Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1885-05-09
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 09 mai 1885 09 mai 1885
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
Quinzième année. — N° 4872
Prix du numéro à Paris : 15 centimes — Départements : 20 centimes
Samedi 9 filai i3:-5
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Actions Rio 248 75.
BULLETIN
Aucun incident n'est à signaler dans le
règlement du conflit anglo-russe. Le débat
sur le rappel du général Lumsden et la
question afghane reste fixé à lundi. Le
mécontentement est toujours vif dans le
public au sujet du retour du général
Lumsden.
- La nouvelle de la démission de lord
Bufferin a été donnée par plusieurs jour-
naux. Elle est démentie ; mais il est- ce-
pendant peu- probable que, comme l'as-
sure le Daily News, le vice-roi de l'Inde
soit « un des plus chauds partisans de l'ac-
cord intervenu ».
Le Messager officiel du gouvernement
russe publie un historique de la question
afghane où on lit, après l'annonce de l'ar-
bitrage , l'intéressante déclaration sui-
vante :
«Lesdeux gouvernements sont convenus
jle reprendre les négociations pour la dé-
iermination de la frontière sur les bases
qui avaient servi jusqu'ici, mais avec cette
différence que les points principaux de la
ligne devraient être établis par un accord
.préalable de cabinet à cabinet. La démar-
cation sur les lieux de la ligne dans ses
détails ainsi que la pose des poteaux indi-
cateurs seraient réservées à des commis-
saires que les deux gouvernements muni-
raient de pouvoirs à cet effet pour faciliter
les travaux de délimitation. »
Avant-hier, en effet, les négociations
pour la délimitation de la ligne frontière
ont été reprises. Dans cette première
réunion, tenue au Foreign-Office, le mi-
nistre des affaires étrangères et l'ambas-
sadeur de Russie ont décidé que M. Lessar,
pour la Russie, et M. Philippe Currie,
pour l'Angleterre, poursuivraient les né-
gociations en vue de préparer les détails
du projet de la nouvelle frontière sur les
cartes récemment faites par le major Hol-
dich.
Sur la partie de la ligne des frontières
entre les rivières de Herirud et de
"Murghab, il n'y a jamais eu de grave dif-
ficulté soulevée.
A la Chambre des communes, sir Stafford
Northcote a déclaré hier que l'opposition
combattra lundi la seconde lecture du
bill - relatif au crédit une motion déclarant quelaChambre s'étant
montrée prête à voter le crédit pour la sé-
curité de l'empire, refuse de voter le bill
jusqu'au jour où elle aura reçu du gouver-
nement les éclaircissements nécessaires.
A la Chambre des députés italienne
s'est poursuivie hier la discussion des in-
terpellations sur la politique coloniale.
M. Cairoli a nié qu'il eût laissé l'Italie
isolée; il a lu une lettre de lord Granville,
de 1881, lui exprimant sa gratitude de la
coopération prêtée par l'Italie à l'Angle-
-terre.
M. Depretis s'est déclaré solidaire de
M. Mancini au nom de tout le ministère. Il
a fait ressortir le grand bienfait de l'al-
liance des puissances centrales, qui assure
la paix. Cette paix est très importante
pour l'Italie, qui a à accomplir des réfor-
mes intérieures.
M. Depretis a conclu en disant que le
- cabinet est résolu à défendre l'honneur du
drapeau et du pays.
La Chambre des députés a adopté par
188 voix contre 97 un ordre du jour de con-
fiance au cabinet.
Le roi des Belges a fixé, dit-on, à cinq
le nombre des portefeuilles ministériels
de l'Etat du Congo : l'intérieur, la guerre,
le commerce, les finances et la justice.
M. l'intendant militaire Strauch sera
chef du cabinet avec le portefeuille de là
guerre. M. Yan Eetvelde sera ministre du
commerce et M. Van Neus, ministre des
finances.
Ces hauts fonctionnaires ne prendront
pas le titre de ministres, mais celui d'ad-
ministrateurs. Ils résideront à Bruxelles.
Stanley deviendrait le gouverneur de l'Etat
libre du Congo.
La lutte entre les métis et les troupes
canadiennes continue. Les Anglais pour-
suivent leur marche en avant.
Les tribus indiennes à l'ouest de
Battlefort sont toutes en armes. De nom-
breuses bandes d'Indiens hostiles se trou-
vent près d'Edmonton.
Ils ont enlevé les femmes et les enfants
de plusieurs colons.
Le général Middleton a fait publier une
proclamation offrant l'amnistie à tous,
sauf à Riel et à ses lieutenants. @
On télégraphie de New-York que deux
chefs insurgés dont la complicité dans
l'incendie de Colon a été reconnue vien-
nent d'être pendus.
Le président de la Colombie a informé
le ministre colombien à Washington que
l'ordre était rétabli dans sept des provin-
ces qui constituent la république.
L'amiral Jouett, qui commande les for-
ces américaines, télégraphie, de son côté,
que tout est tranquille.
- QUESTION DU JOUR
Méthode électorale
Les républicains, dans les départe-
ments que la réaction leur dispute en-
core, doivent-ils former une liste uni-
que ? Doivent-ils en faire plusieurs?
S'ils n'en font qu'une, jusqu'où peut-elle
s'étendre à droite et à gauche ? S'ils en
font deux ou trois, quels seront de
chacune d'elles le nom, la couleur et le
gens? JSTous avons déjà dit que journa-
listes ou candidats, chefs de groupes,
présidents de comités, n'àvaient pas, à
notre avis, à se mettre martel en tête
pour résoudre d'ores et déjà cette ques-
tion dans leur cabinet. Ce sera surtout
l'affaire du suffrage universel lui-même.
L'opinion républicaine dominante dans
chaque région s'imposera aux volontés
particulières. Les congrès départemen-
taux, formés des délégués des cantons
et des arrondissements, sauront bien
mettre d'accord les individualités re-
belles à l'entente.
Le Journal des Débats semble pren-
dre beaucoup de peine depuis quelques
jours pour démontrer que l'accord en-
tre les diverses fractions du parti répu-
blicain n'est pas possible, que dis-je ?
qu'il serait immoral, monstrueux. Ce
sont ses expressions mêmes. Notre
coufrère arrive à donner à sa démons-
tration un air assez spécieux par un
moyen d'ailleurs peu compliqué. Il lui
suffit de forcer les notes et les tons, de
déclarer à priori qu'il n'y a aucun lien
commun, aucun principe politique sem-
blable entre tel et tel groupe de l'opinion
républicaine; puis il se demande com-
ment ces groupes pourraient former
une liste unique?
« Si, dit-il, l'exemple d'une coalition
sans programme et sans idées commu-
nes était donné dans le Nord, ce ne
seraient pas uniquement les habitants
de Lille ou de Valenciennes, ce seraient
les habitants de la France entière qui
perdraient toute foi dans le sérieux des
républicains modérés, qui se dégoûte-
raient d'un tel spectacle. » Nous lais-
sons de côté le mot de « républicains
modérés » ; notre confrère semble y at-
tacher une signification et une impor-
tance que nous ne distinguons pas aussi
nettement que lui. Il ne faudrait pas, en
tout cas, que la modération devînt un
motif de disputes. Mais il est bien cer-
tain que si « l'exemple d'une coalition
sans programme et sans idées commu-
nes » était donné dans le Nord ou n'im-
porte où, ce ne serait pas un joli spec-
tacle. Le Journal des Débats parle d'or.
Nous voulons seulement examiner son
hypothèse, nous la serrons un peu,
nous la retournons, et il nous semble
qu'elle est parfaitement vaine et vide.
Nous ne comprenons pas qu'une union
de républicains, de patriotes dévoués à
la cause de la Révolution française et
au progrès d'une démocratie libre puisse
être « une coalition sans programme et
sans idées communes ».
Le Journal des Débats, voulant mettre
tout à fait en relief la difficulté de l'ac-
cord, cite des noms, indique des nuan-
ces, les choisit aux extrêmes les plus
opposés et demande s'il est moralement
possible de les faire marcher ensem-
ble. Les républicains de gouvernement,
dit-il, pourront-ils aller au scrutin la
main dans la main avec des anarchis-
tes avérés ? Sans doute c'est assez diffi-
cile; mais qui a parlé de cela? C'est encore
un procédé de polémique un peu trop
simple. Il est clair que des républicains
résolus à fortifier l'organisation de la
République en France ne marcheront
pas au scrutin avec des hommes qui
afficheraient l'intention de la désorga-
niser et de la détruire. Autant vaudrait
mettre sur la même liste des républi-
cains et des royalistes, qui sont aujour-
d'hui des anarchiste d'une espèce par-
culière.
Mais il est certain que des républi-
cains ont pu siéger à l'Extrême-Gauche
de la Chambre, émettre des votes que
nous n'aurions pas émis, prononcer des
discours que nous n'eussions pas pro-
noncés, et se trouver, au moment de la
consultation du suffrage universel, sur
une large liste d'union républicaine et
démocratique avec leurs collègues des
autres groupes du Parlement. Si ces dé-
putés se sont plus d'une fois séparés,
ils se sont plus d'une fois réunis. Ils
ont voté dans des sens différents ; ils
ont aussi voté dans le même sens. Ils
ont travaillé depuis cinq ans, depuis
dix ans, à une œuvre commune : la fon-
dation d'un gouvernement républicain
contre tous les efforts de la réaction
monarchique et cléricale.
Si ces républicains d'extrême gauche
que vous appelez des radicaux, des au-
tonomistes, des anarchistes peut-être,
concourent sincèrement, loyalement, à
former une liste commune d'union pa-
triotique, ils font par cela même un
acte très significatif de politique répu-
blicaine gouvernementale. Le commen-
cement de la sagesse est de se défier
de tous ces mots, de les réduire à leur
juste valeur devant le suffrage universel.
Ils sont certainement, en présence de
la nation, beaucoup moins gros que dans
la Chambre. Nous connaissons des ré-
publicains qui ne veulent pas être ap-
pelés des hommes de gouvernement :
cela les agace, que voulez-vous? D'au-
tres ont horreur de s'entendre qualifier
de libéraux, de radicaux, etc. Mais le
scrutin de liste a précisément été insti-
tué pour fondre les nuances, pour met-
tre les choses au-dessus des mots et le
patriotisme par-dessus tout.
Le scrutin de liste ne sert à rien, s'il
ne sert à cela. Mais on ne peut nier que
des républicains de différentes nuances
s'unissant pour établir, d'un commun
accord, une liste républicaine, ne fas-
sent à ce moment-là une œuvre très
caractéristique de politique gouverne-
mentale. L'un ou l'autre de ces répu-
blicains aura beau avoir au fond du
coeur un préjugé enraciné contre les
mots plutôt que contre les idées de
gouvernement, il est, et de la meilleure
manière, au meilleur sens de l'expres-
sion, un homme de gouvernement
quand il marche d'accord avec les au-
tres républicains pour battre la réac-
tion monarchique. Il sacrifie à cet ac-
cord quelques-uns de ses penchants
particuliers, il redresse certains de ses
sentiments, il élargit sa manière de
comprendre la politique. Et soyez as-
suré que de cet accord, de cette cam-
pagne électorale menée en commun, il
restera quelque chose. Chacun, dites-
vous, après l'élection, ira reprendre sa
place à la Chambre ? Ce n'est pas bien
certain. En tout cas, chacun, même à
son ancienne place, se sentira un hom-
me un peu différent de ce qu'il était
quand il s'y est mis pour la première
fois. Il possédera une éducation poli-
tique plus complète, moins défecteuse.
Nous parlons aussi bien pour les dépu-
tés de l'Extrême-Gauche que pour les
membres des Gauches et du Centre.
Nous disons que de tout cela il résulte,
quoi donc? une œuvre de gouverne-
ment.
Au reste, nous ne saurions trop le
répéter, l'arbitre souverain de la liste,
c'est le suffrage universel, c'est l'opi-
nion dominante du département, c'est
le congrès départemental. Quand un
arrondissement présentera un nom et
jugera qu'il n'est nullement immoral ni
monstrueux, mais qu'il est au contraire
très sage et très politique de le mettre
avec d'autres noms sur la liste, et quand
tous les arrondissements représentés
au congrès seront d'accord pour porter
cette liste devant le suffrage universel,
qui oserait prétendre, qui aurait le droit
de soutenir que cet acte n'est pas ins-
piré par des principes communs, par
une pensée commune de patriotisme et
d'honneur national ? Tel candidat, à vo-
tre avis, ne représente dans le départe-
ment qu'une minorité. Eh bien ! n'êtes-
vous par un partisan de la représentation
des minorités ? Et n'est-ce pas encore
pour cela que nous avons demandé le
scrutin de liste ?
Enfin nous ne sommes qu'au premier
essai d'une méthode électorale toute
nouvelle. Essayons-la dans l'esprit le
plus large d'union patriotique. Si nous
commettons aujourd'hui quelque erreur,
nous tâcherons de faire mieux une autre
fois. Et si la réaction est définitivement
écrasée, si sa défaite devient le point
de départ d'une classification normale et
claire des forces républicaines, il est
certain que le prochain scrutin de liste
ne ressemblera pas à celui-ci.
H. DEPASSE.
— —
Nous avons dit hier qu'un comité con-
servateur du dix-septième arrondissement
faisait un pressant appel à la bourse et à la
bonne volonté du public pour préparer
les élections d'octobre.
Le Figaro a donné sur ce petit événe-
ment l'information suivante :
Les comités conservateurs s'organisent dès
maintenant à Paris pour la prochaine lutte
électorale.
Un comité central monarchique est en voie
de formation ; son président sera M. Ferdi-
nand Duval, ancien préfet de la Seine sous le
gouvernement du maréchal de Mac-Mahon,
ou bien M. Lambert de Sainte-Croix, séna-
teur du département de l'Aube. Le choix n'est
pas encore fait entre ces deux noms.
Le Soleil la rectifie en ces termes :
Les renseignements donnés par le Figaro
ont besoin d'être complétés, pour qu'aucune
confusion ne puisse s'établir dans le public.
II n'a pas été question jusqu'à présent de
former un comité central monarchique rayon-
nant dans toute la France. -
Le comité dont parle le Figaro et qui a pour
président M. Ferdinand Duval, ancien préfet
de la Seine, n'a été créé que pour Paris et
pour le département de la Seine.
Autour de lui se groupent les comités d'ar-
rondissements et de quartiers, ainsi que les
comités formés dans la banlieue.
Les comités formés dans les départements
ne relèvent donc pas du comité de Paris.
Ces comités sont en rapport avec M. Lam-
bert de Sainte-Croix, ancien sénateur de
l'Aude.
L'action de M. Ferdinand Duval et celle de
M. Lambert de Sainte-Croix, bien qu'elles ten-
dent au même but, sont donc essentiellement
différentes.
L'une se concentre à Paris et dans le dé-
partement de la Seine ; l'autre s'étend à toute
la France. L'une s'exerce au moyen d'un co-
mité ; l'autre est une action personnelle.
Voilà qui est bien clair. M. F. Duval
a Paris, M. Lambert Sainte-Croix a la
France. Ce sont, l'un et l'autre, des hom-
mes d'esprit ; ils doivent rire en se regar-
dant, comme les classiques augures.
Car, parmi leurs adhérents, il faudra
compter les bonapartistes et il faudra
compter avec les bonapartistes 1
Ferdinand, qui l'eût cru ! Lambert, qui l'aurait dit!
au temps du Courrier du Dimanche ?
LA CHARITÉ DE PARIS
J'ai annoncé,. ces jours-ci, que la
presse de Paris, réunie sous la prési-
dence de notre excellent syndic, M.
Jourde, avait résolu de donner, cette an-
née encore, une grande fête au bois de
Boulogne, la fête des Fleurs, au profit
des « Victimes du Devoir ».
On pouvait croire et on devait espérer
qu'une pareille idée ne rencontrerait
qu'approbation et sympathie. -
Il n'en est rien.
La fête au profit des Victimes du De-
voir a excité une véritable indignation
de la part de X Univers î
Je cite le morceau du pieux journal
où l'esprit de Veuillot revit tout entier,
sàêf, hélas U ce talent et ce tour de main
particuliers qui le. faisaient goûter des
dillettanti alors même que sa verve
s'exerçait à leurs dépens :
« On pouvait penser, dit XUnivers,
que le ridicule et l'inconvenance de ce
divertissement public, si piteusement
raté l'année dernière, avaient pour tout
de bon découragé ses entrepreneurs.
Il paraît que non, et qu'on espère que
« des dames du meilleur monde » iront
s'amuser et se couvrir de fleurs au bois
de Boulogne pour l'agrément du public
et sous le patronnage des citoyens
Scholl, Fouquier, Carle et autres gloires
de la presse républicaine, appuyés par
MM. Magnard, Mayer et autres repré-
sentants du journalisme commode et
agréable. En tout temps, un pareil ou-
bli de dignité serait choquant. Dans la
crise que nous traversons, ce serait une
honte. »
Vous avez bien lu : « C'est une honte ! »
Secourir les victimes du devoir, venir
en aide aux familles qu'ont laissées
derrière eux tant de braves gens, sans
distinction de classe ou de métier, par-
ticuliers, gendarmes, sergents de ville,
pompiers, médecins, récompenser les
prêtres et les sœurs de charité par un
témoignage d'honneur, c'est une honte !
Il n'y a que XUnivers pour avoir de
ces mots-là î
La fête des Fleurs, l'an dernier, a été
contrariée par un temps affreux. Ceci
est vrai. Mais je ne pense pas que l'Uni-
vers, quelque goût qu'il ait pour les mi-
racles, pense que Dieu ait fait pleuvoir
ce jour-là pour témoigner de son blâ-
me. La Providence n'est pas intervenue
et je me refuse à voir dans les terribles
averses de l'an passé ce doigt de Dieu
que XUnivers, selon un mot fameux,
s'est si souvent « fourré dans l'œil » !
N'étant point assez sots pour tirer un
argument impie des toits d'églises qui
s'écroulent, des clochers que frappent
la foudre, — accidents assez fréquents,
— nous ne prêtons pas à nos adversai-
res la sottise de croire que le ciel tonne
juste pour empêcher des Parisiens de
se divertir. Et, quelque contrariée qu'ait
été la fête, elle a cependant donné de
bons résultats. C'est ce qui nous en-
gage à la recommencer, et nous pou-
vions même espérer que X Univers prie-
rait pour le beau temps, puisqu'il s'agit,
avant tout, d'une œuvre de noble cha-
rité.
Je sais parfaitement que cette cha-
rité est un peu mondaine. Ce n'est pas
la charité masquée et voilée qu'un pein-
tre a représentée dans une église flo-
rentine ; et j'accorde que la charité
anonyme et qui ne s'allie à aucun au-
tre plaisir que celui de faire le bien
est la plus agréable à Dieu. Mais, si
l'Univers a vraiment la tradition de
l'Eglise, il avouera qu'un peu de politi-
que humaine peut se mêler à la défense
des intérêts du ciel. Le goût du plaisir,
la vanité, si vous voulez, sont des sen-
timents humains. Est-il sage de les
proscrire absolument, de ne pas es-
sayer de les faire servir au bien ? Des
gens point mauvais, mais un peu in-
différents, ne donneraient pas leur ar-
gent pour les pauvres si personne ne le
savait, ou bien si un peu de plaisir ne
stimulait leur zèle? Soit. Pourquoi ne
pas faire servir des péchés bien mi-
gnons au profit d'une œuvre généreuse?
Croyez-vous que la vanité ou le res-
pect humain ne soient pas exploités par
l'Eglise, quand on nous apporte, pour
une œuvre pieuse, une liste de souscrip-
tion où le nom des donateurs figure en
clair? ou bien quand, à l'église même,
on quête sur un plateau? La vanité et
le goût du plaisir sont-ils absents des
fêtes de charité du grand monde, de ces
ventes comme on en faisait encore il y
a quelques jours sous le patronage
des dames les plus en renom du fau-
bourg Saint-Germain?L'Eglise a-t-elle ja-
mais refusé les legs faits sous condition
que la chapelle ou l'asile bâtis seraient
appelés du nom du bienfaiteur ? A-t-elle
effacé, dans les pieux tableaux, l'image
du donataire placé par avance avec les
saints du paradis ?
Dans les messes de minuit, qui sont
presque des opéras, dans les proces-
sions, qui sont presque des ballets,
dans les « mois de Marie » qui sont,
tels que je les ai vus et à Paris et dans
les pays du Midi, de véritables « fêtes
des fleurs », le goût du plaisir, de la
mise en scène, ne se mêlent-ils pas à la
piété? J'ai eu entre les mains le pros-
pectus d'un cercle catholique où l'on
faisait remarquer que, en outre des con-
versations pieuses et des avantages spi-
rituels, les membres trouveraient, sous
l'invocation d'un saint, les meilleurs
billards de la ville et des consommations
de choix et à bon marché !
UUnivers est sévère pour nous, « les
gloires républicaines », comme il dit.
Cela ne nous étonne pas. Mais est-il ha-
bile de sa part ou juste de rabrouer de
même les journaux profondément ca-
tholiques et conservateurs qui s'asso-
cient à notre œuvre ? Ce n'est pas le mo-
ment de montrer une vertu trop dia-
blesse et de fermer les portes de l'E-
glise sur des hommes qui y sont entrés
à moitié pour le moins. Que diable y
a-t-il d'indigne dans une fête? Et XUni-
vers oublie-t-il que ça n'a pas réussi
aux curés de la Restauration de vouloir
empêcher villageois ou citadins de dan-
ser? Si nous traversons une crise, si les
misères sont grandes, si les épidé-
;-
mies, les guerres, les accidents ont été
nombreux, la honte n'est pas d'y son-
ger, n'est pas de chercher à en atténuer
ou à en consoler les deuils ; elle serait
plutôt à ne pas vouloir que la charité de
Paris s'exerçât, — même avec un sou-
rire et en habit de fête !
La charité de Paris est inépuisable,
profonde : elle est, de plus, vaillante et
volontiers joyeuse. Ce serait une grande
imprudence de vouloir lui retirer ce
caractère. Jésus eut ses heures de tris-
tesse, mais il était, par-dessus tout, in-
dulgent, et, famillièrement, il prenait
part aux fêtes, et aux noces joyeuses,
et aux jeux des enfants. On ne risque
rien à prendre modèle sur lui. J'ai sous
les yeux un exemplaire d'un numéro
spécial intitulé : la Charité, que pu-
blie le Courrier français. Ce numéro
contient des dessins de nos grands
artistes, des vers de nos meilleurs
poètes. On le vend avec l'autorisa-
tion et au profit du comité de la presse,
pour les pauvres. Savez-vous ce qui
m'a frappé surtout parmi les beaux des-
sins de MM. Henner, Cormon, Gé-
rôme, etc. etc. ? C'est une vignette re-
présentant une femme souriante qui
marche dans l'ombre d'une croix. C'est
là la charité de Paris, et les cœurs vont
vers elle, et l'Univers n'empêchera pas
qu'il en soit ainsi !
HENRY FOUQUIKR.
NOUVELLES PARLEMENTAIRES
CHAMBRE DES DÉPUTK3
La commission du budget
La commission du budget s'est réunie hier,
à trois heures, sous la présidence de M. Rou-
vier.
Elle a d'abord entendu la lecture du rap-
port de M. Jules Roche, concluant à l'adop-
tion du projet de loi qui fixe à quinze millions
la subvention à accorder aux chemins vici-
naux pour l'exercice 1885. Il sera pourvu à
cette dépense au moyen d'une émission de
bons à court terme.
M. Charles Ferry a ensuite donné connais-
sance de son rapport verbal sur le budget des
chemins de fer de l'Etat.
Les réductions proposées par le rapporteur
s'élèvent à 2,300,000 francs ; mais le rapport
soulevant un certain nombre de questions
contestées, il a été décidé que les résolutions
à intervenir seraient réservées jusqu'après la
distribution du rapport en épreuves.
M. Charles Ferry propose les modifications
suivantes :
1° Diminution du nombre des trains ;
20 Diminution correspondante dans le ma-
tériel;
3° Fixation pour l'application des tarifs à
base décroissante d'une limite au delà de la-
quelle le système de la base décroissante ne
sera plus appliqué.
Les autres diminutions de crédits proposées
portent sur les sommes ou annuités que se
doivent réciproquement l'Etat et la Compa-
gnie d'Orléans, à la suite de cessions réci-
proques de lignes. D'après les conventions, le
régime déflrfitif au point de vue de ces an-
nuités doit être déterminé sur une base fixe,
à savoir quand la ligne de Tours à Montluçon
sera en exploitation. Tel est le terme fixé par
les conventions. Mais l'Etat et la Compagnie
d'Orléans émettent à ce sujet des prétentions
différentes.
L'année dernière, la commission du budget
et après elle la Chambre avaient accepté
toutes les réclamations de la Compagnie. M.
Charles Ferry voudrait qu'on procédât, cette
année, à de minutieuses vérifications.
M. Ballue a annoncé hier, à la commission,
que le général Campenon comptait modifier
assez profondément le budget établi par le
général Lewal. Par suite, le rapport sur le
budget de la guerre ne pourra être arrêté
que plus tard.
- La mise en accusation
M. Delafosse a soutenu hier devant la 31°
commission d'initiative sa demande de mise
en accusation du ministère Ferry.
L'argumentation du député bonapartiste
n'a été que la reproduction des prétendus
griefs qu'il a déjà cent fois développés à la
tribune au sujet du Tonkin.
On peut les résumer ainsi :
« M. Jules Ferry a trompé le pays sur l'ob-
jet de l'expédition, sur l'étendue des sacrifi-
ces en hommes et en argent qu'elle devait
entraîner, sur l'attitude de la Chine, sur l'af-
faire de Bac-Lé, etc., etc.
» Il a sacrifié sans cause les ressources de
la France dans une guerre reconnue, par
lui-même, inutile puisqu'il a négocié et con-
senti la paix en 1885 à des conditions moins
favorables que celles qui nous étaient offer-
tes en 1884.
» Il a violé deux fois la Constitution en
faisant deux fois la guerre, à l'Annam en 1883,
à la Chine en 1884, sans avoir obtenu la sanc-
tion préalable du Parlement. »
Après le départ de M. Delafosse, une dis-
cussion s'est engagée sur l'ordre que la com-
mission devait adopter pour la suite de ses
travaux.
M. Rivière a exposé qu'il convenait de dé-
pouiller très attentivement les procès-ver-
baux secrets des quatre commissions parle-
mentaires qui ont été chargées de s'occuper
des affaires du Tonkin. Mais ce dépouillement
prendra un temps considérable, à moins qu'il
n'y soit procédé en séance de la commission.
Si le dépouillement est fait par chaque mem-
bre individuellement, il faut que la commis-
sion s'ajourne à lundi. On aurait peut être le
temps d'ici là d'étudier les procès-verbaux.
M. Gomot voudrait un délai plus long. Il
ne faut rien faire avec précipitation. La dis-
cussion en séance publique n'est pas ur-
gente.
M. Desmons est du même avis. Il faut tout
lire. Une date précise pour la réunion de la
commission n'est pas possible. Pourquoi la
commission ne consacrerait-elle pas trois ou
quatre séances à la lecture des procès-ver-
baux secrets?
M. Journault croit que cette manière de pro-
céder mènerait trop loin. Il ne faut pas de
lecture à haute voix. Il y a intérêt à ne pas
prolonger les travaux de la commission.
M. Gomot croit a^Kcïmtraire que le système
proposé par M. Desmons est le plus simple
et le plus rapide.
M. Bovier-Lapierre indique un autre sys-
tème qui consisterait à nommer une sous-
commission. Cette sous-commission dépouil-
lerait les procès-verbaux et ferait ensuite un
rapport à la commission.
A la suite de quelques autres observations
présentées par MM. GQinot et Rivière, la com-
mission décide :
1° Qu'elle ne discutera pas, séance tenante,
.a demande de mise en accusation;
20 Que les procès-verbaux secrets seront
lus en séance de la commission.
M. Gomot déclare ensuite que la commis-
sion devra travailler actiyen^nt « Nous de-
vons, ajoute-t-il, faire oeu,.,r,,, CIO iÏia,,;istrats.
Nous avons entendu les accusateurs ; il nous
reste à entendre les accusés. »
En conséquence, la commission décide, à
l'unanimité, d'entendre les anciens ministres.
Cette audition aura lieu aussitôt après le
dépouillement des procès-verbaux secrets.
Le président de la commission a été chargé
d'en aviser les intéressés.
La commission s'est en dernier lieu ajour-
née à lundi, une heure, pour la lecture des
procès-verbaux secrets.
Ajoutons que plusieurs membres de la com-
mission se proposent de demander l'audition
de MM. Bourée, Harmand, des généraux
Bouët et Millot, du commandant Fournier, etc.
Comme on le voit, les travaux de la com-
mission d'initiative sont loin d'être terminés,
et la plaisanterie n'est pas à la veille de
cesser.
Les crédits pour Madagascar.
La commission relative aux crédits pour
Madagascar a reçu communication de deux
adresses en faveur de la continuation de
l'expédition. L'une émane de la chambre de
commerce de Nantes, et l'autre de la Société -
pour la défense du commerce de Marseille.
Les signataires des adresses font valoir l'in-
térêt qu'il y a pour le commerce français à
s'emparer de Madagascar.
La commission a ensuite décidé de deman-
der communication au gouvernement de tous
les documents relatifs aux affaires de Mada-
gascar pendant rannée qui vient de s'écou-
ler.
Elle entendra ensuite M. de Freycinet, l'ami-
ral Galiber et, s'il y a lieu, le président du
conseil. Les crédits ne seront examinés qu'en-
suite.
Ainsi que nous l'avons plusieurs fois an-
noncé, le gouvernement est bien décidé à
poursuivre l'expédition. L'amiral Galiber a,
en effet, déclaré à M. Peytral, membre d3 la
commission, qu'il allait faire occuper un nou-
veau point à Majunka et que les opérations
militaires seraient menées avec toute l'acti-
vité possible dès que les affaires du Tonkin
permettraient de disposer des troupes de ma-
rine.
A leur retour d'Extrême-Orient, sept ou huit
mille hommes seront vraisemblablement di-
rigés sur Madagascar.
L'assainissement de Paris
La commission relative à l'utilisation agri-
cole des eaux d'égout de Paris et à l'assainis-
sement de la Seine a choisi M. Langlois, pré-
sident, en remplacement de M. Hervé-Man-
gon, devenu ministre.
M. Langlois a été élu comme doyen d'âgo
et sans que sa nomination préjuge en rien les
résolutions de la commission.
La commission entendra vendredi prochain
MM. Journault, président, et Duverdy, tréso-
rier du comité de défense de Saint-Ger-
main.
M. Floquet, président de la Chambre, assis-
tait, hier, à la séance de la commission, dont
il est membre.
SÉNAT
Le scrutin de lisle
La commission du scrutin de liste a en-
tendu hier, à deux heures, le président du
conseil et le ministre de l'intérieur.
MM. Henri Brisson et Allain-Targé ont de-
mandé à la commission de modifier le moins
possible le texte voté par la Chambre. Il faut
éviter, ont-ils dit, que le projet revienne au
Palais--Bourbon. Si le projet revenait à la
Chambre, les amendements qu'on a réussi à
écarter pourraient se reproduire et être
adoptés.
Après le départ des membres du gouverne-
ment, la commission a décidé par 8 voix
contre 1 d'examiner le projet article par arti-
cle, au lieu de l'adopter en bloc.
Elle a ensuite adopté l'article 1er qui con-
sacre le principe du scrutin de liste, ainsi que
la disposition comprise dans l'ancien amen-
dement de Sonnier et qui a pour but d'ex-
clure les étrangers du chiffre de la popula-
tion, pour le calcul du nombre de députés
par département.
Les autres articles du projet ont été succes-
sivement adoptés.
La commission a réservé seulement la ques-
tion de la base électorale et celle de la frac-
tion minimum donnant droit à un député de
plus.
L'idée de diviser Paris en quelques gran-
des sections a été abandonnée.
On a seulement ajouté à la loi un article
additionnel déclarant inéligibles à la Cham-
bre des députés les membres des anciennes
familles ayant régné en Franco.
M. Bozérian a été, en dernier lieu, nommé
rapporteur.
$
La commission des finances
La commission des finances s'est réunie à
trois heures pour élire son président, en
remplacement de M. de Freycinet.
M. Dauphin a été élu président par 9 voix
sur 13 votants.
M. Claude (des Vosges) a été élu vice-prési-
dent en remplacement de M. Dauphin.
M. Dauphin était rapporteur général, Il y
aura lieu de le remplacer dans ces fonctions.
La commission y pourvoira mardi prochain.
LA DÉFENSE INDUSTRIELLE
Les protectionnistes viennent de rem-
porter un succès de plus. Une décision mi-
nistérielle, prise conjointement par les
finances et le commerce, supprime les to-
lérances en vertu desquelles les jouets
étrangers étaient admis à un droit infé-
rieur à celui de la bimbeloterie. Les jouets
en bois, en porcelaine et en plomb ac-
quitteront désormais le droit de GO francs
par 100 kilogrammes, et les jouets compo-
sés d'une matière plus précieuse,.soit d'or,
d'argent, d'aluminium ou de platine, ac-
quitteront le droit afférent à" cette ma-
tière; même mesure est prise pour les
jouets en métaux dorés, argenlcs ou nic-
kelés, en nacre, en écailleT en os, ou en
tissus dont le droit spécifique serait de
beaucoup supérieur à 60 francs. Puisse ce
décret rendre quelque tranquillité aux
marchands de jouets français, que la con-
currence allemande empêchait de dormir!
Avant que le gouvernement s'en mêlât,
l'initiative privée avait fait d'intelligents
efforts pour lutter contre la dangereuse
concurrence des marchands de jouets al-
lemands. Une cinquantaine de fabricants
parisiens, par exemple, se sont associés et
ont ouvert il y a deux ans, rue d'Haute-
ville, un magasin pour vendre leurs pro-
duits à l'exclusion de tout article étranger.
Bien entendu, chaque commerçant con-
serve le droit de fabriquer pour son
compte,. dans ses ateliers et avec sa mar-
que spéciale; mais une marque commune
Prix du numéro à Paris : 15 centimes — Départements : 20 centimes
Samedi 9 filai i3:-5
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Egyptienne.,. 32125,320 62,32125.
Actions Rio 248 75.
BULLETIN
Aucun incident n'est à signaler dans le
règlement du conflit anglo-russe. Le débat
sur le rappel du général Lumsden et la
question afghane reste fixé à lundi. Le
mécontentement est toujours vif dans le
public au sujet du retour du général
Lumsden.
- La nouvelle de la démission de lord
Bufferin a été donnée par plusieurs jour-
naux. Elle est démentie ; mais il est- ce-
pendant peu- probable que, comme l'as-
sure le Daily News, le vice-roi de l'Inde
soit « un des plus chauds partisans de l'ac-
cord intervenu ».
Le Messager officiel du gouvernement
russe publie un historique de la question
afghane où on lit, après l'annonce de l'ar-
bitrage , l'intéressante déclaration sui-
vante :
«Lesdeux gouvernements sont convenus
jle reprendre les négociations pour la dé-
iermination de la frontière sur les bases
qui avaient servi jusqu'ici, mais avec cette
différence que les points principaux de la
ligne devraient être établis par un accord
.préalable de cabinet à cabinet. La démar-
cation sur les lieux de la ligne dans ses
détails ainsi que la pose des poteaux indi-
cateurs seraient réservées à des commis-
saires que les deux gouvernements muni-
raient de pouvoirs à cet effet pour faciliter
les travaux de délimitation. »
Avant-hier, en effet, les négociations
pour la délimitation de la ligne frontière
ont été reprises. Dans cette première
réunion, tenue au Foreign-Office, le mi-
nistre des affaires étrangères et l'ambas-
sadeur de Russie ont décidé que M. Lessar,
pour la Russie, et M. Philippe Currie,
pour l'Angleterre, poursuivraient les né-
gociations en vue de préparer les détails
du projet de la nouvelle frontière sur les
cartes récemment faites par le major Hol-
dich.
Sur la partie de la ligne des frontières
entre les rivières de Herirud et de
"Murghab, il n'y a jamais eu de grave dif-
ficulté soulevée.
A la Chambre des communes, sir Stafford
Northcote a déclaré hier que l'opposition
combattra lundi la seconde lecture du
bill - relatif au crédit
montrée prête à voter le crédit pour la sé-
curité de l'empire, refuse de voter le bill
jusqu'au jour où elle aura reçu du gouver-
nement les éclaircissements nécessaires.
A la Chambre des députés italienne
s'est poursuivie hier la discussion des in-
terpellations sur la politique coloniale.
M. Cairoli a nié qu'il eût laissé l'Italie
isolée; il a lu une lettre de lord Granville,
de 1881, lui exprimant sa gratitude de la
coopération prêtée par l'Italie à l'Angle-
-terre.
M. Depretis s'est déclaré solidaire de
M. Mancini au nom de tout le ministère. Il
a fait ressortir le grand bienfait de l'al-
liance des puissances centrales, qui assure
la paix. Cette paix est très importante
pour l'Italie, qui a à accomplir des réfor-
mes intérieures.
M. Depretis a conclu en disant que le
- cabinet est résolu à défendre l'honneur du
drapeau et du pays.
La Chambre des députés a adopté par
188 voix contre 97 un ordre du jour de con-
fiance au cabinet.
Le roi des Belges a fixé, dit-on, à cinq
le nombre des portefeuilles ministériels
de l'Etat du Congo : l'intérieur, la guerre,
le commerce, les finances et la justice.
M. l'intendant militaire Strauch sera
chef du cabinet avec le portefeuille de là
guerre. M. Yan Eetvelde sera ministre du
commerce et M. Van Neus, ministre des
finances.
Ces hauts fonctionnaires ne prendront
pas le titre de ministres, mais celui d'ad-
ministrateurs. Ils résideront à Bruxelles.
Stanley deviendrait le gouverneur de l'Etat
libre du Congo.
La lutte entre les métis et les troupes
canadiennes continue. Les Anglais pour-
suivent leur marche en avant.
Les tribus indiennes à l'ouest de
Battlefort sont toutes en armes. De nom-
breuses bandes d'Indiens hostiles se trou-
vent près d'Edmonton.
Ils ont enlevé les femmes et les enfants
de plusieurs colons.
Le général Middleton a fait publier une
proclamation offrant l'amnistie à tous,
sauf à Riel et à ses lieutenants. @
On télégraphie de New-York que deux
chefs insurgés dont la complicité dans
l'incendie de Colon a été reconnue vien-
nent d'être pendus.
Le président de la Colombie a informé
le ministre colombien à Washington que
l'ordre était rétabli dans sept des provin-
ces qui constituent la république.
L'amiral Jouett, qui commande les for-
ces américaines, télégraphie, de son côté,
que tout est tranquille.
- QUESTION DU JOUR
Méthode électorale
Les républicains, dans les départe-
ments que la réaction leur dispute en-
core, doivent-ils former une liste uni-
que ? Doivent-ils en faire plusieurs?
S'ils n'en font qu'une, jusqu'où peut-elle
s'étendre à droite et à gauche ? S'ils en
font deux ou trois, quels seront de
chacune d'elles le nom, la couleur et le
gens? JSTous avons déjà dit que journa-
listes ou candidats, chefs de groupes,
présidents de comités, n'àvaient pas, à
notre avis, à se mettre martel en tête
pour résoudre d'ores et déjà cette ques-
tion dans leur cabinet. Ce sera surtout
l'affaire du suffrage universel lui-même.
L'opinion républicaine dominante dans
chaque région s'imposera aux volontés
particulières. Les congrès départemen-
taux, formés des délégués des cantons
et des arrondissements, sauront bien
mettre d'accord les individualités re-
belles à l'entente.
Le Journal des Débats semble pren-
dre beaucoup de peine depuis quelques
jours pour démontrer que l'accord en-
tre les diverses fractions du parti répu-
blicain n'est pas possible, que dis-je ?
qu'il serait immoral, monstrueux. Ce
sont ses expressions mêmes. Notre
coufrère arrive à donner à sa démons-
tration un air assez spécieux par un
moyen d'ailleurs peu compliqué. Il lui
suffit de forcer les notes et les tons, de
déclarer à priori qu'il n'y a aucun lien
commun, aucun principe politique sem-
blable entre tel et tel groupe de l'opinion
républicaine; puis il se demande com-
ment ces groupes pourraient former
une liste unique?
« Si, dit-il, l'exemple d'une coalition
sans programme et sans idées commu-
nes était donné dans le Nord, ce ne
seraient pas uniquement les habitants
de Lille ou de Valenciennes, ce seraient
les habitants de la France entière qui
perdraient toute foi dans le sérieux des
républicains modérés, qui se dégoûte-
raient d'un tel spectacle. » Nous lais-
sons de côté le mot de « républicains
modérés » ; notre confrère semble y at-
tacher une signification et une impor-
tance que nous ne distinguons pas aussi
nettement que lui. Il ne faudrait pas, en
tout cas, que la modération devînt un
motif de disputes. Mais il est bien cer-
tain que si « l'exemple d'une coalition
sans programme et sans idées commu-
nes » était donné dans le Nord ou n'im-
porte où, ce ne serait pas un joli spec-
tacle. Le Journal des Débats parle d'or.
Nous voulons seulement examiner son
hypothèse, nous la serrons un peu,
nous la retournons, et il nous semble
qu'elle est parfaitement vaine et vide.
Nous ne comprenons pas qu'une union
de républicains, de patriotes dévoués à
la cause de la Révolution française et
au progrès d'une démocratie libre puisse
être « une coalition sans programme et
sans idées communes ».
Le Journal des Débats, voulant mettre
tout à fait en relief la difficulté de l'ac-
cord, cite des noms, indique des nuan-
ces, les choisit aux extrêmes les plus
opposés et demande s'il est moralement
possible de les faire marcher ensem-
ble. Les républicains de gouvernement,
dit-il, pourront-ils aller au scrutin la
main dans la main avec des anarchis-
tes avérés ? Sans doute c'est assez diffi-
cile; mais qui a parlé de cela? C'est encore
un procédé de polémique un peu trop
simple. Il est clair que des républicains
résolus à fortifier l'organisation de la
République en France ne marcheront
pas au scrutin avec des hommes qui
afficheraient l'intention de la désorga-
niser et de la détruire. Autant vaudrait
mettre sur la même liste des républi-
cains et des royalistes, qui sont aujour-
d'hui des anarchiste d'une espèce par-
culière.
Mais il est certain que des républi-
cains ont pu siéger à l'Extrême-Gauche
de la Chambre, émettre des votes que
nous n'aurions pas émis, prononcer des
discours que nous n'eussions pas pro-
noncés, et se trouver, au moment de la
consultation du suffrage universel, sur
une large liste d'union républicaine et
démocratique avec leurs collègues des
autres groupes du Parlement. Si ces dé-
putés se sont plus d'une fois séparés,
ils se sont plus d'une fois réunis. Ils
ont voté dans des sens différents ; ils
ont aussi voté dans le même sens. Ils
ont travaillé depuis cinq ans, depuis
dix ans, à une œuvre commune : la fon-
dation d'un gouvernement républicain
contre tous les efforts de la réaction
monarchique et cléricale.
Si ces républicains d'extrême gauche
que vous appelez des radicaux, des au-
tonomistes, des anarchistes peut-être,
concourent sincèrement, loyalement, à
former une liste commune d'union pa-
triotique, ils font par cela même un
acte très significatif de politique répu-
blicaine gouvernementale. Le commen-
cement de la sagesse est de se défier
de tous ces mots, de les réduire à leur
juste valeur devant le suffrage universel.
Ils sont certainement, en présence de
la nation, beaucoup moins gros que dans
la Chambre. Nous connaissons des ré-
publicains qui ne veulent pas être ap-
pelés des hommes de gouvernement :
cela les agace, que voulez-vous? D'au-
tres ont horreur de s'entendre qualifier
de libéraux, de radicaux, etc. Mais le
scrutin de liste a précisément été insti-
tué pour fondre les nuances, pour met-
tre les choses au-dessus des mots et le
patriotisme par-dessus tout.
Le scrutin de liste ne sert à rien, s'il
ne sert à cela. Mais on ne peut nier que
des républicains de différentes nuances
s'unissant pour établir, d'un commun
accord, une liste républicaine, ne fas-
sent à ce moment-là une œuvre très
caractéristique de politique gouverne-
mentale. L'un ou l'autre de ces répu-
blicains aura beau avoir au fond du
coeur un préjugé enraciné contre les
mots plutôt que contre les idées de
gouvernement, il est, et de la meilleure
manière, au meilleur sens de l'expres-
sion, un homme de gouvernement
quand il marche d'accord avec les au-
tres républicains pour battre la réac-
tion monarchique. Il sacrifie à cet ac-
cord quelques-uns de ses penchants
particuliers, il redresse certains de ses
sentiments, il élargit sa manière de
comprendre la politique. Et soyez as-
suré que de cet accord, de cette cam-
pagne électorale menée en commun, il
restera quelque chose. Chacun, dites-
vous, après l'élection, ira reprendre sa
place à la Chambre ? Ce n'est pas bien
certain. En tout cas, chacun, même à
son ancienne place, se sentira un hom-
me un peu différent de ce qu'il était
quand il s'y est mis pour la première
fois. Il possédera une éducation poli-
tique plus complète, moins défecteuse.
Nous parlons aussi bien pour les dépu-
tés de l'Extrême-Gauche que pour les
membres des Gauches et du Centre.
Nous disons que de tout cela il résulte,
quoi donc? une œuvre de gouverne-
ment.
Au reste, nous ne saurions trop le
répéter, l'arbitre souverain de la liste,
c'est le suffrage universel, c'est l'opi-
nion dominante du département, c'est
le congrès départemental. Quand un
arrondissement présentera un nom et
jugera qu'il n'est nullement immoral ni
monstrueux, mais qu'il est au contraire
très sage et très politique de le mettre
avec d'autres noms sur la liste, et quand
tous les arrondissements représentés
au congrès seront d'accord pour porter
cette liste devant le suffrage universel,
qui oserait prétendre, qui aurait le droit
de soutenir que cet acte n'est pas ins-
piré par des principes communs, par
une pensée commune de patriotisme et
d'honneur national ? Tel candidat, à vo-
tre avis, ne représente dans le départe-
ment qu'une minorité. Eh bien ! n'êtes-
vous par un partisan de la représentation
des minorités ? Et n'est-ce pas encore
pour cela que nous avons demandé le
scrutin de liste ?
Enfin nous ne sommes qu'au premier
essai d'une méthode électorale toute
nouvelle. Essayons-la dans l'esprit le
plus large d'union patriotique. Si nous
commettons aujourd'hui quelque erreur,
nous tâcherons de faire mieux une autre
fois. Et si la réaction est définitivement
écrasée, si sa défaite devient le point
de départ d'une classification normale et
claire des forces républicaines, il est
certain que le prochain scrutin de liste
ne ressemblera pas à celui-ci.
H. DEPASSE.
— —
Nous avons dit hier qu'un comité con-
servateur du dix-septième arrondissement
faisait un pressant appel à la bourse et à la
bonne volonté du public pour préparer
les élections d'octobre.
Le Figaro a donné sur ce petit événe-
ment l'information suivante :
Les comités conservateurs s'organisent dès
maintenant à Paris pour la prochaine lutte
électorale.
Un comité central monarchique est en voie
de formation ; son président sera M. Ferdi-
nand Duval, ancien préfet de la Seine sous le
gouvernement du maréchal de Mac-Mahon,
ou bien M. Lambert de Sainte-Croix, séna-
teur du département de l'Aube. Le choix n'est
pas encore fait entre ces deux noms.
Le Soleil la rectifie en ces termes :
Les renseignements donnés par le Figaro
ont besoin d'être complétés, pour qu'aucune
confusion ne puisse s'établir dans le public.
II n'a pas été question jusqu'à présent de
former un comité central monarchique rayon-
nant dans toute la France. -
Le comité dont parle le Figaro et qui a pour
président M. Ferdinand Duval, ancien préfet
de la Seine, n'a été créé que pour Paris et
pour le département de la Seine.
Autour de lui se groupent les comités d'ar-
rondissements et de quartiers, ainsi que les
comités formés dans la banlieue.
Les comités formés dans les départements
ne relèvent donc pas du comité de Paris.
Ces comités sont en rapport avec M. Lam-
bert de Sainte-Croix, ancien sénateur de
l'Aude.
L'action de M. Ferdinand Duval et celle de
M. Lambert de Sainte-Croix, bien qu'elles ten-
dent au même but, sont donc essentiellement
différentes.
L'une se concentre à Paris et dans le dé-
partement de la Seine ; l'autre s'étend à toute
la France. L'une s'exerce au moyen d'un co-
mité ; l'autre est une action personnelle.
Voilà qui est bien clair. M. F. Duval
a Paris, M. Lambert Sainte-Croix a la
France. Ce sont, l'un et l'autre, des hom-
mes d'esprit ; ils doivent rire en se regar-
dant, comme les classiques augures.
Car, parmi leurs adhérents, il faudra
compter les bonapartistes et il faudra
compter avec les bonapartistes 1
Ferdinand, qui l'eût cru ! Lambert, qui l'aurait dit!
au temps du Courrier du Dimanche ?
LA CHARITÉ DE PARIS
J'ai annoncé,. ces jours-ci, que la
presse de Paris, réunie sous la prési-
dence de notre excellent syndic, M.
Jourde, avait résolu de donner, cette an-
née encore, une grande fête au bois de
Boulogne, la fête des Fleurs, au profit
des « Victimes du Devoir ».
On pouvait croire et on devait espérer
qu'une pareille idée ne rencontrerait
qu'approbation et sympathie. -
Il n'en est rien.
La fête au profit des Victimes du De-
voir a excité une véritable indignation
de la part de X Univers î
Je cite le morceau du pieux journal
où l'esprit de Veuillot revit tout entier,
sàêf, hélas U ce talent et ce tour de main
particuliers qui le. faisaient goûter des
dillettanti alors même que sa verve
s'exerçait à leurs dépens :
« On pouvait penser, dit XUnivers,
que le ridicule et l'inconvenance de ce
divertissement public, si piteusement
raté l'année dernière, avaient pour tout
de bon découragé ses entrepreneurs.
Il paraît que non, et qu'on espère que
« des dames du meilleur monde » iront
s'amuser et se couvrir de fleurs au bois
de Boulogne pour l'agrément du public
et sous le patronnage des citoyens
Scholl, Fouquier, Carle et autres gloires
de la presse républicaine, appuyés par
MM. Magnard, Mayer et autres repré-
sentants du journalisme commode et
agréable. En tout temps, un pareil ou-
bli de dignité serait choquant. Dans la
crise que nous traversons, ce serait une
honte. »
Vous avez bien lu : « C'est une honte ! »
Secourir les victimes du devoir, venir
en aide aux familles qu'ont laissées
derrière eux tant de braves gens, sans
distinction de classe ou de métier, par-
ticuliers, gendarmes, sergents de ville,
pompiers, médecins, récompenser les
prêtres et les sœurs de charité par un
témoignage d'honneur, c'est une honte !
Il n'y a que XUnivers pour avoir de
ces mots-là î
La fête des Fleurs, l'an dernier, a été
contrariée par un temps affreux. Ceci
est vrai. Mais je ne pense pas que l'Uni-
vers, quelque goût qu'il ait pour les mi-
racles, pense que Dieu ait fait pleuvoir
ce jour-là pour témoigner de son blâ-
me. La Providence n'est pas intervenue
et je me refuse à voir dans les terribles
averses de l'an passé ce doigt de Dieu
que XUnivers, selon un mot fameux,
s'est si souvent « fourré dans l'œil » !
N'étant point assez sots pour tirer un
argument impie des toits d'églises qui
s'écroulent, des clochers que frappent
la foudre, — accidents assez fréquents,
— nous ne prêtons pas à nos adversai-
res la sottise de croire que le ciel tonne
juste pour empêcher des Parisiens de
se divertir. Et, quelque contrariée qu'ait
été la fête, elle a cependant donné de
bons résultats. C'est ce qui nous en-
gage à la recommencer, et nous pou-
vions même espérer que X Univers prie-
rait pour le beau temps, puisqu'il s'agit,
avant tout, d'une œuvre de noble cha-
rité.
Je sais parfaitement que cette cha-
rité est un peu mondaine. Ce n'est pas
la charité masquée et voilée qu'un pein-
tre a représentée dans une église flo-
rentine ; et j'accorde que la charité
anonyme et qui ne s'allie à aucun au-
tre plaisir que celui de faire le bien
est la plus agréable à Dieu. Mais, si
l'Univers a vraiment la tradition de
l'Eglise, il avouera qu'un peu de politi-
que humaine peut se mêler à la défense
des intérêts du ciel. Le goût du plaisir,
la vanité, si vous voulez, sont des sen-
timents humains. Est-il sage de les
proscrire absolument, de ne pas es-
sayer de les faire servir au bien ? Des
gens point mauvais, mais un peu in-
différents, ne donneraient pas leur ar-
gent pour les pauvres si personne ne le
savait, ou bien si un peu de plaisir ne
stimulait leur zèle? Soit. Pourquoi ne
pas faire servir des péchés bien mi-
gnons au profit d'une œuvre généreuse?
Croyez-vous que la vanité ou le res-
pect humain ne soient pas exploités par
l'Eglise, quand on nous apporte, pour
une œuvre pieuse, une liste de souscrip-
tion où le nom des donateurs figure en
clair? ou bien quand, à l'église même,
on quête sur un plateau? La vanité et
le goût du plaisir sont-ils absents des
fêtes de charité du grand monde, de ces
ventes comme on en faisait encore il y
a quelques jours sous le patronage
des dames les plus en renom du fau-
bourg Saint-Germain?L'Eglise a-t-elle ja-
mais refusé les legs faits sous condition
que la chapelle ou l'asile bâtis seraient
appelés du nom du bienfaiteur ? A-t-elle
effacé, dans les pieux tableaux, l'image
du donataire placé par avance avec les
saints du paradis ?
Dans les messes de minuit, qui sont
presque des opéras, dans les proces-
sions, qui sont presque des ballets,
dans les « mois de Marie » qui sont,
tels que je les ai vus et à Paris et dans
les pays du Midi, de véritables « fêtes
des fleurs », le goût du plaisir, de la
mise en scène, ne se mêlent-ils pas à la
piété? J'ai eu entre les mains le pros-
pectus d'un cercle catholique où l'on
faisait remarquer que, en outre des con-
versations pieuses et des avantages spi-
rituels, les membres trouveraient, sous
l'invocation d'un saint, les meilleurs
billards de la ville et des consommations
de choix et à bon marché !
UUnivers est sévère pour nous, « les
gloires républicaines », comme il dit.
Cela ne nous étonne pas. Mais est-il ha-
bile de sa part ou juste de rabrouer de
même les journaux profondément ca-
tholiques et conservateurs qui s'asso-
cient à notre œuvre ? Ce n'est pas le mo-
ment de montrer une vertu trop dia-
blesse et de fermer les portes de l'E-
glise sur des hommes qui y sont entrés
à moitié pour le moins. Que diable y
a-t-il d'indigne dans une fête? Et XUni-
vers oublie-t-il que ça n'a pas réussi
aux curés de la Restauration de vouloir
empêcher villageois ou citadins de dan-
ser? Si nous traversons une crise, si les
misères sont grandes, si les épidé-
;-
mies, les guerres, les accidents ont été
nombreux, la honte n'est pas d'y son-
ger, n'est pas de chercher à en atténuer
ou à en consoler les deuils ; elle serait
plutôt à ne pas vouloir que la charité de
Paris s'exerçât, — même avec un sou-
rire et en habit de fête !
La charité de Paris est inépuisable,
profonde : elle est, de plus, vaillante et
volontiers joyeuse. Ce serait une grande
imprudence de vouloir lui retirer ce
caractère. Jésus eut ses heures de tris-
tesse, mais il était, par-dessus tout, in-
dulgent, et, famillièrement, il prenait
part aux fêtes, et aux noces joyeuses,
et aux jeux des enfants. On ne risque
rien à prendre modèle sur lui. J'ai sous
les yeux un exemplaire d'un numéro
spécial intitulé : la Charité, que pu-
blie le Courrier français. Ce numéro
contient des dessins de nos grands
artistes, des vers de nos meilleurs
poètes. On le vend avec l'autorisa-
tion et au profit du comité de la presse,
pour les pauvres. Savez-vous ce qui
m'a frappé surtout parmi les beaux des-
sins de MM. Henner, Cormon, Gé-
rôme, etc. etc. ? C'est une vignette re-
présentant une femme souriante qui
marche dans l'ombre d'une croix. C'est
là la charité de Paris, et les cœurs vont
vers elle, et l'Univers n'empêchera pas
qu'il en soit ainsi !
HENRY FOUQUIKR.
NOUVELLES PARLEMENTAIRES
CHAMBRE DES DÉPUTK3
La commission du budget
La commission du budget s'est réunie hier,
à trois heures, sous la présidence de M. Rou-
vier.
Elle a d'abord entendu la lecture du rap-
port de M. Jules Roche, concluant à l'adop-
tion du projet de loi qui fixe à quinze millions
la subvention à accorder aux chemins vici-
naux pour l'exercice 1885. Il sera pourvu à
cette dépense au moyen d'une émission de
bons à court terme.
M. Charles Ferry a ensuite donné connais-
sance de son rapport verbal sur le budget des
chemins de fer de l'Etat.
Les réductions proposées par le rapporteur
s'élèvent à 2,300,000 francs ; mais le rapport
soulevant un certain nombre de questions
contestées, il a été décidé que les résolutions
à intervenir seraient réservées jusqu'après la
distribution du rapport en épreuves.
M. Charles Ferry propose les modifications
suivantes :
1° Diminution du nombre des trains ;
20 Diminution correspondante dans le ma-
tériel;
3° Fixation pour l'application des tarifs à
base décroissante d'une limite au delà de la-
quelle le système de la base décroissante ne
sera plus appliqué.
Les autres diminutions de crédits proposées
portent sur les sommes ou annuités que se
doivent réciproquement l'Etat et la Compa-
gnie d'Orléans, à la suite de cessions réci-
proques de lignes. D'après les conventions, le
régime déflrfitif au point de vue de ces an-
nuités doit être déterminé sur une base fixe,
à savoir quand la ligne de Tours à Montluçon
sera en exploitation. Tel est le terme fixé par
les conventions. Mais l'Etat et la Compagnie
d'Orléans émettent à ce sujet des prétentions
différentes.
L'année dernière, la commission du budget
et après elle la Chambre avaient accepté
toutes les réclamations de la Compagnie. M.
Charles Ferry voudrait qu'on procédât, cette
année, à de minutieuses vérifications.
M. Ballue a annoncé hier, à la commission,
que le général Campenon comptait modifier
assez profondément le budget établi par le
général Lewal. Par suite, le rapport sur le
budget de la guerre ne pourra être arrêté
que plus tard.
- La mise en accusation
M. Delafosse a soutenu hier devant la 31°
commission d'initiative sa demande de mise
en accusation du ministère Ferry.
L'argumentation du député bonapartiste
n'a été que la reproduction des prétendus
griefs qu'il a déjà cent fois développés à la
tribune au sujet du Tonkin.
On peut les résumer ainsi :
« M. Jules Ferry a trompé le pays sur l'ob-
jet de l'expédition, sur l'étendue des sacrifi-
ces en hommes et en argent qu'elle devait
entraîner, sur l'attitude de la Chine, sur l'af-
faire de Bac-Lé, etc., etc.
» Il a sacrifié sans cause les ressources de
la France dans une guerre reconnue, par
lui-même, inutile puisqu'il a négocié et con-
senti la paix en 1885 à des conditions moins
favorables que celles qui nous étaient offer-
tes en 1884.
» Il a violé deux fois la Constitution en
faisant deux fois la guerre, à l'Annam en 1883,
à la Chine en 1884, sans avoir obtenu la sanc-
tion préalable du Parlement. »
Après le départ de M. Delafosse, une dis-
cussion s'est engagée sur l'ordre que la com-
mission devait adopter pour la suite de ses
travaux.
M. Rivière a exposé qu'il convenait de dé-
pouiller très attentivement les procès-ver-
baux secrets des quatre commissions parle-
mentaires qui ont été chargées de s'occuper
des affaires du Tonkin. Mais ce dépouillement
prendra un temps considérable, à moins qu'il
n'y soit procédé en séance de la commission.
Si le dépouillement est fait par chaque mem-
bre individuellement, il faut que la commis-
sion s'ajourne à lundi. On aurait peut être le
temps d'ici là d'étudier les procès-verbaux.
M. Gomot voudrait un délai plus long. Il
ne faut rien faire avec précipitation. La dis-
cussion en séance publique n'est pas ur-
gente.
M. Desmons est du même avis. Il faut tout
lire. Une date précise pour la réunion de la
commission n'est pas possible. Pourquoi la
commission ne consacrerait-elle pas trois ou
quatre séances à la lecture des procès-ver-
baux secrets?
M. Journault croit que cette manière de pro-
céder mènerait trop loin. Il ne faut pas de
lecture à haute voix. Il y a intérêt à ne pas
prolonger les travaux de la commission.
M. Gomot croit a^Kcïmtraire que le système
proposé par M. Desmons est le plus simple
et le plus rapide.
M. Bovier-Lapierre indique un autre sys-
tème qui consisterait à nommer une sous-
commission. Cette sous-commission dépouil-
lerait les procès-verbaux et ferait ensuite un
rapport à la commission.
A la suite de quelques autres observations
présentées par MM. GQinot et Rivière, la com-
mission décide :
1° Qu'elle ne discutera pas, séance tenante,
.a demande de mise en accusation;
20 Que les procès-verbaux secrets seront
lus en séance de la commission.
M. Gomot déclare ensuite que la commis-
sion devra travailler actiyen^nt « Nous de-
vons, ajoute-t-il, faire oeu,.,r,,, CIO iÏia,,;istrats.
Nous avons entendu les accusateurs ; il nous
reste à entendre les accusés. »
En conséquence, la commission décide, à
l'unanimité, d'entendre les anciens ministres.
Cette audition aura lieu aussitôt après le
dépouillement des procès-verbaux secrets.
Le président de la commission a été chargé
d'en aviser les intéressés.
La commission s'est en dernier lieu ajour-
née à lundi, une heure, pour la lecture des
procès-verbaux secrets.
Ajoutons que plusieurs membres de la com-
mission se proposent de demander l'audition
de MM. Bourée, Harmand, des généraux
Bouët et Millot, du commandant Fournier, etc.
Comme on le voit, les travaux de la com-
mission d'initiative sont loin d'être terminés,
et la plaisanterie n'est pas à la veille de
cesser.
Les crédits pour Madagascar.
La commission relative aux crédits pour
Madagascar a reçu communication de deux
adresses en faveur de la continuation de
l'expédition. L'une émane de la chambre de
commerce de Nantes, et l'autre de la Société -
pour la défense du commerce de Marseille.
Les signataires des adresses font valoir l'in-
térêt qu'il y a pour le commerce français à
s'emparer de Madagascar.
La commission a ensuite décidé de deman-
der communication au gouvernement de tous
les documents relatifs aux affaires de Mada-
gascar pendant rannée qui vient de s'écou-
ler.
Elle entendra ensuite M. de Freycinet, l'ami-
ral Galiber et, s'il y a lieu, le président du
conseil. Les crédits ne seront examinés qu'en-
suite.
Ainsi que nous l'avons plusieurs fois an-
noncé, le gouvernement est bien décidé à
poursuivre l'expédition. L'amiral Galiber a,
en effet, déclaré à M. Peytral, membre d3 la
commission, qu'il allait faire occuper un nou-
veau point à Majunka et que les opérations
militaires seraient menées avec toute l'acti-
vité possible dès que les affaires du Tonkin
permettraient de disposer des troupes de ma-
rine.
A leur retour d'Extrême-Orient, sept ou huit
mille hommes seront vraisemblablement di-
rigés sur Madagascar.
L'assainissement de Paris
La commission relative à l'utilisation agri-
cole des eaux d'égout de Paris et à l'assainis-
sement de la Seine a choisi M. Langlois, pré-
sident, en remplacement de M. Hervé-Man-
gon, devenu ministre.
M. Langlois a été élu comme doyen d'âgo
et sans que sa nomination préjuge en rien les
résolutions de la commission.
La commission entendra vendredi prochain
MM. Journault, président, et Duverdy, tréso-
rier du comité de défense de Saint-Ger-
main.
M. Floquet, président de la Chambre, assis-
tait, hier, à la séance de la commission, dont
il est membre.
SÉNAT
Le scrutin de lisle
La commission du scrutin de liste a en-
tendu hier, à deux heures, le président du
conseil et le ministre de l'intérieur.
MM. Henri Brisson et Allain-Targé ont de-
mandé à la commission de modifier le moins
possible le texte voté par la Chambre. Il faut
éviter, ont-ils dit, que le projet revienne au
Palais--Bourbon. Si le projet revenait à la
Chambre, les amendements qu'on a réussi à
écarter pourraient se reproduire et être
adoptés.
Après le départ des membres du gouverne-
ment, la commission a décidé par 8 voix
contre 1 d'examiner le projet article par arti-
cle, au lieu de l'adopter en bloc.
Elle a ensuite adopté l'article 1er qui con-
sacre le principe du scrutin de liste, ainsi que
la disposition comprise dans l'ancien amen-
dement de Sonnier et qui a pour but d'ex-
clure les étrangers du chiffre de la popula-
tion, pour le calcul du nombre de députés
par département.
Les autres articles du projet ont été succes-
sivement adoptés.
La commission a réservé seulement la ques-
tion de la base électorale et celle de la frac-
tion minimum donnant droit à un député de
plus.
L'idée de diviser Paris en quelques gran-
des sections a été abandonnée.
On a seulement ajouté à la loi un article
additionnel déclarant inéligibles à la Cham-
bre des députés les membres des anciennes
familles ayant régné en Franco.
M. Bozérian a été, en dernier lieu, nommé
rapporteur.
$
La commission des finances
La commission des finances s'est réunie à
trois heures pour élire son président, en
remplacement de M. de Freycinet.
M. Dauphin a été élu président par 9 voix
sur 13 votants.
M. Claude (des Vosges) a été élu vice-prési-
dent en remplacement de M. Dauphin.
M. Dauphin était rapporteur général, Il y
aura lieu de le remplacer dans ces fonctions.
La commission y pourvoira mardi prochain.
LA DÉFENSE INDUSTRIELLE
Les protectionnistes viennent de rem-
porter un succès de plus. Une décision mi-
nistérielle, prise conjointement par les
finances et le commerce, supprime les to-
lérances en vertu desquelles les jouets
étrangers étaient admis à un droit infé-
rieur à celui de la bimbeloterie. Les jouets
en bois, en porcelaine et en plomb ac-
quitteront désormais le droit de GO francs
par 100 kilogrammes, et les jouets compo-
sés d'une matière plus précieuse,.soit d'or,
d'argent, d'aluminium ou de platine, ac-
quitteront le droit afférent à" cette ma-
tière; même mesure est prise pour les
jouets en métaux dorés, argenlcs ou nic-
kelés, en nacre, en écailleT en os, ou en
tissus dont le droit spécifique serait de
beaucoup supérieur à 60 francs. Puisse ce
décret rendre quelque tranquillité aux
marchands de jouets français, que la con-
currence allemande empêchait de dormir!
Avant que le gouvernement s'en mêlât,
l'initiative privée avait fait d'intelligents
efforts pour lutter contre la dangereuse
concurrence des marchands de jouets al-
lemands. Une cinquantaine de fabricants
parisiens, par exemple, se sont associés et
ont ouvert il y a deux ans, rue d'Haute-
ville, un magasin pour vendre leurs pro-
duits à l'exclusion de tout article étranger.
Bien entendu, chaque commerçant con-
serve le droit de fabriquer pour son
compte,. dans ses ateliers et avec sa mar-
que spéciale; mais une marque commune
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