Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1890-05-05
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 05 mai 1890 05 mai 1890
Description : 1890/05/05 (A19,N6685). 1890/05/05 (A19,N6685).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7560224c
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
Dix-neuvième année. — N® ^665 - CINQ Centimes - Paris et Départements - CINQ Centimes LUNDI S MAI JGGO
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AdreMM télêffrapbiqne : XIX. SIÈCLE — PARIS
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THES PROCHAINEMENT
Le XIXe SIÈCLE
Publiera un grand roman-feuilleton
dû a la plume d'un de nos plus pOpfJJo-
laires romanciers, ;■ ■■
AUX HOPITAUX
L'occasion m'a été donnée, ces jours
derniers de voir deux de nos hôpi-
taux. Ce qui rend ces visites si inté-
ressantes, ce n'est pas tant le specta-
cle particulier qu'on y trouve. Le
plaisir de la curiosité satisfaite
le cède à un sentiment plus élevé. Des
constatations particulières qu'on est
appelé à faire se dégage une vue plus
nette des nécessités auxquelles est
soumise l'œuvre hospitalière. Des
aperçus s'ouvrent sur la méthode à
suivre, sur les idées générales à faire
prévaloir.
Un fait saute aux yeux du visiteur
qui pénètre dans l'un de ces vastes
établissements qui portent aujour-
d'hui le nom d'hôpital Trousseau et
d'hôpital Saint-Antoine. Ils n'ont
point été bâtis pour l'usage auquel ils
sont maintenant affectés. On s'en
aperçoit à chaque pas.
C'est ainsi que dans un hôpital des-
tiné à recevoir des enfants malades,se
trouvent des escaliers dont l'abord
n'est pas sans risque, même pour des
adultes valides. C'est une régla aussi
passée aujourd'hui à l'état d'axiome,
qu'il f tut éviter avec soin,dans les sal-
les d'hôpital, les recoins et les angles :
nids à poussière, nids à microbes.
Mais ces antiques édifices sont pleins
de renfoncements, de couloirs, de pe-
tites salles étranglées. On essaie bien
des aménagements. Mais il n'y a rien
nui coûte si cher que les réparations.
rien non plkjus qui soit mois aisé et
moins pratiqué. Ainsi, à l'hôpital
Trousseau, on a construit des pavil-
lons supplémentaires, dans le but d'y
isoler les petits malades atteints de la
fièvre scarlatine ou de la rougeole. On
v* peut-être donner à ces construc-
tions un pendant, en, édifiant un autre
pavillon afffccte aux malades dou-
teux, qu'on placerait de la sorte en
observation. Ce sont des mesures ex-
cellentes, mais elles ne sont pas sans
présenter de graves inconvénients.
Chaque pavillon qu'on élève fait tom-
ber des arbres et disparaître des par-
terres de gazor et de fleurs qui don-
naient aux malades de l'air, de l'espace
et de la gaieté.
D'ailleurs, même bonnes de tout
point, ces modifications ne s'opèrent
pas toutes seules. Il faut compter avec
MM. les architectes, qui ne laissent
pas que de tenir largement leur place.
Leurs préoccupations, du reste, n'ont
qu'un très lointain rapport avec celles
qui hantent l'esprit des médecins. Der-
nièrement, on proposa d'annexer à
l'hôpital Saint-Antoine une Maternité.
Le plan en avait été dressé conformé-
ment aux indications des hommes de
science. Restait à obtenir l'approba-
tion du conseil des bâtiments civils.
Elle fut refusée. La raison, je vous la
donne en mille : les bâtiments proje-
tés n'étaient pas dans le style Louis XVI,
qui est celui des vieux bâtiments de
l'hôpital.
Le docteur Lannelongue, l'éminent
chirurgien de l'hôpital Trousseau,
nous citait un autre exemple de la
toute-puissance de ces messieurs de
l'architecture. Il avait tracé lui-même
le plan d'un amphithéâtre qui devait
servir à ses leçons. Le projet avait
subi tous les visas, reçu tous les sa-
crements. Là-dessus, le docteur Lan-
nelongue s'en fut en vacances, se pro-
mettant d'entrer, dès son retour, en
possession de l'annexe désirée. Quand
il revint, l'amphithéâtre était, en effet,
construit. Mais il avait été disposé au
gré des idées de l'architecte. Quant
aux plans du docteur Lannelongue,
ils avaient disparu, on ne les a jamais
retrouvés.
Dame routine est toute-puissante.
Elle s'affirme dans la pierre de taille
et le moellon. Elle n'est pas moins te-
nace quand il s'agit, non plus des bâ-
timents, mais du personnel qui les
occupera. Les partisans des sœurs ne
se sont pas encore résignés à leur dé-
faite. Ils tentaient hier encore de ral-
lumer l'ardeur de leurs partisans. La
tentative a fait long feu. Si peu au
courant qu'il soit du détail des ques-
tions d'assistance, le public n'est pas
sans s'apercevoir de la comédie qu'on
lui joue. Derrière les protestations
attendries, il devine les calculs inté-
ressés.
Le vrai est que le remplacement des
sœurs par les infirmières laïques a
été, à tous les points de vue, une très
bonne mesure. La communauté for-
mait un bloc, que la supérieure seule
mettait en mouvement. C'est par l'in-
termédiaire de celle-ci que l'adminis-
tration en était réduite à passer, tou-
tes les fois qu'il y avait une observa-
tion à faire. Les laïques sont beau-
coup plus dans la main du directeur.
Le personnel n'est pas parfait; certes,
mais il est bon et perfectible. --
C'est sur un autre point que les ré-
formateurs de notre organisation hos-
pitalière doivent porter leurs ef-
forts.
On retrouve dans l'Assistance pu-
blique, comme dans toutes - les bran-
ches de l'administration française, la
rage d'uniformité et de centralisation
qui est la plaie de notre pays.
On ne veut pas admettre que cha-
que établissement ait le droit, dans
certaines limites, de se gérer à sa
guise, selon ses besoins. Il faut que
des règles identiques jusque dans les
plus petits détails soient appliquées
partout de la même façon, sans souci
des différences inévitables et des tem-
péraments nécessaires.
Non content d'avoir à Paris une ad-
ministration centrale déjà énorme, on
tend à soumettre celle-ci à une direc-
tion générale placée au ministère de
l'intérieur, qui aurait sous la main,
avec Paris,la France tout entière. C'est
une tendance funeste contre laquelle
on ne saurait trop vivement réagir.
Les administrations centrales ne
peuvent utilement remplir que deux
fonctions : grouper le plus de rensei-
gnements possible et fournir ainsi des
moyens de comparaison et d'enseigne-
ment; organiser, au moyen d'inspec-
tions générales bien faites, une sur-
veillance intelligente et large, qui, se-
lon le besoin,stimule ou retienne. Mais
vouloir enlever aux directeurs des
établissements hospitaliers tout droit
d'initiative, rendre chaque jour la
centralisation plus étroite et plus in-
tolérante, il n'y a pas de pire con-
ception.
A. Millerand.
L'UNION LIBÉRALE
Il nous est arrivé d'attirer sur notre
tête les foudres du Journal des Débats,
lorsque nous émettions l'opinion que
l'Union libérale se rapprochait par bien
des côtés du boulangisme et qu'elle n'é-
tait pas loin de faire cause commune avec
lui. Loin d'exagérer, nous étions au-des-
sous de la vérité, et en voici la preuve :
L'Union libérale a présenté dans le quar-
tier Saint-Germain-dès-Prés un candidat,
M. Prache, qui, au premier tour de scru-
tin, a eu moins de voix que le candidat
républicain, M. Depasse, mais qui en
en a eu plus que le candidat boulangiste,
M. Georges Poignant.
Celui-ci s'est retiré de la lutte, tandis
que M. Prache maintenait sa candida-
ture. Or, nous avons entre les mains une
circulaire autographiée adressée par M.
Verdan, président du comité boulangiste
qui patronnait M. Poignant, à ses « chers
camarades » les boulangistes du quar-
tier. Nous en détachons ces quatre li-
gnes :
« J'espère que vous voudrez bien vous
joindre à nous, reporter votre voix et en-
gager vos amis à reporter les leurs sur le
candidat qui représente l'opposition, M.
Laurent Prache. »
Après avoir soutenu ouvertement les
monarchistes ; après avoir eu, elle aussi,
ses « républicains ralliés '1, comme M.
Loreau; après avoir, par son abstention,
assuré le succès de M. Naquet sur son
concurrent républicain, 'l'U nieu libérale
devient, ofifciellement, la protégée du
boulangisme.
Rien ne manque plus à sa gloire.
LES ÉLECTIONS D'AUJOURD'HUI
Elections municipales et élection
législative.
En dehors des élections municipales, dont
le scrutin de ballottage porte sur 59 quar-
tiers, et des élections au conseil général dont
le scrutin de ballottage porte sur les cantons
de Sceaux, Charenton, Vincennes et Neuilly,
une élection législative a lieu dans la
deuxième circonscription de Périgueux
(Dordogne), par suite de l'invalidation de
M. Meilhodon, réactionnaire.
LE PRÉFET A L'HOTEL DE VILLE
La fin d'un conflit. — La décision du
ministre de l'intérieur.
L'emménagement du préfet à l'Hôtel de
Ville est chose décidée en principe.
Il aura sûrement lieu d'ici au 15 juin. Il
est question de profiter des vacances de la
Pentecôte ou de l'Ascension pour l'effectuer.
Il est probable que le ministre de l'inté-
rieur en fixera la date d'ici à deux ou trois
jours.
Les bureaux administratifs qui occupent
encore le pavillon de Flore iront occuper
les locaux qui leur sont attributés à la ca-
serne Lobau et qui sont depuis trois ans
prêts à les recevoir.
L'EMPERCUR DOM PEDRO
Abattement et monomanie
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Cannes, 3 mai.
L'état de santé de Dom Pedro donne de
vives inquiétudes à son entourage.
L'ex-empereur du Brésil n'est plus le
même homme depuis la mort de l'impéra-
trice. Sa gaieté d'autrefois a disparu; il
évite toute compagnie et il reste souvent
plusieurs jours sans sortir de sa chambre.
Les choses les plus futiles le mettent en co-
lère. Aux accès de fureur succèdent des
crises d'abattement pendant lesquelles il
erre dans ses appartements en gémissant
et pleurant comme un enfant.
Il a l'idée fixe qu'il se trouvera bientôt
«ans ressources et mourra de faim.
LiB
RETOUR DE BOULANGER
LE COMITÉ ÉCHOUE DANS SA TENTATIVE
Un truc du comité national. - On
demande des subsides. — Un chef
qui n'obéit pas. — Comité sans
emploi.
[Nous avons reçu la communication qu'on
va lire de la personne qui nous a précédem-
ment adressé sur les choses du boulangisme
les intéressants renseignements dont nos lec-
teurs ont pu apprécier la sûreté:]
La nouvelle du retour du général Bou- *
langer a circulé, dans ces derniers jours,
avec une singulière persistance; ses auteurs
ou colporteurs étaient parvenus même à
faire publier dans divers journaux des in-
formations plus remarquables par la préci-
sion des détails que par leur authenticité,
indiquant la date et l'heure de ce retour, le
costume du général, et même Pépître dont
il se ferait précéder, comme s'il s'agissait
d'une cérémonie officielle réglée à l'avance.
Il ne manquait qu'une chose à ces infor-
mations, c'était d'être vraies.
Cette nouvelle ainsi propagée n'était
pas, comme elle le paraît, une manœuvre
ab-olument électorale, et elle avait bien
moins pour but d'exercer une influence sur
les électeurs-pour le second tour de scrutin,
que sur celui dont on annonçait le retour.
Si le général Boulanger n'a pas eu l'inten-
tion ou n'a pas pris la résolution de venir
purger sa contumace, d'autres ont pris
cette résolution à sa place et ont cru le con-
traindre à la prendre, en faisant annoncer
comme certain un fait qui n'était encore
que dans leur imagination. Telle est la vé-
rité.
L'ultimatum du comité
Le comité national, qui a dirigé l'élection
municipale comme il l'avait fait pour les
précédentes élections et qui avait annoncé
qu'il remportel'ait. une victoire éclatante, a
eié littéralement attérré par le résultat du
scrutin du 97 avril. Ceux qui avaient pris
la part la plus active dans la direction et
dans la confection de la liste des investis
ont considéré ce résultat comme le signal
d'un effondrement qu'on ne pouvait con-
jurer que par une résolution extrême. Ils
ont décidé qu'il fallait sommer le général
Boulanger de revenir à Paris purger sa
contumace devant la haute cour, en le me-
naçant d'une dissolution du comité, dont
les membres reprendraient leur liberté
s'il ne consentait a ce sacrifice.
MM. Laguerre, Naquet, Déroulède et Lai-
sant sont allés porter cet ultimatum à Jer-
sey. Il est assez curieux que ce soit ceux-là
mêmes qui, sauf MtDéroulôde, ont décidé le
général a fuir il y a un an, en prenant, dans
une déclaration publique, la responsabilité
de son départ, qui, aujourd'hui, le som- ~l
ment de revenir se constituer prison-
nier. -
Réponse évasive
La première idée de ce retour appartient,
on le sait, aux chefs, de la Droite, qui en
avaient fait, à la veille des élections légis-
latives, une condition des subsides si lar-
gement alloués au comité boulangiste. Les
chefs de la Droite supposaient, bien à tort,
du reste, que ce retour aurait pour effet
d'assurer la majorité aux monarchistes,
quelle que fût d ailleurs pour le général
l'issue de l'événement. Aussi les monar-
chistes n'ont-ils pas pardonné au général de
ne pas être revenu tenter le coup de main
qui devait leur donner le pouvoir. Depuis
lors, le comité n'a cessé de croire que ce
retour du général était une condition né-
cessaire du succès, parce qu'il lui ramène-
rait tout à la fois les voix réactionnaires,
et surtout les subsides qu'on regrette et qui
font défaut.
Le général Boulanger n'a pas accueilli la
proposition que lui apportaient les mem-
bres du comité avec enthousiasme. Outre
qu'il ne lui était pas démontré qu'il fût ur-
gent qu'il vînt se constituer prisonnier, il a
fait remarquer qu'il n'était pas seul com-
pris dans les poursuites et qu'il ne pouvait
agir qu'après une entente avec son ami et
coaccusé Henri Rochefort.
En route pour Londres
Les quatre mousquetaires boulangistes,
quelque peu démontés par cette remarque,
prirent le parti d'aller a Londres pour dé-
terminer le rédacteur en chef deVJntransi-
geant à user de son influence en faveur de
leur projet, en donnant lui-même l'exemple
d'un sacrifice auquel le général serait bien
contraint de se résoudre.
M. Henri Rochefort, qui n'éprouve pas le
besoin de purger sa contumace, représenta
à ses collègues du comité qu'il n'avait été
condamné que comme complice par la
haute cour, que son sort était par consé-
quent subordonné à celui de ses coaccusés,
et qu'en outre il était indispensable qu'il
restat libre, surtout si le général compa-
raissait à nouveau devant la haute cour,
afin de pouvoir prendre chaque jour sa dé-
fense dans ses articles de l'Intransigeant.
Le chef refuse l'obéissance
A ces observations de M. Henri Rochefort,
il n'y avait pas de réplique. Aussi se borna-
t-on à lui demander d'intervenir près du
général pour le décider à prendre une dé-
termination qui lui inspire beaucoup de
méfiance, et les quatre directeurs du co-
mité, ne se trouvant pas doués d'un fonds
commun de persuasion suffisant, appelè-
rent à leur aide M. Millevoye pour vaincre
les dernières hésitations du « chef » qui
refuse d'obéir, en espérant arracher, à force
d'arguments, d'arguties et de promesses, et
surtout par lassitude, une résolution con-
forme à leurs désirs à cet étrange chef d'un
parti dictatorial, instrument d'un conseil
privé auquel il ne peut résister que par
son mutisme.
Désespérant d'autant plus de vaincre cette
résistance qu'on n'avait pas de bonnes rai-
sons à invoquer et qu'on ne pouvait ou
n'osait produire celles qui motivent en réa-
lié cette démarche, on crut pouvoir en ve-
nir à bout en faisant propager à Paris, grâ-
ce à des amis mettant au service de l'en-
treprise leurs relations et leur ingéniosité,
la nouvelle du retour dans les termes et
dans les conditions où elle s'est produite,
en imaginant même le projet de lettre à M.
Carnot dont nous avons donné le texte. On
supposait que le général, ainsi engagé, fini-
rait par s'exécuter; mais c'était mal connaître
cet homme, dont la volonté presque tou-
jours hésitante ne s'affirme que lorsqu'on
le veut contraindre.
Les amis personnels
Les membres-du comité, qui voyaient
leur salut dans ce retour, désespèrent, à
l'heure actuelle, de décider le général Bou-
langer, mis en dénance, à exécuter leur
langer, d'autant plus que, en apprenant la
projet, que, en apprenant Ja
nouvelle sur la véracité de laquelle ils n'é-
taient pas fixés, les amis personnels et in-
times du général se sont émus et lui ont
exprimé leur espoir de le voir ne pas don-
ner suite à cette idée qu'on lui prêtait de
revenir en France en ce moment, recom-
mencer un procès politique dans lequel
l'impartialité a, selon eux, peu de garantie,
et continuer une agitation stérile.
Rêve évanoui
Quoique le général Boulanger ait presque
toujours obéi en quelque sorte aux hommes
politiques de son comité, en la compétence
desquels il avait confiance, il était devenu
pour eux quelque peu gênant ou encom-
brant. Les directeurs du comité estimaient
qu'il cesserait de l'être alors qu'il serait en-
fermé dans quelque prison d'Etat. Il serait
devenu un martyr dont on aurait invoqué
le nom et l'image, et que l'on n'aurait plus
eu à consulter. Ces membres du comité au-
raient bénéficié, ils l'espéraient du moins,
de la popularité ressuscitée par la crânerie
du général, et plus encore par son empri-
sonnement et une condamnation nouvelle,
et ils seraient restés les maîtres abolus du
boulangisme. -,
Ce beau rêve ne se réalisera pas.
De retour à Paris
Les délégués du comité sont rentrés à
Paris hier soir, l'oreille basse et la bou-
che hermétiquement close. Ne voulant pas
avouer leur défaite, ils ont pris le parti de
ne rien dire.
Que vont-ils faire? .-
Le comité mettra-t-il à exécution sa me-
nace de dissolution? On en peut douter.
Quoique ses membres aient pu préten-
dre, ils doivent bien s'avouer qu'ils n'ont
dû qu'au boulangisme d'être un moment
des personnages, et que s'ils reprenaient
leur liberté,suivant leur expression, ils n'en
pourraient rien faire, condamnés qu'ils
seraieut à errer autour de partis qui ne
paraissent pas très jaloux de leur capacité
et de leur popularité. Il est probable qu'ils
trouveront une combinaison, impossible à
imaginer, tant la fantaisie leur est habi-
tueLe, pour reprendre leur liberté tout en
demeurant le comité électoral sans emploi
qu'ils veulent être pour être quelque
chose et sans lequel ils ne seraient rien.
LA CONVERSION ÉGYPTIENNE
L'adhésion de la Franoe et les condi-
tions de son acceptation.
M. Ribot, ministre des affaires étrangè-
res, a reçu hier après-midi Tigrane-Pacha
et M. Palmers.
Il leur a fait connaître les conditions aux-
quelles la France subordonnait son adhé-
sion à la conversion de la dette égyptienne,
et il leur a donné lecture de la note dans
laquelle sont exposées les vues do notre
cabinet.
Ces conditions sont les suivantes :
La France déclare qu'elle est disposée à
donner son adhésion a la conversion im-
médiate, puisqu'il parait démontré que l'é-
poque actuelle est la plus favorable au
point de vue financier.
Et cette adhésion, elle la donnera sous la
réserve formelle que les fonds disponibles
provenant de la conversion, et qui repré-
sentent, d'après les évaluations, un boni
annuel de sept millions et demi, ne rece-
vront d'emploi que conformément à une
convention ultérieure encore à débattre,
avec le concours et le consentement de
toutes les puissances signataires de la con-
vention de 1885.
Cette réserve a une grosse importance.
On sait, en effet, que l'Angleterre comptait
appliquer ces fonds à l'organisation de son
occupation, aux frais d'entretien de son ar-
mée et au paiement de ses très nombreux
fonctionnaires qui inondent l'Egypte.
Ajoutons que ce document a été envoyé
à notre correspondant au Caire, qui est
chargé de le soumettre au khedive.
LES ESr IONS DE BtLFORT
Dépêche oonfirmée.-- La nouvelle
voie stratégique.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIJiR)
Belfort, 3 mai.
Voici quelques détails complémentaires
sur les deux espions dont je vous ai télé-
graphié l'arrestation hier :
Les deux Allemands en question ont été
surpris et arrêtés en train de lever des
plans aux abords de la place.
Et, détail à noter, ils opéraient à dis-
tance éloignée l'un de l'autre, mais leur
travail était identique. Ce qui les intéres-
sait, c'est la nouvelle voie ferrée militaire
qui contourne la place et relie cette der-
nière aux forts compris entre elle et la
frontière. Ils la suivaient fort paisiblement,
la carte de l'état-major d'une main, le
crayon de l'autre, suivant et notant sur la
première le chemin qu'ils parcouraient le
long de la ligue.
Ceci établi, il n'est pas besoin d'insister
sur le genre d'occupation de ces deux
Allemands.
Il faut pourtant ajouter que la ligne
qu'ils ont relevée est à peine construite, et
que l'état-major de l'armée allemande était
singulièrement pressé pour en reconnaître
la situation exacte.
Il y a une loi sur l'espionnage, l'occasion
est bonne de l'appliquer. Ce sera la pre-
mière fois à Belfort, alors que c'est par
dizaines qu'on compte le nombre d'es-
pions arrêtés, puis. relâchés,
BOMBARDEMENT DE WHYDDAH
Dépêche de l'agence Havas
Kotonou, 3 mai.
Le Kerguelen a bombardé Whyddah les S9
et 30 avril ; les factoreries eut été ména-
gées.
Le commandant Fournier a envoyé un
ultimatum au roi de Dahomey pour lui
réclamer les prisonniers et lui dire que,
sinon, il continuera le bombardement le 5
mai.
Des canotiers d'une maison allemande,
envoyés par les autorités indigènes pour
chercher cette lettre à bord du Kerguelen,
ont dit que le bombardement avait produit
une grande panique.
Les troupes dahoméennes occupent la
rive gauche de l'Ouaéiné, à 70 kilomètres(?)
au nord de Porto-Novo.
UNE ERREUR
La Gazette diplomatique attribue à M. Itené
Goblet le rejet de la convention Wolf à la fin
de 1887.
C'est là une erreur manifeste. M. Gobles
n'est entré au ministère des affaires étrangèret
qu'en 1888,
CHRONIQUE
Un dernier écho de la manifestation de
jeudi, journée historique à laquelle il n'a
manqué. que des événements. Il ne s'a-
git pas là de politique. Je laisse la parole
à un ami qui me raconte une assez pi-
quante petite aventure. Ah 1 les dessous
inattendus de ces périodes de fièvre! Du
diable si je sais, par exemple, de qui mon
ami tient cette historiette, car aucun des
intéressés n'avait à s'en vanter. Mais ve-
nons au fait.
Imaginez donc un brave homme, un
commerçant, si vous voulez, qui est ma-
rié à une séduisante petite personne dont
il est terriblement jaloux. Il n'est ni jeune
ni beau, et il a des raisons pour supposer
qu'un de ses employés; lequel est un so-
lide garçon plein d'aplomb, rôde autour
de sa femme. Il a depuis longtemps
des doutes qui se sont changés en quasi-
certitudes. Ces choses-là arrivent depuis
qu'il y a des jolies femmes qui s'ennuient,
de vieux patrons et de jeunes commis.
L'infortuné négociant passe donc son
existence en continuelles inquiétudes.
D'autant qu'il s'est adressé à une agence
Tricoéhe et Cacolet, dont le directeur,
opérant lui-même, lui envoie communi-
cations sur communications. Elles ne
sont pas encore absolument prédises, mais
elles sont singulièrement alarmantes.
Bref, il est sûr « qu'il y a quelque chose»,
et, n'étant point suffisamment philoso- i
phe, il se dit que, le jour où il aura des
preuves, il ne sera pas un mari commode,
qu'il usera de toutes les armes que la loi
met à sa disposition. Ah, mais ! il ne sera
pas, lui, de ceux dont on se moque ! Il
n'est pas de tempérament sanguinaire, et
il ne tirera pas de coups de revolver sur
les coupables. Non; seulement, il confon-
dra, par les moyens permis, les impu-
dents qui se jouent de lui. Ah! pour cela,
par exemple, il est bien certain qu'il
n'hésitera pas.
Ce mari farouche était un commer-
çant timoré. Tous les racontars au sujet
des conséquences possibles de la manifes-
tation n'avaient pas été sans lui inspirer
quelques craintes, et il avait jugé plus
prudent de fermer son magasin jeudi.
Par suite, ses employés avaient congé.
• Sa femme, dans la matinée, lui déclara
que les événements qui se préparaient lui
causaient une vive frayeur et qu'elle al-
lait passer la journée à la campagne, chez
ses parents. Le pauvre homme, qui n'é-
tait pas rassuré lui-même, accepta ingé-
nument, bien qu'il fût payé pour n'être
plus très confiant, cette explication de Son
absence. Pour lui, ce jour de repos allait
lui permettre de se plonger à loisir dans
ses comptes, dans la préparation de son
inventaire. Il n'allait pas, en badaud, con-
tribuer à encombrer les rues !
De fait, il s'installa dans son bureau, et
il faisait depuis une heure des additions
compliquées,quand un billet,porté par un
commissionnaire, lui arriva de l'agence
Tricoche. Il le lut, et ses joues s'empour-
prèrent, tandis qu'un cri de colère lui
échappait. Comment avait-il été assez sot
pour croire au prétendu petit voyage de
sa femme ? Il était encore vraiment par
trop naïf! L'agence, qui ne chômait
point, elle, l'avertissait que les « preu-
ves » qu'il désirait et redoutait à la fois,
il les trouverait, — indiscutables, hélas 1
— en se transportant de sa personne,
telle rue, tel numéro, où un avisé détec-
tive de cette maison, où la célérité s'unis-
sait à la discrétion, avait vu entrer le
galant commis et l'épouse en rupture de
contrat.
Le commerçant se coiffa de son cha-
peau, d'un geste plein de dignité.
— Ah ! cette fois, s'écria-t-il, je les
tiens. Ce que je vais les faire plncer !.
Cela lui paraissait tout simple. Non,
certes, il ne se gênerait point pour faire
constater le flagrant délit! Ah! ah! on
allait voir si on le pouvait duper impu-
nément!. Et déjà il imaginait, avec une
âpre joie vengeresse, l'humiliation des
coupables, leur effarement lorsqu'ils en-
tendraient tout à coup, troublés dans
leurs félicités, les paroles sacramentelles :
a Ouvrez, au nom de la loi ! » prononcées
par un commissaire de police, requis par
lui et nullement disposé à badiner.
C'est dans ces dispositions rageuses
qu'il se dirigea vers le quartier qu'on lui
avait désigné. Il se rendit devant la mai-
son indiquée, la contempla, navré et in-
digné, avec un air de défi, et il s'écria,
comme s'il s'adressait aux deux traî-
tres :
— Nous allons bien voir qui rira le
dernier!
Mais il fallait agir sans perdre un ins-
tant. Il se renseigna vite et apprit où se
trouvait le commissariat de police qui
avait sous sa juridiction la rue où était
en train de se commettre le moins dou-
teux des attentats contre son honneur.
Le commissariat était plein d'agents
qui paraissaient fort nerveux.
— Tant mieux, pensa-t-il, il ne man-
quera pas de gens pour me prêter main-
forte.
Il eut beaucoup de peine, cependant, à
obtenir accès dans le bureau, et il fut un
moment décontenancé.
Il dit, d'une voix qui trahissait son
émotion :
— Je voudrais parler à M. le commis-
saire.
Un planton lui répondit d'un ton ro-
gue:
- Il n'est pas là, naturellement. Il fait
une ronde dans le quartier.
L'autre insista :
— J'ai pourtant absolument besoin de
le voir. C'est très urgent.
— Urgent! fit le planton. Est-ce que
vous venez de la préfecture ?
— Non.
- Vous n'apportez pas des instruc-
tions?
— Je viens requérir.
- ()hl bien, alors, mon brave homme:
il faut remettre votre demande à un autre
jour.
Le déplorable mari fit un si beau ta-
page qu on l'introduisit enfin auprès du
secrétaire. Celui-ci, très affairé, dépouil-
lait des rapports qui lui parvenaient
d instant en instant. Il interrogea dédai-
gneusement le survenant, sans lever les
yeux :
- Qu'est-ce que vous voulez? Expli-
quez-vous vite; vous voyez que nous
sommes Dressés 1
— Je viens.
— Quoi?
— Je viens pour faire surprendre ma
femme, qui me trompe, en flagrant délit.
- Un adultère! s'écria le secrétaire
avec une pitié railleuse. Eh bien, vous
avez du toupet, vous, de nous déranger
pour cela. si vous croyez que nous
avons le temps de nous occuper de ces
balivernes-là aujourd'hui! Sachez, mon-
sieur, que nous n'aimons pas les mau-
vais plaisants et qu'il pourrait vous en
cuire de vous moquer ainsi de nous !
- Mais je ne me moque pas. malheu-
reusement. J'ai des preuves.
- Un adultère, quand toute la police
est sur pied, quand il s'agit de mainte-
nir J'ordre coûte que coûte 1 Vous tombez
menl. Qu est-oe que voua voulez que ça
puisse nous faire, que votre femme vous
trompe? -
—f Mais, à moi, ça me fait beaucoup.
- Allons, videz la place, et plus vite
que cela. Nous avons à nous occuper de
choses sérieuses!
Ainsi éconduit et fort penaud, le pau-
vre homme eut autant de difficulté à sor-
tir du commissariat encombré, qu'il
avait eu de mal à y entrer. Mais il ne re-
nonçait pas à ses desseins. Il lui parais-
sait par trop amer de laisser les cou-
pables dans une sereine impunité. Que
diableHl devait avoir la Loi pour lui.
Il se jeta à la recherche du commis-
saire lui-même. Mais les consignes étaient
formelles. Gardiens de la paix et gardes
républicains lui barraient sans cesse le
passage, et il était obligé, suant et s'es-
souiilant, à d'invraisemblables détours.
Avec une obstination exaspérée, il reve-
nait à la charge, essayant de se glisser
au milieu des cordons d'agents, bientôt
poursuivi par des cavaliers qui couraient
à ses trousses. — « Mais, s écriait-il la-
mentablement, puisque je vous dis que
c est pour un adultère!. Je ne fais pas
de politique, moi !» — Il est ivre, dit un
agent, en le. rembarrant vigoureuse-
raent.
c, Pourtant, le malheureux apercevait le
commissaire, et il tentait des efforts dé-
sespérés pour s'approcher de lui. Le
temps pressait. Dans une heure, où se-
raient les deux coquins? Il fallait se hâ-
ter de les surprendre. Il interpellait, de
loin, Je magistrat, à qui on avait signalé,
à tort ou à raison, l'approche d'une bande
ae maniiestants et qui donnait des or-
dres fiévreusement : « — Vite, vite, ve-
nez," lui criait-il, contenu par la police,
qui ne lui permettait point de s'avancer,
et ayant déjà reçu force horions. Le com-
missaire, naturellement, ne le voyait
point. Un brigadier s'alarma, à la fin, de
ses gestes furieux : « — Empoignez-moi
cet anarchiste!» dit-il à deux de ses hom-
mes.
Et, déçu dans ses espoirs de vengeance,
le mari trompé et battu fut eonduit au
poste en dépit de ses protestations. Il ne
fut relâché que dans la soirée, — et non
sans peine. Quand il rentra chez lui, il
trouva sa femme déjà endormie d'un cal-
me sommeil, qui ne se réveilla que pour
lui demander eompte, d'un air majes-
tueux, de son insolite absence.
Mon ami m'a assuré que cette aventuré
s'était passée ainsi. Mais, à vous dire le
vrai, je soupçonne un peu mon ami d'ê-
tre un fantaisiste.
Paul Ginisty.
Le « XIX* Siècle a publiera demain la
a Chronique n par M. Francisque Sarce,..
L'EMPRUNT ORTUGAIS
Ce qu'on dit à Lisbonne
Le journal portugais Os Debates publie
la note suivante :
« On dit que les contractants de l'em-
prunt exigeraient du gouvernement, pour
donner suite à leur traité, un boni de 10 fr.
par obligation et que le gouvernement
leur fera cette concession pour ne point
rester sans argent.
» Comme on le sait, les banquiers de
Paris ont pris ces obligations à IM fr. par
titre ; il parait qu'ils ne paieraient aujour-
d'hui que 425 francs, ou tout au plus A97,
ce qui représenterait un grand préjudice
pour le pays ».
La même note se retrouve dans la plu-
part des journaux de Lisbonne.
On nous écrit d'autre part qu'on ne
souhaite nullement à Lisbonne voir le gou-
vernement français accorder la cote à
l'emprunt Ephrussi, qu'on considère com-
me surtout destiné à payer les dépenses
secrètes d'un roi dictateur.
STAILEV A LONDRES
Réception par le prince de Galles
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Londres, 3 mai.
Une grande réception' en l'honneur de
Stanley a eu lieu hier soir à Saint-James
Hall, à Londres. Dans la nombreuse assis-
tance, on remarquait le prince et la prin-
cesse de Galles, le duc et la duchesse d'E-
dimbourg, ainsi que plusieurs ministres.
Le prince de Galles présidait.
Stanley a commencé par dire qu'il ne
parlerait pas d'Emin-Pacna.
Son discours a, en général, désappointé
l'auditoire.Il a été très sec, bourré de faits
et de données géographiques et n'a appris
rien qui ne fût déjà connu.
La réception était organisée par le co-
mité anglais de secours pour la délivrance
d'Emin-Pacha.
JOURNAL RÉPUBLICAIN
RÉDACTION
14 e f Rue jw £ ontanaartro
p4m
DIRECTEUR "'ITIQUE
.&. » ÉDOUARD PORTALIS
PRIX DE L'ABONNE MENT :
Paris. Traimut, ô L; SillllÏJ, 111.; Bau, SOI
J)epart.&8 - 7t; — i2.; — 24r.
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la abonnements partent du 1" et 15 de chaque mois.
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Départements — 7f.; — t21.; — 24 f.
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La abonnements partent des 1" et 15 de chaque mois
AdreMM télêffrapbiqne : XIX. SIÈCLE — PARIS
TttéplM^ ; 20.289 bit.
THES PROCHAINEMENT
Le XIXe SIÈCLE
Publiera un grand roman-feuilleton
dû a la plume d'un de nos plus pOpfJJo-
laires romanciers, ;■ ■■
AUX HOPITAUX
L'occasion m'a été donnée, ces jours
derniers de voir deux de nos hôpi-
taux. Ce qui rend ces visites si inté-
ressantes, ce n'est pas tant le specta-
cle particulier qu'on y trouve. Le
plaisir de la curiosité satisfaite
le cède à un sentiment plus élevé. Des
constatations particulières qu'on est
appelé à faire se dégage une vue plus
nette des nécessités auxquelles est
soumise l'œuvre hospitalière. Des
aperçus s'ouvrent sur la méthode à
suivre, sur les idées générales à faire
prévaloir.
Un fait saute aux yeux du visiteur
qui pénètre dans l'un de ces vastes
établissements qui portent aujour-
d'hui le nom d'hôpital Trousseau et
d'hôpital Saint-Antoine. Ils n'ont
point été bâtis pour l'usage auquel ils
sont maintenant affectés. On s'en
aperçoit à chaque pas.
C'est ainsi que dans un hôpital des-
tiné à recevoir des enfants malades,se
trouvent des escaliers dont l'abord
n'est pas sans risque, même pour des
adultes valides. C'est une régla aussi
passée aujourd'hui à l'état d'axiome,
qu'il f tut éviter avec soin,dans les sal-
les d'hôpital, les recoins et les angles :
nids à poussière, nids à microbes.
Mais ces antiques édifices sont pleins
de renfoncements, de couloirs, de pe-
tites salles étranglées. On essaie bien
des aménagements. Mais il n'y a rien
nui coûte si cher que les réparations.
rien non plkjus qui soit mois aisé et
moins pratiqué. Ainsi, à l'hôpital
Trousseau, on a construit des pavil-
lons supplémentaires, dans le but d'y
isoler les petits malades atteints de la
fièvre scarlatine ou de la rougeole. On
v* peut-être donner à ces construc-
tions un pendant, en, édifiant un autre
pavillon afffccte aux malades dou-
teux, qu'on placerait de la sorte en
observation. Ce sont des mesures ex-
cellentes, mais elles ne sont pas sans
présenter de graves inconvénients.
Chaque pavillon qu'on élève fait tom-
ber des arbres et disparaître des par-
terres de gazor et de fleurs qui don-
naient aux malades de l'air, de l'espace
et de la gaieté.
D'ailleurs, même bonnes de tout
point, ces modifications ne s'opèrent
pas toutes seules. Il faut compter avec
MM. les architectes, qui ne laissent
pas que de tenir largement leur place.
Leurs préoccupations, du reste, n'ont
qu'un très lointain rapport avec celles
qui hantent l'esprit des médecins. Der-
nièrement, on proposa d'annexer à
l'hôpital Saint-Antoine une Maternité.
Le plan en avait été dressé conformé-
ment aux indications des hommes de
science. Restait à obtenir l'approba-
tion du conseil des bâtiments civils.
Elle fut refusée. La raison, je vous la
donne en mille : les bâtiments proje-
tés n'étaient pas dans le style Louis XVI,
qui est celui des vieux bâtiments de
l'hôpital.
Le docteur Lannelongue, l'éminent
chirurgien de l'hôpital Trousseau,
nous citait un autre exemple de la
toute-puissance de ces messieurs de
l'architecture. Il avait tracé lui-même
le plan d'un amphithéâtre qui devait
servir à ses leçons. Le projet avait
subi tous les visas, reçu tous les sa-
crements. Là-dessus, le docteur Lan-
nelongue s'en fut en vacances, se pro-
mettant d'entrer, dès son retour, en
possession de l'annexe désirée. Quand
il revint, l'amphithéâtre était, en effet,
construit. Mais il avait été disposé au
gré des idées de l'architecte. Quant
aux plans du docteur Lannelongue,
ils avaient disparu, on ne les a jamais
retrouvés.
Dame routine est toute-puissante.
Elle s'affirme dans la pierre de taille
et le moellon. Elle n'est pas moins te-
nace quand il s'agit, non plus des bâ-
timents, mais du personnel qui les
occupera. Les partisans des sœurs ne
se sont pas encore résignés à leur dé-
faite. Ils tentaient hier encore de ral-
lumer l'ardeur de leurs partisans. La
tentative a fait long feu. Si peu au
courant qu'il soit du détail des ques-
tions d'assistance, le public n'est pas
sans s'apercevoir de la comédie qu'on
lui joue. Derrière les protestations
attendries, il devine les calculs inté-
ressés.
Le vrai est que le remplacement des
sœurs par les infirmières laïques a
été, à tous les points de vue, une très
bonne mesure. La communauté for-
mait un bloc, que la supérieure seule
mettait en mouvement. C'est par l'in-
termédiaire de celle-ci que l'adminis-
tration en était réduite à passer, tou-
tes les fois qu'il y avait une observa-
tion à faire. Les laïques sont beau-
coup plus dans la main du directeur.
Le personnel n'est pas parfait; certes,
mais il est bon et perfectible. --
C'est sur un autre point que les ré-
formateurs de notre organisation hos-
pitalière doivent porter leurs ef-
forts.
On retrouve dans l'Assistance pu-
blique, comme dans toutes - les bran-
ches de l'administration française, la
rage d'uniformité et de centralisation
qui est la plaie de notre pays.
On ne veut pas admettre que cha-
que établissement ait le droit, dans
certaines limites, de se gérer à sa
guise, selon ses besoins. Il faut que
des règles identiques jusque dans les
plus petits détails soient appliquées
partout de la même façon, sans souci
des différences inévitables et des tem-
péraments nécessaires.
Non content d'avoir à Paris une ad-
ministration centrale déjà énorme, on
tend à soumettre celle-ci à une direc-
tion générale placée au ministère de
l'intérieur, qui aurait sous la main,
avec Paris,la France tout entière. C'est
une tendance funeste contre laquelle
on ne saurait trop vivement réagir.
Les administrations centrales ne
peuvent utilement remplir que deux
fonctions : grouper le plus de rensei-
gnements possible et fournir ainsi des
moyens de comparaison et d'enseigne-
ment; organiser, au moyen d'inspec-
tions générales bien faites, une sur-
veillance intelligente et large, qui, se-
lon le besoin,stimule ou retienne. Mais
vouloir enlever aux directeurs des
établissements hospitaliers tout droit
d'initiative, rendre chaque jour la
centralisation plus étroite et plus in-
tolérante, il n'y a pas de pire con-
ception.
A. Millerand.
L'UNION LIBÉRALE
Il nous est arrivé d'attirer sur notre
tête les foudres du Journal des Débats,
lorsque nous émettions l'opinion que
l'Union libérale se rapprochait par bien
des côtés du boulangisme et qu'elle n'é-
tait pas loin de faire cause commune avec
lui. Loin d'exagérer, nous étions au-des-
sous de la vérité, et en voici la preuve :
L'Union libérale a présenté dans le quar-
tier Saint-Germain-dès-Prés un candidat,
M. Prache, qui, au premier tour de scru-
tin, a eu moins de voix que le candidat
républicain, M. Depasse, mais qui en
en a eu plus que le candidat boulangiste,
M. Georges Poignant.
Celui-ci s'est retiré de la lutte, tandis
que M. Prache maintenait sa candida-
ture. Or, nous avons entre les mains une
circulaire autographiée adressée par M.
Verdan, président du comité boulangiste
qui patronnait M. Poignant, à ses « chers
camarades » les boulangistes du quar-
tier. Nous en détachons ces quatre li-
gnes :
« J'espère que vous voudrez bien vous
joindre à nous, reporter votre voix et en-
gager vos amis à reporter les leurs sur le
candidat qui représente l'opposition, M.
Laurent Prache. »
Après avoir soutenu ouvertement les
monarchistes ; après avoir eu, elle aussi,
ses « républicains ralliés '1, comme M.
Loreau; après avoir, par son abstention,
assuré le succès de M. Naquet sur son
concurrent républicain, 'l'U nieu libérale
devient, ofifciellement, la protégée du
boulangisme.
Rien ne manque plus à sa gloire.
LES ÉLECTIONS D'AUJOURD'HUI
Elections municipales et élection
législative.
En dehors des élections municipales, dont
le scrutin de ballottage porte sur 59 quar-
tiers, et des élections au conseil général dont
le scrutin de ballottage porte sur les cantons
de Sceaux, Charenton, Vincennes et Neuilly,
une élection législative a lieu dans la
deuxième circonscription de Périgueux
(Dordogne), par suite de l'invalidation de
M. Meilhodon, réactionnaire.
LE PRÉFET A L'HOTEL DE VILLE
La fin d'un conflit. — La décision du
ministre de l'intérieur.
L'emménagement du préfet à l'Hôtel de
Ville est chose décidée en principe.
Il aura sûrement lieu d'ici au 15 juin. Il
est question de profiter des vacances de la
Pentecôte ou de l'Ascension pour l'effectuer.
Il est probable que le ministre de l'inté-
rieur en fixera la date d'ici à deux ou trois
jours.
Les bureaux administratifs qui occupent
encore le pavillon de Flore iront occuper
les locaux qui leur sont attributés à la ca-
serne Lobau et qui sont depuis trois ans
prêts à les recevoir.
L'EMPERCUR DOM PEDRO
Abattement et monomanie
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Cannes, 3 mai.
L'état de santé de Dom Pedro donne de
vives inquiétudes à son entourage.
L'ex-empereur du Brésil n'est plus le
même homme depuis la mort de l'impéra-
trice. Sa gaieté d'autrefois a disparu; il
évite toute compagnie et il reste souvent
plusieurs jours sans sortir de sa chambre.
Les choses les plus futiles le mettent en co-
lère. Aux accès de fureur succèdent des
crises d'abattement pendant lesquelles il
erre dans ses appartements en gémissant
et pleurant comme un enfant.
Il a l'idée fixe qu'il se trouvera bientôt
«ans ressources et mourra de faim.
LiB
RETOUR DE BOULANGER
LE COMITÉ ÉCHOUE DANS SA TENTATIVE
Un truc du comité national. - On
demande des subsides. — Un chef
qui n'obéit pas. — Comité sans
emploi.
[Nous avons reçu la communication qu'on
va lire de la personne qui nous a précédem-
ment adressé sur les choses du boulangisme
les intéressants renseignements dont nos lec-
teurs ont pu apprécier la sûreté:]
La nouvelle du retour du général Bou- *
langer a circulé, dans ces derniers jours,
avec une singulière persistance; ses auteurs
ou colporteurs étaient parvenus même à
faire publier dans divers journaux des in-
formations plus remarquables par la préci-
sion des détails que par leur authenticité,
indiquant la date et l'heure de ce retour, le
costume du général, et même Pépître dont
il se ferait précéder, comme s'il s'agissait
d'une cérémonie officielle réglée à l'avance.
Il ne manquait qu'une chose à ces infor-
mations, c'était d'être vraies.
Cette nouvelle ainsi propagée n'était
pas, comme elle le paraît, une manœuvre
ab-olument électorale, et elle avait bien
moins pour but d'exercer une influence sur
les électeurs-pour le second tour de scrutin,
que sur celui dont on annonçait le retour.
Si le général Boulanger n'a pas eu l'inten-
tion ou n'a pas pris la résolution de venir
purger sa contumace, d'autres ont pris
cette résolution à sa place et ont cru le con-
traindre à la prendre, en faisant annoncer
comme certain un fait qui n'était encore
que dans leur imagination. Telle est la vé-
rité.
L'ultimatum du comité
Le comité national, qui a dirigé l'élection
municipale comme il l'avait fait pour les
précédentes élections et qui avait annoncé
qu'il remportel'ait. une victoire éclatante, a
eié littéralement attérré par le résultat du
scrutin du 97 avril. Ceux qui avaient pris
la part la plus active dans la direction et
dans la confection de la liste des investis
ont considéré ce résultat comme le signal
d'un effondrement qu'on ne pouvait con-
jurer que par une résolution extrême. Ils
ont décidé qu'il fallait sommer le général
Boulanger de revenir à Paris purger sa
contumace devant la haute cour, en le me-
naçant d'une dissolution du comité, dont
les membres reprendraient leur liberté
s'il ne consentait a ce sacrifice.
MM. Laguerre, Naquet, Déroulède et Lai-
sant sont allés porter cet ultimatum à Jer-
sey. Il est assez curieux que ce soit ceux-là
mêmes qui, sauf MtDéroulôde, ont décidé le
général a fuir il y a un an, en prenant, dans
une déclaration publique, la responsabilité
de son départ, qui, aujourd'hui, le som- ~l
ment de revenir se constituer prison-
nier. -
Réponse évasive
La première idée de ce retour appartient,
on le sait, aux chefs, de la Droite, qui en
avaient fait, à la veille des élections légis-
latives, une condition des subsides si lar-
gement alloués au comité boulangiste. Les
chefs de la Droite supposaient, bien à tort,
du reste, que ce retour aurait pour effet
d'assurer la majorité aux monarchistes,
quelle que fût d ailleurs pour le général
l'issue de l'événement. Aussi les monar-
chistes n'ont-ils pas pardonné au général de
ne pas être revenu tenter le coup de main
qui devait leur donner le pouvoir. Depuis
lors, le comité n'a cessé de croire que ce
retour du général était une condition né-
cessaire du succès, parce qu'il lui ramène-
rait tout à la fois les voix réactionnaires,
et surtout les subsides qu'on regrette et qui
font défaut.
Le général Boulanger n'a pas accueilli la
proposition que lui apportaient les mem-
bres du comité avec enthousiasme. Outre
qu'il ne lui était pas démontré qu'il fût ur-
gent qu'il vînt se constituer prisonnier, il a
fait remarquer qu'il n'était pas seul com-
pris dans les poursuites et qu'il ne pouvait
agir qu'après une entente avec son ami et
coaccusé Henri Rochefort.
En route pour Londres
Les quatre mousquetaires boulangistes,
quelque peu démontés par cette remarque,
prirent le parti d'aller a Londres pour dé-
terminer le rédacteur en chef deVJntransi-
geant à user de son influence en faveur de
leur projet, en donnant lui-même l'exemple
d'un sacrifice auquel le général serait bien
contraint de se résoudre.
M. Henri Rochefort, qui n'éprouve pas le
besoin de purger sa contumace, représenta
à ses collègues du comité qu'il n'avait été
condamné que comme complice par la
haute cour, que son sort était par consé-
quent subordonné à celui de ses coaccusés,
et qu'en outre il était indispensable qu'il
restat libre, surtout si le général compa-
raissait à nouveau devant la haute cour,
afin de pouvoir prendre chaque jour sa dé-
fense dans ses articles de l'Intransigeant.
Le chef refuse l'obéissance
A ces observations de M. Henri Rochefort,
il n'y avait pas de réplique. Aussi se borna-
t-on à lui demander d'intervenir près du
général pour le décider à prendre une dé-
termination qui lui inspire beaucoup de
méfiance, et les quatre directeurs du co-
mité, ne se trouvant pas doués d'un fonds
commun de persuasion suffisant, appelè-
rent à leur aide M. Millevoye pour vaincre
les dernières hésitations du « chef » qui
refuse d'obéir, en espérant arracher, à force
d'arguments, d'arguties et de promesses, et
surtout par lassitude, une résolution con-
forme à leurs désirs à cet étrange chef d'un
parti dictatorial, instrument d'un conseil
privé auquel il ne peut résister que par
son mutisme.
Désespérant d'autant plus de vaincre cette
résistance qu'on n'avait pas de bonnes rai-
sons à invoquer et qu'on ne pouvait ou
n'osait produire celles qui motivent en réa-
lié cette démarche, on crut pouvoir en ve-
nir à bout en faisant propager à Paris, grâ-
ce à des amis mettant au service de l'en-
treprise leurs relations et leur ingéniosité,
la nouvelle du retour dans les termes et
dans les conditions où elle s'est produite,
en imaginant même le projet de lettre à M.
Carnot dont nous avons donné le texte. On
supposait que le général, ainsi engagé, fini-
rait par s'exécuter; mais c'était mal connaître
cet homme, dont la volonté presque tou-
jours hésitante ne s'affirme que lorsqu'on
le veut contraindre.
Les amis personnels
Les membres-du comité, qui voyaient
leur salut dans ce retour, désespèrent, à
l'heure actuelle, de décider le général Bou-
langer, mis en dénance, à exécuter leur
langer, d'autant plus que, en apprenant la
projet, que, en apprenant Ja
nouvelle sur la véracité de laquelle ils n'é-
taient pas fixés, les amis personnels et in-
times du général se sont émus et lui ont
exprimé leur espoir de le voir ne pas don-
ner suite à cette idée qu'on lui prêtait de
revenir en France en ce moment, recom-
mencer un procès politique dans lequel
l'impartialité a, selon eux, peu de garantie,
et continuer une agitation stérile.
Rêve évanoui
Quoique le général Boulanger ait presque
toujours obéi en quelque sorte aux hommes
politiques de son comité, en la compétence
desquels il avait confiance, il était devenu
pour eux quelque peu gênant ou encom-
brant. Les directeurs du comité estimaient
qu'il cesserait de l'être alors qu'il serait en-
fermé dans quelque prison d'Etat. Il serait
devenu un martyr dont on aurait invoqué
le nom et l'image, et que l'on n'aurait plus
eu à consulter. Ces membres du comité au-
raient bénéficié, ils l'espéraient du moins,
de la popularité ressuscitée par la crânerie
du général, et plus encore par son empri-
sonnement et une condamnation nouvelle,
et ils seraient restés les maîtres abolus du
boulangisme. -,
Ce beau rêve ne se réalisera pas.
De retour à Paris
Les délégués du comité sont rentrés à
Paris hier soir, l'oreille basse et la bou-
che hermétiquement close. Ne voulant pas
avouer leur défaite, ils ont pris le parti de
ne rien dire.
Que vont-ils faire? .-
Le comité mettra-t-il à exécution sa me-
nace de dissolution? On en peut douter.
Quoique ses membres aient pu préten-
dre, ils doivent bien s'avouer qu'ils n'ont
dû qu'au boulangisme d'être un moment
des personnages, et que s'ils reprenaient
leur liberté,suivant leur expression, ils n'en
pourraient rien faire, condamnés qu'ils
seraieut à errer autour de partis qui ne
paraissent pas très jaloux de leur capacité
et de leur popularité. Il est probable qu'ils
trouveront une combinaison, impossible à
imaginer, tant la fantaisie leur est habi-
tueLe, pour reprendre leur liberté tout en
demeurant le comité électoral sans emploi
qu'ils veulent être pour être quelque
chose et sans lequel ils ne seraient rien.
LA CONVERSION ÉGYPTIENNE
L'adhésion de la Franoe et les condi-
tions de son acceptation.
M. Ribot, ministre des affaires étrangè-
res, a reçu hier après-midi Tigrane-Pacha
et M. Palmers.
Il leur a fait connaître les conditions aux-
quelles la France subordonnait son adhé-
sion à la conversion de la dette égyptienne,
et il leur a donné lecture de la note dans
laquelle sont exposées les vues do notre
cabinet.
Ces conditions sont les suivantes :
La France déclare qu'elle est disposée à
donner son adhésion a la conversion im-
médiate, puisqu'il parait démontré que l'é-
poque actuelle est la plus favorable au
point de vue financier.
Et cette adhésion, elle la donnera sous la
réserve formelle que les fonds disponibles
provenant de la conversion, et qui repré-
sentent, d'après les évaluations, un boni
annuel de sept millions et demi, ne rece-
vront d'emploi que conformément à une
convention ultérieure encore à débattre,
avec le concours et le consentement de
toutes les puissances signataires de la con-
vention de 1885.
Cette réserve a une grosse importance.
On sait, en effet, que l'Angleterre comptait
appliquer ces fonds à l'organisation de son
occupation, aux frais d'entretien de son ar-
mée et au paiement de ses très nombreux
fonctionnaires qui inondent l'Egypte.
Ajoutons que ce document a été envoyé
à notre correspondant au Caire, qui est
chargé de le soumettre au khedive.
LES ESr IONS DE BtLFORT
Dépêche oonfirmée.-- La nouvelle
voie stratégique.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIJiR)
Belfort, 3 mai.
Voici quelques détails complémentaires
sur les deux espions dont je vous ai télé-
graphié l'arrestation hier :
Les deux Allemands en question ont été
surpris et arrêtés en train de lever des
plans aux abords de la place.
Et, détail à noter, ils opéraient à dis-
tance éloignée l'un de l'autre, mais leur
travail était identique. Ce qui les intéres-
sait, c'est la nouvelle voie ferrée militaire
qui contourne la place et relie cette der-
nière aux forts compris entre elle et la
frontière. Ils la suivaient fort paisiblement,
la carte de l'état-major d'une main, le
crayon de l'autre, suivant et notant sur la
première le chemin qu'ils parcouraient le
long de la ligue.
Ceci établi, il n'est pas besoin d'insister
sur le genre d'occupation de ces deux
Allemands.
Il faut pourtant ajouter que la ligne
qu'ils ont relevée est à peine construite, et
que l'état-major de l'armée allemande était
singulièrement pressé pour en reconnaître
la situation exacte.
Il y a une loi sur l'espionnage, l'occasion
est bonne de l'appliquer. Ce sera la pre-
mière fois à Belfort, alors que c'est par
dizaines qu'on compte le nombre d'es-
pions arrêtés, puis. relâchés,
BOMBARDEMENT DE WHYDDAH
Dépêche de l'agence Havas
Kotonou, 3 mai.
Le Kerguelen a bombardé Whyddah les S9
et 30 avril ; les factoreries eut été ména-
gées.
Le commandant Fournier a envoyé un
ultimatum au roi de Dahomey pour lui
réclamer les prisonniers et lui dire que,
sinon, il continuera le bombardement le 5
mai.
Des canotiers d'une maison allemande,
envoyés par les autorités indigènes pour
chercher cette lettre à bord du Kerguelen,
ont dit que le bombardement avait produit
une grande panique.
Les troupes dahoméennes occupent la
rive gauche de l'Ouaéiné, à 70 kilomètres(?)
au nord de Porto-Novo.
UNE ERREUR
La Gazette diplomatique attribue à M. Itené
Goblet le rejet de la convention Wolf à la fin
de 1887.
C'est là une erreur manifeste. M. Gobles
n'est entré au ministère des affaires étrangèret
qu'en 1888,
CHRONIQUE
Un dernier écho de la manifestation de
jeudi, journée historique à laquelle il n'a
manqué. que des événements. Il ne s'a-
git pas là de politique. Je laisse la parole
à un ami qui me raconte une assez pi-
quante petite aventure. Ah 1 les dessous
inattendus de ces périodes de fièvre! Du
diable si je sais, par exemple, de qui mon
ami tient cette historiette, car aucun des
intéressés n'avait à s'en vanter. Mais ve-
nons au fait.
Imaginez donc un brave homme, un
commerçant, si vous voulez, qui est ma-
rié à une séduisante petite personne dont
il est terriblement jaloux. Il n'est ni jeune
ni beau, et il a des raisons pour supposer
qu'un de ses employés; lequel est un so-
lide garçon plein d'aplomb, rôde autour
de sa femme. Il a depuis longtemps
des doutes qui se sont changés en quasi-
certitudes. Ces choses-là arrivent depuis
qu'il y a des jolies femmes qui s'ennuient,
de vieux patrons et de jeunes commis.
L'infortuné négociant passe donc son
existence en continuelles inquiétudes.
D'autant qu'il s'est adressé à une agence
Tricoéhe et Cacolet, dont le directeur,
opérant lui-même, lui envoie communi-
cations sur communications. Elles ne
sont pas encore absolument prédises, mais
elles sont singulièrement alarmantes.
Bref, il est sûr « qu'il y a quelque chose»,
et, n'étant point suffisamment philoso- i
phe, il se dit que, le jour où il aura des
preuves, il ne sera pas un mari commode,
qu'il usera de toutes les armes que la loi
met à sa disposition. Ah, mais ! il ne sera
pas, lui, de ceux dont on se moque ! Il
n'est pas de tempérament sanguinaire, et
il ne tirera pas de coups de revolver sur
les coupables. Non; seulement, il confon-
dra, par les moyens permis, les impu-
dents qui se jouent de lui. Ah! pour cela,
par exemple, il est bien certain qu'il
n'hésitera pas.
Ce mari farouche était un commer-
çant timoré. Tous les racontars au sujet
des conséquences possibles de la manifes-
tation n'avaient pas été sans lui inspirer
quelques craintes, et il avait jugé plus
prudent de fermer son magasin jeudi.
Par suite, ses employés avaient congé.
• Sa femme, dans la matinée, lui déclara
que les événements qui se préparaient lui
causaient une vive frayeur et qu'elle al-
lait passer la journée à la campagne, chez
ses parents. Le pauvre homme, qui n'é-
tait pas rassuré lui-même, accepta ingé-
nument, bien qu'il fût payé pour n'être
plus très confiant, cette explication de Son
absence. Pour lui, ce jour de repos allait
lui permettre de se plonger à loisir dans
ses comptes, dans la préparation de son
inventaire. Il n'allait pas, en badaud, con-
tribuer à encombrer les rues !
De fait, il s'installa dans son bureau, et
il faisait depuis une heure des additions
compliquées,quand un billet,porté par un
commissionnaire, lui arriva de l'agence
Tricoche. Il le lut, et ses joues s'empour-
prèrent, tandis qu'un cri de colère lui
échappait. Comment avait-il été assez sot
pour croire au prétendu petit voyage de
sa femme ? Il était encore vraiment par
trop naïf! L'agence, qui ne chômait
point, elle, l'avertissait que les « preu-
ves » qu'il désirait et redoutait à la fois,
il les trouverait, — indiscutables, hélas 1
— en se transportant de sa personne,
telle rue, tel numéro, où un avisé détec-
tive de cette maison, où la célérité s'unis-
sait à la discrétion, avait vu entrer le
galant commis et l'épouse en rupture de
contrat.
Le commerçant se coiffa de son cha-
peau, d'un geste plein de dignité.
— Ah ! cette fois, s'écria-t-il, je les
tiens. Ce que je vais les faire plncer !.
Cela lui paraissait tout simple. Non,
certes, il ne se gênerait point pour faire
constater le flagrant délit! Ah! ah! on
allait voir si on le pouvait duper impu-
nément!. Et déjà il imaginait, avec une
âpre joie vengeresse, l'humiliation des
coupables, leur effarement lorsqu'ils en-
tendraient tout à coup, troublés dans
leurs félicités, les paroles sacramentelles :
a Ouvrez, au nom de la loi ! » prononcées
par un commissaire de police, requis par
lui et nullement disposé à badiner.
C'est dans ces dispositions rageuses
qu'il se dirigea vers le quartier qu'on lui
avait désigné. Il se rendit devant la mai-
son indiquée, la contempla, navré et in-
digné, avec un air de défi, et il s'écria,
comme s'il s'adressait aux deux traî-
tres :
— Nous allons bien voir qui rira le
dernier!
Mais il fallait agir sans perdre un ins-
tant. Il se renseigna vite et apprit où se
trouvait le commissariat de police qui
avait sous sa juridiction la rue où était
en train de se commettre le moins dou-
teux des attentats contre son honneur.
Le commissariat était plein d'agents
qui paraissaient fort nerveux.
— Tant mieux, pensa-t-il, il ne man-
quera pas de gens pour me prêter main-
forte.
Il eut beaucoup de peine, cependant, à
obtenir accès dans le bureau, et il fut un
moment décontenancé.
Il dit, d'une voix qui trahissait son
émotion :
— Je voudrais parler à M. le commis-
saire.
Un planton lui répondit d'un ton ro-
gue:
- Il n'est pas là, naturellement. Il fait
une ronde dans le quartier.
L'autre insista :
— J'ai pourtant absolument besoin de
le voir. C'est très urgent.
— Urgent! fit le planton. Est-ce que
vous venez de la préfecture ?
— Non.
- Vous n'apportez pas des instruc-
tions?
— Je viens requérir.
- ()hl bien, alors, mon brave homme:
il faut remettre votre demande à un autre
jour.
Le déplorable mari fit un si beau ta-
page qu on l'introduisit enfin auprès du
secrétaire. Celui-ci, très affairé, dépouil-
lait des rapports qui lui parvenaient
d instant en instant. Il interrogea dédai-
gneusement le survenant, sans lever les
yeux :
- Qu'est-ce que vous voulez? Expli-
quez-vous vite; vous voyez que nous
sommes Dressés 1
— Je viens.
— Quoi?
— Je viens pour faire surprendre ma
femme, qui me trompe, en flagrant délit.
- Un adultère! s'écria le secrétaire
avec une pitié railleuse. Eh bien, vous
avez du toupet, vous, de nous déranger
pour cela. si vous croyez que nous
avons le temps de nous occuper de ces
balivernes-là aujourd'hui! Sachez, mon-
sieur, que nous n'aimons pas les mau-
vais plaisants et qu'il pourrait vous en
cuire de vous moquer ainsi de nous !
- Mais je ne me moque pas. malheu-
reusement. J'ai des preuves.
- Un adultère, quand toute la police
est sur pied, quand il s'agit de mainte-
nir J'ordre coûte que coûte 1 Vous tombez
menl. Qu est-oe que voua voulez que ça
puisse nous faire, que votre femme vous
trompe? -
—f Mais, à moi, ça me fait beaucoup.
- Allons, videz la place, et plus vite
que cela. Nous avons à nous occuper de
choses sérieuses!
Ainsi éconduit et fort penaud, le pau-
vre homme eut autant de difficulté à sor-
tir du commissariat encombré, qu'il
avait eu de mal à y entrer. Mais il ne re-
nonçait pas à ses desseins. Il lui parais-
sait par trop amer de laisser les cou-
pables dans une sereine impunité. Que
diableHl devait avoir la Loi pour lui.
Il se jeta à la recherche du commis-
saire lui-même. Mais les consignes étaient
formelles. Gardiens de la paix et gardes
républicains lui barraient sans cesse le
passage, et il était obligé, suant et s'es-
souiilant, à d'invraisemblables détours.
Avec une obstination exaspérée, il reve-
nait à la charge, essayant de se glisser
au milieu des cordons d'agents, bientôt
poursuivi par des cavaliers qui couraient
à ses trousses. — « Mais, s écriait-il la-
mentablement, puisque je vous dis que
c est pour un adultère!. Je ne fais pas
de politique, moi !» — Il est ivre, dit un
agent, en le. rembarrant vigoureuse-
raent.
c, Pourtant, le malheureux apercevait le
commissaire, et il tentait des efforts dé-
sespérés pour s'approcher de lui. Le
temps pressait. Dans une heure, où se-
raient les deux coquins? Il fallait se hâ-
ter de les surprendre. Il interpellait, de
loin, Je magistrat, à qui on avait signalé,
à tort ou à raison, l'approche d'une bande
ae maniiestants et qui donnait des or-
dres fiévreusement : « — Vite, vite, ve-
nez," lui criait-il, contenu par la police,
qui ne lui permettait point de s'avancer,
et ayant déjà reçu force horions. Le com-
missaire, naturellement, ne le voyait
point. Un brigadier s'alarma, à la fin, de
ses gestes furieux : « — Empoignez-moi
cet anarchiste!» dit-il à deux de ses hom-
mes.
Et, déçu dans ses espoirs de vengeance,
le mari trompé et battu fut eonduit au
poste en dépit de ses protestations. Il ne
fut relâché que dans la soirée, — et non
sans peine. Quand il rentra chez lui, il
trouva sa femme déjà endormie d'un cal-
me sommeil, qui ne se réveilla que pour
lui demander eompte, d'un air majes-
tueux, de son insolite absence.
Mon ami m'a assuré que cette aventuré
s'était passée ainsi. Mais, à vous dire le
vrai, je soupçonne un peu mon ami d'ê-
tre un fantaisiste.
Paul Ginisty.
Le « XIX* Siècle a publiera demain la
a Chronique n par M. Francisque Sarce,..
L'EMPRUNT ORTUGAIS
Ce qu'on dit à Lisbonne
Le journal portugais Os Debates publie
la note suivante :
« On dit que les contractants de l'em-
prunt exigeraient du gouvernement, pour
donner suite à leur traité, un boni de 10 fr.
par obligation et que le gouvernement
leur fera cette concession pour ne point
rester sans argent.
» Comme on le sait, les banquiers de
Paris ont pris ces obligations à IM fr. par
titre ; il parait qu'ils ne paieraient aujour-
d'hui que 425 francs, ou tout au plus A97,
ce qui représenterait un grand préjudice
pour le pays ».
La même note se retrouve dans la plu-
part des journaux de Lisbonne.
On nous écrit d'autre part qu'on ne
souhaite nullement à Lisbonne voir le gou-
vernement français accorder la cote à
l'emprunt Ephrussi, qu'on considère com-
me surtout destiné à payer les dépenses
secrètes d'un roi dictateur.
STAILEV A LONDRES
Réception par le prince de Galles
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Londres, 3 mai.
Une grande réception' en l'honneur de
Stanley a eu lieu hier soir à Saint-James
Hall, à Londres. Dans la nombreuse assis-
tance, on remarquait le prince et la prin-
cesse de Galles, le duc et la duchesse d'E-
dimbourg, ainsi que plusieurs ministres.
Le prince de Galles présidait.
Stanley a commencé par dire qu'il ne
parlerait pas d'Emin-Pacna.
Son discours a, en général, désappointé
l'auditoire.Il a été très sec, bourré de faits
et de données géographiques et n'a appris
rien qui ne fût déjà connu.
La réception était organisée par le co-
mité anglais de secours pour la délivrance
d'Emin-Pacha.
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