Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1890-05-03
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Description : 03 mai 1890 03 mai 1890
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
DfcfHneuvième année.—N° 6,683 CINQ Centimes - Paris et Départements - "CIRQ Centimes - SAMEDI 3 MAI iboo
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TRES PROCHAINEMENT
Le XI Xe SIÈCLE
Publiera un grand roman-feuilleton
dû à la plume d'un de nos plus popu-
laires romanciers.
LA
MANIFESTATION
Une fois de plus, les trembleurs en
ont été pour leur anxiété et les agita-
teurs pour leur peine. La journée
d'hier s'est passée dans un calme com-
plet. Quelques incidents sans gravité
ont seuls jeté une note légèrement
discordante, et ils ne méritaient as-
surément pas les charges et les bour-
rades auxquelles quelques agents se
sont livrés pour faire circuler des gens
qui ne stationnaient pas. D'une façon
générale, l'aspect de la ville, hier, of-
frait une assez grande analogie avec
celui d'une journée de Grand-Prix, et
cette « fête du travail » a eu surtout
ceci de particulier qu'on s'est reposé.
Il n'en pouvait pas être autrement,
et nous ne songeons pas à tirer vanité
des pronostics que nous avions formu-
lés. Tout d'abord, en effet, l'élément
révolutionnaire ne dispose pas chez
nous de forces suffisantes pour créer
une agitation un peu importante, et il
y avait d'autant moins de crainte à
avoir qu'une fraction, et non la moins
considérable, du parti ouvrier, était
opposée à la manifestation. Mais ces
considérations parussent-elles insuf-
fisantes, il y en avait une sans répli-
que. Le projet de manifestation était
annoncé publiquement depuis de longs
mois; c'est dans un congrès dont la
presse a suivi les séances, que la date
du lor mai a été fixée. On avait donc
pu prendre toutes les mesures néces-
saires pour empêcher le mouvement
de dégénérer en émeute. Ces précau-
tions ont été prises publiquement.
Tous les journaux ont donné l'énumé-
ration des troupes dont le gouver-
nement disposait à Paris, celle des ren-
forts qui avaient été appelés, l'empla-
cement des détachements. Tous ces
renseignements ont été fournis à tout
le monde. Les précautions ont été
prises non seulement ostensiblement,
mais avec ostentation. Les manifes-
tants savaient donc, de science cer-
taine, que si une tentative de désordre
se produisait, sur quelque point que
ce fût, elle serait immédiatement ré-
primée. Ils ne pouvaient se flatter de
l'espoir qu'une collision tournerait à
leur avantage, car des hommes sans
armes sont impuissants à lutter contre
la troupe. Nous ne sommes plus au
temps où des émeutiers pouvaient ef-
facer cette inégalité en pillant quel-
ques boutiques d'armuriers et en pre-
nant chez les marchands de ferraille
des pistolets à pierre. Les fusils de
chasse et les vieux sabres sont de pau-
vres armes contre le fusil à répétition
et contre la cavalerie, et le pavage en
bois a porté le dernier coup à l'indus-
* des faiseurs de
trie, déjà bien perdue: des faiseurs de
barricades. Les vieux procédés qui
rendaient les émeutes possibles en
183.4 n'ont plus aucune valeur au-
jourd'hui. Le progrès a marqué son
empreinte là comme partout.
Tout, du reste, s'est renouvelé. Au-
trefois, les partis révolutionnaires au-
raient mis tous leurs soins à cacher
leurs projets, et si le gouvernement
les avait surpris, il n'aurait pas mis
moins de mystère à préparer ses
moyens de défense. Aujourd'hui, au
contraire, on recherche le grand jour.
Aux sociétés secrètes de jadis ont suc-
cédé des congrès qui recherchent la
publicité, dont les résolutions et les
vœux sont publiquement exposés.
Avec la liberté de la presse et avec le
développement de l'information dans
les journaux, tous les partis ont com-
pris qu'il n'était plus possible de con-
server des allures mystérieuses et
qu'il n'y avait plus de secret si bien
gardé qu'il ne transpirât rapidement.
On s'est accommodé de ces mœurs
nouvelles et l'on cherche moins à sur-
prendre ses adversaires qu'à recruter
des adhérents par une propagande
active.
Il ne faut pas se plaindre de ce chan-
gement. Quelle que soit la violence
des théories émises, il vaut mieux les
connaître que les ignorer, et pouvoir
les réfuter que les laisser se propager
dans l'ombre. On a même trouvé
dans certains pays, comme l'Angle-
terre et les Etats-Unis, que les mani-
festations publiques n'étaient pas sans
avantage, car elles permettent de dé-
nombrer les hommes qui défendent
certaines idées, qui Poursuivent cer-
taines revendications. Ces mœurs ne
sont pas les nôtres; nous n'avons
malheureusement pas encore une lon-
gue habitude de la liberté. On peut
constater cependant que nous com-
mençons à la prendre, et le calme qui
n'a cessé de régner hier, malgré des
mesures qui étaient bien de nature à
semer la peur, l'absence de toute in-
quiétude chez l'immense maj orité de
la population et dans le monde des
affaires, sont des symptômes qu'on ne
saurait passer sous silence.
Le a XIXe Siècle D publiera demain la
« Chronique D par M. - Francisque Saroey.
LA VIEDEP ARIS
Je ne sais pas, au moment où j'écris ces
quelques lignes, ce que sera la soirée à
Paris. On peut encore, peut-être, redou-
ter quelques désordres ;il faut tabler avec
l'excitation du diner et les facilités que
donne la nuit. Il faut aussi faire la part
de l'influence que peuvent avoir certains
placards qu'on vend ou qu'on distribue,
celle des nouvelles vraies ou fausses qu'on
peut colporter. J'espère pourtant que rien
de grave ne se passera dans la soirée, et
je puis, de loisir, donner mon impres-
sion sur la première partie de la jour-
née. -'
Paris a eu, dès dix heures du matin, cet
aspect très particulier qui est celui d'un
jour de demi-fête et qui se traduit tout
d'abord par le peu de monde qu'on trouve
dans la rue. Aux « Trois-Huit » heures
pour qui on manifestait, il faut ajouter
(pour moi) un quatrième « huit » : huit
heures de voiture à parcourir les divers
quartiers, à la recherche d'une manifes-
tation. Il y avait bien quelque foule aux
approches des chemins de fer. Mais cette
foule était faite de gens qui allaient à la
campagne, ayant le grand tort d'avoir
peur. C est cette peur qui a fait fermer un
certain nombre de boutiques, un nombre
fort restreint d'ailleurs, .dans quelques
rues où devait passer la manifestation.
Ajoutez à cela que les gardes munici-
paux étaient massés dans certains mo-
numents où la foule allait admirer les
beaux militaires, et que l'on a chargé
trois ou quatre fois pour faire évacuer la
place de la Concorde ou les abords de l'E-
lysée. A part ces incidents, c'était partout
la physionomie de la demi-fête, des gens
qui flânaient, des curieux en grand nom-
bre, beaucoup entassés aux fenêtres ou
sur le pas des portes, attendant quelque
chose qui ne venait pas. Lorsque les dé-
légués sont venus à la Chambre, ils ont
été suivis des deux ou trois cents per-
sonnes qui les suivaient et ils sont entrés
seuls dansle palais vide, car c'est à peine
si une douzaine de députés étaient venus
au Palais-Bourbon.
Les reporters — qui ont fait une jour-
née de plus de huit heures ! — entou-
raient, à trente ou quarante, les délégués
qui paraissaient embarrassés de leur
isolement. Le mot de Ledru m'est re-
venu à l'esprit, disant qu'il avait bien
dû suivre les insurgés, puisqu'il était
leur chef. On sentait vraiment je ne sais
quel manque de conviction, quelque
chose comme le sentiment de l'inutilité
et de l'impuissance de l'action essayée.
En revenant dans la rue de la Paix, les
délégués ont croisé la voiture de M. Lis-
bonne, une belle voiture de maître,
allant du côté des Champs-Elysées.
On a souri. Toute la journée, du res-
te, a été marquée au coin d'une certaine
gaîté « bon garçon », avec une nuance
d'étonnement et comme de désappointe-
ment qu'il « n'y eût que ça. On se se-
rait meme fort ennuyé si le temps n'eût
été superbe et si le boulevard et les gran-
des rues n'avaient été égayées par la pré-
sence d'un assez grand hombre de jeunes
femmes dont on disait que, certaine-
ment, elles ne venaient pas manifester
contre le travail du soir. En somme, une
journée de déception pour les amateurs
de tapage, de flânerie pour les Parisiens,
de grosse recette pour les cafés et de bé-
néfice pour les joueurs qui s'étaient mis
à la hausse. Car la Bourse a monté ferme,
ce qui est un fait caractéristique.
Le calme de cette journée du 1er mai à
Paris,qui contraste avec les désordres plus
ou moins graves qui ont éclaté ailleurs,
dans des pays monarchiques, calme fort
heureux pour la République, est dû pour
beaucoup aux mesures prises par le pou-
voir. J'entends bien qu'on raillera ces
précautions, la journée passée. Mais en-
fin, nous avons traversé sans encombre
un mauvais pas. Mais il m'a paru, en
outre, et c'est ce qui explique peut-être par
dessus tout le calme de la journée, que la
population ne croyait pas beaucoup au
désordre et ne le souhaitait pas du tout.
Il y a bien eu les effrayés qui ont filé
ou qui se sont tapis dans leurs maisons ;
mais ceux-ci, heureusement, sont en mi-
norité : la majorité des Parisiens a gardé
un beau sang-froid et a très bien pris
son parti d'un jour de congé. Il semble
acquis par cette expérience que si ,
aux élections, Paris peut éprouver des
emballements, il n'y a que peu de ré-
volutionnaires très convaincus, peu d'a-
gitateurs de la vieille école allant au
combat sans chance de succès et pour
l'honneur. Je sais bien qu'à de rares
exceptions près , ce sont toujours des
minorités qui engagent la bataille ; mais
elles peuvent compter, et c'est là leur
espoir, sur une complicité morale de la
majorité, même non agissante. Visible-
ment, dans le Paris d'aujourd'hui, cette
complicité n'existe pas pour ceux qui
voudraient chercher à tenter un coup de
force dans le sens des revendications so-
ciales.
L'échec des révolutionnaires d'aujour-
d'hui — et je parle en flâneur de la rue—
n'est caractérisé ni par la facilité avec la-
quelle la police a enlevé quelques me-
neurs, ni par la timidité des quelques
tentatives faites pour violer les consignes
données, mais bien par l'indifférence de
la foule. Les curieux n'avaient ni sympa-
thie pour les très rares manifestants, qui
n'ont jamais fait un groupe un peu com-
pact, ni même, contre eux, cette hostilité
que donne la peur. J'ai le triste privilège
d'avoir vu la rue, à Paris, bien souvent
troublée. On ne s'y trompe pas un ins-
tant.
Quand il y a de l'émeute sérieuse dans
l'air, cela se sent à un énervement de tous,
à des symptômes précurseurs, aussi cer-
tains que la lourdeur de l'atmosphère
avant l'orage. La journée de congé qu'on
a forcé les Parisiens de prendre n'a rien
présenté de pareil. Elle me paraît exces-
sivement rassurante, malgré l'ennui que
peut causer la nécessité de quelques gour-
mades un peu fortes. Son importance
reste grande cependant, mais théorique
et, pour ainsi dire, philosophique. Une
manifestation essayée sur un mot d'or-
dre qui est commun à tous les pays d'Eu-
rope ceci a une gravité. Mais c'est là
toucher à la politique, et je dois me con-
tenter de noter mes impressions de flâ-
neur.
Henry Pouquier.
DERNIÈRE HEURE
Les arrestations
Le nombre des arrestations opérées dans
la journée d'hier s'est élevé à environ
quatre cents.
Presque toutes ont été faites dans les ma-
nifestations sur la place de la Concorde et
aux alentours. Cent dix manifestants ont
été conduite au commissariat de la rue
Mont-Thabor, autant au commissariat de
la rue d'Anjou, et cent quarante-cinq autres
au commissariat du quartier des Champs-
Elysées.
Presque tous ont été arrêtés pour refus
de circuler et relâchés dans la soirée; d'au-
tres, contre lesquels on a relevé le délit de
rébellion, d'outrages aux agents, ont été
envoyés au Dépôt. Ces derniers sont au
nombre de cent cinquante environ.
Au cours des charges exécutées pour dé-
barrasser la voie publique, un grand nom-
bre de curieux ont été renversés et plus ou
moins sérieusement contusionnés. Conduits
dans les pharmacies voisines, ils y ont reçu
des soins.
A la place de la République
Pendant toute la soirée, un nombre assez
considérable de curieux se sont tenus place
de la République, autour du monument.
Les agents du dixième arrondissement, qui
étaient chargés du service d'ordre, ont fait
circuler los passants, dont quelques-uns
ont été arrêtés.
Vers dis heures, deux coups de feu ont
retenti ; ne légère panique s'est alors pro-
duite dans la foule. On n'a pu retrouver
l'individu qui a tiré ces coups de revolver.
A onze heures, la place avait repris sa phy-
sionomie de tous les jours.
Départ de Louise Michel
Nous avons dit hier que Louise Michel avait
a été arrêtée à la gare de Lyon, au moment
de sa descente du train. La citoyenne avait
été mise en état d'arrestation sur l'ordre du
parquet de Saint-Etienne, où elle était
allée organiser la manifestation ouvrière.
Mme Louise Michel a été écrouée la nuit
dernière auDépôt et, accompagnée de deux
agents, conduite à la gare de Lyon, à desti-
nation de Saint-Etienne, pour être mise à
la disposition de ce parquet.
Commissaire blessé.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIBR)
Vienne (Isère) 1er mai.
Dans une réunion tenue au théâtre, les
anarchistes ont organisé un boucan en
règle et forcé M. Jouffray, maire et député,
à sortir de la salle.
Une bagarre s'est engagée. Le commis-
saire central a été grièvement blessé.
A la sortie, on a dû faire donner la cava-
lerie ; de nombreuses arrestations ont été
opérées.
Roubaix, 1er mai.
Au moment de la sortie d'une réunion
ouvrière, une patrouille de chasseurs a été
saluée des cris de « Vive l'armée ! »
Troyes, 1er mai.
Autant la journée a été calme, autant la
soirée a été orageuse. Des bandes parcou-
rent la ville criant : « Mort aux patrons !
C'est huit heures qu'il nous faut ! »
Le commissaire de police, M. Bruner,
étant seul, rue de la Cité, veut arracher un
drapeau rouge des mains des manifestants;
il est frappé, jeté à terre, on lui vole son
chapeau et sa canne plombée.
Des patrouilles de cavalerie vont par-
courir la ville, les chasseurs à pied sont
prêts à tout événement.
Marseille, 1er mai..
Une bande d'individus, en majeure partie
étrangers, ont envahi vers huit heures l'hui-
lerie Jansoulin, située au quartier Areno.
Le patron et les contre-maîtres des éta-
blissements ont été menacés et même frap-
pés. .t t 't'b" D, d' At
Les vitres ont été brisées. Divers dégâts
ont été commis. La police, prévenue, a pu
arrêter trente et un de ces individus, tous
Italiens. La Bourse du travail est occupée
par une compagnie d'infanterie.
A dix heures et demie, le calme était ré-
tabli.
Alger, lor mai.
Jusqu'à la nuit, tout a été tranquille au
Prater : 150,000 ouvriers, attablés dans les
jardins des restaurants, buvaient de la
bière en écoutant dans plusieurs établisse-
ments de la musique populaire; un certain
nombre d'entre eux s'arrêtaient devant les
baraques de saltimbanques ou ils prenaient
part aux jeux établis dans cet endroit.
L'ordre parfait régnait partout, et il n'y
avait aucune surexcitation. Aucun discours
n'a été prononcé.
Pendant ce temps, le Corso habituel avait
lieu dans la grande allée, envahie par des
curieux plutôt que par des manifestants;
toutefois, les équipages étaient moins nom-
breux que les années précédentes.
Les rapports sont très satisfaisants en ce
qui concerne la Silésie, la Haute-Autriche,
le Styrie, la Carinthie, la Bukovine, la Mo-
ravie, laGalicie.
.Les ouvriers de la fabrique d'armes de
Steyr ont résolu d'adresser à la Chambre
des députés une pétition pour demander la
mise à exécution, par les voies légales, du
programme de Paris.
VIOLENTE TEMPÊTE
- Madrid, 1er mai.
Une violente tempête sévit sur les côtes de
Bilbao. Les eaux de Nervion sont de deux mé-
tres au-dessus du niveau ordinaire.
De nombreux arbres ont été déracinés, les
navires du port ont doublé leurs amarres, plu-
sieurs barques ont été entraînées par le cou-
rant.
Lç port est fermé.
LE PREMIER MAI
LA JOURNÉE DES CURIEUX
BEAUCOUP DE TROUPE
PEU DE MANIFESTANTS
A travers Paris. - A la recherche des
manifestants. - La délégation au-
près de M. Floquet. — Incidents
divers et charges de cava-
lerie.
Si nous devions passer sous silence les
quelques incidents qui émaillent toujours
les journées où « il doit se passer quelque
chose », la manifestation d'hier, dont on
parlait depuis si longtemps et qui devait
avoir un énorme retentissement, serait
passée complètement inaperçue.
D'abord, a proprement dire, il n'y a pas
eu de manifestation ouvrière; les usines et
les ateliers,—à de très rares exceptions près,
— n'ont pas été désertés. Tout le monde a
travaillé comme à Pordinaire.
Cependant, il faut bien indiquer que pri-
mitivement les groupes corporatifs avaient
décidé la cessation complète du travail,
ce jour-là.
On devait, en une imposante démons-
tration, accompagner les délégués chargés
de présenter la pétition demandant la limi-
tation des heures de travail.
Les paroles imprudentes et les menaces
des anarchistes firent réfléchir les organi-
sateurs de la manifestation, à laquelle des
éléments tapageurs voulaient donner une
signification qu'elle ne devait et ne pou-
vait avoir. En outre, les arrestations récen-
tes et les mesures préventives prises par le
gouvernementdémontraientclairementl'in-
tention de couper court à toute tentative
de manifestation, se serait-elle passée dans
le plus grand calme.
Physionomie de Paris
Malgré les bruits les plus fâcheux qui
couraient depuis quelques jours; malgré
aussi les rodomontades des orateurs anar-
chistes et les informations apeurées de plu-
sieurs de nos confrères, disant que l'on
avait décidé de faire sauter plusieurs éta-
blissements publics, Paris a conservé à
peu près sa physionomie habituelle. Une
centaine de boutiques étaient fermées,
voilà tout.
La ville présentait l'aspect d'un jour fé-
rié. A une heure seulement, dans les rues
avoisinant la place de la Concorde, les bi-
joutiers, et les armuriers principalement,
mettent les volets sur leurs vitrines. Ce
n'est qu'une sage précaution, rien de plus !
par, contre, les cafés ajoutent des tables eL
des chaises à leurS terrasses, pendant que les
voitures de courses traversent au grand
galop la ligne des boulevards, emportant
les parieurs vers Longchamps.
A ce moment, certes, on s'occupait beau-
coup plus des chevaux favoris que de la
manifestation.
Sur la place de la Concorde
C'était sur la place de la Concorde que
devaient se réunir tous ceux qui auraient
désiré participer à la grande manifestation ;
aussi les curieux, toujours en quête d'inci-
dents tumultueux,s'y portaient-ils en nom-
bre assez considérable.
Tranquillement, le nez en l'air, on se pro-
mène de long en large. On pousse jusqu'aux
grilles des Tuileries où bivouaquent des
gardes municipaux à pied et à cheval. On
s'intéresse également aux gardiens de la
paix massés le long de l'Orangerie. Comme
le soleil est assez ardent, on se réfugie sous
les arbres des Champs-Elysées, et l'on est
tout surpris d'apercevoir aux portes du
Palais de l'Industrie des dragons, sabre au
clair, monter la faction. Alors on se sou-
vient tout à coup de la fameuse manifesta-
tion, c- t,de craindre de perdre une bouchée
de ce qui va se produire, l'on revient sur la
place de la Concorde, toujours aussi vide
et toujours aussi ensoleillée..
Toutefois, le nombre des curieux devient
gênant. M. Lépine, secrétaire général de la
préfecture de police, donne l'ordre de faire
évacuer la place.
Un demi-escadron de cavaliers sort des
Tuileries; les curieux admirent l'allure
des chevaux et la tenue des hommes, sans
se douter aucunement de l'intention de
ces derniers.
Les bêtes caracolent sur les trottoirs, au
milieu de la chaussée, pourchassant les
gens qui s'écrient : « Il y a erreur ! nous
ne manifestons pas ! »
Peu importe, la place doit être déblayée,
et elle l'a été plusieurs fois au cours de la
journée.
Arrivée de la délégation
Vers deux heures on aperçoit, débou-
chant de la rue Royale, un tout petit groupe
de personnes, à la tête duquel marchent
trois hommmes dont la poitrine est barrée
par une écharpe tricolore.
Aussitôt, des gardes à cheval partent ven-
tre à terre dans cette direction ; des gardiens
de la paix les suivent au pas gymnas-
tique. Alerte ! alerte ! c'est la délégation qui
arrive du café Mollard, situé en face la gare
Saint-Lazare.
Et, obéissant au commandemement de M.
Lépine, remplaçant M. Lozé, absent pour
nous ne savons quelle cause, cavaliers et
gardiens barrent le chemin aux personnes
qui accompagnent la délégation.
Au terre-plein de la place, M. Debeurry,
inspecteur divisionnaire, s'avance vers les
délégués et s'oppose à leur passage.
- vous êtes trop nombreux, dit ce fonc-
tionnaire ; vous ne passerez pas.
M. Ferroul montre son écharpe de dépu-
té, MM. Baudin et Thivrier font de même.
— Nous sommes députés, s'écrient-ils, et
nous accompagnons les citoyens délégués
Gouzon, Féline, Lentz, Jules Guesde, Rous-
sel, Duluc et Vaillant.
Ce dernier sort son écharpe de conseiller
municipal et se l'attache autour du corps.
— C'est bien, passez ! fit M. Debeurry.
Deux fois la délégation subit le même
sort, et deux fois elle triomphe, grâce aux
écharpes tricolores, des mêmes difficultés.
M. Baudin ne cachait pas sa colère.
— On ne peut pas se prêter, s'écriait-il, à
une semblable comédie !
M. Thivrier, lui, ne disait rien. Il se con-
tentait de froisser sa blouse.
AU PALAIS-BOURBON
A l'intérieur de la Chambre, la salle des
Pas-Perdus n'était guère animée que par la
présence de quelques journalistes et d'une
douzaine de députés, parmi lesquels MM.
Peytral, Noël Parfait, Fouquier, Félix Faure,
Rabier, Martineau, Mermeix, Laporte et
Paulin Méry.
Les délégués., conduits par les questeurs,
MM. Duclaud et Guillaumou, ont été con-
duits auprès de M. Pierre, secrétaire géné-
ral de la présidence. MM. Ferroul, Baudin
et Thivrier ont été reçus par M. Floquet,
qui, sur leur demande, a donné l'ordre
d'introduire les autres délégués.
L'entrevue à duré environ dix minutes,
Les membres de la délégation, auxquels
s'était jointM. Cluseret, se sont ensuite réu-
nis dans la salle des gardes, où ils ont ré-
digé le procès-verbal suivant :
Un procès-verbal
Conformément à la décision prise hier soir
en assemblée générale des représentants des
chambres syndicales parisiennes et des délé-
gués au congrès international de Paris, la dé-
légation chargée de porter aux pouvoirs pu-
blics la pétition pour la journée de huit heu-
res et les autres résolutions du congrès inter-
national est partie à deux heures de la place
de la Concorde et s'est présentée à la Cham-
bre des députés.
Elle a été reçue par le secrétaire général de
la présidence, qui a enregistré les pétitions
émanant des chambres syndicales et des
groupes so.,ialistes de tous les points de la
France, ainsi que les résolutions du congrès
en vue d'une législation nationale et interna-
tionale du travail.
Avis a été donné que ce pétitionnement col-
lectif sera complété par les adhésions annon-
cées et pas encore reçues, et continué par un
pétitionnement individuel qui commence au-
jourd'hui dans la population ouvrière.
La délégation a été ensuite reçue par le pré-
sident de la Chambre, qui a déclaré être pé-
nétré de toute l'importance de la question et
ne pas douter de l'intérêt avec lequel la ma-
jorité républicaine discutera les revendica-
tions formulées. ,
En : foi de quoi ont si lé*: les délégués Gou-
zon, Guignet, Lacoste, Feline, Roussel, Duluc,
Lentz, Guesde, Vaillant, Baudin, Ferrow) Thi-
vrier.
Note officielle
D'autre part, la présidence de la Cham-
bre nous communique la note suivante :
A deux heures et quart, MM. Duclaud et
Guillaumou, questeurs de la Chambre des dé-
putés, ont reçu à la grille du quai d'Orsay MM.
le docteur Ferroul, Baudin et Thivrier, dépu-
tés, accompagnés de MM. Vaillant, conseiller
municipal, Guesde, Feline, Lentz, Guignet, Du-
luc, Lacoste et Gouzon.
Conformément aux instructions données par
M. le président, MM. les questeurs ont conduit
MM. Ferroul, Baudin, Thivrier et les citoyens
qui les accompagnaient au cabinet du secré-
taire général de la présidence.
M. le docteur Ferroul a remis à M. Pierre
82 pétitions émanant des chambres syndicales,
et M. Vaillant a annoncé que d'autres pétitions
ayant le même objet seraient ultérieurement
envoyées. Après avoir pris connaissance de ces
pétitions, le secrétaire général a fait obser-
ver que la formule placée en tête pouvait prê-
ter à une équivoque, et il a demandé aux pé-
titionnaires de la supprimer.
MM. Guesde et Vaillant ont répondu que
cette formule n'avait nullement le sens qu on
paraissait lui attribuer, qu'elle était une sim-
ple indication historique, que &a pièce adres-
sée à la Chambre commençait au mot péti-
tion.
S'étant assuré ainsi que les pétitions n'éma-
naient nullement d'un rassemblement formé
sur la voie publique, le secrétaire général a
reçu les pétitions, qu'il a fait enregistrer.
M. Ferroul a demandé alors à voir le prési-
dent de la Chambre et à lui présenter les ci-
toyens qui l'accompagnaient.
M. Floquet ayant permis au secrétaire géné-
ral d'introduire auprès de lui ses collègues
ainsi que les personnes venues avec eux, une
contre-entrevue a eu lieu dans le cabinet du
président de la Chambre.
M. Ferroul, député, a remercié M. le prési-
dent de la Chambre d'avoir bien voulu le re-
cevoir avec'ses amis et d'avoir maintenu le
droit de pétition des travailleurs.
M. Floquet a répondu que ce droit n'avait
été contesté par personne ; qu'il avait donné
l'ordre de recevoir la pétition au secrétariat
général de la présidence et de l'enregistrer
suivant les formes réglementaires; qu'il avait
en outre reçu bien volontiers ses collègues de
la Chambre et les quelques citoyens qui les
accompagnaient, et qu'il prenait acte de nou-
veau que la pétition émanait d'ouvriers des
syndicats qui l'avaient régulièrement signée
et non d'un rassemblement sur la voie pu-
blique.
M. Floquet a ajouté que s'il pouvait être en
désaccord avec les pétitionnaires sur plus
d'un point, il les assurait que la Chambre et
son président examineraient avec intérêt tou-
tes les questions touchant au sort des travail-
leurs. Ses collègues présents savaient d'ail-
leurs quels moyens le règlement leur don-
nait d'amener sur leurs pétitions un débat
public devant l'Assemblée.
En remerciant le président de la Chambre,
les délégués ont insisté sur le caractère légal
de leur démarche,qui n'est pas la conséquence
d'un rassemblement dans la rue, et sur la ré-
gularité de la pétition qu'ils ont déposée et
qui est signée d'un grand nombre de tra-
vailleurs de tous les points de la France.
D'autres pétitions viendront ultérieurement
s'ajouter a celle-ci et seront envoyées au se-
crétariat général de la présidence.
Charges de cavalerie
Pendant que la délégation discutait avec
M. Floquet, une série d'incidents, assez
graves, se produisaient sur la place de
la Concorde et dans les avenues adja-
centes.
Afin d'éviter des attroupements qui, à un
moment donné, auraient pu devenir des
centres d'agitation, des escouades de gar-
des municipaux balayaient incessamment
la place, refoulant avec l'aide des gardiens
de la paix, non pas les manifestants, car il
n'y en a pas eu, mais les curieux, qui
fuyaient épouvantés.
Une centaine de récalcitrants furent ar-
rêtés. Dans ce nombre, plus de cinquante
cherchaient évidemment l'occasion de con-
naître l'intérieur d'un poste de police.
Nous avons assisté, par exemple, à des
scènes comme celle-ci :
— Circulez! disait un gardien de la
paix.
— Parlez donc plus poliment ! faisait la
personne ainsi interpellée.
— Plus vite que ça, où je vous conduis au
poste !
- Ah! c'est ainsi! Eh bien! conduisez-
moi au poste.
Au.-sitôt, ce désir était exaucé.
Les trois quarts des arrestations de la
journée d'hier ont été opérées de la sorte.
Pourtant, les charges de cavalerie étaient
parfois sérieuses, et les gardiens de la paix,
sans doute énervés d'une trop grande fac-
tion, manifestaient à grand renfort de
coups de poing un mécontentement qu'ils
n'auraient pas dû ressentir.
Nous avons vu des gens très inoffensifs
bousculés brutalement. Entre autres, M.
Lannes de Montebello, petit-fils du maré-
chal de ce nom, a été violemment frappé
par dès gardiens de la paix. M. de Monte-
bello, qui a eu la jambe brisée par une
balle prussienne, n'avait pu fuir à temps;
ce seul motif lui a valu des coups de poing.
Un de nos confrères a eu le même sort.
Départ de la délégation
A quatre heures, la délégation ouvrière
traversa pour la seconde fois la place de
la Concordé. Au commencement de la rue
Royale, elle fut entourée de gardiens de la
paix qui voulurent la disperser.
De rechef, les députés exhibèrent leur
écharpe. Seul M. Trivier eut un peu maille
à partir avec la police.
Selon son habitude,le député de Montlu*
çon s'était vêtu d'une blouse, et le gardiea
de la paix qui l'avait saisi par le bras dou-
tait de sa qualité.
Avec beaucoup de mal, car sa blouse
semblait l'embarrasser fort, M. Thivier
put sortir de sa poche l'écharpe tricolore
qu'il se mit autour du cou, en s'écriant :
— Vous voyez bien que je suis député
En avant de la délégation,"une escouade
de gardes à cheval balayait la rue Royale,
tandis que des gardiens rejetaient loin en
arrière des curieux qui s'étaient placés sur
les marches de l'église de la Madeleine.
Puis, sans plus d'autre incident, la délé-
gation s'en alla tranquillement à l'Hôtel de
Ville.
Autour de l'Hôtel de Ville
Toute la matinée, la place de l'Hôtel-de-
Ville et les abords sont restés fort calmes.
Des pelotons de gardes-municipaux à che-o
val évoluent sur la place, le long des quais,
avenue Victoria et rue de Rivoli; mais ils
n'ont aucune difficulté à repousser les cu-
rieux qui se dirigent vers l'Hôtel de Ville.
ioutes les grilles du monument sont fer-
mées, sauf une seule par où pénètrent
quelques conseillers municipaux qui en-
trent et sortent sans attirer l'attention
du public.
À deux heures et demie, un eamelot a été -
invité à circuler; comme il s'y refusait, il
fut appréhendé au collet par les agents; aux-
quels il opposa une certaine résistance. M.
Duraiiton, commissaire de police, qui s'était
assuré de ce camelot, a été mordu à la
main par celui-ci.
Après cet incident, la place redevient cal-
me, et les agents se contentent d'empêcher
les rassemblements en faisant circuler, à
tout bout de champ, les curieux.
A L'HOTEL DE VILLE
Les conseillers en permanence
Les conseillers municipaux avaient reçu
hier une lettre les informant que le bureau
du conseil, en prévision des événements
qui pourraient survenir, se tiendrait toute
la journée en permanence à l'Hôtel de
Ville. La lettre ajoutait que ceux des mem-
bres qui désiraient s'entretenir avec le bu-
reau seraient reçus dans le local ordinaire
de la présidence. 11 ne s'agissait nullement.
on le voit, d'une séance in extremis, comme
l'ont dit quelques journaux, mais de sim-
ples conversations.
De nombreux conseillers s'étaient en
effet rendus à l'Hôtel da Ville. En voici les
noms :
MM. Brousse, Stupuy, Benon, Després;
Alphonse Humbert, Binder, Perrichont.
Deligny, Gaufrés, Chassaing, Pipereau,
Boué, Daumas, Cusset, Lavy, Chau temps,
Poussier, Duplan, Levraud, Marsoulan,Des-
champs, Dumay, Simonneau, Petrot, Bom-
pard, G. Berry et Lerolle.
On voit que toutes les opinions, de l'ex-
trême socialiste à la droite la plus pure.
étaient représentées.
La conversation a roulé, bien entendu,
sur ce qu'il y aurait à faire au cas où des
délégations demanderaient à être enten-
dues. Mais tout le monde a été d'avis que,
suivant toute probabilité, ce cas ne se pré-
senterait pas, puisque la manifestation
avait pour but la remise d'une pétition
adressée non pas au conseil municipal,
mais aux Chambres.
L'installation du préfet
Quelques observations ont été aussi
échangées à propos de la présence à l'Hô-
tel de Ville du préfet de la Seine, et quel-
ques membres se sont demandé si cette
circonstance n'engageait pas la question dQ
la résidence du préfet à l'Hôtel de Ville.
Examen fait de la situation, il a été re..i
connu que le litige soulevé à ce propos
entre l'Etat et la Ville n'avait jamais mis en
question le droit pour le préfet de se ren-
dre à l'Hôtel de Ville les jours où il y ju-
geait sa présence nécessaire, ni même d'y
avoir un cabinet.
Toute la question est de savoir si le préfet
a le droit « d'habiter » l'Hôtel-de-Ville. Or
disent les conseillers, ce droit, aucune loi
ne le lui concède.
Le préfet de la Seine est, en effet, à la
fois préfet du département de la Seine et
maire- de Paris. Comme préfet il peut re-
vendiquer le droit d'habitation dans un
bâtiment départemental, mais non pas dans
un bâtiment communal payé avec des de*
niers exclusivement communaux ; car la
loi n'oblige pas une commune à loger à ses
frais le préfet du département.
Comme maire de Paris, il ne peut da-
vantage réclamer la résidence à l'Hôtel de
Ville; car, aux termes de la législation exis-
tante, aucune commune de France, pas
même la commune parisienne, n'est obli-
gée, à loger son maire.
Cela étant, et la question étant posée
dans ces termes, qui sont les vrais, il est
bien clair qu'elle ne peut être résolue inci-
dentellement et que sa solution dépend ex-
clusivement des pouvoirs publics.
Aucun lien n'est donc a établir entre la
présence du préfet à l'Hôtel de Ville
et le droit, pour lui, d'y fixer sa rési-
dence. Et, dans ces conditions, il n'y avait
pas à intervenir, la question des droits du
conseil n'étant pas engagée.
La consigne
Cependant, le préfet a été consulté au
sujet des consignes données aux agents de
la force publique chargés de garder les
portes fermées de l'Hôtel de Ville. Il a ré-
pondu qu'il exécutait simplement les or-
dres du ministre de l'intérieur.
Sur les quatre heures et demie; M. Al-
phonse Humbert, qui sortait de la réunion,
a rencontré sur la place MM. Vaillant et
Chauvière qui, accompagnés des députés
Baudin et Thivrier, se rendaient à l'Hôtel
de Ville. L'entrée ayant été refusée aux
deux députés, M. Alphonse Humbert s'est
rendu auprès du préfet de la Seine et lui a
fait observer que ces messieurs ne venaient
pas le moins du monde en délégation,
qu'aucun manifestant ne les accompagnait,
qu'ils n'avaient de mandat d aucune
espèce ni de personne et que, dans ces con-
ditions, il paraissait discourtois de leur
refuser l'accès de l'Hôtel de Ville quand ils
s'y présentaient accompagnés d'un conseil-
ler municipal.
Le préfet a répondu qu'il était aux regrets
de refusera MM. Baudin et Thivrier ce qu'ils
demandaient, mais que la consigne était
formelle; qu'elle autorisait les seuls con-
seillers municipaux à pénétrer dans le bâti-
ment et qu'il lui était impossible d'enfrein-
dre les ordres qu'il avait reçus.
JML Alnhonse Humbert a transmis cetttf
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TRES PROCHAINEMENT
Le XI Xe SIÈCLE
Publiera un grand roman-feuilleton
dû à la plume d'un de nos plus popu-
laires romanciers.
LA
MANIFESTATION
Une fois de plus, les trembleurs en
ont été pour leur anxiété et les agita-
teurs pour leur peine. La journée
d'hier s'est passée dans un calme com-
plet. Quelques incidents sans gravité
ont seuls jeté une note légèrement
discordante, et ils ne méritaient as-
surément pas les charges et les bour-
rades auxquelles quelques agents se
sont livrés pour faire circuler des gens
qui ne stationnaient pas. D'une façon
générale, l'aspect de la ville, hier, of-
frait une assez grande analogie avec
celui d'une journée de Grand-Prix, et
cette « fête du travail » a eu surtout
ceci de particulier qu'on s'est reposé.
Il n'en pouvait pas être autrement,
et nous ne songeons pas à tirer vanité
des pronostics que nous avions formu-
lés. Tout d'abord, en effet, l'élément
révolutionnaire ne dispose pas chez
nous de forces suffisantes pour créer
une agitation un peu importante, et il
y avait d'autant moins de crainte à
avoir qu'une fraction, et non la moins
considérable, du parti ouvrier, était
opposée à la manifestation. Mais ces
considérations parussent-elles insuf-
fisantes, il y en avait une sans répli-
que. Le projet de manifestation était
annoncé publiquement depuis de longs
mois; c'est dans un congrès dont la
presse a suivi les séances, que la date
du lor mai a été fixée. On avait donc
pu prendre toutes les mesures néces-
saires pour empêcher le mouvement
de dégénérer en émeute. Ces précau-
tions ont été prises publiquement.
Tous les journaux ont donné l'énumé-
ration des troupes dont le gouver-
nement disposait à Paris, celle des ren-
forts qui avaient été appelés, l'empla-
cement des détachements. Tous ces
renseignements ont été fournis à tout
le monde. Les précautions ont été
prises non seulement ostensiblement,
mais avec ostentation. Les manifes-
tants savaient donc, de science cer-
taine, que si une tentative de désordre
se produisait, sur quelque point que
ce fût, elle serait immédiatement ré-
primée. Ils ne pouvaient se flatter de
l'espoir qu'une collision tournerait à
leur avantage, car des hommes sans
armes sont impuissants à lutter contre
la troupe. Nous ne sommes plus au
temps où des émeutiers pouvaient ef-
facer cette inégalité en pillant quel-
ques boutiques d'armuriers et en pre-
nant chez les marchands de ferraille
des pistolets à pierre. Les fusils de
chasse et les vieux sabres sont de pau-
vres armes contre le fusil à répétition
et contre la cavalerie, et le pavage en
bois a porté le dernier coup à l'indus-
* des faiseurs de
trie, déjà bien perdue: des faiseurs de
barricades. Les vieux procédés qui
rendaient les émeutes possibles en
183.4 n'ont plus aucune valeur au-
jourd'hui. Le progrès a marqué son
empreinte là comme partout.
Tout, du reste, s'est renouvelé. Au-
trefois, les partis révolutionnaires au-
raient mis tous leurs soins à cacher
leurs projets, et si le gouvernement
les avait surpris, il n'aurait pas mis
moins de mystère à préparer ses
moyens de défense. Aujourd'hui, au
contraire, on recherche le grand jour.
Aux sociétés secrètes de jadis ont suc-
cédé des congrès qui recherchent la
publicité, dont les résolutions et les
vœux sont publiquement exposés.
Avec la liberté de la presse et avec le
développement de l'information dans
les journaux, tous les partis ont com-
pris qu'il n'était plus possible de con-
server des allures mystérieuses et
qu'il n'y avait plus de secret si bien
gardé qu'il ne transpirât rapidement.
On s'est accommodé de ces mœurs
nouvelles et l'on cherche moins à sur-
prendre ses adversaires qu'à recruter
des adhérents par une propagande
active.
Il ne faut pas se plaindre de ce chan-
gement. Quelle que soit la violence
des théories émises, il vaut mieux les
connaître que les ignorer, et pouvoir
les réfuter que les laisser se propager
dans l'ombre. On a même trouvé
dans certains pays, comme l'Angle-
terre et les Etats-Unis, que les mani-
festations publiques n'étaient pas sans
avantage, car elles permettent de dé-
nombrer les hommes qui défendent
certaines idées, qui Poursuivent cer-
taines revendications. Ces mœurs ne
sont pas les nôtres; nous n'avons
malheureusement pas encore une lon-
gue habitude de la liberté. On peut
constater cependant que nous com-
mençons à la prendre, et le calme qui
n'a cessé de régner hier, malgré des
mesures qui étaient bien de nature à
semer la peur, l'absence de toute in-
quiétude chez l'immense maj orité de
la population et dans le monde des
affaires, sont des symptômes qu'on ne
saurait passer sous silence.
Le a XIXe Siècle D publiera demain la
« Chronique D par M. - Francisque Saroey.
LA VIEDEP ARIS
Je ne sais pas, au moment où j'écris ces
quelques lignes, ce que sera la soirée à
Paris. On peut encore, peut-être, redou-
ter quelques désordres ;il faut tabler avec
l'excitation du diner et les facilités que
donne la nuit. Il faut aussi faire la part
de l'influence que peuvent avoir certains
placards qu'on vend ou qu'on distribue,
celle des nouvelles vraies ou fausses qu'on
peut colporter. J'espère pourtant que rien
de grave ne se passera dans la soirée, et
je puis, de loisir, donner mon impres-
sion sur la première partie de la jour-
née. -'
Paris a eu, dès dix heures du matin, cet
aspect très particulier qui est celui d'un
jour de demi-fête et qui se traduit tout
d'abord par le peu de monde qu'on trouve
dans la rue. Aux « Trois-Huit » heures
pour qui on manifestait, il faut ajouter
(pour moi) un quatrième « huit » : huit
heures de voiture à parcourir les divers
quartiers, à la recherche d'une manifes-
tation. Il y avait bien quelque foule aux
approches des chemins de fer. Mais cette
foule était faite de gens qui allaient à la
campagne, ayant le grand tort d'avoir
peur. C est cette peur qui a fait fermer un
certain nombre de boutiques, un nombre
fort restreint d'ailleurs, .dans quelques
rues où devait passer la manifestation.
Ajoutez à cela que les gardes munici-
paux étaient massés dans certains mo-
numents où la foule allait admirer les
beaux militaires, et que l'on a chargé
trois ou quatre fois pour faire évacuer la
place de la Concorde ou les abords de l'E-
lysée. A part ces incidents, c'était partout
la physionomie de la demi-fête, des gens
qui flânaient, des curieux en grand nom-
bre, beaucoup entassés aux fenêtres ou
sur le pas des portes, attendant quelque
chose qui ne venait pas. Lorsque les dé-
légués sont venus à la Chambre, ils ont
été suivis des deux ou trois cents per-
sonnes qui les suivaient et ils sont entrés
seuls dansle palais vide, car c'est à peine
si une douzaine de députés étaient venus
au Palais-Bourbon.
Les reporters — qui ont fait une jour-
née de plus de huit heures ! — entou-
raient, à trente ou quarante, les délégués
qui paraissaient embarrassés de leur
isolement. Le mot de Ledru m'est re-
venu à l'esprit, disant qu'il avait bien
dû suivre les insurgés, puisqu'il était
leur chef. On sentait vraiment je ne sais
quel manque de conviction, quelque
chose comme le sentiment de l'inutilité
et de l'impuissance de l'action essayée.
En revenant dans la rue de la Paix, les
délégués ont croisé la voiture de M. Lis-
bonne, une belle voiture de maître,
allant du côté des Champs-Elysées.
On a souri. Toute la journée, du res-
te, a été marquée au coin d'une certaine
gaîté « bon garçon », avec une nuance
d'étonnement et comme de désappointe-
ment qu'il « n'y eût que ça. On se se-
rait meme fort ennuyé si le temps n'eût
été superbe et si le boulevard et les gran-
des rues n'avaient été égayées par la pré-
sence d'un assez grand hombre de jeunes
femmes dont on disait que, certaine-
ment, elles ne venaient pas manifester
contre le travail du soir. En somme, une
journée de déception pour les amateurs
de tapage, de flânerie pour les Parisiens,
de grosse recette pour les cafés et de bé-
néfice pour les joueurs qui s'étaient mis
à la hausse. Car la Bourse a monté ferme,
ce qui est un fait caractéristique.
Le calme de cette journée du 1er mai à
Paris,qui contraste avec les désordres plus
ou moins graves qui ont éclaté ailleurs,
dans des pays monarchiques, calme fort
heureux pour la République, est dû pour
beaucoup aux mesures prises par le pou-
voir. J'entends bien qu'on raillera ces
précautions, la journée passée. Mais en-
fin, nous avons traversé sans encombre
un mauvais pas. Mais il m'a paru, en
outre, et c'est ce qui explique peut-être par
dessus tout le calme de la journée, que la
population ne croyait pas beaucoup au
désordre et ne le souhaitait pas du tout.
Il y a bien eu les effrayés qui ont filé
ou qui se sont tapis dans leurs maisons ;
mais ceux-ci, heureusement, sont en mi-
norité : la majorité des Parisiens a gardé
un beau sang-froid et a très bien pris
son parti d'un jour de congé. Il semble
acquis par cette expérience que si ,
aux élections, Paris peut éprouver des
emballements, il n'y a que peu de ré-
volutionnaires très convaincus, peu d'a-
gitateurs de la vieille école allant au
combat sans chance de succès et pour
l'honneur. Je sais bien qu'à de rares
exceptions près , ce sont toujours des
minorités qui engagent la bataille ; mais
elles peuvent compter, et c'est là leur
espoir, sur une complicité morale de la
majorité, même non agissante. Visible-
ment, dans le Paris d'aujourd'hui, cette
complicité n'existe pas pour ceux qui
voudraient chercher à tenter un coup de
force dans le sens des revendications so-
ciales.
L'échec des révolutionnaires d'aujour-
d'hui — et je parle en flâneur de la rue—
n'est caractérisé ni par la facilité avec la-
quelle la police a enlevé quelques me-
neurs, ni par la timidité des quelques
tentatives faites pour violer les consignes
données, mais bien par l'indifférence de
la foule. Les curieux n'avaient ni sympa-
thie pour les très rares manifestants, qui
n'ont jamais fait un groupe un peu com-
pact, ni même, contre eux, cette hostilité
que donne la peur. J'ai le triste privilège
d'avoir vu la rue, à Paris, bien souvent
troublée. On ne s'y trompe pas un ins-
tant.
Quand il y a de l'émeute sérieuse dans
l'air, cela se sent à un énervement de tous,
à des symptômes précurseurs, aussi cer-
tains que la lourdeur de l'atmosphère
avant l'orage. La journée de congé qu'on
a forcé les Parisiens de prendre n'a rien
présenté de pareil. Elle me paraît exces-
sivement rassurante, malgré l'ennui que
peut causer la nécessité de quelques gour-
mades un peu fortes. Son importance
reste grande cependant, mais théorique
et, pour ainsi dire, philosophique. Une
manifestation essayée sur un mot d'or-
dre qui est commun à tous les pays d'Eu-
rope ceci a une gravité. Mais c'est là
toucher à la politique, et je dois me con-
tenter de noter mes impressions de flâ-
neur.
Henry Pouquier.
DERNIÈRE HEURE
Les arrestations
Le nombre des arrestations opérées dans
la journée d'hier s'est élevé à environ
quatre cents.
Presque toutes ont été faites dans les ma-
nifestations sur la place de la Concorde et
aux alentours. Cent dix manifestants ont
été conduite au commissariat de la rue
Mont-Thabor, autant au commissariat de
la rue d'Anjou, et cent quarante-cinq autres
au commissariat du quartier des Champs-
Elysées.
Presque tous ont été arrêtés pour refus
de circuler et relâchés dans la soirée; d'au-
tres, contre lesquels on a relevé le délit de
rébellion, d'outrages aux agents, ont été
envoyés au Dépôt. Ces derniers sont au
nombre de cent cinquante environ.
Au cours des charges exécutées pour dé-
barrasser la voie publique, un grand nom-
bre de curieux ont été renversés et plus ou
moins sérieusement contusionnés. Conduits
dans les pharmacies voisines, ils y ont reçu
des soins.
A la place de la République
Pendant toute la soirée, un nombre assez
considérable de curieux se sont tenus place
de la République, autour du monument.
Les agents du dixième arrondissement, qui
étaient chargés du service d'ordre, ont fait
circuler los passants, dont quelques-uns
ont été arrêtés.
Vers dis heures, deux coups de feu ont
retenti ; ne légère panique s'est alors pro-
duite dans la foule. On n'a pu retrouver
l'individu qui a tiré ces coups de revolver.
A onze heures, la place avait repris sa phy-
sionomie de tous les jours.
Départ de Louise Michel
Nous avons dit hier que Louise Michel avait
a été arrêtée à la gare de Lyon, au moment
de sa descente du train. La citoyenne avait
été mise en état d'arrestation sur l'ordre du
parquet de Saint-Etienne, où elle était
allée organiser la manifestation ouvrière.
Mme Louise Michel a été écrouée la nuit
dernière auDépôt et, accompagnée de deux
agents, conduite à la gare de Lyon, à desti-
nation de Saint-Etienne, pour être mise à
la disposition de ce parquet.
Commissaire blessé.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIBR)
Vienne (Isère) 1er mai.
Dans une réunion tenue au théâtre, les
anarchistes ont organisé un boucan en
règle et forcé M. Jouffray, maire et député,
à sortir de la salle.
Une bagarre s'est engagée. Le commis-
saire central a été grièvement blessé.
A la sortie, on a dû faire donner la cava-
lerie ; de nombreuses arrestations ont été
opérées.
Roubaix, 1er mai.
Au moment de la sortie d'une réunion
ouvrière, une patrouille de chasseurs a été
saluée des cris de « Vive l'armée ! »
Troyes, 1er mai.
Autant la journée a été calme, autant la
soirée a été orageuse. Des bandes parcou-
rent la ville criant : « Mort aux patrons !
C'est huit heures qu'il nous faut ! »
Le commissaire de police, M. Bruner,
étant seul, rue de la Cité, veut arracher un
drapeau rouge des mains des manifestants;
il est frappé, jeté à terre, on lui vole son
chapeau et sa canne plombée.
Des patrouilles de cavalerie vont par-
courir la ville, les chasseurs à pied sont
prêts à tout événement.
Marseille, 1er mai..
Une bande d'individus, en majeure partie
étrangers, ont envahi vers huit heures l'hui-
lerie Jansoulin, située au quartier Areno.
Le patron et les contre-maîtres des éta-
blissements ont été menacés et même frap-
pés. .t t 't'b" D, d' At
Les vitres ont été brisées. Divers dégâts
ont été commis. La police, prévenue, a pu
arrêter trente et un de ces individus, tous
Italiens. La Bourse du travail est occupée
par une compagnie d'infanterie.
A dix heures et demie, le calme était ré-
tabli.
Alger, lor mai.
Jusqu'à la nuit, tout a été tranquille au
Prater : 150,000 ouvriers, attablés dans les
jardins des restaurants, buvaient de la
bière en écoutant dans plusieurs établisse-
ments de la musique populaire; un certain
nombre d'entre eux s'arrêtaient devant les
baraques de saltimbanques ou ils prenaient
part aux jeux établis dans cet endroit.
L'ordre parfait régnait partout, et il n'y
avait aucune surexcitation. Aucun discours
n'a été prononcé.
Pendant ce temps, le Corso habituel avait
lieu dans la grande allée, envahie par des
curieux plutôt que par des manifestants;
toutefois, les équipages étaient moins nom-
breux que les années précédentes.
Les rapports sont très satisfaisants en ce
qui concerne la Silésie, la Haute-Autriche,
le Styrie, la Carinthie, la Bukovine, la Mo-
ravie, laGalicie.
.Les ouvriers de la fabrique d'armes de
Steyr ont résolu d'adresser à la Chambre
des députés une pétition pour demander la
mise à exécution, par les voies légales, du
programme de Paris.
VIOLENTE TEMPÊTE
- Madrid, 1er mai.
Une violente tempête sévit sur les côtes de
Bilbao. Les eaux de Nervion sont de deux mé-
tres au-dessus du niveau ordinaire.
De nombreux arbres ont été déracinés, les
navires du port ont doublé leurs amarres, plu-
sieurs barques ont été entraînées par le cou-
rant.
Lç port est fermé.
LE PREMIER MAI
LA JOURNÉE DES CURIEUX
BEAUCOUP DE TROUPE
PEU DE MANIFESTANTS
A travers Paris. - A la recherche des
manifestants. - La délégation au-
près de M. Floquet. — Incidents
divers et charges de cava-
lerie.
Si nous devions passer sous silence les
quelques incidents qui émaillent toujours
les journées où « il doit se passer quelque
chose », la manifestation d'hier, dont on
parlait depuis si longtemps et qui devait
avoir un énorme retentissement, serait
passée complètement inaperçue.
D'abord, a proprement dire, il n'y a pas
eu de manifestation ouvrière; les usines et
les ateliers,—à de très rares exceptions près,
— n'ont pas été désertés. Tout le monde a
travaillé comme à Pordinaire.
Cependant, il faut bien indiquer que pri-
mitivement les groupes corporatifs avaient
décidé la cessation complète du travail,
ce jour-là.
On devait, en une imposante démons-
tration, accompagner les délégués chargés
de présenter la pétition demandant la limi-
tation des heures de travail.
Les paroles imprudentes et les menaces
des anarchistes firent réfléchir les organi-
sateurs de la manifestation, à laquelle des
éléments tapageurs voulaient donner une
signification qu'elle ne devait et ne pou-
vait avoir. En outre, les arrestations récen-
tes et les mesures préventives prises par le
gouvernementdémontraientclairementl'in-
tention de couper court à toute tentative
de manifestation, se serait-elle passée dans
le plus grand calme.
Physionomie de Paris
Malgré les bruits les plus fâcheux qui
couraient depuis quelques jours; malgré
aussi les rodomontades des orateurs anar-
chistes et les informations apeurées de plu-
sieurs de nos confrères, disant que l'on
avait décidé de faire sauter plusieurs éta-
blissements publics, Paris a conservé à
peu près sa physionomie habituelle. Une
centaine de boutiques étaient fermées,
voilà tout.
La ville présentait l'aspect d'un jour fé-
rié. A une heure seulement, dans les rues
avoisinant la place de la Concorde, les bi-
joutiers, et les armuriers principalement,
mettent les volets sur leurs vitrines. Ce
n'est qu'une sage précaution, rien de plus !
par, contre, les cafés ajoutent des tables eL
des chaises à leurS terrasses, pendant que les
voitures de courses traversent au grand
galop la ligne des boulevards, emportant
les parieurs vers Longchamps.
A ce moment, certes, on s'occupait beau-
coup plus des chevaux favoris que de la
manifestation.
Sur la place de la Concorde
C'était sur la place de la Concorde que
devaient se réunir tous ceux qui auraient
désiré participer à la grande manifestation ;
aussi les curieux, toujours en quête d'inci-
dents tumultueux,s'y portaient-ils en nom-
bre assez considérable.
Tranquillement, le nez en l'air, on se pro-
mène de long en large. On pousse jusqu'aux
grilles des Tuileries où bivouaquent des
gardes municipaux à pied et à cheval. On
s'intéresse également aux gardiens de la
paix massés le long de l'Orangerie. Comme
le soleil est assez ardent, on se réfugie sous
les arbres des Champs-Elysées, et l'on est
tout surpris d'apercevoir aux portes du
Palais de l'Industrie des dragons, sabre au
clair, monter la faction. Alors on se sou-
vient tout à coup de la fameuse manifesta-
tion, c- t,de craindre de perdre une bouchée
de ce qui va se produire, l'on revient sur la
place de la Concorde, toujours aussi vide
et toujours aussi ensoleillée..
Toutefois, le nombre des curieux devient
gênant. M. Lépine, secrétaire général de la
préfecture de police, donne l'ordre de faire
évacuer la place.
Un demi-escadron de cavaliers sort des
Tuileries; les curieux admirent l'allure
des chevaux et la tenue des hommes, sans
se douter aucunement de l'intention de
ces derniers.
Les bêtes caracolent sur les trottoirs, au
milieu de la chaussée, pourchassant les
gens qui s'écrient : « Il y a erreur ! nous
ne manifestons pas ! »
Peu importe, la place doit être déblayée,
et elle l'a été plusieurs fois au cours de la
journée.
Arrivée de la délégation
Vers deux heures on aperçoit, débou-
chant de la rue Royale, un tout petit groupe
de personnes, à la tête duquel marchent
trois hommmes dont la poitrine est barrée
par une écharpe tricolore.
Aussitôt, des gardes à cheval partent ven-
tre à terre dans cette direction ; des gardiens
de la paix les suivent au pas gymnas-
tique. Alerte ! alerte ! c'est la délégation qui
arrive du café Mollard, situé en face la gare
Saint-Lazare.
Et, obéissant au commandemement de M.
Lépine, remplaçant M. Lozé, absent pour
nous ne savons quelle cause, cavaliers et
gardiens barrent le chemin aux personnes
qui accompagnent la délégation.
Au terre-plein de la place, M. Debeurry,
inspecteur divisionnaire, s'avance vers les
délégués et s'oppose à leur passage.
- vous êtes trop nombreux, dit ce fonc-
tionnaire ; vous ne passerez pas.
M. Ferroul montre son écharpe de dépu-
té, MM. Baudin et Thivrier font de même.
— Nous sommes députés, s'écrient-ils, et
nous accompagnons les citoyens délégués
Gouzon, Féline, Lentz, Jules Guesde, Rous-
sel, Duluc et Vaillant.
Ce dernier sort son écharpe de conseiller
municipal et se l'attache autour du corps.
— C'est bien, passez ! fit M. Debeurry.
Deux fois la délégation subit le même
sort, et deux fois elle triomphe, grâce aux
écharpes tricolores, des mêmes difficultés.
M. Baudin ne cachait pas sa colère.
— On ne peut pas se prêter, s'écriait-il, à
une semblable comédie !
M. Thivrier, lui, ne disait rien. Il se con-
tentait de froisser sa blouse.
AU PALAIS-BOURBON
A l'intérieur de la Chambre, la salle des
Pas-Perdus n'était guère animée que par la
présence de quelques journalistes et d'une
douzaine de députés, parmi lesquels MM.
Peytral, Noël Parfait, Fouquier, Félix Faure,
Rabier, Martineau, Mermeix, Laporte et
Paulin Méry.
Les délégués., conduits par les questeurs,
MM. Duclaud et Guillaumou, ont été con-
duits auprès de M. Pierre, secrétaire géné-
ral de la présidence. MM. Ferroul, Baudin
et Thivrier ont été reçus par M. Floquet,
qui, sur leur demande, a donné l'ordre
d'introduire les autres délégués.
L'entrevue à duré environ dix minutes,
Les membres de la délégation, auxquels
s'était jointM. Cluseret, se sont ensuite réu-
nis dans la salle des gardes, où ils ont ré-
digé le procès-verbal suivant :
Un procès-verbal
Conformément à la décision prise hier soir
en assemblée générale des représentants des
chambres syndicales parisiennes et des délé-
gués au congrès international de Paris, la dé-
légation chargée de porter aux pouvoirs pu-
blics la pétition pour la journée de huit heu-
res et les autres résolutions du congrès inter-
national est partie à deux heures de la place
de la Concorde et s'est présentée à la Cham-
bre des députés.
Elle a été reçue par le secrétaire général de
la présidence, qui a enregistré les pétitions
émanant des chambres syndicales et des
groupes so.,ialistes de tous les points de la
France, ainsi que les résolutions du congrès
en vue d'une législation nationale et interna-
tionale du travail.
Avis a été donné que ce pétitionnement col-
lectif sera complété par les adhésions annon-
cées et pas encore reçues, et continué par un
pétitionnement individuel qui commence au-
jourd'hui dans la population ouvrière.
La délégation a été ensuite reçue par le pré-
sident de la Chambre, qui a déclaré être pé-
nétré de toute l'importance de la question et
ne pas douter de l'intérêt avec lequel la ma-
jorité républicaine discutera les revendica-
tions formulées. ,
En : foi de quoi ont si lé*: les délégués Gou-
zon, Guignet, Lacoste, Feline, Roussel, Duluc,
Lentz, Guesde, Vaillant, Baudin, Ferrow) Thi-
vrier.
Note officielle
D'autre part, la présidence de la Cham-
bre nous communique la note suivante :
A deux heures et quart, MM. Duclaud et
Guillaumou, questeurs de la Chambre des dé-
putés, ont reçu à la grille du quai d'Orsay MM.
le docteur Ferroul, Baudin et Thivrier, dépu-
tés, accompagnés de MM. Vaillant, conseiller
municipal, Guesde, Feline, Lentz, Guignet, Du-
luc, Lacoste et Gouzon.
Conformément aux instructions données par
M. le président, MM. les questeurs ont conduit
MM. Ferroul, Baudin, Thivrier et les citoyens
qui les accompagnaient au cabinet du secré-
taire général de la présidence.
M. le docteur Ferroul a remis à M. Pierre
82 pétitions émanant des chambres syndicales,
et M. Vaillant a annoncé que d'autres pétitions
ayant le même objet seraient ultérieurement
envoyées. Après avoir pris connaissance de ces
pétitions, le secrétaire général a fait obser-
ver que la formule placée en tête pouvait prê-
ter à une équivoque, et il a demandé aux pé-
titionnaires de la supprimer.
MM. Guesde et Vaillant ont répondu que
cette formule n'avait nullement le sens qu on
paraissait lui attribuer, qu'elle était une sim-
ple indication historique, que &a pièce adres-
sée à la Chambre commençait au mot péti-
tion.
S'étant assuré ainsi que les pétitions n'éma-
naient nullement d'un rassemblement formé
sur la voie publique, le secrétaire général a
reçu les pétitions, qu'il a fait enregistrer.
M. Ferroul a demandé alors à voir le prési-
dent de la Chambre et à lui présenter les ci-
toyens qui l'accompagnaient.
M. Floquet ayant permis au secrétaire géné-
ral d'introduire auprès de lui ses collègues
ainsi que les personnes venues avec eux, une
contre-entrevue a eu lieu dans le cabinet du
président de la Chambre.
M. Ferroul, député, a remercié M. le prési-
dent de la Chambre d'avoir bien voulu le re-
cevoir avec'ses amis et d'avoir maintenu le
droit de pétition des travailleurs.
M. Floquet a répondu que ce droit n'avait
été contesté par personne ; qu'il avait donné
l'ordre de recevoir la pétition au secrétariat
général de la présidence et de l'enregistrer
suivant les formes réglementaires; qu'il avait
en outre reçu bien volontiers ses collègues de
la Chambre et les quelques citoyens qui les
accompagnaient, et qu'il prenait acte de nou-
veau que la pétition émanait d'ouvriers des
syndicats qui l'avaient régulièrement signée
et non d'un rassemblement sur la voie pu-
blique.
M. Floquet a ajouté que s'il pouvait être en
désaccord avec les pétitionnaires sur plus
d'un point, il les assurait que la Chambre et
son président examineraient avec intérêt tou-
tes les questions touchant au sort des travail-
leurs. Ses collègues présents savaient d'ail-
leurs quels moyens le règlement leur don-
nait d'amener sur leurs pétitions un débat
public devant l'Assemblée.
En remerciant le président de la Chambre,
les délégués ont insisté sur le caractère légal
de leur démarche,qui n'est pas la conséquence
d'un rassemblement dans la rue, et sur la ré-
gularité de la pétition qu'ils ont déposée et
qui est signée d'un grand nombre de tra-
vailleurs de tous les points de la France.
D'autres pétitions viendront ultérieurement
s'ajouter a celle-ci et seront envoyées au se-
crétariat général de la présidence.
Charges de cavalerie
Pendant que la délégation discutait avec
M. Floquet, une série d'incidents, assez
graves, se produisaient sur la place de
la Concorde et dans les avenues adja-
centes.
Afin d'éviter des attroupements qui, à un
moment donné, auraient pu devenir des
centres d'agitation, des escouades de gar-
des municipaux balayaient incessamment
la place, refoulant avec l'aide des gardiens
de la paix, non pas les manifestants, car il
n'y en a pas eu, mais les curieux, qui
fuyaient épouvantés.
Une centaine de récalcitrants furent ar-
rêtés. Dans ce nombre, plus de cinquante
cherchaient évidemment l'occasion de con-
naître l'intérieur d'un poste de police.
Nous avons assisté, par exemple, à des
scènes comme celle-ci :
— Circulez! disait un gardien de la
paix.
— Parlez donc plus poliment ! faisait la
personne ainsi interpellée.
— Plus vite que ça, où je vous conduis au
poste !
- Ah! c'est ainsi! Eh bien! conduisez-
moi au poste.
Au.-sitôt, ce désir était exaucé.
Les trois quarts des arrestations de la
journée d'hier ont été opérées de la sorte.
Pourtant, les charges de cavalerie étaient
parfois sérieuses, et les gardiens de la paix,
sans doute énervés d'une trop grande fac-
tion, manifestaient à grand renfort de
coups de poing un mécontentement qu'ils
n'auraient pas dû ressentir.
Nous avons vu des gens très inoffensifs
bousculés brutalement. Entre autres, M.
Lannes de Montebello, petit-fils du maré-
chal de ce nom, a été violemment frappé
par dès gardiens de la paix. M. de Monte-
bello, qui a eu la jambe brisée par une
balle prussienne, n'avait pu fuir à temps;
ce seul motif lui a valu des coups de poing.
Un de nos confrères a eu le même sort.
Départ de la délégation
A quatre heures, la délégation ouvrière
traversa pour la seconde fois la place de
la Concordé. Au commencement de la rue
Royale, elle fut entourée de gardiens de la
paix qui voulurent la disperser.
De rechef, les députés exhibèrent leur
écharpe. Seul M. Trivier eut un peu maille
à partir avec la police.
Selon son habitude,le député de Montlu*
çon s'était vêtu d'une blouse, et le gardiea
de la paix qui l'avait saisi par le bras dou-
tait de sa qualité.
Avec beaucoup de mal, car sa blouse
semblait l'embarrasser fort, M. Thivier
put sortir de sa poche l'écharpe tricolore
qu'il se mit autour du cou, en s'écriant :
— Vous voyez bien que je suis député
En avant de la délégation,"une escouade
de gardes à cheval balayait la rue Royale,
tandis que des gardiens rejetaient loin en
arrière des curieux qui s'étaient placés sur
les marches de l'église de la Madeleine.
Puis, sans plus d'autre incident, la délé-
gation s'en alla tranquillement à l'Hôtel de
Ville.
Autour de l'Hôtel de Ville
Toute la matinée, la place de l'Hôtel-de-
Ville et les abords sont restés fort calmes.
Des pelotons de gardes-municipaux à che-o
val évoluent sur la place, le long des quais,
avenue Victoria et rue de Rivoli; mais ils
n'ont aucune difficulté à repousser les cu-
rieux qui se dirigent vers l'Hôtel de Ville.
ioutes les grilles du monument sont fer-
mées, sauf une seule par où pénètrent
quelques conseillers municipaux qui en-
trent et sortent sans attirer l'attention
du public.
À deux heures et demie, un eamelot a été -
invité à circuler; comme il s'y refusait, il
fut appréhendé au collet par les agents; aux-
quels il opposa une certaine résistance. M.
Duraiiton, commissaire de police, qui s'était
assuré de ce camelot, a été mordu à la
main par celui-ci.
Après cet incident, la place redevient cal-
me, et les agents se contentent d'empêcher
les rassemblements en faisant circuler, à
tout bout de champ, les curieux.
A L'HOTEL DE VILLE
Les conseillers en permanence
Les conseillers municipaux avaient reçu
hier une lettre les informant que le bureau
du conseil, en prévision des événements
qui pourraient survenir, se tiendrait toute
la journée en permanence à l'Hôtel de
Ville. La lettre ajoutait que ceux des mem-
bres qui désiraient s'entretenir avec le bu-
reau seraient reçus dans le local ordinaire
de la présidence. 11 ne s'agissait nullement.
on le voit, d'une séance in extremis, comme
l'ont dit quelques journaux, mais de sim-
ples conversations.
De nombreux conseillers s'étaient en
effet rendus à l'Hôtel da Ville. En voici les
noms :
MM. Brousse, Stupuy, Benon, Després;
Alphonse Humbert, Binder, Perrichont.
Deligny, Gaufrés, Chassaing, Pipereau,
Boué, Daumas, Cusset, Lavy, Chau temps,
Poussier, Duplan, Levraud, Marsoulan,Des-
champs, Dumay, Simonneau, Petrot, Bom-
pard, G. Berry et Lerolle.
On voit que toutes les opinions, de l'ex-
trême socialiste à la droite la plus pure.
étaient représentées.
La conversation a roulé, bien entendu,
sur ce qu'il y aurait à faire au cas où des
délégations demanderaient à être enten-
dues. Mais tout le monde a été d'avis que,
suivant toute probabilité, ce cas ne se pré-
senterait pas, puisque la manifestation
avait pour but la remise d'une pétition
adressée non pas au conseil municipal,
mais aux Chambres.
L'installation du préfet
Quelques observations ont été aussi
échangées à propos de la présence à l'Hô-
tel de Ville du préfet de la Seine, et quel-
ques membres se sont demandé si cette
circonstance n'engageait pas la question dQ
la résidence du préfet à l'Hôtel de Ville.
Examen fait de la situation, il a été re..i
connu que le litige soulevé à ce propos
entre l'Etat et la Ville n'avait jamais mis en
question le droit pour le préfet de se ren-
dre à l'Hôtel de Ville les jours où il y ju-
geait sa présence nécessaire, ni même d'y
avoir un cabinet.
Toute la question est de savoir si le préfet
a le droit « d'habiter » l'Hôtel-de-Ville. Or
disent les conseillers, ce droit, aucune loi
ne le lui concède.
Le préfet de la Seine est, en effet, à la
fois préfet du département de la Seine et
maire- de Paris. Comme préfet il peut re-
vendiquer le droit d'habitation dans un
bâtiment départemental, mais non pas dans
un bâtiment communal payé avec des de*
niers exclusivement communaux ; car la
loi n'oblige pas une commune à loger à ses
frais le préfet du département.
Comme maire de Paris, il ne peut da-
vantage réclamer la résidence à l'Hôtel de
Ville; car, aux termes de la législation exis-
tante, aucune commune de France, pas
même la commune parisienne, n'est obli-
gée, à loger son maire.
Cela étant, et la question étant posée
dans ces termes, qui sont les vrais, il est
bien clair qu'elle ne peut être résolue inci-
dentellement et que sa solution dépend ex-
clusivement des pouvoirs publics.
Aucun lien n'est donc a établir entre la
présence du préfet à l'Hôtel de Ville
et le droit, pour lui, d'y fixer sa rési-
dence. Et, dans ces conditions, il n'y avait
pas à intervenir, la question des droits du
conseil n'étant pas engagée.
La consigne
Cependant, le préfet a été consulté au
sujet des consignes données aux agents de
la force publique chargés de garder les
portes fermées de l'Hôtel de Ville. Il a ré-
pondu qu'il exécutait simplement les or-
dres du ministre de l'intérieur.
Sur les quatre heures et demie; M. Al-
phonse Humbert, qui sortait de la réunion,
a rencontré sur la place MM. Vaillant et
Chauvière qui, accompagnés des députés
Baudin et Thivrier, se rendaient à l'Hôtel
de Ville. L'entrée ayant été refusée aux
deux députés, M. Alphonse Humbert s'est
rendu auprès du préfet de la Seine et lui a
fait observer que ces messieurs ne venaient
pas le moins du monde en délégation,
qu'aucun manifestant ne les accompagnait,
qu'ils n'avaient de mandat d aucune
espèce ni de personne et que, dans ces con-
ditions, il paraissait discourtois de leur
refuser l'accès de l'Hôtel de Ville quand ils
s'y présentaient accompagnés d'un conseil-
ler municipal.
Le préfet a répondu qu'il était aux regrets
de refusera MM. Baudin et Thivrier ce qu'ils
demandaient, mais que la consigne était
formelle; qu'elle autorisait les seuls con-
seillers municipaux à pénétrer dans le bâti-
ment et qu'il lui était impossible d'enfrein-
dre les ordres qu'il avait reçus.
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