Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1885-04-23
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 23 avril 1885 23 avril 1885
Description : 1885/04/23 (A15,N4856). 1885/04/23 (A15,N4856).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
Quinzième année. — N° 4856
Prix du numéro à Paris : 15 centimes — Départements : 20 centimes
Jeudi 23 Avril 1885
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JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
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Egyptienne. 310, 308 75.
Hongrois. 76 11/16.
BULLETIN
Lé conflit anglo-russe est revenu à l'état
aigu. Des renseignements pessimistes sont
donnés par la plupart des journaux, et
l'émotion est vive à Londres. On assure
que le gouvernement russe aurait répondu
à la demande d'enquête par un refus.
Cette enquête, portant sur la conduite d'un
de ses généraux, paraîtrait à la Russie in-
compatible avec son honneur militaire.
Le rapport du général de Lumsden que
nous citons plus loin contredit, point par
point, le rapport du général Komaroff.
J}es nouvelles reçues de Saint-Pétersbourg
annoncent que le parti de la guerre, à la
tête duquel se trouvent les grands-ducs, a
regagné le terrain qu'il avait perdu ces jours
derniers, et que M. de Giers serait im-
puissant à lutter contre lui et contre la
pression de l'opinion publique. A cette
heure, le plus léger incident peut amener
4a rupture des négociations. La Russie
continue à faire d'immenses préparatifs
militaires.
Voici où en est l'affaire du Bosphore :
- Une dépêche de M. Saint-René Taillan-
dier, consul de France au Caire, a informé
le ministre des affaires étrangères que
Nubar-Pacha a fait une réponse évasive
aux réclamations du gouvernement fran-
çais.
M. de Freycinet a répondu à cette dé-
pêche hier, en donnant à notre consul
l'ordre de s'opposer à ce que le gouverne-
ment égyptien ait recours à des moyens
dilatoires..
On mande du Caire que la colonie étran-
gère est très émue de l'incident et loue
hautement le gouvernement français d'a-
voir rappelé l'administration égyptienne
au respect des capitulations. Les notables
de la colonie française doivent se rendre
auprès des députés de la nation, afin de
faire ressortir l'urgence d'une prompte so-
lution de la question.
A la Chambre des représentants belges,
M. Beernaert, premier ministre, a donné
° lecture hier d'une lettre du roi dans la-
quelle celui-ci demande l'autorisation de
prendre le titre de souverain de l'Etat du
Congo. La lettre explique que le nouvel
Etat sera tout à fait indépendant, qu'il n'y
aura qu'un lien personnel entre les deux
Etats, et, enfin, que la Belgique n'en sup-
portera ni les charges financières ni les
charges militaires.
M. Beernaert a dit que le cabinet pro-
pose d'autoriser le roi à prendre le titre de
souverain du Congo, en se basant sur l'ar-
ticle 62 de la Constitution.
La Chambre a renvoyé ces propositions
h l'examen des sections.
Nous avons déjà eu l'occasion de faire
outes nos réserves sur ces propositions,
en ce qui concerne les droits acquis de la
France.
A la suite de l'échec qu'il vient de subir
aux élections, le ministère a envoyé sa
démission au roi, qui reviendra demain de
Corfou où il devait rester jusqu'à la réu-
nion de la Chambre.
—————.—— -———————
Voici le texte du rapport du général
Lumsden sur les événements de la fin de
mars en Afghanistan :
Tirpul, 17 avril 1885.
En réponse à la dépêche télégraphique de
Votre Seigneurie du 13 avril, j'informe que le
rapport du général Komaroff, concernant son
attaque sur Pendjeh est inexact.
1° Le général Komaroff dit : « Le 25 mars
un détachement s'approcha de Tash-Kepri sur
notre rive du Ruoschk. »
Réponse : « Les prétentions du général Ko-
maroff sur les deux rives du Kouschk ne sont
pas soutenables. La rive gauche de cette ri-
vière a toujours été tenue par les Afghans et
les Russes ne l'ont jamais occupée. Le 20 fé-
vrier, les Russes établirent un avant-poste de
vingt-cinq Yulatan-Turcomans à Zizil-Tepe,
qui se trouve à une mille au nord du Pul-i-
Khisti et à la même distance du point le plus
proche de la rivière Kouschk et de sa jonction
avec le Murghab. Cela a toujours été la li-
mite extrême de l'avance des Russes au delà
de la ligne de leurs vedettes. Un détache-
ment de cavalerie russe tenta de s'avancer
vers Pul-i-Khisti le 25 mars, mais il se retira
avant d'avoir atteint cette place à la suite
d'un avis du commandant afghan, ainsi que
cela avait déjà eu lieu le 20 février. »
2° Le général Komaroff dit : « Près du pont,
je trouvai un retranchement occupé par les
Afghans. » Réponse : « Cette position avait
été occupée par les Afghans avant la marche
en avant du général Komaroff et avant même
la conclusion de l'arrangement du 17 mars. »
30 Le général Komaroff dit : « Afin d'éviter
un conflit, je fis prendre position à mes trou-
pes à cinq verstes de la position des Afghans.»
Réponse : « Cela ne peut avoir rapport qu'au
gros des troupes, car des détachements rus-
ses se trouvaient à Kizil-Tepe qui n'était qu'à
un mille de la position afghane, et les vedet-
tes russes étaient postées plus près encore. »
40 Le général Komaroff dit : « Lorsque les
Afghans eurent la conviction que nous n'a-
vions pas l'intention de les attaquer, ils com-
mencèrent à se rapprocher de plus en plus
de notre camp. » Réponse : « Les Afghans
étaient loin d'être convaincus des intentions
pacifiques du général Komaroff; au contraire,
les efforts incessants et irritants qui tendaient
à provoquer des hostilités finirent par con-
vaincre les Afghans de la détermination des
Russes à provoquer un conflit, et cela les
amena, à titre de nécessité militaire, à don-
ner à leur position défensive une plus grande
étendue. »
50 Le général Komarof dit : « Le 27 mars,
les Afghans, voyant une compagnie russe qui
faisait une reconnaissance, envoyèrent con-
tre elle trois compagnies, avec de la cavale-
rie et une pièce de canon. » Réponse : « Une
reconnaissance en force implique par elle-
même des intentions hostiles. Une compa-
gnie russe compte 250 hommes, c'est-à-dire
plus que trois compagnies afghanes, qui ne
forment qu'un effectif de 225 hommes. Le 27
mars, on vit s'avancer simultanément deux
détachements russes. Le colonel Alikhanoé,
avec de la cavalerie, poussa au delà de Pul-
i-Khisti, et un détachement d'infanterie se
dirigea sur le flanc droit de la position af-
ghane, sur la rive droite du Mourghab.
» Le colonel Alikhanof ne se retira que
lorsqu'il y fut obligé par un mouvement tour-
nant de la cavalerie afghane, à quatre milles
environ de la position des Afghans, et l'infan-
terie russe ne battit en retraite qu'après que
le commandant afghan eut déployé trois
compagnies et eut prévenu l'officier russe
qu'il allait faire feu si les Russes s'avançaient
encore. Le chef de l'état-major du général
Komaroff, au cours d'une entrevue qui a eu
lieu le 28, dit que l'avance du colonel Alikha-
nof était simplement une partie de plaisir,
mais que le commandant afghan l'avait con-
sidérée comme un mouvement sérieux. »
6° Le général Komaroff dit : « L'audace et
l. 'arrogance des Afghans croissaient par de-
grés. » Réponse : « Cela se peut, mais, s'il en
est ainsi la faute en est tout eutière à la ma-
nière d'agir des Russes, car les Afghans fai-
saient tout leur possible pour éviter la colli-
sion, et c'est seulement grâce à leur patience
et à leur tolérance pendant deux mois de pro-
vocations continuelles que la paix a pu etre
conservée si longtemps. La réponse courtoise
du commandant afghan à l'ultimatum du 29
du général Komaroff prouve combien il dési-
rait éviter le conflit. »
7° Le général Komaroff dit : « Le 28, les
Afghans commandaient la gauche de notre
camp, et ils commencèrent à construire des
retranchements, à établir un poste de cava-
lerie derrière notre ligne, et placèrent un pi-
quet à une portée de canon de notre rive. »
Réponse : « 11 est vrai que le commandant af-
ghan, le 28, après la reconnaissance ennemie
du 27, fit placer un poste d'observation sur
les collines de la rive droite du Murghab,
pour le renseigner sur les mouvements des
Russes de ce côté ; mais ce poste fut retiré le
lendemain. »
8° Le général Komaroff dit : « Le 29, j'en-
voyai au commandant afghan une énergique
sommation, et je reçus pour réponse que,
d'après l'avis des Anglais, il refusait de se
retirer sur le Kousehk. » Réponse : « On me
rapporte que le fait en lui-meme est complè-
tement inexact, et il n'y a nullement eu une
telle déclaration dans la réponse du com-
mandant afghan. Au contraire, il s'exprimait
ainsi :
« J'ai dûment reçu votre lettre concer-
nant le retrait de certains piquets. Comme
j'avais reçu du gouverneur de Hérat des or-
dres m'enjoignant de consulter le capitaine
Yate, qui a été envoyé à Pendjeh par sir Pe-
ters Lumsden à ce sujet, je lui ai communi-
qué votre lettre. Le capitaine Yate a eu en-
suite une entrevue avec le colonel Zàkz-
chewski et m'a informé de la conversation
qu'il avait eue avec lui. Sachez que je dois
loyalement obéir aux ordres que j'ai reçus de
Sa Hautesse l'émir. Je ne puis rien faire con-
trairement à la volonté de mon souverain.
Bref, pour les questions de détail telles que
les changements de position ou la marche
en avant des vedettes ou des piquets placés
sur le front des troupes, je suis prêt à entrer
en arrangement avec vous en vue d'éviter
tout risque de conflit. »
9e Le général Komaroff dit : « J'adressai de
nouveau une lettre particulière conçue en
termes amicaux. » Réponse : « La lettre en
question n'a jamais été vue par aucun offi-
cier de la commission, mais le capitaine De-
lashoe dit qu'une lettre fut reçue quelques
heures avant l'attaque du 30. J'ai invité Sepeh
Salar à me donner une copie de cette seconde
lettre. »
10° Enfin le général Komaroff dit : « Le 30,
pour appuyer nos demandes, je marchai avec
mon detachement contre les positions afgha-
nes, comptant toujours sur une solution pa-
cifique ; mais le feu de l'artillerie et l'atta-
que de la cavalerie m'obligèrent à accepter
le combat. » Réponse : « Les Russes avan-
cèrent pour attaquer les positions afghanes,
et ce furent les Afghans eux-mêmes qui fu-
rent forcés de se défendre. Le feu a été ou-
vert par le général Komaroff, et le feu de
l'infanterie a été entendu plusieurs minutes
avant le premier coup de canon. »
QUESTION DU JOUR
Le préfet de police
Depuis la formation du nouveau ca-
binet, le bruit avait couru plusieurs
fois que l'honorable M. Camescasse,
député du Finistère et préfet de police,
avait donné sa démission de préfet.
Nous avions refusé d'enregistrer cette
nouvelle que nous savions pertinem-
ment, jusqu'à la date d'avant-hier, être
inexacte. Mais aujourd'hui le départ de
M. Camescasse est certain.
La retraite du préfet laissera certaine-
ment des regrets à tous ceux qui,
sans se soucier des combinaisons poli-
ticiennes, tenaient avant tout à savoir
que le soin de la sûreté de la ville de
Paris, et celui de mille intérêts divers et
délicats, était confié aux mains d'un
tonnête, expérimenté, modéré et ferme.
Mais ce que je veux faire ici, ce n'est
pas rendre hommage à la personne d'un
administrateur estimé : c'est étudier et
apprécier un acte politique qui me pa-
raît extrêmement important.
M. Camescasse n'a pas offert sa dé-
mission. Rien dans le programme du
nouveau ministère ne lui paraissait in-
compatible avec le mandat qui lui a été
confié il y a quatre ans. Rien dans ses
rapports personnels avec les membres
du nouveau cabinet n'exigeait vson dé-
part. Je sais bien que la loi sur les in-
compatibilités pouvait l'atteindre, mais il
est bien évident que si M. Camescasse
eût choisi à son gré l'heure de sa retraite,
il eût attendu au moins, pour reprendre i
sa liberté, l'ouverture de la période élec-
torale.
De cette façon, le gouvernement eût
en plus de loisir pour lui trouver un suc-
cesseur, ce qui n'est pas aisé, et le pré-
fet de police aurait pu officiellement ap-
porter son concours à la confection de
lois préparées de longue main par son
administration, notamment la loi sur les
récidivistes.
Les membres les plus importants du
cabinet n'avaient de leur côté aucun
désir personnel de se séparer de M. Ca-
xïic^casse. M. Brisson l'avait connu et
apprécié dans son département comme
prefet; il avait été le collaborateur de
M. de Freycinet et de M. Goblet; et M.
Allain-Targé ne saurait en vouloir à un
fonctionnaire d'avoir servi sous la direc-
tion de Gambetta.
On peut donc dire de la séparation
entre le nouveau ministère et le préfet
de police ce que Tacite a si joliment dit
de la rupture entre Titus et Bérénice :
lnvitus invitam dimisit. Mais quand
l'empereur renvoya malgré lui reine qui
voulait rester, tout le monde comprit la
haute raison d'Etat qui exigeait ce dou-
ble et réciproque sacrifice.
Ce qui est intéressant à discerner au-
jourd'hui, c'est la raison d'Etat ou autre
qui a pu contraindre le cabinet à de-
mander sa démission à M. Camescasse.
Là-dessus il faut consulter les jour-
naux radicaux et intransigeants, qui
nous répondent avec une triomphante
netteté :
M. Camescasse est sacrifié :
1° Aux exigences des coalisés qui
ont renversé le ministère et qui ne
veulent pas supporter dans les hauts
postes administratifs les anciens colla-
borateurs du cabinet Ferry ;
2° Aux exigences des conseillers mu-
nicipaux et des radicaux qui faisaient
métier de détester en M. Camescasse un
préfet qui ne se pliait pas à leurs fan-
taisies.
A moins que par impossible ces rai-
sons ne soient pas celles du départ de
M. le préfet de police, ce départ nous
paraîtrait un acte d'inqualifiable fai-
blesse de la part du gouvernement.
Le programme du ministère, à la lec-
ture duquel nous nous sommes décidés
à le soutenir, est un programme d'union,
de concorde, « de libre concentration
des forces républicaines ». Sacrifier un
fonctionnaire républicain uniquement
parce qu'il appartient à tel ou tel groupe
parlementaire, c'est déjà mentir à ce
programme dont la stricte exécution est
la seule raison d'existence d'un cabinet
qui, s'il n'est pas sincèrement un cabi-
net de oonciliation, peut et doit être mis
en minorité au premier instant.
Que si ce n'est pas le collaborateur
de M. Ferry qu'on atteint en M. Cames-
casse, mais bien le fonctionnaire qui a
su défendre les droits de l'Etat contre
le petit Parlement de l'Hôtel de Ville,
c'est avec plus de sévérité encore que
nous blâmerions le cabinet.
Il est tenu, je le veux bien, par sa
composition même, à une politique d'é-
quilibre. Mais cette politique ne peut
consister en autre chose qu'à consti-
tuer une majorité avec tout le parti
républicain gouvernemental et à lutter
à la fois avec la même énergie et la
même sincérité contre la Droite et les
intransigeants.
Le système des compensations du
bonhomme Azaïs est un aimable jeu de
philosophe, mais un tour de gobelet dé-
plorable en politique, s'il consiste sim-
plement à escamoter Camescasse pour
faire passer Cavaignac !
Le ministère compte dans ses rangs
trois ou quatre hommes qui ont été à
l'Union démocratique en venant du
Centre gauche. Il serait tout à fait sin-
gulier qu'il tombât tout justement du
côté où il ne paraissait pas devoir pen-
cher et que des républicains très con-
servateurs, plus conservateurs que nous-
mêmes, ne soient arrivés au pouvoir
que pour baisser pavillon devant les in-
transigeants et les radicaux !
Ceci dit, reste à savoir ce qui va arri-
ver de la préfecture de police.
Le choix du successeur de M. Cames-
casse a plus de portée qu'un simple
changement de personne.
Ce n'est pas un grand mystère que le
désir du conseil municipal est de réduire
à rien les attributions et le rôle du pré-
fet de police. Le conseil voudrait voir
attribuer à la préfecture de la Seine
une partie des services de la préfecture
de police, donner ensuite les trois quarts
de ce qui en resterait au chef de la
police municipale rendu indépendant
du préfet et déjà l'homme du futur
maire de Paris, et laisser enfin vivoter
le préfet de police dans les obscurs
honneurs du commandement de la lé-
gion des municipaux. Décentraliser et
communaliser la police, voilà le but
poursuivi et nous saurons,selon le choix
qu'on fera du successeur de M. Cames-
casse, si le cabinet bigarré qui préside
à nos destinées entend entraver les pro-
jets du conseil municipal et des intran-
sigeants," ou laisser faire et nous con-
duire de concession en concession à
cette concession dernière dont parlait
une jolie caricature sur le maréchal
de Mac-Mahon.
Le préfet de police doit être un hom-
me énergique avec des formes conci-
liantes, d'une grande netteté de vues
sans aucune étroitesse d'esprit, ayant
plus de scrupules que de préjugés, ré-
solu à n'empiéter jamais sur aucune
administration, mais à n' abandonner
rien des droits de l'Etat, étranger aux
intrigues des partis, sans ambition par-
lementaire , inflexible, et sûr vis-à-
vis de son personnel, Parisien jusqu'au
bout des ongles, aimant la police pour
elle-même, et j'oserai dire : au moins
aussi artiste que magistrat.
Je pense que l'honorable M. Gragnon,
que nous avons connu dans la presse
quand il était rédacteur du Soir, réunit
la plupart de ces mérites, puisqu'on le
désigne comme le successeur de M. Ca-
mescasse. S'il lui en manquait quel-
ques-uns, le cabinet n'hésiterait pas
sans doute à chercher un préfet de po-
lice même en dehors des fonctionnaires
du quai des Orfèvres. Car en nommant
à la direction générale des douanes M.
Pallain, le ministère a prouvé qu'il savait
user du choix sans tenir trop de compte
des règles étroites de la hiérarchie.
HENRY FouQulEn.
L'élection, à Chartres, d'un conseiller géné-
ral réactionnaire est exploitée en ce moment
par nos adversaires. Ce triomphe bruyant ap-
pelle quelques observations.
En réalité, le ballottage d'Eure-et-Loir a été
moins contre nous en fait qu'en apparence.
Les suffrages républicains accordés à deux
candidats formaient un total de 1,884 voix
contre 1,275 pour le représentant de l'opposi-
tion.Au second tour, celui-ci a gagné 389 voix,
et M. Alleaume, restant le seul républicain,
en a perdu 511 sur le vote collectif précédent,
tout en dépassant encore de près de 100 voix
le chiffre acquis à l'origine par son concur-
rent.
Ce n'est là qu'une surprise, et qui ne doit
pas nous contrister. Cependant on en peut
tirer une leçon pour l'avenir. Il est évident
que la conquête des 385 voix réactionnaires
correspond à un effort considérable, à une
propagande effrénée. -, , - - -
Parce qu'elle sera cent etcant fois réparée,
nous n'en devons pas moins faire sentir à nos
amis politiques l'erreur commise en cette
circonstance. Quand l'accord devait être
complet sur un programme général, accep-
table par tous, des compétitions se sont
produites et l'insuccès final est survenu.
La politique du tout ou rien a de ces à-coups.
Il est bon de les prévoir, meilleur de les évi-
ter.
Le moyen pour les républicains, séparés
seulement par des nuances théoriques, de
ne pas avoir à regretter de semblables ac-
cidents, serait de renoncer à des polémiques
purement personnelles, qui rendent impossi-
ble un rapprochement à l'heure où il devient
cependant nécessaire.
En fait de désidérata politique, il faut sa-
voir se contenter à temps d un minimum,
pour ne pas risquer de voir, comme cette fois,
ce minimum lui-même s'échapper par la tan.
gente !
E. R.
M. ALI MARGAROT
Maire de Mimes
M. Ali Margarot, dont les journaux de
Paris ont à peine annoncé la mort et que
ses compatriotes désolés accompagnaient
ce matin à sa dernière demeure, était le
premier maire républicain de sa bonne
ville.
Elle est, cette bonne ville, une ville
unique, férocement divisée, avec, dans
toutes les mémoires, le souvenir sanglant
des vieilles guerres de religion. A Nîmes,
il n'y a ni républicains, ni réactionnaires,
mais des « protestants » et des « catholi-
ques », et cet abîme creusé entre les habi-
tants n'est pas seulement moral; des quar-
tiers sont carlistes et des quartiers radi-
caux ; on dit d'un citoyen qu'il est « de ,
l'enclos Rey » ou « de la Placette », sui-
vant qu'il attend avec impatience la restau-
ration des Bourbons ou qu'il marque un
profond mépris pour la « légitimité ».
Toujours, jusqu'à ces dernières années,
les « catholiques » — pour parler fa lan-
gue de là-bas — avaient eu la majorité au
conseil municipal. Les élections de 1881
déplacèrent cette majorité, et c'est alors
que M. Ali Margarot prit en main le gou-
vernement de la cité.
Il fallait tout bouleverser et tout remet-
tre en ordre: construire un lycée, des éco-
les, un marché, une caisse d'épargne, un
musée ; réorganiser l'administration ; re-
Feuilleton du XIXc SIÈCLE
Du 23 Avril 1885
Chronique Scientifique
i
LE MONDE DES FRAUDEURS
Buffeteurs, brouilleurs et fardeurs
Le bon vinaigre d'Orléans
Au laboratoire municipal
Règlements et loi
Colique sèche des pays chauds
Salycilage
M. Charles Girard vient de publier en un
gros volume, que M. Masson a édité, un
« rapport sur les falsifications des matières
alimentaires et sur les travaux du labora-
toire municipal » qui est adressé au pré-
fet de police, — mais que tous les Pari-
siens devraient lire pour se convaincre de
l'impudence des falsificateurs et de la né-
cessité d'une surveillance active et per-
manente.
« Il y a, — disait un jour M. Léon Say à
propos de la situation financière de notre
pays, — il y a en France un monde des
fraudeurs. M. Disraëli contait dans son
dernier roman que, lorsque les députés
jouissaient de la franchise postale, c était
élégant et comme il faut de faire partie du
monde de la franchise. Le monde de la
franchise était alors le monde influent.
Du train où vont ici les choses, il sera bien-
tôt très bien porté de faire partie du
monde des fraudeurs (1). »
Ce monde des fraudeurs — organisé,
discipliné, ingénieux et redoutable, qui
vole l'Etat, empoisonne le consommateur
et déshonore les transactions avec une
parfaite insouciance des résultats — est,
chez nous, un vieux monde : les Romains
le connaissaient déjà : Aloes mercantur
qull saporem coloremque adultérant, dit
Pline en parlant des Marseillais qui em-
(1) La Politique financière de la Frçtaçç. fourmi
des Economistes, 1882. -
ployaient l'aloès pour rehausser la couleur
de leurs vins anémiques. Procédé naïf, que
les sophistes, les buffeteurs, les brouil-
leurs, les fardeurs et les falsificateurs ont
singulièrement perfectionné à travers les
âges !
Nous sommes loin du temps où Guil-
laume Bouchet, sieur du Brocourt, qui
fut juge-consul des marchands de Poi-
tiers, contait que les drôles qui « gas-
tent ce que Dieu a faict, non seulement
marient le puys à la cave, mais en-
core y mettent des choses qui nuisent
grandement à notre santé, comme de l'e-
ruca, du soufre, de l'eau de mer cuite,
de la résine, du miel, du lait de va-
che, de la chaux. » Nos chimistes mo-
dernes ont renoncé à l'eau de mer cuite, à
la résine et à l'eruca; ils ont encore aban-
donné le miel et le lait de vache, beaucoup
trop coûteux à leur gré ; mais ils ont con-
servé le soufre et le plâtre, auxquels ils
ont ajouté le bois de Campêche, la rose
trémière, la chochenille, l'orseille, le sureau
et surtout les produits dérivés du gou-
dron de houille, ces admirables cou-
leurs d'aniline, si puissamment colorantes
qu'une infinitésimale parcelle de fuchisne
suffit à rougir cent litres d'eau.
Le malheur est — pour les voleurs —
que notre loi n'admet pas de tromperie
sur la qualité de la marchandise vendue
et que les fabricants qui tentent de faire pas-
ser pour du petit bourgogne un simple
mélange de carmin de piquette et d'eau,
sont justement passibles de poursuites ju-
diciaires.
Mais un expert est nécessaire, placé
entre celui qui vend et celui qui achè-
te, pour signaler les contrevenants à
la sévérité de la justice. C'est ce qu'avaient
fort bien compris les conseillers munici-
paux de Paris quand, en 1876, M. Dumas
leur soumit le plan d'organisation d'un
bureau d'essai où le-premier citoyen venu
aurait le droit de faire contrôler la qualité
de son vin, de son huile et de son café.
Car, il est bon qu'on le sache, le labora-
toire municipal, que quelques-uns de nos
édiles semblent s'ingénier à tracasser, a
été librement édifié, sur les sollicitations
pressantes et motivées d'un grand nombre
d'électeurs, par le conseil municipal lui-
même.
x
La proposition de M. Dumas fut reprise
et complétée le 22 février 1877 nar M. De-
lattre qui invita le préfet de police « à pré-
senter au conseil un mémoire sur l'utilité
et la possibilité de créer un laboratoire
municipal de chimie où les commerçants
pourraient faire analyser les denrées ali-
mentaires et les boissons moyennant un
tarif préalablement convenu ». Le préfet
de police était alors M. Voisin ; il s'em-
pressa de mettre à l'étude cette impor-
tante question et déposa, le 28 mars 1878,
un rapport dans lequel il concluait à la
fondation d'un laboratoire public. Le con-
seil ne partageapas complètement son avis
et décida que le futur laboratoire ne serait
ouvert qu'à l'administration seule. Il com-
mença à fonctionner sur ces bases au mois
d'octobre de la même année.
On reconnut vite que cette institution
ne rendrait les services qu'on était en
droit d'en attendre que quand on l'aurait
mise à la portée de tous. Aussi, dès le
20 mars 1880, MM. Darlot, Marsoulan,
Masse et Sick proposèrent-ils au conseil
de modifier l'organisation primitive. Nou-
velle discussion, nouveau rapporteur et
nouveau rapport à la suite duquel le
conseil revint, sans trop de grimaces, sur
sa délibération ancienne ; l'ouverture au
public du Laboratoire municipal était
enfin votée.
Aussitôt les clients affluèrent. Tel petit
employé apportait son vin, telle ménagère
son beurre, tel cabaretier son café. Chacun
voulait être renseigné sur la probité com-
merciale des débitants de son quartier et
moi-même je fus bientôt amené à faire
comme tout le monde. J'avais cru remar-
quer que le vinaigre dont on se servait à
ma table m'irritait singulièrement la
gorge et m'occasionnait une inflammation
assez vive des. muqueuses de la bouche.
Je m'enquis de l'adresse de l'honorable
négociant qui me fournissait ce produit
et je me présentai dans sa boutique.
J'eus le bonheur de le rencontrer et de
l'entretenir personnellement.
- Monsieur, lui dis-je, je loge à deux
pas d'ici et ma cuisinière achète dans votre
magasin le vinaigre dont on garnit ma
salade. Pourrais-je savoir comment vous
le fabriquez ?
- Monsieur, me répondit-il, mon vi-
naigre est le meilleur des. vinaigres; c'est
du vinaigre blanc.
Je savais que ce vinaigre était blanc,
favais pu m'en assurer sans difficulté; le
but de ma visite n'était pas d'être rensei-
gné sur sa couleur. J'insistai donc.
— Et comment fabriquez-vous ce vinai-
gre blanc, cet excellent vinaigre?
— Monsieur, me dit majestueusement
l'épicier, je ne le fabrique point. Je l'a-
chète à Orléans; c'est du vinaigre d'Or-
léans.
— Mais je croyais, repris-je un peu bon-
nement, qu'on donnait le nom de vinaigre
d'Orléans à du vinaigre de vin; j'entends
à du vin aigri, naturel et sans addition
d'acides ou de condiments.
— Eh oui ! monsieur, conclut mon in-
dustriel ; c'est précisément ce vinaigre que
j'ai l'honneur de vous vendre; vinaigre
naturel et pur, vinaigre blanc d'Orléans.
* Les calmes assertions de mon voisin
m'eussent sans doute convaincu si je n'a-
vais eu qu'un simple soupçon sur l'insalu-
brité de son vinaigre, mais il fallait une
explication à la fréquence de mes stoma-
tites, et je résolus de l'aller chercher au
laboratoire.
Je pris un beau matin quelques centili-
tres de ce vinaigre et l'emportai à la pré-
fecture de police où j'eus quelque peine à
découvrir le laboratoire au fond de la cour
de la caserne, dans un ancien corps de
garde de cavalerie. Un employé fort cour-
tois me reçut qui voulut bien m'appren-
dre d'abord que j'aurais pu m'éviter l'en-
nui de descendre jusqu'à la Cité, en dépo-
sant simplement mon flacon chez le com-
missaire de mon quartier ; il paraît, en ef-
fet, que les voitures cellulaires ramassent
chaque matin les échantillons en même
temps que les pochards, les maraudeurs,
les voleurs et les filles pour le Dépôt. Puis
il s'euquit de mon nom et de mon adresse,
du nom et de l'adresse de mon fournis-
seur, du prix de mon vinaigre, et me fit
signer une fiche en carton blanc sur
laquelle il avait rapidement écrit ces di-
vers renseignements; il me délivra en-
core un reçu portant, avec le numéro d'or-
dre reproduit sur la fiche, la date fixée
pour la livraison de l'analyse. Au jour dit,
je fus exact et reçus des mains du même
employé une note mi-partie imprimée,
mi-partie manuscrite et ainsi conçue :
LABORATOIRE MUNICIPAL DE CHIMIE
&NAI
Le chef du laboratoire municipal certifie
que l'échantillon déposé sous le nO. par
M. V. du Claux est MAUVAIS NUISIBLE.
Le chef du laboratoire municipal,
CH. GIRARD.
Toute personne qui usera du présent bulletin
pour nuire à la réputation d'autrui commettra le
délit de diffamation.
Mauvais nuisible ! mauvais nuisible !
Je n'étais pas beaucoup plus renseigné
qu'avant l'analyse, ma secrète curiosité
étant de savoir pourquoi mon vinaigre était
mauvais et comment il était nuisible.
L'employé auquel je confiai mon souci
m'apprit que,moyennant une petite somme
qu'il me fixa, le laboratoire pourrait me
fournir ces documents complets et précis.
Je dus rapporter une fiole de vinaigre, re-
donner les indications que j'avais données
pour l'analyse gratuite, verser dix francs
et apposer ma signature sur une fiche de
carton rose. J'appris ainsi que mon vinai-
gre, mon bon vinaigre d'Orléans, était fa-
briqué de toutes pièces avec quelques in-
grédients, parmi lesquels je distinguai sur-
tout l'acide sulfurique , la moutarde et le
piment.
Dès lors l'utilité du laboratoire me pa-
rut indiscutablement démontrée.
X
Et voulez-vous savoir comment fonc-
tionnent ceux des rouages de cette grande
machine que le public ne voit pas ? -
Aussitôt qu'un échantillon suspect a
été déposé au bureau, la fiche (blanche ou
rose, suivant que l'analyse doit être qua-
litative ou quantitative, gratuite on payée)
est divisée en deux fragments : l'un de
ces fragments, qui porte les noms du
vendeur et du déposant, reste dans les
registres de la comptabilitÓ: J'autre, qui
ne porte qu'un numéro d'ordre, est rivé à
l'échantillon et transmis à l'expert. Celui-
ci analyse donc un produit dont il igno-e
la provenance, et la bonne foi. dp son ex-
pertise ne peut en aucun cas être mise
en doute. Si le produit examiné n'est pas
falsifié, on se borne pour toute formalité à
transcrire le détail des résultats obtenus
sur le livre à souche, dont on .- détache le
bulletin d'analyse. Mais si l'on découvre
quelque fraude" le chef du Laboratoire dé-
pêche aussitôtcleiu inspecteurs à l'adresse
indiquée du négociant. -
Ces inspecteurs (au nombre de 45) sont
! des médecins, des pharmaciens, ou tout
au moins des étudiants à seize inscrip-
tions en médecine et en pharmacie, qui
ont passé, pour obtenir leur emploi, un
examen spécial de chimie. Tous sont,
en outre, régulièrement .nommés com-
missaires de police et peuvent empor-
ter dans leur poche, à côté de leur
trousse de chimiste, l'écharpe tricolo-
re, qui leur permettrait au besoin d'im-
poser leur visite aux négociants récalci-
trants et de requérir les agents de la force
publique.
Mais ils n'ont jamais besoin d'en venir
à ces extrémités. Quand ils se présentent
- toujours au nombre de deux - pour
opérer un prélèvement, on leur donne en
général sans discussion les échantillons
qu'ils réclament. De ces échantillons, ils
font deux parts égales qu'ils cachètent et
signent, sous les yeux du propriétaire,
qui, lui-même, signe après eux sur le scel.
Partout ils tentent, séance tenante, un ra-
pide essai préliminaire, puis ils dressent
un procès-verbal, en ayant soin d'y faire
figurer toutes les indications ou réclama-
tions du négociant.
L'un des deux échantillons saisis est
analysé au Laboratoire, l'autre est con-
servé pour être transmis au parquet, s'il
y a lieu. Le chef du Laboratoire n'a, en
effet, aucune action judiciaire : il se borne
à signaler au parquet les fraudes qui lui
paraissent devoir être poursuivies. Mais
le parquet, sauf en cas d'aveu, fait pro-
céder d'abord à une contre-expertise et
« classe » l'affaire toutes les fois que la
nouvelle analyse diffère en quoi que ce
soit d'essentiel de l'analyse du Laboratoire.
11 est par suite impossible qu'un honnête
négociant soit la victime d'une erreur ou
d'une calomnie. Quant à ceux qui s'enri-
chissent aux dépens de notre santé, tant
mieux si le Laboratoire les gêne! Je trouve
nos loi- beaucoup trop douces à leur en-
droit.
X
Jadis OR él ait autrement sévère contre
tous les marchands « d'adultère beuverie»;
tandis qu'au parlement de Paris le con-
seiller Le May demandait la mort d'un ca-
baretier, un évêque en excommuniait un
autre au concile de Rome. L'histoire est
pleine de ces exemples.
Bullon, dans son Dictionnaire, rapporf.e
un arrêt qui condamne les charretiers
buffeteurs de vin « à faire amende hon
Prix du numéro à Paris : 15 centimes — Départements : 20 centimes
Jeudi 23 Avril 1885
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Extérieure. 57 5/16, 3/16.
Egyptienne. 310, 308 75.
Hongrois. 76 11/16.
BULLETIN
Lé conflit anglo-russe est revenu à l'état
aigu. Des renseignements pessimistes sont
donnés par la plupart des journaux, et
l'émotion est vive à Londres. On assure
que le gouvernement russe aurait répondu
à la demande d'enquête par un refus.
Cette enquête, portant sur la conduite d'un
de ses généraux, paraîtrait à la Russie in-
compatible avec son honneur militaire.
Le rapport du général de Lumsden que
nous citons plus loin contredit, point par
point, le rapport du général Komaroff.
J}es nouvelles reçues de Saint-Pétersbourg
annoncent que le parti de la guerre, à la
tête duquel se trouvent les grands-ducs, a
regagné le terrain qu'il avait perdu ces jours
derniers, et que M. de Giers serait im-
puissant à lutter contre lui et contre la
pression de l'opinion publique. A cette
heure, le plus léger incident peut amener
4a rupture des négociations. La Russie
continue à faire d'immenses préparatifs
militaires.
Voici où en est l'affaire du Bosphore :
- Une dépêche de M. Saint-René Taillan-
dier, consul de France au Caire, a informé
le ministre des affaires étrangères que
Nubar-Pacha a fait une réponse évasive
aux réclamations du gouvernement fran-
çais.
M. de Freycinet a répondu à cette dé-
pêche hier, en donnant à notre consul
l'ordre de s'opposer à ce que le gouverne-
ment égyptien ait recours à des moyens
dilatoires..
On mande du Caire que la colonie étran-
gère est très émue de l'incident et loue
hautement le gouvernement français d'a-
voir rappelé l'administration égyptienne
au respect des capitulations. Les notables
de la colonie française doivent se rendre
auprès des députés de la nation, afin de
faire ressortir l'urgence d'une prompte so-
lution de la question.
A la Chambre des représentants belges,
M. Beernaert, premier ministre, a donné
° lecture hier d'une lettre du roi dans la-
quelle celui-ci demande l'autorisation de
prendre le titre de souverain de l'Etat du
Congo. La lettre explique que le nouvel
Etat sera tout à fait indépendant, qu'il n'y
aura qu'un lien personnel entre les deux
Etats, et, enfin, que la Belgique n'en sup-
portera ni les charges financières ni les
charges militaires.
M. Beernaert a dit que le cabinet pro-
pose d'autoriser le roi à prendre le titre de
souverain du Congo, en se basant sur l'ar-
ticle 62 de la Constitution.
La Chambre a renvoyé ces propositions
h l'examen des sections.
Nous avons déjà eu l'occasion de faire
outes nos réserves sur ces propositions,
en ce qui concerne les droits acquis de la
France.
A la suite de l'échec qu'il vient de subir
aux élections, le ministère a envoyé sa
démission au roi, qui reviendra demain de
Corfou où il devait rester jusqu'à la réu-
nion de la Chambre.
—————.—— -———————
Voici le texte du rapport du général
Lumsden sur les événements de la fin de
mars en Afghanistan :
Tirpul, 17 avril 1885.
En réponse à la dépêche télégraphique de
Votre Seigneurie du 13 avril, j'informe que le
rapport du général Komaroff, concernant son
attaque sur Pendjeh est inexact.
1° Le général Komaroff dit : « Le 25 mars
un détachement s'approcha de Tash-Kepri sur
notre rive du Ruoschk. »
Réponse : « Les prétentions du général Ko-
maroff sur les deux rives du Kouschk ne sont
pas soutenables. La rive gauche de cette ri-
vière a toujours été tenue par les Afghans et
les Russes ne l'ont jamais occupée. Le 20 fé-
vrier, les Russes établirent un avant-poste de
vingt-cinq Yulatan-Turcomans à Zizil-Tepe,
qui se trouve à une mille au nord du Pul-i-
Khisti et à la même distance du point le plus
proche de la rivière Kouschk et de sa jonction
avec le Murghab. Cela a toujours été la li-
mite extrême de l'avance des Russes au delà
de la ligne de leurs vedettes. Un détache-
ment de cavalerie russe tenta de s'avancer
vers Pul-i-Khisti le 25 mars, mais il se retira
avant d'avoir atteint cette place à la suite
d'un avis du commandant afghan, ainsi que
cela avait déjà eu lieu le 20 février. »
2° Le général Komaroff dit : « Près du pont,
je trouvai un retranchement occupé par les
Afghans. » Réponse : « Cette position avait
été occupée par les Afghans avant la marche
en avant du général Komaroff et avant même
la conclusion de l'arrangement du 17 mars. »
30 Le général Komaroff dit : « Afin d'éviter
un conflit, je fis prendre position à mes trou-
pes à cinq verstes de la position des Afghans.»
Réponse : « Cela ne peut avoir rapport qu'au
gros des troupes, car des détachements rus-
ses se trouvaient à Kizil-Tepe qui n'était qu'à
un mille de la position afghane, et les vedet-
tes russes étaient postées plus près encore. »
40 Le général Komaroff dit : « Lorsque les
Afghans eurent la conviction que nous n'a-
vions pas l'intention de les attaquer, ils com-
mencèrent à se rapprocher de plus en plus
de notre camp. » Réponse : « Les Afghans
étaient loin d'être convaincus des intentions
pacifiques du général Komaroff; au contraire,
les efforts incessants et irritants qui tendaient
à provoquer des hostilités finirent par con-
vaincre les Afghans de la détermination des
Russes à provoquer un conflit, et cela les
amena, à titre de nécessité militaire, à don-
ner à leur position défensive une plus grande
étendue. »
50 Le général Komarof dit : « Le 27 mars,
les Afghans, voyant une compagnie russe qui
faisait une reconnaissance, envoyèrent con-
tre elle trois compagnies, avec de la cavale-
rie et une pièce de canon. » Réponse : « Une
reconnaissance en force implique par elle-
même des intentions hostiles. Une compa-
gnie russe compte 250 hommes, c'est-à-dire
plus que trois compagnies afghanes, qui ne
forment qu'un effectif de 225 hommes. Le 27
mars, on vit s'avancer simultanément deux
détachements russes. Le colonel Alikhanoé,
avec de la cavalerie, poussa au delà de Pul-
i-Khisti, et un détachement d'infanterie se
dirigea sur le flanc droit de la position af-
ghane, sur la rive droite du Mourghab.
» Le colonel Alikhanof ne se retira que
lorsqu'il y fut obligé par un mouvement tour-
nant de la cavalerie afghane, à quatre milles
environ de la position des Afghans, et l'infan-
terie russe ne battit en retraite qu'après que
le commandant afghan eut déployé trois
compagnies et eut prévenu l'officier russe
qu'il allait faire feu si les Russes s'avançaient
encore. Le chef de l'état-major du général
Komaroff, au cours d'une entrevue qui a eu
lieu le 28, dit que l'avance du colonel Alikha-
nof était simplement une partie de plaisir,
mais que le commandant afghan l'avait con-
sidérée comme un mouvement sérieux. »
6° Le général Komaroff dit : « L'audace et
l. 'arrogance des Afghans croissaient par de-
grés. » Réponse : « Cela se peut, mais, s'il en
est ainsi la faute en est tout eutière à la ma-
nière d'agir des Russes, car les Afghans fai-
saient tout leur possible pour éviter la colli-
sion, et c'est seulement grâce à leur patience
et à leur tolérance pendant deux mois de pro-
vocations continuelles que la paix a pu etre
conservée si longtemps. La réponse courtoise
du commandant afghan à l'ultimatum du 29
du général Komaroff prouve combien il dési-
rait éviter le conflit. »
7° Le général Komaroff dit : « Le 28, les
Afghans commandaient la gauche de notre
camp, et ils commencèrent à construire des
retranchements, à établir un poste de cava-
lerie derrière notre ligne, et placèrent un pi-
quet à une portée de canon de notre rive. »
Réponse : « 11 est vrai que le commandant af-
ghan, le 28, après la reconnaissance ennemie
du 27, fit placer un poste d'observation sur
les collines de la rive droite du Murghab,
pour le renseigner sur les mouvements des
Russes de ce côté ; mais ce poste fut retiré le
lendemain. »
8° Le général Komaroff dit : « Le 29, j'en-
voyai au commandant afghan une énergique
sommation, et je reçus pour réponse que,
d'après l'avis des Anglais, il refusait de se
retirer sur le Kousehk. » Réponse : « On me
rapporte que le fait en lui-meme est complè-
tement inexact, et il n'y a nullement eu une
telle déclaration dans la réponse du com-
mandant afghan. Au contraire, il s'exprimait
ainsi :
« J'ai dûment reçu votre lettre concer-
nant le retrait de certains piquets. Comme
j'avais reçu du gouverneur de Hérat des or-
dres m'enjoignant de consulter le capitaine
Yate, qui a été envoyé à Pendjeh par sir Pe-
ters Lumsden à ce sujet, je lui ai communi-
qué votre lettre. Le capitaine Yate a eu en-
suite une entrevue avec le colonel Zàkz-
chewski et m'a informé de la conversation
qu'il avait eue avec lui. Sachez que je dois
loyalement obéir aux ordres que j'ai reçus de
Sa Hautesse l'émir. Je ne puis rien faire con-
trairement à la volonté de mon souverain.
Bref, pour les questions de détail telles que
les changements de position ou la marche
en avant des vedettes ou des piquets placés
sur le front des troupes, je suis prêt à entrer
en arrangement avec vous en vue d'éviter
tout risque de conflit. »
9e Le général Komaroff dit : « J'adressai de
nouveau une lettre particulière conçue en
termes amicaux. » Réponse : « La lettre en
question n'a jamais été vue par aucun offi-
cier de la commission, mais le capitaine De-
lashoe dit qu'une lettre fut reçue quelques
heures avant l'attaque du 30. J'ai invité Sepeh
Salar à me donner une copie de cette seconde
lettre. »
10° Enfin le général Komaroff dit : « Le 30,
pour appuyer nos demandes, je marchai avec
mon detachement contre les positions afgha-
nes, comptant toujours sur une solution pa-
cifique ; mais le feu de l'artillerie et l'atta-
que de la cavalerie m'obligèrent à accepter
le combat. » Réponse : « Les Russes avan-
cèrent pour attaquer les positions afghanes,
et ce furent les Afghans eux-mêmes qui fu-
rent forcés de se défendre. Le feu a été ou-
vert par le général Komaroff, et le feu de
l'infanterie a été entendu plusieurs minutes
avant le premier coup de canon. »
QUESTION DU JOUR
Le préfet de police
Depuis la formation du nouveau ca-
binet, le bruit avait couru plusieurs
fois que l'honorable M. Camescasse,
député du Finistère et préfet de police,
avait donné sa démission de préfet.
Nous avions refusé d'enregistrer cette
nouvelle que nous savions pertinem-
ment, jusqu'à la date d'avant-hier, être
inexacte. Mais aujourd'hui le départ de
M. Camescasse est certain.
La retraite du préfet laissera certaine-
ment des regrets à tous ceux qui,
sans se soucier des combinaisons poli-
ticiennes, tenaient avant tout à savoir
que le soin de la sûreté de la ville de
Paris, et celui de mille intérêts divers et
délicats, était confié aux mains d'un
tonnête, expérimenté, modéré et ferme.
Mais ce que je veux faire ici, ce n'est
pas rendre hommage à la personne d'un
administrateur estimé : c'est étudier et
apprécier un acte politique qui me pa-
raît extrêmement important.
M. Camescasse n'a pas offert sa dé-
mission. Rien dans le programme du
nouveau ministère ne lui paraissait in-
compatible avec le mandat qui lui a été
confié il y a quatre ans. Rien dans ses
rapports personnels avec les membres
du nouveau cabinet n'exigeait vson dé-
part. Je sais bien que la loi sur les in-
compatibilités pouvait l'atteindre, mais il
est bien évident que si M. Camescasse
eût choisi à son gré l'heure de sa retraite,
il eût attendu au moins, pour reprendre i
sa liberté, l'ouverture de la période élec-
torale.
De cette façon, le gouvernement eût
en plus de loisir pour lui trouver un suc-
cesseur, ce qui n'est pas aisé, et le pré-
fet de police aurait pu officiellement ap-
porter son concours à la confection de
lois préparées de longue main par son
administration, notamment la loi sur les
récidivistes.
Les membres les plus importants du
cabinet n'avaient de leur côté aucun
désir personnel de se séparer de M. Ca-
xïic^casse. M. Brisson l'avait connu et
apprécié dans son département comme
prefet; il avait été le collaborateur de
M. de Freycinet et de M. Goblet; et M.
Allain-Targé ne saurait en vouloir à un
fonctionnaire d'avoir servi sous la direc-
tion de Gambetta.
On peut donc dire de la séparation
entre le nouveau ministère et le préfet
de police ce que Tacite a si joliment dit
de la rupture entre Titus et Bérénice :
lnvitus invitam dimisit. Mais quand
l'empereur renvoya malgré lui reine qui
voulait rester, tout le monde comprit la
haute raison d'Etat qui exigeait ce dou-
ble et réciproque sacrifice.
Ce qui est intéressant à discerner au-
jourd'hui, c'est la raison d'Etat ou autre
qui a pu contraindre le cabinet à de-
mander sa démission à M. Camescasse.
Là-dessus il faut consulter les jour-
naux radicaux et intransigeants, qui
nous répondent avec une triomphante
netteté :
M. Camescasse est sacrifié :
1° Aux exigences des coalisés qui
ont renversé le ministère et qui ne
veulent pas supporter dans les hauts
postes administratifs les anciens colla-
borateurs du cabinet Ferry ;
2° Aux exigences des conseillers mu-
nicipaux et des radicaux qui faisaient
métier de détester en M. Camescasse un
préfet qui ne se pliait pas à leurs fan-
taisies.
A moins que par impossible ces rai-
sons ne soient pas celles du départ de
M. le préfet de police, ce départ nous
paraîtrait un acte d'inqualifiable fai-
blesse de la part du gouvernement.
Le programme du ministère, à la lec-
ture duquel nous nous sommes décidés
à le soutenir, est un programme d'union,
de concorde, « de libre concentration
des forces républicaines ». Sacrifier un
fonctionnaire républicain uniquement
parce qu'il appartient à tel ou tel groupe
parlementaire, c'est déjà mentir à ce
programme dont la stricte exécution est
la seule raison d'existence d'un cabinet
qui, s'il n'est pas sincèrement un cabi-
net de oonciliation, peut et doit être mis
en minorité au premier instant.
Que si ce n'est pas le collaborateur
de M. Ferry qu'on atteint en M. Cames-
casse, mais bien le fonctionnaire qui a
su défendre les droits de l'Etat contre
le petit Parlement de l'Hôtel de Ville,
c'est avec plus de sévérité encore que
nous blâmerions le cabinet.
Il est tenu, je le veux bien, par sa
composition même, à une politique d'é-
quilibre. Mais cette politique ne peut
consister en autre chose qu'à consti-
tuer une majorité avec tout le parti
républicain gouvernemental et à lutter
à la fois avec la même énergie et la
même sincérité contre la Droite et les
intransigeants.
Le système des compensations du
bonhomme Azaïs est un aimable jeu de
philosophe, mais un tour de gobelet dé-
plorable en politique, s'il consiste sim-
plement à escamoter Camescasse pour
faire passer Cavaignac !
Le ministère compte dans ses rangs
trois ou quatre hommes qui ont été à
l'Union démocratique en venant du
Centre gauche. Il serait tout à fait sin-
gulier qu'il tombât tout justement du
côté où il ne paraissait pas devoir pen-
cher et que des républicains très con-
servateurs, plus conservateurs que nous-
mêmes, ne soient arrivés au pouvoir
que pour baisser pavillon devant les in-
transigeants et les radicaux !
Ceci dit, reste à savoir ce qui va arri-
ver de la préfecture de police.
Le choix du successeur de M. Cames-
casse a plus de portée qu'un simple
changement de personne.
Ce n'est pas un grand mystère que le
désir du conseil municipal est de réduire
à rien les attributions et le rôle du pré-
fet de police. Le conseil voudrait voir
attribuer à la préfecture de la Seine
une partie des services de la préfecture
de police, donner ensuite les trois quarts
de ce qui en resterait au chef de la
police municipale rendu indépendant
du préfet et déjà l'homme du futur
maire de Paris, et laisser enfin vivoter
le préfet de police dans les obscurs
honneurs du commandement de la lé-
gion des municipaux. Décentraliser et
communaliser la police, voilà le but
poursuivi et nous saurons,selon le choix
qu'on fera du successeur de M. Cames-
casse, si le cabinet bigarré qui préside
à nos destinées entend entraver les pro-
jets du conseil municipal et des intran-
sigeants," ou laisser faire et nous con-
duire de concession en concession à
cette concession dernière dont parlait
une jolie caricature sur le maréchal
de Mac-Mahon.
Le préfet de police doit être un hom-
me énergique avec des formes conci-
liantes, d'une grande netteté de vues
sans aucune étroitesse d'esprit, ayant
plus de scrupules que de préjugés, ré-
solu à n'empiéter jamais sur aucune
administration, mais à n' abandonner
rien des droits de l'Etat, étranger aux
intrigues des partis, sans ambition par-
lementaire , inflexible, et sûr vis-à-
vis de son personnel, Parisien jusqu'au
bout des ongles, aimant la police pour
elle-même, et j'oserai dire : au moins
aussi artiste que magistrat.
Je pense que l'honorable M. Gragnon,
que nous avons connu dans la presse
quand il était rédacteur du Soir, réunit
la plupart de ces mérites, puisqu'on le
désigne comme le successeur de M. Ca-
mescasse. S'il lui en manquait quel-
ques-uns, le cabinet n'hésiterait pas
sans doute à chercher un préfet de po-
lice même en dehors des fonctionnaires
du quai des Orfèvres. Car en nommant
à la direction générale des douanes M.
Pallain, le ministère a prouvé qu'il savait
user du choix sans tenir trop de compte
des règles étroites de la hiérarchie.
HENRY FouQulEn.
L'élection, à Chartres, d'un conseiller géné-
ral réactionnaire est exploitée en ce moment
par nos adversaires. Ce triomphe bruyant ap-
pelle quelques observations.
En réalité, le ballottage d'Eure-et-Loir a été
moins contre nous en fait qu'en apparence.
Les suffrages républicains accordés à deux
candidats formaient un total de 1,884 voix
contre 1,275 pour le représentant de l'opposi-
tion.Au second tour, celui-ci a gagné 389 voix,
et M. Alleaume, restant le seul républicain,
en a perdu 511 sur le vote collectif précédent,
tout en dépassant encore de près de 100 voix
le chiffre acquis à l'origine par son concur-
rent.
Ce n'est là qu'une surprise, et qui ne doit
pas nous contrister. Cependant on en peut
tirer une leçon pour l'avenir. Il est évident
que la conquête des 385 voix réactionnaires
correspond à un effort considérable, à une
propagande effrénée. -, , - - -
Parce qu'elle sera cent etcant fois réparée,
nous n'en devons pas moins faire sentir à nos
amis politiques l'erreur commise en cette
circonstance. Quand l'accord devait être
complet sur un programme général, accep-
table par tous, des compétitions se sont
produites et l'insuccès final est survenu.
La politique du tout ou rien a de ces à-coups.
Il est bon de les prévoir, meilleur de les évi-
ter.
Le moyen pour les républicains, séparés
seulement par des nuances théoriques, de
ne pas avoir à regretter de semblables ac-
cidents, serait de renoncer à des polémiques
purement personnelles, qui rendent impossi-
ble un rapprochement à l'heure où il devient
cependant nécessaire.
En fait de désidérata politique, il faut sa-
voir se contenter à temps d un minimum,
pour ne pas risquer de voir, comme cette fois,
ce minimum lui-même s'échapper par la tan.
gente !
E. R.
M. ALI MARGAROT
Maire de Mimes
M. Ali Margarot, dont les journaux de
Paris ont à peine annoncé la mort et que
ses compatriotes désolés accompagnaient
ce matin à sa dernière demeure, était le
premier maire républicain de sa bonne
ville.
Elle est, cette bonne ville, une ville
unique, férocement divisée, avec, dans
toutes les mémoires, le souvenir sanglant
des vieilles guerres de religion. A Nîmes,
il n'y a ni républicains, ni réactionnaires,
mais des « protestants » et des « catholi-
ques », et cet abîme creusé entre les habi-
tants n'est pas seulement moral; des quar-
tiers sont carlistes et des quartiers radi-
caux ; on dit d'un citoyen qu'il est « de ,
l'enclos Rey » ou « de la Placette », sui-
vant qu'il attend avec impatience la restau-
ration des Bourbons ou qu'il marque un
profond mépris pour la « légitimité ».
Toujours, jusqu'à ces dernières années,
les « catholiques » — pour parler fa lan-
gue de là-bas — avaient eu la majorité au
conseil municipal. Les élections de 1881
déplacèrent cette majorité, et c'est alors
que M. Ali Margarot prit en main le gou-
vernement de la cité.
Il fallait tout bouleverser et tout remet-
tre en ordre: construire un lycée, des éco-
les, un marché, une caisse d'épargne, un
musée ; réorganiser l'administration ; re-
Feuilleton du XIXc SIÈCLE
Du 23 Avril 1885
Chronique Scientifique
i
LE MONDE DES FRAUDEURS
Buffeteurs, brouilleurs et fardeurs
Le bon vinaigre d'Orléans
Au laboratoire municipal
Règlements et loi
Colique sèche des pays chauds
Salycilage
M. Charles Girard vient de publier en un
gros volume, que M. Masson a édité, un
« rapport sur les falsifications des matières
alimentaires et sur les travaux du labora-
toire municipal » qui est adressé au pré-
fet de police, — mais que tous les Pari-
siens devraient lire pour se convaincre de
l'impudence des falsificateurs et de la né-
cessité d'une surveillance active et per-
manente.
« Il y a, — disait un jour M. Léon Say à
propos de la situation financière de notre
pays, — il y a en France un monde des
fraudeurs. M. Disraëli contait dans son
dernier roman que, lorsque les députés
jouissaient de la franchise postale, c était
élégant et comme il faut de faire partie du
monde de la franchise. Le monde de la
franchise était alors le monde influent.
Du train où vont ici les choses, il sera bien-
tôt très bien porté de faire partie du
monde des fraudeurs (1). »
Ce monde des fraudeurs — organisé,
discipliné, ingénieux et redoutable, qui
vole l'Etat, empoisonne le consommateur
et déshonore les transactions avec une
parfaite insouciance des résultats — est,
chez nous, un vieux monde : les Romains
le connaissaient déjà : Aloes mercantur
qull saporem coloremque adultérant, dit
Pline en parlant des Marseillais qui em-
(1) La Politique financière de la Frçtaçç. fourmi
des Economistes, 1882. -
ployaient l'aloès pour rehausser la couleur
de leurs vins anémiques. Procédé naïf, que
les sophistes, les buffeteurs, les brouil-
leurs, les fardeurs et les falsificateurs ont
singulièrement perfectionné à travers les
âges !
Nous sommes loin du temps où Guil-
laume Bouchet, sieur du Brocourt, qui
fut juge-consul des marchands de Poi-
tiers, contait que les drôles qui « gas-
tent ce que Dieu a faict, non seulement
marient le puys à la cave, mais en-
core y mettent des choses qui nuisent
grandement à notre santé, comme de l'e-
ruca, du soufre, de l'eau de mer cuite,
de la résine, du miel, du lait de va-
che, de la chaux. » Nos chimistes mo-
dernes ont renoncé à l'eau de mer cuite, à
la résine et à l'eruca; ils ont encore aban-
donné le miel et le lait de vache, beaucoup
trop coûteux à leur gré ; mais ils ont con-
servé le soufre et le plâtre, auxquels ils
ont ajouté le bois de Campêche, la rose
trémière, la chochenille, l'orseille, le sureau
et surtout les produits dérivés du gou-
dron de houille, ces admirables cou-
leurs d'aniline, si puissamment colorantes
qu'une infinitésimale parcelle de fuchisne
suffit à rougir cent litres d'eau.
Le malheur est — pour les voleurs —
que notre loi n'admet pas de tromperie
sur la qualité de la marchandise vendue
et que les fabricants qui tentent de faire pas-
ser pour du petit bourgogne un simple
mélange de carmin de piquette et d'eau,
sont justement passibles de poursuites ju-
diciaires.
Mais un expert est nécessaire, placé
entre celui qui vend et celui qui achè-
te, pour signaler les contrevenants à
la sévérité de la justice. C'est ce qu'avaient
fort bien compris les conseillers munici-
paux de Paris quand, en 1876, M. Dumas
leur soumit le plan d'organisation d'un
bureau d'essai où le-premier citoyen venu
aurait le droit de faire contrôler la qualité
de son vin, de son huile et de son café.
Car, il est bon qu'on le sache, le labora-
toire municipal, que quelques-uns de nos
édiles semblent s'ingénier à tracasser, a
été librement édifié, sur les sollicitations
pressantes et motivées d'un grand nombre
d'électeurs, par le conseil municipal lui-
même.
x
La proposition de M. Dumas fut reprise
et complétée le 22 février 1877 nar M. De-
lattre qui invita le préfet de police « à pré-
senter au conseil un mémoire sur l'utilité
et la possibilité de créer un laboratoire
municipal de chimie où les commerçants
pourraient faire analyser les denrées ali-
mentaires et les boissons moyennant un
tarif préalablement convenu ». Le préfet
de police était alors M. Voisin ; il s'em-
pressa de mettre à l'étude cette impor-
tante question et déposa, le 28 mars 1878,
un rapport dans lequel il concluait à la
fondation d'un laboratoire public. Le con-
seil ne partageapas complètement son avis
et décida que le futur laboratoire ne serait
ouvert qu'à l'administration seule. Il com-
mença à fonctionner sur ces bases au mois
d'octobre de la même année.
On reconnut vite que cette institution
ne rendrait les services qu'on était en
droit d'en attendre que quand on l'aurait
mise à la portée de tous. Aussi, dès le
20 mars 1880, MM. Darlot, Marsoulan,
Masse et Sick proposèrent-ils au conseil
de modifier l'organisation primitive. Nou-
velle discussion, nouveau rapporteur et
nouveau rapport à la suite duquel le
conseil revint, sans trop de grimaces, sur
sa délibération ancienne ; l'ouverture au
public du Laboratoire municipal était
enfin votée.
Aussitôt les clients affluèrent. Tel petit
employé apportait son vin, telle ménagère
son beurre, tel cabaretier son café. Chacun
voulait être renseigné sur la probité com-
merciale des débitants de son quartier et
moi-même je fus bientôt amené à faire
comme tout le monde. J'avais cru remar-
quer que le vinaigre dont on se servait à
ma table m'irritait singulièrement la
gorge et m'occasionnait une inflammation
assez vive des. muqueuses de la bouche.
Je m'enquis de l'adresse de l'honorable
négociant qui me fournissait ce produit
et je me présentai dans sa boutique.
J'eus le bonheur de le rencontrer et de
l'entretenir personnellement.
- Monsieur, lui dis-je, je loge à deux
pas d'ici et ma cuisinière achète dans votre
magasin le vinaigre dont on garnit ma
salade. Pourrais-je savoir comment vous
le fabriquez ?
- Monsieur, me répondit-il, mon vi-
naigre est le meilleur des. vinaigres; c'est
du vinaigre blanc.
Je savais que ce vinaigre était blanc,
favais pu m'en assurer sans difficulté; le
but de ma visite n'était pas d'être rensei-
gné sur sa couleur. J'insistai donc.
— Et comment fabriquez-vous ce vinai-
gre blanc, cet excellent vinaigre?
— Monsieur, me dit majestueusement
l'épicier, je ne le fabrique point. Je l'a-
chète à Orléans; c'est du vinaigre d'Or-
léans.
— Mais je croyais, repris-je un peu bon-
nement, qu'on donnait le nom de vinaigre
d'Orléans à du vinaigre de vin; j'entends
à du vin aigri, naturel et sans addition
d'acides ou de condiments.
— Eh oui ! monsieur, conclut mon in-
dustriel ; c'est précisément ce vinaigre que
j'ai l'honneur de vous vendre; vinaigre
naturel et pur, vinaigre blanc d'Orléans.
* Les calmes assertions de mon voisin
m'eussent sans doute convaincu si je n'a-
vais eu qu'un simple soupçon sur l'insalu-
brité de son vinaigre, mais il fallait une
explication à la fréquence de mes stoma-
tites, et je résolus de l'aller chercher au
laboratoire.
Je pris un beau matin quelques centili-
tres de ce vinaigre et l'emportai à la pré-
fecture de police où j'eus quelque peine à
découvrir le laboratoire au fond de la cour
de la caserne, dans un ancien corps de
garde de cavalerie. Un employé fort cour-
tois me reçut qui voulut bien m'appren-
dre d'abord que j'aurais pu m'éviter l'en-
nui de descendre jusqu'à la Cité, en dépo-
sant simplement mon flacon chez le com-
missaire de mon quartier ; il paraît, en ef-
fet, que les voitures cellulaires ramassent
chaque matin les échantillons en même
temps que les pochards, les maraudeurs,
les voleurs et les filles pour le Dépôt. Puis
il s'euquit de mon nom et de mon adresse,
du nom et de l'adresse de mon fournis-
seur, du prix de mon vinaigre, et me fit
signer une fiche en carton blanc sur
laquelle il avait rapidement écrit ces di-
vers renseignements; il me délivra en-
core un reçu portant, avec le numéro d'or-
dre reproduit sur la fiche, la date fixée
pour la livraison de l'analyse. Au jour dit,
je fus exact et reçus des mains du même
employé une note mi-partie imprimée,
mi-partie manuscrite et ainsi conçue :
LABORATOIRE MUNICIPAL DE CHIMIE
&NAI
Le chef du laboratoire municipal certifie
que l'échantillon déposé sous le nO. par
M. V. du Claux est MAUVAIS NUISIBLE.
Le chef du laboratoire municipal,
CH. GIRARD.
Toute personne qui usera du présent bulletin
pour nuire à la réputation d'autrui commettra le
délit de diffamation.
Mauvais nuisible ! mauvais nuisible !
Je n'étais pas beaucoup plus renseigné
qu'avant l'analyse, ma secrète curiosité
étant de savoir pourquoi mon vinaigre était
mauvais et comment il était nuisible.
L'employé auquel je confiai mon souci
m'apprit que,moyennant une petite somme
qu'il me fixa, le laboratoire pourrait me
fournir ces documents complets et précis.
Je dus rapporter une fiole de vinaigre, re-
donner les indications que j'avais données
pour l'analyse gratuite, verser dix francs
et apposer ma signature sur une fiche de
carton rose. J'appris ainsi que mon vinai-
gre, mon bon vinaigre d'Orléans, était fa-
briqué de toutes pièces avec quelques in-
grédients, parmi lesquels je distinguai sur-
tout l'acide sulfurique , la moutarde et le
piment.
Dès lors l'utilité du laboratoire me pa-
rut indiscutablement démontrée.
X
Et voulez-vous savoir comment fonc-
tionnent ceux des rouages de cette grande
machine que le public ne voit pas ? -
Aussitôt qu'un échantillon suspect a
été déposé au bureau, la fiche (blanche ou
rose, suivant que l'analyse doit être qua-
litative ou quantitative, gratuite on payée)
est divisée en deux fragments : l'un de
ces fragments, qui porte les noms du
vendeur et du déposant, reste dans les
registres de la comptabilitÓ: J'autre, qui
ne porte qu'un numéro d'ordre, est rivé à
l'échantillon et transmis à l'expert. Celui-
ci analyse donc un produit dont il igno-e
la provenance, et la bonne foi. dp son ex-
pertise ne peut en aucun cas être mise
en doute. Si le produit examiné n'est pas
falsifié, on se borne pour toute formalité à
transcrire le détail des résultats obtenus
sur le livre à souche, dont on .- détache le
bulletin d'analyse. Mais si l'on découvre
quelque fraude" le chef du Laboratoire dé-
pêche aussitôtcleiu inspecteurs à l'adresse
indiquée du négociant. -
Ces inspecteurs (au nombre de 45) sont
! des médecins, des pharmaciens, ou tout
au moins des étudiants à seize inscrip-
tions en médecine et en pharmacie, qui
ont passé, pour obtenir leur emploi, un
examen spécial de chimie. Tous sont,
en outre, régulièrement .nommés com-
missaires de police et peuvent empor-
ter dans leur poche, à côté de leur
trousse de chimiste, l'écharpe tricolo-
re, qui leur permettrait au besoin d'im-
poser leur visite aux négociants récalci-
trants et de requérir les agents de la force
publique.
Mais ils n'ont jamais besoin d'en venir
à ces extrémités. Quand ils se présentent
- toujours au nombre de deux - pour
opérer un prélèvement, on leur donne en
général sans discussion les échantillons
qu'ils réclament. De ces échantillons, ils
font deux parts égales qu'ils cachètent et
signent, sous les yeux du propriétaire,
qui, lui-même, signe après eux sur le scel.
Partout ils tentent, séance tenante, un ra-
pide essai préliminaire, puis ils dressent
un procès-verbal, en ayant soin d'y faire
figurer toutes les indications ou réclama-
tions du négociant.
L'un des deux échantillons saisis est
analysé au Laboratoire, l'autre est con-
servé pour être transmis au parquet, s'il
y a lieu. Le chef du Laboratoire n'a, en
effet, aucune action judiciaire : il se borne
à signaler au parquet les fraudes qui lui
paraissent devoir être poursuivies. Mais
le parquet, sauf en cas d'aveu, fait pro-
céder d'abord à une contre-expertise et
« classe » l'affaire toutes les fois que la
nouvelle analyse diffère en quoi que ce
soit d'essentiel de l'analyse du Laboratoire.
11 est par suite impossible qu'un honnête
négociant soit la victime d'une erreur ou
d'une calomnie. Quant à ceux qui s'enri-
chissent aux dépens de notre santé, tant
mieux si le Laboratoire les gêne! Je trouve
nos loi- beaucoup trop douces à leur en-
droit.
X
Jadis OR él ait autrement sévère contre
tous les marchands « d'adultère beuverie»;
tandis qu'au parlement de Paris le con-
seiller Le May demandait la mort d'un ca-
baretier, un évêque en excommuniait un
autre au concile de Rome. L'histoire est
pleine de ces exemples.
Bullon, dans son Dictionnaire, rapporf.e
un arrêt qui condamne les charretiers
buffeteurs de vin « à faire amende hon
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