Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1891-12-02
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 02 décembre 1891 02 décembre 1891
Description : 1891/12/02 (A21,N7261). 1891/12/02 (A21,N7261).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/04/2013
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Viogtët-unîémé année. — N® 7,261 v CINQ Centimes ~- Paris et Départements - CINO Centimes MERCREDI a DECEMBRE 1891
1
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Levée de Cross e Cr
« Le vent de la bataille sainte souf-
fle partout », s'écrie joyeusement la
Gazette de France, et l'on ne saurait
en effet se dissimuler que nous en-
trons dans une ère de luttes religieuses.
Déjà nous avions les lettres de pres-
que tout l'épiscopat à l'archevêque
d'Aix, lettres pour la plupart em-
preintes de violence et dont quelques-
unes même contenaient des théories
de droit fort anormales. Malgré leur
ton acerbe, on avait pu, avec beau-
coup de bonne volonté, estimer qu'el-
les méritaient l'indulgence. Un pré-
venu et ses partisans ont touj ours la
liberté de plaider leur cause devant le
public avant de la plaider devant le
tribunal et de chercher à provoquer
un mouvement d'opinion en leur fa-
veur.
Mais l'épiscopat ne s'est pas arrêté
en chemin. Ses manifestations conti-
nuent après le procès. M. Gouthe-
Soulard a le martyre bruyant,et c'est
dans un char de triomphe qu'il monte
au Golgotha, entouré des jeunes Elia-
cins des cercles catholiques et salué
de ces acclamations un peu inatten-
dues : "Vive l'archevêque des ou-
vriers 1 » Les évêques lui envoient,
non pas des condoléances, mais des
félicitations : ci Vous aviez à côté de
vous à l'audience, s'écrie l'un des plus
intransigeants, M. Cotton, évêque de
Valence, soixante de vos collègues,
cardinaux, archevêques et évêques, et
nous avons tous été condamnés en
votre personne. » Et l'évêque de
Cahors, M. Grimardias, lui écrit : « Ce
n'est pas votre personne que vous
avez cherché à défendre : c'est l'épis-
copat dont vous avez défendu les
droits et la dignité ; aussi, je ne crains
pas de vous dire, moi qui suis un des
doyens de cet épiscopat, que nous
sommes avec vous dans cette circons-
tance et que nous sommes tous atteints
dans votre condamnation. »
La droite royaliste de la Chambre
ne reste pas en arrière, et hier, sur la
proposition de M. de Cazenove de
Prauines, elle envoyait une adresse de
délicitations respectueuses" à l'ar-
chevêque d'Aix; et ceci n'est pas un
des faits les moins intéressants,car on
y peut voir une indication très nette
de ce que serait la politique religieuse
de la monarchie si elle venait à être
restaurée.
C'est donc une levée de crosses qui
s'accomplit, et déjà l'on prédit « une
concentration de l'épiscopat pour la
défense des droits de la vérité et de la
justice M. « Cette union du clergé et des
fidèles, disent les journaux cléricaux,
sera notre force, et quand on verra
trente millions de catholiques à la suite
de leurs chefs, décidés à sacrifier leur
vie plutôt que leur âme, peut-être corn-
prendra-t-on que la persécution n'est
pas le moyen de pacitier les cœurs et
de rendre à la France sa prospérité et
sa gloire ».
- Il y a dans ces lignes des exagéra-
tions bien grandes. Le gouvernement
de la République n'a nul titre à être
compare à Dioclétien, et les catholi-
ques savent fort bien que leur vie
n'est pas en danger. Ils doivent savoir
aussi que s'ils étaient trente millions
rangés derrière les évêques, ils forme-
raient la majorité ; ils pourraient dès
lors gouverner selon leurs doctrines
et ils ne se feraient pas faute de per-
sécuter leurs adversaires. Nous les
avons vus à l'œuvre à une époque où
ils étaient en majorité dans l'Asseln-
blée nationale et où, après le 16 Mai,
ils s'étaient emparés du gouverne-
ment. Nous, savons comment ils pra-
tiquent le respect de la liberté de
conscience et comment ils entendent
la pacification.
Mais en dégageant de ces exagéra-
tions la pensée fondamentale, on voit
que celle-ci est de former une « con-
centration de l'épiscopat», et l'on peut
dire qu'après les incidents de ces der-
niers temps, après la série de lettres
par laquelle l'épiscopat s'est solida-
rité avec l'archevêque d'Aix, cette
concentration est bien près d'être réa-
lisée. Ce qui peut donner encore plus
d'unité à ce mouvement, c'est la for-
mation de « l'Association pour l'af-
franchissement du pape » dont l'ar-
chevêque de Bordeaux prend l'initia-
tive. bur ce chapitre, l'accord est éta-
bli à l'avance. Le parti clérical n'a ja-
mais cessé de protester contre la dé-
possession du pouvoir temporel; le
pape s'est toujours considéré, depuis
l'entrée des Italiens à Rome, comme
prisonnier dans le Vatican, et tout ré-
cemment encore, après les incidents
du pèlerinage, cause première des
faits actuels, les journaux cléricaux
ne se faisaient pas faute de répéter
que la coexistence du pouvoir royal
et du pouvoir pontifical à Rome ne
pouvait continuer et que te gouver-
nement italien devait quitter la place.
Ainsi donc, le mouvement clérical
a pour but, à l'intérieur, de grouper
les catholiques autour des évêques et
d'opposer une concentration religieuse
à une action politique ; à l'extérieur,
il peut créer des complications ou du
moins inquiéter certaines puissances
et provoquer une émotion en donnant
à croire que les intentions de la France
ne;sont pas favorables au maintien de
l'état de choses actuel, et l'on sait com-
bien déjà ces prétendues intentions de
la France ont été exploitées, car elles
n'ont été étrangères ni à l'animosité
des Italiens contre nous, ni à leur en-
trée, dans la triple alliance.
On assure que le cabinet s'est ému
de tous ces actes du clergé et que, dans
une entrevue avec le nonce, le minis-
tre des affaires étrangères aurait dé-
claré que si le Vatican ne faisait pas
entendre aux évêques des conseils de
modération, le gouvernement ne s'op-
poserait plus à la séparation des Egli-
ses et de l'Etat. Nous laissons la res-
ponsabilité de cette information au
Gaulois. Mais nous devons constater
que cette simple nouvelle paraît in-
quiéter fort les feuilles pieuses. Avec
une sollicitude touchante, elles nous,
signalent les inconvénients que la sé-
paration pourrait avoir pour nous.
Que quelques-uns de ces inconvénients
soient à craindre, cela est possible.
Mais nous croyons que l'Eglise serait
beaucoup plus embarrassée que nous
et il nous semble que c'était aussi
l'avis de M. Freppel lorsque, naguère,
il combattait la séparation à la tri-
bune de la Chambre. Si l'Eglise veut
le maintien du Concordat, il faut
qu'elle en accepte les obligations et
qu'elle renonce à se proclamer indé-
pendante et à entrer en lutte avec le
pouvoir civil. Quant à faire du Con-
cordat deux parts, l'une des droits,
qu'elle veut garder, l'autre des de-
voirs, auxquels elle prétend se sous-
traire, c'est une méthode commode
mais inacceptable, et aucun gouver-
nement autre qu'un gouvernement
ultramontain ne saurait l'accepter.
Le XIXe SIECLE publiera demain la
« Vie de Paris », par Henry Fouquier.
AU MINISTÈRE DES FINANCES
Le service de l'enregistrement et du tim-
bre à Paris, qui recouvre près de trois cents
millions par an, est, en ce moment, exas-
péré par les excentricités d'un inspecteur
des finances dont M. Rouvier ignore sans
doute le fâcheux état de santé.
Dans les couloirs du ministère, les écarts
de langage et de conduite de ce personnage
inquiétant font chaque jour l'objet d'in-
terminables commentaires,et l'on s'attend à
des conflits qui motiveraient une interven-
tion parlementaire.
Plusieurs députés sont disposés à provo-
quer, à ce sujet, les explications du minis-
tre sur le rôle et le fonctionnement de
l'inspection des finances, au point de vue
des régies financières déjà pourvues du
- double contrôle d'inspecteurs spéciaux.
Wimillllll
LES AFFAIRES
DE M. BAUDRY-D'ASSON
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULlBa)
Nantes, 30 novembres.
Aujourd'hui est venu devant le tribunal
civil de Nantes le procès Baudry-d'Asson.
Voici les faits :
Le fougueux député, jetant l'argent par
les fenêtres, avait contracté de nombreux
emprunts au nom de ses enfants et sur les
biens de ces derniers. On sait que son im-
mense fortune est engloutie. Or, un de ces
emprunts avait été contracté au nom de
Mlle Anne de Baudry-d'Asson, par l'entre-
mise de Me Reliquet, notaire à Nantes, et de
son successeur, Me Mollat; c'est Mme de la
Bassetière qui avait fourni les fonds.
A la mort de celle-ci, ses héritiers récla-
mèrent le remboursement, et, l'échéance
étant venue, ils menacèrent Mlle Anne de
Baudry-d'Asson d'une saisie immobilière.
La jeune fille étant mineure, l'affaire était
délicate; elle vient donc demander au tri-
bunal de condamner les notaires au rem-
boursement de la somme prêtée.
Les débats menacent d'être fort longs. Ils
ne se termineront pas avant mercredi.
SOUVENIR DU KRACH BEX
M. Reumont, prédécesseur de l'agent de
change Bex qui se suicida après la chute
de sa maison, est sorti hier de la prison
d'Etampes après y avoir passé dix mois.
M. Reumont avait été condamné en jan-
vier dernier à quatre qnnées d'emprison-
nement pour sa participation dans les opé-
rations du suicidé.
Il s'en tire franchement à bon compte !
LES CADOUDAL
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULlIW)
Nantes, 30 novembre.
Ces jours derniers, la police ramassait, à
Saint-Mandé, une vieille ivrognesse qui
déclara se nommer Cadoudal et être la der-
nière descendante du fameux chef des
chouans.
La famille de Cadoudal, qui habite Nantes
et Auray, proteste contre cette prétention
qui, du reste, est bien simple à contrôler.
Georges Cadoudal est mort célibataire.
Ses deux frères se sont mariés et ont laissé
des enfants. L'ainé est mort officier général
et sept de ses petitshenfants sont encore
vivants.
Les cinq garçons sont tous officiers et
l'un d'eux est capitaine breveté attaché à
l'état-major du 11° corps, à Nantes.
Quant à la lignée du deuxième, elle se
compose d'un de ses petits-fils qui habite
également la Loire-lnlériçure a~ se$ en-
fants, -
LES
MASSACRES EN CHINE
LES ANARCHISTES
DU CÉLESTE-EMPIRE
Les rebelles chinois. — Massacres de
chrétiens. — Les sociétés secrètes.-
Le patriotisme de la queue.
Les nouvelles reçues de Chine sont fort
peu rassurantes pour les Parisiennes qui
projetaient d'aller assister aux débats de
l'affaire Tcheng-Ki-Tong.
D'après une dépêche expédiée de Tien-
Tsin, deux révoltes sérieuses ont éclaté
dans le voisinage de la grande muraille
septentrionale. Les rebelles ont battu une
armée impériale de A,000 hommes à la-
quelle ils ont tué 700 soldats, et se sont em-
parés de la ville de Chaoyang, située à en-
viron 200 milles nord-est de Pékin.
Un soulèvement encore plus grave a
éclaté dans le district de Takou.
Les mandarins locàux ont conclu avec
les chefs des insurgés un arrangement d'a-
près lequel ceux-ci se sont engagés à épar-
gner les habitants, à la condition que pleine
et entière liberté leur serait laissée de sac-
cager et de piller les maisons des chrétiens
et les maisons européennes.
les maisons des chrétiens ont été aussitôt
livrées aux rebelles, qui ont commis des
actes de férocité inouïs, 300 chrétiens ont
été massacrés ; on croit que pas un seul
d'entre eux n'a échappé.
Les missionnaires protestants ont aban-
donné Tsun-Hoa, situé près de la grande
muraille au nord-est de Pékin, les autori-
tés étant impuissantes à les protéger.
Du reste, le seul fait que Li-Hung-Chang
a fait prendre le chemin de fer aux troupes
qu'il expédie contre les rebelles semble
démontrer que le gouvernement n'est pas
très rassuré.
D'autre part, le Daily Chronicle de Lon-
dres publie la dépêche suivante :
Les atrocités commises par les rebelles à
Takou sont sans précédent. Les membres de la
mission belge ont été massacrés avec une
cruauté diabolique.
Des enfants ont été percés de coups de cou-
teau et leurs cadavres rôtis sur des bra-
siers.
Les religieuses, après avoir subi les derniers
outrages, ont été assommées à coups de mas-
sue.
Les prêtres belges ont été mis à la torture et
ont fait preuve d'une résignation héroïque.
L'un d'eux a eu le cœur et la langue arra-
cnes.
Les bourreaux ont été accueillis et fêtés par
les principaux mandarins de la province.
Les représentants des puissances à Pékin
sont furieux, la colonie européenne est indi-
gnée.
Les rebelles continuent leur marche en avant
et occupent les villes sans rencontrer de résis-
tance.
Faut-il voir là une simple insurrection
locale ; doit-on, au contraire, considérer
ces massacres comme le prélude d'une ré-
volution générale contre la dynastie ré-
gnante, ou d'un mouvement national dirigé
contre les Européens? Telle est la question
que tout le monde se pose et que nous
avons soumise hier à un diplomate ayant
habité la Chine, où il a encore séjourné
tout récemment.
Les rebelles
— Nous n'avons pas encore de rensei-
gnements suffisants, nous dit notre interlo-
cuteur, pour apprécier sérieusement la si-
tuation. Toutefois, a priori, j'incline à
croire qu'on se trouve simplement en pré-
sence d'une bande de pillards, de plusieurs
bandes même, si vous voulez.
Le « rebelle » fleurit en Chine à l'état con-
tinu. La population, beaucoup trop dense,
a toujours grand'peine à se nourrir. Que la
récolte manque dans un village, aussitôt
les habitants les plus décidés se mettent en
route vers une région plus riche et brûlent
le premier hameau qu'ils rencontrent.
Les malheureux incendiés s'enfuient vers
le village suivant, qui est abandonné dès
qu'on connaît l'approche des bandits, et
lorsque ces derniers arrivent, ils s'instal-
lent sans coup férir, mettant tout au pil-
lage.
En opérant à une distance suffisante des
villes de garnison, ils sont certains de ne
rencontrer aucune résistance et, en quel-
ques semaines, ils ravagent toute une ré-
gion. Après quoi ils s'en retournent avec
leur butin et se dispersent comme par en-
chantement.
J'ai vu plusieurs campagnes de ce genre
pendant mon séjour en Chine, et je serais
assez porté à croire que les insurgés actuels
sont tout bonnement des malheureux rui-
nés par les mauvaises récoltes et par les
inondations du nord.
La politique de la queue
Il faut d'ailleurs d'autant plus se défier
de l'appréciation des Chinois que les man-
darins ont toujours soin de présenter ces
faits de piraterie comme des complots di-
rigés contre la dynastie, qu'ils se vantent
ensuite d'avoir sauvée une nouvelle fois.
J'ignore quel est exactement l'état psycho-
logique actuel du citoyen chinois, mais je
crois la dynastie actuelle beaucoup plus
solide qu'on affecte parfois de le préten-
dre. Cette dynastie, d'origine tartare, règne
depuis le commencement du dix-septième
siècle, et non seulement la défaveur qui
dans le principe entourait le conquérant
a disparu,s mais encore les mœurs qu'elle a
introduite dans le Céleste-Empire sont au-
jourd'hui considérées comme mœurs chi-
noises.
Pour ne citer qu'un exemple, la fameuse
queue est l'antique coiffure des combat-
tants mandchous qui, à l'instar des Francs
nos ancêtres, y voyaient une protection
comme la crinière du casque et s'en ser-
vaient pour attacher leurs armes au-dessus
de leurs têtes quand ils traversaient un
fleuve à la nage. La queue fut imposée aux
Chinois par les Tartares comme une mar-
que de soumission, et dans les premiers
temps qui suivirent la conquête, on tuait
tous ceux qui ne la portaient pas.
Aujourd'hui le Chinois a oublié tout cela,
et il tient plus à sa queue qu'à sa femme.
Les sociétés secrètes
Du reste, continue notre interlocuteur,
les sociétés secrètes qui pullulent en Chine,
et qui constituent la force du mouvement,
ont fort peu d'analogie avec les nôtres.
Jusqu'ici, en effet, on ne leur connaît au-
cun programme socialiste, aucune visée
politique. Ce sont des sociétés de secours
mutuels ayant pour unique objet l'exploi-
tation des non-associés. Chaque adepte
d'une de ces confréries reçoit un tiéket qui
lui vaut la décapitation de la part du gou-
vernement et la pitance de la part du pre-
mier collègue chçz lequel il se présçnte.
« Tous pour un, un pour tous n, telle est la
devise de ces braves gens qui, en échange
de ce droit à la soupe, font abandon com-
plet de leur personne au profit de la caisse
sociale, dont le gérant peut à tout moment,
sûr d'être obéi, leur donner l'ordre d'aller
« faire un pante ».
C'est en somme une catégorie d'anar-
chistes perfectionnés, car ils agissent, et au
fond ils n'en veulent pas plus aux chré-
tiens qu'aux bouddhistes : ce qu'ils pour-
suivent avant tout, c'est la « réalisation »
du capital. Seulement, il est fort possible
qu'ils s'attaquent de préférence aux Euro-
péens, dans l'espoir de créer au gouverne-
ment des difficultés extérieures dont ils
profiteraient. Ils sont assez intelligents et
assez canailles pour cela. C'est meme, à
mon avis, la façon la plus vraie d'envisager
les événements actuels.
Et l'armée?
— Mais, demandons-nous, comment cela
finira-t-il? Cette première défaite des trou-
pes régulières n'est pas rassurante.
— Elle s'explique par ce fait que les re-
belles, qui savent se battre, comme nous
l'avons appris au Tonkin, auront rencontré
des troupes de première ligne, quelque
chose comme une garde nationale, car l'ar-
mée chinoise est concentrée entre Takou,
Tsien-Tsin et Pékin.
Si le gouvernement agit immédiatement,
il se tirera facilement d'affaire, car ses
troupes sont bien disciplinées. Mais le Chi-
nois, plus dégourdi que nos paysans, ap-
prend en deux jours le maniement d'un
fusil qui étonnerait un Breton pendant six
semaines, et les rebelles peuvent trouver
des armes à tir rapide à Hon g-Kong : en
quinze jours, il leur est donc facile d'orga-
niser une véritable armée. Si le gouverne-
ment ne les disperse pas avant, on ne sau-
rait prévoir ce qui arrivera.
LA BANQUE D'ALGÉRIE
LE RENOUVELLEMENT
DU PRIVILÈGE
M. Nelson-Chiérico est en ce moment à
Paris, où il était venu pour s'occuper du
renouvellement du privilège de la Banque
d'Algérie, dont il est le directeur.
On croyait, en effet, que le renouvelle-
ment du privilège de la Banque d'Algérie
serait discuté en même temps que le renou-
vellement du privilège de la Banque de
France. Les deux privilèges expirent la
même année, en 1897.
Mais jusqu'ici M. Rouvier n'a déposé au-
cun projet dans ce sens.
Le. renouvellement du privilège de la
Banque d'Algérie soulève les plus graves
objections. Les Algériens qui ne sont pas
actionnaires de la banque ou qui n'ont pas
un intérêt électoral au maintien de son
privilège demandent qu'il ne soit pas re-
nouvelé, et que la Banque de France éta-
blisse des succursales en Algérie comme
dans les autres départements.
C'est pour cela que M. Rouvier, d'accord
avec les députés de l'Algérie, veut attendre
que le renouvellement du privilège de la
Banque de France ait été discuté.
Le projet qu'il a déposé pour la Banque
de France fixe le nombre des succursales
qu'elle devra établir et ne parle pas de
l'Algérie. On pense que lorsque ce projet
sera voté il sera difficile d'y revenir et
qu'on obtiendra plus facilement alors le re-
nouvellement du privilège d'une banque
sur laquelle on raconte les histoires les
plus fantastiques et que les colons appel-
lent une des sept plaies de l'Algérie.
M. GOUTHE-SOULARD
ET LA DROITE ROYALISTE
La droite royaliste de la Chambre, trou-
vant sans doute insuffisants les témoigna-
ges de sympathie adressés par le clergé
français à M. Gouthe-Soulard, a voulu y
joindre ses félicitations.
Réunis hier dans un des bureaux de la
Chambre, les membres de ce groupe, sur la
proposition de M. de Cazenove de Pradines,
ont « adressé leurs félicitations respectueu-
ses à l'archevêque d'Aix à l'occasion des
nobles paroles qu'il vient de faire entendre
pour la défense des droits de l'Eglise et de
l'honneur français ».
LA RENTRÉE DU MARTYR
Aix, 30 novembre.
M. Gouthe-Soulard est arrivé à quatre
heures à Aix ; il a été reçu à la gare par le
clergé diocésain. Un millier de curieux en-
viron assistaient à son arrivée. L'archevê-
que a été l'objet de manifestations sympa-
thiques, mais discrètes. Au sortir de la ga-
re, comme il montait en voiture, quelques
prêtres ayant .-applaudi, des sifflets ont
éclaté.
La foule a suivi le cortège jusqu'à la place
de l'Archevêché.
Là, les sifflets continuant, la police a dû
intervenir. L'archevêque est entré dans
l'archevêché, où l'attendaient les représen-
tants des œuvres religieuses du diocèse.
M. Gouthe-Soulard s'est alors rendu dans
le grand salon où étaient exposés tous les
cadeaux reçus ces jours derniers; une
grande mitre en fleurs naturelles, une
crosse et tous les ornements sacerdotaux,
une grande quantité de bouquets, une pal-
me d'or et d'autres objets.
LA GRÈVE TERMINÉE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Lens, 30 novembre.
Une importante réunion a eu lieu à la
salle Gauthier. M. Basly a exposé les con-
cessions obtenues hier par les mineurs. Il
invite les ouvriers à obéir au mot d'ordre :
reprise du travail.
Un ordre du jour de félicitations est voté
en faveur des arbitres ouvriers. Puis on
décide de faire appel à la clémence des
membres du Parlement pour faire obtenir
la grâce des mineurs condamnés.
La reprise générale du travail aura lieu
demain.
L'ÉLECTION DE ROANNE
Saint-Etienne, 30. novembre. — Le parti ou-
vrier de Roanne a tenu hier soir, à Charlieu,
un nouveau congrès à l'effet de choisir un
candidat pour l'élection dans la deuxième cir-
conscription de Roanne. -
MM. Camélinat, Ferroul et Lacbize, députés,
assistaient à ce congrès.
M, Carndinat a été choisi comme candidat,
contre M. Delmores, rédacteur en cbçj cfu So-
cialiste ronemiais,
CHRONIQUE
C'est une histoire vraiment effrayante,
que celle de ce gamin de onze ans qui,
précoce Antony, assassine une fillette qui
ui a résisté; On a beau avoir du tempé-
rament, dans le Midi, c'est tout de même
s'y prendre un peu tôt que de jouer à cet
âge les héros de crimes passionnels! H
est épouvantable, ce gamin tout frêle,
tout petit, sournois .et pleurard, qui
déjà ne badine plus avec l'amour et n'ad-
met point qu'on lui refuse les faveurs
qu'il exige.
On l'a nécessairement acquitté, comme
« ayant agi sans discernement", encore
que cet accusé de onze ans se soit dé-
fendu non sans rouerie comme l'eût fait
un malfaiteur « professionnel". Et c'est
cela le problème terrible! C'est que ce
petit misérable a attesté une remarqua-
ble intelligence. Aussitôt le crime com-
mis, il avait eu, avec un parfait sang-
froid, l'idée de se constituer un alibi. En
outre, il avait fait la leçon à son frère et
à sa sœur, moins âgés que lui. En usant
de menaces et de promesses, il leur avait
ordonné de déclarer qu'ils avaient vu « un
vagabond, avec une grande barbe noire,
portant un bâton à la main et un sac sur
l'épaule. » II avait dès lors songé à son
plan de défense, et ce vagabond imagi-
naire devait porter tout le poids du for-
fait. Où avait-il trouvé, d'une façon in-
génieuse, toute cette argumentation qui
eût pu égarer la justice ? Par quelle divi-
nation du mal se préparait-il avec autant
de calme qu'un vieux bandit à repousser
l'accusation qui allait être portée contre
lui?
Le « discernement", malheureusement,
et par un lamentable défi contre les lois
\.-'de la nature, apparaît clairement chez
cet enfant. Ce n'est pas seulement, ce
petit monstre, un jeune sauvage emporté
par des instincts prématurément vio-
lents; il est, hélas, parfaitement capable
de raisonnement, et le cas est, ainsi,
beaucoup plus triste. Il se rend très bien
compte de ce qu'il a fait, puisque, en-
core tout souillé de sang, il ne pense
qu'aux moyens de dissimuler son affreuse
action. Ce n'est pas un fou, comme cet
autre enfant assassin de son âge, nommé,
je crois, Lemaire, qui, un jour, entraîna
un pauvre petiot et le tua, dans un accès
de démence furieuse, uniquement pour
le plaisir de tuer.
Acquitté par le jury, comme il ne pou-
vait en être autrement, le précoce meur-
trier, qui a comparu devant la cour d'as-
sises de l'Aude, a été envoyé dans une
maison de correction. C'était l'issue pré-
vue de ce procès. Il y restera, dit l'arrêt
du tribunal, jusqu'à dix-huit ans.
Eh bien, on peut se demander, sans
risquer là aucun paradoxe, s'il n'eût pas
été plus humain de le considérer comme
un assassin ordinaire et de le condamner
tout de suite comme tel. Je m'explique,
car on entend bien qu'il n'est pas dans
mes habitudes de réclamer plus de sévé-
rité de la part des tribunaux, auxquels
on peut si souvent, au contraire, repro-
cher de manquer de philosophique équité
et de pitié.
Je veux dire seulement ceci : Avec le
système actuel de répression contre l'en-
fance coupable, à quoi bon prendre la
peine d'élever ce petit malheureux pour
faire sûrement de lui un criminel dan-
gereux ? La maison de correction va le
garder sept ans. Il n'est que trop certain
que, lorsqu'il en sortira, il sera un enne-
mi déclaré de la société, comme on dit
un peu solennellement, et qu'ilserl fer-
mement disposé à lui faire tout le mal
possible, ayant achevé de se pervertir
sans remède, assoiffé de prendre sa re-
vanche contre un régime qui n'aura pu
avoir aucune action morale sur sa dé-
pravation. Il ne sera pas plus tôt libre
qu'il commettra de nouveau quelque at-
tentat. rrui ne sera nlus Henlement un at-
tentat « passionnel », celui-là. On l'arrê-
tera encore ; cette fois, on le condamnera,
et le souvenir de son crime d'enfant ren-
dra la condamnation d'une suprême ri-
gueur. Alors, pourquoi le ménager, avec
je ne sais qu'elle hypocrisie, jusque-là ?
Il serait plus charitable de se débarrasser
de lui tout de suite.
Dira-t-on que j'arrange l'avenir de ce
jeune misérable à ma façon, avec quel-
que imagination, poussant complaisam-
ment au noir le tableau? Il y a cependant
assez d'exemples qui justifient cette hy-
pothèse. C'est l'ordinaire résultat, que
tous ceux qui passent par la maison de
correction n'y nourrissent que des senti-
ments de révolte et de haine, n'y appren-
nent que la dissimulation, et, en dépit
du régime cellulaire le plus sévère, y
font l'apprentissage du crime. Où sont-
ils ceux qui, libérés, ne songent qu'à ra-
cheter leurs erreurs d'autrefois? Si un
enfant qui n'a sur la conscience que de
menues fautes, qui furent vraiment le
fait de son inconscience, est mûr, en
quittant la maison de correction, pour
les pires actions, à plus forte raison
un coupable comme ce petit Louis Oulès
ne doit que s'y endurcir, s'y aguerrir
dans le mal.
Voyons, raisonnablement, à qui fera-
t-on croire que la cellure, que la priva-
tion d'air et de lumière, que toute la
barbarie des règlements administratifs
soit capable de lui inspirer de salutaires
réflexions, de lui faire prendre en hor-
reur le crime qu'il a commis? Tout ce
que le régime de la maison de correction
est susceptible d'obtenir, c'est une sour-
noise apparence de résignation. Mais du
sérieux repentir ? Ce serait trop aisé s'il
en était sinsi. Il est évident, au contraire,
que, peu à peu, il se transformera à ses
yeux en victime, que sa rancune gran-
dira avec les années, qu'il perdra ses
dernières notions de conscience, qu'il
n'aspirera qu'au momentpassions courront se déchaîner. C'est
r alors qu'on le rendra à la liberté. Il n'y a
pas besoin d'être sorcier pour prédire
l'usage qu'il en fera. Il ne la gardera pas
longtemps.
Est-ce que cela n'est pas fait pour ins-
pirer des réflexions graves ? Est-ce que
cela n'est pas intéressant, douloureuse-
ment intéressant, ce cas d'un enfant de
onze ans, ayant toute une vie devant lui
pour racheter peut-être, s'il était bien
dirigé, son incroyable crime, et que, avec
les moyens actuels, on se sent d'avance
impuissant à sauver ? Si pervers qu'il
soit, est-ce qu'il n'y a qu'à se décourager,
à laisser les choses suivre fatalement leun
cours? Est-ce qu'il n'y a vraiment plus de'
ressources vis-à-vis de ce gamin, méchant,
abominable même, mais si petit? Quelle
expérience à tenter, pourtant, — préci-
sément parce qu'il est particulièrement
coupable!
Avec la maison de correction telle
qu'elle est présentement conçue, on peut
prévoir mathématiquement, pour ainsi
dire, le temps où il sera prêt pour l'écha-
faud, et j'estime que cette certitude qu'il
est permis d'avoir ne fait pas l'éloge de
notre système de répression.
On suppose bien que ce n'est pas l'am-
nistie que je souhaite pour cet enfant,
que j'ai montré à dessein criminel comme
il l'est, avec l'aggravation qu'il est intel-
ligent et presque responsable. Je vou-
drais seulement que son internement
servît à l'amender, au lieu de le précipi-
ter fatalement encore plus bas et de Io
fortifier err quelque sorte dans le maïL
Le crime d'un enfant aussi jeune a été
exceptionnel. Ne devrait-on pas aussi lui
appliquer un traitement exceptionnel,;
consistant en une autre méthode que
celle qui est habituellement employée
et qui donne de si piteux résultats ? J1 YI,
aurait là une épreuve à faire qui serait,
philosophiquement, singulièrement atta--
chante, une cure morale à entreprendre,
avec des procédés moins bêtes que la cel-r
Iule et le cachot, qui, en raison de l'âge
et de la culpabilité du sujet, vaudrait la
peine d'être essayée. Mais les règlementSJ.1
mais la routine, mais la peur des modifi-
cations à nos vieux errements !. Et c'est
pourquoi j'ai pu dire qu'un acquitte-
ment qui avait pour corollaire l'ordi-
naire maison de correction n'était qu'une
condamnation différée, et qu'il était plus
cruel que le châtiment immédiat..
Paul Ginisty.
LES SEMAILLES
Des renseignements qui nous parviennent
de la direction de l'agriculture, il résulte
que les semailles d'automne se sont faites
dans de bonnes conditions, sauf sur quel-
ques points où les gelées avaient entravé
les travaux pendant quelques jours. La le-
vée des premiers blés se fait bien et la cul-
ture se montre jusqu'à présent satisfaite de
ses ensemencements ; dans les régions du
nord, les semailles se continuent par un
temps doux et pluvieux.
Mais si, en France, on est content du ré-
sultat de ces premiers travaux agricoles, il
n'en est pas de même à l'étranger, notam-
ment en Hongrie, en Roumanie et dans la
Russie méridionale, où l'on a même dû res-
treindre la surface ensemencée en blé. En
Allemagne, les ensemencements ont assez
belle apparence, mais on se plaint de plus
en plus du déficit de la récolte des pom
mes de terre, si importante dans ce pays.
LE TONKIN
LE BUDGET DES COLONIES
A LA CHAMBRE
La discussion générale — Interpella*
tion retirée — Deux grands discours
- M. Delcassé et M. Pelle tan
La' séance a été prise tout entière par la.
discussion générale du budget des colo-
nies. Il y a eu trois discours dont le pre-
mier, et le plus long, hélas! (il a duré près
de deux heures) a été prononcé par M.
Martineau, un député de Paris qui futbou-
langiste.
C'est une interminable conférence sur la
Soudan qu'a placée ainsi M. Martineau sous
prétexte de conseiller au gouvernement de
se méfier du Soudan et de l'engrenage sou-
danais, où nous devons soigneusement évi-
ter de nous laisser, prendre.
La thèse n'était certes pas mauvaise, mais
comme elle a été, un peu plus tard, reprise
par M. Pelletan avec une autorité qui, sans,
doute, fera longtemps encore défaut à M,
Martineau, nous n'avons garde d'insister
sur l'interminable harangue de ce der-i
nier. 1
M. Martineau avait annoncé qu'il inter-,
pellait sur cette affaire du Soudan ; puisy
quand il a eu fini, il a déclaré qu'il renon-
çait à son interpellation. Ayant dissertÓÍ
tout à son aise, il se tenait pour satis-
fait.
La véritable discussion générale du bud-
get des colonies a pu alors commencer.
Jusqu'ici, elle nous a valu deux grands'
discours, l'un de M. Delcassé, rapporteur
dudit budget, l'autre de M. Camille Pel;
letan.
Et M. Etienne? Le délicieux sous-secré-i
taire d'Etat n'a rien dit encore. Nous don-j
nera-t-il la joie de l'entendre ? Mystère ï4
Toujours est-il que M. Déroulède, pour;
s'être — trop bruyamment, il est vrai —?
étonné de son mutisme, s'est fait adminis-"
trer un bon rappel à l'ordre.
Le rapporteur
M. Delcassé, député de l'Ariège, qui,,
l'an dernier déjà, avait prononcé un remar-
quable discours sur le budget des afiaire3
étrangères, a remporté un égal succès en
traitant la question coloniale. Sa parole est'
facile, tout en restant précise. Bref, la
Chambre l'a écouté avec intérêt et souvent
applaudi.
M. le rapporteur — Ce qui importe, c'est
d'établir une situation claire, afin que la Cham-
bre puisse adopter une solution dont il ma
semble impossible que nous ne soyons pas
unanimes ici à constater la nécessité.
Le gouvernement a demandé un prélèvement
de 18 millions sur les excédents de 1889 pour le
chemin de fer de Phu-Lang-Thuong à Lang-
SOD, et pour le remboursement à la Ccchin-i
chine de ses avances à l'Annam et la delta
qu'elle a contractée, vis-à-is de la Banque
indo-chinoise afin de parfaire le contingent
excessif ttui lui avait été tmposé. v
Viogtët-unîémé année. — N® 7,261 v CINQ Centimes ~- Paris et Départements - CINO Centimes MERCREDI a DECEMBRE 1891
1
ÎÏj K^lJi il J
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Levée de Cross e Cr
« Le vent de la bataille sainte souf-
fle partout », s'écrie joyeusement la
Gazette de France, et l'on ne saurait
en effet se dissimuler que nous en-
trons dans une ère de luttes religieuses.
Déjà nous avions les lettres de pres-
que tout l'épiscopat à l'archevêque
d'Aix, lettres pour la plupart em-
preintes de violence et dont quelques-
unes même contenaient des théories
de droit fort anormales. Malgré leur
ton acerbe, on avait pu, avec beau-
coup de bonne volonté, estimer qu'el-
les méritaient l'indulgence. Un pré-
venu et ses partisans ont touj ours la
liberté de plaider leur cause devant le
public avant de la plaider devant le
tribunal et de chercher à provoquer
un mouvement d'opinion en leur fa-
veur.
Mais l'épiscopat ne s'est pas arrêté
en chemin. Ses manifestations conti-
nuent après le procès. M. Gouthe-
Soulard a le martyre bruyant,et c'est
dans un char de triomphe qu'il monte
au Golgotha, entouré des jeunes Elia-
cins des cercles catholiques et salué
de ces acclamations un peu inatten-
dues : "Vive l'archevêque des ou-
vriers 1 » Les évêques lui envoient,
non pas des condoléances, mais des
félicitations : ci Vous aviez à côté de
vous à l'audience, s'écrie l'un des plus
intransigeants, M. Cotton, évêque de
Valence, soixante de vos collègues,
cardinaux, archevêques et évêques, et
nous avons tous été condamnés en
votre personne. » Et l'évêque de
Cahors, M. Grimardias, lui écrit : « Ce
n'est pas votre personne que vous
avez cherché à défendre : c'est l'épis-
copat dont vous avez défendu les
droits et la dignité ; aussi, je ne crains
pas de vous dire, moi qui suis un des
doyens de cet épiscopat, que nous
sommes avec vous dans cette circons-
tance et que nous sommes tous atteints
dans votre condamnation. »
La droite royaliste de la Chambre
ne reste pas en arrière, et hier, sur la
proposition de M. de Cazenove de
Prauines, elle envoyait une adresse de
délicitations respectueuses" à l'ar-
chevêque d'Aix; et ceci n'est pas un
des faits les moins intéressants,car on
y peut voir une indication très nette
de ce que serait la politique religieuse
de la monarchie si elle venait à être
restaurée.
C'est donc une levée de crosses qui
s'accomplit, et déjà l'on prédit « une
concentration de l'épiscopat pour la
défense des droits de la vérité et de la
justice M. « Cette union du clergé et des
fidèles, disent les journaux cléricaux,
sera notre force, et quand on verra
trente millions de catholiques à la suite
de leurs chefs, décidés à sacrifier leur
vie plutôt que leur âme, peut-être corn-
prendra-t-on que la persécution n'est
pas le moyen de pacitier les cœurs et
de rendre à la France sa prospérité et
sa gloire ».
- Il y a dans ces lignes des exagéra-
tions bien grandes. Le gouvernement
de la République n'a nul titre à être
compare à Dioclétien, et les catholi-
ques savent fort bien que leur vie
n'est pas en danger. Ils doivent savoir
aussi que s'ils étaient trente millions
rangés derrière les évêques, ils forme-
raient la majorité ; ils pourraient dès
lors gouverner selon leurs doctrines
et ils ne se feraient pas faute de per-
sécuter leurs adversaires. Nous les
avons vus à l'œuvre à une époque où
ils étaient en majorité dans l'Asseln-
blée nationale et où, après le 16 Mai,
ils s'étaient emparés du gouverne-
ment. Nous, savons comment ils pra-
tiquent le respect de la liberté de
conscience et comment ils entendent
la pacification.
Mais en dégageant de ces exagéra-
tions la pensée fondamentale, on voit
que celle-ci est de former une « con-
centration de l'épiscopat», et l'on peut
dire qu'après les incidents de ces der-
niers temps, après la série de lettres
par laquelle l'épiscopat s'est solida-
rité avec l'archevêque d'Aix, cette
concentration est bien près d'être réa-
lisée. Ce qui peut donner encore plus
d'unité à ce mouvement, c'est la for-
mation de « l'Association pour l'af-
franchissement du pape » dont l'ar-
chevêque de Bordeaux prend l'initia-
tive. bur ce chapitre, l'accord est éta-
bli à l'avance. Le parti clérical n'a ja-
mais cessé de protester contre la dé-
possession du pouvoir temporel; le
pape s'est toujours considéré, depuis
l'entrée des Italiens à Rome, comme
prisonnier dans le Vatican, et tout ré-
cemment encore, après les incidents
du pèlerinage, cause première des
faits actuels, les journaux cléricaux
ne se faisaient pas faute de répéter
que la coexistence du pouvoir royal
et du pouvoir pontifical à Rome ne
pouvait continuer et que te gouver-
nement italien devait quitter la place.
Ainsi donc, le mouvement clérical
a pour but, à l'intérieur, de grouper
les catholiques autour des évêques et
d'opposer une concentration religieuse
à une action politique ; à l'extérieur,
il peut créer des complications ou du
moins inquiéter certaines puissances
et provoquer une émotion en donnant
à croire que les intentions de la France
ne;sont pas favorables au maintien de
l'état de choses actuel, et l'on sait com-
bien déjà ces prétendues intentions de
la France ont été exploitées, car elles
n'ont été étrangères ni à l'animosité
des Italiens contre nous, ni à leur en-
trée, dans la triple alliance.
On assure que le cabinet s'est ému
de tous ces actes du clergé et que, dans
une entrevue avec le nonce, le minis-
tre des affaires étrangères aurait dé-
claré que si le Vatican ne faisait pas
entendre aux évêques des conseils de
modération, le gouvernement ne s'op-
poserait plus à la séparation des Egli-
ses et de l'Etat. Nous laissons la res-
ponsabilité de cette information au
Gaulois. Mais nous devons constater
que cette simple nouvelle paraît in-
quiéter fort les feuilles pieuses. Avec
une sollicitude touchante, elles nous,
signalent les inconvénients que la sé-
paration pourrait avoir pour nous.
Que quelques-uns de ces inconvénients
soient à craindre, cela est possible.
Mais nous croyons que l'Eglise serait
beaucoup plus embarrassée que nous
et il nous semble que c'était aussi
l'avis de M. Freppel lorsque, naguère,
il combattait la séparation à la tri-
bune de la Chambre. Si l'Eglise veut
le maintien du Concordat, il faut
qu'elle en accepte les obligations et
qu'elle renonce à se proclamer indé-
pendante et à entrer en lutte avec le
pouvoir civil. Quant à faire du Con-
cordat deux parts, l'une des droits,
qu'elle veut garder, l'autre des de-
voirs, auxquels elle prétend se sous-
traire, c'est une méthode commode
mais inacceptable, et aucun gouver-
nement autre qu'un gouvernement
ultramontain ne saurait l'accepter.
Le XIXe SIECLE publiera demain la
« Vie de Paris », par Henry Fouquier.
AU MINISTÈRE DES FINANCES
Le service de l'enregistrement et du tim-
bre à Paris, qui recouvre près de trois cents
millions par an, est, en ce moment, exas-
péré par les excentricités d'un inspecteur
des finances dont M. Rouvier ignore sans
doute le fâcheux état de santé.
Dans les couloirs du ministère, les écarts
de langage et de conduite de ce personnage
inquiétant font chaque jour l'objet d'in-
terminables commentaires,et l'on s'attend à
des conflits qui motiveraient une interven-
tion parlementaire.
Plusieurs députés sont disposés à provo-
quer, à ce sujet, les explications du minis-
tre sur le rôle et le fonctionnement de
l'inspection des finances, au point de vue
des régies financières déjà pourvues du
- double contrôle d'inspecteurs spéciaux.
Wimillllll
LES AFFAIRES
DE M. BAUDRY-D'ASSON
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULlBa)
Nantes, 30 novembres.
Aujourd'hui est venu devant le tribunal
civil de Nantes le procès Baudry-d'Asson.
Voici les faits :
Le fougueux député, jetant l'argent par
les fenêtres, avait contracté de nombreux
emprunts au nom de ses enfants et sur les
biens de ces derniers. On sait que son im-
mense fortune est engloutie. Or, un de ces
emprunts avait été contracté au nom de
Mlle Anne de Baudry-d'Asson, par l'entre-
mise de Me Reliquet, notaire à Nantes, et de
son successeur, Me Mollat; c'est Mme de la
Bassetière qui avait fourni les fonds.
A la mort de celle-ci, ses héritiers récla-
mèrent le remboursement, et, l'échéance
étant venue, ils menacèrent Mlle Anne de
Baudry-d'Asson d'une saisie immobilière.
La jeune fille étant mineure, l'affaire était
délicate; elle vient donc demander au tri-
bunal de condamner les notaires au rem-
boursement de la somme prêtée.
Les débats menacent d'être fort longs. Ils
ne se termineront pas avant mercredi.
SOUVENIR DU KRACH BEX
M. Reumont, prédécesseur de l'agent de
change Bex qui se suicida après la chute
de sa maison, est sorti hier de la prison
d'Etampes après y avoir passé dix mois.
M. Reumont avait été condamné en jan-
vier dernier à quatre qnnées d'emprison-
nement pour sa participation dans les opé-
rations du suicidé.
Il s'en tire franchement à bon compte !
LES CADOUDAL
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULlIW)
Nantes, 30 novembre.
Ces jours derniers, la police ramassait, à
Saint-Mandé, une vieille ivrognesse qui
déclara se nommer Cadoudal et être la der-
nière descendante du fameux chef des
chouans.
La famille de Cadoudal, qui habite Nantes
et Auray, proteste contre cette prétention
qui, du reste, est bien simple à contrôler.
Georges Cadoudal est mort célibataire.
Ses deux frères se sont mariés et ont laissé
des enfants. L'ainé est mort officier général
et sept de ses petitshenfants sont encore
vivants.
Les cinq garçons sont tous officiers et
l'un d'eux est capitaine breveté attaché à
l'état-major du 11° corps, à Nantes.
Quant à la lignée du deuxième, elle se
compose d'un de ses petits-fils qui habite
également la Loire-lnlériçure a~ se$ en-
fants, -
LES
MASSACRES EN CHINE
LES ANARCHISTES
DU CÉLESTE-EMPIRE
Les rebelles chinois. — Massacres de
chrétiens. — Les sociétés secrètes.-
Le patriotisme de la queue.
Les nouvelles reçues de Chine sont fort
peu rassurantes pour les Parisiennes qui
projetaient d'aller assister aux débats de
l'affaire Tcheng-Ki-Tong.
D'après une dépêche expédiée de Tien-
Tsin, deux révoltes sérieuses ont éclaté
dans le voisinage de la grande muraille
septentrionale. Les rebelles ont battu une
armée impériale de A,000 hommes à la-
quelle ils ont tué 700 soldats, et se sont em-
parés de la ville de Chaoyang, située à en-
viron 200 milles nord-est de Pékin.
Un soulèvement encore plus grave a
éclaté dans le district de Takou.
Les mandarins locàux ont conclu avec
les chefs des insurgés un arrangement d'a-
près lequel ceux-ci se sont engagés à épar-
gner les habitants, à la condition que pleine
et entière liberté leur serait laissée de sac-
cager et de piller les maisons des chrétiens
et les maisons européennes.
les maisons des chrétiens ont été aussitôt
livrées aux rebelles, qui ont commis des
actes de férocité inouïs, 300 chrétiens ont
été massacrés ; on croit que pas un seul
d'entre eux n'a échappé.
Les missionnaires protestants ont aban-
donné Tsun-Hoa, situé près de la grande
muraille au nord-est de Pékin, les autori-
tés étant impuissantes à les protéger.
Du reste, le seul fait que Li-Hung-Chang
a fait prendre le chemin de fer aux troupes
qu'il expédie contre les rebelles semble
démontrer que le gouvernement n'est pas
très rassuré.
D'autre part, le Daily Chronicle de Lon-
dres publie la dépêche suivante :
Les atrocités commises par les rebelles à
Takou sont sans précédent. Les membres de la
mission belge ont été massacrés avec une
cruauté diabolique.
Des enfants ont été percés de coups de cou-
teau et leurs cadavres rôtis sur des bra-
siers.
Les religieuses, après avoir subi les derniers
outrages, ont été assommées à coups de mas-
sue.
Les prêtres belges ont été mis à la torture et
ont fait preuve d'une résignation héroïque.
L'un d'eux a eu le cœur et la langue arra-
cnes.
Les bourreaux ont été accueillis et fêtés par
les principaux mandarins de la province.
Les représentants des puissances à Pékin
sont furieux, la colonie européenne est indi-
gnée.
Les rebelles continuent leur marche en avant
et occupent les villes sans rencontrer de résis-
tance.
Faut-il voir là une simple insurrection
locale ; doit-on, au contraire, considérer
ces massacres comme le prélude d'une ré-
volution générale contre la dynastie ré-
gnante, ou d'un mouvement national dirigé
contre les Européens? Telle est la question
que tout le monde se pose et que nous
avons soumise hier à un diplomate ayant
habité la Chine, où il a encore séjourné
tout récemment.
Les rebelles
— Nous n'avons pas encore de rensei-
gnements suffisants, nous dit notre interlo-
cuteur, pour apprécier sérieusement la si-
tuation. Toutefois, a priori, j'incline à
croire qu'on se trouve simplement en pré-
sence d'une bande de pillards, de plusieurs
bandes même, si vous voulez.
Le « rebelle » fleurit en Chine à l'état con-
tinu. La population, beaucoup trop dense,
a toujours grand'peine à se nourrir. Que la
récolte manque dans un village, aussitôt
les habitants les plus décidés se mettent en
route vers une région plus riche et brûlent
le premier hameau qu'ils rencontrent.
Les malheureux incendiés s'enfuient vers
le village suivant, qui est abandonné dès
qu'on connaît l'approche des bandits, et
lorsque ces derniers arrivent, ils s'instal-
lent sans coup férir, mettant tout au pil-
lage.
En opérant à une distance suffisante des
villes de garnison, ils sont certains de ne
rencontrer aucune résistance et, en quel-
ques semaines, ils ravagent toute une ré-
gion. Après quoi ils s'en retournent avec
leur butin et se dispersent comme par en-
chantement.
J'ai vu plusieurs campagnes de ce genre
pendant mon séjour en Chine, et je serais
assez porté à croire que les insurgés actuels
sont tout bonnement des malheureux rui-
nés par les mauvaises récoltes et par les
inondations du nord.
La politique de la queue
Il faut d'ailleurs d'autant plus se défier
de l'appréciation des Chinois que les man-
darins ont toujours soin de présenter ces
faits de piraterie comme des complots di-
rigés contre la dynastie, qu'ils se vantent
ensuite d'avoir sauvée une nouvelle fois.
J'ignore quel est exactement l'état psycho-
logique actuel du citoyen chinois, mais je
crois la dynastie actuelle beaucoup plus
solide qu'on affecte parfois de le préten-
dre. Cette dynastie, d'origine tartare, règne
depuis le commencement du dix-septième
siècle, et non seulement la défaveur qui
dans le principe entourait le conquérant
a disparu,s mais encore les mœurs qu'elle a
introduite dans le Céleste-Empire sont au-
jourd'hui considérées comme mœurs chi-
noises.
Pour ne citer qu'un exemple, la fameuse
queue est l'antique coiffure des combat-
tants mandchous qui, à l'instar des Francs
nos ancêtres, y voyaient une protection
comme la crinière du casque et s'en ser-
vaient pour attacher leurs armes au-dessus
de leurs têtes quand ils traversaient un
fleuve à la nage. La queue fut imposée aux
Chinois par les Tartares comme une mar-
que de soumission, et dans les premiers
temps qui suivirent la conquête, on tuait
tous ceux qui ne la portaient pas.
Aujourd'hui le Chinois a oublié tout cela,
et il tient plus à sa queue qu'à sa femme.
Les sociétés secrètes
Du reste, continue notre interlocuteur,
les sociétés secrètes qui pullulent en Chine,
et qui constituent la force du mouvement,
ont fort peu d'analogie avec les nôtres.
Jusqu'ici, en effet, on ne leur connaît au-
cun programme socialiste, aucune visée
politique. Ce sont des sociétés de secours
mutuels ayant pour unique objet l'exploi-
tation des non-associés. Chaque adepte
d'une de ces confréries reçoit un tiéket qui
lui vaut la décapitation de la part du gou-
vernement et la pitance de la part du pre-
mier collègue chçz lequel il se présçnte.
« Tous pour un, un pour tous n, telle est la
devise de ces braves gens qui, en échange
de ce droit à la soupe, font abandon com-
plet de leur personne au profit de la caisse
sociale, dont le gérant peut à tout moment,
sûr d'être obéi, leur donner l'ordre d'aller
« faire un pante ».
C'est en somme une catégorie d'anar-
chistes perfectionnés, car ils agissent, et au
fond ils n'en veulent pas plus aux chré-
tiens qu'aux bouddhistes : ce qu'ils pour-
suivent avant tout, c'est la « réalisation »
du capital. Seulement, il est fort possible
qu'ils s'attaquent de préférence aux Euro-
péens, dans l'espoir de créer au gouverne-
ment des difficultés extérieures dont ils
profiteraient. Ils sont assez intelligents et
assez canailles pour cela. C'est meme, à
mon avis, la façon la plus vraie d'envisager
les événements actuels.
Et l'armée?
— Mais, demandons-nous, comment cela
finira-t-il? Cette première défaite des trou-
pes régulières n'est pas rassurante.
— Elle s'explique par ce fait que les re-
belles, qui savent se battre, comme nous
l'avons appris au Tonkin, auront rencontré
des troupes de première ligne, quelque
chose comme une garde nationale, car l'ar-
mée chinoise est concentrée entre Takou,
Tsien-Tsin et Pékin.
Si le gouvernement agit immédiatement,
il se tirera facilement d'affaire, car ses
troupes sont bien disciplinées. Mais le Chi-
nois, plus dégourdi que nos paysans, ap-
prend en deux jours le maniement d'un
fusil qui étonnerait un Breton pendant six
semaines, et les rebelles peuvent trouver
des armes à tir rapide à Hon g-Kong : en
quinze jours, il leur est donc facile d'orga-
niser une véritable armée. Si le gouverne-
ment ne les disperse pas avant, on ne sau-
rait prévoir ce qui arrivera.
LA BANQUE D'ALGÉRIE
LE RENOUVELLEMENT
DU PRIVILÈGE
M. Nelson-Chiérico est en ce moment à
Paris, où il était venu pour s'occuper du
renouvellement du privilège de la Banque
d'Algérie, dont il est le directeur.
On croyait, en effet, que le renouvelle-
ment du privilège de la Banque d'Algérie
serait discuté en même temps que le renou-
vellement du privilège de la Banque de
France. Les deux privilèges expirent la
même année, en 1897.
Mais jusqu'ici M. Rouvier n'a déposé au-
cun projet dans ce sens.
Le. renouvellement du privilège de la
Banque d'Algérie soulève les plus graves
objections. Les Algériens qui ne sont pas
actionnaires de la banque ou qui n'ont pas
un intérêt électoral au maintien de son
privilège demandent qu'il ne soit pas re-
nouvelé, et que la Banque de France éta-
blisse des succursales en Algérie comme
dans les autres départements.
C'est pour cela que M. Rouvier, d'accord
avec les députés de l'Algérie, veut attendre
que le renouvellement du privilège de la
Banque de France ait été discuté.
Le projet qu'il a déposé pour la Banque
de France fixe le nombre des succursales
qu'elle devra établir et ne parle pas de
l'Algérie. On pense que lorsque ce projet
sera voté il sera difficile d'y revenir et
qu'on obtiendra plus facilement alors le re-
nouvellement du privilège d'une banque
sur laquelle on raconte les histoires les
plus fantastiques et que les colons appel-
lent une des sept plaies de l'Algérie.
M. GOUTHE-SOULARD
ET LA DROITE ROYALISTE
La droite royaliste de la Chambre, trou-
vant sans doute insuffisants les témoigna-
ges de sympathie adressés par le clergé
français à M. Gouthe-Soulard, a voulu y
joindre ses félicitations.
Réunis hier dans un des bureaux de la
Chambre, les membres de ce groupe, sur la
proposition de M. de Cazenove de Pradines,
ont « adressé leurs félicitations respectueu-
ses à l'archevêque d'Aix à l'occasion des
nobles paroles qu'il vient de faire entendre
pour la défense des droits de l'Eglise et de
l'honneur français ».
LA RENTRÉE DU MARTYR
Aix, 30 novembre.
M. Gouthe-Soulard est arrivé à quatre
heures à Aix ; il a été reçu à la gare par le
clergé diocésain. Un millier de curieux en-
viron assistaient à son arrivée. L'archevê-
que a été l'objet de manifestations sympa-
thiques, mais discrètes. Au sortir de la ga-
re, comme il montait en voiture, quelques
prêtres ayant .-applaudi, des sifflets ont
éclaté.
La foule a suivi le cortège jusqu'à la place
de l'Archevêché.
Là, les sifflets continuant, la police a dû
intervenir. L'archevêque est entré dans
l'archevêché, où l'attendaient les représen-
tants des œuvres religieuses du diocèse.
M. Gouthe-Soulard s'est alors rendu dans
le grand salon où étaient exposés tous les
cadeaux reçus ces jours derniers; une
grande mitre en fleurs naturelles, une
crosse et tous les ornements sacerdotaux,
une grande quantité de bouquets, une pal-
me d'or et d'autres objets.
LA GRÈVE TERMINÉE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Lens, 30 novembre.
Une importante réunion a eu lieu à la
salle Gauthier. M. Basly a exposé les con-
cessions obtenues hier par les mineurs. Il
invite les ouvriers à obéir au mot d'ordre :
reprise du travail.
Un ordre du jour de félicitations est voté
en faveur des arbitres ouvriers. Puis on
décide de faire appel à la clémence des
membres du Parlement pour faire obtenir
la grâce des mineurs condamnés.
La reprise générale du travail aura lieu
demain.
L'ÉLECTION DE ROANNE
Saint-Etienne, 30. novembre. — Le parti ou-
vrier de Roanne a tenu hier soir, à Charlieu,
un nouveau congrès à l'effet de choisir un
candidat pour l'élection dans la deuxième cir-
conscription de Roanne. -
MM. Camélinat, Ferroul et Lacbize, députés,
assistaient à ce congrès.
M, Carndinat a été choisi comme candidat,
contre M. Delmores, rédacteur en cbçj cfu So-
cialiste ronemiais,
CHRONIQUE
C'est une histoire vraiment effrayante,
que celle de ce gamin de onze ans qui,
précoce Antony, assassine une fillette qui
ui a résisté; On a beau avoir du tempé-
rament, dans le Midi, c'est tout de même
s'y prendre un peu tôt que de jouer à cet
âge les héros de crimes passionnels! H
est épouvantable, ce gamin tout frêle,
tout petit, sournois .et pleurard, qui
déjà ne badine plus avec l'amour et n'ad-
met point qu'on lui refuse les faveurs
qu'il exige.
On l'a nécessairement acquitté, comme
« ayant agi sans discernement", encore
que cet accusé de onze ans se soit dé-
fendu non sans rouerie comme l'eût fait
un malfaiteur « professionnel". Et c'est
cela le problème terrible! C'est que ce
petit misérable a attesté une remarqua-
ble intelligence. Aussitôt le crime com-
mis, il avait eu, avec un parfait sang-
froid, l'idée de se constituer un alibi. En
outre, il avait fait la leçon à son frère et
à sa sœur, moins âgés que lui. En usant
de menaces et de promesses, il leur avait
ordonné de déclarer qu'ils avaient vu « un
vagabond, avec une grande barbe noire,
portant un bâton à la main et un sac sur
l'épaule. » II avait dès lors songé à son
plan de défense, et ce vagabond imagi-
naire devait porter tout le poids du for-
fait. Où avait-il trouvé, d'une façon in-
génieuse, toute cette argumentation qui
eût pu égarer la justice ? Par quelle divi-
nation du mal se préparait-il avec autant
de calme qu'un vieux bandit à repousser
l'accusation qui allait être portée contre
lui?
Le « discernement", malheureusement,
et par un lamentable défi contre les lois
\.-'de la nature, apparaît clairement chez
cet enfant. Ce n'est pas seulement, ce
petit monstre, un jeune sauvage emporté
par des instincts prématurément vio-
lents; il est, hélas, parfaitement capable
de raisonnement, et le cas est, ainsi,
beaucoup plus triste. Il se rend très bien
compte de ce qu'il a fait, puisque, en-
core tout souillé de sang, il ne pense
qu'aux moyens de dissimuler son affreuse
action. Ce n'est pas un fou, comme cet
autre enfant assassin de son âge, nommé,
je crois, Lemaire, qui, un jour, entraîna
un pauvre petiot et le tua, dans un accès
de démence furieuse, uniquement pour
le plaisir de tuer.
Acquitté par le jury, comme il ne pou-
vait en être autrement, le précoce meur-
trier, qui a comparu devant la cour d'as-
sises de l'Aude, a été envoyé dans une
maison de correction. C'était l'issue pré-
vue de ce procès. Il y restera, dit l'arrêt
du tribunal, jusqu'à dix-huit ans.
Eh bien, on peut se demander, sans
risquer là aucun paradoxe, s'il n'eût pas
été plus humain de le considérer comme
un assassin ordinaire et de le condamner
tout de suite comme tel. Je m'explique,
car on entend bien qu'il n'est pas dans
mes habitudes de réclamer plus de sévé-
rité de la part des tribunaux, auxquels
on peut si souvent, au contraire, repro-
cher de manquer de philosophique équité
et de pitié.
Je veux dire seulement ceci : Avec le
système actuel de répression contre l'en-
fance coupable, à quoi bon prendre la
peine d'élever ce petit malheureux pour
faire sûrement de lui un criminel dan-
gereux ? La maison de correction va le
garder sept ans. Il n'est que trop certain
que, lorsqu'il en sortira, il sera un enne-
mi déclaré de la société, comme on dit
un peu solennellement, et qu'ilserl fer-
mement disposé à lui faire tout le mal
possible, ayant achevé de se pervertir
sans remède, assoiffé de prendre sa re-
vanche contre un régime qui n'aura pu
avoir aucune action morale sur sa dé-
pravation. Il ne sera pas plus tôt libre
qu'il commettra de nouveau quelque at-
tentat. rrui ne sera nlus Henlement un at-
tentat « passionnel », celui-là. On l'arrê-
tera encore ; cette fois, on le condamnera,
et le souvenir de son crime d'enfant ren-
dra la condamnation d'une suprême ri-
gueur. Alors, pourquoi le ménager, avec
je ne sais qu'elle hypocrisie, jusque-là ?
Il serait plus charitable de se débarrasser
de lui tout de suite.
Dira-t-on que j'arrange l'avenir de ce
jeune misérable à ma façon, avec quel-
que imagination, poussant complaisam-
ment au noir le tableau? Il y a cependant
assez d'exemples qui justifient cette hy-
pothèse. C'est l'ordinaire résultat, que
tous ceux qui passent par la maison de
correction n'y nourrissent que des senti-
ments de révolte et de haine, n'y appren-
nent que la dissimulation, et, en dépit
du régime cellulaire le plus sévère, y
font l'apprentissage du crime. Où sont-
ils ceux qui, libérés, ne songent qu'à ra-
cheter leurs erreurs d'autrefois? Si un
enfant qui n'a sur la conscience que de
menues fautes, qui furent vraiment le
fait de son inconscience, est mûr, en
quittant la maison de correction, pour
les pires actions, à plus forte raison
un coupable comme ce petit Louis Oulès
ne doit que s'y endurcir, s'y aguerrir
dans le mal.
Voyons, raisonnablement, à qui fera-
t-on croire que la cellure, que la priva-
tion d'air et de lumière, que toute la
barbarie des règlements administratifs
soit capable de lui inspirer de salutaires
réflexions, de lui faire prendre en hor-
reur le crime qu'il a commis? Tout ce
que le régime de la maison de correction
est susceptible d'obtenir, c'est une sour-
noise apparence de résignation. Mais du
sérieux repentir ? Ce serait trop aisé s'il
en était sinsi. Il est évident, au contraire,
que, peu à peu, il se transformera à ses
yeux en victime, que sa rancune gran-
dira avec les années, qu'il perdra ses
dernières notions de conscience, qu'il
n'aspirera qu'au moment
r alors qu'on le rendra à la liberté. Il n'y a
pas besoin d'être sorcier pour prédire
l'usage qu'il en fera. Il ne la gardera pas
longtemps.
Est-ce que cela n'est pas fait pour ins-
pirer des réflexions graves ? Est-ce que
cela n'est pas intéressant, douloureuse-
ment intéressant, ce cas d'un enfant de
onze ans, ayant toute une vie devant lui
pour racheter peut-être, s'il était bien
dirigé, son incroyable crime, et que, avec
les moyens actuels, on se sent d'avance
impuissant à sauver ? Si pervers qu'il
soit, est-ce qu'il n'y a qu'à se décourager,
à laisser les choses suivre fatalement leun
cours? Est-ce qu'il n'y a vraiment plus de'
ressources vis-à-vis de ce gamin, méchant,
abominable même, mais si petit? Quelle
expérience à tenter, pourtant, — préci-
sément parce qu'il est particulièrement
coupable!
Avec la maison de correction telle
qu'elle est présentement conçue, on peut
prévoir mathématiquement, pour ainsi
dire, le temps où il sera prêt pour l'écha-
faud, et j'estime que cette certitude qu'il
est permis d'avoir ne fait pas l'éloge de
notre système de répression.
On suppose bien que ce n'est pas l'am-
nistie que je souhaite pour cet enfant,
que j'ai montré à dessein criminel comme
il l'est, avec l'aggravation qu'il est intel-
ligent et presque responsable. Je vou-
drais seulement que son internement
servît à l'amender, au lieu de le précipi-
ter fatalement encore plus bas et de Io
fortifier err quelque sorte dans le maïL
Le crime d'un enfant aussi jeune a été
exceptionnel. Ne devrait-on pas aussi lui
appliquer un traitement exceptionnel,;
consistant en une autre méthode que
celle qui est habituellement employée
et qui donne de si piteux résultats ? J1 YI,
aurait là une épreuve à faire qui serait,
philosophiquement, singulièrement atta--
chante, une cure morale à entreprendre,
avec des procédés moins bêtes que la cel-r
Iule et le cachot, qui, en raison de l'âge
et de la culpabilité du sujet, vaudrait la
peine d'être essayée. Mais les règlementSJ.1
mais la routine, mais la peur des modifi-
cations à nos vieux errements !. Et c'est
pourquoi j'ai pu dire qu'un acquitte-
ment qui avait pour corollaire l'ordi-
naire maison de correction n'était qu'une
condamnation différée, et qu'il était plus
cruel que le châtiment immédiat..
Paul Ginisty.
LES SEMAILLES
Des renseignements qui nous parviennent
de la direction de l'agriculture, il résulte
que les semailles d'automne se sont faites
dans de bonnes conditions, sauf sur quel-
ques points où les gelées avaient entravé
les travaux pendant quelques jours. La le-
vée des premiers blés se fait bien et la cul-
ture se montre jusqu'à présent satisfaite de
ses ensemencements ; dans les régions du
nord, les semailles se continuent par un
temps doux et pluvieux.
Mais si, en France, on est content du ré-
sultat de ces premiers travaux agricoles, il
n'en est pas de même à l'étranger, notam-
ment en Hongrie, en Roumanie et dans la
Russie méridionale, où l'on a même dû res-
treindre la surface ensemencée en blé. En
Allemagne, les ensemencements ont assez
belle apparence, mais on se plaint de plus
en plus du déficit de la récolte des pom
mes de terre, si importante dans ce pays.
LE TONKIN
LE BUDGET DES COLONIES
A LA CHAMBRE
La discussion générale — Interpella*
tion retirée — Deux grands discours
- M. Delcassé et M. Pelle tan
La' séance a été prise tout entière par la.
discussion générale du budget des colo-
nies. Il y a eu trois discours dont le pre-
mier, et le plus long, hélas! (il a duré près
de deux heures) a été prononcé par M.
Martineau, un député de Paris qui futbou-
langiste.
C'est une interminable conférence sur la
Soudan qu'a placée ainsi M. Martineau sous
prétexte de conseiller au gouvernement de
se méfier du Soudan et de l'engrenage sou-
danais, où nous devons soigneusement évi-
ter de nous laisser, prendre.
La thèse n'était certes pas mauvaise, mais
comme elle a été, un peu plus tard, reprise
par M. Pelletan avec une autorité qui, sans,
doute, fera longtemps encore défaut à M,
Martineau, nous n'avons garde d'insister
sur l'interminable harangue de ce der-i
nier. 1
M. Martineau avait annoncé qu'il inter-,
pellait sur cette affaire du Soudan ; puisy
quand il a eu fini, il a déclaré qu'il renon-
çait à son interpellation. Ayant dissertÓÍ
tout à son aise, il se tenait pour satis-
fait.
La véritable discussion générale du bud-
get des colonies a pu alors commencer.
Jusqu'ici, elle nous a valu deux grands'
discours, l'un de M. Delcassé, rapporteur
dudit budget, l'autre de M. Camille Pel;
letan.
Et M. Etienne? Le délicieux sous-secré-i
taire d'Etat n'a rien dit encore. Nous don-j
nera-t-il la joie de l'entendre ? Mystère ï4
Toujours est-il que M. Déroulède, pour;
s'être — trop bruyamment, il est vrai —?
étonné de son mutisme, s'est fait adminis-"
trer un bon rappel à l'ordre.
Le rapporteur
M. Delcassé, député de l'Ariège, qui,,
l'an dernier déjà, avait prononcé un remar-
quable discours sur le budget des afiaire3
étrangères, a remporté un égal succès en
traitant la question coloniale. Sa parole est'
facile, tout en restant précise. Bref, la
Chambre l'a écouté avec intérêt et souvent
applaudi.
M. le rapporteur — Ce qui importe, c'est
d'établir une situation claire, afin que la Cham-
bre puisse adopter une solution dont il ma
semble impossible que nous ne soyons pas
unanimes ici à constater la nécessité.
Le gouvernement a demandé un prélèvement
de 18 millions sur les excédents de 1889 pour le
chemin de fer de Phu-Lang-Thuong à Lang-
SOD, et pour le remboursement à la Ccchin-i
chine de ses avances à l'Annam et la delta
qu'elle a contractée, vis-à-is de la Banque
indo-chinoise afin de parfaire le contingent
excessif ttui lui avait été tmposé. v
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