Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1890-11-28
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32757974m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 68249 Nombre total de vues : 68249
Description : 28 novembre 1890 28 novembre 1890
Description : 1890/11/28 (A19,N6892). 1890/11/28 (A19,N6892).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75604316
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/08/2013
.- D x-neuviême année. — N" 6,892 CINQ CeHtilïieS Paris et Départements — CSNQ centimes 'VENDREDI 99 NOVEMBRE; !S90
1
JOURNAL RÉPUBLICAIN
*
RÉDACTION
142. Rue Montmartre
• PARIS
PttrcttttR POLITIQUE
A. - EDOUARD PORTALIS
PRIX DE L'ABONNEMENT:
Paris Trois lBoil. 6 f.; Sh MM, ii L; Us se, 20 9
Départements — 7f.; — 12 i.; - 24 K
Union Postale — 91.; — tet; — 321
£ *• abonnement* partent des 1- -t 15 de chaque moiife
AHwtgft» télégraphique : XIXe SIÈCLE — P ART8
Téléphone : 20.289 bit.
ADMINISTRATION
14S; Hue Montmartre
PARIS
f ■ ■■m»
RÉGISSEURS D'ANNONCES
Mlf. LAGRANGE, CERF ot O*
8, place de la Boarie, <1 !
PRIX DE L'ABONNEMENT :
-
Parte. Tnuum, 61; SiiaM, IIL; bu, 20 f.
Départements — 7f.; — 12 L; — 241
Union Postale — SL; — 161.; — 32 f.
Lu abonnement! partent des 1" et 15 de chaque moit
Adressa télégraphique : XIX* sIÈCLE — PAXU8
Téléphone : 20.289 bit.
L'ORGANISATION
ADMINISTRATIVE
La Chambre vient de nommer dans
ses bureaux une commission chargée
d'étudier la question de l'organisa-
tion administrative. Si l'on en juge
par les noms de ses membres, la ma-
jorité en semble acquise aux idées de
décentralisation et de liberté.
La commission n'est pour le moment
saisie que de deux propositions : cel-
les de MM. Hovelacque et Beauquier.
Nous avons dit, lorsqu'elles furent dé-
posées, de quel esprit elles s'inspi-
raient, quelles modifications profon-
des elles introduisaient dans notre
organisme administratif.
Une autre proposition est dès à
présent soumise à l'examen de la
Chambre. Elle devra sans nul doute
être, comme ses deux aînées, renvoyée
à l'examen de la même commission.
Nous voulons parler du projet de M.
Thellier de Poncheville qui demande
la création de conseils cantonaux.
Il est hors de doute, en effet, que
si elle veut accomplir une œuvre utile
et sérieuse, la commission devra con-
sacrer à notre organisation adminis-
trative une étude d'ensemble.
Il est quelques points sur lesquels
tout le monde semble d'accord et des
critiques qui ne trouvent point de
contradicteurs.
Quand M. Freppel gémit sur les
progrès du fonctionnarisme, toute la
gauche applaudit. Quand M. Pelletan
dénonce les abus de la bureaucratie,
il rencontre à droite une unanime
adhésion. Il semble qu'un accord par-
fait unisse la Chambre dans une com-
mune opinion.
C'est que les orateurs s'en sont te-
nus à la théorie et aux généralités.
Passez à la pratique. Essayez de don-
ner à ces prémisses leur conclusion
naturelle : « Il y a trop de fonction-
naires qui rendent trop peu de servi-
ces. » Tout le monde applaudit. Rem-
placez cet aphorisme par cet amende-
ment : ci Les, sous-pi-éfectures suivan-
tes — ici l'énumération — sont sup-
primées. "Je vous attends au vote.
Ou je me trompe fort, — ce dont je
serais ravi, — ou l'unanimité de tout
à l'heure se sera transformée dans les
urnes en une piteuse minorité.
Robert-Houdin n'aura été pour rien
dans ce miracle. Mais il faut, au Par-
lement comme partout, compter avec
les préoccupations personnelles. Q uand
le député qui tout à l'heure tonnait
contre la foule de fonctionnaires inu-
tiles qui vivent en parasites sur le
budget aura à donner son approba-
tion à la suppression de sa sous-pré-
fecture, il reculera devant un sacri-
fice dont la grandeur risquerait d'être
médiocrement appréciée des habi-
tants de l'arrondissement qu'il repré-
sente.
Il aurait le droit de dire, au sur-
plus, pour expliquer son défaut d'en-
thousiasme, que la suppression d'un
sous-préfet réalise sans doute une
économie mais ne saurait passer pour
une réforme.
Ce n'est point, en effet, en la trai-
tant par le détail qu'on peut arriver
à résoudre cette grosse question de
l'organisation administrative. Il ne
saurait s'agir à coup sûr de changer
du jour au lendemain la coûteuse et
compliquée machine construite par le
génie autoritaire de Bonaparte. Les
partisans du statu quo peuvent se ras-
surer s'ils ont jamais été inquiets.
Nous connaissons par expérience les
difficultés et les lenteurs qui s'oppo-
sent au plus simple changement.
Avant que MM. Hovelacque et Beau-
quier voient leurs projets réalisés, il
passera des microbes sous le pont de
la Concorde.
Aussi bien ont-ils eu pour but, j'en
suis sûr, beaucoup moins de tracer le
plan de l'édifice qui devrait surgir du
sol dès demain, que de planter des ja-
lons destinés à guider dans leur route
les partisans des idées de liberté, de
décentralisation. Ils ont indiqué le
but. Comment l'atteindre? -
Eh bien, s'il est très difficile, parce
qu'on se heurte à des coalitions d'in-
térêts toutes puissantes, d'obtenir dans
cet ordre d'idées les destructions
les plus nécessaires, il est, au con-
traire, une réforme qu'il serait, je
pense, assez aisé de faire triompher.
Aussi est-ce sur elle que nous vou-
drions voir se concentrer les efforts
de la commission.
C'est de l'organisation du canton
que je veux parler. Quel a été jus-
qu'ici le gros obstacle à une organi-
sation sérieuse de la vie municipale
en France? C'est la petitesse d'un trop
grand nombre de communes.
Le canton, au contraire, est dès
aujourd'hui, au point de vue politi-
que comme au point de vue judi-
ciaire, une unité qui compte. Il faut
en faire une unité également impor-
tante au point de lue administratif
et comme la cellule de l'organisme
nouveau.
L'idée est ancienne. Quand il était
ministre de l'intérieur, M. René Go-
blet, pour ne pas remonter plus haut
que 1882, eut l'honneur de la formu-
ler dans un remarquable projet de
loi. Depuis huit ans, l'idée a fait bien
des progrès et conquis plus d'un par-
tisan.
Il s'agit de la revêtir d'une forme
pratique. Il faut donner à cette cir-
conscription nouvelle l'organe néces-
saire, par la création d'un conseil
cantonal. Ses attributions seront assez
faciles à déterminer. Personne, j'ima-
gine, ne criera à la révolution parce
qu'on le chargera, au lieu et place du
conseil d'arrondissement, de répartir
dans le canton l'impôt foncier sur les
propriétés non bâties. Les affaires
cantonales trouveront en lui leur juge
naturel.
Il faudra lui donner un budget. Sans
budget à régler, il tomberait, avant
que d'être né, au rang des assemblée i
de pure apparence,qui sont sans puis-
sance parce qu'elles sont sans respon-
sabilité.
Pour constituer ce budget, il suffira
d'enlever aux budgets municipaux et
départementaux, avec quelques-unes
des dépenses qui leur incombent jus-
qu'ici et qui sont plus particulière-
ment d'intérêt cantonal, les ressources,
c'est-à-dire les centimes correspon-
dants.
Voilà, j'imagine, une œuvre dont la
réalisation, sans soulever d'objections
insurmontables, n'en constituerait pas
moins une amélioration notable, gage
des progrès futurs. Commençons par
là.
A. Millerand
Le XIXo iECLE publiera demain la
« Vie de Paris », par Henry Fouquier.
LES ÉLECTIONS ITALIENNES
(DK NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Rome, 26 novembre.
Les derniers chiffres donnés par le gou-
vernement, et portant le nombre des dé-
putés ministériels élus à 395, englobent
une cinquantaine de membres de l'opposi-
tion de droite.
Les chiffres exacts comportent 1/tO oppo-
sants.
On cite ce mot de M. Zanardelli, collègue
de M. Crispi au ministère :
— La situation est la même qu'en 1886,
avec cette différence que Crispi est main-
tenant le prisonnier de la droite, qu'il a
combattue toute sa vie.
Dans la séance d'hier du conseil des mi-
nistres, il a été arrêté une liste de 50 séna-
teurs à nommer, députés non réélus pour
la plupart.
MORT DE LA BARONNE DE STACKELBERG
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Saint-Pétersbourg, 36 novembre.
La baronne Emilie de Stalkelberg, née
comtesse Haucke, veuve du général de
Stackelberg, sœur de Julie Haucke, qui
épousa morganiquement le prince Alexan-
dre de Hesse et fut la mère des princes de
Battenberg, vient de mourir après une
courte maladie.
Un de ses fils est le baron de Stackelberg,
second secrétaire de l'ambassade russe à
Paris.
Le comte Bossak-Haucke, Haucke les
Pieds-Nus, cousin de la baronne Emilie de
Stackelberg, fut tué pendant la guerre sous
le drapeau français, à la tête d'un corps
franc, près de Dijon.
UN SCANDALE A NIMES
Des employés de l'octroi contrebandiers
et faussaires
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Nîmes, 26 novembre.
Le procureur de la République vient de
faire incarcérer le nommé Martin, préposé
de l'octroi, qui a été surpris en flagrant dé-
lit de faux et d'usage de faux destinés à fa-
voriser la contrebande.
Un sieur Lange, marchand de fromages,
a été également arrêté comme complice.
Plusieurs employés de l'octroi paraissent
être compromis dans cette affaire.
FUITE EN BELGIQUE
ET RETOUR A PARIS
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Bruxelles, 26 novembre.
Lundi matin, une arrestation a été faite
dans un hôtel par la police de Namur.
Un nommé César Gayet, employé de ban-
que, signalé par la préfecture de Paris
comme s'étant enfui avec une somme de
25,000 francs soustraite frauduleusement à
ia banque, et prévenu, en outre, de faux et
de détournements pour 10,000 fr. environ,
a été mis sous la main de la justice.
Aux premiers mots du commissaire,
Gayet tira de sa poche un revolver et fit
mine d'attenter à ses jours. On l'en empê-
cha, et l'on s'empara de l'homme et de son
arme.
Gayet est un homme distingué d'allures,
grand, fort, habillé très finement. Il parait
agé d'une cinquantaine d'années.
Il n'avait pour tout bagage qu'une petite
valise à la main, contenant sans doute les
beaux billets de banque dont cet escroc,
malheureusement pour lui, ne profitera
pas.
ARRESTATION ANNONCÉE
D'UN DÉPUTÉ ITALIEN -
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Gênes, 26 novembre.
Le député socialiste Andréa Costa, qui a été
élu dans deux collèges, à Bologne et à Ra-
venne, est attendu ici aujourd'hui, venant de
-Marseille par bateau à vapeur.
- Le ministère a donné l'ordre au préfet, par
dépêche, de l'appréhender dès qu'il aura mis
i pied à terre, nonobstant l'inviolabilité dont il
L fiât revêtu »ar sou titre de député»,
LE
KRACH MARY. RA YNAU D
EN FUITE OU SUICIDÉ?
La Banque d'Etat en faillite. — Dé-
nouement prévu. — Fin d'un député
repris de justice. — La leçon
profitera-t-elle ?
L'affaire Mary-Raynaud a eu le dénoue-
ment que nous avions prévu.
En l'apprenant, les lecteurs duXIXe Siècle
n'éprouveront aucune surprise. Ils étaient
prévenus. Depuis longtemps, nous les
avions mis en garde contre les manœuvres
de ce financier qui faisait en petit et avec
plus de cynisme ce que d'autres financiers,
députés comme lui, font en grand.
Cet audacieux repris de justice qui, pour
se faire élire dans l'arrondissement de
Saint-Flour, avait usé des mêmes procédés
que les Loreau, les Greffulhe et les Jaluzot,
et qui avait trouvé à Paris comme en Au-
vergne des journaux bien pensants pour le
défendre, vient de se faire justice lui-même,
au moment où la justice allait lui mettre
une fois de plus la main au collet.
Mary-Raynaud, le directeur-de la Banque
d'Etat, a disparu depuis deux jours.
Les uns disent qu'il s'est suicidé comme
le directeur des Bouillons-Parisiens Ro-
senbaum, comme le directeur de l'ancien
Comptoir d'escompte Denfert-Rochereau.
D'autres disent qu'en admettant une pa-
reille hypothèse on lui fait beaucoup d'hon-
neur et qu'il a probablement dû prendre
la fuite après s'être approprié ce qui res-
tait des dépôts de la Banque d'Etat.
Les procédés de Mary-Raynaud
Mary-Raynaud était, sinon l'inventeur des
participations financières, au moins celui
des tripoteurs financiers de la dernière ca-
tégorie qui leur avait donné la plus grande
extension.
Ayant fondé en 1879 la Banque de la
Bourse sous la forme de société anonyme
en participation, il avait été forcé, dès
1883, de suspendre ses paiements, et sa
chute eut pour conséquence sa condamna-
tion, le 6 janvier 1835, à trois ans de prison
pour escroqueries.
Mais ce châtiment, auquel il s'est sous-
trait grâce à l'intervention du trop célèbre
Daniel Wilson, ne devait pas lui servir de
leon.
- - En effet, dès le 26 février 1886, nous le
trouvons en train de constituer la Banque
d'Etat, alors sans indication de capital so-
cial, au moyen d'une souscription publique
d'actions sur lesquelles 250 fr. seulement
devaient être versés. Elle avait pour objet
la spéculation sur toutes les valeurs d'Etat
en général.
Mais les souscripteurs restèrent assez
rares, et Mary-Raynaud finit par constituer
sa société au capital de 10 millions, en s'at-
tribuant comme apport la plus grosse par-
tie du capital social.
Son système consistait à solliciter et rece-
voir en dépôt soit des espèces, soit des ti-
tres, comme les obligations et les actions
de Panama, la rente 3 0/0, l'Extérieure,
toutes les valeurs enfin dont on peut tirer
un parti quelconque à la Bourse,et de pro-
mettre à ses naïfs déposants de leur payer
30 0/0 d'intérêts pour bX) francs versés en
espèces ou en titres.
Ces 30 0/0 étaient payés mensuellement si
les déposants l'exigeaient.
C'est une pratique contre laquelle nous
nous sommes souvent élevés, mais qui a
cependant trouvé de nombreux imita-
teurs.
Nos lecteurs se rappellent que nous les
avons mis fréquemment en garde contre
les fallacieuses promesses des gens qui
leur offraient 3,200 ou A,000 fr. pour cent
francs à gagner sans risques en cinq jours
de Bourse.
C'était exagérer le système de Mary-Ray-
naud, car lui aussi garantissait ses opéra-
tions sans aucun risque et s'engageait à
rendre les titres qu'on avait la naïveté de
lui confier.
Dénouement fatal
Il est arrivé à la Banque d'Etat ce qui ar-
rive fatalement à tout établissement de
crédit, petit ou grand, qui sollicite du pu-
blic des dépôts d'argent et qui, pour servir
à ces dépôts un intérêt petit ou grand de
1 0/0 ou 30 0/0, emploie cet argent dans
des opérations hasardeuses, que ces opé-
rations consistent dans des spéculations à
la Bourse ou dans des placements en fonds
étrangers, argentins ou portugais.
Un jour est venu où, à la suite de cir-
constances que tout le monde connaît, les
déposants de la Banque d'Etat ont eu des
inquiétudes. Alors, ils ont réclamé leur
argent.
M. Mary-Raynaud a commencé par rem-
bourser les plus pressés et les plus exi-
geants. Pour se procurer des ressources, il
s'est lancé dans de nouvelles spéculations
qui n'ont pas été heureuses. Puis les de-
mandes de remboursement devenant plus
nombreuses, il n'a pas voulu attendre l'i-
névitable krach.
La disparition
Lundi dernier, Mary-Raynaud se ren-
dit à la Chambre pour jouir une dernière
fois de son mandat de député. Le matin, en
déjeunant avec le chef du contentieux de
la Banque d'Etat, M. Flament, il avait poussé
la fanfaronnade jusqu'à parler de son in-
tention de faire une interpellation. Il est
vraiment dommage qu'il n'ait pas donné
suite à son projet. C'eût été un joyeux spec-
tacle de voir cet escroc déjà chevronné in-
terpeller le ministre de la justice.
Le lendemain, Mary-Raynaud sortit de
bonne heure en disant à sa femme qu'il se
rendait chez son agréé.
Depuis, on ne l'a plus revu.
Dans l'après-midi, M. Flament ne voyant
pas retenir comme d'habitude Mary-
Raynaud à la Banque d'Etat et se doutant
probablement des raisons de ce retard, alia
touver Mme Mary-Raynaud et lui demanda
ce qu'était devenu son mari.
Mme Mary-Raynaud répondit qu'elle
n'en savait absolument rien.
La soirée, la nuit, se passèrent, on ne vit
pas reparaître Mary-Raynaud.
Hier matin, M. Flament retourna avenue
du Bois-dc-Boulogne dans le somptueux
hôtel du banquier. Mme Mary-Raynaud ne
savait ou disait ne rien savoir de plus que
la veille.
M. Flament se rendit alors chez M. Lam-
bin, commissaire de police du quartier des
Bassins, et l'informa de la disparition du
financier-député.
Une enquête fut aussitôt ouverte. On de-
manda dans toutes les gares si on avait vu
passer quelqu'un répondant au signalement
de Mary-Raynaud, avec une médaille de
député.
L'enquête, comme la plupart de celles
auxquelles nous a habitués M. Lozé,n'abou-
tit à aucun résultat.
Mary-Raynaud était devenu aussi introu-
vable que Padlewsky.
M. Lambin se décida alors à aller chez
Mme Mary-Raynaud, qui lui fit remarquer
qu'un revolver avait disparu d'une pano-
plie.
C'est sur cette indication qu'on a cru pou-
voir baser l'hypothèse du suicide dont le
bruit a couru hier dans la soirée.
Cependant, la nouvel! o de la disparition
de Mary-Raynaud s'est rapidement ré-
pandue, et dans la journés, un grand nom-
bre de déposants allaient réclamer leurs
capitaux à la Banque d'Etat, place de la
Bourse.
Mais la caisse était fermée, et aux uns
comme aux autres on répondait que « le
directeur étant absent, on ne pouvait payer
personne ».
On s'imagine aisément que cette réponse
n'était pas faite pour satisfaire les gogos
qui s'étaient laissé prendre aux belles pro-
messes de Mary-Raynaud.
L'un d'eux, M. Jules-César Chambon, de-
meurant 129, avenue Victor-Hugo, ne tarda
pas à déposer une plainte entre les mains
de M. Rony de Balnègre, commissaire de
police du quartier Vivienne.
Au domicile particulier de Mary-Ray-
naud, avenue du Bois-de-Boulogne, un
grand nombre de créanciers sont venus, en
sortant de la Banque d'Etat, demander des
nouvelles. Mais la porte restait invariable-
ment fermée. Elle ne s'est ouverte que pour
recevoir un chapeau envoyé par la maison
du Petit-Saint-Thomas pour la fille de
Mary-Raynaud, Mlle Fanny.
Deux créanciers, qui se trouvaient là au
moment où le garçon de magasin du Petit-
Saiut-Thomas s'est présenté, voulaient s'op-
poser à ce qu'il livrât la commande.
— Pourquoi cela ? leur dit-il.
— Parce qu'on ne vous payera pas, ré-
pondit l'un d'eux.
— Je voudrais bien voir cela. Et, sans
tenir compte de ces observations, le garçon
remit le chapeau à la concierge, qui revint
quelques instants après payer la facture à
travers la grille.
C'est encore avec notre argent qu'on
paie cela! s'écria alors un des deux créan-
ciers.
Epilogue
Dans la journée, le chef du contentieux
de la Banque d'Etat a demandé au tribunal
de commerce la nomination d'un adminis-
trateur provisoire.
M. Maillard, syndic, a été chargé de faire
une enquête.
Dans la soirée, les scellés ont été appo-
sés. La faillite sera sans doute prononcée
aujourd'hui.
Ajoutons, en terminant, que la Banque
d'Etat comptait parmi ses clients un grand
nombre d'ecclésiastiques et aussi, dit-on,
une grande dame bien connue qui comp-
tait sur Mary-Raynaud pour lui faire re-
gagner les sommes considérables que lui a
coûté le boulangisme.
ÉLECTIONS SÉNATORIALES
DE LA SEINE
C'est dimanche, ainsi qu'on le sait, que
les conseils municipaux nomment leurs dé-
légués en vue des élections sénatoriales du
5 janvier.
Le groupe des Droits de Paris, qui sert
actuellement à désigner l'ancien groupe de
l'autonomie communale, s'est réuni hier à
l'Hôtel de Ville pour procéder à une liste
préparatoire.
Il a été établi en principe que les candi-
dats seraient choisis parmi les partisans de
la suppression du Sénat.
Après une longue discussion, les noms
suivants ont été adoptés :
MM. Desangeois, Alphonse Strauss, Emile
Chaponnct, Besnard, Barbès, Louis Boucher,
Gaston Camus, Dr Gonnard, Mattier, Flock,
Emile Lasalle, Lhotte, Latour, Edmond
Coignet, Gros, Sibille, Dr Daumas, Chancel,
Gros,
Van Gelde., Charriot, Dr Georges Pouchet,
Bauzier, Dr Frébault, Sigismond Lacroix,
Bauzier,
Reignault, Victor Simond, Bouillot, Pay-
naud.
Et comme suppléants : MM. Canson, Vin-
çon, Gastelois, Massin, EUoi, Paul Luquain,
Duuiesnil et Noro.
- Comme on le pense bien, d'autres listes
que celle-là seront certainement présentées
au conseil.
Il est assez piquant de rappeler à ce pro-
pos qu'à la première élection sénatoriale
de la Seine, le conseil municipal de Paris
avait élu pour délégué Victor Hugo et pour
délégué suppléant M. Eugène Spuller.
LE BUDGET ALLEMAND
(D'UN CORRESPONDANT)
Berlin, 26 novembre.
Le projet de budget pour l'empire alle-
mand, pour l'exercice du 1er avril 1891 au 30
mars 1892 balance ses recettes et ses dé-
penses par 1,130,6^5,888 marcs, dont, au
budget ordinaire : 9M,135,067 en dépenses
permanentes; 90,7§0,ii52 en dépenses de
l'année et 98,790,369 en dépenses extraor-
dinaires de l'année.
La part qui, du rendement des douanes
et de l'impôt sur le tabac, devra rester dans
la caisse de l'Empire sera portée de 130
millions de marcs à 1A0 millions.
Les recettes des douanes et des impôts
de consommation comportent une aug-
mentation de Al,35^,500 marcs sur l'exer-
cice précédent.
L'augmentation des crédits de la guerre
s'élève à 5,75.4.707 marcs, dont une partie
importante est nécessitée par l'accroisse-
ment d'effectif -spécifié par la dernière loi
militaire.
Les dépenses annuelles de la marine pré-
sentent un excédent de 7,221,130 marcs. On
construira 3 nouveaux cuirassés, 1 croi-
seur, 1 aviso, 8 torpilleurs.
Les contributions matriculaires des Etats
confédérés sont de 322,626,505 marcs, soit,
en plus de l'exercice précédent, 20,A51,078.
Le montant des sommes à répartir entre
les Etats confédérés est évalué à 331,353,000
marcs, il contrebalance, par conséquent, à
peu de chose près, le montant des contri-
butions matriculaires.
LA FIN DU CHOLÉRA DANS
LA MER ROUGE
(D'UN CORRESPONDANT)
Rome, 56 novembre. — La Gazette - officielle
publie .UIl(} ordonnance portant l'admission
en libre pratique, dans les ports italiens, -(ies
; bâtiments venant de Massouab) où l'4ïû
de enoléra a cessé.
TABLETTES no PROGRÈS
LE PHILTRE
Et le docteur Koch se taisait toujours !
C'est en vain que, de toutes parts, de
compactes et piteuses phalanges de ma-4
lades époumonnés s'acheminent vers Ber-
lin, dont les habitants, saouls d'or et de
gloire, commencent à se demander avec
un brin d'inquiétude ce qu'il adviendra
de cette invasion de bacilles cosmopoli-
tes, appelés sans doute à survivre à leurs
colporteurs et à se fixer sur les bords de
la Sprée ; c'est en vain qu'une armée de
médecins et de journalistes assiège la
porte du Maître, dont les assistants ne sa-
vent plus où donner de l'injecteur; c'est
en vain que, partout, initiés et profanes
font assaut, à ses dépens, de fantaisistes
conjectures; en vain que les échos de
l'univers entier rétentissent du bruit
obsédant de son nom!
Le Maître s'obstine à ne rien dire. Il pa-
raît même qu'il ne faut pas compter qu'il
rompe cet intransigeant silence avant
quinze ou dix-huit mois. C'est, au moins,
ce qu'a cru deviner le docteur Filleau,
l'un des rares Français qui aient pu for-
cer la consigne et prendre le vent du
sanctuaire.
Nous autres Français, avec notre génie
communicatif, débordant, altruiste, fait
d'apostolat, de verbiage et de chevalerie,
nous avons peine à comprendre cette opi-
niâtreté dans la discrétion, alors qu'il
s'agit surtout d'une œuvre intéressant à
un si haut degré l'universalité du genre
humain. Que voulez-vous ? Ce sont « cho-
ses d'Allemagne - Cosas de Alema-
nia!
Je ne ferai pas au docteur Koch l'in-
jure de supposer un seul instant qu'il
veuille ainsi s'approprier tous les béné-
fices pécuniaires de la découverte. Il me
plaît de croire au contraire que le grand
homme abandonne volontiers à ses auxi-
liaires les petits profits de la médica-
tion, lesquels ne se chiffrent pas, cepen-
dant, par moins de 5 ou 6,000 fr. par
jour pour chaque opérateur.
La « spécialité » des tubes de vaccin
charbonneux, dont M. Pasteur s'est, lui
aussi, réservé le monopole, est assuré-
ment une bonne affaire ; il s'en faut, ce-
pendant, qu'elle rapporte à beaucoup
près autant. Il est vrai que le charbon
n'est pas la phtisie, et que M. Pasteur
n'est ni Allemand, ni même docteur en
médecine.
M. Koch n'a-t-il pas craint plutôt des
applications maladroites, intempestives
ou prématurées, de nature à alarmer le
public et à compromettre le prestige et le
succès de la méthode? C'est plus proba-
ble. En tout cas, on assure qu'il
n'a soulevé un coin du voile qu'à son corps
défendant, sous la pression de l'opinion
publique, sinon même sur l'ordre pres-
que formel de l'empereur ..Guillaume, le-
quel, paraît-il, ne se tient plus de joie et
d'orgueil d'avoir mis la main sur le de
Moltke de la stratégie micrographique et
serait même assez disposé à s'attribuer
une part dans ce Sadowa bacillaire.
Si le docteur Koch avait pu n'obéir
qu'à ses propres inspirations, il n'aurait
pas encore soufflé mot de sa découverte,
dont il a la modestie de ne pas se consi-
dérer encore comme définitivement maî-
tre. Des milliers de phtisiques, qui vont
peut-être revenir à la santé, seraient
morts de cette abstention, mais l'honneur
de la science fût resté sauf. Combien de
fois n'a-t-on pas sacrifié des régiments
entiers pour sauver l'honneur du dra-
peau ?
Il est bon d'ajouter que si le docteur
Koch se refuse à livrer son secret, il ne se
refuse pas à livrer le remède. Ni le tsar,
ni le roi de Danemark, ni le roi des Bel-
ges, ni M. Ribot n'ont pu en avoir, de
cette lymphe mystérieuse.
La préparation en est si longue et si
difficile et les clients sont si nombreux,
que les opérateurs de l'Institut hygié-
nique de Berlin sont à la veille d'être
obligés, faute de munitions, d'interrom-
pre leur feu roulant — et lucratif — sur
les bacilles indigènes et sur les bacilles
d'importation.
Cependant, M. Pasteur en a du déjà
recevoir deux flacons, à titre d'hommage
spontané, et le bruit court que tels et tels
médecins parisiens, qui ont fait le voyage
tout exprès, vont être bientôt à même
d'expérimenter sur leurs compatriotes
tuberculeux la panacée d'outre-Rhin.
Or, c'est là l'essentiel. Peu importe, en
effet, aux malades de savoir avec quoi on
les guérit, pourvu qu'on les guérisse !
— Mais, dira-t-on peut-être, s'il y a chez
M. Pasteur des échantillons de la liqueur
magique, rien de plus facile apparem-
ment que d'en démêler, au moyen d'une
bonne petite analyse, l'exacte composi-
tion.
Si les chimistes ordinaires du labora-
toire de la rue Dutot ne se sentent pas
assez forts pour mener à bien cette re-
cherche, que ne passent-ils la main à
l'éminentissime directeur du Laboratoire
municipal, dont le XIXe Siècle est payé,
— ou plutôt « a payé », et même payé
très cher, — pour connaître la transcen-
dante subtilité?
Hélas! ce n'est encore qu'une illusion.
Si, comme il y a lieu de supposer, la pré-
cieuse lymphe est un vaccin ou un virus
d'origine animale, une ptomaïne ou une
leucomaïne, l'analyse chimique ne nous
apprendra pas grand chose, et, tout
comme s'il s'agissait de vin de raisins
secs, M. Girard lui-même n'y verrait que
du bleu (de méthyle). Comme toutes les
autres matières organiques généralement
quelconques, en effet, la lymphe se com-
poserait exclusivement alors d'azote, de
carbone, d'oxygène et d'hydrogène.
MM. les chimistes pourraient bien nous
dire, sans doute, combien il y entre d'a-
tomes de Az, combien de C, combien de H
et combien d'O. Soit! Mais ils ne sau-
raient nous dire ni comment ces atomes
divers s'étaient réunis et associés, af
quelle était la forme chimique de leut
arrangement, ni par quels moyens et en
vertu de quelles lois inédites leur combi-
naison s'était opérée.
Or, il y a tout lieu de croire que c'est
précisément à la genèse sui generis de sa
fabrication, aux « tours de mains" et
aux « actions de présence" qui l'ont pro-
voquée, aidée ou corrigée, à son mode
particulier de culture, en un mot, que la
lymphe anti-tuberculeuse doit ses étran.,
ges vertus.
Après comme avant l'analyse, nous se"
rions toujours logés à la même enseigne :
« Au Mystère. R. Koch, guérisseur. Il n'y a
que la .foi qui sauve. » Il faut attendre et
nous borner a essayer de sauver nos ma-
lades à l'allemande, au liasard de la sec
ringue, et sans en demander plus long.
Au surplus, si nous ignorons la recette
du médicament, nous n'aurons bientôt
plus rien, pour peu queles « interviews n
continuent à pleuvoir, à apprendre sur
ses effets. Et ces effets sont si extraordi-
naires qu'ils suffiraient à eux seuls, alors
même que Koch dût se refuser in sœcula
sœculorum à révéler le mot de l'énigmes
à lui garantir une gloire immortelle.
Imaginez une substance qui, une foiâ
entrée dans le torrent circulatoire, sa
fixe sur les tissus tuberculisés, qu'elle
mortifie, désagrège et dissout, en dédai-
gnant et en épargnant les autres. Imagi-
nez que ces tissus tuberculisés, seuls at-
taqués, tombent et s'éliminent avec les
autres excreta, en entraînant à leur
suite les bacilles qui les peuplaient,
de façon à ne plus laisser à la place
des cavernes et des foyers de puru-
lence que vous savez, que des brèches
tôt réparées et des cicatrices rapidement
closes. Imaginez, en un mot, un diagnos-
tic assez sûr pour que la moindre tare
tuberculeuse, consciente ou non, soit
immédiatement dénoncée par lui, tan-
dis que l'organisme le plus dé-
labré , si tant est que son déla-
brement tienne à des causes étran-
gères à la tuberculose, ne réagisse pas
sous les plus fortes doses. Imaginez,
enfin, que ce procédé de diagnostic est
en même temps un remède, en ce sens
que la lymphe non seulement décèle la
présence des tubercules mais qu'elle les
détruit et les élimine, sans abîmer les
organes circonvoisins. -
N'est-ce pas là une merveille stupé-
fiante, un inestimable bienfait?
La médaille, il est vrai, comme toutes
les médailles, a son revers. Cette dissolu-
tion des tissus électifs ne va point sans une
forte perturbation générale, sans une
réaction violente, — avec fièvre, frissons,
élévation de température, douleurs mus-
culaires, vomissements, dépression, etc.,
à laquelle les malheureux phtisiques dont
le mal est trop invétéré et les poumons
en trop piteux état ne sauraient être im-
punément soumis. Il s'agit, en d'autres
termes, d'un remède héroïque qui peut
sauver le « sujet » quand il possède en-
core un certain ressort, une certaine force
de résistance, mais qui doit tuer infailli-
blement les autres.
Si donc la « lymphe » parait être d'une
efficacité souveraine contre les tubercu-
loses locales, contre les tumeurs osseuses
ou ganglionnaires, contre le lupUiJ, voire
même contre la phtisie pulmonaire prise
à ses débuts, son emploi présenterait
au contraire les plus grands dangers
dans les cas de phtisie pulmonaire
au second ou au troisième degré.
Non pas qu'elle exalte, — au con-
traire ! — la virulence du bacille ; non
pas qu'elle précipite la marche de la ma-
ladie : mais la « poussée » qu'elle provo-
que suffoque le malade par l'œdème ou
l'oblige à cracher d'un seul coup lé peu
de poumon qui lui reste.
Raoul Lucet. ,
LA QUESTION PARNELL
(D'UN CORRESPONDANT)
Londres, 26 novembre.
Dès la rentrée du Parlement, la question
Parnell formait le sujet de toutes les con-
versations dans les couloirs de la Chambre
des communes.
L'opinion générale, presque unanime, des
hommes marquants du parti libérai était
que la nécessité d'une retraite, tout au
moins temporaire, s'imposait inflexible-
ment pour le leader irlandais.
On pensait qu'à la réunion du parti ir-
landais, qui s'est tenue le jour même de la
rentrée des Chambres, et à laquelle assis-
taient tous les députés nationalistes, M. Par-
nell donnerait ou qu'on lui ferait donner
sa démission de chef et directeur du parti,
sinon de député.
L'étonnement a été grand quand on a ap-
pris que M. Parnell avait été réélu et investi
a nouveau de la confiance du parti.
Les ministériels ont triomphé de cette si-
tuation, qui, selon eux, discrédite tout le
parti et le mouvement irlandais, et ils de-
mandent même une dissolution, dans la
persuation que des élections générales se-
raient entièrement défavorables à la cause
du home rule.
Les libéraux gladstoniens regrettent la
détermination prise par M. Parnell.
M. Gladstone a adressé à M. Morley une
lettre qui a été communiquée à M. Parnell
hier dans l'après-midi.
M. Gladstone exprime le regret que M.
Parnell n'ait pas donné sa démission. Il
déclare que le maintien de M. Parnell à la
tête du parti irlandais, non seulement pla-
cerait dans une situation très embarras-
sante beaucoup d'amis sincères et réels
de la cause irlanlaise, mais rendrait la
prolongation de sa situation, à lui Glads..
tone, comme leader du parti libéral, basée
surtout comme elle l'est sur la défense do
la cause de l'Irlande, presque une nullité.
MM. Morley et Gladstone ont eu à ce pro-
pos une entrevue avec M. Parnell. Ils ont
insisté auprès de lui sur le devoir qu'il
avait de démissionner; mais comme M. Par-
nell ne paraissait pas résolu à le faire, M.
Gladstone a communiqué sa lettre à la
presse.
Il en résulte clairement que M. Gladstone
se retirera comme chef de parti, si M. far
retire pas*
1
JOURNAL RÉPUBLICAIN
*
RÉDACTION
142. Rue Montmartre
• PARIS
PttrcttttR POLITIQUE
A. - EDOUARD PORTALIS
PRIX DE L'ABONNEMENT:
Paris Trois lBoil. 6 f.; Sh MM, ii L; Us se, 20 9
Départements — 7f.; — 12 i.; - 24 K
Union Postale — 91.; — tet; — 321
£ *• abonnement* partent des 1- -t 15 de chaque moiife
AHwtgft» télégraphique : XIXe SIÈCLE — P ART8
Téléphone : 20.289 bit.
ADMINISTRATION
14S; Hue Montmartre
PARIS
f ■ ■■m»
RÉGISSEURS D'ANNONCES
Mlf. LAGRANGE, CERF ot O*
8, place de la Boarie, <1 !
PRIX DE L'ABONNEMENT :
-
Parte. Tnuum, 61; SiiaM, IIL; bu, 20 f.
Départements — 7f.; — 12 L; — 241
Union Postale — SL; — 161.; — 32 f.
Lu abonnement! partent des 1" et 15 de chaque moit
Adressa télégraphique : XIX* sIÈCLE — PAXU8
Téléphone : 20.289 bit.
L'ORGANISATION
ADMINISTRATIVE
La Chambre vient de nommer dans
ses bureaux une commission chargée
d'étudier la question de l'organisa-
tion administrative. Si l'on en juge
par les noms de ses membres, la ma-
jorité en semble acquise aux idées de
décentralisation et de liberté.
La commission n'est pour le moment
saisie que de deux propositions : cel-
les de MM. Hovelacque et Beauquier.
Nous avons dit, lorsqu'elles furent dé-
posées, de quel esprit elles s'inspi-
raient, quelles modifications profon-
des elles introduisaient dans notre
organisme administratif.
Une autre proposition est dès à
présent soumise à l'examen de la
Chambre. Elle devra sans nul doute
être, comme ses deux aînées, renvoyée
à l'examen de la même commission.
Nous voulons parler du projet de M.
Thellier de Poncheville qui demande
la création de conseils cantonaux.
Il est hors de doute, en effet, que
si elle veut accomplir une œuvre utile
et sérieuse, la commission devra con-
sacrer à notre organisation adminis-
trative une étude d'ensemble.
Il est quelques points sur lesquels
tout le monde semble d'accord et des
critiques qui ne trouvent point de
contradicteurs.
Quand M. Freppel gémit sur les
progrès du fonctionnarisme, toute la
gauche applaudit. Quand M. Pelletan
dénonce les abus de la bureaucratie,
il rencontre à droite une unanime
adhésion. Il semble qu'un accord par-
fait unisse la Chambre dans une com-
mune opinion.
C'est que les orateurs s'en sont te-
nus à la théorie et aux généralités.
Passez à la pratique. Essayez de don-
ner à ces prémisses leur conclusion
naturelle : « Il y a trop de fonction-
naires qui rendent trop peu de servi-
ces. » Tout le monde applaudit. Rem-
placez cet aphorisme par cet amende-
ment : ci Les, sous-pi-éfectures suivan-
tes — ici l'énumération — sont sup-
primées. "Je vous attends au vote.
Ou je me trompe fort, — ce dont je
serais ravi, — ou l'unanimité de tout
à l'heure se sera transformée dans les
urnes en une piteuse minorité.
Robert-Houdin n'aura été pour rien
dans ce miracle. Mais il faut, au Par-
lement comme partout, compter avec
les préoccupations personnelles. Q uand
le député qui tout à l'heure tonnait
contre la foule de fonctionnaires inu-
tiles qui vivent en parasites sur le
budget aura à donner son approba-
tion à la suppression de sa sous-pré-
fecture, il reculera devant un sacri-
fice dont la grandeur risquerait d'être
médiocrement appréciée des habi-
tants de l'arrondissement qu'il repré-
sente.
Il aurait le droit de dire, au sur-
plus, pour expliquer son défaut d'en-
thousiasme, que la suppression d'un
sous-préfet réalise sans doute une
économie mais ne saurait passer pour
une réforme.
Ce n'est point, en effet, en la trai-
tant par le détail qu'on peut arriver
à résoudre cette grosse question de
l'organisation administrative. Il ne
saurait s'agir à coup sûr de changer
du jour au lendemain la coûteuse et
compliquée machine construite par le
génie autoritaire de Bonaparte. Les
partisans du statu quo peuvent se ras-
surer s'ils ont jamais été inquiets.
Nous connaissons par expérience les
difficultés et les lenteurs qui s'oppo-
sent au plus simple changement.
Avant que MM. Hovelacque et Beau-
quier voient leurs projets réalisés, il
passera des microbes sous le pont de
la Concorde.
Aussi bien ont-ils eu pour but, j'en
suis sûr, beaucoup moins de tracer le
plan de l'édifice qui devrait surgir du
sol dès demain, que de planter des ja-
lons destinés à guider dans leur route
les partisans des idées de liberté, de
décentralisation. Ils ont indiqué le
but. Comment l'atteindre? -
Eh bien, s'il est très difficile, parce
qu'on se heurte à des coalitions d'in-
térêts toutes puissantes, d'obtenir dans
cet ordre d'idées les destructions
les plus nécessaires, il est, au con-
traire, une réforme qu'il serait, je
pense, assez aisé de faire triompher.
Aussi est-ce sur elle que nous vou-
drions voir se concentrer les efforts
de la commission.
C'est de l'organisation du canton
que je veux parler. Quel a été jus-
qu'ici le gros obstacle à une organi-
sation sérieuse de la vie municipale
en France? C'est la petitesse d'un trop
grand nombre de communes.
Le canton, au contraire, est dès
aujourd'hui, au point de vue politi-
que comme au point de vue judi-
ciaire, une unité qui compte. Il faut
en faire une unité également impor-
tante au point de lue administratif
et comme la cellule de l'organisme
nouveau.
L'idée est ancienne. Quand il était
ministre de l'intérieur, M. René Go-
blet, pour ne pas remonter plus haut
que 1882, eut l'honneur de la formu-
ler dans un remarquable projet de
loi. Depuis huit ans, l'idée a fait bien
des progrès et conquis plus d'un par-
tisan.
Il s'agit de la revêtir d'une forme
pratique. Il faut donner à cette cir-
conscription nouvelle l'organe néces-
saire, par la création d'un conseil
cantonal. Ses attributions seront assez
faciles à déterminer. Personne, j'ima-
gine, ne criera à la révolution parce
qu'on le chargera, au lieu et place du
conseil d'arrondissement, de répartir
dans le canton l'impôt foncier sur les
propriétés non bâties. Les affaires
cantonales trouveront en lui leur juge
naturel.
Il faudra lui donner un budget. Sans
budget à régler, il tomberait, avant
que d'être né, au rang des assemblée i
de pure apparence,qui sont sans puis-
sance parce qu'elles sont sans respon-
sabilité.
Pour constituer ce budget, il suffira
d'enlever aux budgets municipaux et
départementaux, avec quelques-unes
des dépenses qui leur incombent jus-
qu'ici et qui sont plus particulière-
ment d'intérêt cantonal, les ressources,
c'est-à-dire les centimes correspon-
dants.
Voilà, j'imagine, une œuvre dont la
réalisation, sans soulever d'objections
insurmontables, n'en constituerait pas
moins une amélioration notable, gage
des progrès futurs. Commençons par
là.
A. Millerand
Le XIXo iECLE publiera demain la
« Vie de Paris », par Henry Fouquier.
LES ÉLECTIONS ITALIENNES
(DK NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Rome, 26 novembre.
Les derniers chiffres donnés par le gou-
vernement, et portant le nombre des dé-
putés ministériels élus à 395, englobent
une cinquantaine de membres de l'opposi-
tion de droite.
Les chiffres exacts comportent 1/tO oppo-
sants.
On cite ce mot de M. Zanardelli, collègue
de M. Crispi au ministère :
— La situation est la même qu'en 1886,
avec cette différence que Crispi est main-
tenant le prisonnier de la droite, qu'il a
combattue toute sa vie.
Dans la séance d'hier du conseil des mi-
nistres, il a été arrêté une liste de 50 séna-
teurs à nommer, députés non réélus pour
la plupart.
MORT DE LA BARONNE DE STACKELBERG
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Saint-Pétersbourg, 36 novembre.
La baronne Emilie de Stalkelberg, née
comtesse Haucke, veuve du général de
Stackelberg, sœur de Julie Haucke, qui
épousa morganiquement le prince Alexan-
dre de Hesse et fut la mère des princes de
Battenberg, vient de mourir après une
courte maladie.
Un de ses fils est le baron de Stackelberg,
second secrétaire de l'ambassade russe à
Paris.
Le comte Bossak-Haucke, Haucke les
Pieds-Nus, cousin de la baronne Emilie de
Stackelberg, fut tué pendant la guerre sous
le drapeau français, à la tête d'un corps
franc, près de Dijon.
UN SCANDALE A NIMES
Des employés de l'octroi contrebandiers
et faussaires
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Nîmes, 26 novembre.
Le procureur de la République vient de
faire incarcérer le nommé Martin, préposé
de l'octroi, qui a été surpris en flagrant dé-
lit de faux et d'usage de faux destinés à fa-
voriser la contrebande.
Un sieur Lange, marchand de fromages,
a été également arrêté comme complice.
Plusieurs employés de l'octroi paraissent
être compromis dans cette affaire.
FUITE EN BELGIQUE
ET RETOUR A PARIS
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Bruxelles, 26 novembre.
Lundi matin, une arrestation a été faite
dans un hôtel par la police de Namur.
Un nommé César Gayet, employé de ban-
que, signalé par la préfecture de Paris
comme s'étant enfui avec une somme de
25,000 francs soustraite frauduleusement à
ia banque, et prévenu, en outre, de faux et
de détournements pour 10,000 fr. environ,
a été mis sous la main de la justice.
Aux premiers mots du commissaire,
Gayet tira de sa poche un revolver et fit
mine d'attenter à ses jours. On l'en empê-
cha, et l'on s'empara de l'homme et de son
arme.
Gayet est un homme distingué d'allures,
grand, fort, habillé très finement. Il parait
agé d'une cinquantaine d'années.
Il n'avait pour tout bagage qu'une petite
valise à la main, contenant sans doute les
beaux billets de banque dont cet escroc,
malheureusement pour lui, ne profitera
pas.
ARRESTATION ANNONCÉE
D'UN DÉPUTÉ ITALIEN -
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Gênes, 26 novembre.
Le député socialiste Andréa Costa, qui a été
élu dans deux collèges, à Bologne et à Ra-
venne, est attendu ici aujourd'hui, venant de
-Marseille par bateau à vapeur.
- Le ministère a donné l'ordre au préfet, par
dépêche, de l'appréhender dès qu'il aura mis
i pied à terre, nonobstant l'inviolabilité dont il
L fiât revêtu »ar sou titre de député»,
LE
KRACH MARY. RA YNAU D
EN FUITE OU SUICIDÉ?
La Banque d'Etat en faillite. — Dé-
nouement prévu. — Fin d'un député
repris de justice. — La leçon
profitera-t-elle ?
L'affaire Mary-Raynaud a eu le dénoue-
ment que nous avions prévu.
En l'apprenant, les lecteurs duXIXe Siècle
n'éprouveront aucune surprise. Ils étaient
prévenus. Depuis longtemps, nous les
avions mis en garde contre les manœuvres
de ce financier qui faisait en petit et avec
plus de cynisme ce que d'autres financiers,
députés comme lui, font en grand.
Cet audacieux repris de justice qui, pour
se faire élire dans l'arrondissement de
Saint-Flour, avait usé des mêmes procédés
que les Loreau, les Greffulhe et les Jaluzot,
et qui avait trouvé à Paris comme en Au-
vergne des journaux bien pensants pour le
défendre, vient de se faire justice lui-même,
au moment où la justice allait lui mettre
une fois de plus la main au collet.
Mary-Raynaud, le directeur-de la Banque
d'Etat, a disparu depuis deux jours.
Les uns disent qu'il s'est suicidé comme
le directeur des Bouillons-Parisiens Ro-
senbaum, comme le directeur de l'ancien
Comptoir d'escompte Denfert-Rochereau.
D'autres disent qu'en admettant une pa-
reille hypothèse on lui fait beaucoup d'hon-
neur et qu'il a probablement dû prendre
la fuite après s'être approprié ce qui res-
tait des dépôts de la Banque d'Etat.
Les procédés de Mary-Raynaud
Mary-Raynaud était, sinon l'inventeur des
participations financières, au moins celui
des tripoteurs financiers de la dernière ca-
tégorie qui leur avait donné la plus grande
extension.
Ayant fondé en 1879 la Banque de la
Bourse sous la forme de société anonyme
en participation, il avait été forcé, dès
1883, de suspendre ses paiements, et sa
chute eut pour conséquence sa condamna-
tion, le 6 janvier 1835, à trois ans de prison
pour escroqueries.
Mais ce châtiment, auquel il s'est sous-
trait grâce à l'intervention du trop célèbre
Daniel Wilson, ne devait pas lui servir de
leon.
- - En effet, dès le 26 février 1886, nous le
trouvons en train de constituer la Banque
d'Etat, alors sans indication de capital so-
cial, au moyen d'une souscription publique
d'actions sur lesquelles 250 fr. seulement
devaient être versés. Elle avait pour objet
la spéculation sur toutes les valeurs d'Etat
en général.
Mais les souscripteurs restèrent assez
rares, et Mary-Raynaud finit par constituer
sa société au capital de 10 millions, en s'at-
tribuant comme apport la plus grosse par-
tie du capital social.
Son système consistait à solliciter et rece-
voir en dépôt soit des espèces, soit des ti-
tres, comme les obligations et les actions
de Panama, la rente 3 0/0, l'Extérieure,
toutes les valeurs enfin dont on peut tirer
un parti quelconque à la Bourse,et de pro-
mettre à ses naïfs déposants de leur payer
30 0/0 d'intérêts pour bX) francs versés en
espèces ou en titres.
Ces 30 0/0 étaient payés mensuellement si
les déposants l'exigeaient.
C'est une pratique contre laquelle nous
nous sommes souvent élevés, mais qui a
cependant trouvé de nombreux imita-
teurs.
Nos lecteurs se rappellent que nous les
avons mis fréquemment en garde contre
les fallacieuses promesses des gens qui
leur offraient 3,200 ou A,000 fr. pour cent
francs à gagner sans risques en cinq jours
de Bourse.
C'était exagérer le système de Mary-Ray-
naud, car lui aussi garantissait ses opéra-
tions sans aucun risque et s'engageait à
rendre les titres qu'on avait la naïveté de
lui confier.
Dénouement fatal
Il est arrivé à la Banque d'Etat ce qui ar-
rive fatalement à tout établissement de
crédit, petit ou grand, qui sollicite du pu-
blic des dépôts d'argent et qui, pour servir
à ces dépôts un intérêt petit ou grand de
1 0/0 ou 30 0/0, emploie cet argent dans
des opérations hasardeuses, que ces opé-
rations consistent dans des spéculations à
la Bourse ou dans des placements en fonds
étrangers, argentins ou portugais.
Un jour est venu où, à la suite de cir-
constances que tout le monde connaît, les
déposants de la Banque d'Etat ont eu des
inquiétudes. Alors, ils ont réclamé leur
argent.
M. Mary-Raynaud a commencé par rem-
bourser les plus pressés et les plus exi-
geants. Pour se procurer des ressources, il
s'est lancé dans de nouvelles spéculations
qui n'ont pas été heureuses. Puis les de-
mandes de remboursement devenant plus
nombreuses, il n'a pas voulu attendre l'i-
névitable krach.
La disparition
Lundi dernier, Mary-Raynaud se ren-
dit à la Chambre pour jouir une dernière
fois de son mandat de député. Le matin, en
déjeunant avec le chef du contentieux de
la Banque d'Etat, M. Flament, il avait poussé
la fanfaronnade jusqu'à parler de son in-
tention de faire une interpellation. Il est
vraiment dommage qu'il n'ait pas donné
suite à son projet. C'eût été un joyeux spec-
tacle de voir cet escroc déjà chevronné in-
terpeller le ministre de la justice.
Le lendemain, Mary-Raynaud sortit de
bonne heure en disant à sa femme qu'il se
rendait chez son agréé.
Depuis, on ne l'a plus revu.
Dans l'après-midi, M. Flament ne voyant
pas retenir comme d'habitude Mary-
Raynaud à la Banque d'Etat et se doutant
probablement des raisons de ce retard, alia
touver Mme Mary-Raynaud et lui demanda
ce qu'était devenu son mari.
Mme Mary-Raynaud répondit qu'elle
n'en savait absolument rien.
La soirée, la nuit, se passèrent, on ne vit
pas reparaître Mary-Raynaud.
Hier matin, M. Flament retourna avenue
du Bois-dc-Boulogne dans le somptueux
hôtel du banquier. Mme Mary-Raynaud ne
savait ou disait ne rien savoir de plus que
la veille.
M. Flament se rendit alors chez M. Lam-
bin, commissaire de police du quartier des
Bassins, et l'informa de la disparition du
financier-député.
Une enquête fut aussitôt ouverte. On de-
manda dans toutes les gares si on avait vu
passer quelqu'un répondant au signalement
de Mary-Raynaud, avec une médaille de
député.
L'enquête, comme la plupart de celles
auxquelles nous a habitués M. Lozé,n'abou-
tit à aucun résultat.
Mary-Raynaud était devenu aussi introu-
vable que Padlewsky.
M. Lambin se décida alors à aller chez
Mme Mary-Raynaud, qui lui fit remarquer
qu'un revolver avait disparu d'une pano-
plie.
C'est sur cette indication qu'on a cru pou-
voir baser l'hypothèse du suicide dont le
bruit a couru hier dans la soirée.
Cependant, la nouvel! o de la disparition
de Mary-Raynaud s'est rapidement ré-
pandue, et dans la journés, un grand nom-
bre de déposants allaient réclamer leurs
capitaux à la Banque d'Etat, place de la
Bourse.
Mais la caisse était fermée, et aux uns
comme aux autres on répondait que « le
directeur étant absent, on ne pouvait payer
personne ».
On s'imagine aisément que cette réponse
n'était pas faite pour satisfaire les gogos
qui s'étaient laissé prendre aux belles pro-
messes de Mary-Raynaud.
L'un d'eux, M. Jules-César Chambon, de-
meurant 129, avenue Victor-Hugo, ne tarda
pas à déposer une plainte entre les mains
de M. Rony de Balnègre, commissaire de
police du quartier Vivienne.
Au domicile particulier de Mary-Ray-
naud, avenue du Bois-de-Boulogne, un
grand nombre de créanciers sont venus, en
sortant de la Banque d'Etat, demander des
nouvelles. Mais la porte restait invariable-
ment fermée. Elle ne s'est ouverte que pour
recevoir un chapeau envoyé par la maison
du Petit-Saint-Thomas pour la fille de
Mary-Raynaud, Mlle Fanny.
Deux créanciers, qui se trouvaient là au
moment où le garçon de magasin du Petit-
Saiut-Thomas s'est présenté, voulaient s'op-
poser à ce qu'il livrât la commande.
— Pourquoi cela ? leur dit-il.
— Parce qu'on ne vous payera pas, ré-
pondit l'un d'eux.
— Je voudrais bien voir cela. Et, sans
tenir compte de ces observations, le garçon
remit le chapeau à la concierge, qui revint
quelques instants après payer la facture à
travers la grille.
C'est encore avec notre argent qu'on
paie cela! s'écria alors un des deux créan-
ciers.
Epilogue
Dans la journée, le chef du contentieux
de la Banque d'Etat a demandé au tribunal
de commerce la nomination d'un adminis-
trateur provisoire.
M. Maillard, syndic, a été chargé de faire
une enquête.
Dans la soirée, les scellés ont été appo-
sés. La faillite sera sans doute prononcée
aujourd'hui.
Ajoutons, en terminant, que la Banque
d'Etat comptait parmi ses clients un grand
nombre d'ecclésiastiques et aussi, dit-on,
une grande dame bien connue qui comp-
tait sur Mary-Raynaud pour lui faire re-
gagner les sommes considérables que lui a
coûté le boulangisme.
ÉLECTIONS SÉNATORIALES
DE LA SEINE
C'est dimanche, ainsi qu'on le sait, que
les conseils municipaux nomment leurs dé-
légués en vue des élections sénatoriales du
5 janvier.
Le groupe des Droits de Paris, qui sert
actuellement à désigner l'ancien groupe de
l'autonomie communale, s'est réuni hier à
l'Hôtel de Ville pour procéder à une liste
préparatoire.
Il a été établi en principe que les candi-
dats seraient choisis parmi les partisans de
la suppression du Sénat.
Après une longue discussion, les noms
suivants ont été adoptés :
MM. Desangeois, Alphonse Strauss, Emile
Chaponnct, Besnard, Barbès, Louis Boucher,
Gaston Camus, Dr Gonnard, Mattier, Flock,
Emile Lasalle, Lhotte, Latour, Edmond
Coignet, Gros, Sibille, Dr Daumas, Chancel,
Gros,
Van Gelde., Charriot, Dr Georges Pouchet,
Bauzier, Dr Frébault, Sigismond Lacroix,
Bauzier,
Reignault, Victor Simond, Bouillot, Pay-
naud.
Et comme suppléants : MM. Canson, Vin-
çon, Gastelois, Massin, EUoi, Paul Luquain,
Duuiesnil et Noro.
- Comme on le pense bien, d'autres listes
que celle-là seront certainement présentées
au conseil.
Il est assez piquant de rappeler à ce pro-
pos qu'à la première élection sénatoriale
de la Seine, le conseil municipal de Paris
avait élu pour délégué Victor Hugo et pour
délégué suppléant M. Eugène Spuller.
LE BUDGET ALLEMAND
(D'UN CORRESPONDANT)
Berlin, 26 novembre.
Le projet de budget pour l'empire alle-
mand, pour l'exercice du 1er avril 1891 au 30
mars 1892 balance ses recettes et ses dé-
penses par 1,130,6^5,888 marcs, dont, au
budget ordinaire : 9M,135,067 en dépenses
permanentes; 90,7§0,ii52 en dépenses de
l'année et 98,790,369 en dépenses extraor-
dinaires de l'année.
La part qui, du rendement des douanes
et de l'impôt sur le tabac, devra rester dans
la caisse de l'Empire sera portée de 130
millions de marcs à 1A0 millions.
Les recettes des douanes et des impôts
de consommation comportent une aug-
mentation de Al,35^,500 marcs sur l'exer-
cice précédent.
L'augmentation des crédits de la guerre
s'élève à 5,75.4.707 marcs, dont une partie
importante est nécessitée par l'accroisse-
ment d'effectif -spécifié par la dernière loi
militaire.
Les dépenses annuelles de la marine pré-
sentent un excédent de 7,221,130 marcs. On
construira 3 nouveaux cuirassés, 1 croi-
seur, 1 aviso, 8 torpilleurs.
Les contributions matriculaires des Etats
confédérés sont de 322,626,505 marcs, soit,
en plus de l'exercice précédent, 20,A51,078.
Le montant des sommes à répartir entre
les Etats confédérés est évalué à 331,353,000
marcs, il contrebalance, par conséquent, à
peu de chose près, le montant des contri-
butions matriculaires.
LA FIN DU CHOLÉRA DANS
LA MER ROUGE
(D'UN CORRESPONDANT)
Rome, 56 novembre. — La Gazette - officielle
publie .UIl(} ordonnance portant l'admission
en libre pratique, dans les ports italiens, -(ies
; bâtiments venant de Massouab) où l'4ïû
de enoléra a cessé.
TABLETTES no PROGRÈS
LE PHILTRE
Et le docteur Koch se taisait toujours !
C'est en vain que, de toutes parts, de
compactes et piteuses phalanges de ma-4
lades époumonnés s'acheminent vers Ber-
lin, dont les habitants, saouls d'or et de
gloire, commencent à se demander avec
un brin d'inquiétude ce qu'il adviendra
de cette invasion de bacilles cosmopoli-
tes, appelés sans doute à survivre à leurs
colporteurs et à se fixer sur les bords de
la Sprée ; c'est en vain qu'une armée de
médecins et de journalistes assiège la
porte du Maître, dont les assistants ne sa-
vent plus où donner de l'injecteur; c'est
en vain que, partout, initiés et profanes
font assaut, à ses dépens, de fantaisistes
conjectures; en vain que les échos de
l'univers entier rétentissent du bruit
obsédant de son nom!
Le Maître s'obstine à ne rien dire. Il pa-
raît même qu'il ne faut pas compter qu'il
rompe cet intransigeant silence avant
quinze ou dix-huit mois. C'est, au moins,
ce qu'a cru deviner le docteur Filleau,
l'un des rares Français qui aient pu for-
cer la consigne et prendre le vent du
sanctuaire.
Nous autres Français, avec notre génie
communicatif, débordant, altruiste, fait
d'apostolat, de verbiage et de chevalerie,
nous avons peine à comprendre cette opi-
niâtreté dans la discrétion, alors qu'il
s'agit surtout d'une œuvre intéressant à
un si haut degré l'universalité du genre
humain. Que voulez-vous ? Ce sont « cho-
ses d'Allemagne - Cosas de Alema-
nia!
Je ne ferai pas au docteur Koch l'in-
jure de supposer un seul instant qu'il
veuille ainsi s'approprier tous les béné-
fices pécuniaires de la découverte. Il me
plaît de croire au contraire que le grand
homme abandonne volontiers à ses auxi-
liaires les petits profits de la médica-
tion, lesquels ne se chiffrent pas, cepen-
dant, par moins de 5 ou 6,000 fr. par
jour pour chaque opérateur.
La « spécialité » des tubes de vaccin
charbonneux, dont M. Pasteur s'est, lui
aussi, réservé le monopole, est assuré-
ment une bonne affaire ; il s'en faut, ce-
pendant, qu'elle rapporte à beaucoup
près autant. Il est vrai que le charbon
n'est pas la phtisie, et que M. Pasteur
n'est ni Allemand, ni même docteur en
médecine.
M. Koch n'a-t-il pas craint plutôt des
applications maladroites, intempestives
ou prématurées, de nature à alarmer le
public et à compromettre le prestige et le
succès de la méthode? C'est plus proba-
ble. En tout cas, on assure qu'il
n'a soulevé un coin du voile qu'à son corps
défendant, sous la pression de l'opinion
publique, sinon même sur l'ordre pres-
que formel de l'empereur ..Guillaume, le-
quel, paraît-il, ne se tient plus de joie et
d'orgueil d'avoir mis la main sur le de
Moltke de la stratégie micrographique et
serait même assez disposé à s'attribuer
une part dans ce Sadowa bacillaire.
Si le docteur Koch avait pu n'obéir
qu'à ses propres inspirations, il n'aurait
pas encore soufflé mot de sa découverte,
dont il a la modestie de ne pas se consi-
dérer encore comme définitivement maî-
tre. Des milliers de phtisiques, qui vont
peut-être revenir à la santé, seraient
morts de cette abstention, mais l'honneur
de la science fût resté sauf. Combien de
fois n'a-t-on pas sacrifié des régiments
entiers pour sauver l'honneur du dra-
peau ?
Il est bon d'ajouter que si le docteur
Koch se refuse à livrer son secret, il ne se
refuse pas à livrer le remède. Ni le tsar,
ni le roi de Danemark, ni le roi des Bel-
ges, ni M. Ribot n'ont pu en avoir, de
cette lymphe mystérieuse.
La préparation en est si longue et si
difficile et les clients sont si nombreux,
que les opérateurs de l'Institut hygié-
nique de Berlin sont à la veille d'être
obligés, faute de munitions, d'interrom-
pre leur feu roulant — et lucratif — sur
les bacilles indigènes et sur les bacilles
d'importation.
Cependant, M. Pasteur en a du déjà
recevoir deux flacons, à titre d'hommage
spontané, et le bruit court que tels et tels
médecins parisiens, qui ont fait le voyage
tout exprès, vont être bientôt à même
d'expérimenter sur leurs compatriotes
tuberculeux la panacée d'outre-Rhin.
Or, c'est là l'essentiel. Peu importe, en
effet, aux malades de savoir avec quoi on
les guérit, pourvu qu'on les guérisse !
— Mais, dira-t-on peut-être, s'il y a chez
M. Pasteur des échantillons de la liqueur
magique, rien de plus facile apparem-
ment que d'en démêler, au moyen d'une
bonne petite analyse, l'exacte composi-
tion.
Si les chimistes ordinaires du labora-
toire de la rue Dutot ne se sentent pas
assez forts pour mener à bien cette re-
cherche, que ne passent-ils la main à
l'éminentissime directeur du Laboratoire
municipal, dont le XIXe Siècle est payé,
— ou plutôt « a payé », et même payé
très cher, — pour connaître la transcen-
dante subtilité?
Hélas! ce n'est encore qu'une illusion.
Si, comme il y a lieu de supposer, la pré-
cieuse lymphe est un vaccin ou un virus
d'origine animale, une ptomaïne ou une
leucomaïne, l'analyse chimique ne nous
apprendra pas grand chose, et, tout
comme s'il s'agissait de vin de raisins
secs, M. Girard lui-même n'y verrait que
du bleu (de méthyle). Comme toutes les
autres matières organiques généralement
quelconques, en effet, la lymphe se com-
poserait exclusivement alors d'azote, de
carbone, d'oxygène et d'hydrogène.
MM. les chimistes pourraient bien nous
dire, sans doute, combien il y entre d'a-
tomes de Az, combien de C, combien de H
et combien d'O. Soit! Mais ils ne sau-
raient nous dire ni comment ces atomes
divers s'étaient réunis et associés, af
quelle était la forme chimique de leut
arrangement, ni par quels moyens et en
vertu de quelles lois inédites leur combi-
naison s'était opérée.
Or, il y a tout lieu de croire que c'est
précisément à la genèse sui generis de sa
fabrication, aux « tours de mains" et
aux « actions de présence" qui l'ont pro-
voquée, aidée ou corrigée, à son mode
particulier de culture, en un mot, que la
lymphe anti-tuberculeuse doit ses étran.,
ges vertus.
Après comme avant l'analyse, nous se"
rions toujours logés à la même enseigne :
« Au Mystère. R. Koch, guérisseur. Il n'y a
que la .foi qui sauve. » Il faut attendre et
nous borner a essayer de sauver nos ma-
lades à l'allemande, au liasard de la sec
ringue, et sans en demander plus long.
Au surplus, si nous ignorons la recette
du médicament, nous n'aurons bientôt
plus rien, pour peu queles « interviews n
continuent à pleuvoir, à apprendre sur
ses effets. Et ces effets sont si extraordi-
naires qu'ils suffiraient à eux seuls, alors
même que Koch dût se refuser in sœcula
sœculorum à révéler le mot de l'énigmes
à lui garantir une gloire immortelle.
Imaginez une substance qui, une foiâ
entrée dans le torrent circulatoire, sa
fixe sur les tissus tuberculisés, qu'elle
mortifie, désagrège et dissout, en dédai-
gnant et en épargnant les autres. Imagi-
nez que ces tissus tuberculisés, seuls at-
taqués, tombent et s'éliminent avec les
autres excreta, en entraînant à leur
suite les bacilles qui les peuplaient,
de façon à ne plus laisser à la place
des cavernes et des foyers de puru-
lence que vous savez, que des brèches
tôt réparées et des cicatrices rapidement
closes. Imaginez, en un mot, un diagnos-
tic assez sûr pour que la moindre tare
tuberculeuse, consciente ou non, soit
immédiatement dénoncée par lui, tan-
dis que l'organisme le plus dé-
labré , si tant est que son déla-
brement tienne à des causes étran-
gères à la tuberculose, ne réagisse pas
sous les plus fortes doses. Imaginez,
enfin, que ce procédé de diagnostic est
en même temps un remède, en ce sens
que la lymphe non seulement décèle la
présence des tubercules mais qu'elle les
détruit et les élimine, sans abîmer les
organes circonvoisins. -
N'est-ce pas là une merveille stupé-
fiante, un inestimable bienfait?
La médaille, il est vrai, comme toutes
les médailles, a son revers. Cette dissolu-
tion des tissus électifs ne va point sans une
forte perturbation générale, sans une
réaction violente, — avec fièvre, frissons,
élévation de température, douleurs mus-
culaires, vomissements, dépression, etc.,
à laquelle les malheureux phtisiques dont
le mal est trop invétéré et les poumons
en trop piteux état ne sauraient être im-
punément soumis. Il s'agit, en d'autres
termes, d'un remède héroïque qui peut
sauver le « sujet » quand il possède en-
core un certain ressort, une certaine force
de résistance, mais qui doit tuer infailli-
blement les autres.
Si donc la « lymphe » parait être d'une
efficacité souveraine contre les tubercu-
loses locales, contre les tumeurs osseuses
ou ganglionnaires, contre le lupUiJ, voire
même contre la phtisie pulmonaire prise
à ses débuts, son emploi présenterait
au contraire les plus grands dangers
dans les cas de phtisie pulmonaire
au second ou au troisième degré.
Non pas qu'elle exalte, — au con-
traire ! — la virulence du bacille ; non
pas qu'elle précipite la marche de la ma-
ladie : mais la « poussée » qu'elle provo-
que suffoque le malade par l'œdème ou
l'oblige à cracher d'un seul coup lé peu
de poumon qui lui reste.
Raoul Lucet. ,
LA QUESTION PARNELL
(D'UN CORRESPONDANT)
Londres, 26 novembre.
Dès la rentrée du Parlement, la question
Parnell formait le sujet de toutes les con-
versations dans les couloirs de la Chambre
des communes.
L'opinion générale, presque unanime, des
hommes marquants du parti libérai était
que la nécessité d'une retraite, tout au
moins temporaire, s'imposait inflexible-
ment pour le leader irlandais.
On pensait qu'à la réunion du parti ir-
landais, qui s'est tenue le jour même de la
rentrée des Chambres, et à laquelle assis-
taient tous les députés nationalistes, M. Par-
nell donnerait ou qu'on lui ferait donner
sa démission de chef et directeur du parti,
sinon de député.
L'étonnement a été grand quand on a ap-
pris que M. Parnell avait été réélu et investi
a nouveau de la confiance du parti.
Les ministériels ont triomphé de cette si-
tuation, qui, selon eux, discrédite tout le
parti et le mouvement irlandais, et ils de-
mandent même une dissolution, dans la
persuation que des élections générales se-
raient entièrement défavorables à la cause
du home rule.
Les libéraux gladstoniens regrettent la
détermination prise par M. Parnell.
M. Gladstone a adressé à M. Morley une
lettre qui a été communiquée à M. Parnell
hier dans l'après-midi.
M. Gladstone exprime le regret que M.
Parnell n'ait pas donné sa démission. Il
déclare que le maintien de M. Parnell à la
tête du parti irlandais, non seulement pla-
cerait dans une situation très embarras-
sante beaucoup d'amis sincères et réels
de la cause irlanlaise, mais rendrait la
prolongation de sa situation, à lui Glads..
tone, comme leader du parti libéral, basée
surtout comme elle l'est sur la défense do
la cause de l'Irlande, presque une nullité.
MM. Morley et Gladstone ont eu à ce pro-
pos une entrevue avec M. Parnell. Ils ont
insisté auprès de lui sur le devoir qu'il
avait de démissionner; mais comme M. Par-
nell ne paraissait pas résolu à le faire, M.
Gladstone a communiqué sa lettre à la
presse.
Il en résulte clairement que M. Gladstone
se retirera comme chef de parti, si M. far
retire pas*
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.07%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.07%.
- Auteurs similaires Chadeuil Gustave Chadeuil Gustave /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Chadeuil Gustave" or dc.contributor adj "Chadeuil Gustave")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k75604316/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k75604316/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k75604316/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k75604316/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k75604316
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k75604316
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k75604316/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest