Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1885-04-24
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 24 avril 1885 24 avril 1885
Description : 1885/04/24 (A15,N4857). 1885/04/24 (A15,N4857).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7561311d
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
Quinzième année. — N° 4857
Prix du numéro à Paris : 15 centimes — Départements : 20 centimes
Vendredi. M Avril 1885
l
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
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Lots Turcs •! 367 50.
Priorité 367 50.
BULLETIN
Le conflit entre l'Angleterre et la Rus-
sie n'a pas fait un pas depuis hier. Tous
les journaux anglais s'accordent à recon-
naître l'extrême gravité de la situation.
Au lendemain du jour où il reçut la ré-
ponse de la Russie refusant de soumettre
à une enquête nouvelle la conduite du gé-
néral Komaroff , lord Granville adressa
une longue dépêche tenue secrète à sir
Edward Thornton. Cette dépêche renfer-
mait, dit-on, une critique des principaux
arguments invoqués par la Russie pour re-
fuser l'enquête. La Russie n'a point en-
core répondu à cette dernière communica-
tion. On annonce que le gouvernement
russe a envoyé le rapport du général
Lumsden au général Komaroff.
Il est douteux que celui-ci en recon-
naisse la véracité. Les nouvelles pessi-
mistes circulent dans tous les cercles di-
plomatiques, où l'on dit aussi que les
cabinets de Berlin et de Vienne manœu-
vrent de concert pour arriver au maintien
de la paix. Le roi Guillaume aurait écrit
dans ce sens une longue lettre au tzar. Ce
sont là des bruits qui courent et dont il
est malaisé d'apprécier exactement l'im-
portance. Mais ce qui est certain, c'est que
l'opinion publique à Londres comme à
Saint-Pétersbourg considère la solution
pacifique de la question afghane comme
peu probable, et qu'à cette heure le moin-
dre incident peut entraîner la rupture des
négociations entre l'Angleterre et la Rus-
sie, qui sont diplomatiquement belligé-
rantes. La guerre, d'ailleurs, ne surpren-
drait pas plus l'Angleterre que la Russie.
A la Chambre des communes, sir Staf-
ford Northcote a questionné le gouverne-
ment pour savoir : 1° si une correspon-
dance additionnelle sur la frontière af-
ghaneit sera communiquée à la Chambre
avant la discussion du crédit ; 20 si le gou-
vernement pouvait dire quelle est la situa-
tion exacte du conflit entre l'Angleterre
et la Russie.
M.Gladstone a répondu, sur la première
question, qu'il n'a pas l'intention de com-
muniquer à la Chambre avant la discus-
sion du crédit un supplément de corres-
pondance sur l'Afghanistan, non plus que
la dépêche précédente du général Lums-
den. Le gouvernement, a dit M. Glads-
tone, recevra peut-être de nouvelles in-
formations d'ici à lundi, mais il ne peut
pas s'engager à en donner communication
ce jour-là.
Sur la seconde question, M. Gladstone
s'est exprimé ainsi :
« Nous serions heureux de préciser l'é-
tat des choses, mais il faut considérer
que nous sommes engagés actuellement
dans une correspondance d'une extrême
gravité. Il nous est impossible de faire
une déclaration complète, et une déclara-
tion pourrait créer un malentendu. Nous
avons donc résolu de ne faire aucune dé-
claration. »
En réponse à sir Stafford Northcote, M.
Gladstone a déclaré que la Chambre était
libre d'ajourner la discussion des crédits,
mais qu'elle déciderait sans doute de
l'aborder lundi, sans déclaration préalable
du gouvernement.
M. Gladstone, répondant à M. Worms
et à lord Churchill, a déclaré qu'il ne
pouvait fournir d'informations à la Cham-
bre avant lundi.
La nouvelle que les représentants de la
France, de l'Allemagne et de l'Autriche
avaient fait une démarche auprès de la
Porte pour que la neutralité des détroits
fût maintenue a été plusieurs fois démne-
tie, et l'autre jour encore, à la Chambre
des communes, M. Gladstone déclarait
n'avoir pas connaissance de cette dé-
marche.
La nouvelle est cependant confirmée.
Les représentants des puissances plus haut
désignées se sont rendus auprès de la
Porte et lui ont fait entrevoir qu'elle assu-
merait une responsabilité singulièrement
grave en n'observant pas une stricte neu-
tralité. La Porte serait, dit-on, disposée
à laisser le libre passage du détroit aux
navires de guerre anglais et russes. Ce
serait là, selon elle, une neutralité nette-
ment définie. Il est douteux que les puis-
sances occidentales acceptent cette doc-
trine.
On signale de fréquentes entrevues à
Londres entre Hassan-Fehmi-Pacha et lord
Granville, et aussi entre ce dernier et le
comte Nigra. Une dépêche de Londres an-
nonce même que, dans une conférence en-
tre les ambassadeurs turc et italien et
lord Granville, l'éventualité de l'occupa-
tion de l'Egypte par des troupes turques
et italiennes a été examinée.
Une explosion attribuée à la dynamite a
eu lieu à Londres hier. Nous donnons plus
bas les dépêches que nous recevons à ce
sujet.
M. de Freycinet a adressé hier à notre
consul général au Caire, au sujet de l'af-
faire du Bosphore égyptien, des instruc-
tions délibérées en conseil des minis-
tres.
Nous croyons savoir que ces instruc-
tions sont très précises et très énergi-
ques.
Nubar-Pacha, cherchant à déplacer la
question qui porte sur la violation du do-
micile du Bosphore, continue d'affirmer
le droit du gouvernement égyptien de
supprimer ce journal, et Nubar prépare,
dit-on, un mémoire dans lequel il citera
une cinquantaine de précédents à l'ap-
pui de son droit de suppression des jour-
naux.
Cependant une solution pacifique du
débat paraît prochaine. Le Times mêle à
des insinuations malveillantes à l'égard de
la France cette déclaration importante:
« S'il y a eu violation de domicile, dans
l'affaire du Bosphore égyptien, il sera
juste que nous donnions une réparation
raisonnable de cette illégalité.
« Personne en Angleterre, ajoute le
Times, ne songe à appuyer des actes dont
l'illégalité est flagrante, que ces actes
soient commis par des fonctionnaires
anglais ou égyptiens. »
Voici les dépêches relatives à l'explo-
sion de Londres, que nous annonçons
plus haut :
Londres, 23 avril.
Ce matin, à onze heures, une explosion a eu
lieu dans une salle du bâtiment de l'Ami-
rauté. Toutes les fenêtres ont été brisées.
On croit que l'explosion a été causée par la
dynamite. La police fait une enquête sur les
lieux.
Le secrétaire-adjoint de l'Amirauté a été
grièvement blessé.
L'Amirauté se trouve dans Whitehall, près
de Westminster, non loin des bâtiments du
ministère de l'intérieur, où a eu lieu, il y a
quelques mois, une explosion semblable.
Londres, 23 avril.
Il résulterait de l'enquête faite sur les lieux
de l'explosion qu'une bombe chargée de dy-
namite aurait été jetée dans le bureau du
secrétaire adjoint de l'Amirauté, à travers la
fenêtre donnant sur Saint-James-Park.
Los murs sont intacts, mais le bureau est
encombré de débris dont l'examen démontre
que l'explosion n'est pas due à une fuite de
gaz.
Londres, 23 avril.
Deux Allemands, qui sont arrivés hier ici
avec un appareil de nouvelle invention, dé-
signé sous le nom de lampe électrique, ont
été arrêtés par des officiers de la douane, qui
croient avoir découvert une machine infer-
nale dans leurs bagages.
L'appareil a été envoyé à Woolwich où il
sera examiné.
QUESTION DU JOUR
Sous la Coupole
Les réceptions académiques sont tou-
jours des événements parisiens; la ré-
ception de M. de Lesseps était un évé-
nement universel. En dépit de ceux qui
voudraient l'emprisonner dans la voca-
tion littéraire, l'Académie française s'ho-
nore en ouvrant ses portes à l'homme
qui représente le mieux le génie de l'ac-
tion dans ce siècle de l'action. A un cer-
tain niveau, toutes les gloires sont
sœurs, et rien n'était plus naturel que
de voir notre grand poète servir de par-
rain à celui qu'on appelle le grand Fran-
çais, parce qu'il a donné au monde le
plus éclatant exemple de ce que peut
encore notre nation pour le bénéfice de
l'humanité.
M. de Lesseps avait promis d'être
court ; il a mis une sorte de coquetterie
à tenir parole, quoique rien sans doute
ne l'y obligeât. Ceux qui liront son dis-
cours jugeront qu'il aurait pu s'éten-
dre davantage sans craindre qu'on le
trouvât long. Il n'est pas plus nécessaire
d'être écrivain de métier pour intéresser
même un auditoire d'élite, que de pos-
séder tous les prétendus secrets de la
rhétorique pour être éloquent. Mais si
l'on se plaignait un peu de ce que le
récipiendaire s'est trop défié de ses
forces, on s'en consolait par la pensée
qu'en cessant de l'entendre parler on
allait commencer à entendre parler de
lui. Comme il était le héros de la jour-
née, il n'avait pas besoin d'en être l'o-
rateur.
La réponse de M. Renan est en effet
un admirable panégyrique de Ferdinand
de Lesseps, et l'auteur de la Vie de Jé-
sus n'a jamais été mieux inspiré. M. Re-
nan, on a déjà pu le constater, excelle
dans le genre académique, qui n'a rien
de commun, quoi qu'en pense le vul-
gaire, avec le genre solennel. Nul ne sait
mieux que lui mettre du sel dans la
louange, du sourire dans l'émotion, et
relever même l'enthousiasme par une
légère pointe de scepticisme. Ce qui
charme le plus dans tout ce qui sort de
sa plume, c'est lui-même, avec la grâce
un peu féline de son langage, avec la
souplesse ondoyante de sa pensée. On
le retrouve tout entier dans chacune de
ses œuvres ; on ne se lasse pas de le
voir se jouer délicatement de tous les
sujets qu'il traite, et projeter sur toutes
les questions des flots de lumière chan-
geante et colorée. Parfois cette finesse
risquerait de toucher à la subtilité, et
cet épicurisme intellectuel choquerait
les âmes simples et les esprits nets, si
M. Renan n'avait pas conservé, peut-
être plus qu'il ne pense lui-même, la fa-
culté d'admirer les grandes œuvres et
les grands hommes, un amour sincère
et fort pour deux ou trois choses qui
suffisent bien à remplir un cœur.
Ce n'est plus la théologie, même tem-
pérée par l'incrédulité, ce n'est plus la
recherche du divin ou la nostalgie de la
foi qui inspirent le mieux M. Renan. Il a
marché avec son temps ; les problèmes
du présent l'intéressent et l'échauffent
d'une chaleur plus communicative et
plus vraie que le dilettantisme méta-
physique dans lequel il semble parfois
s'attarder. Aussi préférons-nous son
éloge de Ferdinand de Lesseps aux
plus brillantes variations qu'il ait exé-
cutées sur YEcclésiaste. Dans ce dis-
cours académique, ayant en main un
sujet si plein, si solide, si vivant, M.
Renan a trouvé une éloquence que le
charme de sa manière ornait sans l'ef-
féminer. Une œuvre comme le perce-
ment d'un isthme n'admet guère le
plus et le moins, l'apparition des nuan-
ces le balancement des idées, et les
qualités maîtresses de l'écrivain ne
le poussaient pas ici à l'excès ; une
saisissante réalité est un bon garde-
fou.
Comme il s'agissait de l'Orient, l'ora-
teur s'est plu à rappeler ses souvenirs
du désert, et il a prouvé qu'il jugeait
bien son héros à l'ceuvre ; c'est un mor-
ceau acàevé que le tableau de l'amitié
si féconde qui unissait le vice-roi Saïd
à M. de Lesseps, le barbare ébloui par
les lueurs de la civilisation au pionnier
de génie qui a su manier les instru-
ments les plus divers. Nous ne voyons
pas qu'on ait jamais mieux fait ressor-
tir la grandeur de l'entreprise qu'en
montrant comment le même homme
domptait tour à tour la volonté capri-
cieuse d'un pacha et la jalousie tenace
des Anglais de province, embrigadait au
service de son dessein les forçats échap-
pés que le travail allait purifier et les
puritains qui consultaient la Bible pour
le juger.
Chose remarquable : ce sceptique raf-
finé a fait de son discours sur M. de
Lesseps un panégyrique de la foi. C'est
qu'il s'agit d'une foi toute moderne,
sans mélange de mysticisme, de celle
qui triomphe une fois pour toutes des
objections en achevant sa besogne, et
qui donne aux yeux la joie de contem-
pler l'accomplissement du rêve, parce
que le rêve n'était qu'un calcul de gé-
nie. Certes, l'homme qui a changé la
géographie du globe a été loué bien
souvent, mais il fallait qu'il entrât à
l'Académie pour contempler sa vie et
sa gloire dans un si beau miroir.
Pour que -la tradition fut respectée,
il fallait parler aussi d'Henri Martin, et
l'on a en effet parlé de lui avec toute
la sympathie que méritent son caractère
élevé, son patriotisme ardent, sa pro-
bité politique et littéraire. M. de Lesseps
a chaudement loué ses vertus et l'in-
vincible fermeté de sa confiance dans
les destinées de la patrie, mais il a fi-
nement esquivé son éloge littéraire.
M. Renan ne pouvait se tirer d'affaire
en plaidant sa propre incompétence ; il
a donc loué Henri Martin. Seulement le
naturel reprenait ici ses droits, et le
spirituel critique n'a pu s'empêcher
d'assaisonner les louanges qu'il donnait
au mort de quelques épigrammes joli-
ment enveloppées, mais que les admira-
teurs du laborieux historien trouveront
peut-être un peu piquantes. C'est assu-
rément pour Henri Martin que la jour-
née a été la moins bonne.
$
NOUVELLES DE CHINE
Les négociations à Tientsin
On mande de Shanghai au Standard, le
22 avril :
« Deux membres du Tsong-li-Yamen ont été
envoyés à Tientsin, munis de pleins pouvoirs
pour assister Li-Hong-Chang dans la négocia-
tion du traité de paix définitif que le vice-roi
du Petchili est chargé de conclure avec M.
Patenôtre. H
Cette nouvelle paraît digne de foi ; toute-
fois le gouvernement français n'a pas encore
été officiellement informé des noms et de l'ar-
rivée à Tientsin des plénipotentiaires chinois.
,———————— .- ——————
L'ÉLECTION , DE DIMANCHE
Les conservateurs sont tellement con-
tents d'avoir trouvé dans M. le dùc De-
cazes un ancien serviteur de la Républi-
que consentant à aller solliciter à la fois
les suffrages des légitimistes qu'il avait
oubliés et ceux des bonapartistes qu'il
avait combattus, qu'ils donnent à. l'élec-
tion de dimanche, dans la Gironde, l'im-
portance d'un coup de parti.
Le Gaulois de ce matin se distingue par-
ticulièrement dans cette campagne, et in-
siste sur la nécessité absolue qu'il y a
pour les monarchistes à envoyer M. De-
cazes au Sénat.
Il paraît que le duc, pour le moment,
n'est pas bien dans les papiers de M. le
comte de Paris. Le rédacteur du Gaulois,
dans un style fort embrouillé où il y a du
courtisan et du prophète, gémit de la sus-
picion où les princes semblent tenir les
hommes qui ont fait le 24 et le 16
Mai sans » réussir à autre chose qu'à
affermir la République. Or, si les élections
nommaient M. Decazes, M. le comte de Pa-
ris serait bien obligé de lui rendre sa con-
fiance ; et, au lieu d'être faite par des gens
sans antécédents, la restauration monar-
chique serait effectuée par le personnel
des dégommés mac-mahoniens, ce qui
est important, comme bien vous pensez 1
On pourrait recourir aux lumières de M.
d'Harcourt qui sait tout, même les ques-
tions de finances. M. de Cumont, s'il n'est
pas mort, retrouverait son lit au Collège de
France et, qui sait? M. Pascal pourrait en-
core peut-être travailler de son métier.
M. le duc Decazes est donc, d'après le
rédacteur du Gaulois, l'homme nécessaire
pour repêcher le personnel fort avarié des
tentatives réactionnaires. De plus il est
l'homme indispensable, toujours selon M.
Teste, à la restauration de la monarchie.
Ecoutez plutôt le portrait qu'il en trace :
M. Decazes a un regard beau et charmant,
qui paraît si sincère que le diplomate le
plus fermé a envie de s'ouvrir à lui.
Son intelligence est ouverte à toutes les
combinaisons, à tous les projets : très fin
il en prend ce qu'il veut et vous laisse le
plaisir de croire qu'il en prend tout.
Homme d'action, il est toujours prêt à
payer. de sa personne. Il serait dans le
Parlement un agent doué de la double
propriété d'unir à droite et de dissoudre à
gauche. H va de la politique au thetttre,
des lettres a la fmailcc, il voit tout le
monde, ^intéresse à tout, eL de chacun et
de chaque chose il tire parti pour sa poli-
tique, etc., etc.
M. Teste ajoute que M. le duc Decazes a
"beaucoup d'esprit. Je n'en disconviens
pas. Je crois même qu'il en a assez pour
s'apercevoir avec quelque ennui que son
apologiste, traçant, d'après lui, le portrait
de l'homme politique accompli, n'a réussi
à nous offrir que la parfaite image de l'in-
trigant.
H. F.
-——————— ———————-. -
Le conseil des ministres s'est occupé
hier de la question du sous-secrêtariat des
colonies, qui est toujours pendante. On
sait que dans une précédente séance le
conseil avait admis en principe la sup-
pression de cette fonction qui devait être
remplacée par une simple direction.
Mais dans une réunion tenue mardi au
Palais-Bourbon par les sénateurs et dé-
putés des colonies il avait été décidé
qu'une démarche collective serait faite au-
près du président du conseil pour deman-
der le maintien du statu quo.
A la suite de cette démarche, le prési-
dent du conseil a remis en discussion la
question, qui n'était pas irrévocablement
jugée. Il a exposé à ses collègues les rai-
sons d'ordre politique qui lui avaient été
soumises par les représentants des colo-
nies.
Le conseil a ajourné sa décision jusqu'à
la séance de samedi, qui aura lieu à l'Ely-
sée, sous la présidence de M. Grévy.
Dès aujourd'hui il paraît certain que le
sous-secrétariat des colonies sera main-
tenu.
J'ai exposé ici même, il y a quelques
jours, les raisons qui rendent cette solu-
tion nécessaire ; je n'y reviendrai pas.
(Juei sera le titulaire de ce sous-secré-
tariat d'Etat, qu'il serait plus exact d'ap-
peler la secrétairerie des colonies, comme
en Angleterre ? Je n'ai pas d'indications
précises sur ce point. Mais ce qui importe,
c'est moins de savoir à qui sera confié ce
poste, équivalant presque à un ministère,
que d'être fixé sur la ligne politique que
devra suivre en matière coloniale le titu-
laire de cette fonction importante.
Seul le président du conseil a autorité
pour dire s'il entend modifier le système
administratif et économique inauguré par
le précédent cabinet, et en quoi consiste-
ront ces modifications, ou bien s'il estime
qu'il faille continuer l'expérience faite de-
puis deux ans.
Il est de toute évidence qu'aucun homme
politique ne peut accepter la responsabilité
de l'administration coloniale sans être
fixé, avant tout, sur ce point essentiel.
Peut-être est-ce pour n'avoir pas posé
tout d'abord la question sur ce terrain que
M. le président du conseil a éprouvé jus-
qu'ici tant de difficultés à trouver un titu-
laire pour le sous-secrétariat des colonies.
Ni M. Félix Faure, qui a bien voulu
rester provisoirement chargé de l'expédi-
tion des affaires, ni aucun de ceux à qui le
poste a été offert, ne savent, à l'heure ac-
tuelle, quelle est la politique du cabinet.
Ce point est particulier. Si le président
du conseil néglige de le dire, il lui sera
aussi difficile demain qu'hier d'obtenir
une réponse catégorique de personne.
Louis HENRIQUB.
INFORMATIONS
Le conseil des ministres
Les ministres se sont réunis hier matin
en conseil sous la présidence de M. Henri
Brisson. Le conseil a décidé de nommer
M. Gragnon au poste vacant par la démis-
sion de M. Camescasse.
Le conseil a examiné la candidature de
M. Noirot, ancien sous-secrétaire d'Etat, à
un siège de la Cour des comptes. Les mi-
nistres ont décidé de n'appeler aucun dé-
puté à des fonctions publiques jusqu'aux
prochaines élections.
La date des élections
On assure que M. Allain-Targé a offi-
cieusement annoncé aux préfets reçus par
lui cette semaine que les élections géné-
rales étaient dès maintenant fixées, d'un
commun accord avec tous les membres du
cabinet, au premier dimanche de septem-
bre.
Nominations
M. Liron d'Ayrolles, ainsi que nous l'an-
noncions hier, est nommé directeur du
mouvement des fonds au ministère des fi-
nances, en remplacement de M. Gay.
M. le général de brigade Jacquemin,
commandant la 3e brigade de cuirassiers
(4e division de cavalerie), est nommé di-
recteur de la cavalerie au ministère de la
guerre, en remplacement de M. le général
Augey-Dufresse.
M. Forot (Pierre), contrôleur de lre
classe de l'administration de l'armée, est
nommé chef du cabinet du sous-secré-
taire d'Etat au ministère de la guerre.
Le mouvement préfectoral
Voici des renseignements qui complè-
tent en les confiirmant ceux que nous
avons donnés déjà sur cet important mou-
vement :
À la préfecture de la Haute-Garonne,
c'est M. Glaize, préfet de la Loire, qui est
nommé.
M. de Selves, préfet de l'Oise, est
nommé préfet de Meurthe-et-Moselle.
M. Jabouille, préfet de Maine-et-Loire,
est nommé préfet du Doubs.
M. Grimanelli, préfet de la Haute-Savoie,
est nommé préfet du Gard.
M. Nelsn-Chierico, préfet de la Nièvre,
est nommé préfet de Maine-et-Loire.
M. Demangeat, ancien préfet, est nom-
mé préfet des Côtes-du-Nord.
M. Bret, sous-préfet de Sens, est nommé
préfet du Morbihan.
M. Filippini, préfet de la Manche, est
nommé préfet de la Loire.
M. Favalelli, préfet de la Haute-Marne,
est nommé préfet de la Manche.
M. Laugier-Mathieu, préfet du Var, est
nommé p rcict. de la Côrrèzè.
M. Frémont, préfet de la Corrèzc, est
nommé préfet de l'Allier, en remplace-
ment de M. Genouille, nommé inspecteur
des services administratifs.
M. Bès de Berc, secrétaire général du
Rhône, est nommé préfet du Var.
M. Loze, préfet du Cantal, est nommé
secrétaire général de la préfecture de po-
lice de Paris.
M. Bardon, préfet de l'Aveyron, est
nommé préfet du Cantal.
M. Dumesnil, secrétaire général de l'Oise,
est nommé préfet de l'Aveyron.
M. Schnerb est maintenu, sur sa de-
mande, préfet de la Gironde.
A l'Académie des beaux-arts
La section de sculpture, le bureau de
l'Académie et les jurés adjoints ont rendu
hier le jugement du second concours d'es-
sai des, deux épreuves réunies pour le
grand prix de Rome en sculpture.
Voici les noms des 10 concurrents, sur
32, qui sont admis à monter en loge pour
le concours définitif :
1° Gardet, élève de MM. Cavelier, Aimé
Millet;
2° Thumisse, élève de M. Cavelier ;
3° Hanaux, élève de MM, Dumont, Tho-
mas, Bonnassieux ;
4° Chavaliaud, élève de MM. Jouffroy,
Falguière, Roubeau;
5° Faivre, élève de M. Cavelier ;
6° Marioton, élève de MM. Dumont,
Thomas, Bonnassieux ;
7° Lefebvre (H.), élève de M. Cavelier;
gODesvergues, élève de MM. Chapu, Fal-
guière, Thomas ;
9° Boutry, élève de M. Cavelier ;
10° Bardelle, élève de M. Dumont, Tho-
mas, Bonnassieux.
Le programme du concours définitif
sera donné lundi matin aux dix concur-
rents à leur entrée en loge.
L'Association des artistes
L'assemblée générale annuelle de l'As-
sociation des artistes peintres, sculpteurs,
architectes, graveurs et dessinateurs aura
lieu aujourd'hui, à deux heures précises,
à l'Ecole nationale des beaux-arts, sous la
présidence de M. Léon Sabatier, président
intérimaire.
La séance sera consacrée au compte
rendu des travaux de l'année.1884, par M.
Guillaume Dubufe, rapporteur, et au re-
nouvellement d'un cinquième des mem-
bres du comité.
La Société de géographie.
La Société de géographie, sous la pré-
sidence de M. Ferdinand de Lesseps, mem-
bre de l'Institut, président de la Société,
tiendra sa première assemblée générale
de 1885 ce soir, à huit heures, dans son
hôtel, 184, boulevard Saint-Germain.
A cette séance, où seront décernés les
prix de la Société, M. le docteur Ballay
fera une communication sur l'Ogôoué et
le Congo, avec projections à la lumière
oxhydrique par M. Molteni.
CHRONIQUE
Je connais une maîtresse de maison
qui a lancé depuis l'année dernière des
invitations au monde entier pour une
fête monstre, et je commence à crain-
dre qu'elle ne s'y prenne un peu tard
pour faire la toilette de ses murs. Cette
grande dame, c'est la France, qui doit
recevoir dans l'enceinte de sa bonne
ville de Paris les participants et les vi-
siteurs de l'Exposition universelle de
1889.
Si quelques jours sont nécessaires
pour disposer un appartement en vue
d'une soirée dansante, il faut bien qua-
tre ans à une ville pour faire ses prépa-
rifs de fête. Il ne s'agit pas, en effet, de
déplacer des meubles, mais des immeu-
bles, qui sont peu portatifs de leur na-
ture. La décoration, qui chez un parti-
culier se borne à deux charretées de
fleurs et de plantes vertes, exige d'une
capitale un déploiement de belles ar-
chitectures et d'œuvres sculptées qui
ne peuvent s'improviser.
Il serait donc prudent de ne pas at-
tendre davantage pour aborder la réali-
sation des travaux à exécuter. La beso-
gne est énorme. Une levée en masse des
balais, des plumeaux et des pioches
pourra seule remettre au point notre
cher Paris qui est devenu si laid, si
laid que le capitaine Cook et le colonel
Gayze n'y promènent qu'en rougissant
leurs régiments de touristes.
Parmi les grosses taches qu'il im-
porte de faire disparaître, je compte en
première ligne la ruine géante qu'on
laisse traîner sur la rive gauche de la
Seine, ruine sinistre par le souvenir des
crimes qu'elle continue à évoquer qua-
tre ans après l'amnistie.
Le palais incendié du conseil d'Etat
et de la Cour dès comptes est une des
verrues de Paris, malgré les efforts que
le. vent, le soleil et les moineaux francs
ont faits pour la rendre pittoresque.
Tout le monde sait qu'il a poussé une
futaie dans les salles déplafonnées, que
les corneilles hantent la crête des murs
roussis, que les hirondelles accrochent
leurs nids aux marbres des cheminées
suspendues dans les airs, que des chats
misanthropes y ont retrouvé les habi-
tudes de la vie sauvage et que des ani-
maux inconnus y poussent, pendant la
nuit, des cris de bataille ou d'amour.
Cela est curieux peut-être, mais ne se
concilie pas avec le besoin de précision
qui est dans le caractère de l'esprit
français. On ne sait plus à quoi l'on a
affaire. Est-ce encore un palais? n'est-
ce plus qu'une forêt vierge gardée par
un concierge ?
Un bon coup de pioche, — et bâtis-
sons là, pour 1889, le musée des Arts
décoratifs, ou quelque bâtiment, point
trop vilain d'aspeot, et ayant un but
d'tttjlity.
Et la cour des Débarras, ci-devant
place du Carrousel, ne lui rendra-t-on
pas sa beauté première? Plus malheu-
reuse encore que la ruine du quai d'Or-
say, cette pauvre place a reçu, sur la
droite, l'usine des postes : une enfilade
de constructions qui ressemblent à des
boîtes d'allumettes-bougies — sur la
gauche, la serre chaude où M. Poubelle
cherche à hâter le travail de son per-
sonnel, — et, au centre, un dépôt de
cailloux, une remise de voitures d,'arro-
sage, des échelles de sauvetagtli. une
potence électrique à deux bras et: dtau-
tres instruments variés destinés àÈsésdai-
rer l'espace, mais pas à le décorer.
Tout cela déshonore le Louvre, mon,
ton, son, notre, votre Louvre, — car
tous ces possessifs peuvent s'appliquer
à une propriété nationale. Il est grand
temps de prendre un parti, de trans-
porter la poste dans son usine neuve,
de déblayer la place et de décider si
l'on réunira le pavillon de Flore au pa-
villon de Marsan, par une ligne d'arca-
des à jour ou si l'on dissimulera le vide
laissé par la démolition du Dalais des
Tuileries en y créant un beau jardin.
Bien d'autres coups de balai seraient
à donner encore; mais le cadre d'une
chronique ne permet pas de tout indi-
quer. Aussi bien faut-il dire au moins
un mot d'une grosse question, celle de
la circulation.
La Compagnie de l'Ouest opère la
rectification de la gare Saint-Lazare.
Les maçons se sont déjà mis à l'œuvre.
Voilà qui est bien.
Mais le Métropolitain, le fameux che-
min de fer qui doit passer on ne sait
où, peut-être sous nos pieds, peut-être
sur nos têtes, que devient-il ? A-t-on
l'intention de le faire? Veut-on y renon-
cer ? Passera-t-il ? ne passera-t-il pas ?
Qu'on se prononce nettement et vive-
ment, car les heures pressent et il est
très important, si l'on doit établir le
réseau ferré au cœur de Paris, d'en
commencer la construction immédiate-
ment. Il ne faut pas recevoir les visi-
teurs de l'Exposition de 1889 comme la
Ville de Vienne a reçu les visiteurs de
l'Exposition d'électricité. Le jour même
de l'ouverture, la municipalité vien-
noise avait eu l'ingénieuse idée de bar-
rer ou de défoncer la seule grande voie
qui menait à l'Exposition. C'est un
exemple à ne pas suivre, n'est-il pas
vrai? Les fondrières sont incompatibles
avec la politesse internationale.
Quant aux travaux de l'Exposition
proprement dite, -' et j'entends par là
non seulement le gros œuvre" mais les
détails décoratifs, — il est certain qu'on
ne tardera pas à prendre une décision.
C'est affaire au ministre du commerce,
ou, pour mieux dire, au ministre de
l'Exposition.
Je le plaindrai d'avance, celui qui
aura à donner le coup d'œil du maître à
tous les préparatifs de notre grande
fête internationale, à presser les uns et
les autres, la ville et le gouvernement,
pour que tout soit en bon ordre à
l'heure dite, je le plaindrais si tous ces
tracas n'étaient rachetés par le bonheur
d'une minute. Ce bonheur, je l'ai lu dans
les yeux de la maîtresse de maison à
qui je faisais allusion tout à l'heure,
lorsque, après une longue semaine d'ef-
forts et de fatigue, elle constate que les
musiciens sont à leurs pupitres, les
maîtres d'hôtel au buffet, les femmes de
chambre au vestiaire, et que son mari a
fini par entrer dans ses gants.
SAINT-JUIRS.
LA JOURNEE DE PARIS
LES CRÉANCIERS DE VALLÈS,- UNE
FARCE DE VILLEMESSANT. — Jules
Valès a laissé des créanciers. Sa succession
les paie. On lit en effet dans le Cri du Peu-
ple:
« MM. Caumont, tailleur, Morlet, Victor-
Richard (Londres), Cima, Morran, Fisher, Jules
Richard, V. Robert, Limozin, Dalloz, Jacob,
Hubert sont priés de se présenter chez
Me Mension, notaire, boulevard Haussmann,
58, avec les pièces justificatives de leurs
créances. »
Ce journaliste qui paie ses' dettes nous re-
met en mémoire une farce que M. de Ville-
messant fit un jour à Gaston Vassy.
Vassy était au Figaro. Il gagnait beaucoup
d'argent - plus de 50,000 francs par an,-en
appointements, remises sur affaires de publi-
cité et gratifications. Et, malgré cela, Vassy
était criblé de dettes. Il n'avait jamais payé
un fournisseur. C'était au Figaro un défilé
continuel de créanciers où des marchands de
chevaux et de voitures, apportant des notes
de 3,000 francs, se rencontraient avec des
blanchisseuses réclamant 12 francs.
Vassy entrait au journal et s'enfuyait par
des portes dérobées, par des escaliers de
service.
Un jour, à la suite d'un scandale causé au
journal par un chemisier mécontent de n'être
pas payé, M. de Villemessant entra dans une
violente colère. Il administra une vive se-
monce à Vassy. Celui-ci jura de s'arranger
avec ses créanciers ; mais à part lui il se
promettait de n'en rien faire, car le seul ar-
rangement possible, c'était le paiement.
Villemessant passa bientôt du courroux à la
bonne humeur. Ce Vassy était si amusant ! il
avait de si drôles de réparties et il était si
habile en affaires! Dans sa grosse gaieté, «le
patron » chercha ce qu'il pourrait faire pour
s'amuser aux dépens du mauvais payeur.
Après le dîner, il donna l'ordre de mettre le
journal sous presse une demi-heure plus tôt
qu'à l'ordinaire. Puis il porta lui-même à
1 imprimerie une note ainsi conçue : « M.
Gaston Vassy prévient MM. ses Créanciers
qu'ils peuvent se présenter à la caisse du
journal où leurs factures seront réglées à
vue. »
« Vous ferez passer cette note en tête du
journal, dit Villemessant n. Ce qui fut fait.
Le lendemain matin, à neuf heures, Gaston
Vassy se présenta chez le directeur du Fi-
Prix du numéro à Paris : 15 centimes — Départements : 20 centimes
Vendredi. M Avril 1885
l
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
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Lots Turcs •! 367 50.
Priorité 367 50.
BULLETIN
Le conflit entre l'Angleterre et la Rus-
sie n'a pas fait un pas depuis hier. Tous
les journaux anglais s'accordent à recon-
naître l'extrême gravité de la situation.
Au lendemain du jour où il reçut la ré-
ponse de la Russie refusant de soumettre
à une enquête nouvelle la conduite du gé-
néral Komaroff , lord Granville adressa
une longue dépêche tenue secrète à sir
Edward Thornton. Cette dépêche renfer-
mait, dit-on, une critique des principaux
arguments invoqués par la Russie pour re-
fuser l'enquête. La Russie n'a point en-
core répondu à cette dernière communica-
tion. On annonce que le gouvernement
russe a envoyé le rapport du général
Lumsden au général Komaroff.
Il est douteux que celui-ci en recon-
naisse la véracité. Les nouvelles pessi-
mistes circulent dans tous les cercles di-
plomatiques, où l'on dit aussi que les
cabinets de Berlin et de Vienne manœu-
vrent de concert pour arriver au maintien
de la paix. Le roi Guillaume aurait écrit
dans ce sens une longue lettre au tzar. Ce
sont là des bruits qui courent et dont il
est malaisé d'apprécier exactement l'im-
portance. Mais ce qui est certain, c'est que
l'opinion publique à Londres comme à
Saint-Pétersbourg considère la solution
pacifique de la question afghane comme
peu probable, et qu'à cette heure le moin-
dre incident peut entraîner la rupture des
négociations entre l'Angleterre et la Rus-
sie, qui sont diplomatiquement belligé-
rantes. La guerre, d'ailleurs, ne surpren-
drait pas plus l'Angleterre que la Russie.
A la Chambre des communes, sir Staf-
ford Northcote a questionné le gouverne-
ment pour savoir : 1° si une correspon-
dance additionnelle sur la frontière af-
ghaneit sera communiquée à la Chambre
avant la discussion du crédit ; 20 si le gou-
vernement pouvait dire quelle est la situa-
tion exacte du conflit entre l'Angleterre
et la Russie.
M.Gladstone a répondu, sur la première
question, qu'il n'a pas l'intention de com-
muniquer à la Chambre avant la discus-
sion du crédit un supplément de corres-
pondance sur l'Afghanistan, non plus que
la dépêche précédente du général Lums-
den. Le gouvernement, a dit M. Glads-
tone, recevra peut-être de nouvelles in-
formations d'ici à lundi, mais il ne peut
pas s'engager à en donner communication
ce jour-là.
Sur la seconde question, M. Gladstone
s'est exprimé ainsi :
« Nous serions heureux de préciser l'é-
tat des choses, mais il faut considérer
que nous sommes engagés actuellement
dans une correspondance d'une extrême
gravité. Il nous est impossible de faire
une déclaration complète, et une déclara-
tion pourrait créer un malentendu. Nous
avons donc résolu de ne faire aucune dé-
claration. »
En réponse à sir Stafford Northcote, M.
Gladstone a déclaré que la Chambre était
libre d'ajourner la discussion des crédits,
mais qu'elle déciderait sans doute de
l'aborder lundi, sans déclaration préalable
du gouvernement.
M. Gladstone, répondant à M. Worms
et à lord Churchill, a déclaré qu'il ne
pouvait fournir d'informations à la Cham-
bre avant lundi.
La nouvelle que les représentants de la
France, de l'Allemagne et de l'Autriche
avaient fait une démarche auprès de la
Porte pour que la neutralité des détroits
fût maintenue a été plusieurs fois démne-
tie, et l'autre jour encore, à la Chambre
des communes, M. Gladstone déclarait
n'avoir pas connaissance de cette dé-
marche.
La nouvelle est cependant confirmée.
Les représentants des puissances plus haut
désignées se sont rendus auprès de la
Porte et lui ont fait entrevoir qu'elle assu-
merait une responsabilité singulièrement
grave en n'observant pas une stricte neu-
tralité. La Porte serait, dit-on, disposée
à laisser le libre passage du détroit aux
navires de guerre anglais et russes. Ce
serait là, selon elle, une neutralité nette-
ment définie. Il est douteux que les puis-
sances occidentales acceptent cette doc-
trine.
On signale de fréquentes entrevues à
Londres entre Hassan-Fehmi-Pacha et lord
Granville, et aussi entre ce dernier et le
comte Nigra. Une dépêche de Londres an-
nonce même que, dans une conférence en-
tre les ambassadeurs turc et italien et
lord Granville, l'éventualité de l'occupa-
tion de l'Egypte par des troupes turques
et italiennes a été examinée.
Une explosion attribuée à la dynamite a
eu lieu à Londres hier. Nous donnons plus
bas les dépêches que nous recevons à ce
sujet.
M. de Freycinet a adressé hier à notre
consul général au Caire, au sujet de l'af-
faire du Bosphore égyptien, des instruc-
tions délibérées en conseil des minis-
tres.
Nous croyons savoir que ces instruc-
tions sont très précises et très énergi-
ques.
Nubar-Pacha, cherchant à déplacer la
question qui porte sur la violation du do-
micile du Bosphore, continue d'affirmer
le droit du gouvernement égyptien de
supprimer ce journal, et Nubar prépare,
dit-on, un mémoire dans lequel il citera
une cinquantaine de précédents à l'ap-
pui de son droit de suppression des jour-
naux.
Cependant une solution pacifique du
débat paraît prochaine. Le Times mêle à
des insinuations malveillantes à l'égard de
la France cette déclaration importante:
« S'il y a eu violation de domicile, dans
l'affaire du Bosphore égyptien, il sera
juste que nous donnions une réparation
raisonnable de cette illégalité.
« Personne en Angleterre, ajoute le
Times, ne songe à appuyer des actes dont
l'illégalité est flagrante, que ces actes
soient commis par des fonctionnaires
anglais ou égyptiens. »
Voici les dépêches relatives à l'explo-
sion de Londres, que nous annonçons
plus haut :
Londres, 23 avril.
Ce matin, à onze heures, une explosion a eu
lieu dans une salle du bâtiment de l'Ami-
rauté. Toutes les fenêtres ont été brisées.
On croit que l'explosion a été causée par la
dynamite. La police fait une enquête sur les
lieux.
Le secrétaire-adjoint de l'Amirauté a été
grièvement blessé.
L'Amirauté se trouve dans Whitehall, près
de Westminster, non loin des bâtiments du
ministère de l'intérieur, où a eu lieu, il y a
quelques mois, une explosion semblable.
Londres, 23 avril.
Il résulterait de l'enquête faite sur les lieux
de l'explosion qu'une bombe chargée de dy-
namite aurait été jetée dans le bureau du
secrétaire adjoint de l'Amirauté, à travers la
fenêtre donnant sur Saint-James-Park.
Los murs sont intacts, mais le bureau est
encombré de débris dont l'examen démontre
que l'explosion n'est pas due à une fuite de
gaz.
Londres, 23 avril.
Deux Allemands, qui sont arrivés hier ici
avec un appareil de nouvelle invention, dé-
signé sous le nom de lampe électrique, ont
été arrêtés par des officiers de la douane, qui
croient avoir découvert une machine infer-
nale dans leurs bagages.
L'appareil a été envoyé à Woolwich où il
sera examiné.
QUESTION DU JOUR
Sous la Coupole
Les réceptions académiques sont tou-
jours des événements parisiens; la ré-
ception de M. de Lesseps était un évé-
nement universel. En dépit de ceux qui
voudraient l'emprisonner dans la voca-
tion littéraire, l'Académie française s'ho-
nore en ouvrant ses portes à l'homme
qui représente le mieux le génie de l'ac-
tion dans ce siècle de l'action. A un cer-
tain niveau, toutes les gloires sont
sœurs, et rien n'était plus naturel que
de voir notre grand poète servir de par-
rain à celui qu'on appelle le grand Fran-
çais, parce qu'il a donné au monde le
plus éclatant exemple de ce que peut
encore notre nation pour le bénéfice de
l'humanité.
M. de Lesseps avait promis d'être
court ; il a mis une sorte de coquetterie
à tenir parole, quoique rien sans doute
ne l'y obligeât. Ceux qui liront son dis-
cours jugeront qu'il aurait pu s'éten-
dre davantage sans craindre qu'on le
trouvât long. Il n'est pas plus nécessaire
d'être écrivain de métier pour intéresser
même un auditoire d'élite, que de pos-
séder tous les prétendus secrets de la
rhétorique pour être éloquent. Mais si
l'on se plaignait un peu de ce que le
récipiendaire s'est trop défié de ses
forces, on s'en consolait par la pensée
qu'en cessant de l'entendre parler on
allait commencer à entendre parler de
lui. Comme il était le héros de la jour-
née, il n'avait pas besoin d'en être l'o-
rateur.
La réponse de M. Renan est en effet
un admirable panégyrique de Ferdinand
de Lesseps, et l'auteur de la Vie de Jé-
sus n'a jamais été mieux inspiré. M. Re-
nan, on a déjà pu le constater, excelle
dans le genre académique, qui n'a rien
de commun, quoi qu'en pense le vul-
gaire, avec le genre solennel. Nul ne sait
mieux que lui mettre du sel dans la
louange, du sourire dans l'émotion, et
relever même l'enthousiasme par une
légère pointe de scepticisme. Ce qui
charme le plus dans tout ce qui sort de
sa plume, c'est lui-même, avec la grâce
un peu féline de son langage, avec la
souplesse ondoyante de sa pensée. On
le retrouve tout entier dans chacune de
ses œuvres ; on ne se lasse pas de le
voir se jouer délicatement de tous les
sujets qu'il traite, et projeter sur toutes
les questions des flots de lumière chan-
geante et colorée. Parfois cette finesse
risquerait de toucher à la subtilité, et
cet épicurisme intellectuel choquerait
les âmes simples et les esprits nets, si
M. Renan n'avait pas conservé, peut-
être plus qu'il ne pense lui-même, la fa-
culté d'admirer les grandes œuvres et
les grands hommes, un amour sincère
et fort pour deux ou trois choses qui
suffisent bien à remplir un cœur.
Ce n'est plus la théologie, même tem-
pérée par l'incrédulité, ce n'est plus la
recherche du divin ou la nostalgie de la
foi qui inspirent le mieux M. Renan. Il a
marché avec son temps ; les problèmes
du présent l'intéressent et l'échauffent
d'une chaleur plus communicative et
plus vraie que le dilettantisme méta-
physique dans lequel il semble parfois
s'attarder. Aussi préférons-nous son
éloge de Ferdinand de Lesseps aux
plus brillantes variations qu'il ait exé-
cutées sur YEcclésiaste. Dans ce dis-
cours académique, ayant en main un
sujet si plein, si solide, si vivant, M.
Renan a trouvé une éloquence que le
charme de sa manière ornait sans l'ef-
féminer. Une œuvre comme le perce-
ment d'un isthme n'admet guère le
plus et le moins, l'apparition des nuan-
ces le balancement des idées, et les
qualités maîtresses de l'écrivain ne
le poussaient pas ici à l'excès ; une
saisissante réalité est un bon garde-
fou.
Comme il s'agissait de l'Orient, l'ora-
teur s'est plu à rappeler ses souvenirs
du désert, et il a prouvé qu'il jugeait
bien son héros à l'ceuvre ; c'est un mor-
ceau acàevé que le tableau de l'amitié
si féconde qui unissait le vice-roi Saïd
à M. de Lesseps, le barbare ébloui par
les lueurs de la civilisation au pionnier
de génie qui a su manier les instru-
ments les plus divers. Nous ne voyons
pas qu'on ait jamais mieux fait ressor-
tir la grandeur de l'entreprise qu'en
montrant comment le même homme
domptait tour à tour la volonté capri-
cieuse d'un pacha et la jalousie tenace
des Anglais de province, embrigadait au
service de son dessein les forçats échap-
pés que le travail allait purifier et les
puritains qui consultaient la Bible pour
le juger.
Chose remarquable : ce sceptique raf-
finé a fait de son discours sur M. de
Lesseps un panégyrique de la foi. C'est
qu'il s'agit d'une foi toute moderne,
sans mélange de mysticisme, de celle
qui triomphe une fois pour toutes des
objections en achevant sa besogne, et
qui donne aux yeux la joie de contem-
pler l'accomplissement du rêve, parce
que le rêve n'était qu'un calcul de gé-
nie. Certes, l'homme qui a changé la
géographie du globe a été loué bien
souvent, mais il fallait qu'il entrât à
l'Académie pour contempler sa vie et
sa gloire dans un si beau miroir.
Pour que -la tradition fut respectée,
il fallait parler aussi d'Henri Martin, et
l'on a en effet parlé de lui avec toute
la sympathie que méritent son caractère
élevé, son patriotisme ardent, sa pro-
bité politique et littéraire. M. de Lesseps
a chaudement loué ses vertus et l'in-
vincible fermeté de sa confiance dans
les destinées de la patrie, mais il a fi-
nement esquivé son éloge littéraire.
M. Renan ne pouvait se tirer d'affaire
en plaidant sa propre incompétence ; il
a donc loué Henri Martin. Seulement le
naturel reprenait ici ses droits, et le
spirituel critique n'a pu s'empêcher
d'assaisonner les louanges qu'il donnait
au mort de quelques épigrammes joli-
ment enveloppées, mais que les admira-
teurs du laborieux historien trouveront
peut-être un peu piquantes. C'est assu-
rément pour Henri Martin que la jour-
née a été la moins bonne.
$
NOUVELLES DE CHINE
Les négociations à Tientsin
On mande de Shanghai au Standard, le
22 avril :
« Deux membres du Tsong-li-Yamen ont été
envoyés à Tientsin, munis de pleins pouvoirs
pour assister Li-Hong-Chang dans la négocia-
tion du traité de paix définitif que le vice-roi
du Petchili est chargé de conclure avec M.
Patenôtre. H
Cette nouvelle paraît digne de foi ; toute-
fois le gouvernement français n'a pas encore
été officiellement informé des noms et de l'ar-
rivée à Tientsin des plénipotentiaires chinois.
,———————— .- ——————
L'ÉLECTION , DE DIMANCHE
Les conservateurs sont tellement con-
tents d'avoir trouvé dans M. le dùc De-
cazes un ancien serviteur de la Républi-
que consentant à aller solliciter à la fois
les suffrages des légitimistes qu'il avait
oubliés et ceux des bonapartistes qu'il
avait combattus, qu'ils donnent à. l'élec-
tion de dimanche, dans la Gironde, l'im-
portance d'un coup de parti.
Le Gaulois de ce matin se distingue par-
ticulièrement dans cette campagne, et in-
siste sur la nécessité absolue qu'il y a
pour les monarchistes à envoyer M. De-
cazes au Sénat.
Il paraît que le duc, pour le moment,
n'est pas bien dans les papiers de M. le
comte de Paris. Le rédacteur du Gaulois,
dans un style fort embrouillé où il y a du
courtisan et du prophète, gémit de la sus-
picion où les princes semblent tenir les
hommes qui ont fait le 24 et le 16
Mai sans » réussir à autre chose qu'à
affermir la République. Or, si les élections
nommaient M. Decazes, M. le comte de Pa-
ris serait bien obligé de lui rendre sa con-
fiance ; et, au lieu d'être faite par des gens
sans antécédents, la restauration monar-
chique serait effectuée par le personnel
des dégommés mac-mahoniens, ce qui
est important, comme bien vous pensez 1
On pourrait recourir aux lumières de M.
d'Harcourt qui sait tout, même les ques-
tions de finances. M. de Cumont, s'il n'est
pas mort, retrouverait son lit au Collège de
France et, qui sait? M. Pascal pourrait en-
core peut-être travailler de son métier.
M. le duc Decazes est donc, d'après le
rédacteur du Gaulois, l'homme nécessaire
pour repêcher le personnel fort avarié des
tentatives réactionnaires. De plus il est
l'homme indispensable, toujours selon M.
Teste, à la restauration de la monarchie.
Ecoutez plutôt le portrait qu'il en trace :
M. Decazes a un regard beau et charmant,
qui paraît si sincère que le diplomate le
plus fermé a envie de s'ouvrir à lui.
Son intelligence est ouverte à toutes les
combinaisons, à tous les projets : très fin
il en prend ce qu'il veut et vous laisse le
plaisir de croire qu'il en prend tout.
Homme d'action, il est toujours prêt à
payer. de sa personne. Il serait dans le
Parlement un agent doué de la double
propriété d'unir à droite et de dissoudre à
gauche. H va de la politique au thetttre,
des lettres a la fmailcc, il voit tout le
monde, ^intéresse à tout, eL de chacun et
de chaque chose il tire parti pour sa poli-
tique, etc., etc.
M. Teste ajoute que M. le duc Decazes a
"beaucoup d'esprit. Je n'en disconviens
pas. Je crois même qu'il en a assez pour
s'apercevoir avec quelque ennui que son
apologiste, traçant, d'après lui, le portrait
de l'homme politique accompli, n'a réussi
à nous offrir que la parfaite image de l'in-
trigant.
H. F.
-——————— ———————-. -
Le conseil des ministres s'est occupé
hier de la question du sous-secrêtariat des
colonies, qui est toujours pendante. On
sait que dans une précédente séance le
conseil avait admis en principe la sup-
pression de cette fonction qui devait être
remplacée par une simple direction.
Mais dans une réunion tenue mardi au
Palais-Bourbon par les sénateurs et dé-
putés des colonies il avait été décidé
qu'une démarche collective serait faite au-
près du président du conseil pour deman-
der le maintien du statu quo.
A la suite de cette démarche, le prési-
dent du conseil a remis en discussion la
question, qui n'était pas irrévocablement
jugée. Il a exposé à ses collègues les rai-
sons d'ordre politique qui lui avaient été
soumises par les représentants des colo-
nies.
Le conseil a ajourné sa décision jusqu'à
la séance de samedi, qui aura lieu à l'Ely-
sée, sous la présidence de M. Grévy.
Dès aujourd'hui il paraît certain que le
sous-secrétariat des colonies sera main-
tenu.
J'ai exposé ici même, il y a quelques
jours, les raisons qui rendent cette solu-
tion nécessaire ; je n'y reviendrai pas.
(Juei sera le titulaire de ce sous-secré-
tariat d'Etat, qu'il serait plus exact d'ap-
peler la secrétairerie des colonies, comme
en Angleterre ? Je n'ai pas d'indications
précises sur ce point. Mais ce qui importe,
c'est moins de savoir à qui sera confié ce
poste, équivalant presque à un ministère,
que d'être fixé sur la ligne politique que
devra suivre en matière coloniale le titu-
laire de cette fonction importante.
Seul le président du conseil a autorité
pour dire s'il entend modifier le système
administratif et économique inauguré par
le précédent cabinet, et en quoi consiste-
ront ces modifications, ou bien s'il estime
qu'il faille continuer l'expérience faite de-
puis deux ans.
Il est de toute évidence qu'aucun homme
politique ne peut accepter la responsabilité
de l'administration coloniale sans être
fixé, avant tout, sur ce point essentiel.
Peut-être est-ce pour n'avoir pas posé
tout d'abord la question sur ce terrain que
M. le président du conseil a éprouvé jus-
qu'ici tant de difficultés à trouver un titu-
laire pour le sous-secrétariat des colonies.
Ni M. Félix Faure, qui a bien voulu
rester provisoirement chargé de l'expédi-
tion des affaires, ni aucun de ceux à qui le
poste a été offert, ne savent, à l'heure ac-
tuelle, quelle est la politique du cabinet.
Ce point est particulier. Si le président
du conseil néglige de le dire, il lui sera
aussi difficile demain qu'hier d'obtenir
une réponse catégorique de personne.
Louis HENRIQUB.
INFORMATIONS
Le conseil des ministres
Les ministres se sont réunis hier matin
en conseil sous la présidence de M. Henri
Brisson. Le conseil a décidé de nommer
M. Gragnon au poste vacant par la démis-
sion de M. Camescasse.
Le conseil a examiné la candidature de
M. Noirot, ancien sous-secrétaire d'Etat, à
un siège de la Cour des comptes. Les mi-
nistres ont décidé de n'appeler aucun dé-
puté à des fonctions publiques jusqu'aux
prochaines élections.
La date des élections
On assure que M. Allain-Targé a offi-
cieusement annoncé aux préfets reçus par
lui cette semaine que les élections géné-
rales étaient dès maintenant fixées, d'un
commun accord avec tous les membres du
cabinet, au premier dimanche de septem-
bre.
Nominations
M. Liron d'Ayrolles, ainsi que nous l'an-
noncions hier, est nommé directeur du
mouvement des fonds au ministère des fi-
nances, en remplacement de M. Gay.
M. le général de brigade Jacquemin,
commandant la 3e brigade de cuirassiers
(4e division de cavalerie), est nommé di-
recteur de la cavalerie au ministère de la
guerre, en remplacement de M. le général
Augey-Dufresse.
M. Forot (Pierre), contrôleur de lre
classe de l'administration de l'armée, est
nommé chef du cabinet du sous-secré-
taire d'Etat au ministère de la guerre.
Le mouvement préfectoral
Voici des renseignements qui complè-
tent en les confiirmant ceux que nous
avons donnés déjà sur cet important mou-
vement :
À la préfecture de la Haute-Garonne,
c'est M. Glaize, préfet de la Loire, qui est
nommé.
M. de Selves, préfet de l'Oise, est
nommé préfet de Meurthe-et-Moselle.
M. Jabouille, préfet de Maine-et-Loire,
est nommé préfet du Doubs.
M. Grimanelli, préfet de la Haute-Savoie,
est nommé préfet du Gard.
M. Nelsn-Chierico, préfet de la Nièvre,
est nommé préfet de Maine-et-Loire.
M. Demangeat, ancien préfet, est nom-
mé préfet des Côtes-du-Nord.
M. Bret, sous-préfet de Sens, est nommé
préfet du Morbihan.
M. Filippini, préfet de la Manche, est
nommé préfet de la Loire.
M. Favalelli, préfet de la Haute-Marne,
est nommé préfet de la Manche.
M. Laugier-Mathieu, préfet du Var, est
nommé p rcict. de la Côrrèzè.
M. Frémont, préfet de la Corrèzc, est
nommé préfet de l'Allier, en remplace-
ment de M. Genouille, nommé inspecteur
des services administratifs.
M. Bès de Berc, secrétaire général du
Rhône, est nommé préfet du Var.
M. Loze, préfet du Cantal, est nommé
secrétaire général de la préfecture de po-
lice de Paris.
M. Bardon, préfet de l'Aveyron, est
nommé préfet du Cantal.
M. Dumesnil, secrétaire général de l'Oise,
est nommé préfet de l'Aveyron.
M. Schnerb est maintenu, sur sa de-
mande, préfet de la Gironde.
A l'Académie des beaux-arts
La section de sculpture, le bureau de
l'Académie et les jurés adjoints ont rendu
hier le jugement du second concours d'es-
sai des, deux épreuves réunies pour le
grand prix de Rome en sculpture.
Voici les noms des 10 concurrents, sur
32, qui sont admis à monter en loge pour
le concours définitif :
1° Gardet, élève de MM. Cavelier, Aimé
Millet;
2° Thumisse, élève de M. Cavelier ;
3° Hanaux, élève de MM, Dumont, Tho-
mas, Bonnassieux ;
4° Chavaliaud, élève de MM. Jouffroy,
Falguière, Roubeau;
5° Faivre, élève de M. Cavelier ;
6° Marioton, élève de MM. Dumont,
Thomas, Bonnassieux ;
7° Lefebvre (H.), élève de M. Cavelier;
gODesvergues, élève de MM. Chapu, Fal-
guière, Thomas ;
9° Boutry, élève de M. Cavelier ;
10° Bardelle, élève de M. Dumont, Tho-
mas, Bonnassieux.
Le programme du concours définitif
sera donné lundi matin aux dix concur-
rents à leur entrée en loge.
L'Association des artistes
L'assemblée générale annuelle de l'As-
sociation des artistes peintres, sculpteurs,
architectes, graveurs et dessinateurs aura
lieu aujourd'hui, à deux heures précises,
à l'Ecole nationale des beaux-arts, sous la
présidence de M. Léon Sabatier, président
intérimaire.
La séance sera consacrée au compte
rendu des travaux de l'année.1884, par M.
Guillaume Dubufe, rapporteur, et au re-
nouvellement d'un cinquième des mem-
bres du comité.
La Société de géographie.
La Société de géographie, sous la pré-
sidence de M. Ferdinand de Lesseps, mem-
bre de l'Institut, président de la Société,
tiendra sa première assemblée générale
de 1885 ce soir, à huit heures, dans son
hôtel, 184, boulevard Saint-Germain.
A cette séance, où seront décernés les
prix de la Société, M. le docteur Ballay
fera une communication sur l'Ogôoué et
le Congo, avec projections à la lumière
oxhydrique par M. Molteni.
CHRONIQUE
Je connais une maîtresse de maison
qui a lancé depuis l'année dernière des
invitations au monde entier pour une
fête monstre, et je commence à crain-
dre qu'elle ne s'y prenne un peu tard
pour faire la toilette de ses murs. Cette
grande dame, c'est la France, qui doit
recevoir dans l'enceinte de sa bonne
ville de Paris les participants et les vi-
siteurs de l'Exposition universelle de
1889.
Si quelques jours sont nécessaires
pour disposer un appartement en vue
d'une soirée dansante, il faut bien qua-
tre ans à une ville pour faire ses prépa-
rifs de fête. Il ne s'agit pas, en effet, de
déplacer des meubles, mais des immeu-
bles, qui sont peu portatifs de leur na-
ture. La décoration, qui chez un parti-
culier se borne à deux charretées de
fleurs et de plantes vertes, exige d'une
capitale un déploiement de belles ar-
chitectures et d'œuvres sculptées qui
ne peuvent s'improviser.
Il serait donc prudent de ne pas at-
tendre davantage pour aborder la réali-
sation des travaux à exécuter. La beso-
gne est énorme. Une levée en masse des
balais, des plumeaux et des pioches
pourra seule remettre au point notre
cher Paris qui est devenu si laid, si
laid que le capitaine Cook et le colonel
Gayze n'y promènent qu'en rougissant
leurs régiments de touristes.
Parmi les grosses taches qu'il im-
porte de faire disparaître, je compte en
première ligne la ruine géante qu'on
laisse traîner sur la rive gauche de la
Seine, ruine sinistre par le souvenir des
crimes qu'elle continue à évoquer qua-
tre ans après l'amnistie.
Le palais incendié du conseil d'Etat
et de la Cour dès comptes est une des
verrues de Paris, malgré les efforts que
le. vent, le soleil et les moineaux francs
ont faits pour la rendre pittoresque.
Tout le monde sait qu'il a poussé une
futaie dans les salles déplafonnées, que
les corneilles hantent la crête des murs
roussis, que les hirondelles accrochent
leurs nids aux marbres des cheminées
suspendues dans les airs, que des chats
misanthropes y ont retrouvé les habi-
tudes de la vie sauvage et que des ani-
maux inconnus y poussent, pendant la
nuit, des cris de bataille ou d'amour.
Cela est curieux peut-être, mais ne se
concilie pas avec le besoin de précision
qui est dans le caractère de l'esprit
français. On ne sait plus à quoi l'on a
affaire. Est-ce encore un palais? n'est-
ce plus qu'une forêt vierge gardée par
un concierge ?
Un bon coup de pioche, — et bâtis-
sons là, pour 1889, le musée des Arts
décoratifs, ou quelque bâtiment, point
trop vilain d'aspeot, et ayant un but
d'tttjlity.
Et la cour des Débarras, ci-devant
place du Carrousel, ne lui rendra-t-on
pas sa beauté première? Plus malheu-
reuse encore que la ruine du quai d'Or-
say, cette pauvre place a reçu, sur la
droite, l'usine des postes : une enfilade
de constructions qui ressemblent à des
boîtes d'allumettes-bougies — sur la
gauche, la serre chaude où M. Poubelle
cherche à hâter le travail de son per-
sonnel, — et, au centre, un dépôt de
cailloux, une remise de voitures d,'arro-
sage, des échelles de sauvetagtli. une
potence électrique à deux bras et: dtau-
tres instruments variés destinés àÈsésdai-
rer l'espace, mais pas à le décorer.
Tout cela déshonore le Louvre, mon,
ton, son, notre, votre Louvre, — car
tous ces possessifs peuvent s'appliquer
à une propriété nationale. Il est grand
temps de prendre un parti, de trans-
porter la poste dans son usine neuve,
de déblayer la place et de décider si
l'on réunira le pavillon de Flore au pa-
villon de Marsan, par une ligne d'arca-
des à jour ou si l'on dissimulera le vide
laissé par la démolition du Dalais des
Tuileries en y créant un beau jardin.
Bien d'autres coups de balai seraient
à donner encore; mais le cadre d'une
chronique ne permet pas de tout indi-
quer. Aussi bien faut-il dire au moins
un mot d'une grosse question, celle de
la circulation.
La Compagnie de l'Ouest opère la
rectification de la gare Saint-Lazare.
Les maçons se sont déjà mis à l'œuvre.
Voilà qui est bien.
Mais le Métropolitain, le fameux che-
min de fer qui doit passer on ne sait
où, peut-être sous nos pieds, peut-être
sur nos têtes, que devient-il ? A-t-on
l'intention de le faire? Veut-on y renon-
cer ? Passera-t-il ? ne passera-t-il pas ?
Qu'on se prononce nettement et vive-
ment, car les heures pressent et il est
très important, si l'on doit établir le
réseau ferré au cœur de Paris, d'en
commencer la construction immédiate-
ment. Il ne faut pas recevoir les visi-
teurs de l'Exposition de 1889 comme la
Ville de Vienne a reçu les visiteurs de
l'Exposition d'électricité. Le jour même
de l'ouverture, la municipalité vien-
noise avait eu l'ingénieuse idée de bar-
rer ou de défoncer la seule grande voie
qui menait à l'Exposition. C'est un
exemple à ne pas suivre, n'est-il pas
vrai? Les fondrières sont incompatibles
avec la politesse internationale.
Quant aux travaux de l'Exposition
proprement dite, -' et j'entends par là
non seulement le gros œuvre" mais les
détails décoratifs, — il est certain qu'on
ne tardera pas à prendre une décision.
C'est affaire au ministre du commerce,
ou, pour mieux dire, au ministre de
l'Exposition.
Je le plaindrai d'avance, celui qui
aura à donner le coup d'œil du maître à
tous les préparatifs de notre grande
fête internationale, à presser les uns et
les autres, la ville et le gouvernement,
pour que tout soit en bon ordre à
l'heure dite, je le plaindrais si tous ces
tracas n'étaient rachetés par le bonheur
d'une minute. Ce bonheur, je l'ai lu dans
les yeux de la maîtresse de maison à
qui je faisais allusion tout à l'heure,
lorsque, après une longue semaine d'ef-
forts et de fatigue, elle constate que les
musiciens sont à leurs pupitres, les
maîtres d'hôtel au buffet, les femmes de
chambre au vestiaire, et que son mari a
fini par entrer dans ses gants.
SAINT-JUIRS.
LA JOURNEE DE PARIS
LES CRÉANCIERS DE VALLÈS,- UNE
FARCE DE VILLEMESSANT. — Jules
Valès a laissé des créanciers. Sa succession
les paie. On lit en effet dans le Cri du Peu-
ple:
« MM. Caumont, tailleur, Morlet, Victor-
Richard (Londres), Cima, Morran, Fisher, Jules
Richard, V. Robert, Limozin, Dalloz, Jacob,
Hubert sont priés de se présenter chez
Me Mension, notaire, boulevard Haussmann,
58, avec les pièces justificatives de leurs
créances. »
Ce journaliste qui paie ses' dettes nous re-
met en mémoire une farce que M. de Ville-
messant fit un jour à Gaston Vassy.
Vassy était au Figaro. Il gagnait beaucoup
d'argent - plus de 50,000 francs par an,-en
appointements, remises sur affaires de publi-
cité et gratifications. Et, malgré cela, Vassy
était criblé de dettes. Il n'avait jamais payé
un fournisseur. C'était au Figaro un défilé
continuel de créanciers où des marchands de
chevaux et de voitures, apportant des notes
de 3,000 francs, se rencontraient avec des
blanchisseuses réclamant 12 francs.
Vassy entrait au journal et s'enfuyait par
des portes dérobées, par des escaliers de
service.
Un jour, à la suite d'un scandale causé au
journal par un chemisier mécontent de n'être
pas payé, M. de Villemessant entra dans une
violente colère. Il administra une vive se-
monce à Vassy. Celui-ci jura de s'arranger
avec ses créanciers ; mais à part lui il se
promettait de n'en rien faire, car le seul ar-
rangement possible, c'était le paiement.
Villemessant passa bientôt du courroux à la
bonne humeur. Ce Vassy était si amusant ! il
avait de si drôles de réparties et il était si
habile en affaires! Dans sa grosse gaieté, «le
patron » chercha ce qu'il pourrait faire pour
s'amuser aux dépens du mauvais payeur.
Après le dîner, il donna l'ordre de mettre le
journal sous presse une demi-heure plus tôt
qu'à l'ordinaire. Puis il porta lui-même à
1 imprimerie une note ainsi conçue : « M.
Gaston Vassy prévient MM. ses Créanciers
qu'ils peuvent se présenter à la caisse du
journal où leurs factures seront réglées à
vue. »
« Vous ferez passer cette note en tête du
journal, dit Villemessant n. Ce qui fut fait.
Le lendemain matin, à neuf heures, Gaston
Vassy se présenta chez le directeur du Fi-
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- Auteurs similaires Deny Martial Deny Martial /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Deny Martial" or dc.contributor adj "Deny Martial")[Recueil de costumes coloriés du temps de Louis XVI et de caricatures] /ark:/12148/btv1b52507760w.highres Expérience du Vaisseau Volant de Monr. Blanchard. Enlevé au Champ de Mars près Paris le 2. Mars 1784. entre Midi et 2 Heures : Sic itur ad astra : [estampe] ([1er état]) / Desrais del. ; Denis sculp. /ark:/12148/btv1b85092580.highres
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