Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1891-11-05
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Description : 05 novembre 1891 05 novembre 1891
Description : 1891/11/05 (A21,N7234). 1891/11/05 (A21,N7234).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/04/2013
Vlngf-et-unième année. —- N° 7,23A CINQ Centirnes -- Paris et Départements — CXNQ Centimes JEUDI 5 NOVEMBRE 1891
JOURNAL RÉPUBLICAIN
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t E 1 f
Le tsar est rentré chez lui sans avoir
fait visite à Guillaume II, sans avoir
même accepté une courte entrevue
entre deux trains. Car il paraît au-
jourd'hui à peu près certain que le
souverain allemand désirait se ren-
contrer avec son puissant voisin et
cousin, et se serait volontiers dérangé
pour avoir le plaisir de causer quel-
ques heures avec lui. Alexandre III a
jugé que ce désir avait quelque chose
de frivole, qu'il vaut mieux ne pas se
voir quand on n'a rien à se dire et
qu'il est inutile de donner à l'Europe
attentive le spectacle d'une embras-
sade peu sincère.
C'est là pour les champions de la
triple ou quadruple alliance, et sur-
tout pour les semeurs de mauvaises
nouvelles, un thème presque inépui-
sable. Car il y a en ce moment à Ber-
lin, à Vienne, à Rome et surtout à
Londres des alarmistes de tempéra-
ment ou de profession qui ne se las-
sent pas de gémir sur les dangers qui
menacent la paix générale. Si les deux
empereurs avaient eu une entrevue,
ces nouvellistes quinteux auraient dé-
claré que cela ne prouve rien et que
ces politesses banales ne tirent pas à
conséquence. L'entrevue n'ayant pas
eu lieu, les mêmes esprits chagrins
affirment que le tsar a volontairement
laissé échapper une occasion de ras-
surer l'Europe et que la rapidité de
son voyage est un symptôme des plus
menaçants.
v Nous ne ferons pas la faute de
prendre très au sérieux - ces augures
qui ne peuvent se regarder sans pleu-
rer. Il est à remarquer que, dans tous
les pays de la triple alliance comme
en Angleterre, ce sont surtout les or-
ganes ministériels qui passent leur
temps à découvrir des nuages dans le
ciel, tout en protestant des intentions
pacifiques de leurs gouvernements
respectifs. C'est que la grande affaire
de ces officieux est de présenter et de
faire passer la carte à payer. De peur
que les sujets ne se lassent des sai-
gnées continuelles qu'on fait à leur
bourse, on les entretient systémati-
quement dans un état d'inquiétude
qui les empêche de murmurer trop
haut contre le grossissement continu
du budget de la guerre. Il n'en est pas
ainsi chez nous; sans mettre notre pa-
triotisme au-dessus de celui des au-
tres, nous pouvons constater que de-
puis vingt ans pas un ministère fran-
çais n'a eu besoin de sonner une pa-
reille cloche pour décider les contri-
buables à de nouveaux sacrifices,
quand il s'agissait de la défense na-
tionale.
On accusera donc Alexandre III
pour décider les Parlements de Ber-
lin, de Vienne et de Rome à voter
quelques surcroîts de crédits. Rien ce-
pendant n'est plus naturel que le peu
de goût de cet honnête homme pour
les manifestations trompeuses d'une
fausse amitié. Nous ne dirons pas
qu'il a craint de nous donner quelque
ombrage en répondant aux avances
de nos ennemis. Il sait que notre con-
fiance dans sa loyauté est au-dessus
de pareilles vétilles. Nous avons bien
ri quand des journaux italiens ont eu
la naïve audace de supposer que la
visite de M. de Giers à Monza pouvait
nous inspirer de l'inquiétude ou de
l'humeur. La vérité est que le tsar,
qui n'est pas un souverain à la mode
du jour et qui prend tout au sérieux,
a horreur des vaines simagrées et des
démonstrations qui ne répondent à
aucun sentiment vrai. Il ne veut pas
mentir et il n'aime pas à recevoir à
bout portant des déclarations d'amitié
auxquelles il lui est impossible d'ajou-
ter foi.
Certes, il n'y a pas un homme en
Europe qui soit plus sincèrement dé-
voué qu'Alexandre III à la cause de
la paix, parce qu'il n'y a pas un sou-
verain ni un homme d'Etat qui ait
davantage le sentiment de sa respon-
sabilité devant Dieu et devant les
hommes. Mais il n'est pas pour cela
obligé d'oublier tous ses griefs ou de
feindre qu'il les oublie. La triple al-
liance, que les coalisés ont renouvelée
avec tant de précipitation, est dirigée
contre la Russie autant que contre la
France. C'est contre nous que se li-
guent l'Allemagne et l'Italie; c'est
contre les Russes que les Autrichiens,
qui n'ont rien à démêler avec nous,
ont tenu à se procurer des alliés. Dans
tout l'Orient, à Constantinople, à
Bucarest, à Sofia, à Belgrade, l'in-
fluence légitime et les justes préten-
tions de la Russie se heurtent à la ri-
valité de l'Autriche, toujours appuyée
par la diplomatie allemande.
Depuis le congrès de Berlin, qui a
enlevé aux vainqueurs de Plewna
presque tous les fruits de. leur victoire,
et surtout depuis l'aï-rivée de Ferdi-
nand de Cobou.rg en Bulgarie, la Rus-
sie a le droit de se plaindre de l'Alle-
magne. Le tsar attend, se réserve,
laisse passer, sinon sans protestation
du moins sans éclat, les violations de
traités, les intrigues hostiles, les mau-
vais procédés; cela ne prouve pas
qu'il y soit insensible. Il a dû être
d'autant plus froissé du renouvelle-
ment de la triple alliance qu'il est plus
que jamais autorisé à se considérer
comme le plus ferme, le plus puissant
et le plus sincère défenseur de la paix
européenne. Il ne lui a pas plu d'é-
changer des protestations de cordia-
lité avec le promoteur de cette ligue
en partie dirigée contre lui. Il ne lui a
pas plu d'ignorer que les états-majors
allemand et autrichien passent leur
temps à combiner des plans d'attaque
contre son empire.
C'est pourquoi il est rentré chez lui
sans se laisser arrêter au passage
par des invitations ou des insinuations
dont il connaît la portée. Ce refus
n'est une menace pour personne ; c'est
simplement une leçon de franchise et
de dignité silencieusement donnée à
qui de droit.
Commines.
LE GROUPE D'EXTRÊME-GAUCHE
On parlait hier dans les couloirs de la
Chambre, où d'ailleurs il n'y avait presque
personne, de la reconstitution prochaine
du groupe d'extrême-gauche.
La nouvelle paraît jusqu'ici manquer de
consistance.
On signalait M. Lagnel comme devant
faire partie du nouveau groupe. Or, M. La-
gnel est à Hanovre ; il est donc assez dou-
teux qu'il ait pu être consulté.
On citait aussi le nom de M. Millerand.
Interrogé par nous, M. Millerand a déclaré
qu'il n'avait nullement l'intention de faire
partie du nouveau groupe, si toutefois la
nouvelle de sa formation était exacte.
Quant à M. Clémenceau, en lisant la note
publiée à ce sujet par le Temps, il a dit
qu'il ne savait pas de quoi il s'agissait.
Les adversaires de la concentration répu-
blicaine ont donc vraisemblablement pris
leurs désirs pour la réalité.
MORT DU DERNIER NEVEU
DE NAPOLÉON Ier
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Rome, 3 novembre.
Aujourd'hui est mort à Fano le prince
Lucien Bonaparte.
Il était né en 1813 et habitait habituelle-
ment en Angleterre, dans le quartier de
Bayswater, à Londres.
Le prince Louis-Lucien Bonaparte était
né à Torngrove, près Worcester, en Angle-
terre, le h janvier 1813, du second mariage
du prince Lucien, frère de Napoléon Ier,
avec Alexandrine, veuve du banquier Jou-
berthon, née de Bleschamp. Il était frère du
prince Pierre Bonaparte.
Le prince Lucien avait épousé la fille
d'un sculpteur lucquois, Marianne Cecchi,
dont il vivait séparé depuis de longues an-
nées, et qui est morte à Ajaccio l'année
dernière. 11 n'en avait pas eu d'enfants.
LA SUCCESSION DE M. MAZE
Modérés et radicaux. — Referendum
sénatorial. — Déclarations
de M. Vian.
Le déjeuner mensuel des républicains de
Seine-et-Oise, au Palais-Royal, était, hier,
particulièrement animé; un grand nombre
de délégués des comités cantonaux y assis-
taient.
M. Vian, député de Rambouillet, prési-
dait, ayant à ses côtés MM. Remoiville et
de Jouvencel, anciens députés.
Au dessert, M. Vian a prononcé l'éloge
funèbre de M. Maze et engagé les républi-
cains à se grouper dès maintenant en vue
de la prochaine élection sénatoriale.
Le député de Rambouillet a conseillé à
ses amis politiques d'éviter le plus long-
temps possible de lancer aucun nom de
candidat, afin de ne pas fournir à la réac-
tion de sujet de polémique.
Rappelant le franc appui apporté par les
radicaux aux dernières élections, l'orateur
a exprimé l'espoir que les électeurs s'en
souviendraient le jour du scrutin. Plusieurs
électeurs modérés ont tenu un langage ana-
logue.
Une innovation électorale
L'assemblée s'est ralliée à une proposi-
tion de M. Vian dont l'application consti-
tuera une innovation ingénieuse en ma-
tière électorale.
Par les soins de l'Alliance républicaine, co-
mité qui présida à l'élection sénatoriale du
mois de janvier 1891, les délégués sénato-
riaux de Seine-et-Oise seront appelés, dans
un scrutin préparatoire, à désigner leur
candidat.
Chaque délégué adressera à l'Alliance ré-
publicaine, sous enveloppe portant son
nom, une seconde enveloppe qui contien-
dra le nom du candidat choisi.
Celui des concurrents républicains qui ob-
tiendra la majorité des voix à cette épreuve
sera proclamé candidat unique.
De cette façon, les rivalités de compéti-
tions disparaîtraient.
Coupons le câble
Interpellé par un électeur sur le discours
de M. Clémenceau à la séance de samedi,
au cours duquel, on s'en souvient, l'ora-
teur dénonça le pacte conclu entre les mo-
dérés et les radicaux et parla de couper le
câble, M. Vian a répondu que, si regrettable
que cette séparation pût être pour la sta-
bilité ministérielle, les radicaux ne pou-
vaient aller plus loin dans la voie des con-
cessions déjà consenties et soutenir un mi-
nistère toujours plus disposé à suivre les
réactionnaires que les fractions avancées
du parti républicain. Ces déclarations ont
été très applaudies.
UN PRÉSENT
AU PRINCE DE GALLES
Londres, 3 novembre. — Les artistes drama
tiques et impresarii de Londres ont sousciit
25,000 francs en vue de faire présent d'une
boîte à cigares en or au prince de Galles avec
ses armes et son chiffre.
La remise en sera faite lundi procbain.
LES ACCIDENTS
DE CHEMINS DE FER
LA VÉRITÉ SUR LES COMPAGNIES
Il faut en finir. — Assez de fumisteries.
Le contrôle de l'Etat. — Le code
des signaux.
Nous n'avons point abusé jusqu'ici des
dissertations sur les accidents de chemins
de fer. La tendance naturelle que nous
avons tous à incriminer les compagnies
nous faisait un devoir de nous montrer
particulièrement circonspect dans cette
question délicate. Aussi, fidèle à notre
habitude de ne formuler que des critiques
appuyées sur des faits, nous nous sommes
à peu près borné à indiquer la bizarrerie
du règlement qui permet de violer leblock-
system, qui n'a sa raison d'être et ne peut
offrir de sécurité qu'à la condition d'être
appliqué d'une manière absolue, comme
sur la ligne d'Auteuil.
D'un autre côté, envisageant dans ses
grandes lignes la question du surmenage
des agents, nous avons cité, avec chiffres à
l'appui, un certain nombre de dépôts où la
circulaire ministérielle fixant à douze heu-
res le maximum de temps de présence des
mécaniciens était considérée comme non
avenue. Nous avons même été agréable-
ment surpris de recevoir la visite d'un
agent du contrôle de l'Etat, venant nous
demander les noms que nous avions dési-
gnés car des initiales, afin de commencer
une enquête sur des abus qui avaient échap-
pé à sa perspicacité.
La série des accidents menaçant de de-
venir interminable, nous avons persévéré à
en rechercher les causes, et si nous n'avons
point la prétention de les avoir toutes dé-
couvertes, nous avons du moins relevé des
faits d'une gravité incontestable, faits pa-
tents, indiscutables, qui contredisent les
explications multicolores prodiguées avec
une telle assurance par les porte-parole
des compagnies.
Les vessies des compagnies
Nous ne nous attarderons point à l'ana-
lyse fastidieuse des vessies que les com-
pagnies tentent de faire prendre pour des
lanternes.
L'antienne - est toujours la même :
« C'est la faute à la presse, déclarent so-
len nellement les administrateurs. Les acci-
dents ne sont pas plus nombreux aujour-
d'hui qu'autrefois : la seule différence est
qu'on en parle davantage, et c'est une mau-
vaise action que d'entretenir la défiance
dans l'esprit des voyageurs. Notre matériel,
nos signaux sont les meilleurs qui existent.
Inventez-en de plus perfectionnés, nous
sommes prêts à les adopter. La preuve de
ce que nous avançons, c'est que tous les ac-
cidents sont dus aux défaillances de nos
employés, que nous remplacerons égale-
ment de suite si vous pouvez nous en four-
nir de supérieurs. »
Et la compagnie P.-L.-M. a eu une trou-
vaille pour expliquer ces défaillances, dont
on ne saurait la rendre responsable, à no-
tre sérieux confrère le Temps :
"Les grèves,a-t-elle dit,ces grèves que vous
ne pouvez nous reprocher d'encourager,
ont détraqué le cerveau de nos employés
au point qu'un mécanicien, au lieu de re-
garder constamment la voie quand il est
sur sa machine, est fatalement porté à lever
les yeux au ciel pour rêver à la solution de
la question sociale."
Il eût été tout aussi vraisemblable de s'en
prendre à la littérature pornographique,
les idées. riantes nous paraissant avoir
plus de chances quelles problèmes philoso-
phiques de distraire un mécanicien qui
s'embête en cours de route.
Quant au contrôle de l'Etat, vantant sans
cesse sa vigilance, il déclare, pour toutes
sortes de raisons, que la situation actuelle
est excellente. déduction faite de la catas-
trophe de Saint-Mandé et de quelques au-
tres.
L'opinion de M. Wickersheimer
Avant de démontrer le vice fondamental
des systèmes actuels de signaux et des rè-
glements concernant la marche des trains,
il importe de donner une idée juste, basée
sur des documents, de l'esprit de résistance
et d'inertie reproché aux compagnies et
que celles-ci affectent de traiter comme
une légende.
« Nous sommes à l'affût du progrès», gé-
missent les compagnies.
Voici ce que leur répondait à la Chambre
des députés, en 1887, M. Wickersheimer, in-
génieur des mines :
« Nous signalerons une raison partieu-
lière qui crée souvent bien des duhcultes
aux inventeurs qui soumettent un appareil
à l'examen d'une compagnie : c'est que les
personnes chargées de l'examen de l'appa-
reil sont précisément les ingénieurs des
compagnies, inventeurs eux-mêmes d'appa-
reils du même genre, c'est-à-dire des ri-
vaux qui ont tout intérêt à discréditer leurs
inventions.
"Loin de nous la pensée que les ingénieurs
des compagnies, très compétents d'ailleurs,
et ayant conscience de leur valeur, soient
systématiquement injustes envers les in-
venteurs; mais on peut admettre qu'ils ont,
comme la plupart des hommes, une con-
fiance particulière dans leur propre in-
faillibilité; en outre, l'inventeur étranger est
une espèce de reproche vivant de leur incurie
ou,' du moins, de leur défaut de génie in-
ventif.
» Dès lors, volontairement ou non, leurs
rapports sur les appareils présentés par
ceux qu'ils considèrent comme des pro-
fanes sont toujours empreints d'un pessi-
misme exagéré."
Une histoire peu connue
Nous n'insisterons point sur les condi-
tions fantastiques dans lesquelles est censé
fonctionner le contrôle de l'Etat.
Chacun sait que les ingénieurs du con-
trôle, cumulant tous ce service avec d'au-
tres également rétribués par l'Etat, n'ont
pas le temps matériel de vaquer à leurs de-
voirs et que, en outre, la plupart, aspirant
à entrer au service des compagnies, cher-
chent avant tout à se les rendre favora-
bles.
Une histoire peu connue, quoique an-
cienne, va nous édifier sur le rôle de l'ins-
titution:
Lè 16 septembre 1871, un train déraille à
Champigny (Yonne) : dix morts et des
Dlessés. L'accident ayant été causé par la
rupture d'un essieu de wagon de houille, le
directeur de l'exploitation est poursuivi,
sur le rapport du contrôle, pour avoir au-
torisé l'introduction de wagons de houille
dans un train de grande vitesse.Condamné à
la prison en première instance, il est acquitté
en appel, après des démarches dont on
conçoit l'activité.
Le 22 août 1872, M. Teisserenc de Bort,
ministre de l'agriculture, qui avait. réussi
à se faire confier l'intérim des travaux pu-
blics, déplace l'inspecteur général du con-
trôle de P.-L.-M., et la dépêche qu'il lui
adresse contient cette phrase en post-scrip-
tum :
« A votre place, j'aurais tâché de sous-
traire un camarade aux poursuites correc-
tionnelles. »
Nota. — M. Teisserenc de Bort était de-
puis nombre d'années administrateur de
la compagnie P.-L.-M.
Le code des signaux
Un exemple plus actuel et autrement
grave va encore venir à l'appui de notre
opinion.
On comprend l'importance qu'il y a en
temps de guerre, où les mécaniciens et
agents des trains sont exposés à passer
d'un réseau sur un autre, à ce que les si-
gnaux en eux-mêmes, c'est-à-dire le lan-
gage qui en résulte, soient les mêmes par-
tout.
Or, en dépit d'un projet de loi déposé à
la Chambre le a mars 1882, c'est seulement
en novembre 1885 que le ministre des tra-
vaux publics se résigna à édicter le code
des signaux applicables à tous les réseaux
français.
Mais en même temps le ministre refusait
d'imposer un délai aux compagnies pour
se conformer à son arrêté, qui a reçu son
exécution définitive il y a à peine quelques
mois. Nous ne sommes même pas certain
que le code soit adopté sur la ligne de
Ceinture.
Encore une plaisanterie
Maintenant, veut-on connaitre la perfec-
tion de ce fameux code dont les compa-
gnies ont tant « joué" lors de la catastro-
phe de Saint-Mandé ?
D'abord, le paragraphe 2 de l'article pre-
mier s'exprime ainsi :
« Les règlements spéciaux à chaque com-
pagnie ne pourront contenir aucune dispo-
sition contraire au code. »
Les compagnies en profitent pour avoir
chacune une rédaction différente pour les
règlements des signaux.
Mais lisons l'article 15 :
« Sur les voies autres que celles suivies
par les trains en circulation, le signal d'ar-
rêt absolu (le plus important de tous), dé-
fini à l'article précédent, peut être rem-
placé, avec l'autorisation du ministre, par
un signal carré ou rond à face jaune, pré-
sentant la nuit un simple feu jaune. »
Tout cela pour éviter à certaines compa-
gnies de repeindre leurs signaux.
Enfin, le code a oublié le cas où la cir-
culation est réduite à une seule voie sur
les lignes à double voie, par suite de répa-
ration ou d'accident.
Chaque compagnie procède alors comme
elle l'entend.
Voilà quatre ans que ces lacunes ont été
signalées au ministre, et elles subsistent
toujours.
Et il y a des gens qui doutent de la force
de résistance des compagnies!
Le lir SMSCttJB putMMwat demain la
a Chronicrae ». par Franciscnie Sarcey,
LES CRIMES ET DÉLITS
A PARIS
LE SERVICE DE LA SURETÉ
Nous avons dit hier que la moyenne des
affaires dont chaque commissariat avait à
s'occuper était environ de 1,800 par an.
Veut-on connaître le nombre des opéra-
tions diverses auxquelles le service de la
Sûreté s'est livré ?
Voici une statistique qui comprend les dix
dernières années.
En 1881 la Sûreté a fourni hg. 1.48 rapports.
1882 — A7.027 —
1883 — .43.ffl -
188A - 39.17,2 -
1885 — hl.917 -
1886 — ho.009 -
1887 — 38.7Z -
1888 - A5.2/i3 —
1883 - h9.3h7 —
1890 - *2.520 —
Ces rapports comprennent les enquêtes
et recherches sur notes administratives, les
recherches de malfaiteurs en vertu de
pièces judiciaires, les recherches de déser-
teurs et jeunes soldats insoumis et les ren-
seignements demandés par le parquet.
Les chiffres cités plus haut ne sont pas
compris dans la moyenne dont nous par-
lions hier; ils viennent, ainsi que les af-
faires de parquet traitées directement par
les commissaires, grossir le chiffre annuel
déjà énorme de cent quarante-quatre mille
affaires diverses.
En passant, une réflexion : Comment se
fait-il que dans le questionnaire, ne com-
prenant pas moins de quarante-sept arti-
cles, envoyé à tous les commissariats, M.
Lozé ait oublié de faire figurer la rubrique,
passablement chargée dans certains quar-
tiers : « Détournement de mineures? » Il y
a là une lacune qui laissera croire que le
travail demandé par le préfet sera loin
d'être bien complet.
Réforme à faire
En terminant, voici un cas que nous sou-
mettons à M. Lozé, en ce moment à l'affût
des innovations ; les faits que nous allons
citer, nous les tenons d'un commissaire :
Un homme est arrêté, à tort ou à raison,
pour un délit quelconque, mais de minime
importance. Il doit, s'il justifie d'un domi-
cile, être remis en liberté. Or, que se passe-
t-il t
L'inculpé est arrêté, admettons-le, à
Montmartre, quartier des Grandes-Car-
rières, et il donne son adresse à Plaisance.
Le commissaire transcrit le texte d'une
dépêche qui est portée par un planton au
poste du quartier et, de là, par un gardien
de la paix au poste central, d'où elle est ex-
pédiée à la préfecture qui la transmet au
poste central du quatorzième arrondisse-
ment. Elle va ensuite au poste de quartier
et arrive chez le commissaire du quartier
de Plaisance. Ce magistrat fait prendre les
renseignements demandés au domicile de
l'intéressé et la réponse refait, en sens in-
verse, le même trajet pour revenir, douze
heures et parfois vingt-quatre heures après,
au commissariat qui détient l'inculpé.
Si celui-ci est coupable,ce n'est que demi-
mal ; mais b'il est innocent, victime de la
routine administrative, il passe près d'une
journée au poste en compagnie de vaga-
bonds, de pochards et de filles.
Nous livrons ce fait aux méditations de
M. Lozé.
LAVIEDEP ARIS
Ceci pourrait s'intituler : a Simple his-
toire », tant l'aventure, en soi et réserve
faite du dénouement tragique, est ba-
nale. Une institutrice, jeune et jolie,
Mlle Marie L., est aimée par un jeune
homme, employé dans un ministère, M.
Valentin D. Le jeune homme est bien
reçu dans la maison, aux environs de
Paris. Il y fréquente assidûment. On s'ha-
bitue partout à le considérer comme un
fiancé. Il ne paraît pas douteux que lui-
même, et probablement de très bonne
foi, ne se soit donné ce rôle. Une liaison
trop intime s'établit entre les jeunes gens.
Puis, avant-hier, Valentin déclare à Marie
qu'il est désespéré, que sa mère,
non seulement ne consente pas au ma-
riage qu'il souhaite, mais encore lui im-
pose d'épouser une fille riche, qu'il n'aime
pas. @ Marie demande une dernière entre-
vue à son amant, l'endort dans ses bras
et, avec le plus grand sang-froid, lui
brûle la cervelle. Après quoi, elle le cou-
vre de baisers et se loge une balle dans
la tête. Elle est morte six heures après.
Voilà l'histoire. Vous l'aurez lue ou
vous la trouverez dans tous les « faits-
divers », probablement avec la rubrique
ordinaire : « Encore une victime de l'a-
mour. » C'est contre la rubrique que je
proteste. L'amour ne fait pas de victi-
mes, quand il est heureux et partagé. Di-
sons donc franchement les choses comme
elles sont et, s'il faut un titre à ce drame
douloureux, intitulons-le : « Encore une
victime du mariage d'argent ». J'entends
souvent formuler des plaintes fort amè-
res sur le relâchement du lien de famille.
On dit, et je ne trouve pas qu'on ait tou-
jours tort, que l'autorité paternelle s'af-
faiblit trop chez nous, non seulement
dans la bourgeoisie, mais partout ; que
le respect des enfants pour leurs parents
a fait trop place à une camaraderie qui
n'est même pas toujours amicale.
Tout ceci est bien fondé peut-être.
Mais on oublie d'ajouter que l'autorité
de la famille reste encore très puissante
sur la question du mariage et qu'elle
s'exerce toujours pour arriver à faire
triompher le mariage d'argent sur le ma-
riage d'amour. On ne s'occupe guère de
former l'esprit du jeune homme aux qua-
lités viriles, on ne s'inquiète pas tou-
jours de le défendre contre les entraîne-
ments de la jeunesse et les duperies de
l'inexpérience. Pour la jeune fille, on
tient fort à ce qu'elle ne fasse rien qui
choque les convenances plutôt qu'on
n'essaye de lui donner, sans pruderie,
une éducation morale supérieure aux
grimaces mondaines. Seulement, quand
arrive l'heure du mariage, la famille se
fait sérieuse et intraitable. Elle ne veut
entendre parler de rien, si ce n'est d'une
bonne affaire. La question d'argent prime
tout.
Pour notre bourgeoisie, c'est par là
que la famille existe encore, se main-
tient et se défend. Moi, je soutiens que
c'est par là qu'elle s'épuise, qu'elle dé-
périt et qu'elle risque de périr. Car les
mariages d'argent font les parents sans
autorité sur leurs enfants et préparent
cette génératiou « fin de siècle », qui,
hélas! a commencé avant la fin du siècle
et risque de lui survivre, d'hommes qui
arrivent épuisés, sceptiques, blasés, à un
mariage qui est une affaire quand il n'est
pas une prostitution, et de jeunes filles
qui, étant incapables de demander ou de
donner de l'amour à leurs maris, sont
parfaitement résolues à le trouver ail-
leurs.
Certes, rien n'est plus poignant et plus
respectable que la douleur de la famille
de ce malheureux Valentin et de celle de
Marie. Mais on peut bien dire que le dé-
sastre est venu du fait de ces idées immo-
rales, étroites et âpres de notre bour-
geoisie, qui veut bien que les jolis gar-
çons s'amusent avec les belles filles, mais
n'épousent que les « demoiselles » riches.
Un homme d'un autre milieu, d'une édu-
cation plus virile, eût simplement dit à
sa mère : « Je me suis engagé". Ainsi
font les Américains. En Amérique encore
(il va de soi qu'on ne peut parler de ces
choses qu'en général, abstraction faite
des exceptions), dans le pays du dieu
Dollar, ce n'est pas l'argent qui fait les
mariages. - ---
Je ne vois pas que les choses en aillent
plus mal, même au point de vue de l'ar-
gent. Est-ce, en effet, une dot, qui pour
rapporter quelques billets de mille francs
doit déjà être considérable et exception-
nelle, qui peut faire qu'un homme fasse
ou non fortune par son travail, son in-
dustrie et son courage ? Je ne le crois pas.
Sans même me défendre de chercher un
paradoxe, je soutiens que la dot des fem-
mes, dans la bourgeoisie française, est
souvent un obstacle à la fortune du mari.
Le revenu qu'elle assure empêche par-
fois l'homme d'avoir l'initiative néces-
saire pour faire fortune de son côté. Il
s'endort sur cette sûreté, ou bien, dans
de nombreux ménages, la dot qu'apporte
la femme lui donne des exigences pour
elle, pour son train - - de maison, poursa
toilette, exigences qui pèsent lourdement
sur la vie du mari. Combien j'aurais
plus confiance dans le ménage de ces
hommes qui ont l'amour et la jeunesse,
qui savent vivre l'un pour l'autre et qui
vont ensemble à la fortune avec l'énergie
que donne seule l'affection conjugale
profonde et désintéressée.
L'assassinat et le suicide d'aujourd'hui
sont un crime nouveau de l'argent, un de
plus à mettre à son compte. Et ces crimes
sont assez fréquents, car on ne peut s'em-
pêcher de constater que la vie humaine
paraît avoir de moins en moins de prix
pour beaucoup d'esprits. Le nombre est
grand des gens qui aiment mieux mourir
que lutter. De plus en plus on perd l'é-
nergie nécessaire pour combattre la dou-
leur. Particulièrement quand il s'agit des
passions de l'amour, on préfère souvent
mourir plutôt que d'engager la bataille
soit avec les autres, soit avec soi-même.
Dans le cas présent on pourrait com-
prendre encore les amants se résignant à
se séparer. Mais si ce sacrifice dépassait
leurs forces, comment n'ont-ils pas eu
l'énergie de faire la chose la plus simple
du monde pour des gens qui s'aiment et
qui sont libres, c'est-à-dire de s'épouser?
Faut-il que le culte de l'argent soit entré
à fond dans les âmes bourgeoises, pour
qu'on lui sacrifie tout, pour qu'une mère
refuse à son fils une femme qu'il aime,
pour qu'un homme n'ait pas le courage
de dire et de montrer que le « sans dot n
de Molière est le secret du bonheur dans
le mariage 1
Henry Fouquier.
FARIA EN LIBERTÉ
Le jeune Faria, ce Portugais qui dérobait
des billets de cinq cents francs chez Mlle
Léonide Leblanc, qui volait dans les grands
magasins et qui filoutait les cochers de fia-
cres, a été mis en liberté hier après-midi,
sur l'ordre de M. Lozé et sur la demande
expresse de hautes personnalités qui s'in-
téressent au sort de cet excellent jeune
homme.
Les malheureux qui volent un pain pour
leurs enfants ont moins de chance.
LA BAISSE DES FONDS PORTUGAIS
Le mauvais œil
Certains de nos confrères publient la pe-
tite note-réclame ci-après :
On ne peut attribuer qu'à de nouvelles ma-
nœuvres de la spéculation à la baisse, en vue
de la liquidation, la légére réaction subie par
les fonds portugais.
Les nouvelles de Lisbonne continuent à être
rassurantes, et il ne s'est produit aucun fait
pouvant expliauer une baisse.
Ce que la note-réclame ci-dessus appelle
une réaction légère, c'est une baisse de près
de h fr. en quelques bourses. Le 3 0/0 por-
tugais, qui valait il n'y a pas quinze jours
37 fr. 30, ne vaut plus que 33 fr. h5, et nous
ne sommes pas au bout de la dégringolade^
car, malgré les «nouvelles rassurantes" dd
Lisbonne, la banqueroute au moins partielle
est inévitable et prochaine.
Il est d'ailleurs à remarquer que l'agence
à laquelle s'est adressé le ministre des fi-
nances portugaises, Mariano Carvalho, joue
de malheur : toutes les fois qu'elle entre-
prend de vanter une valeur, c'est commet
un fait exprès, la malheureuse valeur se
met à dégringoler.
On n'appelle plus cette agence, dans le
monde de la finance, que l'agence du mau-
vais œil..
LES MÉTAUX -
La Ire chambre de la Cour a entendu, hier
mardi, l'appel du jugement du tribunal
statuant sur les clauses du cahier d'en-
chères dressé par les liquidateurs des Mé-
taux.
Mes Clunet et Millerand ont critiqué avec
une grande vigueur les dérogations au
principe de l'égalité devant les enchères.
--- Me Millerand a établi que la combinaison
dont le Crédit industriel n'est que le prête-
nom complaisant — mais transparent —
était imaginée dans l'intérêt non pas des
créanciers, mais d'un seul créancier : le
Comptoir d'escompte.
Cette inégalité est d'autant plus choquante
que les liquidateurs des Métaux plaident (ai
moins qu'ils ne fassent semblant de plai-.
der) que cette créance est inique, immo-
rale, fantaisiste, non existante l
Me Bigault de Granrut, avocat des liqui-
dateurs, s'est soigneusement abstenu de
caractériser la créance du Comptoir d'es-
compte : il a paru à tout le monde, et pro-
bablement à la Cour, que les prémisses de
son raisonnement auraient dû consister
dans la justification de cette prétendue
créance.
Le coup de théàtre de l'audience a été la
production de conclusions additionnelles
de M. Gabriel Ferry. On peut les résumer
ainsi : « Pour établir que vous ne com-
mettez aucune faute, en admettant comme
monnaie libératoire une créance fraudu-
leuse, vous tirez argument de ce quels
Crédit industriel se porte fort pour cette
créance. Or, aux termes d'un arrêt rendu
en décembre 1890 par la chambre devant
laquelle nous plaidons, cet engagement est
de nul effet. »
Conclusions que Me Millerand a résumées
en nn mot : « Vous acceptez, vous manda-
taires de justice, au lieu d'argent, un fan-
tôme de créance, doublé d'un fantôme de
garantie ! »
M. l'avocat général Rau donnera ses con-
clusions jeudi.
Le ministère public étant l'avocat naturel
des mineurs, il est vraisemblable que M.
Rau aura à examiner si l'engagement anti-
statutaire du Crédit industriel peut rendre
liquide la fausse créance du Comptoir d'es-
compte.
DEUX AIGREFINS
M. Cochefert, commissaire aux déléga-
tions, a arrêté hier, sur mandat de M. Pujet.
juge d'instruction, un banquier (!) nommé
Léger qui, en compagnie d'un complice
nommé Godot, arrêté hier également à
Toulouse, avait fondé une société finan-
cière intitulée : La Rente.
La société n'était que fictive, ce qui n'em-
pêchait pas les deux complices d'écouler
avec quiétude, des titres de la Rente à Paris
et en province.
Godot a précisément été arrêté à Tou-
louse au moment où il revenait d'une pro-
menade dans les environs, promenade qu'il
agrémentait de petites visites à de braves
campagnards auxquels il faisait croire que
les titres de la Rente qu'il leur offrait en
vente étaient les titres de cette rente fran-
çaise, du reposant trois pour cent, qu'on
peut acheter en toute sécurité.
Et le truc de l'excellent homme prenait
assez bien ; car, outre qu'il s'offrait à Tou-
louse des diners succulents, il envoyait en-
core à son associé de Paris de quoi mener
bon train.
Les deux compères avaient nommé di-
recteur de leur banque, avec le secret espoir
de lui voir endosser toutes les responsabi-
lités de l'affaire, un brave homme du nom
de Boulet qui n'a pas été inquiété, ayant
prouvé que, de bonne foi, il croyait Léger
et Godot les plus honnêtes gens du
monde.
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t E 1 f
Le tsar est rentré chez lui sans avoir
fait visite à Guillaume II, sans avoir
même accepté une courte entrevue
entre deux trains. Car il paraît au-
jourd'hui à peu près certain que le
souverain allemand désirait se ren-
contrer avec son puissant voisin et
cousin, et se serait volontiers dérangé
pour avoir le plaisir de causer quel-
ques heures avec lui. Alexandre III a
jugé que ce désir avait quelque chose
de frivole, qu'il vaut mieux ne pas se
voir quand on n'a rien à se dire et
qu'il est inutile de donner à l'Europe
attentive le spectacle d'une embras-
sade peu sincère.
C'est là pour les champions de la
triple ou quadruple alliance, et sur-
tout pour les semeurs de mauvaises
nouvelles, un thème presque inépui-
sable. Car il y a en ce moment à Ber-
lin, à Vienne, à Rome et surtout à
Londres des alarmistes de tempéra-
ment ou de profession qui ne se las-
sent pas de gémir sur les dangers qui
menacent la paix générale. Si les deux
empereurs avaient eu une entrevue,
ces nouvellistes quinteux auraient dé-
claré que cela ne prouve rien et que
ces politesses banales ne tirent pas à
conséquence. L'entrevue n'ayant pas
eu lieu, les mêmes esprits chagrins
affirment que le tsar a volontairement
laissé échapper une occasion de ras-
surer l'Europe et que la rapidité de
son voyage est un symptôme des plus
menaçants.
v Nous ne ferons pas la faute de
prendre très au sérieux - ces augures
qui ne peuvent se regarder sans pleu-
rer. Il est à remarquer que, dans tous
les pays de la triple alliance comme
en Angleterre, ce sont surtout les or-
ganes ministériels qui passent leur
temps à découvrir des nuages dans le
ciel, tout en protestant des intentions
pacifiques de leurs gouvernements
respectifs. C'est que la grande affaire
de ces officieux est de présenter et de
faire passer la carte à payer. De peur
que les sujets ne se lassent des sai-
gnées continuelles qu'on fait à leur
bourse, on les entretient systémati-
quement dans un état d'inquiétude
qui les empêche de murmurer trop
haut contre le grossissement continu
du budget de la guerre. Il n'en est pas
ainsi chez nous; sans mettre notre pa-
triotisme au-dessus de celui des au-
tres, nous pouvons constater que de-
puis vingt ans pas un ministère fran-
çais n'a eu besoin de sonner une pa-
reille cloche pour décider les contri-
buables à de nouveaux sacrifices,
quand il s'agissait de la défense na-
tionale.
On accusera donc Alexandre III
pour décider les Parlements de Ber-
lin, de Vienne et de Rome à voter
quelques surcroîts de crédits. Rien ce-
pendant n'est plus naturel que le peu
de goût de cet honnête homme pour
les manifestations trompeuses d'une
fausse amitié. Nous ne dirons pas
qu'il a craint de nous donner quelque
ombrage en répondant aux avances
de nos ennemis. Il sait que notre con-
fiance dans sa loyauté est au-dessus
de pareilles vétilles. Nous avons bien
ri quand des journaux italiens ont eu
la naïve audace de supposer que la
visite de M. de Giers à Monza pouvait
nous inspirer de l'inquiétude ou de
l'humeur. La vérité est que le tsar,
qui n'est pas un souverain à la mode
du jour et qui prend tout au sérieux,
a horreur des vaines simagrées et des
démonstrations qui ne répondent à
aucun sentiment vrai. Il ne veut pas
mentir et il n'aime pas à recevoir à
bout portant des déclarations d'amitié
auxquelles il lui est impossible d'ajou-
ter foi.
Certes, il n'y a pas un homme en
Europe qui soit plus sincèrement dé-
voué qu'Alexandre III à la cause de
la paix, parce qu'il n'y a pas un sou-
verain ni un homme d'Etat qui ait
davantage le sentiment de sa respon-
sabilité devant Dieu et devant les
hommes. Mais il n'est pas pour cela
obligé d'oublier tous ses griefs ou de
feindre qu'il les oublie. La triple al-
liance, que les coalisés ont renouvelée
avec tant de précipitation, est dirigée
contre la Russie autant que contre la
France. C'est contre nous que se li-
guent l'Allemagne et l'Italie; c'est
contre les Russes que les Autrichiens,
qui n'ont rien à démêler avec nous,
ont tenu à se procurer des alliés. Dans
tout l'Orient, à Constantinople, à
Bucarest, à Sofia, à Belgrade, l'in-
fluence légitime et les justes préten-
tions de la Russie se heurtent à la ri-
valité de l'Autriche, toujours appuyée
par la diplomatie allemande.
Depuis le congrès de Berlin, qui a
enlevé aux vainqueurs de Plewna
presque tous les fruits de. leur victoire,
et surtout depuis l'aï-rivée de Ferdi-
nand de Cobou.rg en Bulgarie, la Rus-
sie a le droit de se plaindre de l'Alle-
magne. Le tsar attend, se réserve,
laisse passer, sinon sans protestation
du moins sans éclat, les violations de
traités, les intrigues hostiles, les mau-
vais procédés; cela ne prouve pas
qu'il y soit insensible. Il a dû être
d'autant plus froissé du renouvelle-
ment de la triple alliance qu'il est plus
que jamais autorisé à se considérer
comme le plus ferme, le plus puissant
et le plus sincère défenseur de la paix
européenne. Il ne lui a pas plu d'é-
changer des protestations de cordia-
lité avec le promoteur de cette ligue
en partie dirigée contre lui. Il ne lui a
pas plu d'ignorer que les états-majors
allemand et autrichien passent leur
temps à combiner des plans d'attaque
contre son empire.
C'est pourquoi il est rentré chez lui
sans se laisser arrêter au passage
par des invitations ou des insinuations
dont il connaît la portée. Ce refus
n'est une menace pour personne ; c'est
simplement une leçon de franchise et
de dignité silencieusement donnée à
qui de droit.
Commines.
LE GROUPE D'EXTRÊME-GAUCHE
On parlait hier dans les couloirs de la
Chambre, où d'ailleurs il n'y avait presque
personne, de la reconstitution prochaine
du groupe d'extrême-gauche.
La nouvelle paraît jusqu'ici manquer de
consistance.
On signalait M. Lagnel comme devant
faire partie du nouveau groupe. Or, M. La-
gnel est à Hanovre ; il est donc assez dou-
teux qu'il ait pu être consulté.
On citait aussi le nom de M. Millerand.
Interrogé par nous, M. Millerand a déclaré
qu'il n'avait nullement l'intention de faire
partie du nouveau groupe, si toutefois la
nouvelle de sa formation était exacte.
Quant à M. Clémenceau, en lisant la note
publiée à ce sujet par le Temps, il a dit
qu'il ne savait pas de quoi il s'agissait.
Les adversaires de la concentration répu-
blicaine ont donc vraisemblablement pris
leurs désirs pour la réalité.
MORT DU DERNIER NEVEU
DE NAPOLÉON Ier
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Rome, 3 novembre.
Aujourd'hui est mort à Fano le prince
Lucien Bonaparte.
Il était né en 1813 et habitait habituelle-
ment en Angleterre, dans le quartier de
Bayswater, à Londres.
Le prince Louis-Lucien Bonaparte était
né à Torngrove, près Worcester, en Angle-
terre, le h janvier 1813, du second mariage
du prince Lucien, frère de Napoléon Ier,
avec Alexandrine, veuve du banquier Jou-
berthon, née de Bleschamp. Il était frère du
prince Pierre Bonaparte.
Le prince Lucien avait épousé la fille
d'un sculpteur lucquois, Marianne Cecchi,
dont il vivait séparé depuis de longues an-
nées, et qui est morte à Ajaccio l'année
dernière. 11 n'en avait pas eu d'enfants.
LA SUCCESSION DE M. MAZE
Modérés et radicaux. — Referendum
sénatorial. — Déclarations
de M. Vian.
Le déjeuner mensuel des républicains de
Seine-et-Oise, au Palais-Royal, était, hier,
particulièrement animé; un grand nombre
de délégués des comités cantonaux y assis-
taient.
M. Vian, député de Rambouillet, prési-
dait, ayant à ses côtés MM. Remoiville et
de Jouvencel, anciens députés.
Au dessert, M. Vian a prononcé l'éloge
funèbre de M. Maze et engagé les républi-
cains à se grouper dès maintenant en vue
de la prochaine élection sénatoriale.
Le député de Rambouillet a conseillé à
ses amis politiques d'éviter le plus long-
temps possible de lancer aucun nom de
candidat, afin de ne pas fournir à la réac-
tion de sujet de polémique.
Rappelant le franc appui apporté par les
radicaux aux dernières élections, l'orateur
a exprimé l'espoir que les électeurs s'en
souviendraient le jour du scrutin. Plusieurs
électeurs modérés ont tenu un langage ana-
logue.
Une innovation électorale
L'assemblée s'est ralliée à une proposi-
tion de M. Vian dont l'application consti-
tuera une innovation ingénieuse en ma-
tière électorale.
Par les soins de l'Alliance républicaine, co-
mité qui présida à l'élection sénatoriale du
mois de janvier 1891, les délégués sénato-
riaux de Seine-et-Oise seront appelés, dans
un scrutin préparatoire, à désigner leur
candidat.
Chaque délégué adressera à l'Alliance ré-
publicaine, sous enveloppe portant son
nom, une seconde enveloppe qui contien-
dra le nom du candidat choisi.
Celui des concurrents républicains qui ob-
tiendra la majorité des voix à cette épreuve
sera proclamé candidat unique.
De cette façon, les rivalités de compéti-
tions disparaîtraient.
Coupons le câble
Interpellé par un électeur sur le discours
de M. Clémenceau à la séance de samedi,
au cours duquel, on s'en souvient, l'ora-
teur dénonça le pacte conclu entre les mo-
dérés et les radicaux et parla de couper le
câble, M. Vian a répondu que, si regrettable
que cette séparation pût être pour la sta-
bilité ministérielle, les radicaux ne pou-
vaient aller plus loin dans la voie des con-
cessions déjà consenties et soutenir un mi-
nistère toujours plus disposé à suivre les
réactionnaires que les fractions avancées
du parti républicain. Ces déclarations ont
été très applaudies.
UN PRÉSENT
AU PRINCE DE GALLES
Londres, 3 novembre. — Les artistes drama
tiques et impresarii de Londres ont sousciit
25,000 francs en vue de faire présent d'une
boîte à cigares en or au prince de Galles avec
ses armes et son chiffre.
La remise en sera faite lundi procbain.
LES ACCIDENTS
DE CHEMINS DE FER
LA VÉRITÉ SUR LES COMPAGNIES
Il faut en finir. — Assez de fumisteries.
Le contrôle de l'Etat. — Le code
des signaux.
Nous n'avons point abusé jusqu'ici des
dissertations sur les accidents de chemins
de fer. La tendance naturelle que nous
avons tous à incriminer les compagnies
nous faisait un devoir de nous montrer
particulièrement circonspect dans cette
question délicate. Aussi, fidèle à notre
habitude de ne formuler que des critiques
appuyées sur des faits, nous nous sommes
à peu près borné à indiquer la bizarrerie
du règlement qui permet de violer leblock-
system, qui n'a sa raison d'être et ne peut
offrir de sécurité qu'à la condition d'être
appliqué d'une manière absolue, comme
sur la ligne d'Auteuil.
D'un autre côté, envisageant dans ses
grandes lignes la question du surmenage
des agents, nous avons cité, avec chiffres à
l'appui, un certain nombre de dépôts où la
circulaire ministérielle fixant à douze heu-
res le maximum de temps de présence des
mécaniciens était considérée comme non
avenue. Nous avons même été agréable-
ment surpris de recevoir la visite d'un
agent du contrôle de l'Etat, venant nous
demander les noms que nous avions dési-
gnés car des initiales, afin de commencer
une enquête sur des abus qui avaient échap-
pé à sa perspicacité.
La série des accidents menaçant de de-
venir interminable, nous avons persévéré à
en rechercher les causes, et si nous n'avons
point la prétention de les avoir toutes dé-
couvertes, nous avons du moins relevé des
faits d'une gravité incontestable, faits pa-
tents, indiscutables, qui contredisent les
explications multicolores prodiguées avec
une telle assurance par les porte-parole
des compagnies.
Les vessies des compagnies
Nous ne nous attarderons point à l'ana-
lyse fastidieuse des vessies que les com-
pagnies tentent de faire prendre pour des
lanternes.
L'antienne - est toujours la même :
« C'est la faute à la presse, déclarent so-
len nellement les administrateurs. Les acci-
dents ne sont pas plus nombreux aujour-
d'hui qu'autrefois : la seule différence est
qu'on en parle davantage, et c'est une mau-
vaise action que d'entretenir la défiance
dans l'esprit des voyageurs. Notre matériel,
nos signaux sont les meilleurs qui existent.
Inventez-en de plus perfectionnés, nous
sommes prêts à les adopter. La preuve de
ce que nous avançons, c'est que tous les ac-
cidents sont dus aux défaillances de nos
employés, que nous remplacerons égale-
ment de suite si vous pouvez nous en four-
nir de supérieurs. »
Et la compagnie P.-L.-M. a eu une trou-
vaille pour expliquer ces défaillances, dont
on ne saurait la rendre responsable, à no-
tre sérieux confrère le Temps :
"Les grèves,a-t-elle dit,ces grèves que vous
ne pouvez nous reprocher d'encourager,
ont détraqué le cerveau de nos employés
au point qu'un mécanicien, au lieu de re-
garder constamment la voie quand il est
sur sa machine, est fatalement porté à lever
les yeux au ciel pour rêver à la solution de
la question sociale."
Il eût été tout aussi vraisemblable de s'en
prendre à la littérature pornographique,
les idées. riantes nous paraissant avoir
plus de chances quelles problèmes philoso-
phiques de distraire un mécanicien qui
s'embête en cours de route.
Quant au contrôle de l'Etat, vantant sans
cesse sa vigilance, il déclare, pour toutes
sortes de raisons, que la situation actuelle
est excellente. déduction faite de la catas-
trophe de Saint-Mandé et de quelques au-
tres.
L'opinion de M. Wickersheimer
Avant de démontrer le vice fondamental
des systèmes actuels de signaux et des rè-
glements concernant la marche des trains,
il importe de donner une idée juste, basée
sur des documents, de l'esprit de résistance
et d'inertie reproché aux compagnies et
que celles-ci affectent de traiter comme
une légende.
« Nous sommes à l'affût du progrès», gé-
missent les compagnies.
Voici ce que leur répondait à la Chambre
des députés, en 1887, M. Wickersheimer, in-
génieur des mines :
« Nous signalerons une raison partieu-
lière qui crée souvent bien des duhcultes
aux inventeurs qui soumettent un appareil
à l'examen d'une compagnie : c'est que les
personnes chargées de l'examen de l'appa-
reil sont précisément les ingénieurs des
compagnies, inventeurs eux-mêmes d'appa-
reils du même genre, c'est-à-dire des ri-
vaux qui ont tout intérêt à discréditer leurs
inventions.
"Loin de nous la pensée que les ingénieurs
des compagnies, très compétents d'ailleurs,
et ayant conscience de leur valeur, soient
systématiquement injustes envers les in-
venteurs; mais on peut admettre qu'ils ont,
comme la plupart des hommes, une con-
fiance particulière dans leur propre in-
faillibilité; en outre, l'inventeur étranger est
une espèce de reproche vivant de leur incurie
ou,' du moins, de leur défaut de génie in-
ventif.
» Dès lors, volontairement ou non, leurs
rapports sur les appareils présentés par
ceux qu'ils considèrent comme des pro-
fanes sont toujours empreints d'un pessi-
misme exagéré."
Une histoire peu connue
Nous n'insisterons point sur les condi-
tions fantastiques dans lesquelles est censé
fonctionner le contrôle de l'Etat.
Chacun sait que les ingénieurs du con-
trôle, cumulant tous ce service avec d'au-
tres également rétribués par l'Etat, n'ont
pas le temps matériel de vaquer à leurs de-
voirs et que, en outre, la plupart, aspirant
à entrer au service des compagnies, cher-
chent avant tout à se les rendre favora-
bles.
Une histoire peu connue, quoique an-
cienne, va nous édifier sur le rôle de l'ins-
titution:
Lè 16 septembre 1871, un train déraille à
Champigny (Yonne) : dix morts et des
Dlessés. L'accident ayant été causé par la
rupture d'un essieu de wagon de houille, le
directeur de l'exploitation est poursuivi,
sur le rapport du contrôle, pour avoir au-
torisé l'introduction de wagons de houille
dans un train de grande vitesse.Condamné à
la prison en première instance, il est acquitté
en appel, après des démarches dont on
conçoit l'activité.
Le 22 août 1872, M. Teisserenc de Bort,
ministre de l'agriculture, qui avait. réussi
à se faire confier l'intérim des travaux pu-
blics, déplace l'inspecteur général du con-
trôle de P.-L.-M., et la dépêche qu'il lui
adresse contient cette phrase en post-scrip-
tum :
« A votre place, j'aurais tâché de sous-
traire un camarade aux poursuites correc-
tionnelles. »
Nota. — M. Teisserenc de Bort était de-
puis nombre d'années administrateur de
la compagnie P.-L.-M.
Le code des signaux
Un exemple plus actuel et autrement
grave va encore venir à l'appui de notre
opinion.
On comprend l'importance qu'il y a en
temps de guerre, où les mécaniciens et
agents des trains sont exposés à passer
d'un réseau sur un autre, à ce que les si-
gnaux en eux-mêmes, c'est-à-dire le lan-
gage qui en résulte, soient les mêmes par-
tout.
Or, en dépit d'un projet de loi déposé à
la Chambre le a mars 1882, c'est seulement
en novembre 1885 que le ministre des tra-
vaux publics se résigna à édicter le code
des signaux applicables à tous les réseaux
français.
Mais en même temps le ministre refusait
d'imposer un délai aux compagnies pour
se conformer à son arrêté, qui a reçu son
exécution définitive il y a à peine quelques
mois. Nous ne sommes même pas certain
que le code soit adopté sur la ligne de
Ceinture.
Encore une plaisanterie
Maintenant, veut-on connaitre la perfec-
tion de ce fameux code dont les compa-
gnies ont tant « joué" lors de la catastro-
phe de Saint-Mandé ?
D'abord, le paragraphe 2 de l'article pre-
mier s'exprime ainsi :
« Les règlements spéciaux à chaque com-
pagnie ne pourront contenir aucune dispo-
sition contraire au code. »
Les compagnies en profitent pour avoir
chacune une rédaction différente pour les
règlements des signaux.
Mais lisons l'article 15 :
« Sur les voies autres que celles suivies
par les trains en circulation, le signal d'ar-
rêt absolu (le plus important de tous), dé-
fini à l'article précédent, peut être rem-
placé, avec l'autorisation du ministre, par
un signal carré ou rond à face jaune, pré-
sentant la nuit un simple feu jaune. »
Tout cela pour éviter à certaines compa-
gnies de repeindre leurs signaux.
Enfin, le code a oublié le cas où la cir-
culation est réduite à une seule voie sur
les lignes à double voie, par suite de répa-
ration ou d'accident.
Chaque compagnie procède alors comme
elle l'entend.
Voilà quatre ans que ces lacunes ont été
signalées au ministre, et elles subsistent
toujours.
Et il y a des gens qui doutent de la force
de résistance des compagnies!
Le lir SMSCttJB putMMwat demain la
a Chronicrae ». par Franciscnie Sarcey,
LES CRIMES ET DÉLITS
A PARIS
LE SERVICE DE LA SURETÉ
Nous avons dit hier que la moyenne des
affaires dont chaque commissariat avait à
s'occuper était environ de 1,800 par an.
Veut-on connaître le nombre des opéra-
tions diverses auxquelles le service de la
Sûreté s'est livré ?
Voici une statistique qui comprend les dix
dernières années.
En 1881 la Sûreté a fourni hg. 1.48 rapports.
1882 — A7.027 —
1883 — .43.ffl -
188A - 39.17,2 -
1885 — hl.917 -
1886 — ho.009 -
1887 — 38.7Z -
1888 - A5.2/i3 —
1883 - h9.3h7 —
1890 - *2.520 —
Ces rapports comprennent les enquêtes
et recherches sur notes administratives, les
recherches de malfaiteurs en vertu de
pièces judiciaires, les recherches de déser-
teurs et jeunes soldats insoumis et les ren-
seignements demandés par le parquet.
Les chiffres cités plus haut ne sont pas
compris dans la moyenne dont nous par-
lions hier; ils viennent, ainsi que les af-
faires de parquet traitées directement par
les commissaires, grossir le chiffre annuel
déjà énorme de cent quarante-quatre mille
affaires diverses.
En passant, une réflexion : Comment se
fait-il que dans le questionnaire, ne com-
prenant pas moins de quarante-sept arti-
cles, envoyé à tous les commissariats, M.
Lozé ait oublié de faire figurer la rubrique,
passablement chargée dans certains quar-
tiers : « Détournement de mineures? » Il y
a là une lacune qui laissera croire que le
travail demandé par le préfet sera loin
d'être bien complet.
Réforme à faire
En terminant, voici un cas que nous sou-
mettons à M. Lozé, en ce moment à l'affût
des innovations ; les faits que nous allons
citer, nous les tenons d'un commissaire :
Un homme est arrêté, à tort ou à raison,
pour un délit quelconque, mais de minime
importance. Il doit, s'il justifie d'un domi-
cile, être remis en liberté. Or, que se passe-
t-il t
L'inculpé est arrêté, admettons-le, à
Montmartre, quartier des Grandes-Car-
rières, et il donne son adresse à Plaisance.
Le commissaire transcrit le texte d'une
dépêche qui est portée par un planton au
poste du quartier et, de là, par un gardien
de la paix au poste central, d'où elle est ex-
pédiée à la préfecture qui la transmet au
poste central du quatorzième arrondisse-
ment. Elle va ensuite au poste de quartier
et arrive chez le commissaire du quartier
de Plaisance. Ce magistrat fait prendre les
renseignements demandés au domicile de
l'intéressé et la réponse refait, en sens in-
verse, le même trajet pour revenir, douze
heures et parfois vingt-quatre heures après,
au commissariat qui détient l'inculpé.
Si celui-ci est coupable,ce n'est que demi-
mal ; mais b'il est innocent, victime de la
routine administrative, il passe près d'une
journée au poste en compagnie de vaga-
bonds, de pochards et de filles.
Nous livrons ce fait aux méditations de
M. Lozé.
LAVIEDEP ARIS
Ceci pourrait s'intituler : a Simple his-
toire », tant l'aventure, en soi et réserve
faite du dénouement tragique, est ba-
nale. Une institutrice, jeune et jolie,
Mlle Marie L., est aimée par un jeune
homme, employé dans un ministère, M.
Valentin D. Le jeune homme est bien
reçu dans la maison, aux environs de
Paris. Il y fréquente assidûment. On s'ha-
bitue partout à le considérer comme un
fiancé. Il ne paraît pas douteux que lui-
même, et probablement de très bonne
foi, ne se soit donné ce rôle. Une liaison
trop intime s'établit entre les jeunes gens.
Puis, avant-hier, Valentin déclare à Marie
qu'il est désespéré, que sa mère,
non seulement ne consente pas au ma-
riage qu'il souhaite, mais encore lui im-
pose d'épouser une fille riche, qu'il n'aime
pas. @ Marie demande une dernière entre-
vue à son amant, l'endort dans ses bras
et, avec le plus grand sang-froid, lui
brûle la cervelle. Après quoi, elle le cou-
vre de baisers et se loge une balle dans
la tête. Elle est morte six heures après.
Voilà l'histoire. Vous l'aurez lue ou
vous la trouverez dans tous les « faits-
divers », probablement avec la rubrique
ordinaire : « Encore une victime de l'a-
mour. » C'est contre la rubrique que je
proteste. L'amour ne fait pas de victi-
mes, quand il est heureux et partagé. Di-
sons donc franchement les choses comme
elles sont et, s'il faut un titre à ce drame
douloureux, intitulons-le : « Encore une
victime du mariage d'argent ». J'entends
souvent formuler des plaintes fort amè-
res sur le relâchement du lien de famille.
On dit, et je ne trouve pas qu'on ait tou-
jours tort, que l'autorité paternelle s'af-
faiblit trop chez nous, non seulement
dans la bourgeoisie, mais partout ; que
le respect des enfants pour leurs parents
a fait trop place à une camaraderie qui
n'est même pas toujours amicale.
Tout ceci est bien fondé peut-être.
Mais on oublie d'ajouter que l'autorité
de la famille reste encore très puissante
sur la question du mariage et qu'elle
s'exerce toujours pour arriver à faire
triompher le mariage d'argent sur le ma-
riage d'amour. On ne s'occupe guère de
former l'esprit du jeune homme aux qua-
lités viriles, on ne s'inquiète pas tou-
jours de le défendre contre les entraîne-
ments de la jeunesse et les duperies de
l'inexpérience. Pour la jeune fille, on
tient fort à ce qu'elle ne fasse rien qui
choque les convenances plutôt qu'on
n'essaye de lui donner, sans pruderie,
une éducation morale supérieure aux
grimaces mondaines. Seulement, quand
arrive l'heure du mariage, la famille se
fait sérieuse et intraitable. Elle ne veut
entendre parler de rien, si ce n'est d'une
bonne affaire. La question d'argent prime
tout.
Pour notre bourgeoisie, c'est par là
que la famille existe encore, se main-
tient et se défend. Moi, je soutiens que
c'est par là qu'elle s'épuise, qu'elle dé-
périt et qu'elle risque de périr. Car les
mariages d'argent font les parents sans
autorité sur leurs enfants et préparent
cette génératiou « fin de siècle », qui,
hélas! a commencé avant la fin du siècle
et risque de lui survivre, d'hommes qui
arrivent épuisés, sceptiques, blasés, à un
mariage qui est une affaire quand il n'est
pas une prostitution, et de jeunes filles
qui, étant incapables de demander ou de
donner de l'amour à leurs maris, sont
parfaitement résolues à le trouver ail-
leurs.
Certes, rien n'est plus poignant et plus
respectable que la douleur de la famille
de ce malheureux Valentin et de celle de
Marie. Mais on peut bien dire que le dé-
sastre est venu du fait de ces idées immo-
rales, étroites et âpres de notre bour-
geoisie, qui veut bien que les jolis gar-
çons s'amusent avec les belles filles, mais
n'épousent que les « demoiselles » riches.
Un homme d'un autre milieu, d'une édu-
cation plus virile, eût simplement dit à
sa mère : « Je me suis engagé". Ainsi
font les Américains. En Amérique encore
(il va de soi qu'on ne peut parler de ces
choses qu'en général, abstraction faite
des exceptions), dans le pays du dieu
Dollar, ce n'est pas l'argent qui fait les
mariages. - ---
Je ne vois pas que les choses en aillent
plus mal, même au point de vue de l'ar-
gent. Est-ce, en effet, une dot, qui pour
rapporter quelques billets de mille francs
doit déjà être considérable et exception-
nelle, qui peut faire qu'un homme fasse
ou non fortune par son travail, son in-
dustrie et son courage ? Je ne le crois pas.
Sans même me défendre de chercher un
paradoxe, je soutiens que la dot des fem-
mes, dans la bourgeoisie française, est
souvent un obstacle à la fortune du mari.
Le revenu qu'elle assure empêche par-
fois l'homme d'avoir l'initiative néces-
saire pour faire fortune de son côté. Il
s'endort sur cette sûreté, ou bien, dans
de nombreux ménages, la dot qu'apporte
la femme lui donne des exigences pour
elle, pour son train - - de maison, poursa
toilette, exigences qui pèsent lourdement
sur la vie du mari. Combien j'aurais
plus confiance dans le ménage de ces
hommes qui ont l'amour et la jeunesse,
qui savent vivre l'un pour l'autre et qui
vont ensemble à la fortune avec l'énergie
que donne seule l'affection conjugale
profonde et désintéressée.
L'assassinat et le suicide d'aujourd'hui
sont un crime nouveau de l'argent, un de
plus à mettre à son compte. Et ces crimes
sont assez fréquents, car on ne peut s'em-
pêcher de constater que la vie humaine
paraît avoir de moins en moins de prix
pour beaucoup d'esprits. Le nombre est
grand des gens qui aiment mieux mourir
que lutter. De plus en plus on perd l'é-
nergie nécessaire pour combattre la dou-
leur. Particulièrement quand il s'agit des
passions de l'amour, on préfère souvent
mourir plutôt que d'engager la bataille
soit avec les autres, soit avec soi-même.
Dans le cas présent on pourrait com-
prendre encore les amants se résignant à
se séparer. Mais si ce sacrifice dépassait
leurs forces, comment n'ont-ils pas eu
l'énergie de faire la chose la plus simple
du monde pour des gens qui s'aiment et
qui sont libres, c'est-à-dire de s'épouser?
Faut-il que le culte de l'argent soit entré
à fond dans les âmes bourgeoises, pour
qu'on lui sacrifie tout, pour qu'une mère
refuse à son fils une femme qu'il aime,
pour qu'un homme n'ait pas le courage
de dire et de montrer que le « sans dot n
de Molière est le secret du bonheur dans
le mariage 1
Henry Fouquier.
FARIA EN LIBERTÉ
Le jeune Faria, ce Portugais qui dérobait
des billets de cinq cents francs chez Mlle
Léonide Leblanc, qui volait dans les grands
magasins et qui filoutait les cochers de fia-
cres, a été mis en liberté hier après-midi,
sur l'ordre de M. Lozé et sur la demande
expresse de hautes personnalités qui s'in-
téressent au sort de cet excellent jeune
homme.
Les malheureux qui volent un pain pour
leurs enfants ont moins de chance.
LA BAISSE DES FONDS PORTUGAIS
Le mauvais œil
Certains de nos confrères publient la pe-
tite note-réclame ci-après :
On ne peut attribuer qu'à de nouvelles ma-
nœuvres de la spéculation à la baisse, en vue
de la liquidation, la légére réaction subie par
les fonds portugais.
Les nouvelles de Lisbonne continuent à être
rassurantes, et il ne s'est produit aucun fait
pouvant expliauer une baisse.
Ce que la note-réclame ci-dessus appelle
une réaction légère, c'est une baisse de près
de h fr. en quelques bourses. Le 3 0/0 por-
tugais, qui valait il n'y a pas quinze jours
37 fr. 30, ne vaut plus que 33 fr. h5, et nous
ne sommes pas au bout de la dégringolade^
car, malgré les «nouvelles rassurantes" dd
Lisbonne, la banqueroute au moins partielle
est inévitable et prochaine.
Il est d'ailleurs à remarquer que l'agence
à laquelle s'est adressé le ministre des fi-
nances portugaises, Mariano Carvalho, joue
de malheur : toutes les fois qu'elle entre-
prend de vanter une valeur, c'est commet
un fait exprès, la malheureuse valeur se
met à dégringoler.
On n'appelle plus cette agence, dans le
monde de la finance, que l'agence du mau-
vais œil..
LES MÉTAUX -
La Ire chambre de la Cour a entendu, hier
mardi, l'appel du jugement du tribunal
statuant sur les clauses du cahier d'en-
chères dressé par les liquidateurs des Mé-
taux.
Mes Clunet et Millerand ont critiqué avec
une grande vigueur les dérogations au
principe de l'égalité devant les enchères.
--- Me Millerand a établi que la combinaison
dont le Crédit industriel n'est que le prête-
nom complaisant — mais transparent —
était imaginée dans l'intérêt non pas des
créanciers, mais d'un seul créancier : le
Comptoir d'escompte.
Cette inégalité est d'autant plus choquante
que les liquidateurs des Métaux plaident (ai
moins qu'ils ne fassent semblant de plai-.
der) que cette créance est inique, immo-
rale, fantaisiste, non existante l
Me Bigault de Granrut, avocat des liqui-
dateurs, s'est soigneusement abstenu de
caractériser la créance du Comptoir d'es-
compte : il a paru à tout le monde, et pro-
bablement à la Cour, que les prémisses de
son raisonnement auraient dû consister
dans la justification de cette prétendue
créance.
Le coup de théàtre de l'audience a été la
production de conclusions additionnelles
de M. Gabriel Ferry. On peut les résumer
ainsi : « Pour établir que vous ne com-
mettez aucune faute, en admettant comme
monnaie libératoire une créance fraudu-
leuse, vous tirez argument de ce quels
Crédit industriel se porte fort pour cette
créance. Or, aux termes d'un arrêt rendu
en décembre 1890 par la chambre devant
laquelle nous plaidons, cet engagement est
de nul effet. »
Conclusions que Me Millerand a résumées
en nn mot : « Vous acceptez, vous manda-
taires de justice, au lieu d'argent, un fan-
tôme de créance, doublé d'un fantôme de
garantie ! »
M. l'avocat général Rau donnera ses con-
clusions jeudi.
Le ministère public étant l'avocat naturel
des mineurs, il est vraisemblable que M.
Rau aura à examiner si l'engagement anti-
statutaire du Crédit industriel peut rendre
liquide la fausse créance du Comptoir d'es-
compte.
DEUX AIGREFINS
M. Cochefert, commissaire aux déléga-
tions, a arrêté hier, sur mandat de M. Pujet.
juge d'instruction, un banquier (!) nommé
Léger qui, en compagnie d'un complice
nommé Godot, arrêté hier également à
Toulouse, avait fondé une société finan-
cière intitulée : La Rente.
La société n'était que fictive, ce qui n'em-
pêchait pas les deux complices d'écouler
avec quiétude, des titres de la Rente à Paris
et en province.
Godot a précisément été arrêté à Tou-
louse au moment où il revenait d'une pro-
menade dans les environs, promenade qu'il
agrémentait de petites visites à de braves
campagnards auxquels il faisait croire que
les titres de la Rente qu'il leur offrait en
vente étaient les titres de cette rente fran-
çaise, du reposant trois pour cent, qu'on
peut acheter en toute sécurité.
Et le truc de l'excellent homme prenait
assez bien ; car, outre qu'il s'offrait à Tou-
louse des diners succulents, il envoyait en-
core à son associé de Paris de quoi mener
bon train.
Les deux compères avaient nommé di-
recteur de leur banque, avec le secret espoir
de lui voir endosser toutes les responsabi-
lités de l'affaire, un brave homme du nom
de Boulet qui n'a pas été inquiété, ayant
prouvé que, de bonne foi, il croyait Léger
et Godot les plus honnêtes gens du
monde.
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