Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1890-05-01
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 01 mai 1890 01 mai 1890
Description : 1890/05/01 (A19,N6681). 1890/05/01 (A19,N6681).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7560220q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
.Dix-neuvième année. — N° 6,681 CINQ Centimes - Paris et Départements - CINQ Centimes JEUDI 11,11 MAI 1890
JOURNAL RÉPUBLICAIN
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TRÈS PROCHAINEMENT
Le XIXe SIÈCLE
Publiera un grand roman-feuilleton
dû a la plume d'un de nos plus popu-
laires romanciers.
LE PREMIER MAI
Nous touchons à cette journée du
lor mai dont on parle depuis si long-
temps et pour laquelle les socialistes
se sont, bien des mois à l'avance, don-
né rendez-vous. Il s'agit, dans la pen-
sée des promoteurs de l'idée, de faire
une manifestation aussi imposante
que pacifique en faveur de la réduc-
tion uniforme de la journée de travail
à huit heures. Mais il paraît que le
caractère pacifique de cette manifes-
tation n'inspire pas à tout le monde
une bien grande confiance, car en Al-
lemagne et plus encore en Autriche,
une véritable panique s'est déclarée.
Les fonds publics ont subi de fortes
dépréciations, la population émigré
des villes industrielles et va attendre
dans des régions plus paisibles la
tournure que prendront les événe-
ments.
Il ne nous déplaît pas d'opposer à
cette agitation et à ces inquiétudes la
tranquillité parfaite dont nous jouis-
sons et la certitude où nous sommes
que la journée du 1er mai ne donnera
lieu, en France, à aucun incident de
quelque gravité. A Paris, on peut être
assuré que la population ouvrière res-
tera insensible aux excitations des
agitateurs, et que, même si aucune
mesure n'avait été prise, elle les au-
rait dédaignées, parce que, d'une
part, les chefs du parti possibîliste
s'étaient très énergiquement pronon-
cés contre la manifestation et que,
d'autre part, la question de la réduc-
tion de la journée de travail n'a pour
elle qu'un très médiocre intérêt. Seuls
les ouvriers de quelques centres in-
dustriels pourraient croire que la ma-
nifestation avancera leurs affaires.
Mais ils savent aussi que la Républi-
que doit porter son effort vers l'exa-
men et la solution des questions ou-
vrières et sociales, et ils comprendront
que le moment serait mal choisi pour
se livrer à des manifestations d'allu-
res au moins anormales quand ces
questions sont posées, et que, si les
opinions sont partagées quant à la
solution à adopter, nul du moins ne
se refuse à entreprendre un étude at-
tentive.
Nul symptôme ne peut faire crain-
dre que nous touchions à une crise.
Nulle part ne s'est produite aucune de
ces effervescences qui précèdent tou-
jours les grands mouvements. Tout
au contraire, les élections législatives
ont prouvé que, malgré tous les ef-
forts des agitateurs, malgré les pro-
messes de toute nature qu'on n'a mê-
me pas marchandées aux populations
ouvrières, l'îmmensemajorite du pays
croyait beaucoup plutôt au progrès
régulier, fondé sur le développement
des institutions républicaines, qu'au
triomphe des moyens violents et à la
fécondité des révolutions. Dira-t-on
que les élections législatives sont déjà
bien anciennes et que la situation s'est
modifiée depuis lors ? Que l'on consi-
dère alors les élections municipales
de dimanche dernier. Elles ne sont
assurément pas l'œuvre d'une popu-
lation animée de sentiments bien ré-
volutionnaires; elles ont, bien au
contraire, cette signification très pré-
cise que les Parisiens en ont assez
des perturbateurs, qu'ils ne veulent
plus entendre parler de ceux qui cher-
chent exploiter, dans un intérêt mal
défini, les passions populaires,et qu'ils
veulent travailler sans être détournés
de leur besogne.
Si quelque chose pouvait confirmer
encore les ouvriers dans cette pensée,
ce serait bien de voir à la tête du mou-
vement dans lequel on prétend les en-
traîner des hommes qui n'ont rien à
faire dans une agitation socialiste.
Lors des manifestations précédentes,
comme celle qui se termina, il y a
quelques années, par le pillage des
boulangeries de la rive gauche, on dé-
couvrit, après coup, parmi ces ci ou-
vriers sans travail ", des agents roya-
listes qui avaient été les plus ardents
à exciter et à entraîner les ouvriers,
•qui même en avaient embauché. Cette
fois, c'est à la veille de la « grande
manifestation du prolétariat" qu'on
découvre parmi les meneurs un mar-
quis subventionnant les journaux les
plus violents et des hommes qui sont
connus par leur dévouement à la cause
monarchique. Ce sont ces hommes
qui, à une époque où les anciennes
entraves à la liberté de l'imprimerie
ont été supprimées, établissent une
imprimerie clandestine pour publier
des appels à la violence et pour ex-
citer l'armée à la désertion et à la
trahison.
On aurait peine à soutenir que ces
hommes n'ont pas calculé les consé-
quences de leurs manœuvres, qu'ils
sont aigris par leurs souffrances et
qu'ils se laissent aveugler par la ran-
cune des prolétaires contre les heu-
reux de la terre. Ils ont, au contraire,
parfaitement prévu le parti qu'ils pou-
vaient tirer de leur propagande; ils
ont pensé que, n'ayant pas réussi à
mettre la main sur la République par
des moyens pacifiques, il fallait es-
sayer de la renverser par des moyens
violents, « en la précipitant, comme
dit la Lanterne, dans l'émeute et dans
le sang. »
Les ouvriers français, qui ont, avec
tant de bon sens, soutenu la Répu-
blique contre ses adversaires et qui
ont déjoué les manœuvres insidieuses
à l'aide desquelles on s'efforçait de les
entraîner vers un but qu'on leur ca-
chait, ne tomberont pas dans le nou-
veau piège qui est tendu à leur bonne
foi. Leur intérêt personnel est d'ac-
cord avec l'intérêt politique pour leur
conseiller de rester tranquilles et de ne
pas aider, par leur participation, à un
mouvement qui, commencé pacifique-
ment, ne saurait, tant il y a de gens
intéressés à en changer le caractère,
manquer de dégénérer bientôt en
émeute. Ils laisseront les agitateurs
s'agiter dans le vide, et ils montreront
une fois de plus la supériorité des ré-
gimes de liberté comme la République
sur les démocraties impériales ou sur
celles qui voudraient les prendre pour
modèles.
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ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
ET ÉLECTIONS MUNICIPALES
En six mois. — Simple comparaison. —
Les boulangistes battus dans les
arrondissements boulangistes.
Il est intéressant de comparer le nombre
des voix obtenues à Paris aux élections lé-
gislatives par les candidats boulangistes
élus députés, — avec le nombre des voix
que les candidats boulangistes aux élections
municipales ont obtenues dans les mêmes
arrondissements et les mêmes quartiers.
Nous comparons également le nombre
des voix données, il y a six mois, aux can-
didats républicains dans les arrondisse-
ments qui ont nommé des députés boulan-
gistes.
On pourra se rendre compte ainsi, et fa-
cilement, des changements profonds qui se
sont opérés en aussi peu de temps dans
les quartiers et les arrondissements que
les boulangistes considéraient depuis lors
comme complètement à eux.
Cinquième arrondissement. — Aux
élections législatives, les quartiers Saint-
Victor et de la Sorbonne donnent h,830
voix à M. Naquet, boulangiste, et .4,7h5 voix
à M. Bourneville, républicain.
Aux élections municipales, ces deux
quartiers donnent 3,.495 voix aux boulan-
gistes et 5,1475 voix aux républicains.
Septième arrondissement. — Aux élec-
tions législatives, cet arrondissement donne
5,001 voix à M. Mermeix, boulangiste, A,679
voix à M. Frébault, républicain, h,828 voix
à M. Denys Cochin, conservateur.
Aux élections municipales, il donne Xi,095
voix aux boulangistes, îi,855 aux conserva-
teurs, 3,980 aux républicains.
Treizième arrondissement. — Aux élec-
tions législatives,les quartiers de la Maison-
Blanche et la Gare donnent 5,806 voix à M.
Paulin-Méry, boulangiste, et 5,78h voix à
M. Basly, républicain.
Aux élections municipales, ils donnent
6,MO voix aux républicains et h,55A voix
boulangistes.
Quinzième arrondissement. Aux élec-
tions législatives, les quartiers de Grenelle
et Necker donnent 6,569 voix à M. Farcy,
boulangiste, et h,699 voix aux deux candi-
dats républicains.
Aux élections municipales, ils donnent
5,618 voix aux républicains et h,..lJJ. aux-
boulangistes.
2e circonscription. — Aux élections légis-
latives, les quartiers de Javel et Saint-
Lambert donnent ht209 voix à M. Laguerre
et 2,965 voix aux trois républicains. Aux
élections municipales,ils donnent Jj,Ji02voix
aux républicains et ,h99 voix aux boulan-
gistes.
Dix-septième arrondissement. — Aux
élections législatives, les quartiers des Ter-
nes et Plaine-Monceau donnent h,708 voix
à M. Le Senne, boulangiste, et A,001 voix à
M. de Hérédia, républicain. Aux élections
municipales, ils donnent aux républicains
3,90h voix, plus 1,931 voix à M. Lambert Ste-
Croix, nettement anti-boulangiste), et ,h99
voix aux boulangistes.
2e circonscription. — Aux élections légis-
latives, les quartiers des Batignolles et des
Epinettes donnent 8,653 voix à M. E. Roche,
boulangiste, et 7,758 voix à M. E. Lepelle-
tier, républicain.
Aux élections municipales, ils donnen t
9,110 voix aux républicains et 6,127 aux
boulangistes.
Dix-huitième arrondissement. — Aux
élections législatives, le quartier des Gran-
des-Carrières donne 3,610 voix à M. Lai-
sant, boulangiste, et 3,21A voix à M. Lafont,
républicain.
Aux élections municipales, il donne
3,762 voix aux républicains et 2,83h voix
aux boulangistes.
36 circonscription. — Aux élections légis-
latives, les quartiers de la Goutte-d'Or et
la Chapelle donnent 5,719 voix à M. Saint-
Martin, boulangiste, et 5,390 voix aux trois
candidats républicains.
Aux élections municipales, ils donnent
5,83h voix aux républicains et h,552 voix
aux boulangistes.
Dix-neuvième arrondissement. — Aux
élections législatives, les quartiers de la Vil-
lette et du Combat donnent 7,138 à M. Mar-
tineau, boulangiste, et 5,723 voix à M. Cha-
bert, républicain.
Aux élections municipales, ils donnent
6,531 voix aux républicains et A,998 voix
aux boulangistes.
2 circonscription. — Aux élections légis-
latives, les quartiers du Pont-de-Flaadre et
d'Amérique donnent %U5k voix à, M. Gran-
ger,boulangiste, et 2,272 voix à M. Cattiaux,
républicain.
Aux élections municipales, ils donnent
, voix aux républicains et 1,963 voix
aux boulangistes.
LES ARRESTATIONS
CONTINUENT
lA JOURNÉE DES PERQUISITIONS
M. de Morès. — Perquisitions à ses
domiciles. — Papiers, brochures et
journaux. — Chez les révolution-
naires. — En recherches.
Après une nuit passée au Dépôt, M. le
marquis de Morès, qui semble être le chef
d'une association aussi peu redoutable que
bizarre, a été conduit, à dix heures du
matin, dans le cabinet de M. Dhers, com-
missaire de police du quartier Saint-Ger-
main-l'Auxerrois.
— Je vais perquisitionner chez vous, lui
dit M. Dhers, à vos deux domiciles : rue
Sainte-Anne et rue Tilsitt. Vous assisterez,
d'ailleurs, à cette « formalité ».
M. de Morès eut un sourire des plus iro-
niques :
— Vous comprenez bien, monsieur, qu'é-
tant appelé à devenir un personnage qua-
lifié de "dangereux", j'ai pris quelques
précautions. Je ne garde rien de compro-
mettant. Pas aussi naïf !
Et M. de Morès, M. Dhers et son secrétaire,
avec quatre inspecteurs de la sûreté ont
pris place dans deux voitures qui les ont
déposés, peu d'instants après, devant la
porte du petit local loué par M. de Morès,
65, rue Sainte-Anne. Nous remarquons
les scellés apposés la veille par M. Dulac.
Il n'y a pas grand' chose dans l'apparte-
ment de M. de Morès : des numéros du
journal l'Attaqué, dont le gérant et le prin-
cipal rédacteur ont passé avant-hier en
cour d'assises, quelques papiers épars, des
brochures invitant les travailleurs à mani-
fester le 1er mai. Tout cela n'est pas très
important. M. Dhers enferme ces papiers
dans une valise qui appartient précisé-
ment à l'inculpé, ainsi que l'indiquent ces
mots à l'encre noire écrits sur un des
côtés : Marquis de Morès
Rue de Tilsitt
Les deux voitures filent ensuite, au mi-
lieu d'un petit groupe de curieux subite-
ment amassés sur le trottoir, dans la direc-
tion de la rue de Tilsitt, 5, où habitent M.
de Morès, son beau-père et sa femme.
Mme de Morès, une Américaine qui a déjà
assisté à trois arrestations de son mari en
Amérique, était fort peu émotionnée. Son
mari était, du reste, parfaitement calme.
— Voulez-vous accepter quelque rafraî-
chissement? questionna-t-il en s'adressant
à M. Dhers, qui refusa d'un signe.
Quelques papiers trouvés dans le cabinet
de travail de M. de Morès vont rejoindre
la valise. -
— Je vous demande la permission, dit Je
gentilhomme socialiste au commissaire de
police, de me changer de linge.
M. de Morès profite de l'autorisation pour
se faire la barbe et nous le voyons ressor-
tir de l'hôtel avec une chemise de flanelle
à rayures jaunes et brunes sur laquelle est
attaché un faux-col blanc, — un vêtement
complet noir, un par-dessus d'été clair sur
le bras, un chapeau de soie.
Le prisonnier est reconduit au Dépôt.
Interrogatoire de M. de Morès
M. de Morès a été interrogé dans l'après-
midi par M. Atthalin.
Après son interrogatoire, il a pu s'entre-
tenir avec sa femme qui lui a appris qu'elle
avait demandé à Me Paul Escudier de pré-
senter sa défense.
Le marquis de Morès proteste contre le
récit qui a été fait de son arrestation. Il ne
s'est pas enfui, dit-il, à l'approche des
agents chargés de l'arrêter. Il s'est contenté
de les suivre, en s'écriant : « Le gouverne-
ment a donc peur de moi, qu'il me fait ar-
rêter? »
M. Dulac s'occupe
Au même moment, tandis que M. Dhers
opérait chez M. de Morès, M. Dulac, com-
missaire aux délégations judiciaires, se
rendait au domicile de l'un des trois indi-
vidus arrêtés à l'imprimerie de la rue des
Trois-Bornes, le nommé Dumont, dit Ri-
cardo. M. Dulac a fait main basse sur un
paquet de brochures et de manifestes exci-
tant les soldats à la désobéissance et à la
révolte.
Veut-on un extrait de cette prose ?
Soldats I vous êtes des travailleurs comme
nous, vous êtes des frères en misère, et nous
voulons vous affranchir du joug sous lequel
vous marchez courbés comme des esclaves.
L'abolition de la société bourgeoise amènera
la suppression des armées ; quand l'ouvrier
sera émancipé, le soldat sera libre J
Les chefs qui vous commandent, comme les
patrons qui nous exploitent, sont des tyrans.
Frères! le 1ermai, nous nous rencontrerons
dans la rue; vos chefs bourgeois vous ordon-
neront peut-être de tirer sur nous. S'il vous
donnent cet ordre infâme, montrez que vous
n'êtes pas des brutes asservies : retournez
contre eux les canons de vos fusils, et en-
voyez-leur les balles qu'ils nous destinaient.
Si l'ouvrier et le soldat marchent la main
dans la main, pour eux le jour de la liberté
est proche.
La société de demain ne reconnaîtra plus
d'esclaves de la caserne, plus d'esclaves de
l'usine, plus d'exploités, plus de maîtres. Elle
ne reconnaîtra, d'un bout du monde à l'au-
tre, que des frères.
Soldats ! le 1" mai, deux ennemis se trouve-
ront en face : nous, les travailleurs, las de
souffrir et cherchant à améliorer notre sort,
et les exploiteurs enrichis de millions extor-
qués au peuple et voulant prolonger nos mi-
sères.
Si vous prenez parti pour nous, nous se-
rons les plus forts, et certainement nous au-
rons la victoire. Si vous préférez servir nos
tyrans communs, venez, égorgez-nous avec
nos femmes et nos enfants. Venez massacrer
les vieillards qui, espérant dans votre atti-
tude sympathique, exposeront à vos poi-
gnards leurs freles poitrines 1
Non 1 non 1 vous prendrez parti pour vos
frères, et le 1er mai 1890, solats et travailleurs
ensemble chanteront la « Marseillaise des
Prolétaires », saluant l'aube de l'émancipa-
tion humaine.
Des manifestes de ce genre avaient été
distribués dans les casernes de Paris, Saint-
Germain, Versailles, même au Palais de
Justice à des gardes républicains, qui se
sont empressés de les remettre à leurs
chefs.
M. Mouquin aussi
De son côté, M. Mouquin, commissaire
de police du faubourg Montmartre, « tra-
vaillait » et se rendait chez Molinari, sujet
italien, marchand de tableaux, rue de la
Grange-Batelière.
— Mon mari est absent, dit Mme Moli-
nari.
— Où est-il ?
— Il est parti, il y a dne semaine, pour
Amiens ; de là, il doit aller en Angleterre.
M. Mouquin constata que Molinari n'était
pas dans le Detit appartement cm'occuD8 le
ménager
Un arrêté d'expulsion avait été pris con-
tre ce révolutionnaire, il y a quelques
jours.
Confrontation à Versailles
Dans l'après-midi, M. Clément s'est rendu
à Versailles, accompagné d'agents de la Sû-
reté, qui ont emmené avec eux le nommé
Dumont pour être confronté avec les sol-
dats à qui il a distribué avec ses complices,
les nommés Xavier Martino et Troaria, des
brochures les excitant à tirer des coups de
fusil sur leurs officiers au cours de la ma-
nifes ation du 1er mai.
Dumont a été reconnu par plusieurs sol-
dats pour leur avoir remis des placards
anarchistes. Le magistrat s'est livré à des
investigations qui l'ont mis sur la piste de
plusieurs autres individus faisant partie
du comité de propagande dont Dumont
était le chef.
Revenu à Paris à huit heures, M. Clément
s'est immédiatement rendu, muni d'un
mandat de M. Atthalin, 1A, rue Bertholet,
au domicile d'un jeune étudiant rou-
main du nom de Stoïanoff, âgé de vingt
et un ans. Cet individu est inculpé, comme
ses complices, d'excitation à la violence. Il
a été écroué à dix heures au Dépôt.
Dans la soirée, le préfet de police s'est
concerté avec MM. Atthalin, juge d'instruc-
tion, Goron, chef de la sûreté, et Clément,
commissaire aux délégations judiciaires.
Il est probable que d'autres arrestations se-
ront opérées aujourd'hui.
La citoyenne Louise Michel
Depuis plusieurs mois, la citoyenne
Louise Michel a coutume de faire chaque
semaine une conférence à la salle des Ca-
pucines.
Hier, elle devait parler sur un sujet plein
d'actualité : la manifestation du 1er mai.
Un grand nombre de personnes s'étaient
rendues à la salle des Capucines pour en-
tendre la révolutionnaire, mais la confé-
rence n'a pas eu lieu.
Mlle Louise Michel se trouve à Lyon, où,
paraît-il, elle aurait été mise en état d'ar-
restation.
Le total
Donc, actuellement, il y a quatorze arrê-
tés : Gegout, Malato et Bebin, dont les ar-
restations se rattachent au procès de l'At-
taque, et de Morès, Mordacq, Cabot, Cuisse,
Prévost, Prodi, Martinet, Dumont dit Ri-
cardo, Merleno, Trovaria et Stoïanoff.
Ces derniers sont poursuivis pour provo-
cation adressée à des militaires et pour
provocation à des attroupements.
MM. de Morès et Mordacq sont prévenus
d'avoir coopéré à ces crimes ou délits en
fournissant les sommes nécessaires pour
l'impression des appels révolutionnaires.
M. Cuisse est compris dans les poursuites
comme rédacteur de plusieurs manifestes,
Prevost comme distributeur.
Enfin, les étrangers Malaio, Prodi, Mer-
leno, Trovaria sont sous le coup de man-
dats d'expulsion.
Ajoutons que la police recherche les anar-
chistes Laurens, Villaret et Thévenin.
On annonce, en dernière heure, qu'un
anarchiste, du nom de Vinchon,a été arrêté
hier soir à la gare de Lyon, au moment où
il se disposait à prendre le train.
Le bruit court également de l'arrestation
de M. Amilcare Cipriani.
Les députés socialistes et les arresta-
tions
Nous avons annoncé, dans notre dernier
numéro, l'arrestation de Prévost, secrétaire
du syndicat des coiffeurs et membre de la
commission d'organisation de la journée
du 1er mai.
Dès ce matin, MM. Ferroul et Baudin, dé-
putés socialistes et organisateurs de la ma-
nifestation ouvrière, se sont rendus à la
préfecture de police pour demander des
renseignements à M. Lozé sur cette arres-
tation et sur les autres en même temps.
— Aucun texte de loi, dit M. Ferroul au
préfet, n'interdit, que je sache, de faire
des manifestations pacifiques. Nous vous
demandons, en conséquence, pourquoi de
semblables mesures ont été prises.
— Prévost, a répondu M. Lozé, est l'un
des distributeurs de ces écrits séditieux, de
ces appels, manifestes et brochures, exci-
tant les soldats au mépris de leurs chefs, à
la désobéissance, à la révolte. Il y a une loi
qui punit cela.
Puis, parlant du 1er mai, le préfet a
ajouté :
— Quelque pacifique que soit la mani-
festation, il y a encore une loi de l8h8 qui
interdit les attroupements. Cette loi sera
exécutée.
— Alors, nous autres députés, si.?
— Vous autres, députés, vous pourrez
vous rendre librement au Palais-Bourbon;
mais il ne vous sera pas permis de vous
faire escorter par une délégation quelcon-
que, ce qui donnerait lieu à un attroupe-
ment, et alors. MM. Baudin et Ferroul se
sont retirés. Nous rencontrons à la sortie
les deux députés.
— Vous allez voir le ministre de l'inté-
rieur? demandons-nous.
— Un député socialiste, réplique M. Fer-
roul, très digne, ne peut discuter avec un
ministre. Il n'y a rien de commun entre
nous et lui !
La loi
Voici le texte des articles de la loi de
18A8 et de la loi de 1881 dont nous parlons
plus haut :
Loi de 1848
Art. 6. — Toute provocation directe à un at-
troupement armé ou non armé, par des dis-
cours proférés publiquement et par des écrits
ou des imprimés, affichés ou distribués, sera
punie comme le crime et le délit, selon les
distinctions ci-dessus établies.
Les imprimeurs, graveurs, lithographes, affi-
cheurs et distributeurs seront punis comme
complices lorsqu'ils auront agi sciemment.
Si la provocation faite par les moyens ci-des-
sus n'a pas été suivie d'effet, elle sera punie,
s'il s'agit d'une provocation à un attroupe-
ment nocturne et armé, d'un emprisonne-
ment de six mois à un an ; s'il s'agit d'un at-
troupement non armé, l'emprisonnement sera
de un mois à trois mois.
Art. 7. — Les poursuites dirigées pour crime
ou délit d'attroupement ne font aucun obsta-
cle à la poursuite pour crimes et délits parti-
e uliers qui auraient été commis au milieu des
attroupements.
Loi de 1881
Art. 33. — Seront punis comme complices
d'une action qualifiée crime ou délit ceux qui,
soit par des discours, cris ou menaces prcïé*
rés dans des lieux ou réunions publics, soit
par des é!.'is, des imprimée Vendus ou distri-
i bués, mis en vente ou exposés dans des lieux
ou réunions publics, soit par des placards ou
affiches, exposés aux regards du public, au-
ront directement provoqué l'auteur ou les
auteurs à commettre ladite action, si la pro-
vocation a été suivie d'effet.
Cette disposition sera également applicable
lorsque la provocation n'aura été suivie que
d'une tentative de crime prévue par l'article 2
du code pénal.
Art.. — Ceux qui par les moyens énoncés
en l'article précédent auront directement pro-
voqué à commettre les crimes de meurtre, de
pillage et d'incendie, ou l'un des crimes con-
tre la sûreté de l'Etat prévus par les articles
75 et suivants jusques et y compris l'article
101 du Code pénal, seront punis, dans le cas
où cette provocation n'aurait pas été suivie
d'effet, de trois mois à deux ans d'emprisonne-
ment et de 100 francs à 3,000 francs d'amende.
Tous cris ou chants séditieux proférés dans
des lieux ou réunions publiques seront punis
d'un emprisonnement de six jours à un mois
et d'une amende de 16 francs à 500 francs, ou
de l'une de ces deux peines seulement.
Art. 25. — Toute provocation par l'un des
moyens énoncés en l'article 23, adressée à des
militaires des armées de terre ou de mer,
dans le but de les détourner de leurs devoirs
militaires et de l'obéissance qu'ils doivent à
leurs chefs dans tout ce qu'ils leur comman-
dent pour l'exécution des lois et règlements
militaires, sera punie d'un emprisonnement
d'un à six mois et d'une amende de 16 francs
à 100 francs.
Les anarchistes de Lyon
(D'UN CORRESPONDANT)
Lyon, 99 avril.
Les indications recueillies par le service
de la sûreté faisaient présumer que les an-
archistes de Lyon préparaient pour les ap-
proches du 1er mai des attentats, et déte-
naient dans ce but des matières explosi-
bles.
Sur ces données, dans la nuit du 96 au
27 avril, des perquisitions furent faites si-
multanément chez plusieurs d'entre eux et
furent suivies des arrestations des nommés
Trimollet, Gruffat, Cuzin, veuve Petel, Puil-
let, Griffon, Says, sujet suisse, femme Says,
Krayenbuhl se prétendant sujet suisse, mais
dont le vrai nom est Mayeux et qui est un
déserteur français. Tous se laissèrent arrê-
ter sans résistance.
Le 27 avril, à onze heures et demie du
soir, trois autres anarchistes, parmi les-
quels le nommé Cadeaux, furent arrêtés
rue Molière, au moment où ils sortaient
d'un débit de boissons ; un quatrième par-
vint à s'échaDDer.
Le sieur Câdeaux s'était grièvement brûlé
à la face en manipulant les matières desti-
nées à préparer les explosifs. Mis en éveil
par les arrestations de la nuit précédente,
il fit disparaître la plus grande partie de
ces matières ; mais une perquisition opérée
chez lui dans la journée du 23 amena ce-
pendant la découverte de plusieurs pa-
quets ou bouteilles contenant des produits
chimiques répondant à cette destination.
Le service de la sûreté put arrêter un
quatrième anarchiste qui s'était échappé la
veille et fit chez lui une perquisition qui
amena la découverte de matières analogues
aux premières, enveloppées dans une
blouse. Arrêté vers huit heures du soir,
cet anarchiste, nomme Regater, avoua que
Cadeaux lui avait, la veille, remis ce pa-
quet pour le cacher chez lui.
Enfin, aujourd'hui, deux nouvelles arres-
tations d'anarchistes dangereux, celles
des nommés Poyet et Condom, ont été
opérées.
Tous ces individus ont été mis à la dis-
position du procureur de la République,
auquel ont été transmis les produits saisis,
qui feront l'objet d'une analyse.
A l'heure actuelle, quinze arrestations
ont été opérées ; d'autres sont imminentes.
Deux escadrons de cavalerie viennent
d'être envoyés à Thizy, à Cours et au pont
de Trambouze, région des tissages et des
filatures, en vue d'isoler les manifestants
qui s'y réuniront le 1er mai.
Le a XIXe Siècle » publiera demain la
a Chronique. par M. Francisque Sarcey.
MESURES D'ORDRE
Le 1er mai
Plusieurs batteries d'artillerie ont quitté
Versailles hier, se rendant à Paris à la
caserne de l'Ecole-Militaire.
Des troupes venant de Meaux, Fontaine-
bleau et Melun sont arrivées hier et ont
été cantonnées à Vincennes.
Les pompiers seront consignés dans leurs
casernes le 1er mai. Aucun service ne sera
fait aux théâtres.
Va-t-on arroser les manifestants ?
AU DAHOMEY
Interpellation
Dès la reprise de la session parlementaire,
le gouvernement sera appelé à faire un ex-
posé complet de la situation au Dahomey
et des mesures qu'il compte prendre.
Nous apprenons, en effet, que M. Boissy-
d'Anglas a fait part au ministre de la ma-
rine de son intention de l'interpeller pour
permettre au gouvernement de faire une
déclaration à cet égard.
Dépêche de l'agence Havas
L'agence Havas a publié hier soir la dé-
pêche suivante de Kotonou :
Les Dahoméens sont à neuf kilomètres de
Porto-Novo,occupés à couper les palmiers ;
la récolte serait ainsi détruite pour plu-
sieurs années. Si le fait se confirme, le com-
merce va subir un long temps d'arrêt à
Porto-Novo.
Le résident attend la réponse du roi de
Dahomey au sujet de l'échange des prison-
niers.
Le Sand a lancé quelques obus sur Why-
dah.
La Mésange a débarqué trente soldats
avec le lieutenant-colonel Klipfel ; l'esca-
dre a débarqué quatre-vingts marins.
CONVOCATION D'ÉLECTEURS
Les électeurs de la 9* circonscription de Nice
sont convoqués pour le 25 mai prochain, à
l'effet d'élire un député, par suite de la dé-
mission de M. Borriglione.
RÉVOLTE DE FEMMES
(D'UN CORRESPONDANT)
Nantes, 29 avril.
Une mutinerie a éclaté ce soir 4 la prison
des femmes.
Les prisonnières ont eassé les vitres et me-
nacé les gardiens, qui ont dû battre en re-
traite.
La gendarmerie est intervenue pour réta-
blir l'ordre.
Le procureur de la République et son sub-
stitut interrogent les couoables.
LA VIEDE PARIS
On a dit que, devant les folles menace;
des anarchistes, l'ouverture du Salon d6
peinture serait reculée d'un jour et n'au-
rait lieu que le 2 mai. Je ne veux pas, je
ne puis pas croire à cette faiblesse,qui irait
contre l'idée de la liberté. Au nom de la
liberté, qu'un certain nombre d'ouvriers
ne travaillent pas demain et se promè-
nent, rien de mieux, pourvu que la cir-
culation ne soit pas interrompue ; mais,
au nom de cette même liberté, il faut qu*
les Parisiens qui ont la manie (si vous
voulez) d'aller faire semblant de regardeJ
les tableaux le jour de l'ouverture et
d'aller se bousculer pour manger de la
sauce verte dans un cabaret voisin, puis*
sent satisfaire cette manie, d'ailleurs in-
nocente. Le gouvernement nous doit la
rue praticable, et tout me fait croire que
nous l'aurons. Donc, demain, rendev
vous aux Champs-Elysées. Et aujour-
d'hui, jour de vernissage. La contempla-
tion des toiles exposées au mètre coûtera,
le 1er mai, quelques sous ; la veille, dix
francs. Et à voir l'empressement de la
foule aux gui,->,HefcsJoia pourrait croire qu4
nous sommes le peuple le plus artiste d,
la terre. Ce qui est une profonde erreur.
Je ne me lasse pas de dire que le goût uni..
versel des bourgeois de Paris pour les oeut
vres d'art est un goût parfaitement fac*
tice et où la mode entre pour les trois
quarts. A l'appui de cette opinion, il suf
fit de constater ce qui s'est passé en ma*
tière d'œuvres d'art anciennes.
Ces jours-ci, on a enterré M. Spitzer,
considéré comme l'amateur le plus éclairé
et aussi comme le négociant le plus avisô
de Paris en curiosités, tableaux, sculp-
tures. Il laisse après lui une galerie et un
cabinet qu'on évalue à un nombre res-
pectable de millions. Or, qu'a fait M. Spifc*
zer ? Il a purement et simplement précédé
la mode. Il est resté dans la tradition des
dix ou quinze amateurs sincères et con-
naisseurs sérieux, qui ont toujours existé
à Paris et qui sont devenus les mille ou
quinze cents faux amateurs et pseudo-
connaisseurs grâce auxquels on paie tout
à prix dlor, à prix de diamant. Remar-
quez bien que je ne blâme pas cette ex-
pansion du goût du bibelot et de l'œuvre
d'art. Affectation pour affectation, celle-
ci est une jolie affectation, qui fait aller
le commerce. Et puis, on peut dire de ce
goût ce que certains disent du mariage s
mariez-vous d'abord, l'amour viendra
après, à l'user. De même, quand on achète
beaucoup, on finit par s'y connaître un
peu, et la vanité, qui pousse d'abord les
collectionneurs, peut finir par se trans-
muer en un amour presque vrai et désin-
téressé. Il faut seulement ne pas avoir,
trop d'illusions sur notre tempérament,
qui n'est pas très naturellement sensible'
aux choses de la plastique. Les collec-
tionneurs sont les premiers à le savoir,
eux qui n'ont jamais eu qu'un tour dans
leur sac pour faire de beaux coups : le
tour d'Aladin allant offrir d'échanger les
vieilles lampes contre des neuves.
C'est ainsi qu'avec une conscience qui
est, d'ailleurs, une conscience particulière
aux collectionneurs, Piot (je crois) par-
courait les églises en offrant aux fabri-
ciens des rideaux de lampas neufs et des -
chaises de pacotille en velours contre d
tapisseries au point de Flandre et des selJ
lerias de la Renaissance. Mais le métier
est perdu. La notion de la beauté des an-
tiquités n'a pas pénétré les masses, il est
vrai ; mais elles ont celle de la valeur, et
quand on veut acheter un vieux Marseille
à quelque paysan du Midi, il vous mon-
tre froidement que sa vieille assiette est à
« l'épée » et il vous en demande trois fois
la valeur. Il n'y a d'espoir pour le cousin
Pons que dans une révolution. Et l'a-
mateur est tel qu'il est bien capable de la
désirer, si elle met sur les quais des « oc-
casions » — eussent-elles une vague
odeur de recel.
Quant à la peinture contemporaine
dont on nous abreuve jusqu'à plus soif,
interrogez, après le vernissage, les aima-
bles personnes qui vont là montrer leurs
fraîches toilettes de printemps, dans un
Longchamps couvert, et interrogez les
beaux messieurs qui les y vont retroufJ
ver. S'ils sont de bonne foi, ils vous di-
ront que ces quatre mille tableaux les.
laissent très froids, que leur plusgrancfc
plaisir est de reconnaître, pour un peu
« casser du sucre M, les portraits des gens
qu'ils connaissent, qu'un joli trompe-lloeil
ou un sujet « spirituel » ou dramatique
les charme un moment, et que, pour la
reste, ils ont besoin d'être avertis, quand
c'est beau, par le nom du peintre inscrite
sur le cadre.
Ceux qui parlent ainsi sont, du reste
vraiment gentils. Il n'y a d'insupporté
ble, en toutes choses, que la fatuité, de-*
puis celle du compagnon Tortelier qui
veut refaire le monde à son idée, simple-
ment, jusqu'à celle de l'ignorant homma
du monde qui prononce sur tout en
dernier ressort. J'avoue que c'est une
joie ou un agacement, selon la façons
dont on a l'esprit tourné ce jour-là, d'en'
tendre les jugements que la foule incom
pétente porte sur les œuvres d'art. Ce,
qui, dans ces jugements, reste naïf est;
du reste, très respectable et, dans une
certaine mesure, demeure juste.
Le goût bourgeois, qui aime les po
traits photographiquement ressemblants
les paysages où l'on compte les feuilles,.
les natures mortes qu'on croirait vivan-
tes ou réelles, ce goût se peut défendre{
Ce qui est irritant, c'est la prétention an
faux art et l'emballement feint devant,
des productions qui ne peuvent être ju!
gées que par un œil très formé et pari
un esprit instruit par les comparaisons^
A mon gré, un concierge a raison contre
un faux amateur et une petite fille colhl
tre un rapi
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TRÈS PROCHAINEMENT
Le XIXe SIÈCLE
Publiera un grand roman-feuilleton
dû a la plume d'un de nos plus popu-
laires romanciers.
LE PREMIER MAI
Nous touchons à cette journée du
lor mai dont on parle depuis si long-
temps et pour laquelle les socialistes
se sont, bien des mois à l'avance, don-
né rendez-vous. Il s'agit, dans la pen-
sée des promoteurs de l'idée, de faire
une manifestation aussi imposante
que pacifique en faveur de la réduc-
tion uniforme de la journée de travail
à huit heures. Mais il paraît que le
caractère pacifique de cette manifes-
tation n'inspire pas à tout le monde
une bien grande confiance, car en Al-
lemagne et plus encore en Autriche,
une véritable panique s'est déclarée.
Les fonds publics ont subi de fortes
dépréciations, la population émigré
des villes industrielles et va attendre
dans des régions plus paisibles la
tournure que prendront les événe-
ments.
Il ne nous déplaît pas d'opposer à
cette agitation et à ces inquiétudes la
tranquillité parfaite dont nous jouis-
sons et la certitude où nous sommes
que la journée du 1er mai ne donnera
lieu, en France, à aucun incident de
quelque gravité. A Paris, on peut être
assuré que la population ouvrière res-
tera insensible aux excitations des
agitateurs, et que, même si aucune
mesure n'avait été prise, elle les au-
rait dédaignées, parce que, d'une
part, les chefs du parti possibîliste
s'étaient très énergiquement pronon-
cés contre la manifestation et que,
d'autre part, la question de la réduc-
tion de la journée de travail n'a pour
elle qu'un très médiocre intérêt. Seuls
les ouvriers de quelques centres in-
dustriels pourraient croire que la ma-
nifestation avancera leurs affaires.
Mais ils savent aussi que la Républi-
que doit porter son effort vers l'exa-
men et la solution des questions ou-
vrières et sociales, et ils comprendront
que le moment serait mal choisi pour
se livrer à des manifestations d'allu-
res au moins anormales quand ces
questions sont posées, et que, si les
opinions sont partagées quant à la
solution à adopter, nul du moins ne
se refuse à entreprendre un étude at-
tentive.
Nul symptôme ne peut faire crain-
dre que nous touchions à une crise.
Nulle part ne s'est produite aucune de
ces effervescences qui précèdent tou-
jours les grands mouvements. Tout
au contraire, les élections législatives
ont prouvé que, malgré tous les ef-
forts des agitateurs, malgré les pro-
messes de toute nature qu'on n'a mê-
me pas marchandées aux populations
ouvrières, l'îmmensemajorite du pays
croyait beaucoup plutôt au progrès
régulier, fondé sur le développement
des institutions républicaines, qu'au
triomphe des moyens violents et à la
fécondité des révolutions. Dira-t-on
que les élections législatives sont déjà
bien anciennes et que la situation s'est
modifiée depuis lors ? Que l'on consi-
dère alors les élections municipales
de dimanche dernier. Elles ne sont
assurément pas l'œuvre d'une popu-
lation animée de sentiments bien ré-
volutionnaires; elles ont, bien au
contraire, cette signification très pré-
cise que les Parisiens en ont assez
des perturbateurs, qu'ils ne veulent
plus entendre parler de ceux qui cher-
chent exploiter, dans un intérêt mal
défini, les passions populaires,et qu'ils
veulent travailler sans être détournés
de leur besogne.
Si quelque chose pouvait confirmer
encore les ouvriers dans cette pensée,
ce serait bien de voir à la tête du mou-
vement dans lequel on prétend les en-
traîner des hommes qui n'ont rien à
faire dans une agitation socialiste.
Lors des manifestations précédentes,
comme celle qui se termina, il y a
quelques années, par le pillage des
boulangeries de la rive gauche, on dé-
couvrit, après coup, parmi ces ci ou-
vriers sans travail ", des agents roya-
listes qui avaient été les plus ardents
à exciter et à entraîner les ouvriers,
•qui même en avaient embauché. Cette
fois, c'est à la veille de la « grande
manifestation du prolétariat" qu'on
découvre parmi les meneurs un mar-
quis subventionnant les journaux les
plus violents et des hommes qui sont
connus par leur dévouement à la cause
monarchique. Ce sont ces hommes
qui, à une époque où les anciennes
entraves à la liberté de l'imprimerie
ont été supprimées, établissent une
imprimerie clandestine pour publier
des appels à la violence et pour ex-
citer l'armée à la désertion et à la
trahison.
On aurait peine à soutenir que ces
hommes n'ont pas calculé les consé-
quences de leurs manœuvres, qu'ils
sont aigris par leurs souffrances et
qu'ils se laissent aveugler par la ran-
cune des prolétaires contre les heu-
reux de la terre. Ils ont, au contraire,
parfaitement prévu le parti qu'ils pou-
vaient tirer de leur propagande; ils
ont pensé que, n'ayant pas réussi à
mettre la main sur la République par
des moyens pacifiques, il fallait es-
sayer de la renverser par des moyens
violents, « en la précipitant, comme
dit la Lanterne, dans l'émeute et dans
le sang. »
Les ouvriers français, qui ont, avec
tant de bon sens, soutenu la Répu-
blique contre ses adversaires et qui
ont déjoué les manœuvres insidieuses
à l'aide desquelles on s'efforçait de les
entraîner vers un but qu'on leur ca-
chait, ne tomberont pas dans le nou-
veau piège qui est tendu à leur bonne
foi. Leur intérêt personnel est d'ac-
cord avec l'intérêt politique pour leur
conseiller de rester tranquilles et de ne
pas aider, par leur participation, à un
mouvement qui, commencé pacifique-
ment, ne saurait, tant il y a de gens
intéressés à en changer le caractère,
manquer de dégénérer bientôt en
émeute. Ils laisseront les agitateurs
s'agiter dans le vide, et ils montreront
une fois de plus la supériorité des ré-
gimes de liberté comme la République
sur les démocraties impériales ou sur
celles qui voudraient les prendre pour
modèles.
■WWWjMW——■——
ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
ET ÉLECTIONS MUNICIPALES
En six mois. — Simple comparaison. —
Les boulangistes battus dans les
arrondissements boulangistes.
Il est intéressant de comparer le nombre
des voix obtenues à Paris aux élections lé-
gislatives par les candidats boulangistes
élus députés, — avec le nombre des voix
que les candidats boulangistes aux élections
municipales ont obtenues dans les mêmes
arrondissements et les mêmes quartiers.
Nous comparons également le nombre
des voix données, il y a six mois, aux can-
didats républicains dans les arrondisse-
ments qui ont nommé des députés boulan-
gistes.
On pourra se rendre compte ainsi, et fa-
cilement, des changements profonds qui se
sont opérés en aussi peu de temps dans
les quartiers et les arrondissements que
les boulangistes considéraient depuis lors
comme complètement à eux.
Cinquième arrondissement. — Aux
élections législatives, les quartiers Saint-
Victor et de la Sorbonne donnent h,830
voix à M. Naquet, boulangiste, et .4,7h5 voix
à M. Bourneville, républicain.
Aux élections municipales, ces deux
quartiers donnent 3,.495 voix aux boulan-
gistes et 5,1475 voix aux républicains.
Septième arrondissement. — Aux élec-
tions législatives, cet arrondissement donne
5,001 voix à M. Mermeix, boulangiste, A,679
voix à M. Frébault, républicain, h,828 voix
à M. Denys Cochin, conservateur.
Aux élections municipales, il donne Xi,095
voix aux boulangistes, îi,855 aux conserva-
teurs, 3,980 aux républicains.
Treizième arrondissement. — Aux élec-
tions législatives,les quartiers de la Maison-
Blanche et la Gare donnent 5,806 voix à M.
Paulin-Méry, boulangiste, et 5,78h voix à
M. Basly, républicain.
Aux élections municipales, ils donnent
6,MO voix aux républicains et h,55A voix
boulangistes.
Quinzième arrondissement. Aux élec-
tions législatives, les quartiers de Grenelle
et Necker donnent 6,569 voix à M. Farcy,
boulangiste, et h,699 voix aux deux candi-
dats républicains.
Aux élections municipales, ils donnent
5,618 voix aux républicains et h,..lJJ. aux-
boulangistes.
2e circonscription. — Aux élections légis-
latives, les quartiers de Javel et Saint-
Lambert donnent ht209 voix à M. Laguerre
et 2,965 voix aux trois républicains. Aux
élections municipales,ils donnent Jj,Ji02voix
aux républicains et ,h99 voix aux boulan-
gistes.
Dix-septième arrondissement. — Aux
élections législatives, les quartiers des Ter-
nes et Plaine-Monceau donnent h,708 voix
à M. Le Senne, boulangiste, et A,001 voix à
M. de Hérédia, républicain. Aux élections
municipales, ils donnent aux républicains
3,90h voix, plus 1,931 voix à M. Lambert Ste-
Croix, nettement anti-boulangiste), et ,h99
voix aux boulangistes.
2e circonscription. — Aux élections légis-
latives, les quartiers des Batignolles et des
Epinettes donnent 8,653 voix à M. E. Roche,
boulangiste, et 7,758 voix à M. E. Lepelle-
tier, républicain.
Aux élections municipales, ils donnen t
9,110 voix aux républicains et 6,127 aux
boulangistes.
Dix-huitième arrondissement. — Aux
élections législatives, le quartier des Gran-
des-Carrières donne 3,610 voix à M. Lai-
sant, boulangiste, et 3,21A voix à M. Lafont,
républicain.
Aux élections municipales, il donne
3,762 voix aux républicains et 2,83h voix
aux boulangistes.
36 circonscription. — Aux élections légis-
latives, les quartiers de la Goutte-d'Or et
la Chapelle donnent 5,719 voix à M. Saint-
Martin, boulangiste, et 5,390 voix aux trois
candidats républicains.
Aux élections municipales, ils donnent
5,83h voix aux républicains et h,552 voix
aux boulangistes.
Dix-neuvième arrondissement. — Aux
élections législatives, les quartiers de la Vil-
lette et du Combat donnent 7,138 à M. Mar-
tineau, boulangiste, et 5,723 voix à M. Cha-
bert, républicain.
Aux élections municipales, ils donnent
6,531 voix aux républicains et A,998 voix
aux boulangistes.
2 circonscription. — Aux élections légis-
latives, les quartiers du Pont-de-Flaadre et
d'Amérique donnent %U5k voix à, M. Gran-
ger,boulangiste, et 2,272 voix à M. Cattiaux,
républicain.
Aux élections municipales, ils donnent
, voix aux républicains et 1,963 voix
aux boulangistes.
LES ARRESTATIONS
CONTINUENT
lA JOURNÉE DES PERQUISITIONS
M. de Morès. — Perquisitions à ses
domiciles. — Papiers, brochures et
journaux. — Chez les révolution-
naires. — En recherches.
Après une nuit passée au Dépôt, M. le
marquis de Morès, qui semble être le chef
d'une association aussi peu redoutable que
bizarre, a été conduit, à dix heures du
matin, dans le cabinet de M. Dhers, com-
missaire de police du quartier Saint-Ger-
main-l'Auxerrois.
— Je vais perquisitionner chez vous, lui
dit M. Dhers, à vos deux domiciles : rue
Sainte-Anne et rue Tilsitt. Vous assisterez,
d'ailleurs, à cette « formalité ».
M. de Morès eut un sourire des plus iro-
niques :
— Vous comprenez bien, monsieur, qu'é-
tant appelé à devenir un personnage qua-
lifié de "dangereux", j'ai pris quelques
précautions. Je ne garde rien de compro-
mettant. Pas aussi naïf !
Et M. de Morès, M. Dhers et son secrétaire,
avec quatre inspecteurs de la sûreté ont
pris place dans deux voitures qui les ont
déposés, peu d'instants après, devant la
porte du petit local loué par M. de Morès,
65, rue Sainte-Anne. Nous remarquons
les scellés apposés la veille par M. Dulac.
Il n'y a pas grand' chose dans l'apparte-
ment de M. de Morès : des numéros du
journal l'Attaqué, dont le gérant et le prin-
cipal rédacteur ont passé avant-hier en
cour d'assises, quelques papiers épars, des
brochures invitant les travailleurs à mani-
fester le 1er mai. Tout cela n'est pas très
important. M. Dhers enferme ces papiers
dans une valise qui appartient précisé-
ment à l'inculpé, ainsi que l'indiquent ces
mots à l'encre noire écrits sur un des
côtés : Marquis de Morès
Rue de Tilsitt
Les deux voitures filent ensuite, au mi-
lieu d'un petit groupe de curieux subite-
ment amassés sur le trottoir, dans la direc-
tion de la rue de Tilsitt, 5, où habitent M.
de Morès, son beau-père et sa femme.
Mme de Morès, une Américaine qui a déjà
assisté à trois arrestations de son mari en
Amérique, était fort peu émotionnée. Son
mari était, du reste, parfaitement calme.
— Voulez-vous accepter quelque rafraî-
chissement? questionna-t-il en s'adressant
à M. Dhers, qui refusa d'un signe.
Quelques papiers trouvés dans le cabinet
de travail de M. de Morès vont rejoindre
la valise. -
— Je vous demande la permission, dit Je
gentilhomme socialiste au commissaire de
police, de me changer de linge.
M. de Morès profite de l'autorisation pour
se faire la barbe et nous le voyons ressor-
tir de l'hôtel avec une chemise de flanelle
à rayures jaunes et brunes sur laquelle est
attaché un faux-col blanc, — un vêtement
complet noir, un par-dessus d'été clair sur
le bras, un chapeau de soie.
Le prisonnier est reconduit au Dépôt.
Interrogatoire de M. de Morès
M. de Morès a été interrogé dans l'après-
midi par M. Atthalin.
Après son interrogatoire, il a pu s'entre-
tenir avec sa femme qui lui a appris qu'elle
avait demandé à Me Paul Escudier de pré-
senter sa défense.
Le marquis de Morès proteste contre le
récit qui a été fait de son arrestation. Il ne
s'est pas enfui, dit-il, à l'approche des
agents chargés de l'arrêter. Il s'est contenté
de les suivre, en s'écriant : « Le gouverne-
ment a donc peur de moi, qu'il me fait ar-
rêter? »
M. Dulac s'occupe
Au même moment, tandis que M. Dhers
opérait chez M. de Morès, M. Dulac, com-
missaire aux délégations judiciaires, se
rendait au domicile de l'un des trois indi-
vidus arrêtés à l'imprimerie de la rue des
Trois-Bornes, le nommé Dumont, dit Ri-
cardo. M. Dulac a fait main basse sur un
paquet de brochures et de manifestes exci-
tant les soldats à la désobéissance et à la
révolte.
Veut-on un extrait de cette prose ?
Soldats I vous êtes des travailleurs comme
nous, vous êtes des frères en misère, et nous
voulons vous affranchir du joug sous lequel
vous marchez courbés comme des esclaves.
L'abolition de la société bourgeoise amènera
la suppression des armées ; quand l'ouvrier
sera émancipé, le soldat sera libre J
Les chefs qui vous commandent, comme les
patrons qui nous exploitent, sont des tyrans.
Frères! le 1ermai, nous nous rencontrerons
dans la rue; vos chefs bourgeois vous ordon-
neront peut-être de tirer sur nous. S'il vous
donnent cet ordre infâme, montrez que vous
n'êtes pas des brutes asservies : retournez
contre eux les canons de vos fusils, et en-
voyez-leur les balles qu'ils nous destinaient.
Si l'ouvrier et le soldat marchent la main
dans la main, pour eux le jour de la liberté
est proche.
La société de demain ne reconnaîtra plus
d'esclaves de la caserne, plus d'esclaves de
l'usine, plus d'exploités, plus de maîtres. Elle
ne reconnaîtra, d'un bout du monde à l'au-
tre, que des frères.
Soldats ! le 1" mai, deux ennemis se trouve-
ront en face : nous, les travailleurs, las de
souffrir et cherchant à améliorer notre sort,
et les exploiteurs enrichis de millions extor-
qués au peuple et voulant prolonger nos mi-
sères.
Si vous prenez parti pour nous, nous se-
rons les plus forts, et certainement nous au-
rons la victoire. Si vous préférez servir nos
tyrans communs, venez, égorgez-nous avec
nos femmes et nos enfants. Venez massacrer
les vieillards qui, espérant dans votre atti-
tude sympathique, exposeront à vos poi-
gnards leurs freles poitrines 1
Non 1 non 1 vous prendrez parti pour vos
frères, et le 1er mai 1890, solats et travailleurs
ensemble chanteront la « Marseillaise des
Prolétaires », saluant l'aube de l'émancipa-
tion humaine.
Des manifestes de ce genre avaient été
distribués dans les casernes de Paris, Saint-
Germain, Versailles, même au Palais de
Justice à des gardes républicains, qui se
sont empressés de les remettre à leurs
chefs.
M. Mouquin aussi
De son côté, M. Mouquin, commissaire
de police du faubourg Montmartre, « tra-
vaillait » et se rendait chez Molinari, sujet
italien, marchand de tableaux, rue de la
Grange-Batelière.
— Mon mari est absent, dit Mme Moli-
nari.
— Où est-il ?
— Il est parti, il y a dne semaine, pour
Amiens ; de là, il doit aller en Angleterre.
M. Mouquin constata que Molinari n'était
pas dans le Detit appartement cm'occuD8 le
ménager
Un arrêté d'expulsion avait été pris con-
tre ce révolutionnaire, il y a quelques
jours.
Confrontation à Versailles
Dans l'après-midi, M. Clément s'est rendu
à Versailles, accompagné d'agents de la Sû-
reté, qui ont emmené avec eux le nommé
Dumont pour être confronté avec les sol-
dats à qui il a distribué avec ses complices,
les nommés Xavier Martino et Troaria, des
brochures les excitant à tirer des coups de
fusil sur leurs officiers au cours de la ma-
nifes ation du 1er mai.
Dumont a été reconnu par plusieurs sol-
dats pour leur avoir remis des placards
anarchistes. Le magistrat s'est livré à des
investigations qui l'ont mis sur la piste de
plusieurs autres individus faisant partie
du comité de propagande dont Dumont
était le chef.
Revenu à Paris à huit heures, M. Clément
s'est immédiatement rendu, muni d'un
mandat de M. Atthalin, 1A, rue Bertholet,
au domicile d'un jeune étudiant rou-
main du nom de Stoïanoff, âgé de vingt
et un ans. Cet individu est inculpé, comme
ses complices, d'excitation à la violence. Il
a été écroué à dix heures au Dépôt.
Dans la soirée, le préfet de police s'est
concerté avec MM. Atthalin, juge d'instruc-
tion, Goron, chef de la sûreté, et Clément,
commissaire aux délégations judiciaires.
Il est probable que d'autres arrestations se-
ront opérées aujourd'hui.
La citoyenne Louise Michel
Depuis plusieurs mois, la citoyenne
Louise Michel a coutume de faire chaque
semaine une conférence à la salle des Ca-
pucines.
Hier, elle devait parler sur un sujet plein
d'actualité : la manifestation du 1er mai.
Un grand nombre de personnes s'étaient
rendues à la salle des Capucines pour en-
tendre la révolutionnaire, mais la confé-
rence n'a pas eu lieu.
Mlle Louise Michel se trouve à Lyon, où,
paraît-il, elle aurait été mise en état d'ar-
restation.
Le total
Donc, actuellement, il y a quatorze arrê-
tés : Gegout, Malato et Bebin, dont les ar-
restations se rattachent au procès de l'At-
taque, et de Morès, Mordacq, Cabot, Cuisse,
Prévost, Prodi, Martinet, Dumont dit Ri-
cardo, Merleno, Trovaria et Stoïanoff.
Ces derniers sont poursuivis pour provo-
cation adressée à des militaires et pour
provocation à des attroupements.
MM. de Morès et Mordacq sont prévenus
d'avoir coopéré à ces crimes ou délits en
fournissant les sommes nécessaires pour
l'impression des appels révolutionnaires.
M. Cuisse est compris dans les poursuites
comme rédacteur de plusieurs manifestes,
Prevost comme distributeur.
Enfin, les étrangers Malaio, Prodi, Mer-
leno, Trovaria sont sous le coup de man-
dats d'expulsion.
Ajoutons que la police recherche les anar-
chistes Laurens, Villaret et Thévenin.
On annonce, en dernière heure, qu'un
anarchiste, du nom de Vinchon,a été arrêté
hier soir à la gare de Lyon, au moment où
il se disposait à prendre le train.
Le bruit court également de l'arrestation
de M. Amilcare Cipriani.
Les députés socialistes et les arresta-
tions
Nous avons annoncé, dans notre dernier
numéro, l'arrestation de Prévost, secrétaire
du syndicat des coiffeurs et membre de la
commission d'organisation de la journée
du 1er mai.
Dès ce matin, MM. Ferroul et Baudin, dé-
putés socialistes et organisateurs de la ma-
nifestation ouvrière, se sont rendus à la
préfecture de police pour demander des
renseignements à M. Lozé sur cette arres-
tation et sur les autres en même temps.
— Aucun texte de loi, dit M. Ferroul au
préfet, n'interdit, que je sache, de faire
des manifestations pacifiques. Nous vous
demandons, en conséquence, pourquoi de
semblables mesures ont été prises.
— Prévost, a répondu M. Lozé, est l'un
des distributeurs de ces écrits séditieux, de
ces appels, manifestes et brochures, exci-
tant les soldats au mépris de leurs chefs, à
la désobéissance, à la révolte. Il y a une loi
qui punit cela.
Puis, parlant du 1er mai, le préfet a
ajouté :
— Quelque pacifique que soit la mani-
festation, il y a encore une loi de l8h8 qui
interdit les attroupements. Cette loi sera
exécutée.
— Alors, nous autres députés, si.?
— Vous autres, députés, vous pourrez
vous rendre librement au Palais-Bourbon;
mais il ne vous sera pas permis de vous
faire escorter par une délégation quelcon-
que, ce qui donnerait lieu à un attroupe-
ment, et alors. MM. Baudin et Ferroul se
sont retirés. Nous rencontrons à la sortie
les deux députés.
— Vous allez voir le ministre de l'inté-
rieur? demandons-nous.
— Un député socialiste, réplique M. Fer-
roul, très digne, ne peut discuter avec un
ministre. Il n'y a rien de commun entre
nous et lui !
La loi
Voici le texte des articles de la loi de
18A8 et de la loi de 1881 dont nous parlons
plus haut :
Loi de 1848
Art. 6. — Toute provocation directe à un at-
troupement armé ou non armé, par des dis-
cours proférés publiquement et par des écrits
ou des imprimés, affichés ou distribués, sera
punie comme le crime et le délit, selon les
distinctions ci-dessus établies.
Les imprimeurs, graveurs, lithographes, affi-
cheurs et distributeurs seront punis comme
complices lorsqu'ils auront agi sciemment.
Si la provocation faite par les moyens ci-des-
sus n'a pas été suivie d'effet, elle sera punie,
s'il s'agit d'une provocation à un attroupe-
ment nocturne et armé, d'un emprisonne-
ment de six mois à un an ; s'il s'agit d'un at-
troupement non armé, l'emprisonnement sera
de un mois à trois mois.
Art. 7. — Les poursuites dirigées pour crime
ou délit d'attroupement ne font aucun obsta-
cle à la poursuite pour crimes et délits parti-
e uliers qui auraient été commis au milieu des
attroupements.
Loi de 1881
Art. 33. — Seront punis comme complices
d'une action qualifiée crime ou délit ceux qui,
soit par des discours, cris ou menaces prcïé*
rés dans des lieux ou réunions publics, soit
par des é!.'is, des imprimée Vendus ou distri-
i bués, mis en vente ou exposés dans des lieux
ou réunions publics, soit par des placards ou
affiches, exposés aux regards du public, au-
ront directement provoqué l'auteur ou les
auteurs à commettre ladite action, si la pro-
vocation a été suivie d'effet.
Cette disposition sera également applicable
lorsque la provocation n'aura été suivie que
d'une tentative de crime prévue par l'article 2
du code pénal.
Art.. — Ceux qui par les moyens énoncés
en l'article précédent auront directement pro-
voqué à commettre les crimes de meurtre, de
pillage et d'incendie, ou l'un des crimes con-
tre la sûreté de l'Etat prévus par les articles
75 et suivants jusques et y compris l'article
101 du Code pénal, seront punis, dans le cas
où cette provocation n'aurait pas été suivie
d'effet, de trois mois à deux ans d'emprisonne-
ment et de 100 francs à 3,000 francs d'amende.
Tous cris ou chants séditieux proférés dans
des lieux ou réunions publiques seront punis
d'un emprisonnement de six jours à un mois
et d'une amende de 16 francs à 500 francs, ou
de l'une de ces deux peines seulement.
Art. 25. — Toute provocation par l'un des
moyens énoncés en l'article 23, adressée à des
militaires des armées de terre ou de mer,
dans le but de les détourner de leurs devoirs
militaires et de l'obéissance qu'ils doivent à
leurs chefs dans tout ce qu'ils leur comman-
dent pour l'exécution des lois et règlements
militaires, sera punie d'un emprisonnement
d'un à six mois et d'une amende de 16 francs
à 100 francs.
Les anarchistes de Lyon
(D'UN CORRESPONDANT)
Lyon, 99 avril.
Les indications recueillies par le service
de la sûreté faisaient présumer que les an-
archistes de Lyon préparaient pour les ap-
proches du 1er mai des attentats, et déte-
naient dans ce but des matières explosi-
bles.
Sur ces données, dans la nuit du 96 au
27 avril, des perquisitions furent faites si-
multanément chez plusieurs d'entre eux et
furent suivies des arrestations des nommés
Trimollet, Gruffat, Cuzin, veuve Petel, Puil-
let, Griffon, Says, sujet suisse, femme Says,
Krayenbuhl se prétendant sujet suisse, mais
dont le vrai nom est Mayeux et qui est un
déserteur français. Tous se laissèrent arrê-
ter sans résistance.
Le 27 avril, à onze heures et demie du
soir, trois autres anarchistes, parmi les-
quels le nommé Cadeaux, furent arrêtés
rue Molière, au moment où ils sortaient
d'un débit de boissons ; un quatrième par-
vint à s'échaDDer.
Le sieur Câdeaux s'était grièvement brûlé
à la face en manipulant les matières desti-
nées à préparer les explosifs. Mis en éveil
par les arrestations de la nuit précédente,
il fit disparaître la plus grande partie de
ces matières ; mais une perquisition opérée
chez lui dans la journée du 23 amena ce-
pendant la découverte de plusieurs pa-
quets ou bouteilles contenant des produits
chimiques répondant à cette destination.
Le service de la sûreté put arrêter un
quatrième anarchiste qui s'était échappé la
veille et fit chez lui une perquisition qui
amena la découverte de matières analogues
aux premières, enveloppées dans une
blouse. Arrêté vers huit heures du soir,
cet anarchiste, nomme Regater, avoua que
Cadeaux lui avait, la veille, remis ce pa-
quet pour le cacher chez lui.
Enfin, aujourd'hui, deux nouvelles arres-
tations d'anarchistes dangereux, celles
des nommés Poyet et Condom, ont été
opérées.
Tous ces individus ont été mis à la dis-
position du procureur de la République,
auquel ont été transmis les produits saisis,
qui feront l'objet d'une analyse.
A l'heure actuelle, quinze arrestations
ont été opérées ; d'autres sont imminentes.
Deux escadrons de cavalerie viennent
d'être envoyés à Thizy, à Cours et au pont
de Trambouze, région des tissages et des
filatures, en vue d'isoler les manifestants
qui s'y réuniront le 1er mai.
Le a XIXe Siècle » publiera demain la
a Chronique. par M. Francisque Sarcey.
MESURES D'ORDRE
Le 1er mai
Plusieurs batteries d'artillerie ont quitté
Versailles hier, se rendant à Paris à la
caserne de l'Ecole-Militaire.
Des troupes venant de Meaux, Fontaine-
bleau et Melun sont arrivées hier et ont
été cantonnées à Vincennes.
Les pompiers seront consignés dans leurs
casernes le 1er mai. Aucun service ne sera
fait aux théâtres.
Va-t-on arroser les manifestants ?
AU DAHOMEY
Interpellation
Dès la reprise de la session parlementaire,
le gouvernement sera appelé à faire un ex-
posé complet de la situation au Dahomey
et des mesures qu'il compte prendre.
Nous apprenons, en effet, que M. Boissy-
d'Anglas a fait part au ministre de la ma-
rine de son intention de l'interpeller pour
permettre au gouvernement de faire une
déclaration à cet égard.
Dépêche de l'agence Havas
L'agence Havas a publié hier soir la dé-
pêche suivante de Kotonou :
Les Dahoméens sont à neuf kilomètres de
Porto-Novo,occupés à couper les palmiers ;
la récolte serait ainsi détruite pour plu-
sieurs années. Si le fait se confirme, le com-
merce va subir un long temps d'arrêt à
Porto-Novo.
Le résident attend la réponse du roi de
Dahomey au sujet de l'échange des prison-
niers.
Le Sand a lancé quelques obus sur Why-
dah.
La Mésange a débarqué trente soldats
avec le lieutenant-colonel Klipfel ; l'esca-
dre a débarqué quatre-vingts marins.
CONVOCATION D'ÉLECTEURS
Les électeurs de la 9* circonscription de Nice
sont convoqués pour le 25 mai prochain, à
l'effet d'élire un député, par suite de la dé-
mission de M. Borriglione.
RÉVOLTE DE FEMMES
(D'UN CORRESPONDANT)
Nantes, 29 avril.
Une mutinerie a éclaté ce soir 4 la prison
des femmes.
Les prisonnières ont eassé les vitres et me-
nacé les gardiens, qui ont dû battre en re-
traite.
La gendarmerie est intervenue pour réta-
blir l'ordre.
Le procureur de la République et son sub-
stitut interrogent les couoables.
LA VIEDE PARIS
On a dit que, devant les folles menace;
des anarchistes, l'ouverture du Salon d6
peinture serait reculée d'un jour et n'au-
rait lieu que le 2 mai. Je ne veux pas, je
ne puis pas croire à cette faiblesse,qui irait
contre l'idée de la liberté. Au nom de la
liberté, qu'un certain nombre d'ouvriers
ne travaillent pas demain et se promè-
nent, rien de mieux, pourvu que la cir-
culation ne soit pas interrompue ; mais,
au nom de cette même liberté, il faut qu*
les Parisiens qui ont la manie (si vous
voulez) d'aller faire semblant de regardeJ
les tableaux le jour de l'ouverture et
d'aller se bousculer pour manger de la
sauce verte dans un cabaret voisin, puis*
sent satisfaire cette manie, d'ailleurs in-
nocente. Le gouvernement nous doit la
rue praticable, et tout me fait croire que
nous l'aurons. Donc, demain, rendev
vous aux Champs-Elysées. Et aujour-
d'hui, jour de vernissage. La contempla-
tion des toiles exposées au mètre coûtera,
le 1er mai, quelques sous ; la veille, dix
francs. Et à voir l'empressement de la
foule aux gui,->,HefcsJoia pourrait croire qu4
nous sommes le peuple le plus artiste d,
la terre. Ce qui est une profonde erreur.
Je ne me lasse pas de dire que le goût uni..
versel des bourgeois de Paris pour les oeut
vres d'art est un goût parfaitement fac*
tice et où la mode entre pour les trois
quarts. A l'appui de cette opinion, il suf
fit de constater ce qui s'est passé en ma*
tière d'œuvres d'art anciennes.
Ces jours-ci, on a enterré M. Spitzer,
considéré comme l'amateur le plus éclairé
et aussi comme le négociant le plus avisô
de Paris en curiosités, tableaux, sculp-
tures. Il laisse après lui une galerie et un
cabinet qu'on évalue à un nombre res-
pectable de millions. Or, qu'a fait M. Spifc*
zer ? Il a purement et simplement précédé
la mode. Il est resté dans la tradition des
dix ou quinze amateurs sincères et con-
naisseurs sérieux, qui ont toujours existé
à Paris et qui sont devenus les mille ou
quinze cents faux amateurs et pseudo-
connaisseurs grâce auxquels on paie tout
à prix dlor, à prix de diamant. Remar-
quez bien que je ne blâme pas cette ex-
pansion du goût du bibelot et de l'œuvre
d'art. Affectation pour affectation, celle-
ci est une jolie affectation, qui fait aller
le commerce. Et puis, on peut dire de ce
goût ce que certains disent du mariage s
mariez-vous d'abord, l'amour viendra
après, à l'user. De même, quand on achète
beaucoup, on finit par s'y connaître un
peu, et la vanité, qui pousse d'abord les
collectionneurs, peut finir par se trans-
muer en un amour presque vrai et désin-
téressé. Il faut seulement ne pas avoir,
trop d'illusions sur notre tempérament,
qui n'est pas très naturellement sensible'
aux choses de la plastique. Les collec-
tionneurs sont les premiers à le savoir,
eux qui n'ont jamais eu qu'un tour dans
leur sac pour faire de beaux coups : le
tour d'Aladin allant offrir d'échanger les
vieilles lampes contre des neuves.
C'est ainsi qu'avec une conscience qui
est, d'ailleurs, une conscience particulière
aux collectionneurs, Piot (je crois) par-
courait les églises en offrant aux fabri-
ciens des rideaux de lampas neufs et des -
chaises de pacotille en velours contre d
tapisseries au point de Flandre et des selJ
lerias de la Renaissance. Mais le métier
est perdu. La notion de la beauté des an-
tiquités n'a pas pénétré les masses, il est
vrai ; mais elles ont celle de la valeur, et
quand on veut acheter un vieux Marseille
à quelque paysan du Midi, il vous mon-
tre froidement que sa vieille assiette est à
« l'épée » et il vous en demande trois fois
la valeur. Il n'y a d'espoir pour le cousin
Pons que dans une révolution. Et l'a-
mateur est tel qu'il est bien capable de la
désirer, si elle met sur les quais des « oc-
casions » — eussent-elles une vague
odeur de recel.
Quant à la peinture contemporaine
dont on nous abreuve jusqu'à plus soif,
interrogez, après le vernissage, les aima-
bles personnes qui vont là montrer leurs
fraîches toilettes de printemps, dans un
Longchamps couvert, et interrogez les
beaux messieurs qui les y vont retroufJ
ver. S'ils sont de bonne foi, ils vous di-
ront que ces quatre mille tableaux les.
laissent très froids, que leur plusgrancfc
plaisir est de reconnaître, pour un peu
« casser du sucre M, les portraits des gens
qu'ils connaissent, qu'un joli trompe-lloeil
ou un sujet « spirituel » ou dramatique
les charme un moment, et que, pour la
reste, ils ont besoin d'être avertis, quand
c'est beau, par le nom du peintre inscrite
sur le cadre.
Ceux qui parlent ainsi sont, du reste
vraiment gentils. Il n'y a d'insupporté
ble, en toutes choses, que la fatuité, de-*
puis celle du compagnon Tortelier qui
veut refaire le monde à son idée, simple-
ment, jusqu'à celle de l'ignorant homma
du monde qui prononce sur tout en
dernier ressort. J'avoue que c'est une
joie ou un agacement, selon la façons
dont on a l'esprit tourné ce jour-là, d'en'
tendre les jugements que la foule incom
pétente porte sur les œuvres d'art. Ce,
qui, dans ces jugements, reste naïf est;
du reste, très respectable et, dans une
certaine mesure, demeure juste.
Le goût bourgeois, qui aime les po
traits photographiquement ressemblants
les paysages où l'on compte les feuilles,.
les natures mortes qu'on croirait vivan-
tes ou réelles, ce goût se peut défendre{
Ce qui est irritant, c'est la prétention an
faux art et l'emballement feint devant,
des productions qui ne peuvent être ju!
gées que par un œil très formé et pari
un esprit instruit par les comparaisons^
A mon gré, un concierge a raison contre
un faux amateur et une petite fille colhl
tre un rapi
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