Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1890-01-26
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32757974m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 68249 Nombre total de vues : 68249
Description : 26 janvier 1890 26 janvier 1890
Description : 1890/01/26 (A19,N6586). 1890/01/26 (A19,N6586).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7560125f
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
Dix-neuvième année. — N° 6,586 CINO Centimes - Paris et Départemente C:::O Centimes DrU.\NCHE Õ JANVIER 1890"
",
, :.
JOURNAL RÉPUBLICAIN
- '-'; RÉDACTION ,-
124ap Rue Mont= artre
PARIS
DIRECTEUR POLITIQUE
A. - ÉDOUARD PORTALIS
PRIX DE L'ABONNEMENT :
tarta. Ttàinoia, 61.; Siiawii, UL; Dit.., 201
Départements -' 7 1.; 12 i.;. — 24 L
Pnion Postale — 91.; — 16 f.. — 32 L
Mm abonnements partent des lm et 15 de chaque mois.
Adresse télégraphique : XIX. SIÈCLE — PARIS
ADMINISTRATION
l*i3, Rue Montrziartre
PARIS
ItSISSEURS D'A N NON CES
MM. LAGRANGE, CERF et aa
0, place de la Bourse, 8
PRIX DE L'ABONNEMENT :
IPadi trobmis, 6 I.i Simoit, llf.;ha, 20f.
Départements — 71.; — 121.; — 24 L
Union Postale — 9L: — 16L; — 32L
Lei abonnements partent des 187 et 15 de chaque moi8
Adresse télégraphique : XXX* SIÈCLE — PARIS
L'ELECTION DE GIEN
RAPPORT DE M. DE LANESSAN
AFFAIRE GOUFFÉ
La dernière version de Gabrielle
L'agent d'affaires Remy Launay
LA PREMIÈRE DES BOUFFES
L'H as Droits
La Droite de la Chambre a tenu
je uli matin, dans le local de son se-
crétariat général, une réunion plé-
nière â laquelle assistaient 57 députés
sur 170 réactionnaires qui siègent au
Palais-Bourbon. Il ne s'agissait pas,
ainsi que M. Freppel l'a expliqué, de
constituer un groupe spécial, mais de
fournir à tous les députés conserva-
teurs, sans distinction de nuances, le
moyen de se rencojatrer et de se con-
certer. On a, paraît-il, fait des .appels
pressants à la concorde, ce qui laisse-
rait supposer qu'il y avait des diver-
gences à réduire, et l'on peut même
constater que, malgré l'éloquence des
orateurs, elles n'ont pas été réduites.
Le but que poursuivaient les pro-
moteurs de la réunion était de doter la
Droite d'une organisation analogue à
celle qu'elle s'était donnée dans la der-
nière Chambre. M. Paul de Cassagnac
qui, récemment, affirmait dans son
journal qu'il «n'était pas vrai » qu'au-
cun membre de la Droite songeât à at-
ténuer son hostilité contre la Républi-
que, parce que tous avaient été élus
par les ennemis irréconciliables de la
République, a voulu donner à cette af-
firmation une sanction expérimentale.
Il a demandé à la réunion de se don-
ner trois présidents, correspondant
aux trois opinions monarchiques de la
Droite: M. de La Rochefoucauld pour
les royalistes, M. Jolibois pour les im-
périalistes, et M. de Mackau pour les
a solutionnistes", c'est-à-dire pour les
monarchistes qui se déclaraient jadis
prêts à suivre indifféremment « Phi-
lippe ou Victor », - a le premier qui
marchera". C'était donc purement et
simplement l'ancienne Union des droi-
tes qu'il s'agissait de ressusciter, et sa
résurrection même devait être la ré-
ponse à ceux qui faisaient courir de
méchants bruits sur la communauté
de vues de tous les droitiers.
Il s'est trouvé que cette proposition,
sur laquelle on comptait pour démon-
trer la concorde, a eu des effets tout
différents. Les membres de la réunion
qui inclinent vers la Droite constitu-
tionnelle ont refusé d'accepter la clas-
sification qu'on voulait leur imposer.
Ils ont dit qu'en dehors des trois caté-
gories indiquées par M. de Cassagnac
il existait des hommes qui, apparte-
nant à la Droite par les principes con-
servateurs, avaient en vue une politi-
que différente de celle des monarchis-
tes, et M. Piou s'est très nettement
expliqué en disant : « Pour ma part,
je ne représente ici ni la royauté ni
l'empire; je suis simplement un dé-
puté conservateur. » Il a fallu, pour
empêcher les députés de cette opinion
de se retirer et pour prévenir le scan-
dale d'une rupture publique, porter à
quatre le nombre des présidents.
Malgré cet incident significatif, M.
Paul de Cassagnac célèbre, dans VAu-
torité, l'union de la Droite et soutient
que la Droite vient de faire une « ma-
nifestation" qui assure sa force. Nous
le verrons bien ; nous verrons aussi
comment est accueillie la décision des
57 par les 113 députés réactionnaires
qui n'assistaient pas à la réunion plé-
nière, et dont un certain nombre n'ont
pas paru très disposés dans ces der-
niers temps, à confier de nouveau au
triumvirat La Rochefoucauld-Jolibois-
Mackau la direction de la politique de
la Droite. ,.
Au surplus, à quelque résolution
que -s'arrêtent les députés de la Droite,
u qu'ils s'accordent entre eux ou se
gourment », comme dit Martine, cela
ne paraît pas avoir pour nous autant
d'importance que paraissent le croire
certains de nos Confrères. Parce que
quelques droitiers cesseront leur op-
position systématique à la Constitu-
tion, qu'y aura-t-il de changé en
France? Cette Constitution, il a été un
temps où ils l'acceptaient, puisque
c'est eux qui l'ont faite et c'est eux qui
se sont chargés de la faire fonctionner
sous le gouvernement du maréchal de
Mac-Mahoii et pendant la période du
Seize-Mai. Pendant tout le temps
qu'ils ont été au pouvoir, ils n'ont pas,
officiellement du moins) agité la ques-
tion monm-hiqiie. Ils se sont conten-
tés de faire œuvre réactionnaire, et si
par hasard ils en avaient encore le
moyen, c'e^t encore à cette œuvre
qu'ils se consacreraient. Monarchistes
ou constitutionnels, les droitiers se
trouveraient d'accord pour détruire la
loi scolaire et la loi militaire, pour dé-
truire les réformes démocratiques
réalisées et pour s'opposer à la réali-
sation des autres, et les uns comme les
autres trouveraient la République as-
sez habitable le jour où elle serait en-,
tre leurs ^nains et où toutes les fonc-
tions publiques seraient livrées à leurs
partisans.
Le différend entre la Droite et nous
ne sera pas terminé parce que la
question constitutionnelle serai mise
en dehors du débat, et il y aura tou-
jours, entre le parti conservateur et
le parti progressiste, des divergences
irréductibles. La question ne regarde
donc en réalité que la Droite; c'est à
el}e de savoir si elle a plus de chances
dé regagner une partie du terrain
qu'elle a perdu, en donnant son adhé-
sion à la République ou en persistant
dans son attitude irréconciliable; s'il
lui est plus avantageux de se consa-
crer uniquement à la défense des
principes conservateurs ou de laisser
au pays des arrière-pensées sur ses
véritables intêntions. Ces arrière-
pensées peuvent inquiéter les uns
comme elles peuvent décider les au-
tres. C'est à la Droite de faire la ba-
lance et de savoir si l'équivoque ou la
franchise lui est plus profitable. Mais,
au bout de tout, cela ne nous regarde
guère et ne peut rien modifier aux
dispositions de la majorité républi-
caine.
Le XIXe SIÈCLE publiera demain la
» Chronique ", par M. Paul Ginisty.
LA DÉMISSION
DE M. MARTINEAU
M. Martineau chez M. Floquet. — Dé-
mission non avenue. — A propos
de M. Bonnet-Duverdier. — La
loi anglaise sur les duels.
La réunion qu'un petit nombre d'élec-
teurs de la première circonscription du
dix-neuvième arrondissement avaient orga-
nisée dans un café du boulevard de la Vil-
lette, et dont nous avons rendu compte, a
fait, hier, l'objet de vifs commentaires dans
les couloirs de la Chambre.
M. Martineau, interrogé par un de nos
rédacteurs, a répondu « qu'il ne se consi-
dérait nullement comme démissionnaire;
qu'au surplus il s'était rendu à la prési-
dence de la Chambre, et que M. Floquet lui
avait dit qu'il considérait qu'une démission
donnée en de telles circonstances ne sau-
rait être regardée comme valable ».
M. Floquet a ajouté qu'il n'avait pas en-
core reçu le fameux papier timbré sur le-
quel M. Martineau fut obligé d'apposer sa
signature.
Un précédent
D'ailleurs, on peut invoquer, à ce sujet,
un précédent qui date de 1878.
Lorsqu'il se présenta devant les électeurs
de la seconde circonscription, aux élec-
tions générales du 111 octobre 1877, M. Bon-
net-Duverdier avait remis au comité qui
patronnait sa candidature sa démission en
blanc.
Quand survinrent les graves accusations
de malversation formulées contre le dé-
puté de Lyon par les mçmbres du comité
de la bibliothèque du quatorzième arron-
dissement, la démission fut envoyée à M.
Jules Grévy, à la présidence de la Chambre
des députés.
M. Grévy refusa de donner lecture de la
lettre de démission, parce qu'elle ne lui
avait pas été remise par le député lui-
même.
M. Floquet s'inspirera de ce précédent;
M. Martineau continuera donc de siéger
comme auparavant.
Le duel Boulanger-Martineau
Nous avons raconté que M. Martineau,
froissé des termes injurieux contenus dans
une dépêche adressée par le général Bou-
langer à M. Castelin, député de l'Aisne,
avait l'intention d'envoyer deux de ses amis
au général.
M. Martineau n'a pas encore fait choix de
ses témoins.
Toutefois, le duel ne pourra, dans le cas
où le général Boulanger accepterait le car-
tel, avoir lieu sur le territoire anglais, la
loi anglaise sévissant très sévèrement con-
tre les duellistes.
La même loi n'est pas non plus très ten-
dre à l'égard des témoins. Ceux-ci, lors
même que le duel n'est pas encore con-
sommé, sont passibles d'une forte amende
et d'un emprisonnement.
Avis donc aux témoins de M. Martineau,
qui auraient, à peine débarqués à Jersey,
maille à partir avec la justice anglaise.
LA BELLE SOLEDAD
Au sein de sa famille. — Le farouche
Chico. — Le ravisseur et
M. Guillot.
Ainsi que nous l'avions annoncé il y a
quelques jours, la belle Soledad, l'étoile
des gitanos, est actuellement à Séville.
Une lettre de notre correspondant nous
annonce, en effet, de la façon la plus for-
melle qu'elle est rentrée, mais non dans le
sein de sa famille. Redoutant la colère du
« capitan Chico », son père, elle s'est réfu-
giée chez des parents.
Elle ne tardera pas cependant à réinté-
grer le domicile paternel, le capitaine
Chico étant bien obligé de pardonner s'il
veut reconquérir l'étoile de sa troupe.
- D'un autre côté, son ravisseur est connu ;
c'est bien un Russe, comme on l'avait dit,
qui, au moment de l'Exposition, se trouvait
à Paris. Lui aussi, il est retourné dans son
pays natal.
M. Guillot, juge d'instruction chargé de
l'affaire, n'a nullement l'intention de de-
mander, par voie diplomatique, l'extradi-
tion du coie et heureux ravisseur.
CHRONIQUE
Le hasard m'a fait faire la connaissance
d'un jeune homme de beaucoup de sens,
de savoir et d'esprit. Le hasard. c'est
une façon de parler. J'aime passionné-
ment le trictrac, j'entends le vrai tric-
trac, le trictrac du dix-septième siècle, le
plus beau, le plus noble, le plus char-
mant, le plus amusant de tous les jeux,
un jeu qui malheureusement se perd et
qu'on ne joue plus guère qu'entre offi-
ciers de marine, dans les voyages au
long cours. Car c'est le seul jeu qu'on
puisse jouer sans aucun enjeu d'argent.
Il est émouvant par lui-même.
Il a contre lui d'être difficile à appren-
dre. Les combinaisons en sont nombreu-
ses et variées, et il faut une assez longue
initiation pour le jouer proprement. Le
jeune homme dont je parle en possédait
les premières notions, qui lui avaient été
données par un vieil oncle. Je l'avais ren-
contré dans une maison tierce, il me de-
manda la permission de venir, de temps
a autre, prendre une leçon.
Il était interne dans un des hôpitaux
de Paris. J'eus occasion de causer souvent
avec lui, et j'appréciai très vite l'étendue
de ses connaissances et la bonne grâce
modeste avec laquelle il les laissait aper-
cevoir. Il parut prendre plaisir à venir
chez moi, et je me pris pour lui de cette
affection que les hommes de mon âge
sentent pour les jeunes gens d'avenir.
L'autre jour, j'avais un petit garçon
malade ; il était venu prendre une leçon
de trictrac, et, naturellement, je lui don-
nai, puisqu'il était là, l'enfant à exami-
ner. Il me dit ce qu'il fallait faire, et,
comme je craignais d'oublier quelqu'une
de ses prescriptions :
— Signez-moi donc une ordonnance,
lui dis-je.
— C'est, me répondit-il en souriant,
que je n'en ai pas le droit !
— Comment î vous êtes depuis des an-
nées interne dans un hôpital, et vous
n'avez pas le droit de signer une ordon-
nance !
— C'est précisément parce que je suis
interne dans un hôpital, que je n'ai pas
le droit de mettre mon nom au bas d'une
ordonnance.
— Quelle plaisanterie est-ce là ?
— Vous pensez bien, me dit-il, que
c'est en effet une plaisanterie et que je
vous signerai tout ce qu'il vous plaira. La
vérité est que je n'en ai pas le droit. Je
ne suis point docteur.
— Mais je croyais, m'écriai-je, que les
internes étaient choisis au concours
parmi les étudiants en médecine qui
avaient déjà achevé leurs études.
-- Cela est vrai, me dit-il. Quand on a
tous; ses examens, on pe u,¡. , concourir
pour l'internat. Un petit nombre est ad-
mis ; les autres passent leur thèse, sont
reçus docteurs ; car il n'y a rien de si
simple que de fabriquer une thèse. De
toutes les épreuves par où passe l'étu-
diant en médecine, la plus facile est sans
contredit la dernière, celle qui lui con-
fère le droit medicandi, purgandi, cou-
pandi et occidendi impune per totam ter-
ram. Quelques internes même se fati-
guent de l'internat et l'abandonnent pour
faire leur thèse.
— Comment, interrompis-je, il y a des
internes qui, après avoir emporté l'in-
ternat au concours, n'achèvent pas le
cycle des études qu'il ouvre et laissent la
place aux autres?.
- — Que voulez-vous ? me dit-il. L'inter-
nat prend toute la journée d'un jeune
homme, ou du moins une bonne partie,
et il rapporte six cents francs par an.
Tous n'ont pas ou la fortune ou la pa-
tience nécessaire pour durer longtemps à
ce régime. Ils préfèrent passer leur
thèse, qui n'est plus qu'une formalité, et
commencer plus tôt à se faire une clien-
tèle.
- Vous ne pouvez donc pas, vous, in-
terne, ébaucher un commencement de
clientèle?
— Nous ne le pouvons pas, officielle-
ment. Et dans la réalité même nous ne
le pouvons pas, nous sommes trop pris,
trop occupés par la salle de garde pour
songer à faire de la clientèle en ville. Mais
c'est précisément pour couper court à
toute velléité qui pourrait se produire
chez nous de soigner une clientèle payante,
que l'Assistance publique ne nous per-
met pas d'être à la fois docteurs et in-
ternes. Elle suppose, et en cela elle n'a
peut-être pas tout à fait tort, qu'entre
un client qui payerait nos services et les
malades de l'hôpital,nous serions parfois
très gênés pour choisir, et elle veut nous
épargner cet embarras en nous enlevant
la possibilité d'avoir légalement des ma-
lades à médicamenter. Du moment que
nous ne sommes pas docteurs, nous som-
mes, elle le croit du moins, bien davan-
tage dans sa main ; nous lui appartenons
tout entiers.
— Le raisonnement me paraît canaille,
mais il est assez juste.
— Elle a encore une autre raison, qui
n'est pas moins bonne. Nous avons à l'hô-
pital un chef de service : c'est le médecin
ou chirurgien en chef. Nous sommes sous
ses ordres ; il nous est bien permis, en
cas urgent, de prendre une initiative;
mais, sauf exception, nous n'avons qu'à
suivre les ordres donnés par lui. Eh bien 1
cette obéissance est plus facile à des jeu-
nes gens qui n'ont pas à se parer du titre
de docteur.
— Est-ce qu'en effet il serait à craindre
que les internes en vinssent à secouer le
joug du chef ?
— Je ne crois pas, me dit mon jeune
homme. Nos chefs sont presque tous des
hommes de telle valeur qu'il ne nous
viendrait pas à l'idée de nous mettre en
avant, de prévenir leurs ordres, encore
moins de les transgresser. Il est vrai aussi
que parmi ces chefs il s'en peut trouver,
je n'en ai pas connu de tels pour ma part,
mais enfin il s'en peut trouver qui n'ins-
pirent pas le même respect, qui se laissent
gagner à la main, et qui ne seraient bien-
tôt plus maîtres de leur personnel, si les
internes se pouvaient appuyer d'un titre
qui leur conférât des droits. Mais ce sont
là des exceptions, et des exceptions si
rares que je ne les ai jamais pu voir.
Ilarrive souvent, au contraire, que nos
chefs de service distinguent quelques-uns
de leurs internes, les prennent en amitié,
les laissent au lit des malades de leur
Clientèle, quand ces malades ont besoin
de soins particuliers, et stipulent ensuite
une rémunération qui les aide à vivre.
Car il n'y a pas moyen de s'en tirer, si
l'on n'a que les appointements alloués par
l'hôpital.
On a souvent demandé que les internes
eussent le droit de passer leur doctorat ;
l'Assistance publique leur a toujours op-
posé les raisons que je vous donne, et l'on
s'en est tenu au statu quo.
- Et vous, lui demandai-je, qu'en
pensez-vous ?
— Oh! moi, me dit-il, me voilà sur la
fin de mon internat ; la question n'a plus
d'intérêt pour moi.
— Mais en thèse générale?
— Mon Dieu! en thèse générale, il est
toujours fâcheux que les plus méritants
ne puissent posséder un titre que se peu-
vent procurer des élèves moins instruits
et moins forts. Un jeune homme ambi-
tieux de fortune et de réputation, au lieu
de se consacrer aux graves travaux de
l'internat, peut conquérir- tout de suite
son diplôme dé docteur et se constituer
rapidement, en faisant de la réclame,
une grosse clientèle. Il a trois ou quatre
ans d'avance sur son camarade, qui
poursuit son éducation, tandis que l'au-
tre gagne de l'argent et quelquefois mê-
me de la renommée. Rien n'est plus fait
que ce spectacle pour démoraliser la jeu-
nesse studieuse.
Quand nous allons en pays étranger,
on est stupéfait que nous n'ayons pas le
grade qui correspond aux fonctions exer-
cées par nous, que nous soyons à la fois
plus et moins que nos camarades doc-
teurs qui n'ont point passé par l'inter-
nat ; il y a là un illogisme qui les frappe
et dont nous souffrons.
Et le pis, ajouta-t-il, c'est que cette
précaution prise contre nous par l'Assis-
tance publique n'empêche pas grand-
chose. Nous sommes forcément amenés
par la nécessité des choses à donner des
consultations, à signer des ordonnances.
Vous en voyez la preuve aujourd'hui
même. La différence, c'est que si un de
nos camarades, docteur, se trompe et est
poursuivi, toute la Faculté se serre autour
de lui. Nous, nous n'avons pas droit à
exercer. Si nous signions une ordon-
nance dont le résultat fût mauvais, et
qu'il y eût une plainte, nous serions con-
damnés sans miséricorde. Les exemples
ne sont pas nombreux, mais il y en a
P.11 -
Il ne serait que juste de permettre à
des jeunes gens dont on paie si peu les
services, de se munir d'un titre qui leur
assurerait la possibilité de dîner le soir
et qui les garantirait contre toute récri-
mination. C'est l'avis de quelques-uns de
nos plus illustres maîtres. Ils ne deman-
deraient pas mieux que d'avoir dans leur
clinicat des docteurs ; ils sont certains
que ces docteurs seraient aussi respec-
tueux et aussi dévoués pour eux que les
jeunes gens à qui l'on interdit ce titre.
— Eh bien ! lui dis-je, il ne faut jamais,
même en badinant, contrevenir à la loi.
Ne me signez pas d'ordonnance. Ecrivez-
moi simplement ce que je dois faire, et
j'enverrai chez le pharmacien en mon
nom. Mais, vraiment, la loi est bizarre!
Francisque Sarcey.
ARRES rATION D'UN GENTLEMAN
Un chèque de 25,000 francs faux. — Un
escroc du grand monde.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Cannes, 5t4 janvier.
Une de nos importantes banques payait,
avant-hier, à un gentleman anglais très
connu dans les principaux clubs, une
somme de 35,000 francs, montant d'un chè-
que de cent livres sterling, daté de Londres
et signé du nom d'un yachtman fort riche
et qui fait de fréquentes visites à notre
littoral.
Hier matin, le directeur de la maison de
banque ayant appris, par dépêche, que la
signature apposée sur le chèque était fausse,
fit immédiatement rechercher le coupable
qui, du reste, n'avait nullement songé à
prendre la fuite.
Le personnage a été arrêté et conduit,
sous bonne escorte, chez le procureur de
la République.
Il paraît que cet étranger est un fils de
famille très prodigue, qui a dépensé en
quelques années 5 a 6 millions.
Il était l'ami d'un prince anglais qui vient
Dasser tous les hivers sur notre littoral.
PLAQUES DE BLINDAGE
D'ALLEMAGNE POUR L'ITALIE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Rome, M janvier.
On annonce le passage, sur la ligne du
Saint-Gothard, d'un nouveau train spécial
chargé de plaques de blindage venant de
Buckau-Magdebourg à destination de la
Spezzia.
Le train doit se composer d'un wagon
spécial à douze essieux, portant une plaque
de 81,000 kil., et d'un autre wagon sembla-
ble portant une plaque de 67,190 kil.
EXPLOSION D'UNE CARTOUCHERIE
Les victimes
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Edimbourg, M janvier.
Hier, à cinq heures, a eu lieu une terri-
ble explosion dans la cartoucherie de Ros-
lin, près d'Edimbourg ; six hommes ont été
tués et un grand nombre blessés.
On a ressenti la commotion à plusieurs
kilomètres de distance. La cause de l'explo-
sion, qui s'est produite dans l'alier de
mélange des poudres, est cac3rié incoauue.
RAPPORT
FAIT AU NOM DE LA COMMISSION
CHARGÉE
de faire une enquête sur l'élection de
M. Loreau dans l'arrondissement
de Gien (Loiret), par M. de La—
nessan, député.
- Messieurs, -.
Conformément au désir que vous avez
manifesté, votre commission s'est fait un
devoir de procéder avec la plus grande ac-
tivité à l'enquête sur l'élection de Gien dont
vous l'avez chargée.
Elle a nommé une sous-commission qui,
après avoir entendu à Paris les personnes
qui lui en avaient adressé la demande, est
partie pour Gien le mardi Il décembre. Le
même jour, à trois heures, dans une des
salles de la sous-préfecture, elle procédait
à l'audition des témoins qui avaient été
préalablement convoqués. Le jeudi, le ven-
dredi, le samedi, le dimanche et le lundi
suivants, elle a tenu chaque jour deux lon-
gues séances et n'a clôturé ses travaux que
lundi soir 17 décembre, après avoir en-
tendu tous les témoins qui lui avaient été
désignés par les parties intéressées ou
qu'elle-même avait cru devoir faire appe-
ler.
La facilité des communications et l'em-
pressement des témoins ont permis à la
sous-commission de faire toute son enquête
sans quitter le chef-lieu d'arrondissement.
Elle a, du reste, été beaucoup aidée dans
ses travaux par les jugements et les ins-,
trustions judiciaires que M. le procureur
de la République et M. le juge d'instruction
lui ont communiqués, conformément aux
précédents.
Le nombre des témoins entendus a été de
250. Tous les témoins ont été invités à prê-
ter serment avant de déposer; aucun ne s'y
est refusé. Toutes les dépositions ont été
recueillies intégralement par la sténogra-
phie et analysées en même temps par le
greffier de la sous-commission. Elles ont
toutes été signées, séance tenante, après lec-
ture à haute voix.
En résumé, votre commission a pris tou-
tes les mesures pour que l'enquête ordon-
née par la Chambre fût aussi complète que
possible et offrit des garanties d'absolue im-
partialité. Quant aux conclusions qu'elle a
l'honneur de vous présenter, elle les appuie
exclusivement sur les faits qui ne peuvent
être l'objet d'aucune contestation. Elle a
eu soin de laisser tous les autres de côté.
Disons, tout d'abord, que l'enquête faite
sur place par votre commission a eu pour
résultat la confirmation de tous les faits si-
gnalés déjà dans son rapport et à la tribune
par le rapporteur de votre sixième bureau,
notre honoroble collègue M. Jourdan. (Voir
Journal officiel, séances du 25 novembre et
du 3 décembre 1889.)
Vous n'avez pas oublié que ces faits àvaient
déterminé votre sixième bureau à vous pro-
poser l'annulation des opérations électora-
les de l'arrondissement de Gien.
Afin d'avoir une idée exacte des manœu-
vres qui ont entaché l'élection de l'arron-
dissement de Gien, il est nécessaire de con-
naître l'état des partis dans cet arrondisse-
ment et la situation particulière du candi-
dat qui a obtenu la majorité des suffrages,
majorité qui'n'a été que de 76 voix sur
lh,816 votants.
Depuis 1871, toutes les élections législa-
tives avaient assuré, dans l'arrondissement
de Gien, le triomphe des républicains, avec
une forte majorité.
Cependant il existait une minorité mo-
narchiste dont M. Loreau est l'un des re-
présentants dans le conseil général du
Loiret. C'est M. Loreau qui fut choisi par
l'alliance des monarchistes, des bonapar-
tistes et des boulangistes, comme candidat
de tous les adversaires de la République
dans l'arrondissement de Gien. (Voir la liste
publiée par l'Autorité dans son numéro du
33 août 1889.)
M. Loreau était depuis longtemps désigné
par l'ardeur de ses opinions monarchiques
et cléricales et par sa situation industrielle,
pour jouer un rôle dans l'assaut que ses
amis allaient livrer à la République et dont
ils escomptaient à l'avance le succès.
En ce qui concerne ses opinions, il suffira
de rappeler que, quelques mois avant l'ou-
verture de la période électorale, M. Loreau
présidait à Gien une conférence et un ban-
quet dans lequel la République et les répu-
blicains étaient attaqués avec la dernière
violence, où le conférencier proclamait
qu'il fallait « en finir avec la République et
les républicains », et terminait par les cris
de : « Vive Mgr le comte de Paris! »
(Voir l'Indépendant, journal de M. Loreau,
numéro du 15 décembre 1888.)
Il n'est donc pas étonnant que tous les
conservateurs et les cléricaux aient voté
pour M. Loreau, même après qu'il eût fait
acte apparent d'adhésion à la c. République
conservatrice ». Il leur avait donné trop de
gages pour qu'ils pussent attacher la moin-
dre importance a ses déclarations tar-
dives.
Quant à la situation personnelle de M.
Loreau dans l'arrondissement de Gien, il
suffit, pour s'en rendre compte, de savoir
qu'il est directeur de la fabrique de bou-
tons de Briare, administrateur et déten-
teur d'une grande partie des actions de la
faïencerie de Gien, propriétaire à Langesse
de vastes terrains sur lesquels sont occu-
pés de nombreux ouvriers depuis plusieurs
années. Il tenait ainsi entre ses mains le
sort de plus de deux mille ouvriers, sans
parler des nombreux négociants qui, à
Briare et à Gien, vivent en très grande par-
tie de ce qu'ils vendent aux employés et
aux ouvriers des usines.
Son influence était encore accrue par les
conditions particulières dans lesquelles se
fait, en dehors des usines et dans les plus
petits villages de certains cantons, un tra-
vail spécial qui consiste dans l'encartage
des boutons fabriqués à Briare.
Dans chacune des communes où se fait
l'encartage, l'usine de Briare a un représen-
tant qui distribue aux femmes les cartes et
les boutons reçus de la fabrique. Comme il
existe des distributeurs dans une trentaine
de communes, et que chaque distributeur
délivre du travail à plus de deux cents per-
sonnes (déposition d'un employé de la fa-
brique de Briare), il est aisé de se faire une
idée de lnfluence personnelle dont disposait
le candidat monarchiste choisi par l'alliance
de tous les ennemis de la République.
Il s'agissait de se servir de toutes ces in-
fluences pour battre en brèche la foi répu-
blicaine de l'arrondissement de Gien et
permettre à la monarchie de regagner les
voix qui avaient; depuis 1871, assuré la vic-
toire aux républicains.
Aii^isi ce qui caractérise essentiellement
lélectioD de l'arrondissement de Gien, c'est
, "- ')0-'
la pression exercée sur les nombreux ou-
vriers ou négociants qui dépendent plus ou
moins directement des usines de Briare et
de Gien.
Campagne de diffamation contre les
républicains.
Cependant, si grande que fût Finnuenco
personnelle de M: Loreau, ses amis et lui-
même ne la jugèrent pas suffisante. Dès le
commencement du mois de septembre, ils*
entamaient contre les candidats républi-
cains, et particulièrement contre celui qu'ils
redoutaient le plus, une campagne d'inju-
res et - de diffamation - d'une violence tellA
qu'aucun autre arrondissement peut-êÚ(S!
n'en a connu de semblable. Ces faits ayant;
été exposés longuement dans le rapport dej
notre honorable collègue M. Jourdan, eg
dans son discours à la Chambre, il me pa;
raît inutile d'y insister.
Je rappellerai seulement que, le 6 no-'
vembre, le tribunal correctionnel de Gien?
condamna M. Loreau pour avoir diffamé
son adversaire dans une affiche disposée
typographiquement de telle sorte que les
lecteurs pouvaient croire que le candidat
républicain était poursuivi en police cor-
rectionnelle pour avoir commis un faux.
On objectera peut-être que la Cour d'ap-
pel d'Orléans a diminué l'autorité de ce ju-
gement en réduisant la condamnation à un
franc de dommages-intérêts. Il suffit, pour;
répondre à cette objection, de dire que la
Cour d'appel, tout en réduisant la peine, a
« adopté les motifs des premiers juges
où il est dit que « des témoins qui ont dé-
posé à l'audience ont déclaré avoir entendu
dire par certains électeurs qu'ils hésitaient
à voter pour M. Portalis, qui était accusé
d'avoir commis un faux et allait passer en'
police correctionnelle ; par d'autres, qu'ils
ne voteraient pas pour Portalis, qui était
un faussaire ; par d'autres, enfin, des com-
munes de Gien et de Nevoy (et ceci le jour
des élections), que Portalis était en pri-
son M.
La commission s'est aussi préoccupée,
d'un supplément de journal, ayant la forme
d'un placard, sur papier blanc, affiché, d'à"
près plusieurs témoins, dans au moins deux
communes et distribué à des millier?
d'exemplaires pendant l'après-midi du a
octobre, c'est-à-dire trop tard pour qu'on?
pût y répondre. Le candidat de tous, les:
républicains y était représenté « tressant
des chaussons de lisière à la Conciergeri,..
dans la cellule de Troppmann, tandis que
les enfants de seize ans se faisaient tuec.
dans les tranchées Y.
L'enquête a démontré d'une manière ir-
réfutable à votre commission que, parmi les*
distributeurs de ce placard diffamatoires
figurent plusieurs ouvriers de la faïenceri
de Gien dont M. Loreau est un des priuci,
paux actionnaires et administrateurs.
M. Loreau rejette, il est vrai, la respon-
sabilité de cet acte, mais l'enquête a établi, i
et il a avoué lui-même à la tribune de lai
Chambre qu'il a payé le journal par led
soins duquel ce placard diffamatoire a étti;
imprimé et distribué.
Ces manoeuvres diffamatoires nous ont
paru d'autant plus graves qu'elles étaient
émises sous le couvert d'un journal à titre,
républicain, que le placard portait en tête
les mots. « République française M, et qu'il
était imprimé sur papier blanc, tous carac-
tères de nature à lui donner des allures of-
ficielles bien faites pour frapper l'esprit des
populations et pour détourner du candidat
de la République un grand nombre de
voix, ainsi que le déclarent tous les té-
moins républicains entendus par votre
sous-commission.
En même temps, les agents de M. Loreau
proclamaient que M. Augère, candidat ré-
publicain, ancien député, mis en minoritéf
au premier tour de scrutin, s'était désisté
en faveur de M. Loreau.
M. Augère protesta contre ces accusa-
tions,et, dans une lettre adressée à ses amis
politiques, il déclara formellement qu'entre
« M. Loreau, qui veut renverser la Répu-
blique, et M. Portalis qui veut la conserver,
il ne saurait hésiter, et qu'il votera pour
M. Portalis ».
Il résulte, du reste, des dépositions de
plusieurs témoins que, même avant le pre-
mier tour de scrutin, M. Augère avait dé*
claré qu'il se désisterait en faveur de M;
Portalis si ce dernier avait plus de voix
que lui.
Cependant, des affiches placardées jus-
qu'à la dernière heure par M. Loreau et ses
amis niaient l'existence de la lettre de M.
Augère et accusaient de faux ceux qui l'a-
vaient publiée. Ils visaient ainsi un double
but : faire croire aux électeurs que M. Au"
gère était favorable à M. Loreau, et désho-
norer le candidat républicain en l'accusant
une fois de plus d'être un faussaire.
L'emploi de cette manœuvre a été poussé
sé jusqu'à la tribune de la Chambre, où M.
Loreau lui-même a contesté l'existence do
la lettre de M. Augère.
Désireuse d'éclaircir cette question dont
l'importance n'avait échappé a personne au
moment de la discussion publique, votre
commission a demandé et obtenu commu-
nication de la lettre de M. Augère. Elle
porte la date du 38 septembre 1889 et était
adressée par Si. Augère au docteur Defau-
camberge, son ami politique et personnel.
En voici les termes textuels : « Dis à Aupe-
tit, je te prie, qu'hier, avant de quitter Or-
léans, je suis allé voir le directeur du Ré-
publicain oroléanais, et que je lui ai remis
une lettre aux termes de laquelle je remer-
cie les électeurs qui ont voté pour moi et
leur déclare que, fidèle à la discipline répu-
blicaine, je ne serai pas candidat au second
tour. Républicain je suis, républicain je
resterai. Entre M. Loreau, qui veut renver-
ser la République, et M. Portalis, républi-
cain, qui veut la conserver, je ne saurais
hésiter : au jour du vote, je déposerai dans
l'urne un bulletin au nom de M. Portalis. »
M. Augère lui-même a été entendu par
votre commission, et sa déposition contient
les déclarations suivantes : « Vous connais-
sez les résultats du premier tour de scrutin.
M. Portalis a obtenu plus de voix que moi-
et j'ai adressé à un journal du Loiret une
lettre dans laquelle je déclarais que, fidèle
à la discipline républicaine, je ne serais pas
candidat au second tour de scrutin. Le
matin du scrutin, j'ai pris le train pour,
Gien. je me suis rendu à la salle du vote ;
j'ai pris fin bulletin au nom de M. Portalis,
que j'ai plié devant les électeurs, et je l'ai
déposé dans l'urne. Quant à ce qui adonné
lieu à ma lettre, le voici : M. Aupetit-Hu-
bert, que je connais beaucoup, secrétaire
du syndicat des vignerons de Gien, m'a
écrit une lettre pendant que j'étais en voyage,
lettre dans laquelle il me disait : « Nos ad-
versaires prétendent que vous appuyez la
candidature de M. Loreau. Je suis persuadé
que telle n'est pas votre intention ; il serait
donc bon de le faire savoir aux électeurs. »
Je n'ai nas cru devoir répondre à ce îeuae
",
, :.
JOURNAL RÉPUBLICAIN
- '-'; RÉDACTION ,-
124ap Rue Mont= artre
PARIS
DIRECTEUR POLITIQUE
A. - ÉDOUARD PORTALIS
PRIX DE L'ABONNEMENT :
tarta. Ttàinoia, 61.; Siiawii, UL; Dit.., 201
Départements -' 7 1.; 12 i.;. — 24 L
Pnion Postale — 91.; — 16 f.. — 32 L
Mm abonnements partent des lm et 15 de chaque mois.
Adresse télégraphique : XIX. SIÈCLE — PARIS
ADMINISTRATION
l*i3, Rue Montrziartre
PARIS
ItSISSEURS D'A N NON CES
MM. LAGRANGE, CERF et aa
0, place de la Bourse, 8
PRIX DE L'ABONNEMENT :
IPadi trobmis, 6 I.i Simoit, llf.;ha, 20f.
Départements — 71.; — 121.; — 24 L
Union Postale — 9L: — 16L; — 32L
Lei abonnements partent des 187 et 15 de chaque moi8
Adresse télégraphique : XXX* SIÈCLE — PARIS
L'ELECTION DE GIEN
RAPPORT DE M. DE LANESSAN
AFFAIRE GOUFFÉ
La dernière version de Gabrielle
L'agent d'affaires Remy Launay
LA PREMIÈRE DES BOUFFES
L'H as Droits
La Droite de la Chambre a tenu
je uli matin, dans le local de son se-
crétariat général, une réunion plé-
nière â laquelle assistaient 57 députés
sur 170 réactionnaires qui siègent au
Palais-Bourbon. Il ne s'agissait pas,
ainsi que M. Freppel l'a expliqué, de
constituer un groupe spécial, mais de
fournir à tous les députés conserva-
teurs, sans distinction de nuances, le
moyen de se rencojatrer et de se con-
certer. On a, paraît-il, fait des .appels
pressants à la concorde, ce qui laisse-
rait supposer qu'il y avait des diver-
gences à réduire, et l'on peut même
constater que, malgré l'éloquence des
orateurs, elles n'ont pas été réduites.
Le but que poursuivaient les pro-
moteurs de la réunion était de doter la
Droite d'une organisation analogue à
celle qu'elle s'était donnée dans la der-
nière Chambre. M. Paul de Cassagnac
qui, récemment, affirmait dans son
journal qu'il «n'était pas vrai » qu'au-
cun membre de la Droite songeât à at-
ténuer son hostilité contre la Républi-
que, parce que tous avaient été élus
par les ennemis irréconciliables de la
République, a voulu donner à cette af-
firmation une sanction expérimentale.
Il a demandé à la réunion de se don-
ner trois présidents, correspondant
aux trois opinions monarchiques de la
Droite: M. de La Rochefoucauld pour
les royalistes, M. Jolibois pour les im-
périalistes, et M. de Mackau pour les
a solutionnistes", c'est-à-dire pour les
monarchistes qui se déclaraient jadis
prêts à suivre indifféremment « Phi-
lippe ou Victor », - a le premier qui
marchera". C'était donc purement et
simplement l'ancienne Union des droi-
tes qu'il s'agissait de ressusciter, et sa
résurrection même devait être la ré-
ponse à ceux qui faisaient courir de
méchants bruits sur la communauté
de vues de tous les droitiers.
Il s'est trouvé que cette proposition,
sur laquelle on comptait pour démon-
trer la concorde, a eu des effets tout
différents. Les membres de la réunion
qui inclinent vers la Droite constitu-
tionnelle ont refusé d'accepter la clas-
sification qu'on voulait leur imposer.
Ils ont dit qu'en dehors des trois caté-
gories indiquées par M. de Cassagnac
il existait des hommes qui, apparte-
nant à la Droite par les principes con-
servateurs, avaient en vue une politi-
que différente de celle des monarchis-
tes, et M. Piou s'est très nettement
expliqué en disant : « Pour ma part,
je ne représente ici ni la royauté ni
l'empire; je suis simplement un dé-
puté conservateur. » Il a fallu, pour
empêcher les députés de cette opinion
de se retirer et pour prévenir le scan-
dale d'une rupture publique, porter à
quatre le nombre des présidents.
Malgré cet incident significatif, M.
Paul de Cassagnac célèbre, dans VAu-
torité, l'union de la Droite et soutient
que la Droite vient de faire une « ma-
nifestation" qui assure sa force. Nous
le verrons bien ; nous verrons aussi
comment est accueillie la décision des
57 par les 113 députés réactionnaires
qui n'assistaient pas à la réunion plé-
nière, et dont un certain nombre n'ont
pas paru très disposés dans ces der-
niers temps, à confier de nouveau au
triumvirat La Rochefoucauld-Jolibois-
Mackau la direction de la politique de
la Droite. ,.
Au surplus, à quelque résolution
que -s'arrêtent les députés de la Droite,
u qu'ils s'accordent entre eux ou se
gourment », comme dit Martine, cela
ne paraît pas avoir pour nous autant
d'importance que paraissent le croire
certains de nos Confrères. Parce que
quelques droitiers cesseront leur op-
position systématique à la Constitu-
tion, qu'y aura-t-il de changé en
France? Cette Constitution, il a été un
temps où ils l'acceptaient, puisque
c'est eux qui l'ont faite et c'est eux qui
se sont chargés de la faire fonctionner
sous le gouvernement du maréchal de
Mac-Mahoii et pendant la période du
Seize-Mai. Pendant tout le temps
qu'ils ont été au pouvoir, ils n'ont pas,
officiellement du moins) agité la ques-
tion monm-hiqiie. Ils se sont conten-
tés de faire œuvre réactionnaire, et si
par hasard ils en avaient encore le
moyen, c'e^t encore à cette œuvre
qu'ils se consacreraient. Monarchistes
ou constitutionnels, les droitiers se
trouveraient d'accord pour détruire la
loi scolaire et la loi militaire, pour dé-
truire les réformes démocratiques
réalisées et pour s'opposer à la réali-
sation des autres, et les uns comme les
autres trouveraient la République as-
sez habitable le jour où elle serait en-,
tre leurs ^nains et où toutes les fonc-
tions publiques seraient livrées à leurs
partisans.
Le différend entre la Droite et nous
ne sera pas terminé parce que la
question constitutionnelle serai mise
en dehors du débat, et il y aura tou-
jours, entre le parti conservateur et
le parti progressiste, des divergences
irréductibles. La question ne regarde
donc en réalité que la Droite; c'est à
el}e de savoir si elle a plus de chances
dé regagner une partie du terrain
qu'elle a perdu, en donnant son adhé-
sion à la République ou en persistant
dans son attitude irréconciliable; s'il
lui est plus avantageux de se consa-
crer uniquement à la défense des
principes conservateurs ou de laisser
au pays des arrière-pensées sur ses
véritables intêntions. Ces arrière-
pensées peuvent inquiéter les uns
comme elles peuvent décider les au-
tres. C'est à la Droite de faire la ba-
lance et de savoir si l'équivoque ou la
franchise lui est plus profitable. Mais,
au bout de tout, cela ne nous regarde
guère et ne peut rien modifier aux
dispositions de la majorité républi-
caine.
Le XIXe SIÈCLE publiera demain la
» Chronique ", par M. Paul Ginisty.
LA DÉMISSION
DE M. MARTINEAU
M. Martineau chez M. Floquet. — Dé-
mission non avenue. — A propos
de M. Bonnet-Duverdier. — La
loi anglaise sur les duels.
La réunion qu'un petit nombre d'élec-
teurs de la première circonscription du
dix-neuvième arrondissement avaient orga-
nisée dans un café du boulevard de la Vil-
lette, et dont nous avons rendu compte, a
fait, hier, l'objet de vifs commentaires dans
les couloirs de la Chambre.
M. Martineau, interrogé par un de nos
rédacteurs, a répondu « qu'il ne se consi-
dérait nullement comme démissionnaire;
qu'au surplus il s'était rendu à la prési-
dence de la Chambre, et que M. Floquet lui
avait dit qu'il considérait qu'une démission
donnée en de telles circonstances ne sau-
rait être regardée comme valable ».
M. Floquet a ajouté qu'il n'avait pas en-
core reçu le fameux papier timbré sur le-
quel M. Martineau fut obligé d'apposer sa
signature.
Un précédent
D'ailleurs, on peut invoquer, à ce sujet,
un précédent qui date de 1878.
Lorsqu'il se présenta devant les électeurs
de la seconde circonscription, aux élec-
tions générales du 111 octobre 1877, M. Bon-
net-Duverdier avait remis au comité qui
patronnait sa candidature sa démission en
blanc.
Quand survinrent les graves accusations
de malversation formulées contre le dé-
puté de Lyon par les mçmbres du comité
de la bibliothèque du quatorzième arron-
dissement, la démission fut envoyée à M.
Jules Grévy, à la présidence de la Chambre
des députés.
M. Grévy refusa de donner lecture de la
lettre de démission, parce qu'elle ne lui
avait pas été remise par le député lui-
même.
M. Floquet s'inspirera de ce précédent;
M. Martineau continuera donc de siéger
comme auparavant.
Le duel Boulanger-Martineau
Nous avons raconté que M. Martineau,
froissé des termes injurieux contenus dans
une dépêche adressée par le général Bou-
langer à M. Castelin, député de l'Aisne,
avait l'intention d'envoyer deux de ses amis
au général.
M. Martineau n'a pas encore fait choix de
ses témoins.
Toutefois, le duel ne pourra, dans le cas
où le général Boulanger accepterait le car-
tel, avoir lieu sur le territoire anglais, la
loi anglaise sévissant très sévèrement con-
tre les duellistes.
La même loi n'est pas non plus très ten-
dre à l'égard des témoins. Ceux-ci, lors
même que le duel n'est pas encore con-
sommé, sont passibles d'une forte amende
et d'un emprisonnement.
Avis donc aux témoins de M. Martineau,
qui auraient, à peine débarqués à Jersey,
maille à partir avec la justice anglaise.
LA BELLE SOLEDAD
Au sein de sa famille. — Le farouche
Chico. — Le ravisseur et
M. Guillot.
Ainsi que nous l'avions annoncé il y a
quelques jours, la belle Soledad, l'étoile
des gitanos, est actuellement à Séville.
Une lettre de notre correspondant nous
annonce, en effet, de la façon la plus for-
melle qu'elle est rentrée, mais non dans le
sein de sa famille. Redoutant la colère du
« capitan Chico », son père, elle s'est réfu-
giée chez des parents.
Elle ne tardera pas cependant à réinté-
grer le domicile paternel, le capitaine
Chico étant bien obligé de pardonner s'il
veut reconquérir l'étoile de sa troupe.
- D'un autre côté, son ravisseur est connu ;
c'est bien un Russe, comme on l'avait dit,
qui, au moment de l'Exposition, se trouvait
à Paris. Lui aussi, il est retourné dans son
pays natal.
M. Guillot, juge d'instruction chargé de
l'affaire, n'a nullement l'intention de de-
mander, par voie diplomatique, l'extradi-
tion du coie et heureux ravisseur.
CHRONIQUE
Le hasard m'a fait faire la connaissance
d'un jeune homme de beaucoup de sens,
de savoir et d'esprit. Le hasard. c'est
une façon de parler. J'aime passionné-
ment le trictrac, j'entends le vrai tric-
trac, le trictrac du dix-septième siècle, le
plus beau, le plus noble, le plus char-
mant, le plus amusant de tous les jeux,
un jeu qui malheureusement se perd et
qu'on ne joue plus guère qu'entre offi-
ciers de marine, dans les voyages au
long cours. Car c'est le seul jeu qu'on
puisse jouer sans aucun enjeu d'argent.
Il est émouvant par lui-même.
Il a contre lui d'être difficile à appren-
dre. Les combinaisons en sont nombreu-
ses et variées, et il faut une assez longue
initiation pour le jouer proprement. Le
jeune homme dont je parle en possédait
les premières notions, qui lui avaient été
données par un vieil oncle. Je l'avais ren-
contré dans une maison tierce, il me de-
manda la permission de venir, de temps
a autre, prendre une leçon.
Il était interne dans un des hôpitaux
de Paris. J'eus occasion de causer souvent
avec lui, et j'appréciai très vite l'étendue
de ses connaissances et la bonne grâce
modeste avec laquelle il les laissait aper-
cevoir. Il parut prendre plaisir à venir
chez moi, et je me pris pour lui de cette
affection que les hommes de mon âge
sentent pour les jeunes gens d'avenir.
L'autre jour, j'avais un petit garçon
malade ; il était venu prendre une leçon
de trictrac, et, naturellement, je lui don-
nai, puisqu'il était là, l'enfant à exami-
ner. Il me dit ce qu'il fallait faire, et,
comme je craignais d'oublier quelqu'une
de ses prescriptions :
— Signez-moi donc une ordonnance,
lui dis-je.
— C'est, me répondit-il en souriant,
que je n'en ai pas le droit !
— Comment î vous êtes depuis des an-
nées interne dans un hôpital, et vous
n'avez pas le droit de signer une ordon-
nance !
— C'est précisément parce que je suis
interne dans un hôpital, que je n'ai pas
le droit de mettre mon nom au bas d'une
ordonnance.
— Quelle plaisanterie est-ce là ?
— Vous pensez bien, me dit-il, que
c'est en effet une plaisanterie et que je
vous signerai tout ce qu'il vous plaira. La
vérité est que je n'en ai pas le droit. Je
ne suis point docteur.
— Mais je croyais, m'écriai-je, que les
internes étaient choisis au concours
parmi les étudiants en médecine qui
avaient déjà achevé leurs études.
-- Cela est vrai, me dit-il. Quand on a
tous; ses examens, on pe u,¡. , concourir
pour l'internat. Un petit nombre est ad-
mis ; les autres passent leur thèse, sont
reçus docteurs ; car il n'y a rien de si
simple que de fabriquer une thèse. De
toutes les épreuves par où passe l'étu-
diant en médecine, la plus facile est sans
contredit la dernière, celle qui lui con-
fère le droit medicandi, purgandi, cou-
pandi et occidendi impune per totam ter-
ram. Quelques internes même se fati-
guent de l'internat et l'abandonnent pour
faire leur thèse.
— Comment, interrompis-je, il y a des
internes qui, après avoir emporté l'in-
ternat au concours, n'achèvent pas le
cycle des études qu'il ouvre et laissent la
place aux autres?.
- — Que voulez-vous ? me dit-il. L'inter-
nat prend toute la journée d'un jeune
homme, ou du moins une bonne partie,
et il rapporte six cents francs par an.
Tous n'ont pas ou la fortune ou la pa-
tience nécessaire pour durer longtemps à
ce régime. Ils préfèrent passer leur
thèse, qui n'est plus qu'une formalité, et
commencer plus tôt à se faire une clien-
tèle.
- Vous ne pouvez donc pas, vous, in-
terne, ébaucher un commencement de
clientèle?
— Nous ne le pouvons pas, officielle-
ment. Et dans la réalité même nous ne
le pouvons pas, nous sommes trop pris,
trop occupés par la salle de garde pour
songer à faire de la clientèle en ville. Mais
c'est précisément pour couper court à
toute velléité qui pourrait se produire
chez nous de soigner une clientèle payante,
que l'Assistance publique ne nous per-
met pas d'être à la fois docteurs et in-
ternes. Elle suppose, et en cela elle n'a
peut-être pas tout à fait tort, qu'entre
un client qui payerait nos services et les
malades de l'hôpital,nous serions parfois
très gênés pour choisir, et elle veut nous
épargner cet embarras en nous enlevant
la possibilité d'avoir légalement des ma-
lades à médicamenter. Du moment que
nous ne sommes pas docteurs, nous som-
mes, elle le croit du moins, bien davan-
tage dans sa main ; nous lui appartenons
tout entiers.
— Le raisonnement me paraît canaille,
mais il est assez juste.
— Elle a encore une autre raison, qui
n'est pas moins bonne. Nous avons à l'hô-
pital un chef de service : c'est le médecin
ou chirurgien en chef. Nous sommes sous
ses ordres ; il nous est bien permis, en
cas urgent, de prendre une initiative;
mais, sauf exception, nous n'avons qu'à
suivre les ordres donnés par lui. Eh bien 1
cette obéissance est plus facile à des jeu-
nes gens qui n'ont pas à se parer du titre
de docteur.
— Est-ce qu'en effet il serait à craindre
que les internes en vinssent à secouer le
joug du chef ?
— Je ne crois pas, me dit mon jeune
homme. Nos chefs sont presque tous des
hommes de telle valeur qu'il ne nous
viendrait pas à l'idée de nous mettre en
avant, de prévenir leurs ordres, encore
moins de les transgresser. Il est vrai aussi
que parmi ces chefs il s'en peut trouver,
je n'en ai pas connu de tels pour ma part,
mais enfin il s'en peut trouver qui n'ins-
pirent pas le même respect, qui se laissent
gagner à la main, et qui ne seraient bien-
tôt plus maîtres de leur personnel, si les
internes se pouvaient appuyer d'un titre
qui leur conférât des droits. Mais ce sont
là des exceptions, et des exceptions si
rares que je ne les ai jamais pu voir.
Ilarrive souvent, au contraire, que nos
chefs de service distinguent quelques-uns
de leurs internes, les prennent en amitié,
les laissent au lit des malades de leur
Clientèle, quand ces malades ont besoin
de soins particuliers, et stipulent ensuite
une rémunération qui les aide à vivre.
Car il n'y a pas moyen de s'en tirer, si
l'on n'a que les appointements alloués par
l'hôpital.
On a souvent demandé que les internes
eussent le droit de passer leur doctorat ;
l'Assistance publique leur a toujours op-
posé les raisons que je vous donne, et l'on
s'en est tenu au statu quo.
- Et vous, lui demandai-je, qu'en
pensez-vous ?
— Oh! moi, me dit-il, me voilà sur la
fin de mon internat ; la question n'a plus
d'intérêt pour moi.
— Mais en thèse générale?
— Mon Dieu! en thèse générale, il est
toujours fâcheux que les plus méritants
ne puissent posséder un titre que se peu-
vent procurer des élèves moins instruits
et moins forts. Un jeune homme ambi-
tieux de fortune et de réputation, au lieu
de se consacrer aux graves travaux de
l'internat, peut conquérir- tout de suite
son diplôme dé docteur et se constituer
rapidement, en faisant de la réclame,
une grosse clientèle. Il a trois ou quatre
ans d'avance sur son camarade, qui
poursuit son éducation, tandis que l'au-
tre gagne de l'argent et quelquefois mê-
me de la renommée. Rien n'est plus fait
que ce spectacle pour démoraliser la jeu-
nesse studieuse.
Quand nous allons en pays étranger,
on est stupéfait que nous n'ayons pas le
grade qui correspond aux fonctions exer-
cées par nous, que nous soyons à la fois
plus et moins que nos camarades doc-
teurs qui n'ont point passé par l'inter-
nat ; il y a là un illogisme qui les frappe
et dont nous souffrons.
Et le pis, ajouta-t-il, c'est que cette
précaution prise contre nous par l'Assis-
tance publique n'empêche pas grand-
chose. Nous sommes forcément amenés
par la nécessité des choses à donner des
consultations, à signer des ordonnances.
Vous en voyez la preuve aujourd'hui
même. La différence, c'est que si un de
nos camarades, docteur, se trompe et est
poursuivi, toute la Faculté se serre autour
de lui. Nous, nous n'avons pas droit à
exercer. Si nous signions une ordon-
nance dont le résultat fût mauvais, et
qu'il y eût une plainte, nous serions con-
damnés sans miséricorde. Les exemples
ne sont pas nombreux, mais il y en a
P.11 -
Il ne serait que juste de permettre à
des jeunes gens dont on paie si peu les
services, de se munir d'un titre qui leur
assurerait la possibilité de dîner le soir
et qui les garantirait contre toute récri-
mination. C'est l'avis de quelques-uns de
nos plus illustres maîtres. Ils ne deman-
deraient pas mieux que d'avoir dans leur
clinicat des docteurs ; ils sont certains
que ces docteurs seraient aussi respec-
tueux et aussi dévoués pour eux que les
jeunes gens à qui l'on interdit ce titre.
— Eh bien ! lui dis-je, il ne faut jamais,
même en badinant, contrevenir à la loi.
Ne me signez pas d'ordonnance. Ecrivez-
moi simplement ce que je dois faire, et
j'enverrai chez le pharmacien en mon
nom. Mais, vraiment, la loi est bizarre!
Francisque Sarcey.
ARRES rATION D'UN GENTLEMAN
Un chèque de 25,000 francs faux. — Un
escroc du grand monde.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Cannes, 5t4 janvier.
Une de nos importantes banques payait,
avant-hier, à un gentleman anglais très
connu dans les principaux clubs, une
somme de 35,000 francs, montant d'un chè-
que de cent livres sterling, daté de Londres
et signé du nom d'un yachtman fort riche
et qui fait de fréquentes visites à notre
littoral.
Hier matin, le directeur de la maison de
banque ayant appris, par dépêche, que la
signature apposée sur le chèque était fausse,
fit immédiatement rechercher le coupable
qui, du reste, n'avait nullement songé à
prendre la fuite.
Le personnage a été arrêté et conduit,
sous bonne escorte, chez le procureur de
la République.
Il paraît que cet étranger est un fils de
famille très prodigue, qui a dépensé en
quelques années 5 a 6 millions.
Il était l'ami d'un prince anglais qui vient
Dasser tous les hivers sur notre littoral.
PLAQUES DE BLINDAGE
D'ALLEMAGNE POUR L'ITALIE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Rome, M janvier.
On annonce le passage, sur la ligne du
Saint-Gothard, d'un nouveau train spécial
chargé de plaques de blindage venant de
Buckau-Magdebourg à destination de la
Spezzia.
Le train doit se composer d'un wagon
spécial à douze essieux, portant une plaque
de 81,000 kil., et d'un autre wagon sembla-
ble portant une plaque de 67,190 kil.
EXPLOSION D'UNE CARTOUCHERIE
Les victimes
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Edimbourg, M janvier.
Hier, à cinq heures, a eu lieu une terri-
ble explosion dans la cartoucherie de Ros-
lin, près d'Edimbourg ; six hommes ont été
tués et un grand nombre blessés.
On a ressenti la commotion à plusieurs
kilomètres de distance. La cause de l'explo-
sion, qui s'est produite dans l'alier de
mélange des poudres, est cac3rié incoauue.
RAPPORT
FAIT AU NOM DE LA COMMISSION
CHARGÉE
de faire une enquête sur l'élection de
M. Loreau dans l'arrondissement
de Gien (Loiret), par M. de La—
nessan, député.
- Messieurs, -.
Conformément au désir que vous avez
manifesté, votre commission s'est fait un
devoir de procéder avec la plus grande ac-
tivité à l'enquête sur l'élection de Gien dont
vous l'avez chargée.
Elle a nommé une sous-commission qui,
après avoir entendu à Paris les personnes
qui lui en avaient adressé la demande, est
partie pour Gien le mardi Il décembre. Le
même jour, à trois heures, dans une des
salles de la sous-préfecture, elle procédait
à l'audition des témoins qui avaient été
préalablement convoqués. Le jeudi, le ven-
dredi, le samedi, le dimanche et le lundi
suivants, elle a tenu chaque jour deux lon-
gues séances et n'a clôturé ses travaux que
lundi soir 17 décembre, après avoir en-
tendu tous les témoins qui lui avaient été
désignés par les parties intéressées ou
qu'elle-même avait cru devoir faire appe-
ler.
La facilité des communications et l'em-
pressement des témoins ont permis à la
sous-commission de faire toute son enquête
sans quitter le chef-lieu d'arrondissement.
Elle a, du reste, été beaucoup aidée dans
ses travaux par les jugements et les ins-,
trustions judiciaires que M. le procureur
de la République et M. le juge d'instruction
lui ont communiqués, conformément aux
précédents.
Le nombre des témoins entendus a été de
250. Tous les témoins ont été invités à prê-
ter serment avant de déposer; aucun ne s'y
est refusé. Toutes les dépositions ont été
recueillies intégralement par la sténogra-
phie et analysées en même temps par le
greffier de la sous-commission. Elles ont
toutes été signées, séance tenante, après lec-
ture à haute voix.
En résumé, votre commission a pris tou-
tes les mesures pour que l'enquête ordon-
née par la Chambre fût aussi complète que
possible et offrit des garanties d'absolue im-
partialité. Quant aux conclusions qu'elle a
l'honneur de vous présenter, elle les appuie
exclusivement sur les faits qui ne peuvent
être l'objet d'aucune contestation. Elle a
eu soin de laisser tous les autres de côté.
Disons, tout d'abord, que l'enquête faite
sur place par votre commission a eu pour
résultat la confirmation de tous les faits si-
gnalés déjà dans son rapport et à la tribune
par le rapporteur de votre sixième bureau,
notre honoroble collègue M. Jourdan. (Voir
Journal officiel, séances du 25 novembre et
du 3 décembre 1889.)
Vous n'avez pas oublié que ces faits àvaient
déterminé votre sixième bureau à vous pro-
poser l'annulation des opérations électora-
les de l'arrondissement de Gien.
Afin d'avoir une idée exacte des manœu-
vres qui ont entaché l'élection de l'arron-
dissement de Gien, il est nécessaire de con-
naître l'état des partis dans cet arrondisse-
ment et la situation particulière du candi-
dat qui a obtenu la majorité des suffrages,
majorité qui'n'a été que de 76 voix sur
lh,816 votants.
Depuis 1871, toutes les élections législa-
tives avaient assuré, dans l'arrondissement
de Gien, le triomphe des républicains, avec
une forte majorité.
Cependant il existait une minorité mo-
narchiste dont M. Loreau est l'un des re-
présentants dans le conseil général du
Loiret. C'est M. Loreau qui fut choisi par
l'alliance des monarchistes, des bonapar-
tistes et des boulangistes, comme candidat
de tous les adversaires de la République
dans l'arrondissement de Gien. (Voir la liste
publiée par l'Autorité dans son numéro du
33 août 1889.)
M. Loreau était depuis longtemps désigné
par l'ardeur de ses opinions monarchiques
et cléricales et par sa situation industrielle,
pour jouer un rôle dans l'assaut que ses
amis allaient livrer à la République et dont
ils escomptaient à l'avance le succès.
En ce qui concerne ses opinions, il suffira
de rappeler que, quelques mois avant l'ou-
verture de la période électorale, M. Loreau
présidait à Gien une conférence et un ban-
quet dans lequel la République et les répu-
blicains étaient attaqués avec la dernière
violence, où le conférencier proclamait
qu'il fallait « en finir avec la République et
les républicains », et terminait par les cris
de : « Vive Mgr le comte de Paris! »
(Voir l'Indépendant, journal de M. Loreau,
numéro du 15 décembre 1888.)
Il n'est donc pas étonnant que tous les
conservateurs et les cléricaux aient voté
pour M. Loreau, même après qu'il eût fait
acte apparent d'adhésion à la c. République
conservatrice ». Il leur avait donné trop de
gages pour qu'ils pussent attacher la moin-
dre importance a ses déclarations tar-
dives.
Quant à la situation personnelle de M.
Loreau dans l'arrondissement de Gien, il
suffit, pour s'en rendre compte, de savoir
qu'il est directeur de la fabrique de bou-
tons de Briare, administrateur et déten-
teur d'une grande partie des actions de la
faïencerie de Gien, propriétaire à Langesse
de vastes terrains sur lesquels sont occu-
pés de nombreux ouvriers depuis plusieurs
années. Il tenait ainsi entre ses mains le
sort de plus de deux mille ouvriers, sans
parler des nombreux négociants qui, à
Briare et à Gien, vivent en très grande par-
tie de ce qu'ils vendent aux employés et
aux ouvriers des usines.
Son influence était encore accrue par les
conditions particulières dans lesquelles se
fait, en dehors des usines et dans les plus
petits villages de certains cantons, un tra-
vail spécial qui consiste dans l'encartage
des boutons fabriqués à Briare.
Dans chacune des communes où se fait
l'encartage, l'usine de Briare a un représen-
tant qui distribue aux femmes les cartes et
les boutons reçus de la fabrique. Comme il
existe des distributeurs dans une trentaine
de communes, et que chaque distributeur
délivre du travail à plus de deux cents per-
sonnes (déposition d'un employé de la fa-
brique de Briare), il est aisé de se faire une
idée de lnfluence personnelle dont disposait
le candidat monarchiste choisi par l'alliance
de tous les ennemis de la République.
Il s'agissait de se servir de toutes ces in-
fluences pour battre en brèche la foi répu-
blicaine de l'arrondissement de Gien et
permettre à la monarchie de regagner les
voix qui avaient; depuis 1871, assuré la vic-
toire aux républicains.
Aii^isi ce qui caractérise essentiellement
lélectioD de l'arrondissement de Gien, c'est
, "- ')0-'
la pression exercée sur les nombreux ou-
vriers ou négociants qui dépendent plus ou
moins directement des usines de Briare et
de Gien.
Campagne de diffamation contre les
républicains.
Cependant, si grande que fût Finnuenco
personnelle de M: Loreau, ses amis et lui-
même ne la jugèrent pas suffisante. Dès le
commencement du mois de septembre, ils*
entamaient contre les candidats républi-
cains, et particulièrement contre celui qu'ils
redoutaient le plus, une campagne d'inju-
res et - de diffamation - d'une violence tellA
qu'aucun autre arrondissement peut-êÚ(S!
n'en a connu de semblable. Ces faits ayant;
été exposés longuement dans le rapport dej
notre honorable collègue M. Jourdan, eg
dans son discours à la Chambre, il me pa;
raît inutile d'y insister.
Je rappellerai seulement que, le 6 no-'
vembre, le tribunal correctionnel de Gien?
condamna M. Loreau pour avoir diffamé
son adversaire dans une affiche disposée
typographiquement de telle sorte que les
lecteurs pouvaient croire que le candidat
républicain était poursuivi en police cor-
rectionnelle pour avoir commis un faux.
On objectera peut-être que la Cour d'ap-
pel d'Orléans a diminué l'autorité de ce ju-
gement en réduisant la condamnation à un
franc de dommages-intérêts. Il suffit, pour;
répondre à cette objection, de dire que la
Cour d'appel, tout en réduisant la peine, a
« adopté les motifs des premiers juges
où il est dit que « des témoins qui ont dé-
posé à l'audience ont déclaré avoir entendu
dire par certains électeurs qu'ils hésitaient
à voter pour M. Portalis, qui était accusé
d'avoir commis un faux et allait passer en'
police correctionnelle ; par d'autres, qu'ils
ne voteraient pas pour Portalis, qui était
un faussaire ; par d'autres, enfin, des com-
munes de Gien et de Nevoy (et ceci le jour
des élections), que Portalis était en pri-
son M.
La commission s'est aussi préoccupée,
d'un supplément de journal, ayant la forme
d'un placard, sur papier blanc, affiché, d'à"
près plusieurs témoins, dans au moins deux
communes et distribué à des millier?
d'exemplaires pendant l'après-midi du a
octobre, c'est-à-dire trop tard pour qu'on?
pût y répondre. Le candidat de tous, les:
républicains y était représenté « tressant
des chaussons de lisière à la Conciergeri,..
dans la cellule de Troppmann, tandis que
les enfants de seize ans se faisaient tuec.
dans les tranchées Y.
L'enquête a démontré d'une manière ir-
réfutable à votre commission que, parmi les*
distributeurs de ce placard diffamatoires
figurent plusieurs ouvriers de la faïenceri
de Gien dont M. Loreau est un des priuci,
paux actionnaires et administrateurs.
M. Loreau rejette, il est vrai, la respon-
sabilité de cet acte, mais l'enquête a établi, i
et il a avoué lui-même à la tribune de lai
Chambre qu'il a payé le journal par led
soins duquel ce placard diffamatoire a étti;
imprimé et distribué.
Ces manoeuvres diffamatoires nous ont
paru d'autant plus graves qu'elles étaient
émises sous le couvert d'un journal à titre,
républicain, que le placard portait en tête
les mots. « République française M, et qu'il
était imprimé sur papier blanc, tous carac-
tères de nature à lui donner des allures of-
ficielles bien faites pour frapper l'esprit des
populations et pour détourner du candidat
de la République un grand nombre de
voix, ainsi que le déclarent tous les té-
moins républicains entendus par votre
sous-commission.
En même temps, les agents de M. Loreau
proclamaient que M. Augère, candidat ré-
publicain, ancien député, mis en minoritéf
au premier tour de scrutin, s'était désisté
en faveur de M. Loreau.
M. Augère protesta contre ces accusa-
tions,et, dans une lettre adressée à ses amis
politiques, il déclara formellement qu'entre
« M. Loreau, qui veut renverser la Répu-
blique, et M. Portalis qui veut la conserver,
il ne saurait hésiter, et qu'il votera pour
M. Portalis ».
Il résulte, du reste, des dépositions de
plusieurs témoins que, même avant le pre-
mier tour de scrutin, M. Augère avait dé*
claré qu'il se désisterait en faveur de M;
Portalis si ce dernier avait plus de voix
que lui.
Cependant, des affiches placardées jus-
qu'à la dernière heure par M. Loreau et ses
amis niaient l'existence de la lettre de M.
Augère et accusaient de faux ceux qui l'a-
vaient publiée. Ils visaient ainsi un double
but : faire croire aux électeurs que M. Au"
gère était favorable à M. Loreau, et désho-
norer le candidat républicain en l'accusant
une fois de plus d'être un faussaire.
L'emploi de cette manœuvre a été poussé
sé jusqu'à la tribune de la Chambre, où M.
Loreau lui-même a contesté l'existence do
la lettre de M. Augère.
Désireuse d'éclaircir cette question dont
l'importance n'avait échappé a personne au
moment de la discussion publique, votre
commission a demandé et obtenu commu-
nication de la lettre de M. Augère. Elle
porte la date du 38 septembre 1889 et était
adressée par Si. Augère au docteur Defau-
camberge, son ami politique et personnel.
En voici les termes textuels : « Dis à Aupe-
tit, je te prie, qu'hier, avant de quitter Or-
léans, je suis allé voir le directeur du Ré-
publicain oroléanais, et que je lui ai remis
une lettre aux termes de laquelle je remer-
cie les électeurs qui ont voté pour moi et
leur déclare que, fidèle à la discipline répu-
blicaine, je ne serai pas candidat au second
tour. Républicain je suis, républicain je
resterai. Entre M. Loreau, qui veut renver-
ser la République, et M. Portalis, républi-
cain, qui veut la conserver, je ne saurais
hésiter : au jour du vote, je déposerai dans
l'urne un bulletin au nom de M. Portalis. »
M. Augère lui-même a été entendu par
votre commission, et sa déposition contient
les déclarations suivantes : « Vous connais-
sez les résultats du premier tour de scrutin.
M. Portalis a obtenu plus de voix que moi-
et j'ai adressé à un journal du Loiret une
lettre dans laquelle je déclarais que, fidèle
à la discipline républicaine, je ne serais pas
candidat au second tour de scrutin. Le
matin du scrutin, j'ai pris le train pour,
Gien. je me suis rendu à la salle du vote ;
j'ai pris fin bulletin au nom de M. Portalis,
que j'ai plié devant les électeurs, et je l'ai
déposé dans l'urne. Quant à ce qui adonné
lieu à ma lettre, le voici : M. Aupetit-Hu-
bert, que je connais beaucoup, secrétaire
du syndicat des vignerons de Gien, m'a
écrit une lettre pendant que j'étais en voyage,
lettre dans laquelle il me disait : « Nos ad-
versaires prétendent que vous appuyez la
candidature de M. Loreau. Je suis persuadé
que telle n'est pas votre intention ; il serait
donc bon de le faire savoir aux électeurs. »
Je n'ai nas cru devoir répondre à ce îeuae
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.95%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.95%.
- Auteurs similaires Chadeuil Gustave Chadeuil Gustave /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Chadeuil Gustave" or dc.contributor adj "Chadeuil Gustave")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7560125f/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7560125f/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7560125f/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7560125f/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7560125f
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7560125f
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7560125f/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest