Dix-neuvième an-née. - N" 6,602 - C„ INQ Centimes - Paris et Départernents- CIIÇQ Centimes MARDI 11 FEVRIER 1890
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DISCOURS DE MM. TIRARD ET CONSTANS
AU MANS
LA JOURNÉE DU DUC D'ORLÉANS
i —
M. GO BLET A SCEAUX
* : <
L'AFFAIRE LAMBERT
FIN DE L'ENQUÊTE GOUFFÉ A LYON
NOS CONSU LS
Que de fois le reproche n'a-t-il pas
été adressé aux Français de ne pas
sortir de chez eux! Critique trop exacte,
qui trouve son application dans tous
les ordres de notre activité. Nos jour-
nalistes, nos politiques sont,- je parle
de la majorité, — d'une ignorance
extraordinaire sur les hommes et les
choses de la politique extérieure. A
maintes reprises, nous avons entendu
nos amis étrangers se plaindre de l'in-
différence du monde politique fran-
çais pour ce qui se passait hors de
nos frontières. Il en va de même de
nos négociants.
* On ne rencontre point sur les gran-
des routes du monde, en paquebot, en
railway, de jeunes Français qui s'en
aillent, comme leurs camarades d'ou-
tre-Manche, compléter leur instruction
générale par un lointain voyage hors
de leur pays : nous sommes casaniers
d'instinct et d'éducation.
Nos négociants, si considérable que
soit leur situation commerciale, n'ont
pas l'habitude de se déplacer, d'aller
au dehors poursuivre la clientèle et
s'informer, par la même occasion, des
procédés et des progrès de leurs con-
currents étrangers.
Sans doute les Expositions univer-
selles sont une source de renseigne-
ments qui a l'avantage, précieux pour
notre paresse, de sourdre à nos
pieds ; mais elle ne jaillit qu'à des in-
tervalles trop éloignés, - pour qu'on
puisse s'en contenter. -
Or, à notre époque, un négociant a
pour clients les habitants du monde.
La facilité des transports, leur rapi-
dité, la multiplicité des chemins de
fer, les applications merveilleuses de
l'électricité ont supprimé les distances.
D'autre part, le nombre toujours crois-
sant des concurrents oblige le produc-
teur à vendre à bas prix et, par suite,
à compenser la médiocrité du bénéfice
par l'importance de la clientèle.
C'est donc une nécessité de vie ou
de mort pour notre commerce que
d'étendre au dehors ses opérations. Il
commence à s'en rendre compte. Mais
il ne suffit pas qu'il le reconnaisse.
Pour que les efforts qu'il tente dans ce
sens soient fructueux, l'aide du gou-
vernement lui est nécessaire. Il im-
porte qu'il trouve dans nos agents
consulaires des auxiliaires actifs et
dévoués.
Ont-ils compris le rôle qui leur in-
combe, et comment le remplissent-ils?
C'est à cette double question qu'a ré-
pondu M. Gaston Cadoux, dans une
intéressante brochure que notre ami
de Lanessan a fait précéder d'une
lettre d'introduction.
Le député de la Seine y note avec
beaucoup de netteté la transformation
qui s'est opérée, par la force des cho-
ses, dans les fonctions consulaires.
Autrefois, la fonction essentielle de
ces agents était de renseigner nos
ambassadeurs sur ce qui se passait au
siège de leur résidence et d'y assurer
la protection de nos nationaux.
Aujourd'hui, avec la rapidité des
communications et l'adoucissement
des mœurs, ces attributions sont de-
venues, ou peu s'en faut, une siné-
cure. Les services très réels que ces
agents sont appelés à fournir, c'est en
qualité d'auxiliaires de notre com-
merce qu'ils peuvent les rendre.
Mais beaucoup n'acceptent pas sans
résistance ce changement de rôle.
D'agents politiques et administra-
tifs passer à l'état d'agents com-
merciaux : pour un peu, ils crieraient
à la déchéance. D'autant que, par un
phénomène assez commun, si la plu-
part se sentent peu de goût pour ces
fonctions nouvelles, c'est qu'ils n'y ont
aucune aptitude. La première condi-
tion pour renseigner nos commerçants
sur les progrès de leurs rivaux d'une
nation étrangère, c'est au moins de
parler la langue des deux peuples. Or,
j'ai rencontré, nous dit M. de Lanes-
san, des agents consulaires qui ne sa-
vaient pas le premier mot de la lan-
gue du pays qu'ils habitaient. Par
contre, M. Cadoux nous raconte l'his-
toire d'un Parisien qui, de passage
dans une grande ville d'Angleterre,
dut à trois reprises aller au consulat
de France sans parvenir à s'y faire
comprendre. Personne n'y savait un
mot de français. -.
Cet incident invraisemblable s'ex-
plique par la fâcheuse habitude que
nous avons de choisir à l'étranger
pour nos représentants des indigènes
qui ne remplissent pas les conditions
les plus élémentaires à réclamer de ces
fonctionnaires.
Au reste, même quand nos agents
parlent français, nous ne sommes sou-
vent pas mieux servis. M. Gaston Ca-
doux cite à ce propos quelques curieux
exemples de l'amabilité de nos repré-
sentants à l'égard des conseillers mu-
nicipaux de Paris en mission à l'étran-
ger. Ceux-ci, en entrant dans les léga-
tions de Londres et de Bruxelles, pu-
rent se figurer, au rogue accueil qui
leur fut fait, qu'ils étaient encore à
Paris, dans le bureau de quelque ad-
ministration publique.
Il importe qu'une telle situation
change. Des rapports périodiques sont
bien fournis, dès maintenant, par nos
agents sur la situation commerciale à
l'étranger. Ils sont pieusement re-
cueillis dans des annales officielles qui
les publient. quand tout le monde
connaît déjà les renseignements qu'ils
contiennent.
Je ne veux pas examiner ici par le
menu le projet de réorganisation que
présente M. Cadoux, l'idée qu'il pré-
conise de créer des attachés commer-
ciaux, le projet d'installer dans cha-
cune de nos ambassades un bureau
ouvert aux négociants français, qui
centraliserait, à leur intention, tous
les renseignements techniques et orga-
niserait, de temps à autre, des expo-
sitions annuelles d'œuvres d'art fran-
çaises.
Le certain, c'est qu'il faut transfor-
mer du tout au tout l'esprit qui anime
nos agents consulaires. C'est par l'in-
fluence de ses consuls que, depuis
1875, l'Allemagne a pu réussir à subs-
tituer au Japon son influence à la
nôtre. Un tel fait porte avec lui un
enseignement qui ne doit pas être
perdu.
A. Millerand.
JUGÉ PAR LES SIENS
Le Journal du Loiret, organe des princes
d'Orléans, parle de la sincérité, de la pro-
bité politique de M. Loreau. « Son hon-
neur politique, dit-il, est inattaquable, ce
point est au-dessus de toute discussion. »
Mais le Soleil, organe non moins autorisé
des princes d'Orléans, le Soleil, qui a pour
directeur notre éminent confrère M.Edouard
Hervé, a de la « sincérité » et de la « pro-
bité politique » de M. Loreau une tout
autre idée.
Voici en quels termes sanglants il s'ex-
primait à propos de l'invalidation de M. Lo-
reau :
Il est juste d'indiquer que l'intéressé (M. Lo-
reau) manquait un peu, pour ne pas dire beau-
coup, de netteté dans son attitude politique. Sa
candidature a paru fort ondoyante. Au pre-
mier tour, il criait : « Vive le roi ! » Au second
tour, il ue criait rien du tout; il déclare au-
jourd'hui qu'il ne veut pas renverser la Répu-
blique.
Ces « habiletés » (!) ne le sauvent pas. Par
253 voix contre 219, l'élection de Gien est an-
nulée.
Il est scandaleux que les décisions du suf-
frage universel soient cassées ; mais il est très
moral qu'un député ne réussisse pas à racheter
son mandat au prix de certaines palinodies.
Aux yeux du Soleil, dont l'autorité dans
la presse conservatrice vaut bien celle du
Journal du Loiret, l'honneur politique de
M. Loreau est donc au moins fort discu-
table.
C'est aussi l'opinion de la Gazette de
France, journal conservateur non moins
autorisé, qui reproche à M. Loreau de n'être
NI FRANC DANS SES ALLURES, NI CONSTANT
DANS SES OPINIONS.
DROLES DE MODÉRÉS
Le même Journal du Loiret prétend que
r M. Loreau a pour lui les hommes modérés
de tous les partis.
Par qui donc a-t-il été soutenu à la Cham-
bre ? Par les Paul de Cassagnac, les Laguer-
re, les Francis Laur, c'est-à-dire par les
hommes les plus intempérants et les plus
violents de la Droite et du boulangisme.
Par qui a-t-il été défendu dans la
presse ? Par Y Autorité de M. Paul de Cassa-
gnac, le Petit Caporal du commandant
Blanc, la Presse de M. Georges Laguerre,
VIntransigeant de M. Rochefort, et tutti
quanti.
En somme, M. Loreau n'a été soutenu,
dans ce grand procès de l'invalidation, que
par les énergumènes. Il n'a même pas eu
pour lui les journaux conservateurs modé-
rés, comme le Soleil.
CRIME DE LA JALOUSIE
Amant jaloux. — Coup de revolver. —
Une morte et un blessé.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Genève, 9 février.
Un crime passionnel vient de causer une
profonde sensation dans notre ville. Le
fils du major Burkel, membre de la cham-
bre de commerce, grand fabricant de pro-
duits chimiques, jouissant de l'estime gé-
nérale, sortait du théâtre, hier soir, vers
minuit. Il rencontra sa maîtresse, la fille
Simonetti, causant avec un jeune homme,
sous la porte d'une allée, rue du Conseil-
Fédéral.
Dès qu'il l'aperçut, il lui tira un coup de
revolver qui l'a tuée raide.
L'assassin, qui est âgé de vingt-trois ans,
a tenté de se suicider, mais il ne s'est fait
qu'une grave blessure.
ENTRE BLANCS ET NOIRS
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
--- New-York, 9 juillet.
Hier, dans lAlabama a eu lieu un véritable
combat entre blap'\js et noirs, employés à la
construction du chemin de fer.
Deux blap.t's ont été tués et trois blessés par
les P..ia'ès, qui étaient les plus nombreux, mais
ies blancs étant revenus en force, les noirs se
sont réfugiés dans les boig,
LES MINISTRES AU MANS
INAUGURATION DE LA BOURSE
DU COMMERCE
Un remarquable édifice. — Une ville
en fête. — L'arrivée de MM. Tirard
et Constans. — L'inauguration.
La Bourse du commerce du Mans, qui
vient d'être inaugurée par le président du
conseil et le ministre de l'intérieur, est un
des édifices les plus remarquables qui aient
été élevés en province depuis quelques an-
nées; Située en face du beau monument de
Chanzy, par Crauck et Choisy, qui se dresse
au centre de la vaste place des Halles, la
Bourse, de noble ordonnance, produit un
grand effet, vue du pont de la Sarthe, offrant
une longue perspective par la rue de Gam-
betta. -
Le rez-de-chaussée, en pierre du Poitou,
repose sur un soubassement de granit bleu.
Sur la place, le pavillon central est sur-
monté d'un beau fronton, de M. Filleul,
statuaire. Il représente le Commerce, en-
touré de l'Industrie et de l'Agriculture.
Sur le boulevard, le corps central est orné
de colonnes ioniennes engagées, suppor-
tant l'entablement qui règne" entre le pre-
mier et le second étage. Il a une originalité
qui fait honneur à l'architecte, M. Théodore
Lafon.
A l'intérieur
L'intérieur du palais est remarquable : le
grand hall, dont le plafond, formé de pou-
tres de fer peintes en bronze et relevées
par des écussons portant le nom de toutes
les villes du département, est des plus heu-
reux. Des colonnes en pierre de Comblan-
chien, alternant avec des piliers en pierre
de Chàvrigny, donnent au hall un carac-
tère de grandeur. Cette salle occupe 600
mètres carrés de surface : elle a A3 mètres de
longueur et 13 mètres 50 de largeur. De
hautes fenêtres y répandent la lumière à
flots.
Le grand escalier à double évolution
s'ouvre fort heureusement au centre de ce
beau hall. Au premier étage, il aboutit à
une salle des pas perdus, d'un goût sobre,
prenant jour sur le boulevard par trois fe-
nêtres à balcon, et pavée en mosaïque dont
le motif principal représente les armes de
1:1. VillfL
A gauche, s'ouvre la salle d'audience du
tribunal de commerce. C'est le morceau
principal du monument. Le plafond est une
merveille. Les caissons sont peints en vieil
or et les reliefs accusés par des dorures
plus vives. Le fond du caisson est d'un bleu
pâle, sur lequel se détachent des ornements
d'un bleu plus foncé. Des boiseries en chêne
courent à mi-hauteur, séparées par une
large moulure dorée, des tentures repro-
duisant en plus foncé les nuances des cais-
sons. Quand le temps aura éteint les teintes
d'or, cette décoration sera fort belle.
La chajnbre de commerce
La chambre de commerce occupe l'autre
partie du monument. La bibliothèque, fort
simplement décorée, sera installée en face
du tribunal. La grande salle des fêtes, qui
est contiguë, donne sur la place de la Ré-
publique. Le plafond, dans les teintes or,
saumon et vert céladon, est exquis. La cor-
niche offre une série d'écussons et attri-
buts consacrés aux industries du départe-
ment. L'auteur de cette décoration est M.
Le Feuvre. Cette salle, qui doit être divisée
en deux parties, renferme deux belles che-
minées : l'une en pierre du Poitou est l'œu-
vre de M. Lafon; l'autre est une cheminée
en fer estampé et en fonte malléable, fort
admirée à l'Eposition de 1889, où elle a ob-
tenu une médaille d'or.
Les bureaux de la chambre de commerce
et du tribunal sont placés aux côtés de l'es-
calier.
Le second étage renferme la salle du con-
seil des prud'hommes et les bureaux de ce
tribunal, ainsi qu'un hall où doit être ins-
tallé un musée industriel.
Le monument a coûté environ520,000 fr.,
provenant d'un emprunt de la chambre de
commerce et de subventions de la ville et
du département.
Le monument disparaît aujourd'hui sous
les drapeaux, les tentures et les fleurs.
Toutes les grandes voies et les édifices pu-
blics sont ornés de drapeaux et d'oriflam-
mes. C'est la chambre de commerce qui a
pris à sa charge tous les frais occasionnés
par la fête offerte à ses hôtes. Il faut avouer
qu'elle a fort bien fait les choses.
Arrivée au Mans
Les ministres sont arrivés à onze heures
et demie. Ils ont été reçus sur le quai de la
gare par M. Lutaud, préfet de la Sarthe, qui
leur a présenté les autorités, parmi les-
quelles le général LaveuVe, M. Rivaud, pré-
fet de la Loire-Inférieure, M. Lemallier,
préfet d'Indre-et-Loire, M. Legludic, dé-
puté.
M. Rubillard, sénateur, a souhaité la bien-
venue aux représentants du gouvernement,
ainsi que M. Hédin, vice-président de la
chambre de commerce.
M. Tirard les a remerciés en quelques
mots, puis le cortège s'est formé.
Les honneurs militaires ont été rendus
par le corps des sapeurs-pompiers, le 117e
de ligne, le 26° et le 316 régiment d'artille-
rie. La gendarmerie formait l'escorte.
La population se pressait sur le passage
des ministres.
Les réceptions
Après le déjeuner, MM. Tirard et Cons-
tans ont reçu dans les grands salons de la
préfecture les autorités civiles et militaires
ainsi que les corps électifs constitués.
L'entrée des maires a été l'occasion d'une
manifestation politique qui mérite d'être
signalée. Ils sont venus des différents points
du département, au nombre de plus de
350, présenter leurs hommages aux mem-
bres du gouvernement de la République.
C'est M. Lutaud, préfet de la Sarthe, qui
les a présentés aux ministres.
M. Constans a répondu à M. Lutaud;
voici. les principaux passages de son dis-
cours :
Oui, nous nous occuperons des communes
qui ont besoin de notre concours ; mais il dé-
pend un peu d'elles qu'on puisse les aider
dans une plus large mesure. Toutes les fois
que vous ferez des efforts pour vous rappro-
cher de nous, vous rendrez la tâche de l'ad-
ministration plus facile, moins lourde. Une
bonne administration est le gage d'une politi-
que paisible, et si, aujourd'hui, nous avons
une politique calme, il n'y a pas bien long-
temps qu'elle ne l'était pas assez ; mais jamais
vous n'avez douté de nos efforts pour remet-
tre toutes choses en place. (Applaudisse-
ments.)
Messieurs, je compte sur vous, à quelque
opinion que vous apparteniez, parce que vous
êtes Français et que vous comprenez que le
pays a besoin de travail et de paix (Nouveaux
applaudissements.) La République est installée
définitivement. (Applaudissements.) Elle est
debue assez forte et assez puissante pour
être bienveillante et nous ne demandons qu'à
faire preuve de bienveillance pour tous. (Mar-
ques d'assentiment.) A ceux qui ne sont pas
avec nous, nous ne demandons que le respect
du gouvernement que la majorité du pays a
constitué (Vive approbation.), mais nous le de-
mandons energiquement.
Quand les réceptions ont été terminées,
les ministres se sont rendus à la Bourse du
commerce.
Discours de M. Tirard
M. Tirard a prononcé le discours sui-
vant :
Je me félicite d'autant plus de l'heureux
événement qui nous appelle, mon collègue,
M. le ministre de l'intérieur, et moi, au milieu
de vos laborieuses populations, qu'il me four-
nit une occasion toute naturelle d'affirmer le
programme politique qu'au début de la nou-
velle législature nous avons tracé devant le
Parlement et devant le pays.
Fidèles à ce programme, comme nous l'avons
été à l'engagement pris par nous, il y a bientôt
un an, de maintenir l'ordre un instant menacé
par des menées factieuses, nous nous efforçons
d'accord avec les Chambres, de consacrer les
travaux législatifs à l'étude des questions éco-
nomiques et des problèmes sociaux qui préoc-
cupent, à juste titre, les hommes de bonne
volonté de tous les partis.
Il faut bien le reconnaître, messieurs, la
tâche nous est aujourd'hui facile. Aussi je
me hâte de déclarer que, tout en écartant les
questions irritantes qui peuvent nous diviser
encore, nous entendo ns ne rien désavouer de
ce qui s'est fait dans les dix dernières an-
nées.
Non ! C'est au contraire parce que les bases
de la République sont inébranlablement assi-
ses, c'est parce que des lois libérales garan-
tissent le développement normal et régulier
de la démocratie française, c'est parce que la
défense nationale est plus fortement constituée
qu'elle l'a jamais été, c'est parce que l'ins-
truction est largement répandue, c'est parce
que toutes ces grandes choses sont faites, que
nous pouvons consacrer nos efforts à l'étude
calme et paisible des questions qui tendent à
mettre plus d'harmonie dans les rapports
sociaux et à augmenter le bien-être des popu-
lations par le développement du travail et
par une équitable répartition des richesses
qui en découlent.
Economie sociale
Le travail ! n'est-ce pas la passion domi-
nante de notre pays ? Et le président du
conseil rappelle avec orgueil le succès de
notre Exposition.
L'Exposition nous a démontré que le génie
scientifique des nations libres n'est plus ex-
clusivement appliqué à la découverte des for-
ces mystérieuses de la nature et à la recher-
che des problèmes dont les solutions se tra-
duisent par des formules positives, mais qu'il
aborde résolument des questions restées jus-
qu'ici dans le domaine d'une philosophie sou-
vent impuissante et résignée.
Sous le titre « d'économie sociale b, des
hommes considérables et désintéressés, ap-
partenant à toutes les classes de la société de
divers pays, nous ont montré les progrès réa-
lisés en quelques années dans l'étude et dans
l'application des mesures propices à l'amélio-
ration morale et matérielle des classes les
moins heureuses.
L'hygiène, l'épargne, la prévoyance sous
toutes ses formes, l'alimentation à bon mar-
ché, les habitations ouvrières, la participation
aux bénéfices, le soulagement des souffrances
physiques et morales, tout ce qui constitue en
un mot la vraie philanthropie a occupé une
large place dans l'exposition de « l'économie
sociale ».
Notre devoir n'est-il pas de seconder le
mouvement qui entraîne ainsi la société mo-
derne vers l'amélioration méthodique et
raisonnée des conditions de l'existence hu-
maine ?
Les Bourses de commerce
M. Tirard rappelle que les Bourses de
commerce sont le corollaire nécessaire des
chambres de commerce :
Une Bourse de commerce est en effet indis-
pensable pour assurer dans de bonnes condi-
tions* les transactions commerciales par les-
quelles passent forcément les produits de
toute nature avant d'arriver à leur destination
dernière, la consommation.
C'est là que se traitent les affaires impor-
tantes, au grand jour de la publicité, et que
les producteurs, bien renseignés sur le cours
des marchandises, peuvent défendre leurs in-
térêts en pleine connaissance de cause et
échapper ainsi à l'exploitation des spécula-
teurs.
Avec la rapidité des communications, le
rayon des affaires s'est tellement élargi, leur
mouvement a pris de telles proportions, que
la solidarite entre la plupart des centres de
production s'est forcément établie et qu'il
n'est plus possible de vivre dans l'isolement.
Aussi les chambres de commerce qui leur
servent de lien ont-elles pris une grande im-
portance.
Ce sont elles notamment qui, en dehors de
beaucoup d'autres attributions, recueillent et
transmettent, avec leurs avis, les renseigne-
ments et les vœux de tous les intéressés, in-
dustriels et commerçants, sur les questions de
douane, de transports, de législation commer-
ciale, et en général sur toutes les questions
qui touchent au régime économique.
C'est ainsi que les chambres de commerce
ont été saisies récemment d'un questionnaire
rédigé par le conseil supérieur sur les réfor-
mes à introduire dads le régime douanfer de
la France.
La question douanière
Il ne s'agit pas de faire prévaloir de part et
d'autre des théories abstraites ni des doctrines
absolues : il importe au contraire de tenir la
balance égale entre tous les intérêts en s'ef-
forçant de leur donner une égale satisfaction.
La tâche est assurément difficile ; mais avec
de la bonne volonté, une grande indépendance
d'esprit et la ferme résolution de ne pas se
livrer de parti pris à des solutions exclusives,
je suis convaincu que nous parviendrons, sans
rien bouleverser et sans rien compromettre, à
doter le pays d'un régime douanier qui sau-
vegardera équitablement la prospérité des
diverses branches du travail national.
Il se fait en ce moment une grande agitation
autour de cette question douanière, je me per-
mets même de dire que je la trouve quelque
peu excessive. Il ne faut jamais rien exagérer
et, quelle que soit l'importance des tarifs de
douane, il ne faut pas entretenir cette croyan-
ce qu'il suffit d'en modifier le taux pour apla-
nir toutes les difficultés et assurer la réalisa-
tion de toutes les espérances.
Les ignorants seuls tranchent avec désin-
volture et d'un mot les questions si complexes
qui touchent à l'économie générale du travail
d'un grand peuple. Ne prenons donc pas d'en-
gagements imprudents, ne flattons les pas-
sions de personne. Soyons les serviteurs dé-
voués de la démocratie laborieuse, n'en
soyons pas les courtisans.
Le moment semble d'ailleurs propice à l'é-
tude des questions économiques. Aux ardentes
polémiques des partis a succédé un calme re-
latif que le pays, las des discussions violentes
et stériles, attendait avec anxiété et dont il se
montre satisfait — ce qui ne veut pas dire que
ce nouvel état de choses soit du goût de tout
le monde. Il est certain que le calme ne plaît
pas à tous les raffinés de la politique. Leur
combativité s'accommode malaisément d'un
programme politique où ne figurent pas de
questions grosses d'orages ; aussi accusent-ils
le gouvernement de faiblesse et d'inertie parce
qu'il ne provoque pas lui-même les difficultés
qui pourraient entraîner sa chute
La situation politique
Le pays est tranquille, il travaille en pleine
sécurité; il n'y a pas de crises, gt l'on çn con-
clut que le gouvernement ne gouverne pas.
Eh bien! messieurs, sans méconnaître la sa-
veur particulière de ces observations et de ces
critiques, je vous avoue qu'elles ne nous tou-
chent guère et que nous n'avons nulle envie
de jouer le rôle de condamnés par persua-
sion. S'o,
Nous continuerons, tant que nous' jouirons
de la confiance du Parlement et du pays, l'oeu-
vre de concorde, d'apaisement et de progrés
que nous avons entreprise, sans être intimidés
par les fanfaronnades des factions vaincues,
sans être troublés par le génie inventif des
faiseurs de fausses nouvelles, qui cherchent à
égarer l'opinion publique par les ré. its fan
taisistes de. prétendus dissentiments qui ré-
gnent dans le cabinet.
Au surplus, messieurs, les questions de per-
sonnes importent peu. La République est au-
dessus de toutes les compétitions, et vous
pouvez avoir confiance dans ce gouvernement
réparateur qui a relevé la France au lendemain
de ses revers et qui, au milieu de difficultés
sans cesse renaissantes, l'a replacée au premier
rang des nations-
Conscient de la force que lui donne le prin-
cipe démocratique dont il émane, le gouver-
nement de la République est sans haine, sans
colère, sans- crainte. Vigilant et ferme, il ne
repousse le concours de personne, pas plus
qu'il ne renie aucune des gloires du passe, et
les républicains les plus anciens et les plus
convaincus salueront avec joie le jour ou les
Français, réconciliés et animés d'un même
sentiment patriotique, seront unanimes à crier
avec nous : « Vive la France 1 Vive la Républi-
que I »
Les paroles prononcées par le président
du conseil ont provoqué à plusieurs re-
prises de vifs applaudissements.
Les récompenses suivantes ont été dé-
cernées par M. Tirard ■.
Sont nommés :
Chevalier de la Légion d'honneur,
M. Hédin, vice-président de la chambre
de commerce.
Dans l'ordre du Mérite agricole,
MM. Briffaut, conseiller général ; Ber-
tron-Auger, éleveur à la Flèche.
Officiers d'académie,
MM. Boullée, Brûlé, Lafon.
En outre, ont été distribuées des médail-
les d'honneur des postes à MM. Portier,
facteur rural : Granier, courrier con-
voyeur.
Des médailles d'ouvriers comptant plus
de 30 ans de services à MM. Beloin, Bou-
chard, Champion, Daguet, Houdayer, Ser-
pin, Desnos, Faussabry, Torché, Cador, Be-
dier, Roboam.
Le banquet -
Le banquet a eu lieu dans le hall de la
Bourse du commerce ; il comptait environ
300 couverts.
Autour de la table d'honneur étaient
groupées cinq longues tables en fer à che-
val brillamment illuminées.
M. Hédin, vice-président de la chambre de
commerce, occupait la place d'honneur Il
avait à sa droite M. Tirard et à sa gauche
M. Constans.
Un incident
Au banquet, M. Vilfeu, député monar-
chiste, a pris la parole après MM. Lutaud
et Hédin.
Il a porté la santé des ouvriers, des agri-
culteurs et des employés de commerce, à
tous les degrés.
Il a dit qu'il ne suffisait pas aux popula-
tions de voir les représentants du gouver-
nement à travers les glaces d'un landeau
ou les fenêtres d'une salle de banquet ; il a
rappelé les paroles prononcées au Mans par
le prince de Joinville, il y a quarante-sept
ans.
Il a dit que les ministres devaient s'in-
quiéter des intérêts et des besoins des ré-
gions qu'ils traversent, et il a demandé la
réforme des errements financiers et politi-
ques qu'il a reprochés au gouvernement
actuel.
L'assemblée a protesté à diverses reprises
contre les paroles prononcées par M. Vilfeu;
elle a, surtout à la fin, couvert la voix de
l'orateur, par les cris répétés de : « Vive la
République ! Vivent les ministres !» On a
cru un moment que M. Vilfeu ne pourrait
pas terminer son discours, qu'il lisait. M.
Hédin et les autorités ont dû intervenir
pour que la parole lui fût conservée jus-
qu'au bout.
M. Constans a répondu en ces termes à
M. Vilfeu.. -
Nous venions ici chercher des amis et non
des conseils ; les conseils, nous les prenons
ailleurs qu'à une table de banquet. (Applau-
dissements.)
Ceux qui ont été vaincus par le suffrage uni-
versel ont droit à quelques privilèges. C'est
pourquoi, ne voulant être désagréable à per-
sonne, je vous prierai de boire à tous ceux qui
sont ici. (Nouveaux applaudissements.)
Le pays a dit, lors des dernières élections :
« Je veux la République, et la République par-
lementaire. » La gouvernement la maintiendra.
(Applaudissements prolongés).
Nous voulons que l'ordre soit observé et
qu'aucune atteinte ne soit portée à la sécurité
de la nation. (Applaudissements).
Ainsi que vous l'a dit M. le président du
conseil, nous nous efforçons de faire préva-
loir une politique de légalité, d'apaisement et
de concorde, et d'assurer la grandeur du
pays à l'intérieur et à l'extérieur. (Applaudis-
sements répétés.)
Buvons à la ville du Mans, et, sans aucune
rancune, à tous ses représentants.
Ce discours a été presque à chaque mot
coupé par des applaudissements pro-
longés. Les dernières paroles du ministre
de l'intérieur ont provoqué un élan d'en-
thousiasme.
M. Tirard a appuyé les paroles de M.
Constans et, au milieu des applaudisse-
ments, de nouveau enthousiastes, de l'au-
ditoire, il a affirmé que l'union avait tou-
jours été complète au sein du cabinet.
Il a terminé en portant un toast à l'ar-
mée, dont la vaillance n'est une menace
pour personne,mais un gage de sûreté pour
le pays tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.
L'improvisation du président du conseil
a provoqué les mêmes acclamations que le
discours de M. Constans.
A la sortie du banquet, la population ne
s'est en aucune façon associée aux senti-
ments dont M. Vilfeu s'est fait l'interprète.
Elle s'est montrée calme et respectueuse
pour les représentants du gouvernement de
la République.
LA TERREUR EN BUlGARrE
Etat de siège et arrestations
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Vienne, 9 février.
Les renseignements qui parviennent ici
de Bulgarie sont des plus graves. Des
désordres ont éclaté dans plusieurs villes.
Un état de siège rigoureux a été établi dans
toute la principauté. On continue à opérer
de nombreuses arrestations] les esprits sont
très surexcités.
CHRONIQUE
Vous savez qu'il s'est formé à Paris une
ligue dont le nom indique suffisamment
les visées : Association nationale povu* la
réforme de l'enseignement secondaire.
Pauvre enseignement secondaire, on nef
fait que cela, de le réformer ! C'est une
rage. On le réforme tous les dix ans.
Le conseil supérieur de l'instruction
publique vient encore, il n'y a pas trois
ans , d'opérer une réforme qu'on as-
surait devoir être la dernière. Ce que
cette réforme donnera,personne n'en sait
rien encore, puisqu'on n'a pas eu la
temps de l'appliquer.. Et voilà que de
nouveaux médecins tâtent le pouls du
malade et lui font tirer la langue. S'il en
échappe, il aura de la chance!
M. Georges Berger a été nommé prési-
dent de la ligue; Raoul Frary eQ est un des
membres les plus influents. Raoul Frary,
ce nom dit tout : les études grecques et
latines n'ont qu'à se bien tenir. Vous
n'ignorez pas que, dans un pamphlet
M. Raoul Frary a signifié leur congé il
Homère et à Virgile, et qu'aux langues
ancienne, il a substitué la géographie,qui
serait désormais la base de l'enseigne-
ment classique.
Parmi les hommes marquants inscrits
sur la liste des adhérents figure M.
Lockroy, et vous n'avez pas oublié que
M. Lockroy, alors qu'il était ministre de -
l'instruction publiqii,profita de l'occasion
que lui offrait la distribution des prix du
concours général pour dire vertement
leur fait,dans un discours qui, d'ailleurs,
étincelait d'esprit, aux études latines et
grecques. -
Le plan d'éducation que proposent ces
messieurs nous a été révélé par M. Gabriel
Compayré : c'est à lui que j'en emprunte
les traits généraux.
Il y aurait désormais deux degrés dans
l'enseignement secondaire. Le premier
degré comprendrait tous les élèves, leq
retiendrait jusqu'à treize ou quatorze
ans. -r
,
« Il est nécessaire, dit le programme de
la ligue, de donner à tous indistinctement
pendant plusieurs années, à l'aide dur
français et d'une ou deux langues viran-
tes, une même culture générale, destinée
tout ensemble à développer les facultés'; -
à en assurer l'équilibre, et à jeter les baseï
du savoir qui convient aa citoyen mo*
derne: instruction morale et civique,'
géographie, premiers éléments des scien-
ces. » ,
Ce programme est bien connu : c'est c
lui de l'enseignement primaire supé-
rieur. Là, ces messieurs n'ont rien in-
nové. Mais à ce premier enseignement
on superposerait divers enseignements
secondaires spéciaux, français ou gréco
latin, selon les aptitudes et les besoins. -'
On apprendra désormais, disent ces
messieurs, les langues classiques en trois
ou quatre ans, par des moyens expédi
tifs.
Des moyens expéditifs ! C'est à se pâmer
de rire! Je comprends que MM. Berger et
Lockroy, qui n'ont jamais de leur vie fait
une classe, mettent leur signature au bas
d'énormités pareilles. Mais Raoul Frary,
qui a passé par l'Ecole normale et le pro-
fessorat ! Il est vrai que Raoul Frary se-
rait, lui, bien plus radical. Il supprime-
rait, s'il ne fallait pas compter avec sei
collègues, les langues anciennes de ]'en-
seignement : ça serait bien plus cxp
ditif encore.
Ça serait au moins plus rationnel!
M. Gabriel Compayré, dont l'autorité est
si grande en ces matières, dit excellent
ment :
« Ce qui est l'erreur fondamentale de
la nouvelle école d'éducation, c'est dè
croire qu'oii puisât: manutctiir sérieusa- ,
ment la culture classique, telle que l'as-
sure seul. un long contact avec les au-
teurs de l'antiquité, en réduisant les let-
tres grecques et latines à la portion con-
grue, en les rejetant à la fin des études
dans un compartiment spécial. 'J
» On nous pardonnera notre franchise :
mais un système est jugé à nos yeux,
quand il parle d'arriver à ses fins a par des
moyens expéditifs ». Il vaudrait mieux re*
noncer tout à fait aux études classjquegf
que les mutiler, les amoindrir, les rendre
inutiles et sans portée, en ne les admettant
que sur le tard pour les écoliers de quaf
torze on quinze ans, qui auront consacfiS
à de tous autres objets leurs premières
années, les plus souples et les plus fe
condes. la culture classique doit être
commencée de bonne heure, ou bien ce
n'est pas la peine de l'essayer. Proscri-
vez-la impitoyablement, ou bien rési-*
gnez-vous à y consacrer beaucoup dq
temps. »
Il est impossible de dire plus juste et
plus net. Tous les hommes au courant des
l'éducation secondaire, j'entends ceuJ(
qui l'ont pratiquée et non les utopistes
de la théorie, haussent les épaules quand
on leur parle de faire lire en classe, au cou-
rant d'une explication sommairemen t
enlevée, Vlliade et l'Enéide dans uneJ
même année, au lieu d'en étudier à fond
quelques morceaux choisis. Ils savent
bien que ces lectures rapides, faites à le
volée, sous l'œil du professeur, par des
élèves qui ne se rendent compte de rien ;
qui n'écoutent pas le plus souvent, ne
laissent aucune trace dans leur esprit
On s'imagine leur faire mieux connaît
tre l'antiquité par ces moyens expéditifs ;
la vérité est qu'ils en savent beaucoup
moins qu'ils n'en apprenaient or les vieU-j
les méthodes. 1 #
En éducation, il n'y a pas de moyerii
expéditifs. Le temps est le premier et la
plus important de tous les facteurs ; l'ese
prit ne garde longtemps que ce qu'on J,
a versé lentement et goutk à goutte.
Il n'y a pas de plus fausse méthode que
de mettre les bouchées doubles. On n'ap-
urendrait cas même. en se hâtant de la
JOURNAL RPUBLICAIN
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DISCOURS DE MM. TIRARD ET CONSTANS
AU MANS
LA JOURNÉE DU DUC D'ORLÉANS
i —
M. GO BLET A SCEAUX
* : <
L'AFFAIRE LAMBERT
FIN DE L'ENQUÊTE GOUFFÉ A LYON
NOS CONSU LS
Que de fois le reproche n'a-t-il pas
été adressé aux Français de ne pas
sortir de chez eux! Critique trop exacte,
qui trouve son application dans tous
les ordres de notre activité. Nos jour-
nalistes, nos politiques sont,- je parle
de la majorité, — d'une ignorance
extraordinaire sur les hommes et les
choses de la politique extérieure. A
maintes reprises, nous avons entendu
nos amis étrangers se plaindre de l'in-
différence du monde politique fran-
çais pour ce qui se passait hors de
nos frontières. Il en va de même de
nos négociants.
* On ne rencontre point sur les gran-
des routes du monde, en paquebot, en
railway, de jeunes Français qui s'en
aillent, comme leurs camarades d'ou-
tre-Manche, compléter leur instruction
générale par un lointain voyage hors
de leur pays : nous sommes casaniers
d'instinct et d'éducation.
Nos négociants, si considérable que
soit leur situation commerciale, n'ont
pas l'habitude de se déplacer, d'aller
au dehors poursuivre la clientèle et
s'informer, par la même occasion, des
procédés et des progrès de leurs con-
currents étrangers.
Sans doute les Expositions univer-
selles sont une source de renseigne-
ments qui a l'avantage, précieux pour
notre paresse, de sourdre à nos
pieds ; mais elle ne jaillit qu'à des in-
tervalles trop éloignés, - pour qu'on
puisse s'en contenter. -
Or, à notre époque, un négociant a
pour clients les habitants du monde.
La facilité des transports, leur rapi-
dité, la multiplicité des chemins de
fer, les applications merveilleuses de
l'électricité ont supprimé les distances.
D'autre part, le nombre toujours crois-
sant des concurrents oblige le produc-
teur à vendre à bas prix et, par suite,
à compenser la médiocrité du bénéfice
par l'importance de la clientèle.
C'est donc une nécessité de vie ou
de mort pour notre commerce que
d'étendre au dehors ses opérations. Il
commence à s'en rendre compte. Mais
il ne suffit pas qu'il le reconnaisse.
Pour que les efforts qu'il tente dans ce
sens soient fructueux, l'aide du gou-
vernement lui est nécessaire. Il im-
porte qu'il trouve dans nos agents
consulaires des auxiliaires actifs et
dévoués.
Ont-ils compris le rôle qui leur in-
combe, et comment le remplissent-ils?
C'est à cette double question qu'a ré-
pondu M. Gaston Cadoux, dans une
intéressante brochure que notre ami
de Lanessan a fait précéder d'une
lettre d'introduction.
Le député de la Seine y note avec
beaucoup de netteté la transformation
qui s'est opérée, par la force des cho-
ses, dans les fonctions consulaires.
Autrefois, la fonction essentielle de
ces agents était de renseigner nos
ambassadeurs sur ce qui se passait au
siège de leur résidence et d'y assurer
la protection de nos nationaux.
Aujourd'hui, avec la rapidité des
communications et l'adoucissement
des mœurs, ces attributions sont de-
venues, ou peu s'en faut, une siné-
cure. Les services très réels que ces
agents sont appelés à fournir, c'est en
qualité d'auxiliaires de notre com-
merce qu'ils peuvent les rendre.
Mais beaucoup n'acceptent pas sans
résistance ce changement de rôle.
D'agents politiques et administra-
tifs passer à l'état d'agents com-
merciaux : pour un peu, ils crieraient
à la déchéance. D'autant que, par un
phénomène assez commun, si la plu-
part se sentent peu de goût pour ces
fonctions nouvelles, c'est qu'ils n'y ont
aucune aptitude. La première condi-
tion pour renseigner nos commerçants
sur les progrès de leurs rivaux d'une
nation étrangère, c'est au moins de
parler la langue des deux peuples. Or,
j'ai rencontré, nous dit M. de Lanes-
san, des agents consulaires qui ne sa-
vaient pas le premier mot de la lan-
gue du pays qu'ils habitaient. Par
contre, M. Cadoux nous raconte l'his-
toire d'un Parisien qui, de passage
dans une grande ville d'Angleterre,
dut à trois reprises aller au consulat
de France sans parvenir à s'y faire
comprendre. Personne n'y savait un
mot de français. -.
Cet incident invraisemblable s'ex-
plique par la fâcheuse habitude que
nous avons de choisir à l'étranger
pour nos représentants des indigènes
qui ne remplissent pas les conditions
les plus élémentaires à réclamer de ces
fonctionnaires.
Au reste, même quand nos agents
parlent français, nous ne sommes sou-
vent pas mieux servis. M. Gaston Ca-
doux cite à ce propos quelques curieux
exemples de l'amabilité de nos repré-
sentants à l'égard des conseillers mu-
nicipaux de Paris en mission à l'étran-
ger. Ceux-ci, en entrant dans les léga-
tions de Londres et de Bruxelles, pu-
rent se figurer, au rogue accueil qui
leur fut fait, qu'ils étaient encore à
Paris, dans le bureau de quelque ad-
ministration publique.
Il importe qu'une telle situation
change. Des rapports périodiques sont
bien fournis, dès maintenant, par nos
agents sur la situation commerciale à
l'étranger. Ils sont pieusement re-
cueillis dans des annales officielles qui
les publient. quand tout le monde
connaît déjà les renseignements qu'ils
contiennent.
Je ne veux pas examiner ici par le
menu le projet de réorganisation que
présente M. Cadoux, l'idée qu'il pré-
conise de créer des attachés commer-
ciaux, le projet d'installer dans cha-
cune de nos ambassades un bureau
ouvert aux négociants français, qui
centraliserait, à leur intention, tous
les renseignements techniques et orga-
niserait, de temps à autre, des expo-
sitions annuelles d'œuvres d'art fran-
çaises.
Le certain, c'est qu'il faut transfor-
mer du tout au tout l'esprit qui anime
nos agents consulaires. C'est par l'in-
fluence de ses consuls que, depuis
1875, l'Allemagne a pu réussir à subs-
tituer au Japon son influence à la
nôtre. Un tel fait porte avec lui un
enseignement qui ne doit pas être
perdu.
A. Millerand.
JUGÉ PAR LES SIENS
Le Journal du Loiret, organe des princes
d'Orléans, parle de la sincérité, de la pro-
bité politique de M. Loreau. « Son hon-
neur politique, dit-il, est inattaquable, ce
point est au-dessus de toute discussion. »
Mais le Soleil, organe non moins autorisé
des princes d'Orléans, le Soleil, qui a pour
directeur notre éminent confrère M.Edouard
Hervé, a de la « sincérité » et de la « pro-
bité politique » de M. Loreau une tout
autre idée.
Voici en quels termes sanglants il s'ex-
primait à propos de l'invalidation de M. Lo-
reau :
Il est juste d'indiquer que l'intéressé (M. Lo-
reau) manquait un peu, pour ne pas dire beau-
coup, de netteté dans son attitude politique. Sa
candidature a paru fort ondoyante. Au pre-
mier tour, il criait : « Vive le roi ! » Au second
tour, il ue criait rien du tout; il déclare au-
jourd'hui qu'il ne veut pas renverser la Répu-
blique.
Ces « habiletés » (!) ne le sauvent pas. Par
253 voix contre 219, l'élection de Gien est an-
nulée.
Il est scandaleux que les décisions du suf-
frage universel soient cassées ; mais il est très
moral qu'un député ne réussisse pas à racheter
son mandat au prix de certaines palinodies.
Aux yeux du Soleil, dont l'autorité dans
la presse conservatrice vaut bien celle du
Journal du Loiret, l'honneur politique de
M. Loreau est donc au moins fort discu-
table.
C'est aussi l'opinion de la Gazette de
France, journal conservateur non moins
autorisé, qui reproche à M. Loreau de n'être
NI FRANC DANS SES ALLURES, NI CONSTANT
DANS SES OPINIONS.
DROLES DE MODÉRÉS
Le même Journal du Loiret prétend que
r M. Loreau a pour lui les hommes modérés
de tous les partis.
Par qui donc a-t-il été soutenu à la Cham-
bre ? Par les Paul de Cassagnac, les Laguer-
re, les Francis Laur, c'est-à-dire par les
hommes les plus intempérants et les plus
violents de la Droite et du boulangisme.
Par qui a-t-il été défendu dans la
presse ? Par Y Autorité de M. Paul de Cassa-
gnac, le Petit Caporal du commandant
Blanc, la Presse de M. Georges Laguerre,
VIntransigeant de M. Rochefort, et tutti
quanti.
En somme, M. Loreau n'a été soutenu,
dans ce grand procès de l'invalidation, que
par les énergumènes. Il n'a même pas eu
pour lui les journaux conservateurs modé-
rés, comme le Soleil.
CRIME DE LA JALOUSIE
Amant jaloux. — Coup de revolver. —
Une morte et un blessé.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Genève, 9 février.
Un crime passionnel vient de causer une
profonde sensation dans notre ville. Le
fils du major Burkel, membre de la cham-
bre de commerce, grand fabricant de pro-
duits chimiques, jouissant de l'estime gé-
nérale, sortait du théâtre, hier soir, vers
minuit. Il rencontra sa maîtresse, la fille
Simonetti, causant avec un jeune homme,
sous la porte d'une allée, rue du Conseil-
Fédéral.
Dès qu'il l'aperçut, il lui tira un coup de
revolver qui l'a tuée raide.
L'assassin, qui est âgé de vingt-trois ans,
a tenté de se suicider, mais il ne s'est fait
qu'une grave blessure.
ENTRE BLANCS ET NOIRS
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
--- New-York, 9 juillet.
Hier, dans lAlabama a eu lieu un véritable
combat entre blap'\js et noirs, employés à la
construction du chemin de fer.
Deux blap.t's ont été tués et trois blessés par
les P..ia'ès, qui étaient les plus nombreux, mais
ies blancs étant revenus en force, les noirs se
sont réfugiés dans les boig,
LES MINISTRES AU MANS
INAUGURATION DE LA BOURSE
DU COMMERCE
Un remarquable édifice. — Une ville
en fête. — L'arrivée de MM. Tirard
et Constans. — L'inauguration.
La Bourse du commerce du Mans, qui
vient d'être inaugurée par le président du
conseil et le ministre de l'intérieur, est un
des édifices les plus remarquables qui aient
été élevés en province depuis quelques an-
nées; Située en face du beau monument de
Chanzy, par Crauck et Choisy, qui se dresse
au centre de la vaste place des Halles, la
Bourse, de noble ordonnance, produit un
grand effet, vue du pont de la Sarthe, offrant
une longue perspective par la rue de Gam-
betta. -
Le rez-de-chaussée, en pierre du Poitou,
repose sur un soubassement de granit bleu.
Sur la place, le pavillon central est sur-
monté d'un beau fronton, de M. Filleul,
statuaire. Il représente le Commerce, en-
touré de l'Industrie et de l'Agriculture.
Sur le boulevard, le corps central est orné
de colonnes ioniennes engagées, suppor-
tant l'entablement qui règne" entre le pre-
mier et le second étage. Il a une originalité
qui fait honneur à l'architecte, M. Théodore
Lafon.
A l'intérieur
L'intérieur du palais est remarquable : le
grand hall, dont le plafond, formé de pou-
tres de fer peintes en bronze et relevées
par des écussons portant le nom de toutes
les villes du département, est des plus heu-
reux. Des colonnes en pierre de Comblan-
chien, alternant avec des piliers en pierre
de Chàvrigny, donnent au hall un carac-
tère de grandeur. Cette salle occupe 600
mètres carrés de surface : elle a A3 mètres de
longueur et 13 mètres 50 de largeur. De
hautes fenêtres y répandent la lumière à
flots.
Le grand escalier à double évolution
s'ouvre fort heureusement au centre de ce
beau hall. Au premier étage, il aboutit à
une salle des pas perdus, d'un goût sobre,
prenant jour sur le boulevard par trois fe-
nêtres à balcon, et pavée en mosaïque dont
le motif principal représente les armes de
1:1. VillfL
A gauche, s'ouvre la salle d'audience du
tribunal de commerce. C'est le morceau
principal du monument. Le plafond est une
merveille. Les caissons sont peints en vieil
or et les reliefs accusés par des dorures
plus vives. Le fond du caisson est d'un bleu
pâle, sur lequel se détachent des ornements
d'un bleu plus foncé. Des boiseries en chêne
courent à mi-hauteur, séparées par une
large moulure dorée, des tentures repro-
duisant en plus foncé les nuances des cais-
sons. Quand le temps aura éteint les teintes
d'or, cette décoration sera fort belle.
La chajnbre de commerce
La chambre de commerce occupe l'autre
partie du monument. La bibliothèque, fort
simplement décorée, sera installée en face
du tribunal. La grande salle des fêtes, qui
est contiguë, donne sur la place de la Ré-
publique. Le plafond, dans les teintes or,
saumon et vert céladon, est exquis. La cor-
niche offre une série d'écussons et attri-
buts consacrés aux industries du départe-
ment. L'auteur de cette décoration est M.
Le Feuvre. Cette salle, qui doit être divisée
en deux parties, renferme deux belles che-
minées : l'une en pierre du Poitou est l'œu-
vre de M. Lafon; l'autre est une cheminée
en fer estampé et en fonte malléable, fort
admirée à l'Eposition de 1889, où elle a ob-
tenu une médaille d'or.
Les bureaux de la chambre de commerce
et du tribunal sont placés aux côtés de l'es-
calier.
Le second étage renferme la salle du con-
seil des prud'hommes et les bureaux de ce
tribunal, ainsi qu'un hall où doit être ins-
tallé un musée industriel.
Le monument a coûté environ520,000 fr.,
provenant d'un emprunt de la chambre de
commerce et de subventions de la ville et
du département.
Le monument disparaît aujourd'hui sous
les drapeaux, les tentures et les fleurs.
Toutes les grandes voies et les édifices pu-
blics sont ornés de drapeaux et d'oriflam-
mes. C'est la chambre de commerce qui a
pris à sa charge tous les frais occasionnés
par la fête offerte à ses hôtes. Il faut avouer
qu'elle a fort bien fait les choses.
Arrivée au Mans
Les ministres sont arrivés à onze heures
et demie. Ils ont été reçus sur le quai de la
gare par M. Lutaud, préfet de la Sarthe, qui
leur a présenté les autorités, parmi les-
quelles le général LaveuVe, M. Rivaud, pré-
fet de la Loire-Inférieure, M. Lemallier,
préfet d'Indre-et-Loire, M. Legludic, dé-
puté.
M. Rubillard, sénateur, a souhaité la bien-
venue aux représentants du gouvernement,
ainsi que M. Hédin, vice-président de la
chambre de commerce.
M. Tirard les a remerciés en quelques
mots, puis le cortège s'est formé.
Les honneurs militaires ont été rendus
par le corps des sapeurs-pompiers, le 117e
de ligne, le 26° et le 316 régiment d'artille-
rie. La gendarmerie formait l'escorte.
La population se pressait sur le passage
des ministres.
Les réceptions
Après le déjeuner, MM. Tirard et Cons-
tans ont reçu dans les grands salons de la
préfecture les autorités civiles et militaires
ainsi que les corps électifs constitués.
L'entrée des maires a été l'occasion d'une
manifestation politique qui mérite d'être
signalée. Ils sont venus des différents points
du département, au nombre de plus de
350, présenter leurs hommages aux mem-
bres du gouvernement de la République.
C'est M. Lutaud, préfet de la Sarthe, qui
les a présentés aux ministres.
M. Constans a répondu à M. Lutaud;
voici. les principaux passages de son dis-
cours :
Oui, nous nous occuperons des communes
qui ont besoin de notre concours ; mais il dé-
pend un peu d'elles qu'on puisse les aider
dans une plus large mesure. Toutes les fois
que vous ferez des efforts pour vous rappro-
cher de nous, vous rendrez la tâche de l'ad-
ministration plus facile, moins lourde. Une
bonne administration est le gage d'une politi-
que paisible, et si, aujourd'hui, nous avons
une politique calme, il n'y a pas bien long-
temps qu'elle ne l'était pas assez ; mais jamais
vous n'avez douté de nos efforts pour remet-
tre toutes choses en place. (Applaudisse-
ments.)
Messieurs, je compte sur vous, à quelque
opinion que vous apparteniez, parce que vous
êtes Français et que vous comprenez que le
pays a besoin de travail et de paix (Nouveaux
applaudissements.) La République est installée
définitivement. (Applaudissements.) Elle est
debue assez forte et assez puissante pour
être bienveillante et nous ne demandons qu'à
faire preuve de bienveillance pour tous. (Mar-
ques d'assentiment.) A ceux qui ne sont pas
avec nous, nous ne demandons que le respect
du gouvernement que la majorité du pays a
constitué (Vive approbation.), mais nous le de-
mandons energiquement.
Quand les réceptions ont été terminées,
les ministres se sont rendus à la Bourse du
commerce.
Discours de M. Tirard
M. Tirard a prononcé le discours sui-
vant :
Je me félicite d'autant plus de l'heureux
événement qui nous appelle, mon collègue,
M. le ministre de l'intérieur, et moi, au milieu
de vos laborieuses populations, qu'il me four-
nit une occasion toute naturelle d'affirmer le
programme politique qu'au début de la nou-
velle législature nous avons tracé devant le
Parlement et devant le pays.
Fidèles à ce programme, comme nous l'avons
été à l'engagement pris par nous, il y a bientôt
un an, de maintenir l'ordre un instant menacé
par des menées factieuses, nous nous efforçons
d'accord avec les Chambres, de consacrer les
travaux législatifs à l'étude des questions éco-
nomiques et des problèmes sociaux qui préoc-
cupent, à juste titre, les hommes de bonne
volonté de tous les partis.
Il faut bien le reconnaître, messieurs, la
tâche nous est aujourd'hui facile. Aussi je
me hâte de déclarer que, tout en écartant les
questions irritantes qui peuvent nous diviser
encore, nous entendo ns ne rien désavouer de
ce qui s'est fait dans les dix dernières an-
nées.
Non ! C'est au contraire parce que les bases
de la République sont inébranlablement assi-
ses, c'est parce que des lois libérales garan-
tissent le développement normal et régulier
de la démocratie française, c'est parce que la
défense nationale est plus fortement constituée
qu'elle l'a jamais été, c'est parce que l'ins-
truction est largement répandue, c'est parce
que toutes ces grandes choses sont faites, que
nous pouvons consacrer nos efforts à l'étude
calme et paisible des questions qui tendent à
mettre plus d'harmonie dans les rapports
sociaux et à augmenter le bien-être des popu-
lations par le développement du travail et
par une équitable répartition des richesses
qui en découlent.
Economie sociale
Le travail ! n'est-ce pas la passion domi-
nante de notre pays ? Et le président du
conseil rappelle avec orgueil le succès de
notre Exposition.
L'Exposition nous a démontré que le génie
scientifique des nations libres n'est plus ex-
clusivement appliqué à la découverte des for-
ces mystérieuses de la nature et à la recher-
che des problèmes dont les solutions se tra-
duisent par des formules positives, mais qu'il
aborde résolument des questions restées jus-
qu'ici dans le domaine d'une philosophie sou-
vent impuissante et résignée.
Sous le titre « d'économie sociale b, des
hommes considérables et désintéressés, ap-
partenant à toutes les classes de la société de
divers pays, nous ont montré les progrès réa-
lisés en quelques années dans l'étude et dans
l'application des mesures propices à l'amélio-
ration morale et matérielle des classes les
moins heureuses.
L'hygiène, l'épargne, la prévoyance sous
toutes ses formes, l'alimentation à bon mar-
ché, les habitations ouvrières, la participation
aux bénéfices, le soulagement des souffrances
physiques et morales, tout ce qui constitue en
un mot la vraie philanthropie a occupé une
large place dans l'exposition de « l'économie
sociale ».
Notre devoir n'est-il pas de seconder le
mouvement qui entraîne ainsi la société mo-
derne vers l'amélioration méthodique et
raisonnée des conditions de l'existence hu-
maine ?
Les Bourses de commerce
M. Tirard rappelle que les Bourses de
commerce sont le corollaire nécessaire des
chambres de commerce :
Une Bourse de commerce est en effet indis-
pensable pour assurer dans de bonnes condi-
tions* les transactions commerciales par les-
quelles passent forcément les produits de
toute nature avant d'arriver à leur destination
dernière, la consommation.
C'est là que se traitent les affaires impor-
tantes, au grand jour de la publicité, et que
les producteurs, bien renseignés sur le cours
des marchandises, peuvent défendre leurs in-
térêts en pleine connaissance de cause et
échapper ainsi à l'exploitation des spécula-
teurs.
Avec la rapidité des communications, le
rayon des affaires s'est tellement élargi, leur
mouvement a pris de telles proportions, que
la solidarite entre la plupart des centres de
production s'est forcément établie et qu'il
n'est plus possible de vivre dans l'isolement.
Aussi les chambres de commerce qui leur
servent de lien ont-elles pris une grande im-
portance.
Ce sont elles notamment qui, en dehors de
beaucoup d'autres attributions, recueillent et
transmettent, avec leurs avis, les renseigne-
ments et les vœux de tous les intéressés, in-
dustriels et commerçants, sur les questions de
douane, de transports, de législation commer-
ciale, et en général sur toutes les questions
qui touchent au régime économique.
C'est ainsi que les chambres de commerce
ont été saisies récemment d'un questionnaire
rédigé par le conseil supérieur sur les réfor-
mes à introduire dads le régime douanfer de
la France.
La question douanière
Il ne s'agit pas de faire prévaloir de part et
d'autre des théories abstraites ni des doctrines
absolues : il importe au contraire de tenir la
balance égale entre tous les intérêts en s'ef-
forçant de leur donner une égale satisfaction.
La tâche est assurément difficile ; mais avec
de la bonne volonté, une grande indépendance
d'esprit et la ferme résolution de ne pas se
livrer de parti pris à des solutions exclusives,
je suis convaincu que nous parviendrons, sans
rien bouleverser et sans rien compromettre, à
doter le pays d'un régime douanier qui sau-
vegardera équitablement la prospérité des
diverses branches du travail national.
Il se fait en ce moment une grande agitation
autour de cette question douanière, je me per-
mets même de dire que je la trouve quelque
peu excessive. Il ne faut jamais rien exagérer
et, quelle que soit l'importance des tarifs de
douane, il ne faut pas entretenir cette croyan-
ce qu'il suffit d'en modifier le taux pour apla-
nir toutes les difficultés et assurer la réalisa-
tion de toutes les espérances.
Les ignorants seuls tranchent avec désin-
volture et d'un mot les questions si complexes
qui touchent à l'économie générale du travail
d'un grand peuple. Ne prenons donc pas d'en-
gagements imprudents, ne flattons les pas-
sions de personne. Soyons les serviteurs dé-
voués de la démocratie laborieuse, n'en
soyons pas les courtisans.
Le moment semble d'ailleurs propice à l'é-
tude des questions économiques. Aux ardentes
polémiques des partis a succédé un calme re-
latif que le pays, las des discussions violentes
et stériles, attendait avec anxiété et dont il se
montre satisfait — ce qui ne veut pas dire que
ce nouvel état de choses soit du goût de tout
le monde. Il est certain que le calme ne plaît
pas à tous les raffinés de la politique. Leur
combativité s'accommode malaisément d'un
programme politique où ne figurent pas de
questions grosses d'orages ; aussi accusent-ils
le gouvernement de faiblesse et d'inertie parce
qu'il ne provoque pas lui-même les difficultés
qui pourraient entraîner sa chute
La situation politique
Le pays est tranquille, il travaille en pleine
sécurité; il n'y a pas de crises, gt l'on çn con-
clut que le gouvernement ne gouverne pas.
Eh bien! messieurs, sans méconnaître la sa-
veur particulière de ces observations et de ces
critiques, je vous avoue qu'elles ne nous tou-
chent guère et que nous n'avons nulle envie
de jouer le rôle de condamnés par persua-
sion. S'o,
Nous continuerons, tant que nous' jouirons
de la confiance du Parlement et du pays, l'oeu-
vre de concorde, d'apaisement et de progrés
que nous avons entreprise, sans être intimidés
par les fanfaronnades des factions vaincues,
sans être troublés par le génie inventif des
faiseurs de fausses nouvelles, qui cherchent à
égarer l'opinion publique par les ré. its fan
taisistes de. prétendus dissentiments qui ré-
gnent dans le cabinet.
Au surplus, messieurs, les questions de per-
sonnes importent peu. La République est au-
dessus de toutes les compétitions, et vous
pouvez avoir confiance dans ce gouvernement
réparateur qui a relevé la France au lendemain
de ses revers et qui, au milieu de difficultés
sans cesse renaissantes, l'a replacée au premier
rang des nations-
Conscient de la force que lui donne le prin-
cipe démocratique dont il émane, le gouver-
nement de la République est sans haine, sans
colère, sans- crainte. Vigilant et ferme, il ne
repousse le concours de personne, pas plus
qu'il ne renie aucune des gloires du passe, et
les républicains les plus anciens et les plus
convaincus salueront avec joie le jour ou les
Français, réconciliés et animés d'un même
sentiment patriotique, seront unanimes à crier
avec nous : « Vive la France 1 Vive la Républi-
que I »
Les paroles prononcées par le président
du conseil ont provoqué à plusieurs re-
prises de vifs applaudissements.
Les récompenses suivantes ont été dé-
cernées par M. Tirard ■.
Sont nommés :
Chevalier de la Légion d'honneur,
M. Hédin, vice-président de la chambre
de commerce.
Dans l'ordre du Mérite agricole,
MM. Briffaut, conseiller général ; Ber-
tron-Auger, éleveur à la Flèche.
Officiers d'académie,
MM. Boullée, Brûlé, Lafon.
En outre, ont été distribuées des médail-
les d'honneur des postes à MM. Portier,
facteur rural : Granier, courrier con-
voyeur.
Des médailles d'ouvriers comptant plus
de 30 ans de services à MM. Beloin, Bou-
chard, Champion, Daguet, Houdayer, Ser-
pin, Desnos, Faussabry, Torché, Cador, Be-
dier, Roboam.
Le banquet -
Le banquet a eu lieu dans le hall de la
Bourse du commerce ; il comptait environ
300 couverts.
Autour de la table d'honneur étaient
groupées cinq longues tables en fer à che-
val brillamment illuminées.
M. Hédin, vice-président de la chambre de
commerce, occupait la place d'honneur Il
avait à sa droite M. Tirard et à sa gauche
M. Constans.
Un incident
Au banquet, M. Vilfeu, député monar-
chiste, a pris la parole après MM. Lutaud
et Hédin.
Il a porté la santé des ouvriers, des agri-
culteurs et des employés de commerce, à
tous les degrés.
Il a dit qu'il ne suffisait pas aux popula-
tions de voir les représentants du gouver-
nement à travers les glaces d'un landeau
ou les fenêtres d'une salle de banquet ; il a
rappelé les paroles prononcées au Mans par
le prince de Joinville, il y a quarante-sept
ans.
Il a dit que les ministres devaient s'in-
quiéter des intérêts et des besoins des ré-
gions qu'ils traversent, et il a demandé la
réforme des errements financiers et politi-
ques qu'il a reprochés au gouvernement
actuel.
L'assemblée a protesté à diverses reprises
contre les paroles prononcées par M. Vilfeu;
elle a, surtout à la fin, couvert la voix de
l'orateur, par les cris répétés de : « Vive la
République ! Vivent les ministres !» On a
cru un moment que M. Vilfeu ne pourrait
pas terminer son discours, qu'il lisait. M.
Hédin et les autorités ont dû intervenir
pour que la parole lui fût conservée jus-
qu'au bout.
M. Constans a répondu en ces termes à
M. Vilfeu.. -
Nous venions ici chercher des amis et non
des conseils ; les conseils, nous les prenons
ailleurs qu'à une table de banquet. (Applau-
dissements.)
Ceux qui ont été vaincus par le suffrage uni-
versel ont droit à quelques privilèges. C'est
pourquoi, ne voulant être désagréable à per-
sonne, je vous prierai de boire à tous ceux qui
sont ici. (Nouveaux applaudissements.)
Le pays a dit, lors des dernières élections :
« Je veux la République, et la République par-
lementaire. » La gouvernement la maintiendra.
(Applaudissements prolongés).
Nous voulons que l'ordre soit observé et
qu'aucune atteinte ne soit portée à la sécurité
de la nation. (Applaudissements).
Ainsi que vous l'a dit M. le président du
conseil, nous nous efforçons de faire préva-
loir une politique de légalité, d'apaisement et
de concorde, et d'assurer la grandeur du
pays à l'intérieur et à l'extérieur. (Applaudis-
sements répétés.)
Buvons à la ville du Mans, et, sans aucune
rancune, à tous ses représentants.
Ce discours a été presque à chaque mot
coupé par des applaudissements pro-
longés. Les dernières paroles du ministre
de l'intérieur ont provoqué un élan d'en-
thousiasme.
M. Tirard a appuyé les paroles de M.
Constans et, au milieu des applaudisse-
ments, de nouveau enthousiastes, de l'au-
ditoire, il a affirmé que l'union avait tou-
jours été complète au sein du cabinet.
Il a terminé en portant un toast à l'ar-
mée, dont la vaillance n'est une menace
pour personne,mais un gage de sûreté pour
le pays tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.
L'improvisation du président du conseil
a provoqué les mêmes acclamations que le
discours de M. Constans.
A la sortie du banquet, la population ne
s'est en aucune façon associée aux senti-
ments dont M. Vilfeu s'est fait l'interprète.
Elle s'est montrée calme et respectueuse
pour les représentants du gouvernement de
la République.
LA TERREUR EN BUlGARrE
Etat de siège et arrestations
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Vienne, 9 février.
Les renseignements qui parviennent ici
de Bulgarie sont des plus graves. Des
désordres ont éclaté dans plusieurs villes.
Un état de siège rigoureux a été établi dans
toute la principauté. On continue à opérer
de nombreuses arrestations] les esprits sont
très surexcités.
CHRONIQUE
Vous savez qu'il s'est formé à Paris une
ligue dont le nom indique suffisamment
les visées : Association nationale povu* la
réforme de l'enseignement secondaire.
Pauvre enseignement secondaire, on nef
fait que cela, de le réformer ! C'est une
rage. On le réforme tous les dix ans.
Le conseil supérieur de l'instruction
publique vient encore, il n'y a pas trois
ans , d'opérer une réforme qu'on as-
surait devoir être la dernière. Ce que
cette réforme donnera,personne n'en sait
rien encore, puisqu'on n'a pas eu la
temps de l'appliquer.. Et voilà que de
nouveaux médecins tâtent le pouls du
malade et lui font tirer la langue. S'il en
échappe, il aura de la chance!
M. Georges Berger a été nommé prési-
dent de la ligue; Raoul Frary eQ est un des
membres les plus influents. Raoul Frary,
ce nom dit tout : les études grecques et
latines n'ont qu'à se bien tenir. Vous
n'ignorez pas que, dans un pamphlet
M. Raoul Frary a signifié leur congé il
Homère et à Virgile, et qu'aux langues
ancienne, il a substitué la géographie,qui
serait désormais la base de l'enseigne-
ment classique.
Parmi les hommes marquants inscrits
sur la liste des adhérents figure M.
Lockroy, et vous n'avez pas oublié que
M. Lockroy, alors qu'il était ministre de -
l'instruction publiqii,profita de l'occasion
que lui offrait la distribution des prix du
concours général pour dire vertement
leur fait,dans un discours qui, d'ailleurs,
étincelait d'esprit, aux études latines et
grecques. -
Le plan d'éducation que proposent ces
messieurs nous a été révélé par M. Gabriel
Compayré : c'est à lui que j'en emprunte
les traits généraux.
Il y aurait désormais deux degrés dans
l'enseignement secondaire. Le premier
degré comprendrait tous les élèves, leq
retiendrait jusqu'à treize ou quatorze
ans. -r
,
« Il est nécessaire, dit le programme de
la ligue, de donner à tous indistinctement
pendant plusieurs années, à l'aide dur
français et d'une ou deux langues viran-
tes, une même culture générale, destinée
tout ensemble à développer les facultés'; -
à en assurer l'équilibre, et à jeter les baseï
du savoir qui convient aa citoyen mo*
derne: instruction morale et civique,'
géographie, premiers éléments des scien-
ces. » ,
Ce programme est bien connu : c'est c
lui de l'enseignement primaire supé-
rieur. Là, ces messieurs n'ont rien in-
nové. Mais à ce premier enseignement
on superposerait divers enseignements
secondaires spéciaux, français ou gréco
latin, selon les aptitudes et les besoins. -'
On apprendra désormais, disent ces
messieurs, les langues classiques en trois
ou quatre ans, par des moyens expédi
tifs.
Des moyens expéditifs ! C'est à se pâmer
de rire! Je comprends que MM. Berger et
Lockroy, qui n'ont jamais de leur vie fait
une classe, mettent leur signature au bas
d'énormités pareilles. Mais Raoul Frary,
qui a passé par l'Ecole normale et le pro-
fessorat ! Il est vrai que Raoul Frary se-
rait, lui, bien plus radical. Il supprime-
rait, s'il ne fallait pas compter avec sei
collègues, les langues anciennes de ]'en-
seignement : ça serait bien plus cxp
ditif encore.
Ça serait au moins plus rationnel!
M. Gabriel Compayré, dont l'autorité est
si grande en ces matières, dit excellent
ment :
« Ce qui est l'erreur fondamentale de
la nouvelle école d'éducation, c'est dè
croire qu'oii puisât: manutctiir sérieusa- ,
ment la culture classique, telle que l'as-
sure seul. un long contact avec les au-
teurs de l'antiquité, en réduisant les let-
tres grecques et latines à la portion con-
grue, en les rejetant à la fin des études
dans un compartiment spécial. 'J
» On nous pardonnera notre franchise :
mais un système est jugé à nos yeux,
quand il parle d'arriver à ses fins a par des
moyens expéditifs ». Il vaudrait mieux re*
noncer tout à fait aux études classjquegf
que les mutiler, les amoindrir, les rendre
inutiles et sans portée, en ne les admettant
que sur le tard pour les écoliers de quaf
torze on quinze ans, qui auront consacfiS
à de tous autres objets leurs premières
années, les plus souples et les plus fe
condes. la culture classique doit être
commencée de bonne heure, ou bien ce
n'est pas la peine de l'essayer. Proscri-
vez-la impitoyablement, ou bien rési-*
gnez-vous à y consacrer beaucoup dq
temps. »
Il est impossible de dire plus juste et
plus net. Tous les hommes au courant des
l'éducation secondaire, j'entends ceuJ(
qui l'ont pratiquée et non les utopistes
de la théorie, haussent les épaules quand
on leur parle de faire lire en classe, au cou-
rant d'une explication sommairemen t
enlevée, Vlliade et l'Enéide dans uneJ
même année, au lieu d'en étudier à fond
quelques morceaux choisis. Ils savent
bien que ces lectures rapides, faites à le
volée, sous l'œil du professeur, par des
élèves qui ne se rendent compte de rien ;
qui n'écoutent pas le plus souvent, ne
laissent aucune trace dans leur esprit
On s'imagine leur faire mieux connaît
tre l'antiquité par ces moyens expéditifs ;
la vérité est qu'ils en savent beaucoup
moins qu'ils n'en apprenaient or les vieU-j
les méthodes. 1 #
En éducation, il n'y a pas de moyerii
expéditifs. Le temps est le premier et la
plus important de tous les facteurs ; l'ese
prit ne garde longtemps que ce qu'on J,
a versé lentement et goutk à goutte.
Il n'y a pas de plus fausse méthode que
de mettre les bouchées doubles. On n'ap-
urendrait cas même. en se hâtant de la
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