Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1890-01-27
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 27 janvier 1890 27 janvier 1890
Description : 1890/01/27 (A19,N6587). 1890/01/27 (A19,N6587).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
Dix-neuvième année. — NG 6,587
CINQ Centimes Paris et Departements - CINQ Centimes
LUNDI 27 JANVIER 1890
JOURNAL REPUBLICAIN
< RÉDACTION
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A. - ÉDOUARD PORTALIS
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M. DELAHAYE INVALIDE
AFFAIRE GOUFFÉ
Monsieur X. et M. Chotteau
La scène du crime
Les perquisitions à Sèvres
Discours de l'empereur Mme
FINANCES PUBLIOUES
Parmi les réformes les plus impor-
tantes qui sollicitent à cette heure
l'attention du Parlement et du public,
il faut citer les modifications de notre
mécanisme budgétaire.
L'institution des trésoriers-payeurs
généraux est depuis longtemps battue
en brèche. Les attaques les plus vives
se sont produites contre ces hauts
fonctionnaires.. On contesté leur
utilité; on dénonce avec amertume
les bénéfices exorbitants qu'ils reti-
rent de leurs charges ; on s'étonne que
des emplois si considérables soient
confiés parfois à des titulaires qui n'y
paraissaient appelés ni par leur com-
pétence ni même par leur situation
personnelle. Les fonctions de tréso-
rier-payeur général ont été, dit-on,
pour quelques rats faméliques, le fro-
mage sauveur où ils trouvèrent, aux
frais des contribuables, gîte et souper
confortablement assurés.
D'exposer les vices de l'institution à
en réclamer la suppression, il n'y
avait qu'un pas, qui a été franchi. La
question des trésoriers-payeurs géné-
raux est auj ourd'hui d'autant plus
pressante que la législature actuelle
va se trouver en face d'un problème
dont la solution s'y lie intimement :
nous voulons parler du renouvelle-
ment du privilège de la Banque. On
n'ignore pas, en effet, que la proposi-
tion a été faite de confier tout ou par-
tie. des attributions des trésoriers-
payeurs généraux, à la Banque réor-
ganisée.
Les défenseurs de cette solution ne
manquent pas d'invoquer l'exemple
de l'Angleterre. Il peut, en effet, être
cité. Un ancien inspecteur des finan-
ces, M. Stourm, vient de donner, dans
un récent ouvrage, les détails les plus
précis, les plus intéressants, sur cette
organisation.
La Banque joue, dans le système
financier anglais, un rôle des plus im-
portants. Deux services considérables
lui sont confiés : c'est elle qui paie les
coupons et opère le transfert des titres
de la dette publique. Elle reçoit de ce
chef une indemnité d'environ cinq
millions de francs.
Il n'est pas sans intérêt de rappeler,
à ce propos, que la Banque de France
a, de 1817 jusqu'en 1819 dans les dé-
partements, jusqu'en 1827 à Paris, fait
le service du paiement des intérêts
de la dette consolidée et le service de
l'amortissement.
En second lieu, la Banque d'Angle-
terre ouvre à l'Etat un compte cou-
rant, dit de l'Echiquier. Bien que
l'institution de l'Echiquier ait été en
effet complètement abolie, le nom en
est resté au Trésor anglais, qui a, sous
cette appellation, un compte ouvert à
la Banaue.
Le crédit en est alimenté par le ver-
sement que font directement de leurs
produits à la Banque les services pu-
blics : postes et télégraphes, doua-
nes, etc. Toutes les recettes du budget
y affluent.
Aucune rétribution n'est donnée à
la Banque pour ce service. Elle en
trouve, en effet, la large rémunéra-
tion dans la jouissance des soldes
énormes que l'Etat laisse dans ses
caisses et qui ont dépassé S60 millions
de francs.
Comment les ressources publiques,
une fois encaissées, sortent-elles des
guichets de la Banque pour être dis-
tribuées selon les votes du Parlement
et les nécessités des administrations
publiques? Rien de plus simple et de
moins dispendieux que l'organisation
du service des dépenses.
Aucun des fonds qui sont inscrits au
crédit du compte courant de l'Echi-
quier ne peut sortir de la Banque sans
l'ordre du contrôleur-auditeur général.
Ce haut fonctionnaire est nommé par
la reine ; mais il ne peut être révoqué
que sur la demande expresse formulée
par les deux Chambres dans une
adresse. Ainsi, tout le service des dé-
penses, c'est-à-dire l'exécution directe
des volontés que le Parlement a mani-
festées en votant le budget, est soumis
au contrôle direct d'un agent dont
seules les Chambres peuvent provo-
quer la révocation.
Les paiements aux créanciers du
Trésor s'effectuent par les mains du
vaumaster oénéral" Qui réside à Lon-
dres. L'organisation si simple, si ré-
duite de ce service, tient à une parti-
cularité des mœurs anglaises. Tout le
monde là-bas use couramment des
banques particulières. Chaque créan-
cier de l'Etat a recours à cet intermé-
diaire pour réclamer, à Londres au
pm/master le montant de sa créance.
Tout au plus fait-on exception pour
quelque pensionné, retiré dans un ha-
meau éloigné et non initié au méca-
nisme des banques. Il reçoit alors l'au-
torisation de toucher à la caisse pu-
blique la plus proche.
Reste le service du contrôle. Quel-
ques esprits malins ont pris texte,
chez nous, de la vacance prolongée du
poste de premier président de la Cour
des comptes, pour proposer la sup-
pression de cette haute magistrature.
Mieux inspirés, ils auraient dû de-
mander qu'on remplaçât le premier
président, mais qu'on supprimât la
Cour des comptes. Ainsi en est-il ou-
tre-Manche.
Là, point d'audiences, point de dé-
libérés, point d'arrêts solennels. Un
seul fonctionnaire, le « contrôleur-au-
diteur général », contrôle les opéra-
tions de tous les comptables publics.
Tels sont quelques-uns des traits de
l'organisation budgétaire anglaise. Il
n'est pas douteux que, sur plus d'un
point, nous ne perdrions rien à nous
en inspirer.
A. Millerand.
illim
Le a XIX0 Siècle » publiera demain la
a Chronique » par M. Francisque Sarcey.
CLOTURE
DU REICHSTAG ALLEMAND
DISCOURS DU TRONE
M. de Bismarck au conseil des minis-
tres. — La loi contre les so-
cialistes rejetée.
(D'UN CORRESPONDANT)
Berlin, 35 janvier.
Hier, peu après l'arrivée du chancelier, le
conseil des ministres s'est réuni, sous la
présidence de l'empereur.
Aujourd'hui, le Parlement a discuté en
troisième lecture le projet de loi contre les
socialistes. Le prince-de Bismarck n'assistait
pas à la séance.
Le député socialiste Bebel a prononcé un
long discours contre le projet de loi ; M.
Herrfurth, ministre de l'intérieur, lui a ré-
pliqué.
La loi. a finalement été repoussée en troi-
sième lecture par 160 voix contre 98.
Les conservateurs ont voté contre la loi,
parce qu'ils la considèrent comme ineffi-
cace sans le paragraphe autorisant l'expul-
sion.
Le centre catholique, les progressistes et
les socialistes ont également voté contre.
Ont voté pour : le parti de l'empire et les
nationaux-libéraux.
M. de Bœtticher a donné ensuite lecture
du décret prononçant la clôture de la ses-
sion, et il a invité la Chambre à se rendre
à six heures à la salle Blanche du Châ-
teau pour entendre lecture du Message
impérial.
Message impérial
Le discours du trône, lu par l'empereur
lui-même, en uniforme de garde du corps,
la tête couverte, était ainsi conçu :
Les trois ans de législature
Les trois années qui viennent de s'écouler
constituent, dans l'histoire de l'empire, une
période tellement importante que je ressens
le besoin de proclamer du haut du trône les
résultats qui ont été atteints grâce à l'action
commune du Reichstag et des gouvernements
confédérés. L'empire a été purement frappé
par la mort de mon grand-père ainsi que par
celle de mon père ; mais le sentiment monar-
chique et la fidélité du peuple se sont pleine-
ment révélés à cette occasion. Je l'en remercie
comme empereur.
Les dépenses militaires et la paix
Le Reichstag mérite de la reconnaissance
pour avoir contribué à rendre pacifique le
double changement de règne. En aidant à ac-
croître la puissance militaire de l'empire, il a
permis à l'Allemagne de conserver dans le
concert des peuples l'influence qui lui est due
et qu'elle emploiera toujours dans l'intérêt de
la paix et de la civilisation.
L'accroissement des prérogatives dont jouis-
sent les corporations ouvrières permettra aux
travailleurs d'augmenter leur bien-être.
Le programme social de Guillaume Ier
Je salue avec une satisfaction toute particu-
lière la mise à exécution des promesses con-
tenues dans le Message de 1881, notamment le
vote de la loi sur l'assurance des ouvriers
contre les accidents et l'invalidité, qui a per-
mis d'assurer l'avenir des classes nécessiteuses
et qui ne manquera pas d'exercer une heu-
reuse influence sur le maintien de la paix in-
térieure de la patrie. Sans doute il reste beau-
coup à faire encore sur ce terrain; mais je suis
convaincu que le peuple n'oubliera pas ce qui
a été fait.
Sur ces fondations, on va pouvoir poursui-
vre l'œuvre d'édification en vue de faire naître
parmi les classes laborieuses la conviction
que nous sommes pénétrés de bon vouloir
pour leurs intérêts légitimes et que l'amélio-
ration de leur sort ne pourra se réaliser que
par des moyens pacifiques et légaux.
Les petits fonctionnaires
Il termine ainsi :
Le Reichstag, par ses votes, a donné aux
gouvernements confédérés l'assurance, ac-
cueillie avec reconnaissance, que le sort des
employés inférieurs et moyens de l'Etat sera
bientôt amélioré.
Au nom des gouvernements confédérés, je
vous remercie de vos travaux accomplis avec
fidélité et dévouement. je souhaite que la pa-
trie continue à se développer pacifiquement et
que la reconnaissance de la population* qui en
résultera vienne récompenser l'activité du
Reichstag.
La session a été ensuite déclarée close.
LA
CONTRE-RÉVOLUTION AU BRÉSIL
(D'UN CORRESPONDANT)
Lisbonne, 25 janvier.
Selon une dépêche privée de Rio-Janeiro,
une nouvelle conspiration contre la Républi-
que aurait été découverte au Brésil. Les cons-
oirateurs appartiendraient à la marine,
L'INVALIDATION
DE M. DELAHAYE
ANNULATION D'UNE ELECTION
BOULANGISTE
M. Delahaye et son concurrent ré-
publicain. — Polémiques électo-
rales. — Une question per-
sonnelle. — Le vote.
M. Joubert, ancien député républicain
d'Indre-et-Loire, a-t-il fait son devoir mi-
litaire pendant la guerre de 1870, et, dès
lors, M. Delahaye, son heureux concurrent
boulangiste aux dernières élections, a-t-il,
en l'accusant du contraire, usè d'une ma-
nœuvre diffamatoire qui doit entraîner sa
nronre invalidation ?
r Telle est la question — fort particulière-
qui a été posée hier à la Chambre et dont la
discussion a occupé la presque totalité de
la séance. A cette double question, la ré-
ponse a été affirmative. C'est ce que prouve
le vote final qui, par 286 voix contre 190, a
prononcé l'invalidation de M. Delahaye.
Cette décision a été rendue contrairement
aux conclusions du nouveau rapport du
bureau compétent.
Du nouveau rapport, disons-nous : c'était
la seconde fois, en effet, que revenait de-
vant la Chambre le cas du député boulan-
giste de Chinon.
La première fois, on se le rappelle sang
doute, l'invalidation avait été, au nom du
même bureau, proposée par le rapporteur,
M. Legludic. Ce dernier avait surtout rele-
vé, à la charge de M. Delahaye les imputa-
tions par lui dirigées contre M. Joubert sur
son attitude en 1870. M. Delahaye s'était dé-
fendu en alléguant le bien fondé desdites
imputations.. ,
En cetétat, la Chambre avaitdecide que i ai-
faire serait renvoyée au bureau. On voulait,
en effet, que la lumière fut faite aussi com-
plète que possible, puisque, par la tour-
nure que la discussion avait prise, l'hon-
neur de M. Joubert, ancien député républi-
cain, se trouvait mis en cause.
M. Joubert fut entendu par le bureau. Les
explications qu'il fournit de sa conduite
passée parurent satisfaisantes. Et cepen-
dant, ce même bureau conclut cette fois à
la validation de M. Delahaye et choisit pour
rapporteur un député de la Droite, M. de
Lanjuinais.
Il est vrai que cette décision avait été
prise et ce choix fait un jour où plusieurs
membres républicains dudit bureau avaient
négligé d'assister à sa réunion.
C'est en cet état que la question revenait
hier devant la Chambre. Et maintenant que
nos lecteurs connaissent et cette question
et la solution qu'elle a reçue, nous nous
reprocherions d'insister longuement sur le
débat assez étendu qui s'est engagé.
Les deux thèses
Voici, en effet, à quoi revient ce débat :
« M. Joubert ne s'est nullement soustrait
à ses obligations militaires en 1870, et M.
Delahaye s'est, en prétendant le Contraire,
servi d'une manœuvre très répréhensible
que la Chambre doit condamner par son
vote. »
Ainsi ont dit successivement M. Legludic,
l'ancien rapporteur, et M. Nivert. j
« M. Joubert a invoque tous les pretextes
possibles pour ne pas partir, et n'est en effet
pas parti. C'est tout au plus s'il a fait mine
de s'engager dans une compagnie de francs-
tireurs qui était une vraie compagnie d'o-
péra-bouffe. Et c'est M. Joubert qui ose
m'accuser de m'être caché dans une sa-
cristie pendant l'invasion ! "Ainsi a répondu
M. Delahaye, appuyé par le nouveau rap-
porteur, M. de Lanjuinais.
A quoi bon s'appesantir sur une discus-
sion aussi spéciale? L'essentiel, c'est qu'on
sache que la Chambre l'a tranchée en fa-
veur du concurrent républicain de M. De-
lahaye.
Avant le vote, M. Boissy-d'Anglas était
venu rappeler que M. Delahaye avait été
déjà condamné cinq fois pour diffama-
tions et injures. « Il est vrai, avait riposté
M. Le Provost de Launay; mais ces condam-
nations, prononcées par des tribunaux cor-
rectionnels, n'entraînaient que de minimes
amendes".
Enfiu,M. Madier-Monjau est venu rappeler
que M.Delahaye appartenait à cette coalition
d'ennemis de la République qui n'ont recu-
lé devant aucune diffamation pour tromper
le pays et qui faisaient répandre à profusion
des caricatures représentant tous les mem-
bres du gouvernement en costume de galé-
riens.
Sur ces paroles, les urnes ont circulé et
l'invalidation de M. Delahaye a été pronon-
cée.
Une question de M. Clech
Au début de la séance, on avait adopté,
par 377 voix contre 52, la proposition de M.
Barodet tendant à la publication des pro-
grammes électoraux des députés.
M. Clech avait en outre posé une ques-
tion au ministre des finances sur l'applica-
tion de l'article de la loi de finances accor-
dant l'exemption de l'impôt mobilier aux
pères de sept enfants.
Ces exemptions en faveur de quelques-
uns aggravent nécessairement, dans les
communes, les charges des autres habi-
tants, disait M. Clech, puisqu'il s'agit d'un
impôt de répartition.
Cette aggravation, qui atteint parfois la
proportion de 10 0/0, est, dans bien des
cas, supportée par des familles pauvres,
alors que ce sont des familles aisées qui
profitent de l'exemption. Est-ce équita-
ble ?
— Non sans doute, a répondu M. Rouvier.
Mais nous n'y pouvons rien pour cette an-
année, la loi de finances de 1800 étant défi-
nitive. Il y aura lieu, lors de la discussion
du budget de 1891, de corriger, ou tout au
moins de modifier cette disposition fâ-
cheuse.
L'incident a pris fin là-dessus.
L'élection de Gien
A la fin de la séance, la Chambre a décidé
de ne pas siéger mardi prochain, afin de
consacrer toute sa journée à la nomination
dans les bureaux de la grande commission
des douanes qui, ont le sait, doit compren-
dre 55 membres.
On a ensuite mis en tête de l'ordre du
jour de jeudi prochain la discussion des
conclusions du rapport fait par M. de La-
nessan au nom de la commission chargée
de l'enquête sur l'élection de Gien.
INCIDENT FRANCO-ALLEMAND
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Colmar, 25 janvier.
Un incident de frontière vient d'être sou-
levé par le gouvernement d'Alsace-Lor-
raine. Il accuse un sous-brigadier des
douanes françaises, relevant de la direction
d'EpinaI, du crime de destruction d'un po-
teau-frontière allemand et de vol sur terri-
toir allemand d'une prise douanière.
Voici la version du gouvernement d'Al-
sàce-Lorraine sur cette obscure affaire :
Depuis quelque temps, de nombreuses
fraudes étaient signalées au fisc. Des con-
trebandiers introduisaient des quantités
considérables d'alcool par la Schlucht et le
Bonhomme. Une surveillance plus active
fut ordonnée et, le dimanche 12 janvier
courant, les douaniers surveillaient tout
particulièrement la frontière en avant du
Bonhomme, en allemand : Diedolshausen.
Vers la soirée, les deux douaniers de ser-
vice aperçurent le sous-brigadier des doua-
nes françaises de service de l'autre côté de
la frontière, et un instant après, débou-
chaient sur la route trois contrebandiers,
ayant chacun sur le dos un petit tonneau.
Les deux douaniers laissèrent aux fraudeurs
le temps de franchir la frontière et de s'en-
gager en forêt par des sentiers de traverse.
C'est alors qu'ils leur crièrent d'arrêter et
se mirent à leur poursuite. Mais les contre-
bandiers jetèrent leurs fûts et reprirent la
direction de la frontière,qu'ils purent fran-
chir sains et saufs. -
N'ayant pu mettre la main sur les frau-
deurs du fisc, les deux gabelous allemands
revinrent sur leurs pas pour s'emparer tout
au moins des fûts d'alcool. Deux avaient
disparu. Aussitôt les douaniers se rendirent
auprès de leurs autorités, firent leur dépo-
sition et accusèrent le sous-britadier des
douanes françaises, sans néanmoins pou-
voir présenter de preuves à l'appui, qu'il
était le coupable de l'enlèvement des fûts.
Un double de ce rapport avec demande
d'enquête a été ensuite adressé au gouver-
nement français, tandis que le gouverne-
ment allemand déléguait lë kreis-director
de Ribeauvillé, ainsi que l'inspecteur des
forêts de Munster, sur les lieux de l'inci-
dent.
La les fonctionnaires allemands consta-
tèrent que le poteau-frontière allemand
avait été miné à sa base, et les deux doua-
niers interrogés émirent l'hypothèse que ce
pourrait bien être le sous-brigadier des
douanes françaises qui fût le coupable,
sans doute pour se venger de la plainte
relativement à l'incident du 12.
Or, le lendemain de l'enquête, c'est-à-dire
le 20 au matin, les douaniers allemands, en
se rendant sur la limite frontière du Die-
dolshausen, constatèrent que le poteau-
frontière allemand avait été violemment
arraché, jeté sur le sol, brisé en morceaux
et les débris transportés sur le territoire
français.
Nouveau rapport, nouvelle plainte au
gouvernement français, nouvelle accusation
contre le sous-brigadier des douanes d'E-
pinal, toujours sans preuve matérielle a
l'appui.
Voilà où en est cette étrange affaire.
Etrange, en effet, par la façon dont les in-
cidents se greffent l'un sur l'autre, et par
l'opiniâtreté des deux douaniers allemands,
— Ballowitz et Reiter, — à accuser, sans
preuve, un douanier français.
Une double enquête contradictoire doit
être ouverte à l'heure qu'il est.
CHRONIQUE
Il fut un temps où les chroniqueurs
qui se plaisaient à esquisser les physiono-
mies de la rue laissaient volontiers percer
quelque attendrissement en parlant du
bouquiniste des quais, surveillant ses
boites où les livres s'offrent aux flâneurs.
Et c'était un thème convenu, fertile en
faciles et touchants développements, que
de le peindre, l'hiver, interrogeant le ciel
avec anxiété, puisque la pluie est l'enne-
mie particulière de son commerce en plein
air, enveloppé dans un caban et souf-
flant sur ses doigts rougis par le froid,
ayant parfois des luttes désespérées à
soutenir contre le vent déchaîné et cruel-
lement malicieux, éprouvant autant de
difficultés à replier ses toiles cirées,en cas
d'alerte, qu'un matelot par une tempête à
carguer ses voiles. Les plus enclins à un
sentimentalisme vague, parmi ces histo-
riens du pavé de Paris, ne manquaient
pas non plus de montrer le bouquiniste
chérissant ses vieux livres, ayant pour
eux de paternelles tendresses, partagé
entre la nécessité de. gagner sa vie et le
regret de se séparer d'eux. Tout cela était
très joli, mais il paraît que l'on fait très
bien fortune, aujourd'hui, dans ce mé-
tier. Un des plus anciens bouquinistes de
Paris, le père Maloret, qui vient de mou-
rir, a laissé un très respectable héritage,
rir, l'héritage d'un notable commerçant.
—
Il n'avait pas, lui, faut-il croire, ce grand
déchirement à céder ses volumes, et il
n'apportait pas tant de sensibilité dans sa
profession.
La physiologie de Paris est toujours à
refaire. La vérité est que le bouquiniste
de la légende, celui qui inspirait ces des-
criptions émues et qu'on considérait
comme une sorte de philosophe, a à peu
près disparu. S'il existe encore, c'est en
des coins perdus et dédaignés. Mais, sur
les quais, les étalages ne sont plus qu'une
succursale des boutiques voisines, où l'on
expose une partie du fonds, comme par
une tradition pittoresque et aussi pour
laisser à l'acheteur quelques illusions.
Les braves gens qui montent la garde au-
tour des livres ne sont plus que des com-
mis, employés par un patron très sé-
rieux, qui fait de temps en temps sa
ronde. Le patriarcal marchand d'autre-
fois a été remplacé par un homme avisé,
qui entend les affaires, un simple libraire
dont les méditations n'ont plus rien que
de très pratique.
Aussi les heureuses trouvailles sont-
elles devenues singulièrement rares dans
ces boîtes des quais. On est loin de l'épo-
que ingénue où Charles Nodier achetait,
pour quelques sous, des merveilles, per-
dues au milieu de tomes dépareillés. Les
bouquinistes connaissent parfaitement la
valeur des livres, à présent, et tendent
même volontiers à l'exagérer. Ce n'est
plus par naïveté qu'ils pèchent : cette
naïveté, ils la laissent à quelques ama-
teurs faisant encore leur apprentissage,
qui croient bonnement « découvrir" dans
ce fouillis, où il y a quelque mise en
scène, un ouvrage qui se trouverait faci-
lement dans Ja prochaine boutique. ,.,
n rit plus d'une fois dans sa barbe, le
bouquiniste actuel, en voyant quelque
badaud tressaillir d'aise, tout-à-coup, en
mettant la main sur un vieux volume,
comme si sa bonne fortune lui avait fait
flairer une rareté. Ce bibliophile inexpert
s'applique à dissimuler sa joie, feint de
marchander avec dédain, d'abandonner
le livre pour un instant, pour ne pas
éveiller l'attention du vendeur ; il use de
tous les stratagèmes habituels, son amour-
propre ne lui permettant pas de supposer
qu'il puisse être dupe. Une fois la
somme payée, il s'éloigne à grands pas,
comme s'il craignait d'être rappelé. Et
l'autre, impassible, songe que cette pré-
tendue a rareté » appartient tout simple-
ment à la catégorie des « rossignols » !
Ainsi les rôles se trouvent renversés, et
c'est le contraire des aventures d'autre-
fois qui arrive.
Encore qu'on l'aperçoive parfois, tête
nue et chaussé de galoches, venant don-
ner familièrement le coup d'œil du maitre
sur les quais, un de ces bouquinistes,
qu'un passant, croyant encore à la lé-
gende, prendrait pour un des bonshommes
de jadis, a rédigé un traité de bibliophi-
lie qui fait autorité. Nodier n'eût pas
prévu cette métaiuorphose du marchand
en plein vent en érudit. Mais tout se mo-
dernise!
Si on ne peut plus avoir que peu d'es-
poir de faire d'admirables rencontres dans
les boites des quais, — si on sait, du
moins, qu'on payera cher ce qui doit être
payé cher, — il est toujours amusant
de bouquiner, même sans la petite émo-
tion de la trouvaille possible, rien que
pour remuer ces livres, souvent indiffé-
rents, mais qui ont chacun une histoire,
qu'on peut imaginer d'après certaines
indications suggestivès : leur fatigue,
leurs taches, leur état de conservation, le
nom de leur possesseur d'un moment
souvent inscrit en quelque coin. Il y a là
un amusant plaisir d'évocation. M. Uzanne
a, un jour, écrit une aimable page où il
se plaisait à tracer le plan d'un ouvrage
qui mériterait la peine d'être fait : l'his-
toire des livres, interprétés par leurs
lecteurs. Comme les spectateurs d'une
pièce manifestent leur joie ou leur émo-
tion, il existe des lecteurs qui ne résistent
pas, en face d'un passage qui les a « em-
poignés M, dans un volume, à exprimer
leurs sentiments. Il citait ainsi un exem-
plaire d'Indiana, où, à tout moment,
quelque bourgeois timoré, quelque Prud-
homme effaré, avait tracé, en face d'un
passage qui l'avait alarmé, ces étonnantes
interjections : « Malheureuse!. que faites-
vous !. Et les principes du devoir ! » Ces
commentaires sur les marges abondent
dans les livres des quais, et on a la vi--
sion de figures évanouies ; de l'humanité
disparue ressuscite pour le rêveur. -'
Parfois aussi, quelqu'un de ces bou-
quins, à présent dédaignés, jetés dans la
boîte au plus humble prix, et dépareillés,
laisse voir encore nombre de mots souli-
gnés, de place en place, et, avec un peu
d'attention, on reconstitue des phrases.
Ce livre fut le truchement de deux amou-
reux, sous ses dehors austères, et on re-
trouve là la trace d'entretiens passion-
nés. Peut-être fut-il longtemps gardé
comme une relique ; puis, un héritier
indifférent, le jugeant sans valeur et sans
intérêt, s'en est débarrassé.
Sur les quais, c'est ce côté extérieur des
livres qui offre peut-être le plus réel in-
térêt. Il y a des signatures jaunies, sur
des premières pages, qui donnent, par
leur prétention, le portrait de leurs an-
ciens acquéreurs, jaloux d'étaler partout
leur paraphe, trahissant le sentiment de
l'orgueil de la possession, même sur un
exemplaire banal. Ou ce sont, sur un
vieux classique latin ou grec, des plai-
santeries d'écoliers d'autrefois, qui mon-
trent les gamineries du petit monde sco-
laire au siècle dernier. Comment encore
tel livre a-t-il traversé cent cinquante
ans (comme je le voyais récemment, pour
un Art épistolaire datéde 17A0)sans avoir
perdu sa virginité, sans que nul ait eu la
curiosité d'en couper les feuillets? Ce sont
les petits mystères des compartiments où
le tarif des volumes offerts ne dépasse
pas quelques sous. -
Paul Ginisty.
L'AFFICHAGE D'UN DISCOURS
DE M. JOFFRIN
Décision de la Fédération socialiste
Dans sa dernière réunion, la Fédération
ouvrière des groupes socialistes vient de
voter les fonds nécessaires à l'affichage
dans Paris du discours que M. Joffrin a pro-
noncé à la Chambre pour le rétablissement
des crédits en faveur d'ouvriers grévistes
votés par le conseil municipal et annulés
par le ministre de l'intérieur.
On se rappelle que c'est au cours de ce
discours que M. Joffrin a été violemment
interrompu par MM. Laguerre, Déroulède
et Millevoye, finalement expulsés.
L'AFFAIRE MAR; INEAU
L'envoi des témoins et la loi anglaise.
- Question à régler.
M. Martineau, qui a définitivement cons-
titué deux témoins, déclarait hier dans les
couloirs de la Chambre qu'avant de les en-
voyer à Jersey, il tenait a régler une ques-
tion d'argent, c'est-à-dire à rembourser au
comité boulangiste les avances que celui-ci
lui a faites au cours de la dernière période
électorale.
Quant à ses témoins, M. Martineau décla-
rait que, pour ne pas les exposer aux ri-
gueurs de la loi anglaise, qui interdit la
provocation au duel, il ne ferait pas con-
naître leurs noms.
Dès que la question d'argent sera réglée,
les témoins de M. Martineau partiront pour
Jersey, à moins que le général Boulanger
ne désigne deux de ses amis, qui se met-
traient en rapport à Paris avec les témoins
de M. Martineau, pour régler le lieu et les
conditions du combat.
MONSIEUR X.
L'AFFAIRE GOUFFÉ
L'anonyme dévoilé. — M. Garanger et
le retour de Gabrielle. — La ques-
tion des 5,000 francs.
Nous sommes privés, aujourd'hui, d'un
quatrième récit du crime débité par Ga-
brielle Bompard, celui qu'on attend, dit
reste, sans impatience, car il est certain, et
où elle avouera sa participation directe
dans l'assassinat de l'huissier.
Le juge d'instruction a eu pitié de la mal-
heureuse fille, que depuis trois jours on
torture par des interrogatoires successifs
qui la brisent, et à la fin desquels on craint
que sa raison ne se. perde tout à fait.
Il y avait un témoin, important par le
rôle court, il est vrai, mais décisif, qu'il a.
joué dans cette curieuse et tragique affaire
Gouffé, qui était resté caché aux yeux du
public, dissimulé derrière la toile de fond.
Nous voulons parler de ce M. X.,qui a ra-
mené Gabrielle Bompard en France, qui l'a
obligée à se constituer prisonnière et à li-
vrer son amant, Michel Eyraud, à la jus-
tice.
Monsieur X.
On sait aujourd'hui qui il est. C'est un
homme distingué, ancien capitaine do
vaisseau, décoré de la Légion d'honneur,
voyageur passionné. Il fut chargé à plu-
sieurs réprises par le gouvernement dg
missions à l'étranger.. ,
Il se nomme Garanger, est âgé d'une
quarantaine d'années et a été un boulevar-
dier connu, qui a laissé d'excellents souve.
nirs à ceux qui l'ont fréquenté au beaix
temps du café Frontin.
Il y a quelques années, il fut pris de l'en;':
vie de voyager. Brusquement, il partit. Il
visita la Birmanie, l'Indo-Chine et le Ton-
kin. Revenant dernièrement de ce pays, i.
passa par l'Amérique. Traversait l'île dgi
Vancouver , l'occasion lui fit rencontre
dans un café que fréquentaient les quel-
ques Français de passage, un compatriotei
qu'on lui présenta comme étant un nomme
Volard, voyageant avec sa fille. Sans aller
jusqu'à l'intimité, les rapports de Volard et
de M. Garanger furent assez suivis. On sa
rencontrait tous les jours ; mais, au bout
d'une semaine, M. Garanger reprenait sa
route vers l'Europe, partant pour San-
Francisco.
Quel ne fut pas son étonnement quanta
deux jours après son arrivée dans cette
nouvelle ville,"il se trouva face à face avec
ses anciennes connaissances de l'île de Van:
couver. -
Kyraud, car c'était lui qui se cachait sous
le nom de Volard, avait flairé dans M. Ga-
ranger une excellente aubaine; le voyageur
n'avait pas caché qu'il voyageait en amateur
et que ses moyens le lui permettaient. Dès
ce moment son but fut arrêté : il s'agissait
de pousser dans les bras de M. Garanger sa
prétendue fille et de l'attirer ensuite dans un
guet-apens où il serait facile de le - dépouil
ler de. ses valeurs.. -
Les rapports furent repris, et M. Garan-
ger s'y laissa prendre, d'autant plus quel
Gabrielle, fatiguée des mauvais traitements
qu'elle avait a subir de la part de son
amant, paraissait éprouver un sentiment
bien naturel pour son nouvel ami.
Eyraud, croyant le moment arrivé, confia
son plan à Gabrielle; mais il avait compté
sans le caprice de samaîtresse,qui se refusa
énérgiquemènt à devenir la complice d'un
nouveau crime.
Elle fit plus, elle raconta les intentions
d'Eyraud a M. Garanger.
Ce dernier n'hésita pas davantage : il ar-
racha Gabrielle des bras d'Eyraud et partie
pour Londres accompagné de la jeune u!!<*.
Ils vinrent à Paris et descendirent dans un
hôtel voisin de la gare Saint-Lazare. Ce se-
rait là seulement que Gabrielle BompardL
raconta à M. Garanger le crime commis par
Eyraud et la part efficace qu'elle y avait
prise.
L'ancien officier de marine n'hésita pas,
il conseilla, obligea presque la jeune fille.
se rendre chez le préfet de police.
La version de M. X.
Mais il y a une autre version qui paraît
bien plus vraisemblable et qui émane de
M. Garanger lui-même :
C'est au Canada, à Québec, quand Ga-
brielle prévint M. Garanger que sa vie était'
en danger, qu'Eyraud voulait l'assassiner
pour le voler, que la jeune fille fit à son
nouvel amant des confidénces relatives au;
crime commis par Eyraud.
M. Garanger décida Gabrielle Bompard à
venir à Paris,renouveler au préfet de police
les déclarations qu'elle venait de lui faire.
Il s'engagea à l'accompagner en France et à
payer tous les frais du voyage. Mais Eyraud
avait réussi, pendant qu'il accompagnait
M. Garanger dans ses pérégrinations, à lui
soutirer une somme de cinq mille francs,
sous divers prétextes frisant l'escroquerie.
»Il est évideat que, quittant Eyraud, cet
argent était perdu pour M. Garanger. C'est
alors que Gabrielle Bompard dit à son pro-
tecteur que son amant avait à Paris un
beau-frère, M. Chotteau, fabricant de che-
mises,qui, se trouvant dans un état de for-
tune excellent, ne ferait aucune difficulté
pour lui rembourser les cinq mille francs
escroqués par Eyraud. -- -
Arrivé a Paris,M. Garanger se rendit chez
M. Chotteau et lui expliqua de quelle façon
Eyraud lui devait cinq mille francs. Ir
ajouta qu'on lui avait fait espérer qu'il
trouverait chez le beau-frère d'Eyraud un
homme disposé à éteindre cette dette.
M. Chotteau entra dans une colère fu-
rieuse, déclara qu'il ne connaissait pas M.
Garanger,bien moins encore la créance que
celui-ci prétendait avoir contre Eyraud, et
que c'était une tentative de chantage qu'on
voulait exercer contre lui. Il mit M. Garan-
gsr @ à la porte.
L'ancien officier de marine eut d'autres
entrevues avec le commerçant, mais jamais
ce dernier.ne consentit à payer les cinq
mille francs dus par son beau-frère.
Nous avons tenu à mettre en première
place le récit qu'a fait M. Garanger de son
entrevue avec M. Chotteau.
M. Chotteau et M. Garanger
Mais voici ce que répond M. Chotteau aux
allégations de l'officier de marine, M. Ga-
ranger :
— Dimanche dernier, M. Garanger, que je
ne connaissais pas, vint rue des Jeûneurs,
à ma maison de commerce et demanda mon
adresse particulière. On lui répondit que,
j'habitais, à Auteuil,le boulevard de Mont-
morency. Il y vint le lendemain et, m'ayant
rencontré, il me dit à brûle-pourpoint :
:- M- Monsieur, je connais votre secret: Ey*
CINQ Centimes Paris et Departements - CINQ Centimes
LUNDI 27 JANVIER 1890
JOURNAL REPUBLICAIN
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A. - ÉDOUARD PORTALIS
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M. DELAHAYE INVALIDE
AFFAIRE GOUFFÉ
Monsieur X. et M. Chotteau
La scène du crime
Les perquisitions à Sèvres
Discours de l'empereur Mme
FINANCES PUBLIOUES
Parmi les réformes les plus impor-
tantes qui sollicitent à cette heure
l'attention du Parlement et du public,
il faut citer les modifications de notre
mécanisme budgétaire.
L'institution des trésoriers-payeurs
généraux est depuis longtemps battue
en brèche. Les attaques les plus vives
se sont produites contre ces hauts
fonctionnaires.. On contesté leur
utilité; on dénonce avec amertume
les bénéfices exorbitants qu'ils reti-
rent de leurs charges ; on s'étonne que
des emplois si considérables soient
confiés parfois à des titulaires qui n'y
paraissaient appelés ni par leur com-
pétence ni même par leur situation
personnelle. Les fonctions de tréso-
rier-payeur général ont été, dit-on,
pour quelques rats faméliques, le fro-
mage sauveur où ils trouvèrent, aux
frais des contribuables, gîte et souper
confortablement assurés.
D'exposer les vices de l'institution à
en réclamer la suppression, il n'y
avait qu'un pas, qui a été franchi. La
question des trésoriers-payeurs géné-
raux est auj ourd'hui d'autant plus
pressante que la législature actuelle
va se trouver en face d'un problème
dont la solution s'y lie intimement :
nous voulons parler du renouvelle-
ment du privilège de la Banque. On
n'ignore pas, en effet, que la proposi-
tion a été faite de confier tout ou par-
tie. des attributions des trésoriers-
payeurs généraux, à la Banque réor-
ganisée.
Les défenseurs de cette solution ne
manquent pas d'invoquer l'exemple
de l'Angleterre. Il peut, en effet, être
cité. Un ancien inspecteur des finan-
ces, M. Stourm, vient de donner, dans
un récent ouvrage, les détails les plus
précis, les plus intéressants, sur cette
organisation.
La Banque joue, dans le système
financier anglais, un rôle des plus im-
portants. Deux services considérables
lui sont confiés : c'est elle qui paie les
coupons et opère le transfert des titres
de la dette publique. Elle reçoit de ce
chef une indemnité d'environ cinq
millions de francs.
Il n'est pas sans intérêt de rappeler,
à ce propos, que la Banque de France
a, de 1817 jusqu'en 1819 dans les dé-
partements, jusqu'en 1827 à Paris, fait
le service du paiement des intérêts
de la dette consolidée et le service de
l'amortissement.
En second lieu, la Banque d'Angle-
terre ouvre à l'Etat un compte cou-
rant, dit de l'Echiquier. Bien que
l'institution de l'Echiquier ait été en
effet complètement abolie, le nom en
est resté au Trésor anglais, qui a, sous
cette appellation, un compte ouvert à
la Banaue.
Le crédit en est alimenté par le ver-
sement que font directement de leurs
produits à la Banque les services pu-
blics : postes et télégraphes, doua-
nes, etc. Toutes les recettes du budget
y affluent.
Aucune rétribution n'est donnée à
la Banque pour ce service. Elle en
trouve, en effet, la large rémunéra-
tion dans la jouissance des soldes
énormes que l'Etat laisse dans ses
caisses et qui ont dépassé S60 millions
de francs.
Comment les ressources publiques,
une fois encaissées, sortent-elles des
guichets de la Banque pour être dis-
tribuées selon les votes du Parlement
et les nécessités des administrations
publiques? Rien de plus simple et de
moins dispendieux que l'organisation
du service des dépenses.
Aucun des fonds qui sont inscrits au
crédit du compte courant de l'Echi-
quier ne peut sortir de la Banque sans
l'ordre du contrôleur-auditeur général.
Ce haut fonctionnaire est nommé par
la reine ; mais il ne peut être révoqué
que sur la demande expresse formulée
par les deux Chambres dans une
adresse. Ainsi, tout le service des dé-
penses, c'est-à-dire l'exécution directe
des volontés que le Parlement a mani-
festées en votant le budget, est soumis
au contrôle direct d'un agent dont
seules les Chambres peuvent provo-
quer la révocation.
Les paiements aux créanciers du
Trésor s'effectuent par les mains du
vaumaster oénéral" Qui réside à Lon-
dres. L'organisation si simple, si ré-
duite de ce service, tient à une parti-
cularité des mœurs anglaises. Tout le
monde là-bas use couramment des
banques particulières. Chaque créan-
cier de l'Etat a recours à cet intermé-
diaire pour réclamer, à Londres au
pm/master le montant de sa créance.
Tout au plus fait-on exception pour
quelque pensionné, retiré dans un ha-
meau éloigné et non initié au méca-
nisme des banques. Il reçoit alors l'au-
torisation de toucher à la caisse pu-
blique la plus proche.
Reste le service du contrôle. Quel-
ques esprits malins ont pris texte,
chez nous, de la vacance prolongée du
poste de premier président de la Cour
des comptes, pour proposer la sup-
pression de cette haute magistrature.
Mieux inspirés, ils auraient dû de-
mander qu'on remplaçât le premier
président, mais qu'on supprimât la
Cour des comptes. Ainsi en est-il ou-
tre-Manche.
Là, point d'audiences, point de dé-
libérés, point d'arrêts solennels. Un
seul fonctionnaire, le « contrôleur-au-
diteur général », contrôle les opéra-
tions de tous les comptables publics.
Tels sont quelques-uns des traits de
l'organisation budgétaire anglaise. Il
n'est pas douteux que, sur plus d'un
point, nous ne perdrions rien à nous
en inspirer.
A. Millerand.
illim
Le a XIX0 Siècle » publiera demain la
a Chronique » par M. Francisque Sarcey.
CLOTURE
DU REICHSTAG ALLEMAND
DISCOURS DU TRONE
M. de Bismarck au conseil des minis-
tres. — La loi contre les so-
cialistes rejetée.
(D'UN CORRESPONDANT)
Berlin, 35 janvier.
Hier, peu après l'arrivée du chancelier, le
conseil des ministres s'est réuni, sous la
présidence de l'empereur.
Aujourd'hui, le Parlement a discuté en
troisième lecture le projet de loi contre les
socialistes. Le prince-de Bismarck n'assistait
pas à la séance.
Le député socialiste Bebel a prononcé un
long discours contre le projet de loi ; M.
Herrfurth, ministre de l'intérieur, lui a ré-
pliqué.
La loi. a finalement été repoussée en troi-
sième lecture par 160 voix contre 98.
Les conservateurs ont voté contre la loi,
parce qu'ils la considèrent comme ineffi-
cace sans le paragraphe autorisant l'expul-
sion.
Le centre catholique, les progressistes et
les socialistes ont également voté contre.
Ont voté pour : le parti de l'empire et les
nationaux-libéraux.
M. de Bœtticher a donné ensuite lecture
du décret prononçant la clôture de la ses-
sion, et il a invité la Chambre à se rendre
à six heures à la salle Blanche du Châ-
teau pour entendre lecture du Message
impérial.
Message impérial
Le discours du trône, lu par l'empereur
lui-même, en uniforme de garde du corps,
la tête couverte, était ainsi conçu :
Les trois ans de législature
Les trois années qui viennent de s'écouler
constituent, dans l'histoire de l'empire, une
période tellement importante que je ressens
le besoin de proclamer du haut du trône les
résultats qui ont été atteints grâce à l'action
commune du Reichstag et des gouvernements
confédérés. L'empire a été purement frappé
par la mort de mon grand-père ainsi que par
celle de mon père ; mais le sentiment monar-
chique et la fidélité du peuple se sont pleine-
ment révélés à cette occasion. Je l'en remercie
comme empereur.
Les dépenses militaires et la paix
Le Reichstag mérite de la reconnaissance
pour avoir contribué à rendre pacifique le
double changement de règne. En aidant à ac-
croître la puissance militaire de l'empire, il a
permis à l'Allemagne de conserver dans le
concert des peuples l'influence qui lui est due
et qu'elle emploiera toujours dans l'intérêt de
la paix et de la civilisation.
L'accroissement des prérogatives dont jouis-
sent les corporations ouvrières permettra aux
travailleurs d'augmenter leur bien-être.
Le programme social de Guillaume Ier
Je salue avec une satisfaction toute particu-
lière la mise à exécution des promesses con-
tenues dans le Message de 1881, notamment le
vote de la loi sur l'assurance des ouvriers
contre les accidents et l'invalidité, qui a per-
mis d'assurer l'avenir des classes nécessiteuses
et qui ne manquera pas d'exercer une heu-
reuse influence sur le maintien de la paix in-
térieure de la patrie. Sans doute il reste beau-
coup à faire encore sur ce terrain; mais je suis
convaincu que le peuple n'oubliera pas ce qui
a été fait.
Sur ces fondations, on va pouvoir poursui-
vre l'œuvre d'édification en vue de faire naître
parmi les classes laborieuses la conviction
que nous sommes pénétrés de bon vouloir
pour leurs intérêts légitimes et que l'amélio-
ration de leur sort ne pourra se réaliser que
par des moyens pacifiques et légaux.
Les petits fonctionnaires
Il termine ainsi :
Le Reichstag, par ses votes, a donné aux
gouvernements confédérés l'assurance, ac-
cueillie avec reconnaissance, que le sort des
employés inférieurs et moyens de l'Etat sera
bientôt amélioré.
Au nom des gouvernements confédérés, je
vous remercie de vos travaux accomplis avec
fidélité et dévouement. je souhaite que la pa-
trie continue à se développer pacifiquement et
que la reconnaissance de la population* qui en
résultera vienne récompenser l'activité du
Reichstag.
La session a été ensuite déclarée close.
LA
CONTRE-RÉVOLUTION AU BRÉSIL
(D'UN CORRESPONDANT)
Lisbonne, 25 janvier.
Selon une dépêche privée de Rio-Janeiro,
une nouvelle conspiration contre la Républi-
que aurait été découverte au Brésil. Les cons-
oirateurs appartiendraient à la marine,
L'INVALIDATION
DE M. DELAHAYE
ANNULATION D'UNE ELECTION
BOULANGISTE
M. Delahaye et son concurrent ré-
publicain. — Polémiques électo-
rales. — Une question per-
sonnelle. — Le vote.
M. Joubert, ancien député républicain
d'Indre-et-Loire, a-t-il fait son devoir mi-
litaire pendant la guerre de 1870, et, dès
lors, M. Delahaye, son heureux concurrent
boulangiste aux dernières élections, a-t-il,
en l'accusant du contraire, usè d'une ma-
nœuvre diffamatoire qui doit entraîner sa
nronre invalidation ?
r Telle est la question — fort particulière-
qui a été posée hier à la Chambre et dont la
discussion a occupé la presque totalité de
la séance. A cette double question, la ré-
ponse a été affirmative. C'est ce que prouve
le vote final qui, par 286 voix contre 190, a
prononcé l'invalidation de M. Delahaye.
Cette décision a été rendue contrairement
aux conclusions du nouveau rapport du
bureau compétent.
Du nouveau rapport, disons-nous : c'était
la seconde fois, en effet, que revenait de-
vant la Chambre le cas du député boulan-
giste de Chinon.
La première fois, on se le rappelle sang
doute, l'invalidation avait été, au nom du
même bureau, proposée par le rapporteur,
M. Legludic. Ce dernier avait surtout rele-
vé, à la charge de M. Delahaye les imputa-
tions par lui dirigées contre M. Joubert sur
son attitude en 1870. M. Delahaye s'était dé-
fendu en alléguant le bien fondé desdites
imputations.. ,
En cetétat, la Chambre avaitdecide que i ai-
faire serait renvoyée au bureau. On voulait,
en effet, que la lumière fut faite aussi com-
plète que possible, puisque, par la tour-
nure que la discussion avait prise, l'hon-
neur de M. Joubert, ancien député républi-
cain, se trouvait mis en cause.
M. Joubert fut entendu par le bureau. Les
explications qu'il fournit de sa conduite
passée parurent satisfaisantes. Et cepen-
dant, ce même bureau conclut cette fois à
la validation de M. Delahaye et choisit pour
rapporteur un député de la Droite, M. de
Lanjuinais.
Il est vrai que cette décision avait été
prise et ce choix fait un jour où plusieurs
membres républicains dudit bureau avaient
négligé d'assister à sa réunion.
C'est en cet état que la question revenait
hier devant la Chambre. Et maintenant que
nos lecteurs connaissent et cette question
et la solution qu'elle a reçue, nous nous
reprocherions d'insister longuement sur le
débat assez étendu qui s'est engagé.
Les deux thèses
Voici, en effet, à quoi revient ce débat :
« M. Joubert ne s'est nullement soustrait
à ses obligations militaires en 1870, et M.
Delahaye s'est, en prétendant le Contraire,
servi d'une manœuvre très répréhensible
que la Chambre doit condamner par son
vote. »
Ainsi ont dit successivement M. Legludic,
l'ancien rapporteur, et M. Nivert. j
« M. Joubert a invoque tous les pretextes
possibles pour ne pas partir, et n'est en effet
pas parti. C'est tout au plus s'il a fait mine
de s'engager dans une compagnie de francs-
tireurs qui était une vraie compagnie d'o-
péra-bouffe. Et c'est M. Joubert qui ose
m'accuser de m'être caché dans une sa-
cristie pendant l'invasion ! "Ainsi a répondu
M. Delahaye, appuyé par le nouveau rap-
porteur, M. de Lanjuinais.
A quoi bon s'appesantir sur une discus-
sion aussi spéciale? L'essentiel, c'est qu'on
sache que la Chambre l'a tranchée en fa-
veur du concurrent républicain de M. De-
lahaye.
Avant le vote, M. Boissy-d'Anglas était
venu rappeler que M. Delahaye avait été
déjà condamné cinq fois pour diffama-
tions et injures. « Il est vrai, avait riposté
M. Le Provost de Launay; mais ces condam-
nations, prononcées par des tribunaux cor-
rectionnels, n'entraînaient que de minimes
amendes".
Enfiu,M. Madier-Monjau est venu rappeler
que M.Delahaye appartenait à cette coalition
d'ennemis de la République qui n'ont recu-
lé devant aucune diffamation pour tromper
le pays et qui faisaient répandre à profusion
des caricatures représentant tous les mem-
bres du gouvernement en costume de galé-
riens.
Sur ces paroles, les urnes ont circulé et
l'invalidation de M. Delahaye a été pronon-
cée.
Une question de M. Clech
Au début de la séance, on avait adopté,
par 377 voix contre 52, la proposition de M.
Barodet tendant à la publication des pro-
grammes électoraux des députés.
M. Clech avait en outre posé une ques-
tion au ministre des finances sur l'applica-
tion de l'article de la loi de finances accor-
dant l'exemption de l'impôt mobilier aux
pères de sept enfants.
Ces exemptions en faveur de quelques-
uns aggravent nécessairement, dans les
communes, les charges des autres habi-
tants, disait M. Clech, puisqu'il s'agit d'un
impôt de répartition.
Cette aggravation, qui atteint parfois la
proportion de 10 0/0, est, dans bien des
cas, supportée par des familles pauvres,
alors que ce sont des familles aisées qui
profitent de l'exemption. Est-ce équita-
ble ?
— Non sans doute, a répondu M. Rouvier.
Mais nous n'y pouvons rien pour cette an-
année, la loi de finances de 1800 étant défi-
nitive. Il y aura lieu, lors de la discussion
du budget de 1891, de corriger, ou tout au
moins de modifier cette disposition fâ-
cheuse.
L'incident a pris fin là-dessus.
L'élection de Gien
A la fin de la séance, la Chambre a décidé
de ne pas siéger mardi prochain, afin de
consacrer toute sa journée à la nomination
dans les bureaux de la grande commission
des douanes qui, ont le sait, doit compren-
dre 55 membres.
On a ensuite mis en tête de l'ordre du
jour de jeudi prochain la discussion des
conclusions du rapport fait par M. de La-
nessan au nom de la commission chargée
de l'enquête sur l'élection de Gien.
INCIDENT FRANCO-ALLEMAND
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Colmar, 25 janvier.
Un incident de frontière vient d'être sou-
levé par le gouvernement d'Alsace-Lor-
raine. Il accuse un sous-brigadier des
douanes françaises, relevant de la direction
d'EpinaI, du crime de destruction d'un po-
teau-frontière allemand et de vol sur terri-
toir allemand d'une prise douanière.
Voici la version du gouvernement d'Al-
sàce-Lorraine sur cette obscure affaire :
Depuis quelque temps, de nombreuses
fraudes étaient signalées au fisc. Des con-
trebandiers introduisaient des quantités
considérables d'alcool par la Schlucht et le
Bonhomme. Une surveillance plus active
fut ordonnée et, le dimanche 12 janvier
courant, les douaniers surveillaient tout
particulièrement la frontière en avant du
Bonhomme, en allemand : Diedolshausen.
Vers la soirée, les deux douaniers de ser-
vice aperçurent le sous-brigadier des doua-
nes françaises de service de l'autre côté de
la frontière, et un instant après, débou-
chaient sur la route trois contrebandiers,
ayant chacun sur le dos un petit tonneau.
Les deux douaniers laissèrent aux fraudeurs
le temps de franchir la frontière et de s'en-
gager en forêt par des sentiers de traverse.
C'est alors qu'ils leur crièrent d'arrêter et
se mirent à leur poursuite. Mais les contre-
bandiers jetèrent leurs fûts et reprirent la
direction de la frontière,qu'ils purent fran-
chir sains et saufs. -
N'ayant pu mettre la main sur les frau-
deurs du fisc, les deux gabelous allemands
revinrent sur leurs pas pour s'emparer tout
au moins des fûts d'alcool. Deux avaient
disparu. Aussitôt les douaniers se rendirent
auprès de leurs autorités, firent leur dépo-
sition et accusèrent le sous-britadier des
douanes françaises, sans néanmoins pou-
voir présenter de preuves à l'appui, qu'il
était le coupable de l'enlèvement des fûts.
Un double de ce rapport avec demande
d'enquête a été ensuite adressé au gouver-
nement français, tandis que le gouverne-
ment allemand déléguait lë kreis-director
de Ribeauvillé, ainsi que l'inspecteur des
forêts de Munster, sur les lieux de l'inci-
dent.
La les fonctionnaires allemands consta-
tèrent que le poteau-frontière allemand
avait été miné à sa base, et les deux doua-
niers interrogés émirent l'hypothèse que ce
pourrait bien être le sous-brigadier des
douanes françaises qui fût le coupable,
sans doute pour se venger de la plainte
relativement à l'incident du 12.
Or, le lendemain de l'enquête, c'est-à-dire
le 20 au matin, les douaniers allemands, en
se rendant sur la limite frontière du Die-
dolshausen, constatèrent que le poteau-
frontière allemand avait été violemment
arraché, jeté sur le sol, brisé en morceaux
et les débris transportés sur le territoire
français.
Nouveau rapport, nouvelle plainte au
gouvernement français, nouvelle accusation
contre le sous-brigadier des douanes d'E-
pinal, toujours sans preuve matérielle a
l'appui.
Voilà où en est cette étrange affaire.
Etrange, en effet, par la façon dont les in-
cidents se greffent l'un sur l'autre, et par
l'opiniâtreté des deux douaniers allemands,
— Ballowitz et Reiter, — à accuser, sans
preuve, un douanier français.
Une double enquête contradictoire doit
être ouverte à l'heure qu'il est.
CHRONIQUE
Il fut un temps où les chroniqueurs
qui se plaisaient à esquisser les physiono-
mies de la rue laissaient volontiers percer
quelque attendrissement en parlant du
bouquiniste des quais, surveillant ses
boites où les livres s'offrent aux flâneurs.
Et c'était un thème convenu, fertile en
faciles et touchants développements, que
de le peindre, l'hiver, interrogeant le ciel
avec anxiété, puisque la pluie est l'enne-
mie particulière de son commerce en plein
air, enveloppé dans un caban et souf-
flant sur ses doigts rougis par le froid,
ayant parfois des luttes désespérées à
soutenir contre le vent déchaîné et cruel-
lement malicieux, éprouvant autant de
difficultés à replier ses toiles cirées,en cas
d'alerte, qu'un matelot par une tempête à
carguer ses voiles. Les plus enclins à un
sentimentalisme vague, parmi ces histo-
riens du pavé de Paris, ne manquaient
pas non plus de montrer le bouquiniste
chérissant ses vieux livres, ayant pour
eux de paternelles tendresses, partagé
entre la nécessité de. gagner sa vie et le
regret de se séparer d'eux. Tout cela était
très joli, mais il paraît que l'on fait très
bien fortune, aujourd'hui, dans ce mé-
tier. Un des plus anciens bouquinistes de
Paris, le père Maloret, qui vient de mou-
rir, a laissé un très respectable héritage,
rir, l'héritage d'un notable commerçant.
—
Il n'avait pas, lui, faut-il croire, ce grand
déchirement à céder ses volumes, et il
n'apportait pas tant de sensibilité dans sa
profession.
La physiologie de Paris est toujours à
refaire. La vérité est que le bouquiniste
de la légende, celui qui inspirait ces des-
criptions émues et qu'on considérait
comme une sorte de philosophe, a à peu
près disparu. S'il existe encore, c'est en
des coins perdus et dédaignés. Mais, sur
les quais, les étalages ne sont plus qu'une
succursale des boutiques voisines, où l'on
expose une partie du fonds, comme par
une tradition pittoresque et aussi pour
laisser à l'acheteur quelques illusions.
Les braves gens qui montent la garde au-
tour des livres ne sont plus que des com-
mis, employés par un patron très sé-
rieux, qui fait de temps en temps sa
ronde. Le patriarcal marchand d'autre-
fois a été remplacé par un homme avisé,
qui entend les affaires, un simple libraire
dont les méditations n'ont plus rien que
de très pratique.
Aussi les heureuses trouvailles sont-
elles devenues singulièrement rares dans
ces boîtes des quais. On est loin de l'épo-
que ingénue où Charles Nodier achetait,
pour quelques sous, des merveilles, per-
dues au milieu de tomes dépareillés. Les
bouquinistes connaissent parfaitement la
valeur des livres, à présent, et tendent
même volontiers à l'exagérer. Ce n'est
plus par naïveté qu'ils pèchent : cette
naïveté, ils la laissent à quelques ama-
teurs faisant encore leur apprentissage,
qui croient bonnement « découvrir" dans
ce fouillis, où il y a quelque mise en
scène, un ouvrage qui se trouverait faci-
lement dans Ja prochaine boutique. ,.,
n rit plus d'une fois dans sa barbe, le
bouquiniste actuel, en voyant quelque
badaud tressaillir d'aise, tout-à-coup, en
mettant la main sur un vieux volume,
comme si sa bonne fortune lui avait fait
flairer une rareté. Ce bibliophile inexpert
s'applique à dissimuler sa joie, feint de
marchander avec dédain, d'abandonner
le livre pour un instant, pour ne pas
éveiller l'attention du vendeur ; il use de
tous les stratagèmes habituels, son amour-
propre ne lui permettant pas de supposer
qu'il puisse être dupe. Une fois la
somme payée, il s'éloigne à grands pas,
comme s'il craignait d'être rappelé. Et
l'autre, impassible, songe que cette pré-
tendue a rareté » appartient tout simple-
ment à la catégorie des « rossignols » !
Ainsi les rôles se trouvent renversés, et
c'est le contraire des aventures d'autre-
fois qui arrive.
Encore qu'on l'aperçoive parfois, tête
nue et chaussé de galoches, venant don-
ner familièrement le coup d'œil du maitre
sur les quais, un de ces bouquinistes,
qu'un passant, croyant encore à la lé-
gende, prendrait pour un des bonshommes
de jadis, a rédigé un traité de bibliophi-
lie qui fait autorité. Nodier n'eût pas
prévu cette métaiuorphose du marchand
en plein vent en érudit. Mais tout se mo-
dernise!
Si on ne peut plus avoir que peu d'es-
poir de faire d'admirables rencontres dans
les boites des quais, — si on sait, du
moins, qu'on payera cher ce qui doit être
payé cher, — il est toujours amusant
de bouquiner, même sans la petite émo-
tion de la trouvaille possible, rien que
pour remuer ces livres, souvent indiffé-
rents, mais qui ont chacun une histoire,
qu'on peut imaginer d'après certaines
indications suggestivès : leur fatigue,
leurs taches, leur état de conservation, le
nom de leur possesseur d'un moment
souvent inscrit en quelque coin. Il y a là
un amusant plaisir d'évocation. M. Uzanne
a, un jour, écrit une aimable page où il
se plaisait à tracer le plan d'un ouvrage
qui mériterait la peine d'être fait : l'his-
toire des livres, interprétés par leurs
lecteurs. Comme les spectateurs d'une
pièce manifestent leur joie ou leur émo-
tion, il existe des lecteurs qui ne résistent
pas, en face d'un passage qui les a « em-
poignés M, dans un volume, à exprimer
leurs sentiments. Il citait ainsi un exem-
plaire d'Indiana, où, à tout moment,
quelque bourgeois timoré, quelque Prud-
homme effaré, avait tracé, en face d'un
passage qui l'avait alarmé, ces étonnantes
interjections : « Malheureuse!. que faites-
vous !. Et les principes du devoir ! » Ces
commentaires sur les marges abondent
dans les livres des quais, et on a la vi--
sion de figures évanouies ; de l'humanité
disparue ressuscite pour le rêveur. -'
Parfois aussi, quelqu'un de ces bou-
quins, à présent dédaignés, jetés dans la
boîte au plus humble prix, et dépareillés,
laisse voir encore nombre de mots souli-
gnés, de place en place, et, avec un peu
d'attention, on reconstitue des phrases.
Ce livre fut le truchement de deux amou-
reux, sous ses dehors austères, et on re-
trouve là la trace d'entretiens passion-
nés. Peut-être fut-il longtemps gardé
comme une relique ; puis, un héritier
indifférent, le jugeant sans valeur et sans
intérêt, s'en est débarrassé.
Sur les quais, c'est ce côté extérieur des
livres qui offre peut-être le plus réel in-
térêt. Il y a des signatures jaunies, sur
des premières pages, qui donnent, par
leur prétention, le portrait de leurs an-
ciens acquéreurs, jaloux d'étaler partout
leur paraphe, trahissant le sentiment de
l'orgueil de la possession, même sur un
exemplaire banal. Ou ce sont, sur un
vieux classique latin ou grec, des plai-
santeries d'écoliers d'autrefois, qui mon-
trent les gamineries du petit monde sco-
laire au siècle dernier. Comment encore
tel livre a-t-il traversé cent cinquante
ans (comme je le voyais récemment, pour
un Art épistolaire datéde 17A0)sans avoir
perdu sa virginité, sans que nul ait eu la
curiosité d'en couper les feuillets? Ce sont
les petits mystères des compartiments où
le tarif des volumes offerts ne dépasse
pas quelques sous. -
Paul Ginisty.
L'AFFICHAGE D'UN DISCOURS
DE M. JOFFRIN
Décision de la Fédération socialiste
Dans sa dernière réunion, la Fédération
ouvrière des groupes socialistes vient de
voter les fonds nécessaires à l'affichage
dans Paris du discours que M. Joffrin a pro-
noncé à la Chambre pour le rétablissement
des crédits en faveur d'ouvriers grévistes
votés par le conseil municipal et annulés
par le ministre de l'intérieur.
On se rappelle que c'est au cours de ce
discours que M. Joffrin a été violemment
interrompu par MM. Laguerre, Déroulède
et Millevoye, finalement expulsés.
L'AFFAIRE MAR; INEAU
L'envoi des témoins et la loi anglaise.
- Question à régler.
M. Martineau, qui a définitivement cons-
titué deux témoins, déclarait hier dans les
couloirs de la Chambre qu'avant de les en-
voyer à Jersey, il tenait a régler une ques-
tion d'argent, c'est-à-dire à rembourser au
comité boulangiste les avances que celui-ci
lui a faites au cours de la dernière période
électorale.
Quant à ses témoins, M. Martineau décla-
rait que, pour ne pas les exposer aux ri-
gueurs de la loi anglaise, qui interdit la
provocation au duel, il ne ferait pas con-
naître leurs noms.
Dès que la question d'argent sera réglée,
les témoins de M. Martineau partiront pour
Jersey, à moins que le général Boulanger
ne désigne deux de ses amis, qui se met-
traient en rapport à Paris avec les témoins
de M. Martineau, pour régler le lieu et les
conditions du combat.
MONSIEUR X.
L'AFFAIRE GOUFFÉ
L'anonyme dévoilé. — M. Garanger et
le retour de Gabrielle. — La ques-
tion des 5,000 francs.
Nous sommes privés, aujourd'hui, d'un
quatrième récit du crime débité par Ga-
brielle Bompard, celui qu'on attend, dit
reste, sans impatience, car il est certain, et
où elle avouera sa participation directe
dans l'assassinat de l'huissier.
Le juge d'instruction a eu pitié de la mal-
heureuse fille, que depuis trois jours on
torture par des interrogatoires successifs
qui la brisent, et à la fin desquels on craint
que sa raison ne se. perde tout à fait.
Il y avait un témoin, important par le
rôle court, il est vrai, mais décisif, qu'il a.
joué dans cette curieuse et tragique affaire
Gouffé, qui était resté caché aux yeux du
public, dissimulé derrière la toile de fond.
Nous voulons parler de ce M. X.,qui a ra-
mené Gabrielle Bompard en France, qui l'a
obligée à se constituer prisonnière et à li-
vrer son amant, Michel Eyraud, à la jus-
tice.
Monsieur X.
On sait aujourd'hui qui il est. C'est un
homme distingué, ancien capitaine do
vaisseau, décoré de la Légion d'honneur,
voyageur passionné. Il fut chargé à plu-
sieurs réprises par le gouvernement dg
missions à l'étranger.. ,
Il se nomme Garanger, est âgé d'une
quarantaine d'années et a été un boulevar-
dier connu, qui a laissé d'excellents souve.
nirs à ceux qui l'ont fréquenté au beaix
temps du café Frontin.
Il y a quelques années, il fut pris de l'en;':
vie de voyager. Brusquement, il partit. Il
visita la Birmanie, l'Indo-Chine et le Ton-
kin. Revenant dernièrement de ce pays, i.
passa par l'Amérique. Traversait l'île dgi
Vancouver , l'occasion lui fit rencontre
dans un café que fréquentaient les quel-
ques Français de passage, un compatriotei
qu'on lui présenta comme étant un nomme
Volard, voyageant avec sa fille. Sans aller
jusqu'à l'intimité, les rapports de Volard et
de M. Garanger furent assez suivis. On sa
rencontrait tous les jours ; mais, au bout
d'une semaine, M. Garanger reprenait sa
route vers l'Europe, partant pour San-
Francisco.
Quel ne fut pas son étonnement quanta
deux jours après son arrivée dans cette
nouvelle ville,"il se trouva face à face avec
ses anciennes connaissances de l'île de Van:
couver. -
Kyraud, car c'était lui qui se cachait sous
le nom de Volard, avait flairé dans M. Ga-
ranger une excellente aubaine; le voyageur
n'avait pas caché qu'il voyageait en amateur
et que ses moyens le lui permettaient. Dès
ce moment son but fut arrêté : il s'agissait
de pousser dans les bras de M. Garanger sa
prétendue fille et de l'attirer ensuite dans un
guet-apens où il serait facile de le - dépouil
ler de. ses valeurs.. -
Les rapports furent repris, et M. Garan-
ger s'y laissa prendre, d'autant plus quel
Gabrielle, fatiguée des mauvais traitements
qu'elle avait a subir de la part de son
amant, paraissait éprouver un sentiment
bien naturel pour son nouvel ami.
Eyraud, croyant le moment arrivé, confia
son plan à Gabrielle; mais il avait compté
sans le caprice de samaîtresse,qui se refusa
énérgiquemènt à devenir la complice d'un
nouveau crime.
Elle fit plus, elle raconta les intentions
d'Eyraud a M. Garanger.
Ce dernier n'hésita pas davantage : il ar-
racha Gabrielle des bras d'Eyraud et partie
pour Londres accompagné de la jeune u!!<*.
Ils vinrent à Paris et descendirent dans un
hôtel voisin de la gare Saint-Lazare. Ce se-
rait là seulement que Gabrielle BompardL
raconta à M. Garanger le crime commis par
Eyraud et la part efficace qu'elle y avait
prise.
L'ancien officier de marine n'hésita pas,
il conseilla, obligea presque la jeune fille.
se rendre chez le préfet de police.
La version de M. X.
Mais il y a une autre version qui paraît
bien plus vraisemblable et qui émane de
M. Garanger lui-même :
C'est au Canada, à Québec, quand Ga-
brielle prévint M. Garanger que sa vie était'
en danger, qu'Eyraud voulait l'assassiner
pour le voler, que la jeune fille fit à son
nouvel amant des confidénces relatives au;
crime commis par Eyraud.
M. Garanger décida Gabrielle Bompard à
venir à Paris,renouveler au préfet de police
les déclarations qu'elle venait de lui faire.
Il s'engagea à l'accompagner en France et à
payer tous les frais du voyage. Mais Eyraud
avait réussi, pendant qu'il accompagnait
M. Garanger dans ses pérégrinations, à lui
soutirer une somme de cinq mille francs,
sous divers prétextes frisant l'escroquerie.
»Il est évideat que, quittant Eyraud, cet
argent était perdu pour M. Garanger. C'est
alors que Gabrielle Bompard dit à son pro-
tecteur que son amant avait à Paris un
beau-frère, M. Chotteau, fabricant de che-
mises,qui, se trouvant dans un état de for-
tune excellent, ne ferait aucune difficulté
pour lui rembourser les cinq mille francs
escroqués par Eyraud. -- -
Arrivé a Paris,M. Garanger se rendit chez
M. Chotteau et lui expliqua de quelle façon
Eyraud lui devait cinq mille francs. Ir
ajouta qu'on lui avait fait espérer qu'il
trouverait chez le beau-frère d'Eyraud un
homme disposé à éteindre cette dette.
M. Chotteau entra dans une colère fu-
rieuse, déclara qu'il ne connaissait pas M.
Garanger,bien moins encore la créance que
celui-ci prétendait avoir contre Eyraud, et
que c'était une tentative de chantage qu'on
voulait exercer contre lui. Il mit M. Garan-
gsr @ à la porte.
L'ancien officier de marine eut d'autres
entrevues avec le commerçant, mais jamais
ce dernier.ne consentit à payer les cinq
mille francs dus par son beau-frère.
Nous avons tenu à mettre en première
place le récit qu'a fait M. Garanger de son
entrevue avec M. Chotteau.
M. Chotteau et M. Garanger
Mais voici ce que répond M. Chotteau aux
allégations de l'officier de marine, M. Ga-
ranger :
— Dimanche dernier, M. Garanger, que je
ne connaissais pas, vint rue des Jeûneurs,
à ma maison de commerce et demanda mon
adresse particulière. On lui répondit que,
j'habitais, à Auteuil,le boulevard de Mont-
morency. Il y vint le lendemain et, m'ayant
rencontré, il me dit à brûle-pourpoint :
:- M- Monsieur, je connais votre secret: Ey*
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