'est embarqué hier à
Marseille pour Madagascar où il va remplir
la mission que lui a confiée le gouvernement.
Rappelons à ce propos que c'est dimanche,
9 septembre, qu'a été expédiée la dépêche
rappelant en France notre résident à Mada-
gascar, M. Larrouy. Elle a été envoyée à
Port-Louis (île Maurice), où attendait un na-
vire de guerre français qui l'a portée en qua-
rante-huit heures à Tamatave, d'où elle a été
retransmise télégraphiquement à Tanana-
rive.
L'intérim de la résidence, pendant le temps
qui s'écoulera entre le départ de M. Larrouy
et l'arrivée de M. Le Myre de Vilers, sera
rempli par notre consul à Tamatave, M.
d'Anthouard, qui se rendra à Tananarive. M.
d'Anthouard, bien connu par ses explorations,
est le fils du général d'Anthouard, mort cen-
tenaire à Versailles il y a quelques mois.
VOL A L'OCTROI DE CLICHY
Un vol important a été commis hier au pré-
judice de l'octroi de Clichy. Le préposé du bu-
reau d'octroi du boulevard Victor-Hugo avait,
en prenant son poste le matin, placé dans le
tiroir de sa table une sacoche contenant une
somme de 1,400 francs, reçue le veille aux
Magasins généraux et qu'il devait remettre
peu après au proposé en chef. L'employé s'é-
tant absenté quelques instants, à son retour
il constata la dispartion de la somme.
Plainte fut déposée au commissariat.
TOURISTE FRANÇAIS ASSASSINÉ
Interlaken, 14 septembre.
On a trouvé sur le Beatenberg le cadavre d'un
voyageur assassiné d'un coup de feu et entièrement
devalise..
On eroit qu'il s'agit d un Français nommé Olliu,
pasteur à Lille, qui taisait un séjour dans l'Ober-
land avec sa famille et qui était parti seul pour faire
une excursion dans la montagne.
La famille a été prévenue.
On est sur la trace des auteurs du crime, qui se-
raient des vagabonds étrangers.
ACCIDENT DE CHEMIN DE FER
Budapest, 14 septembre,
On mande de Fiumeau Lloyd de Pest :
« Au moment où un train de marchandises tra-
versait le tunnel situé entre Lies et Fusine, la
voûte du tunnel, à laquelle on faisait des répara-
tions, s'est effondrée- La locomotive et dix wagons
ont déraillé. La locomotive et cinq wagons, ainsi
que les marchandises qu'ils contenaient, ont été
complètement détruits. Lo mécanicien, le chauffeur
et le chef de train ont été légèrement blesses; le
garde-frein a reçu des blessures plus graves. »
TRISTE ACCIDENT
Liège, 14 septembre.
Deux petits enfants du garde-barrière de Rôanne*:
Coo, province de Liège, traversaient la soie au
moment du passage d'un train. Leur sœur voulut
les sauver, elle fut tuée.
Les deux enfants sont mortellement blessés.
LE PRIX DES VINS
Nîmes, 14 septembre.
Les affaires traitées ces jours derniers au grand
marché des vins dépassent deux cent mille hecto-
litres en vins nouveaux. Ceux de l'année dernière
se trouvent épuisés.
On cote 12 à 13 francs les aramons et 16 à 11
francs les alicante-bouschet.
Les vendanges continueat par un temps favora-
hl"Ui permettra un bon rendement.
CHRONIQUE
L'ENVERS DU DOCUMENT
ftiparaît que Zola est cité en justice par
un entrepreneur susceptible qui s'est cru
^isé et dififeïHé dans certains passages du
roman de Lourdes.
Dans ce livre, Zola nous fait un portrait
superbe du pauvre curé de campagne que
saisit tout à coup la fièvre de l'ambition,
qui se croit un apôtre et veut devenir, lui
aussi, un constructeur de temples et un
pasteur de foules. Il nous montre cet abbé,
tiraillé, entre sa foi d'illuminé et son igno-
rance des affaires, aux prises avec des en-
trepreneurs qui l'exploitent et inaugurent
la série des miracles en renouvelant sur
leursmémoires le miracle de la multipli-
cation des pains.
Malheureusement, Zola ne s'est pas
tenu dans ces généralités vagues. Il a
voulu préciser et mettre les points sur les i.
« L'abbé Peyramale, écrit-il dans son li-
vre, avait accepté les plans de l'archi-
tecte, un projet qu'il avait voulu gran-
diose, et traité avec un entrepreneur
de Chartres, lequel s'engageait à finir
l'église en trois ou quatre ans si les ver-
sements promis se faisaient avec régula-
rite. »
Et plus loin, parlant toujours du même
abbé, 11 nous le montre « goûtant une im-
patiente joie à hâter les travaux avec une
imprévoyance d'homme passionné qui ne
s'inquiétait pas de la dette, se laissait vo-
ler par les entrepreneurs, pourvu qu'il y
eût toujours un peuple d'ouvriers sur les
échafaudages ».
Si. au lieu de prendre son entrepreneur
à Chartres, Zola avait été le chercher à
Carpentras ou à Tarascon, le roman de
Lourdes n'en aurait pas eu un leoteur de
moins, mais le romancier eût évité l'en-
nui, ou du moins le petit désagrément
de recevoir une assignation à compa-
roir devant la.neuvième chambre.
Car il paraît que c'est bien un entrepre-
neur de Chartres qui a soumissionné les
travaux de la basilique de Lourdes. Il
n'est pas nommé, il est vrai, une seule fois
dans le livre, mais il est impossible de le
confondre avec un autre, puisqu'il a été
seul chargé de l'entreprise. Il a même eu
à soutenir, au sujet du règlement de ces
travaux, un procès contre la fabrique. Je
crois bien que personne, excepté lui, ne
songeait plus à ce procès. Peut-être eût-il
été plus sage de ne pas réveiller ce souve-
nir. Mais c'est son affaire et non la
nôtre.
Ce n'est pas la première fois, au sur-
plus, que Zola se trouve aux prises avec
de bruyants inconnus qui prétendent se
reconnaître dans un personnage quelcon-
que de ses romans ou qui ont la fatuité de
croire que le public les reconnaîtra. Déjà,
pour ménager ces vanités susceptibles, il
a dû changer certains noms ou les rem-
placer par des étoiles. Je ne crois pas que
les héritiers de M. Rouher lui cherchent
jamais noise pour avoir écrit « Son Ex-
cellence M. Rougon », mais Durand ou
Tartempion n'ont pas l'humeur si facile et
n'entendent point raillerie sur ce chapitre,
surtout si on leur attribue un rôle qui ne
flatte pas leur amour-propre.
Interviewé par un de nos confrères,
Zola nous semble avoir pris très philoso-
phiquement son parti de l'assignation. Il
proteste tout d'abord de sa bonne foi : « Il
se peut, a-t-il dit, qu'il y ait en mon livre
un mot excessif. Ce qu'il y a de sûr, c'est
que je ne l'ai pas écrit méchamment. J'ai
répété ce qu'on m'avait dit là-bas. Les en-
trepreneurs pour moi, dans l'occasion,
c'était comme une entité. Je ne songeais à
désigner personne. Savais-je même si cet
entrepreneur existait encore? Quinze ans
ont passé sur cet événement. Je tenais
simplement à peindre comme il convenait
ce pauvre abbé Peyramale, triste soldat
de l'idéal qui, à mon sens, peut avoir été la
proie de toutes ces complications. »
Ce que l'affaire a d'intéressant, ce n'est
pas, disons-le tout de suite, un dénoue-
ment qui ne peut-être bien méchant. Si le
tribunal pousse la sévérité très loin, il
condamnera probablement Zola à rempla-1
cer dans la soixante-quinzième édition de
son livre la ville de Chartres par toute
autre préfecture qu'il lui plaira. Mais l'in-
cident comporte, à notre avis, une petite
leçon littéraire qui n'a pas échappé au pu-
blic.
Quand on a donné les « clefs » des Ca-
ractères de La Bruyère et marqué les noms
et les visages des originaux qui avaient
défilé sous ses yeux, La Bruyère a pu pro-
tester avec beaucoup de raison et alléguer
qu'il n'avait voulu peindre personne, mais
que, de traits épars recueillis autour de
lui, il avait composé certains types so-
ciaux qui représentaient une espèce et non
un individu.
Mais le naturalisme n'a-t-il pas mis à la
mode un procédé littéraire tout différent
de celui-là? Il a recommandé, celiectisnné
empilé les observations et les ciocuments.
Au lieu de lâcher la bride à l'imagination,
on l'a traitée, comme Pascal, en folle du
logis. On s'est défié de ses écarts On a en-
gagé le romancier à avoir avant tout de
bons yeux, un crayon et un block-notes
bien garni dont on n'aurait plus, après
coup, qu'à assembler les feuillets. Le « fait
divers » est devenu ainsi, non pas l'occa-
sion du roman, mais le roman lui-même,
et le plus cruel reproche qu'ont pût adres-
ser à l'auteur était de le prendre en fla-
grant délit d'inexactitude.
Eh bien ! dans cette affaire, Zola est la
victime du document rigoureux et précis
avant tout. Dans son enquête à Lourdes,
il a entendu dire que l'entrepreneur de
la basilique était de Chartres. Il s'est em-
pressé de l'enregistrer sur son carnet avec
le scrupule d'un greffier qui dresse un état
de lieux. Il avait trop le souci de la vé-
rité pour nous laisser croire un instant
que l'entrepreneur pouvait être de Gavpen-
tras. 1
î1 est vrai qu'à distance il résonnait
maintenant que le nom ou Forigioe de
l'entrepreneur n'avaient, en définitrve, a
cune importance, et il affirme, comme Là
gruyère, qu'il at. voulu désigner per-
sonne, mais nous représenter seulement
les traits généraux de l'entrepreneur, une
simple entité, l'entrepreneur en soi, com-
me dirait Platon.
En quoi il a raison sans doute, à la con-
dition de déroger sensiblement aux prinr
dpes mêmes du naturalisme. Les pesfbn-
nages qui, dans des livres, ont quelque
chance de durer, ce n'est pas, en effet, l'en-
trepreneur de Chartres, mais ceux crui.
dans Nana, Germinal, la Débâcle, résu-
ment en eux les traits d'une classe sociale
ou d'une époque, et qui sont vrais préci-
sément parce qu'ils ne sont pas réels. Car,
en dépit des théories et des prétentions
d'école, l'art du romancier consiste à ne -
retenir que les traits généraux de l'espèce
et n'a, comme la nature, aucun souci des
individus.
André Bala
LA DOYENNE DES ROSIÈRES
La doyenne des rosières, aujourd'hui âgée de
quatre-vingt-trois ans, habite Saint-Mandé, rue dit;
Bérulle, no 1. C'est Mme Hénault, propriétaire, qui"
fat couronnée rosière de Saint-Mandé en 1832. EU»'
se maria cette même année, et le général Daumeit-!
ml, encore vivant, fut un des témoins du mariage: ]
n Mme Hénault jouit de toutes ses faculSés et d'un#-,
santé parfaite.
Le Catastrjiie d'Appillr
Lettre et lettre. — Un rapport intéressan,
L'enquête. - Les victimes. 1
Nous avons reçu la lettre suivante : r
Paris, le 14 septembre 1894.
Monsieur le rédacteur,
Le Temps publie ce soir la lettre suivante s;
« Paris, 13 septembre. ,
» Je lis attentivement les articles de la presse i
sur l'accident d'Appilly, et il me semble que la i
fauté commise n'est généralement pas bien appjgJrjQ
ciég- ,
» Ce n'est pas une négligence grave d'engagôry
une manœuv re sur une voie principale au rùo £ aénP
de l'heure d'arrivée d'un train. Il est mi que lean
règlements de la compagnie du Nord le défendent
mais «'est bien plus pour éviter de retarder lesM
trains que par crainte de collision, et la prëuvéji
c'est que cette défense n'existe pas dans les règ'R^'
mentS-àe certaines compagnies, comme celle' dé
1 Ouest. -
,
» La garantie essentielle de la sécurité, ce sont':
les signaux, et toutes les gares sans exception p £ ï&*j
sèdent au moins deux disques avancés pour cdqfj
vrir leurs manœuvres. La faute capitale du mâtéo
heureux chef de gare d'Appilly est donc d'avoir l
omis de mettre ses signaux à l'arrêt pour protégée.'
la manœuvre. S'il l'avait fait, le train rapide eû'¡
aurait été quitte pour un retard de quelques nù
nutes. :
» Veuillez agréer, etc. *;
» Un ingénieur du contrôle de l'Etat » ,.
Cette lettre émane d'un fumiste, d'un ÍijÙ)é.A
elle ou d'un compère. ..:
Il est défendu rigoureusement de faire unb
manœuvre sur une voie principale lorsqu'une
train est annoncé ou lorsque s'approche.
l'heure de son passage. Que les réglementé -
intérieurs d'une compagnie le défendent oit;
l'autorisent, la prudence la plus élémentaiit.
conseille de ne pas engager une rame de wâ-
gons sur une voie qui doit rester libre à un
moment déterminé par l'horaire de l'exploità-
tion.
Si les règlements de la compagnie du Nord
l'interdisent, c'est avec raison. La régularité
des trains de voyageurs doit passer avant lat
ponctualité des manœuvres de gare, d'autant
plus que les transports en petite vitesse peu5-
vent attendre un jour et même deux, plus
encore, étant donnés les délais prolongés
dont les compagnies disposent pour ces sortes •
de transports.
Il est avéré que le chef de gare d'Appilly a
exécuté les manœuvres qu'il avait à faire erj
homme pressé qui n'a pas le temps de ren
voyer à l'instant suivant ce qu'il croit pou-
voir faire toute de suite. Il y avait une ra|gl>n
à cela. On lui avait envoyé de Npyon où de
Tergnier, pour des manœuvres qu'il ne pou-
vait faire seul et pour l'exécution desquelles'
une petite demi-heure lui était accordée, un
homme d'équipe qui avait pour mission de
l'aider.
Parti l'homme d'équipe avec le coucou qui
l'avait amené, finie la manœuvre ! Et voilà
pourquoi il s'est hâté de faire passer du ga-
rage de droite sur la voie de manœuvre de
gauche, à travers la voie principale, la petite
rame de wagons que le coucou devait amener.
Si la manœuvre n'avait pas été faite dans
le temps prévu, il aurait fallu la prolonger,
et le train remorqué par le coucou collecteur
aurait rompu l'horaire, dans lequel il n'aurait-
pu peut-être plus trouver place. De toute fa-
çon il y avait pour le chef de gare d'Appilly •;
une punition pour avoir retenu le coucou
après l'heure tixée pour son départ. Le brave
homme a préféré peut-être risquer la mort..
J'en veux venir à ceci, que c'est une négli-
gence grave d'engager un train en manœuvre
au moment de l'heure d'arrivée d'un train.
Avant tant que le train n'est pas annoncé, il
n'y a jamais de négligence, car il n'y a aucun
risque, pourvu que les signaux fontionnent
bien.
Je ne doute pas que dans le cas d'Appilly
ils n'aient bien fonctionné. Mais allez donc
entendre la cloche allemande qui sonne à 250
ou 360 mètres, quand vous êtes à côté d'une
locomotive qui souffle à s'époumonner et que,
de plus, vous êtes talonné par le souci da
manœuvrer assez vite pour que le train que
vous formez puisse partir 1
L'ingénieur du contrôle, lui, néglige ce3 dé..
tails. Péremptoirement, il déclare « que la
faute capitale du malheureux chef de gara
d'Appilly, c'est d'avoir omis de mettri ses sl<
gnaux à l'arrêt — deux disques avaacés --w
pour couvrir ses manoeuvrca ».
Vous ne voyez pas le chef de gare d'Appilly
retenant derrière son disque et son signal
carré le rapide de Cologne 1
C'est une pure bêtise. Toutes les compa.
gnies exploitent à voie ouverte, c'est-à-diri
que tous les signaux de la voie suivie par la
train sont effacés dans ehaque gare pour la
passage du train annoncé par la gare précé-
dente.
La règle ne souffre d'exception que poui
les gares de bifurcation, dont tous les st*
gnaux doivent, aux termes du code de 1885.
être mis à l'arrêt dix minutes avant l'arrivél
des trains, et que certaines compagnies main*
tiennent constamment dans cette position pouf
que la sécurité ne puisse être compromise 4
ces points particulièrement dangereux.
J'avais donc raison de dire que le prétendu
ingénieur du contrôle de l'Etat est un fumiste,
un imbécile ou un compère : un fumiste parce
qu'il se donne l'air d'être compétent, ou un
imbécile parce qu'il n'entend rien à son 8.
jet, ou un compere parce que peut-être il sait
trop de quoi il retourne et qu'il voudrait biea
rompre les 9Q!&a..
Nous osons penser qu'après nçfè expllca*
Nous manoeuvre^ NMiM. dangereuse qUI
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tous les Bureaux de Poste.
LES
nnts de Pkilippc VIII
La France a un nouveau roi. M. Cor-
îtély disait hier que « ce pays a besoin
: d'un rajeunissement », et il ne voulait
pas mettre en doute « qu'il s'éprît bien-
tôt de ce prince Charmant qui vient pour
la première fois de lui parler avec des
mots de vigueur et d'amour ». Sur le
besoin de rajeunissement, M. le duc
'd'Orléans paraît bien près de s'entendre
'avec le rédacteur du Gaulois. Il a même
semblé croire que ce besoin était ur-
gent, si l'on en juge par la hâte avec la-
quelle, avant même que son père fût
mort, il s'est emparé du rôle de préten-
dant. Il y a pour les héritiers des dy-
nasties royales des grâces d'état, et la
;ptSp
fTQpit les Couleurs qu'éprouve le commun
tesmortels.
A peine la pierre du tombeau scellée
fsur le cercueil de son père, M. le duc
d'Orléans garaissait assez consolé, et l'on
imaginerait difficilement quelque chose
de pllis sec que l'allocution de ce jeune
homme de vingt-cinq ans. A lire ce pe-
tit discours du « prince Charmant », on
est fort tenté de croire que, pour les im-
patiences brouillonnes de la jeunesse
royaliste et de son nouveau chef, le
comte de Paris n'apparaissait guère que
comme un obstacle. Vieilli loin du
trône, celui-ci s'était assez résigné à son
sort. Ceux même qui le connaissaient
laissaient entendre qu'il s'y serait ré-
signé tout à fait, sans certaines ambi-
tions qui s'agitaient autour de lui et
auxquelles il était parfois contraint de
donner quelque apparence de satisfac-
tion.
Manifestement, le duc d'Orléans s'i-
magine que la mort de son père sup-
prime un obstacle et que, sous son im-
pulsion, les choses vont prendre une
autre allure. L'empressement qu'il a mis
à se séparer de M. d'Haussonville, l'é-
loignement dans lequel il a su, malgré
une cordialité apparente, tenir les amis,
les anciens conseillers de son père,
montrent assez son intention de ra-
jeunir la direction de son parti. Mais
que sera ce parti raj euni ? A lire
la liste de. ceux dont, dès la pre-
mière heure, le duc d'Orléans s'est en-
touré, on peut croire que si les noms
changent, la cause de la jeunesse n'y
gagne guère. Seulement, c'est l'élimi-
nation définitive de tout ce qui pouvait
rappeler les idées libérales, de tout ce qui
éprouvait dans une certaine mesure
l'influence du mouvement d'où était
sortie la monarchie révolutionnaire de
1830.
Les journées de Juillet sont rayées
de l'histoire par l'arrière-petit-fils de
Louis-Philippe. Le petit-fils du duc
d'Orléans renie la Révolution dont Phi-
lippe-Egalité fut un des auteurs. Il n'a
même plus, comme son père, la préten-
tion de concilier en lui le principe ré-
volutionnaire et le principe du droit di-
vin. Il est l'héritier pur et simple de la
monarchie légitime et du comte de
Chambord. C'est de cette monarchie que
se sont toujours réclamés les amis du
nouveau prétendant, le duc de La Ro-
chefoucauld, le duc de Luynes et la
coterie qui s'agite autour de Mme la
duchesse d'Uzès.
Tout l'effort du comte de Paris avait
tendu à maintenir autour de lui les an-
ciens orléanistes avec les royalistes. Il
y avait médiocrement réussi, car de la
visite à Frohsdorf, en 1873, date la
rupture avec les amis les plus considé-
rables de la monarchie de 1830, et
parmi les autres, beaucoup, sans doute,
ne seraient-pas allés jusqu'où on au-
rait voulu les entraîner au lendemain
d'une restauration. Néanmoins, le souci
de mettre d'accord les deux fractions du
parti royaliste inspirait au comte de
Paris et à ses lieutenants de la prudence
et de la circonspection. Bien qu'il eût
fortement dévié vers l'extrême droite, il
comprenait la nécessité de. faire cer-
taines concessions à la gauche de son
parti, à ceux qui se souvenaient de la
monarchie de 1830 et pour lesquels le
testament de son père était resté une
sorte de catéchisme politique.
Avec le duc d'Orléans, dès la pre-
mière heure ces anciens du parti se
trouvent en conflit. Ils se voient en pré-
sence d'un jeune homme qui, avec une
ignorance complète de son temps, leur
parle de ses « droits », de sa « mis-
sion », qui se fait fort d'obtenir « l'aide
de Dieu » et qui paraît disposer de la
nation comme si elle était sa chose.
C'est la monarchie autoritaire et de
droit divin. Ceux qui ont l'expérience
de la vie ne peuvent que sQurire en
voyaut la confiance dont çe jeûne
homme fait parade, et les anciens orléa-
nistes se trouvent assez désorientés par
ce langage d'un autre temps et d'autres
circonstances. Entre la monarchie que
le duc d'Orléans paraît représenter et
eux-mêmes il y a un abîme, et ce ne
sont assurément pas les débuts du pré-
tendant qui lui attireront les sympa-
thies générales que M. Cornély lui pro-
met. Les légitimistes, (fui acceptaient
avec une mauvaise grâce à peine dissi-
mulée la direction du comte de Paris,
salueront en son fils le « véritable des-
cendant de nos rois». Mais ce n'est pas
cela qui augmentera sa clientèle. Bien
loin delà.
■—B—BWB_gB—_M_
Après les Obsèques du Comte de Paris
Londres, 14 septembre.
Sur l'ordre de la comtesse de Paris, les
couronnes, les croix et les fleurs qui restaient
à Stowe-house ont été transportées à Wey-
bridge par deux fourgons spéciaux. On re-
marquait, parmi les couronnes transportées
aujourd'hui, celle des officiers de l'armée
américaine, en roses artificielles. Cette cou-
rone mesure huit pieds de diamètre.
Le prince de Galles, qui avait reçu hier la
visite du duc d'Orléans, est allé aujourd'hui
à 'Stowe-house. Il , en est revenu cette après-
midi, accompagné jusqu'à la gare de Buckin-
gham par le duc d'Orléans.
La duchesse de Montpensier est partie ce
matin de Stowe-house pour Londres.
LA RETRAITE DE M. D'HAUSSONVILLE
Nous avons annoncé hier que M. le comte
d'Haussonville abandonnait ses fonctions de
chef du parti royaliste.
Le Soleil publie à ce sujet la petite note
suivante dont le caractère officieux ne saurait
être mis en doute :
M. le comte d'Haussonville, en arrivant à Stowe,
samedi soir, a offert immédiatement à monseigneur
le duc d'Orléans sa démission des fonctions qu'il
remplissait auprès de monseigneur le comte de
Paris, et il a insisté pour qu'elle fut acceptée, en
faisant remarquer au prince que le changement de
la situation rendait nécessaire un changement de
personne. Son dévouement, a-t-il dit, restait le
même, mais il ne pouvait pas être utilement le re-
présentant direct du duc d'Orléans comme il avait
été le représentant direct de son père.
Le prince a apprécié la jlistesse de ces réflexions ;
il a demandé seulement à M. d'Haussonville de
garder ses fonctions jusqu'aux funérailles de Mon-
sieur le eomte de Paris.
En effet, M. d'Haussonville a assisté le duc d Or-
léans, le jour dés funérailles, dans la réception des
Français à Grosvenor-hotel. Il accompagnait -le
prince et lui nommait* les personne que le duc
d'Orléans ne connaissait pas encore. Le prince a
témoigné à M. d'Haussonville une confiance abso-
lue et lui a prodigué les témoignages d'une cordia-
lité marquée.
Le duc d'Orléans ne paraît pas avoir l'inten-
tion de pourvoir au remplacement de M. d'Haus-
sonville. Sa pensée serait de ne pas avoir de repré-
sentant direct et d'entretenir lui-même les rap-
ports avec ses partisans. Toutefois le bureau de la
rue Saint-Honoré restera bureau de correspondance
et de renseignements sous la direction de M. Eu-
gène Dufeuille.
Ainsi donc, désormais, le roi n'aura pas d'in-
termédiaire entre lui et ses sujets.
L'AFFAIRE DES ESCLAVES EN ÉGYPTE
Le Caire, 14 septembre.
Voici le verdict du conseil de guerre dans
l'affaire du trafic d'esclaves :
Les deux pachas sont acquittés.
Les marchands d'esclaves et les intermé-
diaires sont condamnés à 18 mois de travaux
forcés.
Un Bédouin et le nommé Abd-ul-Hamid, in-
dividus qui se sont reconnus coupables, sont
condamnés à.six mois de la même peine.
Le major Kitchener a ratifié les condamna-
tions du conseil de guerre, mais il refuse
d'admettre l'acquittement des deux pachas,
car, à son avis, les témoignages produits éta-
blissent leur complicité.
ACCIDENT A UN GÉNÉRAL
Artenay, 14 septembre.
Le général de Verdiére, qui, à partir d'au-
jourd'hui, devait prendre le commandement
de l'ennemi figuré, vient d'être victime d'un
fâcheux accident.
Il avait voulu, profitant du jour de repos
accordé à l'armée par le général de Galliffet,
gagner immédiatement de nouveaux canton-
nements en vue des opérations'à engager à
partir de demain.
En traversant le village de Loigny, il avait
décidé que des honneurs particuliers seraient
rendus devant l'église romane construite en
mémoire de la bataille du 2 décembre 1870,
derrière laquelle un ossuaire a été élevé.
Les musiques des 115e et 117e régiments se
placèrent devant l'église pendant que défi-
laient, rendant les honneurs prescrits, toutes
les troupes de la 16e brigade.
Le général de Verdiére défila lui-même, le
sabre à la main.
Subitement effrayé par la musique, le grand
et superbe cheval bai que montait le général
s'emballa et, dans un vertigineux galop, se
précipita au fond d'une ruelLe close par un
mur d'un mètre cinquante. Il franchit l'obsta
ele, traversa un pré, sauta une haie et voulut
bondir par-dessus un fossé d'une grande lar-
geur. Il se reçut mal, tomba sur les genoux
et projeta le général à plus de dix mètres.
Aussitôt relevé, le général fut l'objet de
soins empressés.
On craignait tout d'abord de graves com-
plications. Les consultations des médecins
rassurèrent bientôt les nombreux amis du gé-
néral de Verdiére. Le général avait, il est
vrai, une fracture du poignet, une fracture de
la clavicule et quelques contusions au-dessous
du cœur, mais aucune de ces blessures ne
présentait de gravité.
Le général, qui, on le sait, doit être admis
l'année prochaine dans le cadre de réserve, a
demandé aussitôt après sa chute à conserver
le commandement de l'ennemi.
Il a dû y renoncer sur le conseil des méde-
cins.
Transporté en voiture à Orgères, le géné-
ral rentrera ce soir à Paris. Il aura le général
Baillod pour successeur dans le commande-
ment de l'ennemi figuré.
C'est le général Haubt, commandant la 5e
brigade de dragons, qui remplacera le géné-
ral Baillod au commandement de la lre divi-
sion de cavalerie.
Le général Bichot, de l'infanterie de ma-
rine, a pris le commandement de la 8e di-
vision d'infanterie, en remplacement du gé-
néral de Verdiére, qui était placé à sa tête
depuis le commeDcemenf des manœuvres jus-
--au'&là côûstitu&Qïi de l'ennemi
."- "-" ..! < --"' ;
M. DUPUY A VERNET
PETITS FAITS D'HISTOIRE
RÉTROSPECTIVE
Comment M. Dupuy était gardé à Vernet-
les-Bains. — Un magistrat passé à
tabac. — Un pays ruiné.
Un de nos amis qui arrive des Pyrénées
nous a fourni de piquants renseignements
sur le séjour de M. Charles Dupuy à Vernet-
les-Bains. Peut-être serviront-ils quelque jour
à fixer l'histoire de la villégiature dans ce
joli pays du président du conseil.
Pour bien comprendre une partie du récit
qui va suivre, il est nécessaire de connaître,
au point de vué topographique, le pays qui
nous occupe.
Le village de Vernet-les-Bains, réputé pour
ses eaux thermales sulfureuses sodiques, est
situé au pied du Canjgou.
L'hôtel de Portugal où était descendu M.
Dupuy se trouve sur le versant de la monta-
gne à plus de 600 mètres d'aititude. Il se com-
pose d'un corps de bâtiment principal entouré
d'un parc très. grand. M. Dupuy s'était ré-
servé la jouissance exclusive de l'hôtel et de
ses dépendances.
L'hôtel se compose d'un premier étage,
d'un entresol, d'un rez-de-chaussée, d'un sclas-
sol, au-dessous duquél un autre étage, celui
des bains. M. Dupuy habitait avec sa famille
le premier étage.
A peine arrivé, il se préoccupa de sa sûreté
personnelle. Un moment il songea à appeler
le génie pour construire des ouvrages de
défense autour de Thôtel de Portugal, des
reiriparts. H renonça bientôt à ce projet pour
celui-ci :
fi installa dans les salles à arcades du rez-
de-chaussée quarante douaniers et dans le
sous-sol, à l'étage des bains, ce qu'on appelait
la grande garde.
Puis, autour du château, quatre lignes de
douaniers distantes res unes !p ..,autroà- düne
quinzaine de iftetres. La garde qui valait agx
barrières de l'hôtel de Portugal avaft'ses AAn-
signes, son mot d'ordre. LesdtfuaÉiers cppt JaJ
composaient devaient toujours s'entendre et
se voir.
Ces précautions contre un danger exagéré af-
folaient l'entourage de M. 0uf)1iy, étjèfe poyij
qu'un jour, vers cinq heures, la beljerfîpé dii
président du conseil, âgée de trejge â^qgiatofze
ans, ayant vu courir un homme dans le parc,
s'imagina qu'on venait pour assassiner son ;
beau-père. La pauvre enfant se précipita .clans
l'appartement et faillit s'y trouver rrlL;r;./ltm-
me qu'elle avait pris pow un anarchiste dange-
reux était un brave douanier de garfle qui
revenait au pas gymnastique à son poste
qu'il avait quitté un instant,
Pour chercher un endroit écarté
Ou d'être homme d'honneur il eût la liberté !
Le ministre deFinLérieur, chargé delà sûreté
générale, prenait, comme on le voit, grand
soin de la sienne.
MAGISTRATS A TOUT FAIRE
Cela ne l'empêchait pas d'avoir des inquié-
tudes. Quelque anarchiste habile ne parvien-
drait-il pas, à la faveur de la nuit, à Se glis-
ser jusqu'à l'hôtel? La surveillance des
douaniers ne se ralentissait-elle pas quelque-
fois ?
Il voulut le savoir, car ses nuits étaient
sans sommeil. Il pria donc M. Hapcher, sub-
stitut du procureur de la République à Per-
pignan, de jouer un soir le rôle d'anarchiste,
c'est-à-dire de chercher à franchir, par ruse
- ou par force, la quadruple ligne de douaniers
qui entourait l'hôtel de Portugal. Le magis-
trat fut-il très heureux d'avoir été choisi pour
cet emploi ? On en peut douter. Mais le prési-
dent du conseil est le dispensateur des biens
de la République, sièges de procureur, croix,
etc. M. le substitut Hapcher obéit. Déguisé,
un soir, vers huit heures, il tenta l'expé-
rience convenue. Il n'alla pas loin.
Deux douaniers l'aperçurent, lui jetèrent un
manteau sur la tête et l'emmenèrent en le
bourrant, absolument comme nos bons gar-
diens de la paix à Paris, et en lui serrant si
fortement les poignets qu'il en souffrit pen-
dant plusieurs jours.
Ce ne fut qu'au poste qu'il put se faire re-
connaître. Il félicita, cela va sans dire, les
agents de la façon dont ils exerçaient le ur
surveillance, et M. Dupuy, à son tour, le re-
mercia,, mais ne le' guérit pas des blessures
qui lui avaient été faites aux poignets.
Cette expérience n'aurait pas été la seule,
nous assure-t-on. M. Puig, président du tri-
bunal, aurait servi de sujet pour une seconde,
M. Dupuy ne jugeant sans doute pas la pre-
mière assez concluante.
LA TERREUR A VERNET
Dans le village de Vernet et dans ceux des
environs la terreur régnait. Impossible de se
promener dans les rues avec une canne ou un
parapluie sans être suspect. Or, aussitôt sus-
pecte, on était arrêté. Chez soi-même on n'é-
tait pas à l'abri des investigations policières.
Pour un oui, pour un non, le touriste le plus
innocent était appréhendé et conduit en pri-
son.
A la table d'hôte de M. Martin-Bonneil,
restaurateur à Molitch, grande fut la stupé-
faction, un jour, à l'heure du déjeuner. Un
malade est prié de suivre les gendarmes. En
vain il proteste, se nomme, offre de prouver
son honorabilité. On ne l'écoute pas. Menottes
aux mains, ce malade est conduit à pied à
Prades, distant de 9 kilomètres, d'où, l'erreur
constatée, il revint, toujours à pied, à Mo-
litch, ayant fait par conséquent 18 kilomè-
tres. C'est en pleurant qu'il racontait son
odyssée à ses voisins d'hôtel.
Ce régime a tout simplement ruiné les com-
merçants de cette région. Dans les trois hôtels
de Vernet-les-Bains il n'y a pas eu en août et
septembre plus d'une douzaine de baigneurs,
au lieu de 250, chiffre des autres années. A
Molitch, il y avait 7 voyageurs, alors qu'à la
même époque ils étaien 150 les années précé-
dentes.
Rien de moins étonnant, puisqu'ils ne pou-
vaient se promener sans risquer d'être arrê-
tés. A Vernet, les baigneurs du Chàteau-
d'Europe, qui payaient 8 francs par jour,
n'avaient même pas le droit d'entrer dans le
parc avec une autorisation.
Les restaurateurs, les maîtres d'hôtel sont
navrés. Il faut croire que leurs plaintes n'ont
pas été faciles à étouffer, car M. Dupuy a
promis une compensation à ceux que sa pré-
sence a ruinés en partie, puisque bien des tou-
ristes ont juré de ne plus mettre les pieds à
Vernet.
Sera-ce le ministre de l'intérieur qui répa-
rera les - dommages causés par M. Dupuy
baigneur ?
LES CÈPES ANARCHISTES
Une dernière histoire ou, plus exactement,
un dernier point d'histoire, car ce que nous
venons de raconter est exact en tous points :
Les journaux officieux ont parlé à mots
couverts d'une tentative d'empoisonnement
dont le président du conseil aurait eu à souf-
frir, tentative mise sur le compte des anar-
chistes.
M. Dupuy a bien failli être empoisonné,
mais ,est pas des cepes et non par vengeance
■ d'aaarchiste, - , : i -
te président aime beaucoup' les cèpes, il
en est très gourmand, à ce point qu'il en
mangeait à déjeuner tous les jours. Le
paysan qui avait l'habitude d'aller les lui
cueillir se trompa-t-il une fois ? prit-il,
comme cela arrive quelquefois des cèpes
vénéneux pour de bons cèpes ? Très proba-
blement, car M. M. Dupuy ressentit «ertaÙMi
après-midi de très vives coliques et tous les'
symptômes d'un empoisonnement par les
champignons. Seuls les cèpes étaient cause du
mal, puisque la famille du président qui n'en
avait pas mangé ne souffrait pas.
Ce sont là des accidents qui arrivent cha-
que jour au commun des mortels. Mais M.
Dupuy ne manqua pas de tirer profit de ce
qui lui était arrivé. On répandit le bruit d'un
mystérieux empoisonnement.
LE RÉGIME DES BOISSONS
Le projet du gouvernement modifiant le
régime des boissons sera distribué aujourd'hui
aux membres du Parlement.
D'après une note communiquée par le mi-
nistère des finances, ce projet vise les points
suivants de la législation actuelle :
Suppression de l'exercice des débits de bois-
sons ;
Abolition du droit de détail qui pèse sur les pe-
tits consommateurs ;
Dégrèvement et unification du droit de circula-
tion ; -
Réduction des droits perçus à l'entrée des villes
au profit de FEtat et des communes. Adoption
d'un système constituant un acheminement vers la
suppression totale des droits;
Abaissement de îa limite à partir de laquelle les
vins sont imposables à raison dé leur force alcooli-
que et modification du régime des vins de liqueur
et des vins d'imitation ;
Facilités nouvelles accordées aux propriétaires et
fermièrs pour Mstransports des vins et des cidres
de leurs recoltes;
Faculté concédée aux entrepositaires de se sous-
traire aux inventaires ;
Mesures déâtiiiées à alléger dans divers cas la
responsabilité des soumissionnaires d'acquits à
caution ;
Maintien des immunités légales accordées aux
bouilleaur de cru ;
dans l'intérêt du Trésor et du
comière honnête, aéj^moye'tts propres à cpmbà^-
tre la fraude et, en particulier, survier, surveillance mieux
assuré de la production industrie de l'alcool;
Reforme deTimpôt sur les vinaigré; 1
Refonte de la législation sur les bièrfes.
On pourrait croire, après avoir lu cette énu-
mératioh, que M. Poincaré présente une ré-
forme d'ensemble absolument nouvelle, il
n'en est rien. En voulant faire du même ;coup
le dégrèvement de l'impôt qui pèse actuelle-
ment sur les boissons hygiéniques et amorcer
une réforme non moins importante, celle de
la s\Jti)rcessï-
tude poïur les réformes démocraticrues.
Mais on remarquera, comme nous l'avons
signalé à plusieurs reprises, que le projet
nouveau de réforme des boissons est incom-
plet ou mal conçu. Pour parfaire le dégrève-
ment de quatre-vingt-onze millions créé par
sa réforme, M. Poincaré propose une série de
mesures que beaucoup de députés jugent déjà
inacceptables.
Pour éviter de frapper les bouilleurs de cru
qui, dans le projet de M. Burdeau, fournis-
saient une partie des recettes nouvelles, le
ministre des finances a imaginé une série de
nouveaux impôts qui seront aussi impopulai-
res et vexatoires que les taxes qu'il veut sup-
primer. De plus, le projet de M. Poincaré,
ainsi que nous l'avons dit, élève à 200 francs
les droits sur l'alcool.
LE DÉPART DE M. LE MYRE DE VILERS
POUR MADAGASCAR
M. Le Myre de Vilers s'est embarqué hier à
Marseille pour Madagascar où il va remplir
la mission que lui a confiée le gouvernement.
Rappelons à ce propos que c'est dimanche,
9 septembre, qu'a été expédiée la dépêche
rappelant en France notre résident à Mada-
gascar, M. Larrouy. Elle a été envoyée à
Port-Louis (île Maurice), où attendait un na-
vire de guerre français qui l'a portée en qua-
rante-huit heures à Tamatave, d'où elle a été
retransmise télégraphiquement à Tanana-
rive.
L'intérim de la résidence, pendant le temps
qui s'écoulera entre le départ de M. Larrouy
et l'arrivée de M. Le Myre de Vilers, sera
rempli par notre consul à Tamatave, M.
d'Anthouard, qui se rendra à Tananarive. M.
d'Anthouard, bien connu par ses explorations,
est le fils du général d'Anthouard, mort cen-
tenaire à Versailles il y a quelques mois.
VOL A L'OCTROI DE CLICHY
Un vol important a été commis hier au pré-
judice de l'octroi de Clichy. Le préposé du bu-
reau d'octroi du boulevard Victor-Hugo avait,
en prenant son poste le matin, placé dans le
tiroir de sa table une sacoche contenant une
somme de 1,400 francs, reçue le veille aux
Magasins généraux et qu'il devait remettre
peu après au proposé en chef. L'employé s'é-
tant absenté quelques instants, à son retour
il constata la dispartion de la somme.
Plainte fut déposée au commissariat.
TOURISTE FRANÇAIS ASSASSINÉ
Interlaken, 14 septembre.
On a trouvé sur le Beatenberg le cadavre d'un
voyageur assassiné d'un coup de feu et entièrement
devalise..
On eroit qu'il s'agit d un Français nommé Olliu,
pasteur à Lille, qui taisait un séjour dans l'Ober-
land avec sa famille et qui était parti seul pour faire
une excursion dans la montagne.
La famille a été prévenue.
On est sur la trace des auteurs du crime, qui se-
raient des vagabonds étrangers.
ACCIDENT DE CHEMIN DE FER
Budapest, 14 septembre,
On mande de Fiumeau Lloyd de Pest :
« Au moment où un train de marchandises tra-
versait le tunnel situé entre Lies et Fusine, la
voûte du tunnel, à laquelle on faisait des répara-
tions, s'est effondrée- La locomotive et dix wagons
ont déraillé. La locomotive et cinq wagons, ainsi
que les marchandises qu'ils contenaient, ont été
complètement détruits. Lo mécanicien, le chauffeur
et le chef de train ont été légèrement blesses; le
garde-frein a reçu des blessures plus graves. »
TRISTE ACCIDENT
Liège, 14 septembre.
Deux petits enfants du garde-barrière de Rôanne*:
Coo, province de Liège, traversaient la soie au
moment du passage d'un train. Leur sœur voulut
les sauver, elle fut tuée.
Les deux enfants sont mortellement blessés.
LE PRIX DES VINS
Nîmes, 14 septembre.
Les affaires traitées ces jours derniers au grand
marché des vins dépassent deux cent mille hecto-
litres en vins nouveaux. Ceux de l'année dernière
se trouvent épuisés.
On cote 12 à 13 francs les aramons et 16 à 11
francs les alicante-bouschet.
Les vendanges continueat par un temps favora-
hl"Ui permettra un bon rendement.
CHRONIQUE
L'ENVERS DU DOCUMENT
ftiparaît que Zola est cité en justice par
un entrepreneur susceptible qui s'est cru
^isé et dififeïHé dans certains passages du
roman de Lourdes.
Dans ce livre, Zola nous fait un portrait
superbe du pauvre curé de campagne que
saisit tout à coup la fièvre de l'ambition,
qui se croit un apôtre et veut devenir, lui
aussi, un constructeur de temples et un
pasteur de foules. Il nous montre cet abbé,
tiraillé, entre sa foi d'illuminé et son igno-
rance des affaires, aux prises avec des en-
trepreneurs qui l'exploitent et inaugurent
la série des miracles en renouvelant sur
leursmémoires le miracle de la multipli-
cation des pains.
Malheureusement, Zola ne s'est pas
tenu dans ces généralités vagues. Il a
voulu préciser et mettre les points sur les i.
« L'abbé Peyramale, écrit-il dans son li-
vre, avait accepté les plans de l'archi-
tecte, un projet qu'il avait voulu gran-
diose, et traité avec un entrepreneur
de Chartres, lequel s'engageait à finir
l'église en trois ou quatre ans si les ver-
sements promis se faisaient avec régula-
rite. »
Et plus loin, parlant toujours du même
abbé, 11 nous le montre « goûtant une im-
patiente joie à hâter les travaux avec une
imprévoyance d'homme passionné qui ne
s'inquiétait pas de la dette, se laissait vo-
ler par les entrepreneurs, pourvu qu'il y
eût toujours un peuple d'ouvriers sur les
échafaudages ».
Si. au lieu de prendre son entrepreneur
à Chartres, Zola avait été le chercher à
Carpentras ou à Tarascon, le roman de
Lourdes n'en aurait pas eu un leoteur de
moins, mais le romancier eût évité l'en-
nui, ou du moins le petit désagrément
de recevoir une assignation à compa-
roir devant la.neuvième chambre.
Car il paraît que c'est bien un entrepre-
neur de Chartres qui a soumissionné les
travaux de la basilique de Lourdes. Il
n'est pas nommé, il est vrai, une seule fois
dans le livre, mais il est impossible de le
confondre avec un autre, puisqu'il a été
seul chargé de l'entreprise. Il a même eu
à soutenir, au sujet du règlement de ces
travaux, un procès contre la fabrique. Je
crois bien que personne, excepté lui, ne
songeait plus à ce procès. Peut-être eût-il
été plus sage de ne pas réveiller ce souve-
nir. Mais c'est son affaire et non la
nôtre.
Ce n'est pas la première fois, au sur-
plus, que Zola se trouve aux prises avec
de bruyants inconnus qui prétendent se
reconnaître dans un personnage quelcon-
que de ses romans ou qui ont la fatuité de
croire que le public les reconnaîtra. Déjà,
pour ménager ces vanités susceptibles, il
a dû changer certains noms ou les rem-
placer par des étoiles. Je ne crois pas que
les héritiers de M. Rouher lui cherchent
jamais noise pour avoir écrit « Son Ex-
cellence M. Rougon », mais Durand ou
Tartempion n'ont pas l'humeur si facile et
n'entendent point raillerie sur ce chapitre,
surtout si on leur attribue un rôle qui ne
flatte pas leur amour-propre.
Interviewé par un de nos confrères,
Zola nous semble avoir pris très philoso-
phiquement son parti de l'assignation. Il
proteste tout d'abord de sa bonne foi : « Il
se peut, a-t-il dit, qu'il y ait en mon livre
un mot excessif. Ce qu'il y a de sûr, c'est
que je ne l'ai pas écrit méchamment. J'ai
répété ce qu'on m'avait dit là-bas. Les en-
trepreneurs pour moi, dans l'occasion,
c'était comme une entité. Je ne songeais à
désigner personne. Savais-je même si cet
entrepreneur existait encore? Quinze ans
ont passé sur cet événement. Je tenais
simplement à peindre comme il convenait
ce pauvre abbé Peyramale, triste soldat
de l'idéal qui, à mon sens, peut avoir été la
proie de toutes ces complications. »
Ce que l'affaire a d'intéressant, ce n'est
pas, disons-le tout de suite, un dénoue-
ment qui ne peut-être bien méchant. Si le
tribunal pousse la sévérité très loin, il
condamnera probablement Zola à rempla-1
cer dans la soixante-quinzième édition de
son livre la ville de Chartres par toute
autre préfecture qu'il lui plaira. Mais l'in-
cident comporte, à notre avis, une petite
leçon littéraire qui n'a pas échappé au pu-
blic.
Quand on a donné les « clefs » des Ca-
ractères de La Bruyère et marqué les noms
et les visages des originaux qui avaient
défilé sous ses yeux, La Bruyère a pu pro-
tester avec beaucoup de raison et alléguer
qu'il n'avait voulu peindre personne, mais
que, de traits épars recueillis autour de
lui, il avait composé certains types so-
ciaux qui représentaient une espèce et non
un individu.
Mais le naturalisme n'a-t-il pas mis à la
mode un procédé littéraire tout différent
de celui-là? Il a recommandé, celiectisnné
empilé les observations et les ciocuments.
Au lieu de lâcher la bride à l'imagination,
on l'a traitée, comme Pascal, en folle du
logis. On s'est défié de ses écarts On a en-
gagé le romancier à avoir avant tout de
bons yeux, un crayon et un block-notes
bien garni dont on n'aurait plus, après
coup, qu'à assembler les feuillets. Le « fait
divers » est devenu ainsi, non pas l'occa-
sion du roman, mais le roman lui-même,
et le plus cruel reproche qu'ont pût adres-
ser à l'auteur était de le prendre en fla-
grant délit d'inexactitude.
Eh bien ! dans cette affaire, Zola est la
victime du document rigoureux et précis
avant tout. Dans son enquête à Lourdes,
il a entendu dire que l'entrepreneur de
la basilique était de Chartres. Il s'est em-
pressé de l'enregistrer sur son carnet avec
le scrupule d'un greffier qui dresse un état
de lieux. Il avait trop le souci de la vé-
rité pour nous laisser croire un instant
que l'entrepreneur pouvait être de Gavpen-
tras. 1
î1 est vrai qu'à distance il résonnait
maintenant que le nom ou Forigioe de
l'entrepreneur n'avaient, en définitrve, a
cune importance, et il affirme, comme Là
gruyère, qu'il at. voulu désigner per-
sonne, mais nous représenter seulement
les traits généraux de l'entrepreneur, une
simple entité, l'entrepreneur en soi, com-
me dirait Platon.
En quoi il a raison sans doute, à la con-
dition de déroger sensiblement aux prinr
dpes mêmes du naturalisme. Les pesfbn-
nages qui, dans des livres, ont quelque
chance de durer, ce n'est pas, en effet, l'en-
trepreneur de Chartres, mais ceux crui.
dans Nana, Germinal, la Débâcle, résu-
ment en eux les traits d'une classe sociale
ou d'une époque, et qui sont vrais préci-
sément parce qu'ils ne sont pas réels. Car,
en dépit des théories et des prétentions
d'école, l'art du romancier consiste à ne -
retenir que les traits généraux de l'espèce
et n'a, comme la nature, aucun souci des
individus.
André Bala
LA DOYENNE DES ROSIÈRES
La doyenne des rosières, aujourd'hui âgée de
quatre-vingt-trois ans, habite Saint-Mandé, rue dit;
Bérulle, no 1. C'est Mme Hénault, propriétaire, qui"
fat couronnée rosière de Saint-Mandé en 1832. EU»'
se maria cette même année, et le général Daumeit-!
ml, encore vivant, fut un des témoins du mariage: ]
n Mme Hénault jouit de toutes ses faculSés et d'un#-,
santé parfaite.
Le Catastrjiie d'Appillr
Lettre et lettre. — Un rapport intéressan,
L'enquête. - Les victimes. 1
Nous avons reçu la lettre suivante : r
Paris, le 14 septembre 1894.
Monsieur le rédacteur,
Le Temps publie ce soir la lettre suivante s;
« Paris, 13 septembre. ,
» Je lis attentivement les articles de la presse i
sur l'accident d'Appilly, et il me semble que la i
fauté commise n'est généralement pas bien appjgJrjQ
ciég- ,
» Ce n'est pas une négligence grave d'engagôry
une manœuv re sur une voie principale au rùo £ aénP
de l'heure d'arrivée d'un train. Il est mi que lean
règlements de la compagnie du Nord le défendent
mais «'est bien plus pour éviter de retarder lesM
trains que par crainte de collision, et la prëuvéji
c'est que cette défense n'existe pas dans les règ'R^'
mentS-àe certaines compagnies, comme celle' dé
1 Ouest. -
,
» La garantie essentielle de la sécurité, ce sont':
les signaux, et toutes les gares sans exception p £ ï&*j
sèdent au moins deux disques avancés pour cdqfj
vrir leurs manœuvres. La faute capitale du mâtéo
heureux chef de gare d'Appilly est donc d'avoir l
omis de mettre ses signaux à l'arrêt pour protégée.'
la manœuvre. S'il l'avait fait, le train rapide eû'¡
aurait été quitte pour un retard de quelques nù
nutes. :
» Veuillez agréer, etc. *;
» Un ingénieur du contrôle de l'Etat » ,.
Cette lettre émane d'un fumiste, d'un ÍijÙ)é.A
elle ou d'un compère. ..:
Il est défendu rigoureusement de faire unb
manœuvre sur une voie principale lorsqu'une
train est annoncé ou lorsque s'approche.
l'heure de son passage. Que les réglementé -
intérieurs d'une compagnie le défendent oit;
l'autorisent, la prudence la plus élémentaiit.
conseille de ne pas engager une rame de wâ-
gons sur une voie qui doit rester libre à un
moment déterminé par l'horaire de l'exploità-
tion.
Si les règlements de la compagnie du Nord
l'interdisent, c'est avec raison. La régularité
des trains de voyageurs doit passer avant lat
ponctualité des manœuvres de gare, d'autant
plus que les transports en petite vitesse peu5-
vent attendre un jour et même deux, plus
encore, étant donnés les délais prolongés
dont les compagnies disposent pour ces sortes •
de transports.
Il est avéré que le chef de gare d'Appilly a
exécuté les manœuvres qu'il avait à faire erj
homme pressé qui n'a pas le temps de ren
voyer à l'instant suivant ce qu'il croit pou-
voir faire toute de suite. Il y avait une ra|gl>n
à cela. On lui avait envoyé de Npyon où de
Tergnier, pour des manœuvres qu'il ne pou-
vait faire seul et pour l'exécution desquelles'
une petite demi-heure lui était accordée, un
homme d'équipe qui avait pour mission de
l'aider.
Parti l'homme d'équipe avec le coucou qui
l'avait amené, finie la manœuvre ! Et voilà
pourquoi il s'est hâté de faire passer du ga-
rage de droite sur la voie de manœuvre de
gauche, à travers la voie principale, la petite
rame de wagons que le coucou devait amener.
Si la manœuvre n'avait pas été faite dans
le temps prévu, il aurait fallu la prolonger,
et le train remorqué par le coucou collecteur
aurait rompu l'horaire, dans lequel il n'aurait-
pu peut-être plus trouver place. De toute fa-
çon il y avait pour le chef de gare d'Appilly •;
une punition pour avoir retenu le coucou
après l'heure tixée pour son départ. Le brave
homme a préféré peut-être risquer la mort..
J'en veux venir à ceci, que c'est une négli-
gence grave d'engager un train en manœuvre
au moment de l'heure d'arrivée d'un train.
Avant tant que le train n'est pas annoncé, il
n'y a jamais de négligence, car il n'y a aucun
risque, pourvu que les signaux fontionnent
bien.
Je ne doute pas que dans le cas d'Appilly
ils n'aient bien fonctionné. Mais allez donc
entendre la cloche allemande qui sonne à 250
ou 360 mètres, quand vous êtes à côté d'une
locomotive qui souffle à s'époumonner et que,
de plus, vous êtes talonné par le souci da
manœuvrer assez vite pour que le train que
vous formez puisse partir 1
L'ingénieur du contrôle, lui, néglige ce3 dé..
tails. Péremptoirement, il déclare « que la
faute capitale du malheureux chef de gara
d'Appilly, c'est d'avoir omis de mettri ses sl<
gnaux à l'arrêt — deux disques avaacés --w
pour couvrir ses manoeuvrca ».
Vous ne voyez pas le chef de gare d'Appilly
retenant derrière son disque et son signal
carré le rapide de Cologne 1
C'est une pure bêtise. Toutes les compa.
gnies exploitent à voie ouverte, c'est-à-diri
que tous les signaux de la voie suivie par la
train sont effacés dans ehaque gare pour la
passage du train annoncé par la gare précé-
dente.
La règle ne souffre d'exception que poui
les gares de bifurcation, dont tous les st*
gnaux doivent, aux termes du code de 1885.
être mis à l'arrêt dix minutes avant l'arrivél
des trains, et que certaines compagnies main*
tiennent constamment dans cette position pouf
que la sécurité ne puisse être compromise 4
ces points particulièrement dangereux.
J'avais donc raison de dire que le prétendu
ingénieur du contrôle de l'Etat est un fumiste,
un imbécile ou un compère : un fumiste parce
qu'il se donne l'air d'être compétent, ou un
imbécile parce qu'il n'entend rien à son 8.
jet, ou un compere parce que peut-être il sait
trop de quoi il retourne et qu'il voudrait biea
rompre les 9Q!&a..
Nous osons penser qu'après nçfè expllca*
Nous manoeuvre^ NMiM. dangereuse qUI
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