Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1885-11-26
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Description : 26 novembre 1885 26 novembre 1885
Description : 1885/11/26 (A15,N5072). 1885/11/26 (A15,N5072).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/04/2013
Quinzième année. — N° 507$Prix du numéro à Paris : 15 centimes — Départements: 20 centimes Jeudi 26 Novembre 1885
LE ! SIECLE
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
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iHongrols 79 15/16, 80 1/16.
Priorité 355.
SOMMAIRE
Dernière heure.
Question du jour (les Colonies). — HENRY
FOUQUIER.
ïonvnée de Paris.
Ch ronique parisienne (Frère Jean).—ALBERT
DUBRUJEAUD.
informations particulières.
Les Fournitures de l'Etat. — LÉo BmoN.
Nouvelles coloniales.
La Guerre. — Louis HENRIQUE.
Dépêches.
Bulletin de l'étranger.
Informations.
Revue de la presse. — NACHBTTB.
La Température.
Courrier de la Bourse. — H. La FA OR*.
Tribunaux. — M* GERVASY.
Faits divers. — JEAN VALUÈRE.
Soirées parisiennes. — EMILE MBNDBL.
Courrier des théâtres. — GEORGES FEYDEAU.
Chronique scientifique. — Dr V. Du CLAux.
DERNIÈRE HEURE
MORT DU ROI D'ESPAGNE
L'ambassade d'Espagne a reçu à neuf
heiires le télégramme suivant :
« El Pardo, 25 novembre.
» Sa Majesté le roi est mort ce matin.
» Le cabinet a présenté à la reine ré-
gente sa démission.
» Les ministres continueront leurs fonc-
tions en attendant la décision que la reine
régente voudra bien prendre. »
Hendaye, 25 novembre.
Les nouvelles de Madrid venues par le
courrier disent que les troupes sont con-
signées dans les casernes.
M. Canovas et le ministre de la guerre
sont restés à Madrid pour parer à toutes
les éventualités.
On craint un soulèvement carliste dans
les provinces du Nord.
Alphonse XII était né à Madrid le 20 no-
vembre 1857, de la reine Isabelle et de
François d'Assise. Il avait donc onze ans
quand, en 1868, sa mère fut renversée du
trône. Alphonse vint à Paris avec son
père et M. Marfori dont il subit la disci-
pline mystique.
Le 25 juin 1870, à l'hôtel Basilewski, sa
mère abdiqua en sa faveur et il fut salué
roi sous le nom d'Alphonse XII par quel-
ques membres influents de son parti.
Le jeune prétendant continua ses études
à Vienne et à Chislehurst où il devint le
camarade du prince impérial. Le lor dé-
cembre 1874, il publia un manifeste, et le
30 décembre un pronunciamiento l'appe-
lait au trône d'Espagne.
Il prit pour chef de cabinet M. Canovas
del Castillo, et, pour son premier acte,
augmenta le budget des cultes, tout en
déclarant qu'il avait l'intention de garantir
la liberté de conscience comme dans les
autres Etats de l'Europe.
Alphonse XII eut à réduire l'insurrec-
tion carliste. Après la soumission de Ca-
brera, les généraux Jovellar et Martinez
Campos prirent Estella (février 1876) et
forcèrent à la fuite don Carlos.
En 1876, après avoir expulsé Marfori,
le roi Alphonse autorisa sa mère à rentrer
en Espagne. On connait les derniers évé-
nements de son règne, ses deux ma-
riages avec la princesse Mercédès et l'ar-
chiduchesse d'Autriche, son voyage à
Paris et sa fière attitude dans le conflit
hispano-allemand.
Le roi Alphonse ne laisse qu'une fille,
qui a cinq ans.
On sait que la reine d'Espagne se trouve
en ce moment dans une position intéres-
sante.
-
L'opinion à Madrid
Madrid, 25 novembre.
L'opinion publique est très alarmée.
On dit qu'au cas où la reine d'Espagne
prendrait la régence en Espagne, le géné-
ral Martinez-Campos serait chargé de for-
mer un nouveau ministère où dominerait
l'élément militaire, pour faire face aux
républicains et aux carlistes qui s'agitent
beaucoup dans toute la péninsule.
En Serbie
Semlin, 25 novembre.
Le bruit court que la division du centre,
conduite par le roi Milan, a repris hier
l'offensive et a réoccupé les positions de
Dragoman ; mais cette nouvelle n'est pas
encore confirmée.
Le ministre de Russie a demandé hier soir
à ses collègues, réunis à la légation autri-
chienne, de proposer un armistice aux
combattants. Tous ont accepté, et une pro-
position dans ce sens a été transmise aux
quartiers généraux serbes et bulgares.
La eonférence
Constantinople, 25 novembre.
La conférence s'est de nouveau ajour-
née à demain, sir W. White refusant de
signer, faute d'instructions, le protocole
relatif à l'envoi d'un commissaire en Rou-
mélie. L'on n'a aucune certitude que sir
W. White signera demain.
QUESTION DU JOUR
Les colonies
M. Camille Pelletan et M. Laguerre,
ces temps-ci, ont déclaré, à propos de
je ne sais quel vote où la Droite et la
Gauche progressiste ont été d'accord,
que rien n'était plus immoral que les
coalitions. Et, quand il s'agit d'une
question de première importance, dont
la solution touche non seulement à l'exis-
tence du cabinet, ce qui nous est fort
égal, mais à l'intégrité matérielle et
morale, à l'intérêt et à l'honneur du
pays, l'Extrême-Gauche trouve tout na-
turel de se coaliser, par une entente
préalable, avec les adversaires de la
République ! On voit alors se former ces
bureaux, dont nous avons, donné hier
la composition, où sont réunis, sur une
même liste, MM. Pelletan, Rochefort et
Bergerot, MM. Granet et Delafosse,
MM. G. Perin et l'amiral de Gueydon,
ce marin que la Suisse nous envie ! La
seule consolation que nous trouvions à
ce beau spectacle, c'est de voir certains
radicaux, qui ont fait la campagne élec-
torale sur un programme hostile à la
politique coloniale, renier ce programme
dans un mouvement d'honnêteté d'esprit
qui nous touche, encore que tardif. Tel
est M. Peytral, qui a fait campagne avec
MM. Granet et Antide Boyer, et qui, au-
jourd'hui, défend les crédits demandés
tout juste par les arguments que ses ad-
versaires invoquaient et faisaient valoir,
quand on n'étouffait pas leur voix sous
les cris de : « Tonkinois ! » adressés à
quiconque avait le courage de parler en
bon Français !
Mais les amères satisfactions que
donnent les palinodies constatées, les
haines démasquées, les ambitions écla-
tant d'un coup, satisfactions qui ne tou-
chent que les moralistes, ne sauraient
compenser les tristesses et les inquié-
tudes que nous cause la situation. A
moins que la Chambre ne se déjuge en
séance publique, ce qui n'est pas impos-
sible, mais ce qui ne paraît pas proba-
ble, la crise ministérielle est ouverte.
C'est en vain qu'on a voulu l'ajourner,
et je persiste à regretter que la question
de confiance n'ait pas été Dosée dès le
premier moment, après l'élection. C'é-
tait du temps de gagné. Quoi qu'il en
soit, la crise est arrivée, après les pa-
roles très nettes, très sages, très hono-
rables qu'a prononcées M. Brisson. On
a remarqué le contraste de ce langage
avec celui de M. Goblet. M. le ministre
de l'instruction publique, etc., etc., a
commencé par se taire. Il a fallu qu'on
l'interrogeât pour le décider à parler ;
et il a, avec une adresse un peu grosse
dont son austérité s'accommode, racom-
modant avec du fil blanc les accrocs de
l'habit ministériel collé à sa peau, tout
fait pour ne pas répondre, pour ne pas
se faire solidaire de M. Brisson, en es-
sayant de montrer que le protectorat du
Tonkin était une chose ou une autre se-
lon que M. Goblet était ministre ou pas.
Vaines habiletés! Inutiles subterfuges 1
Les journaux les plus sérieux de l'opi-
nion républicaine sont unanimes sur ce
point : que la Chambre doit décider s'il
y a une politique coloniale à suivre ou à
abandonner. Et si l'abandon est voté,
c'est bien le moins que la responsabi-
lité de l'exécution incombe à qui aura
pris celle du principe! Pour une fois
que, par hasard, la Chambre fait de
l'histoire, il ne faut pas qu'elle trompe
l'historien futur. Et si j'espère encore
dans la séance publique, c'est parce
que la Droite, qui voudrait bien compro-
mettre la République, sera mise en face
de l'action qu'on lui demande d'accom-
plir, et se rappellera peut-être que l'a-
bandon de l'Inde, celui du Canada, celui
de la Louisiane ont été chèrement ex-
piés !
Assez d'atermoiements! Il faut que
l'explication soit solennelle devant le
pays. D'abord, laissons une bonne fois
de côté les euphémismes ridicules au
milieu desquels on se débat depuis des
mois.« Liquider honorablement, » comme
le demande M. Granet, songeant à res-
ter possible en tout cas, est un vain mot.
On peut souhaiter, si on occupe une co-
lonie, avoir peu d'efforts à faire pour s'y
maintenir ; on peut ne pas chercher les
conflits; mais on ne peut pas répondre
qu'il n'en naîtra pas. Et que dirons-
nous, d'ailleurs, à la Chine, si elle nous
demande de tenir nos engagements et
de pacifier 1 es pays du protectorat? De-
manderons-nous aux mandarins de se
contenter de 45 0/0 de nos promesses?
Est-ce là ce que M. Granet appelle « li-
quider honorablement », en évitant la
faillite avérée par le concordat de créan-
ciers indulgents? Non. Tout ceci est
misérable et indigne de nous : ou bien
l'organisation de nos colonies, avec
l'aléa que comporte l'opération ; ou bien
que l'Extrême-Gauche et la Droite, coa-
lisées, aient le courage de vouloir l'aban-
don, d'émettre un de ces votes que l'on
applaudira peut-être sur l'heure, mais
qu'on maudira avant six mois !
Voilà ce que nous attendons de la,
discussion publique. La campagne élec-
torale a été la campagne de la peur, de
l'abaissement. On a nié, devant ce no-
ble pays, devant les souvenirs de ses
armées vaillantes, les gloires fécondes
de l'aventure, les grandeurs, fécondes
aussi, quoique la moisson s'en lève plus
tard, du sacrifice sanglant de la guerre.
On a prêché sur tous les tons qu'il n'y
avait pas de question d'honneur pour
les peuples, et que nous ne nous en por-
tions pas plus mal pour voir, à Langson,
les dragons des enseignes chinoises
nous tirer la langue! On a fait cette
chose tout à fait nouvelle chez nous : la
paix à tout prix populaire. Car je ne
m'illusionne pas sur l'état des esprits.
L'intérêt palpable, immédiat, le gros
sou d'aujourd'hui y prévaut sur l'intérêt
plus abstrait, sur l'utilité à une échéance
un peu incertaine, sur la pièce d'or de
demain. On nous donne en exemple les
guerres anglaises, simples opérations
commerciales. On a réussi, pour le mo-
ment, à brouiller la démocratie avec
toute sorte d'idéal. Soit.
A parler franc, cela ne nous inquiète
pas pour longtemps. Nous ne pensons
pas que la Gaule, la Gaule conquérante
qui pousse ses fils jusqu'en Grèce et en
Asie, que la France de Dupleix, deMont-
calm, et de ce La Salle qui conquit la
Louisiane avec deux mille hommes, la
Louisiane que Napoléon vendit ouatre-
vingt millions et qui en rapporte peut-
être deux cents aujourd'hui; nous ne
pensons pas que la France de Kléber et
de Bugeaud, quand l'Europe entière
veut des colonies, reste longtemps sous
le coup de l'abandon d'une terre où son
drapeau a flotté! Ce drapeau qui, rouge
oriflamme, fleurdelysé ou tricolore, a
fait le tour du monde, qu'on l'enterre
donc aujourd'hui, comme dans un drame
que nous venons de voir. Ceux qui fe-
ront cette besogne ne jetteront dessus
pas assez de terre ou de boue, que la
hampe ne sorte encore du sol pour être
reprise un jour par des mains plus vi-
goureuses, et à l'applaudissement du
pays. Car notre France est, je pense,
comme ces femmes qui, si vous avez
une querelle, vous supplient de ne pas
vous battre, mais qui vous feraient payer
cher le soufflet gardé et l'injure laissée
sans vengeance !
HENRY FOUQUIER.
LA JOURNEE DE PARIS
COURSES A AUTEUIL. - Aujourd'hui, à
deux heures, courses à Auteuil.
Voici les appréciations de notre collabora-
teur Favelles :
Prix des Veneurs : Mick ou Séville,
Prix du Brasero : Bonbon ou Palamède.
Prix des Glacières : Josaphat ou Vaugirard.
Prix Doublon : Verdier ou Printemps.
n
* *
ASSEMBLEE GÉNÉRALE DE L'ASSO-
CIATION DES JOURNALISTES PARI-
SIENS. — L'Association des journalistes pa-
risiens a tenu hier soir au Grand-Hôtel, salle
du Zodiaque, son assemblée générale an-
nuelle. Après avoir entendu le rapport de M.
Paul Foucher, secrétaire, et celui de M. Du-
guiès, trésorier de l'Association, l'assemblée
général a adopté, en leur faisant subir quel-
ques modifications, les projets de statuts nou-
veaux et de règlement intérieur qui avaient
été soumis aux membres de l'Association.
Elle a ensuite procédé au renouvellement
de son comité. Ont été élus :
MM. Buloz (Revue des Deux Mondes).
Albert Delpit (Paris).
Joseph Denais (Défense).
Henri Duguiès (Messager de Paris).
Alfred Edwards (Matin).
Paul Foucher (National).
Henry Fouquier (XIXO Siècle).
Louis Gai (Liberté).
Denis Guibert (Patrie).
Edouard Hervé (Soteil).
, Gaston Jollivet (Figaro).
G. de Léris (Moniteur universel).
Eugène Liébert (Gagne-Petit).
Marinoni (Petit Journal).
Charles de Mazade (Revue des Deux
Mondes).
Paul Meurice (Rappel).
Arthur Meyer (Gaulois).
Alfred Mézières (Temps).
L'assemblée a voté des remerciements à
M. Ph. Jourde et à ses collègues du Syndicat
de la presse parisienne. Elle en a voté égale-
ment à M. Edouard Lebey et au comité sor-
tant, pour le concours dévoué qu'ils ont
donné à l'As sociation pendant l'exercice écoulé.
*
* *
L'UNION DES FEMMES DE FRANCE.-
Hier, à quatre heures, a eu lieu la séance
solennelle d'inauguration de la salle des con-
férences de l'Union des femmes de France,
29, rue de la Chaussée-d'Antin.
Bien avant l'ouverture de la séance, le local
était rempli par des dames dont beaucoup
en toilette très élégante, portant toutes sur
la poitrine le ruban de la Société, blanc à
liséré vert, avec la croix rouge des hospi-
taliers.
Sur l'estrade d'honneur, on remarquait :
Mmes Goudchaux, Périssé, Dislère, Miot, de
La Bédollière, etc.
Du côté des hommes : MM. Rochard, ins-
pecteur général du service de santé de la ma-
rine, membre de l'Académie de médecine ; le
docteur Bouloumié, le capitaine Josse, repré-
sentant le ministre de la guerre ; les géné-
raux Grenier et Péan, le comte Sérurier, M.
Kœchlin-Schwartz, maire du huitième arron-
dissement, etc.
La séance a été ouverte par un discours
intéressant du docteur Rochard, dans lequel
il a fait un exposé des services déjà rendus
par l'OEuvre et démontré que, si certaines
personnes contestent l'utilité du concours ap-
porté à l'Etat par les Sociétés de ce genre, il
produit pourtant les meilleurs résultats.
Les envois faits par l'Union des femmes de
France, et composés avec toute la sollicitude
de mères qui gâtent leurs enfants, sont re-
çus avec la plus vive reconnaissance par les
malades et les blessés de nos armées au Ton-
kin, en Cochinchine, à Madagascar.
L'orateur a cité un fait curieux et des plus
probants.
Quelques cas de scorbut avaient éclaté
dans les troupes d'occupation de Madagas-
car.
o. Le docteur Rochard, qui connaît parfaite-
ment les ressources de l'île, écrivit à l'a-
miral commandant nos forces, pour lui ex-
primer son étonnement de voir éclater cette
maladie lorsque le pays regorge de vivres et
de légumes frais.
« Ce que vous m'écrivez est juste en temps
de paix, lui répondit-on ; mais, depuis la
guerre, il n'en est plus ainsi, et, quand une
botte de radis parait sur la table de l'amiral,
le factionnaire lui présente les armes. »
Grâce aux envois des Femmes de France,
cette situation changea bientôt : les légumes
frais expédiés de la Réunion abondèrent au
camp français, et le scorbut ne tarda pas à
disparaître.
Passant ensuite au rôle que jouerait l'Union
des femmes dans une guerre européenne, le
docteur Rochard a cherché à donner à ses au-
ditrices une idée des souffrances qu'elles au-
raient à soulager.
Dans la dernière guerre franco-allemande,
nous avons eu 145,000 blessés et près d'un
million de malades.
Faisant appel à ses souvenirs de la guerre
de 1870-71, le docteur trace un tableau saisis-
sant de l'arrivée des trains de blessés de l'ar-
mée de la Loire à Brest où il dirigeait le ser-
vice de santé.
Le docteur Bouloumié a clos la séance et
relatant l'extension prise par l'Union des fem-
mes de France et en remerciant tous les hauts
personnages qui ont aidé à son développe-
ment.
*
* *
UN DINER SCIENTIFIQUE. — M. Napo-
léon Ney vient de réunir en un dîner quel-
ques-uns des « voyageurs» de passage à Pa-
ris.
A la table avaient pris place, avec M. de
Brazza, nos explorateurs les plus connus et
quelques intimes : M. Pavie, de retour du
Cambodge; M. de Chabannes, qui arrive du
Laos ; M. de Llamby, qui a fait récemment un
tour en Birmanie ; M. de Vossion, ancien con-
sul à Mandalay, qui parle toutes les langues
de l'Indo-Chine; le prince Gedroycz, l'explo-
rateur du Daghestan ; MM. de La Tour et E. de
de Lagrené, etc., etc.
En additionnant le nombre des kilomètres
parcourus par ses invités, M. Ney a trouvé
sept fois le tour de la terre et ceux-ci ne
comptent pas s'arrêter en si bon chemin.
«
* *
UN NOUVEAU CONFRÈRE. — En atten-
dant, tel est le titre d'un nouveau journal
hebdomadaire dont le numéro spécimen vient
d'être lancé. Ce titre, un peu baroque, de-
mande à être expliqué. Voici :
On sait que chez messieurs les artistes ca-
pillaires les clients sont parfois obligés de
patienter un certain temps avant d'être exé-
cutés selon les règles. C'est pour leur per-
mettre d'attendre sans trop s'ennuyer que le
journal en question a été créé. Bon succès
à la nouvelle feuille, si elle doit nous faire
paraître moins longue la « petite minute »
de nos figaros modernes.
*
+ *
LA DÉCORATION DE L'HOTEL DE
VILLk, — Les décorateurs poursuivent l'a-
ménagement des salons de réception de l'Hô-
tel de Ville.
La grande salle des fêtes n'a pas été modi-
fiée ; mais la salle des banquets est un peu
plus avancée. Elle est revêtue de hautes boi-
series en chêne ciré dont les panneaux sculp-
tés sont ornés de proues de navires, de colon-
nes cannelées et de guirlandes de fruits. Le
plafond, qu'orneront ultérieurement des pein-
tures allégoriques, est peint en ton de chêne
et agrémenté de fruits, d'animaux blanc et or.
Les murs sont également décorés d'animaux,
d'attributs et de trophées de chasse et de pê-
che sur fond rouge. Des statues placées en-
tre les colonnes complèteront cet ensem-
ble.
Du côté du quai, la décoration des trois
grands salons est presque achevée, sauf les
plafonds réservés pour la peinture d'histoire.
Le salon du centre est consacré aux arts, ce-
lui de droite aux lettres et celui de gauche
aux sciences. On sait qu'en outre chacune de
ces pièces doit être décorée de médaillons de
personnages dont la liste sera arrêtée par le
conseil municipal.
Dans le projet soumis au conseil, on met-
trait dans le salon dit des Sciences les médail-
lons d'Arago, d'Ampère, de J.-B. Dumas et de
Claude Bernard. Dans le salon dit des Lettres, il
y aurait ceux de Victor Hugo, Lamartine, Lit-
tré et Michelet; enfin, dans celui des Arts,
ceux de Herold, Ingres et Rude.
*
* *
M. PASTEUR ET LE TRAITEMENT DE
LA RAGE. — A la suite de l'initiative, prise
par la ville du Havre, du vote d'un crédit
pour le traitement de la rage et de la ré-
ponse de M. Pasteur à la municipalité, M. le
préfet de la Seine-Inférieure a adressé à M.
Pasteur la lettre suivante :
« Rouen, 21 novembre 1885.
» Monsieur et illustre maître,
» Mon administration serait très désireuse
de mettre les malheureux qui, chaque année,
sont atteints par des chiens enragés, à même
de profiter de votre admirable découverte, et
je me préoccupe des moyens à employer
dans ce but ; je crois devoir, avant toutes
choses, prendre vos conseils et m'assurer vo-
tre concours.
» J'ai, en conséquence, l'honneur de vous
demander si vous seriez disposé à recevoir à
Paris ceux de nos compatriotes qui feraient
appel à votre ministère. Je proposerais au
département d'ouvrir un crédit pour assurer
les frais de voyage et de séjour des malheu-
reux.
» Veuillez agréer, etc.
» Le préfet de la Seine-Inférieure,
» Signé : E. HENDLÉ. »
M. le préfet a reçu de',dll. Pasteur la ré-
ponse suivante : ■■jÉÊk
« Paris, 22 novembre.
» Monsieur le préfet,
» J'approuve de tous points les mesures
que vous projetez. Je me mets à la disposition
de tous vos indigents mordus par des chiens
enragés. Je les ferai placer dans des hôtels
du voisinage de mon laboratoire, qui en ont
reçu déjà et en logent plusieurs présente-
ment.
» Vous serez certainement imité par les au-
tres préfets. Les sommes votées seront em-
ployées ou non, selon les circonstances.
» Recevez, etc.
» L. PASTEUR. »
«
* *
UN ANNIVERSAIRE. — A l'occasion de
l'anniversaire du combat d'Epinay-sur-Seine
du 30 novembre 1870, le conseil municipal de
cette localité, accompagné de la subdivision
des sapeurs-pompiers, de la fanfare de la
commune et de plusieurs Sociétés de Saint-
Denis, se rendra dimanche prochain sur les
tombes des enfants de Paris, des soldats et
marins morts pour la patrie, afin d'y déposer
des couronnes.
Les habitants d'Epinay et des communes
environnantes, ainsi que les parents, amis et
compagnons d'armes, sont invités à assister
à cette patriotique cérémonie qui aura lieu
à deux heures précises.
*
*el
LES VENTES D'AUTOGRAPHES. - Une
vente d'autographes de compositeurs de mu-
sique et d'artistes a eu lieu mardi à l'hôtel
Drouoi. Voici quelques-unes das enchères :
Une lettre de Bizet, 30 fr.; de Chopin, 39 fr.;
de Donizetti, 15 fr.; de Gounod, 5 fr.; de Ch.
Lecocq, 11 fr.; de Liszt, 12 fr.; de Massenet,
5 fr.; de Meyerbeer, 10 fr.; de Rossini, 20 fr.;
de Rubinstein, 15 fr.; de Saint-Saëns, 15 fr.;
d'Ambroise Thomas, 6 fr.; de Richard Wag-
ner, 82 fr.
Une lettre de Sarah Bernhardt, 16 fr.; d'Au-
gustine Brohan, 16 fr. ; d'Emilie Broisat, 10 fr.;
de Coquelin aîné, 10 fr.; de CIoizette, 20 fr.;
de Desclée, 20 fr.; de Doche, 10 fr.; de Marie
Dorval, 21 fr.; de Got, 11 fr.; de Judic, 20 fr.;
de Frédérick Lemaître, 30 fr.; de Mlle Mars,21
fr.;de Nillson, 10 fr.; de Dica-Petit, 20 fr.; de
Rachel, 24 fr.; de Talma, 10 fr.; une épître
de Mlle Marie Van Zandt, 19 fr.; une lettre
d'amour de Déjazet, 5Q fr.
Une lettre de M. Henri Rochefort deman-
dant un loge au directeur de l'Odéon : « Si
vous tenez à avoir un jour votre statue
équestre sur la place de l'Odéon, ne refusez
pas ! » 6 fr.
Une lettre de Gambetta, 100 fr.
*
LES JARDINS SUSPENDUS. — Que de
fois n'a-t-on pas appelé Paris la Babylone
moderne! Ce cliché prudhommesque va se
trouver justifié, dit-on. Un architecte aurait
trouvé le moyen de remplacer les toitures de
nos maisons par des jardins où, pendant la
bonne saison, le Parisien pourrait respirer
les senteurs embaumées des plantes rares, à
l'ombre des arbustes les plus gracieux.
Ce nouveau système est, paraît-il, d'une
application très facile et ne donne aucune hu-
midité aux maisons.
On assure que vingt Immeubles vont être
ainsi transformés à bref délai.
Les malfaiteurs qui ont l'habitude de se
promener sur les toits doivent être dans la
jubilation.
«
* *
DÉCOUVERTE D'UN «RAPHAEL ».- Le
Courrier de Meurthe-et-Moselle annonce qu'un
professeur de l'université de Lausanne vient
de découvrir un tableau de Raphaël.
Ce tableau, la Vierge au sein, 1510, signé,
est exposé au musée de Nancy.
La signature n'est pas une preuve d'authen-
ticité. Les Raphaël du Louvre ne sont pas
signés.
Pourvu que nous ne nous trouvions pas en
face de l'œuvre d'un faussaire qui, par excès
de zèle, aura cru devoir ajouter un paraphe à
son petit travail 1
CHRONIOE PARISIENNE
FRÈRE JEAN
Je n'aime pas bien la littérature fa-
cile qui consiste à manger quotidienne-
ment du prêtre et ne fais pas difficulté
de reconnaître qu'il est, parmi les mi-
nistres du culte catholique, nombre de
braves gens qui bataillent de leur mieux
contre les tentations de la chair. Mal-
heureusement l'abbé Maret, de libidi-
neuse mémoire, n'a pas bâti sur le sable.
Il a laissé des disciples qui vont partout
répandant la saine doctrine du maître.
Voici que les frères ignorantins se mê-
lent de la fête et entrent dans la danse.
On sait, en effet, que M. Duranton, com-
missaire de police, rigide observateur
de la loi, a fait appréhender au corps,
par deux agents de la sûreté, et con-
duire au Dépôt, où il a été écroué, Jean
Médard, dit frère Jean, coupable d'avoir
violé un pauvre petit être à peine âgé
de douze ans 1
Ce n'est pas, on me fera l'honneur de
le croire, pour le banal plaisir de con-
ter les menus détails de cet acte infâme
et de délayer un fait divers que je re-
viens sur cette affaire qui, si doulou-
reuse qu'elle soit, n'a pas les allures
d'une grande cause. Puis il est des su-
jets qu'il ne faut traiter que d'une plume
légère, car j'imagine aisément la dou-
leur qui, à cette heure même, doit poi-
gner une famille. Au surplus, je ne veux
retenir que l'acte infâme de ce drôle
qui, vivant au milieu des étranges pro-
miscuités d'une réunion d'adolescents,
ivre de désirs, n'a pas su dominer ses
sens, et que sa chair révoltée a dégradé
pour jamais.
Certes, je devine ce qu'appelle de
pitié le sort de ces infortunés condam-
nés au célibat à perpétuité. Avoir vingt
ans, des reins d athlète, un appétit de
terrassier, et être irrévocablement con-
damné à comprimer tout son être, à
s'isoler dans ses macérations, à passer
dans le monde des vivants comme un
Tantale. voilà qui dépasse les forces
de l'humaine nature, n'est-il pas vrai?
Quoi 1 l'humanité considère comme cho-
ses saintes l'amour, la famille, la pa-
ternité, et lui, prêtre, sans rien savoir
et connaître, il s'est interdit tout cela!
Dans le jardin terrestre, il est un fruit
savoureux entre tous. Il verra les autres
y mordre tour à tour : lui seul n'y por-
tera pas les dents! Et comme si ce
n'était pas assez pour le prêtre d'être
spectateur, le voilà qui par la confes-
sion devient confident. Etonnez-vous
après cela que cet homme ait d'incoerci-
bles ruts de mâle, en dépit du cilice,
des oraisons au pied de l'autel et du
camphre de la couchette.
Il est clair que je n'ai pas qualité pour
traiter, en deux cents lignes, la grosse
question du célibat des prêtres que
Balzac appelait une « admirable mons-
truosité ». Mais au risque de heurter,
en cette occurrence, bien des opinions
franches et désintéressées, j'avouerai
tout net que le mariage des prêtres im-
plique en soi contradiction. N'oublions
pas que le prêtre dispose de la confes-
sion. Or ce seul fait, à mon humble
avis, dénature, corrompt, détruit sa
qualité de citoyen et le met pour ainsi
dire hors la loi. Prêtre à marier, il peut
du fond de son confessionnal se prépa-
rer à loisir une épouse et arranger son
mariage futur. Il y consacrera dix ans,
quinze ans s'il le faut, il y réussira
parce qu'il est prêtre. Qu'auront à lui
refuser ces pères dont il aura confessé
la femme et les enfants? Et que de-
viendraient alors l'autorité et la sécu-
rité des familles ? Ah ! si la religion ca-
tholique voulait se passer de la confes-
sion!.
La confession ! c'est de là, n'en dou-
tez pas, que nous vient tout le mal. Elle
est si monstrueuse, cette façon d'ensei-
gner aux jeunes séminaristes l'art de
la confession ! Je sais tel manuel de
confesseur, en usage dans les grands
séminaires, dont la lecture ferait rougir
une caserne de zouaves ou de zéphyrs.
Il ne s'agit pas, vous m'entendez bien,
de cet Examen de conscience qu'on re-
met aux petits garçons et aux petites
filles, et qui contient des demandes aux-
quelles les enfants se bornent à faire
des réponses. Il s'agit de la manière
dont le confesseur doit interroger les
pénitents et les pénitentes. Tudieu 1
quelle science du mal !
Le doux pasteur, dans ces Diaconales,
compte six espèces de luxure. Il aborde
de telles particularités et s'abandonne
à une telle technicité de langage que je
renonce véritablement à citer aucun
passage. Ces choses-là ne peuvent guère
s'imprimer que dans les librairies catho-
liques. C'est à faire dresser les cheveux
sur la tête. Mgr Bouvier cite certains
cas où la femme doit rendre le devoir
conjugal les yeux fermés et les dents
serrées, et commet un péché mortel si
elle éprouve l'ombre d'une sensation.
C'est simplement iernoble.
En vérité, je suis tout honteux et la
prose de ce prélat éveille en moi des
pudeurs insoupçonnées jusqu'à ce jour.
C'est l'œuvre d'une imagination folle de
luxure, je ne crains pas de l'affirmer.
Il va de soi que je passe sous silence
d'autres poins infâmes qui me permet-
traient de prouver que ces monita se-
creta qu'on confie encore aux jeunes
ecclésiastiques sont peut-être la cause
des débauches de leur imagination.
Mais si jamais notre professeur de
philosophie nous avait pincés lisant un
livre aussi immonde, il se serait fait un
devoir de nous renvoyer pour cause
d'immoralité ! Il n'y a pas ici de pas-
sion politique en jeu. Je le répète, je ne
suis pas un mangeur de prêtres, mais
j'ai le cœur soulevé de dégoût par la
lecture de ces Diaconales que l'on re-
met à des enfants de dix-huit ans, en-
fants à qui l'on fait en même temps prê-
ter serment de chasteté. Ne sentez-vous
donc pas, prélats, a dit naguère un maî-
tre en chroniques, que faire lire de pa-
reilles ordures à de jeunes séminaristes,
c'est leur mettre le feu dans la cervelle
et dans les veines? Ne sentez-vous donc
pas que vous préparez ainsi une géné-
ration de violeurs de petites filles et de
petits garçons? Puis vous venez crier
bien haut que la Religieuse de Diderot
est une invention abominable ! Et vous
applaudissez quand un tribunal de tar-
tufes condamne Sue, Flaubert, Barbey,
Richepin ! Eh bien ! vous n'êtes pas dé-
nués d'aplomb, mes maîtres !
9
* *
Il me faut ajouter un mot au sujet du
médecin de l'établissement d'Issy qui,
voyant une éruption de boutons mar-
brant la poitrine de l'enfant, a déclaré
que le malheureux petit être avait la
« rougeole ».
Que le reporter qui a, le premier,
rendu compte de ce scandale souffre
que je le lui dise, il a failli à sa mission.
Il est des cas où l'indiscrétion est le pre-
mier des devoirs. Il fallait découvrir le
nom et l'adresse de ce singulier prati-
cien. Nous nous serions fait un plaisir
d'imprimer ce nom et cette adresse en
lettres majuscules. Il est véritablement
fâcheux que ce docteur ait jugé conve-
nable de garder l'anonyme et se soit
dérobé ainsi avec une modestie bien
rare de nos jours à l'ovation sur la-
quelle il était en droit de compter. Dieu
me garde de railler les médecins ! Ils
sont en mesure de se venger si aisé-
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iHongrols 79 15/16, 80 1/16.
Priorité 355.
SOMMAIRE
Dernière heure.
Question du jour (les Colonies). — HENRY
FOUQUIER.
ïonvnée de Paris.
Ch ronique parisienne (Frère Jean).—ALBERT
DUBRUJEAUD.
informations particulières.
Les Fournitures de l'Etat. — LÉo BmoN.
Nouvelles coloniales.
La Guerre. — Louis HENRIQUE.
Dépêches.
Bulletin de l'étranger.
Informations.
Revue de la presse. — NACHBTTB.
La Température.
Courrier de la Bourse. — H. La FA OR*.
Tribunaux. — M* GERVASY.
Faits divers. — JEAN VALUÈRE.
Soirées parisiennes. — EMILE MBNDBL.
Courrier des théâtres. — GEORGES FEYDEAU.
Chronique scientifique. — Dr V. Du CLAux.
DERNIÈRE HEURE
MORT DU ROI D'ESPAGNE
L'ambassade d'Espagne a reçu à neuf
heiires le télégramme suivant :
« El Pardo, 25 novembre.
» Sa Majesté le roi est mort ce matin.
» Le cabinet a présenté à la reine ré-
gente sa démission.
» Les ministres continueront leurs fonc-
tions en attendant la décision que la reine
régente voudra bien prendre. »
Hendaye, 25 novembre.
Les nouvelles de Madrid venues par le
courrier disent que les troupes sont con-
signées dans les casernes.
M. Canovas et le ministre de la guerre
sont restés à Madrid pour parer à toutes
les éventualités.
On craint un soulèvement carliste dans
les provinces du Nord.
Alphonse XII était né à Madrid le 20 no-
vembre 1857, de la reine Isabelle et de
François d'Assise. Il avait donc onze ans
quand, en 1868, sa mère fut renversée du
trône. Alphonse vint à Paris avec son
père et M. Marfori dont il subit la disci-
pline mystique.
Le 25 juin 1870, à l'hôtel Basilewski, sa
mère abdiqua en sa faveur et il fut salué
roi sous le nom d'Alphonse XII par quel-
ques membres influents de son parti.
Le jeune prétendant continua ses études
à Vienne et à Chislehurst où il devint le
camarade du prince impérial. Le lor dé-
cembre 1874, il publia un manifeste, et le
30 décembre un pronunciamiento l'appe-
lait au trône d'Espagne.
Il prit pour chef de cabinet M. Canovas
del Castillo, et, pour son premier acte,
augmenta le budget des cultes, tout en
déclarant qu'il avait l'intention de garantir
la liberté de conscience comme dans les
autres Etats de l'Europe.
Alphonse XII eut à réduire l'insurrec-
tion carliste. Après la soumission de Ca-
brera, les généraux Jovellar et Martinez
Campos prirent Estella (février 1876) et
forcèrent à la fuite don Carlos.
En 1876, après avoir expulsé Marfori,
le roi Alphonse autorisa sa mère à rentrer
en Espagne. On connait les derniers évé-
nements de son règne, ses deux ma-
riages avec la princesse Mercédès et l'ar-
chiduchesse d'Autriche, son voyage à
Paris et sa fière attitude dans le conflit
hispano-allemand.
Le roi Alphonse ne laisse qu'une fille,
qui a cinq ans.
On sait que la reine d'Espagne se trouve
en ce moment dans une position intéres-
sante.
-
L'opinion à Madrid
Madrid, 25 novembre.
L'opinion publique est très alarmée.
On dit qu'au cas où la reine d'Espagne
prendrait la régence en Espagne, le géné-
ral Martinez-Campos serait chargé de for-
mer un nouveau ministère où dominerait
l'élément militaire, pour faire face aux
républicains et aux carlistes qui s'agitent
beaucoup dans toute la péninsule.
En Serbie
Semlin, 25 novembre.
Le bruit court que la division du centre,
conduite par le roi Milan, a repris hier
l'offensive et a réoccupé les positions de
Dragoman ; mais cette nouvelle n'est pas
encore confirmée.
Le ministre de Russie a demandé hier soir
à ses collègues, réunis à la légation autri-
chienne, de proposer un armistice aux
combattants. Tous ont accepté, et une pro-
position dans ce sens a été transmise aux
quartiers généraux serbes et bulgares.
La eonférence
Constantinople, 25 novembre.
La conférence s'est de nouveau ajour-
née à demain, sir W. White refusant de
signer, faute d'instructions, le protocole
relatif à l'envoi d'un commissaire en Rou-
mélie. L'on n'a aucune certitude que sir
W. White signera demain.
QUESTION DU JOUR
Les colonies
M. Camille Pelletan et M. Laguerre,
ces temps-ci, ont déclaré, à propos de
je ne sais quel vote où la Droite et la
Gauche progressiste ont été d'accord,
que rien n'était plus immoral que les
coalitions. Et, quand il s'agit d'une
question de première importance, dont
la solution touche non seulement à l'exis-
tence du cabinet, ce qui nous est fort
égal, mais à l'intégrité matérielle et
morale, à l'intérêt et à l'honneur du
pays, l'Extrême-Gauche trouve tout na-
turel de se coaliser, par une entente
préalable, avec les adversaires de la
République ! On voit alors se former ces
bureaux, dont nous avons, donné hier
la composition, où sont réunis, sur une
même liste, MM. Pelletan, Rochefort et
Bergerot, MM. Granet et Delafosse,
MM. G. Perin et l'amiral de Gueydon,
ce marin que la Suisse nous envie ! La
seule consolation que nous trouvions à
ce beau spectacle, c'est de voir certains
radicaux, qui ont fait la campagne élec-
torale sur un programme hostile à la
politique coloniale, renier ce programme
dans un mouvement d'honnêteté d'esprit
qui nous touche, encore que tardif. Tel
est M. Peytral, qui a fait campagne avec
MM. Granet et Antide Boyer, et qui, au-
jourd'hui, défend les crédits demandés
tout juste par les arguments que ses ad-
versaires invoquaient et faisaient valoir,
quand on n'étouffait pas leur voix sous
les cris de : « Tonkinois ! » adressés à
quiconque avait le courage de parler en
bon Français !
Mais les amères satisfactions que
donnent les palinodies constatées, les
haines démasquées, les ambitions écla-
tant d'un coup, satisfactions qui ne tou-
chent que les moralistes, ne sauraient
compenser les tristesses et les inquié-
tudes que nous cause la situation. A
moins que la Chambre ne se déjuge en
séance publique, ce qui n'est pas impos-
sible, mais ce qui ne paraît pas proba-
ble, la crise ministérielle est ouverte.
C'est en vain qu'on a voulu l'ajourner,
et je persiste à regretter que la question
de confiance n'ait pas été Dosée dès le
premier moment, après l'élection. C'é-
tait du temps de gagné. Quoi qu'il en
soit, la crise est arrivée, après les pa-
roles très nettes, très sages, très hono-
rables qu'a prononcées M. Brisson. On
a remarqué le contraste de ce langage
avec celui de M. Goblet. M. le ministre
de l'instruction publique, etc., etc., a
commencé par se taire. Il a fallu qu'on
l'interrogeât pour le décider à parler ;
et il a, avec une adresse un peu grosse
dont son austérité s'accommode, racom-
modant avec du fil blanc les accrocs de
l'habit ministériel collé à sa peau, tout
fait pour ne pas répondre, pour ne pas
se faire solidaire de M. Brisson, en es-
sayant de montrer que le protectorat du
Tonkin était une chose ou une autre se-
lon que M. Goblet était ministre ou pas.
Vaines habiletés! Inutiles subterfuges 1
Les journaux les plus sérieux de l'opi-
nion républicaine sont unanimes sur ce
point : que la Chambre doit décider s'il
y a une politique coloniale à suivre ou à
abandonner. Et si l'abandon est voté,
c'est bien le moins que la responsabi-
lité de l'exécution incombe à qui aura
pris celle du principe! Pour une fois
que, par hasard, la Chambre fait de
l'histoire, il ne faut pas qu'elle trompe
l'historien futur. Et si j'espère encore
dans la séance publique, c'est parce
que la Droite, qui voudrait bien compro-
mettre la République, sera mise en face
de l'action qu'on lui demande d'accom-
plir, et se rappellera peut-être que l'a-
bandon de l'Inde, celui du Canada, celui
de la Louisiane ont été chèrement ex-
piés !
Assez d'atermoiements! Il faut que
l'explication soit solennelle devant le
pays. D'abord, laissons une bonne fois
de côté les euphémismes ridicules au
milieu desquels on se débat depuis des
mois.« Liquider honorablement, » comme
le demande M. Granet, songeant à res-
ter possible en tout cas, est un vain mot.
On peut souhaiter, si on occupe une co-
lonie, avoir peu d'efforts à faire pour s'y
maintenir ; on peut ne pas chercher les
conflits; mais on ne peut pas répondre
qu'il n'en naîtra pas. Et que dirons-
nous, d'ailleurs, à la Chine, si elle nous
demande de tenir nos engagements et
de pacifier 1 es pays du protectorat? De-
manderons-nous aux mandarins de se
contenter de 45 0/0 de nos promesses?
Est-ce là ce que M. Granet appelle « li-
quider honorablement », en évitant la
faillite avérée par le concordat de créan-
ciers indulgents? Non. Tout ceci est
misérable et indigne de nous : ou bien
l'organisation de nos colonies, avec
l'aléa que comporte l'opération ; ou bien
que l'Extrême-Gauche et la Droite, coa-
lisées, aient le courage de vouloir l'aban-
don, d'émettre un de ces votes que l'on
applaudira peut-être sur l'heure, mais
qu'on maudira avant six mois !
Voilà ce que nous attendons de la,
discussion publique. La campagne élec-
torale a été la campagne de la peur, de
l'abaissement. On a nié, devant ce no-
ble pays, devant les souvenirs de ses
armées vaillantes, les gloires fécondes
de l'aventure, les grandeurs, fécondes
aussi, quoique la moisson s'en lève plus
tard, du sacrifice sanglant de la guerre.
On a prêché sur tous les tons qu'il n'y
avait pas de question d'honneur pour
les peuples, et que nous ne nous en por-
tions pas plus mal pour voir, à Langson,
les dragons des enseignes chinoises
nous tirer la langue! On a fait cette
chose tout à fait nouvelle chez nous : la
paix à tout prix populaire. Car je ne
m'illusionne pas sur l'état des esprits.
L'intérêt palpable, immédiat, le gros
sou d'aujourd'hui y prévaut sur l'intérêt
plus abstrait, sur l'utilité à une échéance
un peu incertaine, sur la pièce d'or de
demain. On nous donne en exemple les
guerres anglaises, simples opérations
commerciales. On a réussi, pour le mo-
ment, à brouiller la démocratie avec
toute sorte d'idéal. Soit.
A parler franc, cela ne nous inquiète
pas pour longtemps. Nous ne pensons
pas que la Gaule, la Gaule conquérante
qui pousse ses fils jusqu'en Grèce et en
Asie, que la France de Dupleix, deMont-
calm, et de ce La Salle qui conquit la
Louisiane avec deux mille hommes, la
Louisiane que Napoléon vendit ouatre-
vingt millions et qui en rapporte peut-
être deux cents aujourd'hui; nous ne
pensons pas que la France de Kléber et
de Bugeaud, quand l'Europe entière
veut des colonies, reste longtemps sous
le coup de l'abandon d'une terre où son
drapeau a flotté! Ce drapeau qui, rouge
oriflamme, fleurdelysé ou tricolore, a
fait le tour du monde, qu'on l'enterre
donc aujourd'hui, comme dans un drame
que nous venons de voir. Ceux qui fe-
ront cette besogne ne jetteront dessus
pas assez de terre ou de boue, que la
hampe ne sorte encore du sol pour être
reprise un jour par des mains plus vi-
goureuses, et à l'applaudissement du
pays. Car notre France est, je pense,
comme ces femmes qui, si vous avez
une querelle, vous supplient de ne pas
vous battre, mais qui vous feraient payer
cher le soufflet gardé et l'injure laissée
sans vengeance !
HENRY FOUQUIER.
LA JOURNEE DE PARIS
COURSES A AUTEUIL. - Aujourd'hui, à
deux heures, courses à Auteuil.
Voici les appréciations de notre collabora-
teur Favelles :
Prix des Veneurs : Mick ou Séville,
Prix du Brasero : Bonbon ou Palamède.
Prix des Glacières : Josaphat ou Vaugirard.
Prix Doublon : Verdier ou Printemps.
n
* *
ASSEMBLEE GÉNÉRALE DE L'ASSO-
CIATION DES JOURNALISTES PARI-
SIENS. — L'Association des journalistes pa-
risiens a tenu hier soir au Grand-Hôtel, salle
du Zodiaque, son assemblée générale an-
nuelle. Après avoir entendu le rapport de M.
Paul Foucher, secrétaire, et celui de M. Du-
guiès, trésorier de l'Association, l'assemblée
général a adopté, en leur faisant subir quel-
ques modifications, les projets de statuts nou-
veaux et de règlement intérieur qui avaient
été soumis aux membres de l'Association.
Elle a ensuite procédé au renouvellement
de son comité. Ont été élus :
MM. Buloz (Revue des Deux Mondes).
Albert Delpit (Paris).
Joseph Denais (Défense).
Henri Duguiès (Messager de Paris).
Alfred Edwards (Matin).
Paul Foucher (National).
Henry Fouquier (XIXO Siècle).
Louis Gai (Liberté).
Denis Guibert (Patrie).
Edouard Hervé (Soteil).
, Gaston Jollivet (Figaro).
G. de Léris (Moniteur universel).
Eugène Liébert (Gagne-Petit).
Marinoni (Petit Journal).
Charles de Mazade (Revue des Deux
Mondes).
Paul Meurice (Rappel).
Arthur Meyer (Gaulois).
Alfred Mézières (Temps).
L'assemblée a voté des remerciements à
M. Ph. Jourde et à ses collègues du Syndicat
de la presse parisienne. Elle en a voté égale-
ment à M. Edouard Lebey et au comité sor-
tant, pour le concours dévoué qu'ils ont
donné à l'As sociation pendant l'exercice écoulé.
*
* *
L'UNION DES FEMMES DE FRANCE.-
Hier, à quatre heures, a eu lieu la séance
solennelle d'inauguration de la salle des con-
férences de l'Union des femmes de France,
29, rue de la Chaussée-d'Antin.
Bien avant l'ouverture de la séance, le local
était rempli par des dames dont beaucoup
en toilette très élégante, portant toutes sur
la poitrine le ruban de la Société, blanc à
liséré vert, avec la croix rouge des hospi-
taliers.
Sur l'estrade d'honneur, on remarquait :
Mmes Goudchaux, Périssé, Dislère, Miot, de
La Bédollière, etc.
Du côté des hommes : MM. Rochard, ins-
pecteur général du service de santé de la ma-
rine, membre de l'Académie de médecine ; le
docteur Bouloumié, le capitaine Josse, repré-
sentant le ministre de la guerre ; les géné-
raux Grenier et Péan, le comte Sérurier, M.
Kœchlin-Schwartz, maire du huitième arron-
dissement, etc.
La séance a été ouverte par un discours
intéressant du docteur Rochard, dans lequel
il a fait un exposé des services déjà rendus
par l'OEuvre et démontré que, si certaines
personnes contestent l'utilité du concours ap-
porté à l'Etat par les Sociétés de ce genre, il
produit pourtant les meilleurs résultats.
Les envois faits par l'Union des femmes de
France, et composés avec toute la sollicitude
de mères qui gâtent leurs enfants, sont re-
çus avec la plus vive reconnaissance par les
malades et les blessés de nos armées au Ton-
kin, en Cochinchine, à Madagascar.
L'orateur a cité un fait curieux et des plus
probants.
Quelques cas de scorbut avaient éclaté
dans les troupes d'occupation de Madagas-
car.
o. Le docteur Rochard, qui connaît parfaite-
ment les ressources de l'île, écrivit à l'a-
miral commandant nos forces, pour lui ex-
primer son étonnement de voir éclater cette
maladie lorsque le pays regorge de vivres et
de légumes frais.
« Ce que vous m'écrivez est juste en temps
de paix, lui répondit-on ; mais, depuis la
guerre, il n'en est plus ainsi, et, quand une
botte de radis parait sur la table de l'amiral,
le factionnaire lui présente les armes. »
Grâce aux envois des Femmes de France,
cette situation changea bientôt : les légumes
frais expédiés de la Réunion abondèrent au
camp français, et le scorbut ne tarda pas à
disparaître.
Passant ensuite au rôle que jouerait l'Union
des femmes dans une guerre européenne, le
docteur Rochard a cherché à donner à ses au-
ditrices une idée des souffrances qu'elles au-
raient à soulager.
Dans la dernière guerre franco-allemande,
nous avons eu 145,000 blessés et près d'un
million de malades.
Faisant appel à ses souvenirs de la guerre
de 1870-71, le docteur trace un tableau saisis-
sant de l'arrivée des trains de blessés de l'ar-
mée de la Loire à Brest où il dirigeait le ser-
vice de santé.
Le docteur Bouloumié a clos la séance et
relatant l'extension prise par l'Union des fem-
mes de France et en remerciant tous les hauts
personnages qui ont aidé à son développe-
ment.
*
* *
UN DINER SCIENTIFIQUE. — M. Napo-
léon Ney vient de réunir en un dîner quel-
ques-uns des « voyageurs» de passage à Pa-
ris.
A la table avaient pris place, avec M. de
Brazza, nos explorateurs les plus connus et
quelques intimes : M. Pavie, de retour du
Cambodge; M. de Chabannes, qui arrive du
Laos ; M. de Llamby, qui a fait récemment un
tour en Birmanie ; M. de Vossion, ancien con-
sul à Mandalay, qui parle toutes les langues
de l'Indo-Chine; le prince Gedroycz, l'explo-
rateur du Daghestan ; MM. de La Tour et E. de
de Lagrené, etc., etc.
En additionnant le nombre des kilomètres
parcourus par ses invités, M. Ney a trouvé
sept fois le tour de la terre et ceux-ci ne
comptent pas s'arrêter en si bon chemin.
«
* *
UN NOUVEAU CONFRÈRE. — En atten-
dant, tel est le titre d'un nouveau journal
hebdomadaire dont le numéro spécimen vient
d'être lancé. Ce titre, un peu baroque, de-
mande à être expliqué. Voici :
On sait que chez messieurs les artistes ca-
pillaires les clients sont parfois obligés de
patienter un certain temps avant d'être exé-
cutés selon les règles. C'est pour leur per-
mettre d'attendre sans trop s'ennuyer que le
journal en question a été créé. Bon succès
à la nouvelle feuille, si elle doit nous faire
paraître moins longue la « petite minute »
de nos figaros modernes.
*
+ *
LA DÉCORATION DE L'HOTEL DE
VILLk, — Les décorateurs poursuivent l'a-
ménagement des salons de réception de l'Hô-
tel de Ville.
La grande salle des fêtes n'a pas été modi-
fiée ; mais la salle des banquets est un peu
plus avancée. Elle est revêtue de hautes boi-
series en chêne ciré dont les panneaux sculp-
tés sont ornés de proues de navires, de colon-
nes cannelées et de guirlandes de fruits. Le
plafond, qu'orneront ultérieurement des pein-
tures allégoriques, est peint en ton de chêne
et agrémenté de fruits, d'animaux blanc et or.
Les murs sont également décorés d'animaux,
d'attributs et de trophées de chasse et de pê-
che sur fond rouge. Des statues placées en-
tre les colonnes complèteront cet ensem-
ble.
Du côté du quai, la décoration des trois
grands salons est presque achevée, sauf les
plafonds réservés pour la peinture d'histoire.
Le salon du centre est consacré aux arts, ce-
lui de droite aux lettres et celui de gauche
aux sciences. On sait qu'en outre chacune de
ces pièces doit être décorée de médaillons de
personnages dont la liste sera arrêtée par le
conseil municipal.
Dans le projet soumis au conseil, on met-
trait dans le salon dit des Sciences les médail-
lons d'Arago, d'Ampère, de J.-B. Dumas et de
Claude Bernard. Dans le salon dit des Lettres, il
y aurait ceux de Victor Hugo, Lamartine, Lit-
tré et Michelet; enfin, dans celui des Arts,
ceux de Herold, Ingres et Rude.
*
* *
M. PASTEUR ET LE TRAITEMENT DE
LA RAGE. — A la suite de l'initiative, prise
par la ville du Havre, du vote d'un crédit
pour le traitement de la rage et de la ré-
ponse de M. Pasteur à la municipalité, M. le
préfet de la Seine-Inférieure a adressé à M.
Pasteur la lettre suivante :
« Rouen, 21 novembre 1885.
» Monsieur et illustre maître,
» Mon administration serait très désireuse
de mettre les malheureux qui, chaque année,
sont atteints par des chiens enragés, à même
de profiter de votre admirable découverte, et
je me préoccupe des moyens à employer
dans ce but ; je crois devoir, avant toutes
choses, prendre vos conseils et m'assurer vo-
tre concours.
» J'ai, en conséquence, l'honneur de vous
demander si vous seriez disposé à recevoir à
Paris ceux de nos compatriotes qui feraient
appel à votre ministère. Je proposerais au
département d'ouvrir un crédit pour assurer
les frais de voyage et de séjour des malheu-
reux.
» Veuillez agréer, etc.
» Le préfet de la Seine-Inférieure,
» Signé : E. HENDLÉ. »
M. le préfet a reçu de',dll. Pasteur la ré-
ponse suivante : ■■jÉÊk
« Paris, 22 novembre.
» Monsieur le préfet,
» J'approuve de tous points les mesures
que vous projetez. Je me mets à la disposition
de tous vos indigents mordus par des chiens
enragés. Je les ferai placer dans des hôtels
du voisinage de mon laboratoire, qui en ont
reçu déjà et en logent plusieurs présente-
ment.
» Vous serez certainement imité par les au-
tres préfets. Les sommes votées seront em-
ployées ou non, selon les circonstances.
» Recevez, etc.
» L. PASTEUR. »
«
* *
UN ANNIVERSAIRE. — A l'occasion de
l'anniversaire du combat d'Epinay-sur-Seine
du 30 novembre 1870, le conseil municipal de
cette localité, accompagné de la subdivision
des sapeurs-pompiers, de la fanfare de la
commune et de plusieurs Sociétés de Saint-
Denis, se rendra dimanche prochain sur les
tombes des enfants de Paris, des soldats et
marins morts pour la patrie, afin d'y déposer
des couronnes.
Les habitants d'Epinay et des communes
environnantes, ainsi que les parents, amis et
compagnons d'armes, sont invités à assister
à cette patriotique cérémonie qui aura lieu
à deux heures précises.
*
*el
LES VENTES D'AUTOGRAPHES. - Une
vente d'autographes de compositeurs de mu-
sique et d'artistes a eu lieu mardi à l'hôtel
Drouoi. Voici quelques-unes das enchères :
Une lettre de Bizet, 30 fr.; de Chopin, 39 fr.;
de Donizetti, 15 fr.; de Gounod, 5 fr.; de Ch.
Lecocq, 11 fr.; de Liszt, 12 fr.; de Massenet,
5 fr.; de Meyerbeer, 10 fr.; de Rossini, 20 fr.;
de Rubinstein, 15 fr.; de Saint-Saëns, 15 fr.;
d'Ambroise Thomas, 6 fr.; de Richard Wag-
ner, 82 fr.
Une lettre de Sarah Bernhardt, 16 fr.; d'Au-
gustine Brohan, 16 fr. ; d'Emilie Broisat, 10 fr.;
de Coquelin aîné, 10 fr.; de CIoizette, 20 fr.;
de Desclée, 20 fr.; de Doche, 10 fr.; de Marie
Dorval, 21 fr.; de Got, 11 fr.; de Judic, 20 fr.;
de Frédérick Lemaître, 30 fr.; de Mlle Mars,21
fr.;de Nillson, 10 fr.; de Dica-Petit, 20 fr.; de
Rachel, 24 fr.; de Talma, 10 fr.; une épître
de Mlle Marie Van Zandt, 19 fr.; une lettre
d'amour de Déjazet, 5Q fr.
Une lettre de M. Henri Rochefort deman-
dant un loge au directeur de l'Odéon : « Si
vous tenez à avoir un jour votre statue
équestre sur la place de l'Odéon, ne refusez
pas ! » 6 fr.
Une lettre de Gambetta, 100 fr.
*
LES JARDINS SUSPENDUS. — Que de
fois n'a-t-on pas appelé Paris la Babylone
moderne! Ce cliché prudhommesque va se
trouver justifié, dit-on. Un architecte aurait
trouvé le moyen de remplacer les toitures de
nos maisons par des jardins où, pendant la
bonne saison, le Parisien pourrait respirer
les senteurs embaumées des plantes rares, à
l'ombre des arbustes les plus gracieux.
Ce nouveau système est, paraît-il, d'une
application très facile et ne donne aucune hu-
midité aux maisons.
On assure que vingt Immeubles vont être
ainsi transformés à bref délai.
Les malfaiteurs qui ont l'habitude de se
promener sur les toits doivent être dans la
jubilation.
«
* *
DÉCOUVERTE D'UN «RAPHAEL ».- Le
Courrier de Meurthe-et-Moselle annonce qu'un
professeur de l'université de Lausanne vient
de découvrir un tableau de Raphaël.
Ce tableau, la Vierge au sein, 1510, signé,
est exposé au musée de Nancy.
La signature n'est pas une preuve d'authen-
ticité. Les Raphaël du Louvre ne sont pas
signés.
Pourvu que nous ne nous trouvions pas en
face de l'œuvre d'un faussaire qui, par excès
de zèle, aura cru devoir ajouter un paraphe à
son petit travail 1
CHRONIOE PARISIENNE
FRÈRE JEAN
Je n'aime pas bien la littérature fa-
cile qui consiste à manger quotidienne-
ment du prêtre et ne fais pas difficulté
de reconnaître qu'il est, parmi les mi-
nistres du culte catholique, nombre de
braves gens qui bataillent de leur mieux
contre les tentations de la chair. Mal-
heureusement l'abbé Maret, de libidi-
neuse mémoire, n'a pas bâti sur le sable.
Il a laissé des disciples qui vont partout
répandant la saine doctrine du maître.
Voici que les frères ignorantins se mê-
lent de la fête et entrent dans la danse.
On sait, en effet, que M. Duranton, com-
missaire de police, rigide observateur
de la loi, a fait appréhender au corps,
par deux agents de la sûreté, et con-
duire au Dépôt, où il a été écroué, Jean
Médard, dit frère Jean, coupable d'avoir
violé un pauvre petit être à peine âgé
de douze ans 1
Ce n'est pas, on me fera l'honneur de
le croire, pour le banal plaisir de con-
ter les menus détails de cet acte infâme
et de délayer un fait divers que je re-
viens sur cette affaire qui, si doulou-
reuse qu'elle soit, n'a pas les allures
d'une grande cause. Puis il est des su-
jets qu'il ne faut traiter que d'une plume
légère, car j'imagine aisément la dou-
leur qui, à cette heure même, doit poi-
gner une famille. Au surplus, je ne veux
retenir que l'acte infâme de ce drôle
qui, vivant au milieu des étranges pro-
miscuités d'une réunion d'adolescents,
ivre de désirs, n'a pas su dominer ses
sens, et que sa chair révoltée a dégradé
pour jamais.
Certes, je devine ce qu'appelle de
pitié le sort de ces infortunés condam-
nés au célibat à perpétuité. Avoir vingt
ans, des reins d athlète, un appétit de
terrassier, et être irrévocablement con-
damné à comprimer tout son être, à
s'isoler dans ses macérations, à passer
dans le monde des vivants comme un
Tantale. voilà qui dépasse les forces
de l'humaine nature, n'est-il pas vrai?
Quoi 1 l'humanité considère comme cho-
ses saintes l'amour, la famille, la pa-
ternité, et lui, prêtre, sans rien savoir
et connaître, il s'est interdit tout cela!
Dans le jardin terrestre, il est un fruit
savoureux entre tous. Il verra les autres
y mordre tour à tour : lui seul n'y por-
tera pas les dents! Et comme si ce
n'était pas assez pour le prêtre d'être
spectateur, le voilà qui par la confes-
sion devient confident. Etonnez-vous
après cela que cet homme ait d'incoerci-
bles ruts de mâle, en dépit du cilice,
des oraisons au pied de l'autel et du
camphre de la couchette.
Il est clair que je n'ai pas qualité pour
traiter, en deux cents lignes, la grosse
question du célibat des prêtres que
Balzac appelait une « admirable mons-
truosité ». Mais au risque de heurter,
en cette occurrence, bien des opinions
franches et désintéressées, j'avouerai
tout net que le mariage des prêtres im-
plique en soi contradiction. N'oublions
pas que le prêtre dispose de la confes-
sion. Or ce seul fait, à mon humble
avis, dénature, corrompt, détruit sa
qualité de citoyen et le met pour ainsi
dire hors la loi. Prêtre à marier, il peut
du fond de son confessionnal se prépa-
rer à loisir une épouse et arranger son
mariage futur. Il y consacrera dix ans,
quinze ans s'il le faut, il y réussira
parce qu'il est prêtre. Qu'auront à lui
refuser ces pères dont il aura confessé
la femme et les enfants? Et que de-
viendraient alors l'autorité et la sécu-
rité des familles ? Ah ! si la religion ca-
tholique voulait se passer de la confes-
sion!.
La confession ! c'est de là, n'en dou-
tez pas, que nous vient tout le mal. Elle
est si monstrueuse, cette façon d'ensei-
gner aux jeunes séminaristes l'art de
la confession ! Je sais tel manuel de
confesseur, en usage dans les grands
séminaires, dont la lecture ferait rougir
une caserne de zouaves ou de zéphyrs.
Il ne s'agit pas, vous m'entendez bien,
de cet Examen de conscience qu'on re-
met aux petits garçons et aux petites
filles, et qui contient des demandes aux-
quelles les enfants se bornent à faire
des réponses. Il s'agit de la manière
dont le confesseur doit interroger les
pénitents et les pénitentes. Tudieu 1
quelle science du mal !
Le doux pasteur, dans ces Diaconales,
compte six espèces de luxure. Il aborde
de telles particularités et s'abandonne
à une telle technicité de langage que je
renonce véritablement à citer aucun
passage. Ces choses-là ne peuvent guère
s'imprimer que dans les librairies catho-
liques. C'est à faire dresser les cheveux
sur la tête. Mgr Bouvier cite certains
cas où la femme doit rendre le devoir
conjugal les yeux fermés et les dents
serrées, et commet un péché mortel si
elle éprouve l'ombre d'une sensation.
C'est simplement iernoble.
En vérité, je suis tout honteux et la
prose de ce prélat éveille en moi des
pudeurs insoupçonnées jusqu'à ce jour.
C'est l'œuvre d'une imagination folle de
luxure, je ne crains pas de l'affirmer.
Il va de soi que je passe sous silence
d'autres poins infâmes qui me permet-
traient de prouver que ces monita se-
creta qu'on confie encore aux jeunes
ecclésiastiques sont peut-être la cause
des débauches de leur imagination.
Mais si jamais notre professeur de
philosophie nous avait pincés lisant un
livre aussi immonde, il se serait fait un
devoir de nous renvoyer pour cause
d'immoralité ! Il n'y a pas ici de pas-
sion politique en jeu. Je le répète, je ne
suis pas un mangeur de prêtres, mais
j'ai le cœur soulevé de dégoût par la
lecture de ces Diaconales que l'on re-
met à des enfants de dix-huit ans, en-
fants à qui l'on fait en même temps prê-
ter serment de chasteté. Ne sentez-vous
donc pas, prélats, a dit naguère un maî-
tre en chroniques, que faire lire de pa-
reilles ordures à de jeunes séminaristes,
c'est leur mettre le feu dans la cervelle
et dans les veines? Ne sentez-vous donc
pas que vous préparez ainsi une géné-
ration de violeurs de petites filles et de
petits garçons? Puis vous venez crier
bien haut que la Religieuse de Diderot
est une invention abominable ! Et vous
applaudissez quand un tribunal de tar-
tufes condamne Sue, Flaubert, Barbey,
Richepin ! Eh bien ! vous n'êtes pas dé-
nués d'aplomb, mes maîtres !
9
* *
Il me faut ajouter un mot au sujet du
médecin de l'établissement d'Issy qui,
voyant une éruption de boutons mar-
brant la poitrine de l'enfant, a déclaré
que le malheureux petit être avait la
« rougeole ».
Que le reporter qui a, le premier,
rendu compte de ce scandale souffre
que je le lui dise, il a failli à sa mission.
Il est des cas où l'indiscrétion est le pre-
mier des devoirs. Il fallait découvrir le
nom et l'adresse de ce singulier prati-
cien. Nous nous serions fait un plaisir
d'imprimer ce nom et cette adresse en
lettres majuscules. Il est véritablement
fâcheux que ce docteur ait jugé conve-
nable de garder l'anonyme et se soit
dérobé ainsi avec une modestie bien
rare de nos jours à l'ovation sur la-
quelle il était en droit de compter. Dieu
me garde de railler les médecins ! Ils
sont en mesure de se venger si aisé-
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