Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1887-06-14
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 14 juin 1887 14 juin 1887
Description : 1887/06/14 (A18,N5632). 1887/06/14 (A18,N5632).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/04/2013
Dix-huitième année — N* 5632 Prix du numéro : Paris et départements : 15 centimes Mardi 14 juin 1887
LE XIX SIECLE
JOURNAL RÉPUBLICAIN
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Six mois. 32 »»
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EN VENTE A LONDRES
Et Abonnements pour l'Angleterre
Au bureau du XIXe Sièclo
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MM. LA GRANGE, CERF ET Ci@
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MM. les Souscripteurs dont l'abonne-
ment expire le 15 juin sont priés
de le renouveler, s'ils ne veulent pas
éprouver de retard dans la réception du
journal.
BULLETIN
La plus grande partie de la séance d'hier
a été occupée par le double scrutin ou-
vert pour l'élection d'un vice-président et
d'un secrétaire, en remplacement de M.
Spuller et de M. Etienne. Une discussion
bruyante s'est engagée sur la validité du
premier vote. Finalement, M. Develle a
été proclamé vice-président par 189 voix
con!re 181 données à M. de Mahy, et M.
Horteur a été élu secrétaire par 200 voix
contre M. Lhérissé, qui en a obtenu 172.
Puis la Chambre a repris la suite de son
ordre du jour, c'est-à-dire la discussion de
la loi militaire ; mais une question préju-
dicielle a été posée par M. Mézières, qui
demandait qu'on discutât le titre 2 de la
loi relatif au rengagement des sous-offi-
ciers avant le titre 1er.
Le ministre de la guerre et le président
de la commission, l'honorable M. de Mahy,
ont combattu cette proposition qui a été
repoussée par 360 voix contre 183.
Les termes dans lesquels la presse an-
glaise apprécie la situation nouvelle en
Afghanistan indiquent que nous n'avons
point exagéré en affirmant que cette situa-
tion est mauvaise pour l'Angleterre. Le
Times publie sur Kerki, que les troupes
russes ont occupé, des renseignements
démontrant la très grande importance de
ce point stratégique. Kerki, gros village
dominant l'Oxus, sur la route de Bokhara
à Hérat, commande l'entrée du territoire
de Kodja-Saleh, objet des prétentions des
gouvernements russe et anglais. C'est sur
ce territoire en litige qu'a délibéré, jus-
qu'à ces derniers temps, la fameuse com-
mission de délimitation, qui semble des-
tinée à ne plus jamais se réunir, quoi-
qu'elle ne soit pas officiellement dissoute.
Les Russes, qui ont poussé jusqu'à
Merv leur ligne de chemin de fer, en pour-
suivent la construction dans la direction
de Hérat. En même temps, leurs agents
font une propagande très active dans tout
l'Afghanistan, et particulièrement dans la
capitale, en faveur du prince lskander-
Khan, fils du sultan Jean, qui fut gouver-
neur de Hérat en 1857. Ce prétendant pro-
tégé par la Russie jouit, paraît-il, d'une
popularité qui grandit à mesure que dé-
croit la fortune de l'émir Abdurrhaman.
Il faut que la position de celui-ci soit réel-
lement fort compromise, pour que les cor-
respondants des journaux anglais envi-
sagent déjà l'éventualité de sa déchéance.
Le sort de ce protégé de l'Angleterre ne
paraît pas, d'ailleurs, toucher énormé-
ment la presse de Londres, qui prend son
parti de cet événement avec beaucoup de
philosophie. Le Times ne va-t-il pas jus-
qu'à déclarer que si l'infortuné Abdurrha-
man est détrôné, ce ne sera pas un mal-
heur, au contraire. « La chute de ce prince,
loin d'être un événement regrettable, se-
rait ce que nous pourrions souhaiter de
mieux ». C'est par cette phrase, d'une froi-
deur toute britannique, que l'organe de la
Cité prononce d'avance l'oraison funèbre
de l'émir ami de l'Angleterre. On ne sau-
rait avec plus de désinvolture « lâcher »
ses amis dans le malheur.
Malgré tant de nouvelles peu rassurantes,
la presse anglaise n'abandonne pas l'idée
d'un arrangement. La diplomatie anglaise
a ses portefeuilles pleins de combinaisons
diversf's, destinées à satisfaire la Russie
dans toutes ses exigences, sans com-
promettre les intérêts de l'Angleterre; bien
plus, en consolidant sa situation.
L'optimisme voulu des journaux de
Londres se retrouve dans leurs apprécia-
tions sur l'autre grande question qui tou-
che directement l'Angleterre, nous voulons
parler de la convention égyptienne. D'a-
près le Daily News, les ambassadeurs d'Al-
lemagne et d'Autriche auraient félicité le
sultan de la « sagacité politique » dont il
a fait preuve en concluant l'accord anglo-
turc. Voiià qui réduit à néant les observa-
tions de la Russie et de la France. Cela suf-
fit pour que l'on déclare à Londres que
les puissances ont adhéré. Il ne pourrait,
du reste, en être autrement. La crainte
d'une réoccupation de l'Egypte par l'An-
gleterre , sous un prétexte fantaisiste,
n'est-elle pas puérile? « Est-ce que l'Angle-
terre a intérêt à réoccuper l'Egypte? Est-ce
qu'elle le veut ? »
Mais peut-être, en somme, cet optimisme
sur toute la ligne n'a-t-il pour raison que
le jubilé de la reine. Pendant que les hur-
rahs et les Gode save the Queen éclatent
sur le parcours du cortège royal, il serait
choquant au suprême degré de paraître
examiner les points noirs qui existent a
l'horizon de l'empire de la souveraine des
Indes.
On assure, à Constantinople, que le lan-
gage optimiste des journaux anglais, re-
lativement à la convention égyptienne,
n'est nullement en rapport avec la situa-
tion véritable ; car, indépendamment des
protestations française et russe, il y a la
protestation de l'opinion musulmane, qui
accuse les ministres d'avoir trahi la Tur-
quie en signant un acte d'abdication en
Egypte.
Il n'est pas impossible que le sultan,
poussé par l'opinion et par le clergé, re-
fuse de ratifier la convention. S'il la ra-
tifie, des désordres graves éclateront cer-
tainement , et peut-être Constantinople
sera-t-il de nouveau le théâtre de scènes
semblables à celles qui ont marqué la fin
tragique d'Abdul-Azis.
La question bulgare, après avoir passé
par des phases innombrables, se pose, à
l'heure présente, dans les termes suivants :
On assure que la proposition de substi-
tuer à la régence actuelle un régent uni-
que va - être soumise au tsar. Si le tsar l'ac-
cepte, les régents n'auront plus qu'à dé-
missionner et qu'à céder la place au pou-
voir que la Russie et la Porte auront dési-
gné d'un commun accord. Ce qu'il y a de
certain, c'est que la situation des régents
est devenue impossible. En désaccord pro-
fond avec les ministres, ils sont forcés de
convoquer la Sobranié. Ce sera, dans tous
les cas, la un de leur tyrannie.
.———————————
p~'npnnt~p~
IriFORMATIONS P ARTICULIBRES
Elections de conseillers généraux
Un certain nombre d'élections au conseil
général ont eu lieu dimanche dernier. Voici
les résultats qu'elles ont donnés :
Haute-Saône (canton de Grav)
----.-- -- VI
Inscrifs. 4.405
Votants. 3.045
MM. Signard, rép 1.839 voix Elu
Brugnon, cons. 1.179
IL s'agissait de remplacer M. Jobard, répu-
blicain, démissionnaire.
Vaucluse (canton de Mormoiron)
Inscrits. 3.103
Votants. 2.101
MM. Vialls, rép. 1.349 voix Elu
Franqllebalme. 747
En remplacement de M. Raspail, républi-
cain, démissionnaire.
Orne (canton de Gacé)
Inscrits..,. 2.006
Votants. 1.290
M. Dupebron, conserv 1.101 voix Elu
Sans concurrent.
En remplacement d'un conseiller général
conservateur.
La santé de M. Bihourd
Le ministre des affaires étrangères, quoi-
qu'ayaist reçu de bonnes nouvelles de M. Bi-
hourd, lui avait télégraphié ponr s'informer
plus précisément de sa santé et le prier de la
ménager en cas de besoin.
M. Bihourd a de nouveau répondu .que sa
santé était excellente.
L'unité indo-chinoise
MM. Etienne, sous-secrétaire d'Etat aux co-
lonies, et Dislère, conseiller d'Etat, ancien
directeur des colonies, ont eu. un long entre-
tien avec M. Flourens, ministre des affaires
étrangères, au sujet des conditions dans les-
quelles il serait possible de réaliser l'unité
indo-chinoise.
Le gouvernement est partisan du rattache-
ment. en principe. Il ne reste plus à discuter
que quelques questions de détail.
Le budget des postes et télégraphes
Par suite du rattachement des services du
ministère des postes et télégraphes au minis-
tère des finances, les crédits ouverts sur le
budget ordinaire de l'exercice 1887 au minis-
tère des postes et télégraphes, et qui s'élè-
vent à la somme totale de 138,779,483 fr. 88
centimes, sera transporté au ministère des
finances.
Mouvement dans la magistrature
coloniale
M. Rémy-Nérls, conseiller privé à la Marti-
nique, démissionnaire, est nommé conseiller
privé honoraire à la même cour.
MM. Dupré et Husson sont nommés con-
seillers privés titulaires à la Martinique.
MM. Thaly et Lapeyre sont nommés con-
seillers privés suppléants à la Martinique.
MM. Bioche, président de la chambre de
commerce de la Basse-Terre, et Léonard, an-
cien adjoint au maire de Pointe-à-Pitre, sont
nommés conseillers privés titulaires à la Gua-
deloupe.
MM. L'Amiral, négociant, membre du con-
seil municipal de la Basse-Terre, et Léger,
docteur-médecin à la Pointe-à-Pîtra, sont
nommés conseillers privés suppléants à la
Guadeloupe.
La neutralité que le gouvernement a
observée dans le vote de l'urgence sur
la loi militaire a donné lieu, dans la
presse, à de violentes polémiques qui
ne sont pas encore terminées. On lui
reproche d'avoir voulu, par cette abs-
tention, donner un gage à la Droite et
on lui fait un grief de n'avoir pas saisi
une occasion facile de réunir la majorité
qui s'offrait d'elle-même. Ces reproches
paraissent singulièrement exagérés. Le
ministre de la guerre avait, dès le pre-
mier jour, déclaré qu'il était prêt à ac-
cepter l'extension du service militaire
aux séminaristes, ce qui était la ques-
tion la plus importante au point de vue
de la Droite. Quant au second grief, il
est bien évident que l'intervention du
gouvernement n'aurait rien modifié aux
dispositions de la majorité. Elle pouvait
donc sembler inutile.
L'abstention du gouvernement peut
s'expliquer. Il a sans doute pensé que
la Chambre était meilleur juge que lui
dans la question de savoir si elle était
suffisamment éclairée ou si elle croyait
avoir besoin de procéder à une seconde
délibération. Peut-être même pourrait-
on dire qu'il a eu scrupule à engager
un simulacre de lutte pour une cause
gagnée d'avance et à triompher sans
résistance. Si telle avait été la pensée
du gouvernement, on ne saurait l'en
blâmer.
Quoi qu'il en soit, la majorité répu-
blicaine voulait l'urgence ; elle l'a votée
et il est bien certain que l'intervention
du gouvernement n'aurait pas déplacé
une seule voix. Or si cette intervention
est utile, c'est quand l'autorité de sa
parole peut déterminer un vote qui
semble douteux. Dans ce cas-là, son de-
voir est d'avoir une opinion, de la don-
ner et de ne rien négliger pour la faire
triompher.
Si l'on peut regretter que, dans le cas
qui nous occupe, le gouvernement n'ait
pas déclaré qu'il était partisan de l'ur-
gence, c'est seulement au point de vue
politique et parce qu'une telle déclara-
tion aurait sans doute eu pour effet de
rapprocher les fractions du parti répu-
blicain au lieu d'accentuer encore les
divisions qui existent entre elles.
Il ne faut cependant pas exagérer
l'importance de cet incident, ni porter
jugement définitif sur le cabinet' en un
s'appuyant sur ce seul fait. Le cabinet a
une mission spéciale qui lui est mar-
quée par les conditions mêmes qui ont
présidé à son avènement. Le débat qui
s'était engagé entre le précédent cabi-
net et la commission du budget était
d'ordre financier. La commission récla-
mait des économies que le gouverne-
ment ne voulait pas prendre l'engage-
ment ferme de réaliser, et une majorité
s'est formée pour soutenir les revendi-
cations de la commission.
C'est le caractère financier du conflit
engagé entre la commission du budget
et le gouvernement qui a désigné le
président de cette commission, M. Rou-
vier, au choix de M. le président de la
République comme chef du nouveau
cabinet. Le programme de ce cabinet
doit donc être, avant tout, de réaliser
les réformes que la commission du bud-
get exigeait de son prédécesseur, et la
partie principale de sa tâche doit être
la réforme administrative et la réforme
budgétaire, sur lesquelles M. Dautresme
insistait hier encore, en recevant le per-
sonnel de son ministère. L'acte essentiel
du gouvernement se trouvera résumé
dans le projet de budget qu'il doit dé-
poser prochainement sur le bureau de
la Chambre. C'est là qu'il faut l'attendre
pour le juger ; et si ce projet répond aux
intentions de la Chambre, s'il donne sa-
tisfaction à ses volontés réformatrices,
et aux désirs si souvent exprimés par
elle de réaliser de sérieuses économies
et de mettre plus de clarté dans nos fi-
nances, les incidents comme celui de
samedi dernier seront sans doute bien
vite et complètement oubliés.
QUESTIONS DU JOUR
L'élection de la Haute-Marne
La bataille du 12 juin dans la Haute-
Marne a été gagnée parles républicains,
mais à forces égales, après une cam-
pagne acharnée de quinze jours. C'est
un victorieux que nous saluons dans la
personne de M. Vitry, candidat républi-
cain élu; mais combien son succès a
coûté cher 1
Au premier tour, il n'y avait pas de
candidat conservateur qui se fût osten-
siblement déclaré : ni comité, ni pro-
gramme. M. Bourlon de Rouvres n'en
était pas moins désigné dans les entre-
tiens des conservateurs, sans que rien
fût organisé et sans que les journaux
fissent autre chose que mentionner sa
candidature possible. Au premier tour,
20,100 voix réactionnaires se décla-
rèrent pour le candidat monarchiste;
M. Vitry en avait eu 24,400, mais qui ne
pouvaient lui assurer le succès. Il y
eut donc ballottage.
Au second tour, l'un et l'autre can-
didat gagnèrent des voix dans la pro-
portion suivante :
Le républicain opportuniste passe de
24,400 voix à 28,500, soit une augmen-
tation de 4,000.
Le monarchiste arrive de 20,100 voix
à 27,400, ce qui fait 7,000 voix de plus.
C'est Lutzen, précurseur de Leipzig,
où les troupes étrangères et l'armée
française, égales en nombre, se batti-
rent avec une égale valeur. Le sort de
deux armées aussi braves, aussi fortes,
aussi disciplinées l'une que l'autre, n'est
qu'un jeu du destin. Tous les républi-
cains et tous les réactionnaires étant ac-
courus au vote du 12 juin, il s'est trouvé
que les réserves de la monarchie ont
été plus nombreuses que celles de la
République, sans toutefois la vaincre ;
mais cela n'a tenu qu'à un fil !
Pour nous, nous admirons tout ce
qu'il a fallu de patriotisme et de fer-
meté au suffrage universel, en ces der-
niers mois, pour disputer pied à pied le
terrain à l'armée réactionnaire. Nos an-
ciens se comportent comme la vieille
garde, ils sacrifieraient leur vie pour le
drapeau, le vrai, le seul, celui qui place
l'égalité entre la fraternité et la li-
berté. De clocher en clocher, disait
Bonaparte. Mais ils sont fatigués, et
s'ils ne reprennent courage, non seule-
ment l'extension, mais le maintien des
conquêtes démocratiques trouvera des
obstacles. J'admire d'autant plus les ba-
taillons serrés des patriotes, que les ré-
publteains de la première heure, tout en
comprenant le devoir, marchent moins
en avant, soit découragement, soit
vieillesse. C'est ainsi que nous voyons
les républicains de la Haute-Marne tom-
ber, nous ne dirons pas dans une em-
buscade, mais dans des agglomérations
d'ennemis aussi fortes qu'eux, qu'ils ne
pouvaient prévoir, qu'ils ont seulement
dispersées et qui n'ont songé qu'à se
concentrer après leur défaite.
Honneur aux patriotes! La Républi-
que a confiance en eux, surtout dans la
jeunesse, à ceux
Qui vont entrer dans la carrière
Quand leurs aînés n'y seront plus.
La génération actuelle est bonne ;
celle qui suivra sera plus hardie, moins
accessible à l'indifférence et aux crain-
tes, plus maîtresse d'elle-même et de
ses députés. Ce ne sont que des répu-
blicains qui sortiront de notre sang,
grâce à nos écoles ; je dirai même des
citoyens et des citoyennes. Qu'elle le
veuille ou non, il faudra que la réaction
en prenne son parti, et qu'elle croie
que la nation, à travers peut-être quel-
que Seize-Mai ou quelque dictature en
cas de guerre, se retrouvera toujours
sous le drapeau de la Convention, qui
fonda nos écoles et nos armées, après
un siècle de plus qu'il n'aurait fallu,
malgré des faiblesses passagères, qui
n'ont fait que renforcer la race. Nous
reverrons peut-être un Cavaignac ; nous
ne reverrons jamais ni Napoléons, ni
Orléans, ni Bourbons d'Espagne ou d'ail-
leurs. Etats-Unis? qui sait? Autre his-
toire, autre temps, autres mœurs. Mais
peut-être quelque chose d'analogue.
L'avenir est assuré pour la Révolution
française, mais on n'en discerne pas
visiblement la contournure. Quoi que ce
soit, la République est et sera.
C'est ce sentiment qui pousse les ré-
publicains découragés à voter quand
même. Ah ! qu'on les aiderait en suppri-
mant le scrutin de liste. Pour l'instant,
le rôle de la Chambre serait surtout de
les ménager, de cultiver ce patriotisme
fécond au lieu de le laisser sécher en sol
aride ; en un mot de faire son métier. Le
suffrage universel, tout courageux qu'il
sqit, est devenu aussi sensible, aussi
mil impressionné qu'un homme qui se
ferait arracher les dents. Croyez-ious
que ce qui s'est passé à la Chambre
dans le mois qui vient de s'écouler, ces
accès d'inconstance, pour ne pas être
plus sévère, croyez-vous que ces inci-
dents qui, dans les couloirs du Palais-
Bourbon, semblent frivoles, n'influen-
cent pas sérieusement le suffrage uni-
versel? M. Bourlon de Rouvres aurait-il
acquis 7,000 voix, et le candidat répu-
blicain 4,000 seulement, s'il n'y avait
pas eu de la contrariété chez les élec-
teurs de la Haute-Marne pour se voir si
mal payés de la discipline? Ils aiment à
chanter, danser et boire; mais ils ne
comprendront jamais qu'on joue avec
les ministres comme aux quilles ou à
la raquette.
EUG. LIÉBERT.
On lit dans la Justice :
M. Henry Fouquier, dans le XIX" Siècle, se
demande &i, en acceptant d'être les témoins
de M. Mayer dans son duel contre M. Arène,
MM. Lockroy et Clémenceau ont entendu se
rendre solidaires de la polémique de la Lan-
terne contre les Corses. M. Fouquier ignore
sans doute que M. Mayer, — qui n'était pas
l'auteur de l'article incriminé et ne l'avait
même pas lu, — répudiait les expression" vio-
lentes échappées à son collaborateur. Nous
devons également apprendre à M. Fouquier
que MM Lockroy, Clémenceau, Joseph Rei-
nach, MérllIon, commencèrent parréaigerun
procès-verbal où il était dit que les quatre
témoins, à l'unanimité, condamnaient comme
excessives et regrettables les expressions em-
ployées par le rédacteur de la Lanterne.
Ce procès-verbal ne fut pas publié parce
que l'attitude de M. Arène, —que nous n'a-
vons pas à juger ici, — rendit une rencontre
inévitable. Mais le seul fait que cette pièce
reçût la signature des quatre témoins suffit
à montrer que MM. Lockroy et Clémenceau ne
se regardaient pas comme solidaires de l'é-
crivain qui avait, à l'insu de M. Mayer lui-
même, adressé de graves injures à nos con-
ci oyens de la Corse.
VOYAGES DE VACANCES
ET COLONIES SCOLAIRES
Quand un papa veut stimuler le zèle
de son fils, il lui promet un petit voyage
en récompense de ses succès. Les cais-
ses des écoles de la Ville de Paris, sub-
ventionnées par le conseil municipal, se
sont inspirées des mêmes sentiments
quand elles ont organisé, il y a quel-
ques années, des voyages de vacances
au profit des meilleurs élèves des écoles
communales.
Sur ces entrefaites, M. Edmond Cot-
tinet, administrateur délégué de la
caisse du neuvième arrondissement,
conçut un projet bien différent et dont
nous avons déjà entretenu nos lecteurs.
Les voyages scolaires sont la récom-
pense des bons élèves. Ils sont agréa-
bles et instructifs pour ceux qui ont
bon pied, bon œil et sont déjà capa-
bles de voir, de comprendre et de rete-
nir ce qu'ils ont observé. Mais que de-
viennent, pendant ce temps, les pau-
vres enfants chétifs, malingres et mal
venus dont la débilité physique égale
et explique souvent la débilité morale ?
Ecoliers intermittents, apathiques, in-
dociles, ils tiennent pendant l'année la
queue de la classe, et, quand arrivent
les vacances, on les voit rôder sur les
quais ou le long des rues, maigres,
hâves, étiolés, en proie à toutes les
suggestions du désœuvrement et de
l'ennui, pendant que d'autres, au bord
de la mer ou dans la montagne, vont
faire provision de santé, de bonne hu-
meur et de vigueur morale.
Grâce à l'infatigable persévérance de
M. Cottinet, les Colonies scolaires fu-
rent fondées et firent leurs preuves.
C'est lui qui a attaché le grelot qui vient
de tinter au conseil municipal. On y a
débattu asez longuement, à la dernière
séance, les avantages des deux systèmes:
celui des voyages de vacances, qui con-
siste à récompenser les élèves les plus
méritants; celui des colonies, qui émane
d'un sentiment plus généreux et plus
profondément humain, car il va cher-
cher dans les bas-fonds des écoles ce
que le docteur Chassaing a justement
appelé « l'élite des anémiques », pour
leur rendre, avec la santé, la vigueur
morale qui en découle souvent. Mens
sana in cor pore sano.
On a fait remarquer, non sans raison
d'ailleurs, que les voyages scolaires
étaient coûteux et qu'un trop petit nom-
bre d'enfants se trouvait appelé à en
profiter. Ils ne sont, le plus souvent, que
des pérégrinations rapides, sans haltes
sérieuses, et par là fatigants pour des
enfants encore bien jeunes et quelque-
fois débiles. En outre, s'ils ont été ins-
titués en vue de compléter et de déve-
lopper l'instruction des jeunes voya-
geurs, ils manquent presque toujours le
but. Car il s'agit, ne l'oublions pas, des
écoles primaires, c'est-à-dire d'enfants
de onze à douze ans, dont l'intelligence
et les sens mêmes ne sont pas encore
suffisamment exercés pour comprendre
et goûter les merveilles de la nature ou
de l'industrie. On a contesté enfin que
la perspective des voyages scolaires fût
de nature à provoquer une vive émula-
tion dans les classes. Dès le début de
l'année, les enfants voient très bien que
deux ou trois d'entre eux sont d'avance
assurés de cette récompense et l'appât
de cette faveur les trouve indifférents
et découragés.
M. Gaufrès a rappelé avec beaucoup
d'à-propos le développement qu'avait
pris à l'étranger l'institution des colo-
nies scolaires. En Suisse, Zurich a
donné l'exemple et « l'Œuvre des trois
semaines » a envoyé, l'année dernière,
216 colons dans la montagne. Les autres
villes de la Suisse rivalisent avec Zurich de
générosité et de sollicitude. Eu Suède,
en Norvège, en Autriche, en Allema-
gne, des millions d'enfants sont mis tous
les ans « au vert », grâce aux subven-
ventions des corps administratifs ou
des sociétés particulières qui se sont
formées pour la protection du jeune âge.
Pouvons-nous rester en arrière alors
surtout qu'il est démontré que la mor-
talité des enfants est plus grande chez
nous que partout ailleurs?
Et ce n'est pas seulement la pédago-
gie qui est ici en cause : l'institution des
colonies scolaires soulève une véritable
question sociale. Un des plus fervents
adeptes de cette œuvre disait dernière-
ment à Leipzig : « Nous faisons, par les
colonies de vacances, une véritable
guerre à l'accroissement d'un proléta-
riat dégénéré au point de vue physique
et au point de vue intellectuel. Quand
les colonies de vacances auront existé
pendant vingt ans de suite dans nos
grandes villes, il y aura sûrement dans
les couches inférieures de la population
plus de force, plus de santé, plus de vi-
gueur naturelle et de gaieté. »
Aussi le conseil municipal, sans con-
damner les voyages de vacances, a-t-il
exprimé le vœu qu'ils fussent réduits et
le plus souvent transformés en prome-
nades ou excursions de courte durée. Il
a en outre chaleureusement recom-
mandé aux caisses des écoles l'institu-
tion des colonies scolaires.
L'Etat, de son côté, se propose d'en-
courager également des tentatives de
ce genre et va former un grand comité
chargé de donner à l'institution nais-
sante tout le développement qu'elle
comporte. Nous voudrions surtout que
les administrateurs des caisses des
écoles imitassent l'exemple de M. Cot-
tinet, qui est parvenu à intéresser à
cette œuvre ses concitoyens du IX0 ar-
rondissement. Aucune œuvre n'est plus
digne de stimuler le zèle et l'initiative
des particuliers, chez qui le fara da se
n'est guère en honneur, il faut bien le
dire. Le chiffre peu élevé des adhérents
à l'OEuvre des caisses scolaires, dit excel-
lemment M. Gaufrés, démontre que « si
nos idées démocratiques sont avancées,
nos mœurs le sont moins? » Une démo-
cratie comme la nôtre ne peut vivre
longtemps de paroles et de manifes-
tations. Elle a besoin d'aliments plus
substantiels, et il est grand temps d'y
mettre les mœurs en harmonie avec les
idées.
ANDRÉ BALZ.
RECEPTION DES MINISTRES
M. Dautresme, ministre du commerce et de
l'industrie, a reçu hier matin le personnel de
son administration.
Aux directeurs de l'administration centrale,
MM. Marie, Nicolas et Oilendorff, il a adressé
une allocution d'où nous extrayons le passage
suivant :
Il est certain que les impôts actuels pèsent
lourdement sur la production nationale et risque-
raient de la compromettre s'ils étaient augmentés.
De là, pour équilibrer le budget, la nécessité de
faire des économies. Les crédits qui sont alloués
au ministre du commerce et de l'industrie n'en
permettent pas de considérables ; j'espère cepen-
dant en obtenir quelques-unes si chacun de nous,
comme c'est son devoir, s'applique à être aussi
ménager des deniers publics que des siens pro-
pres. Simplifier notre système administratif et
réduire nos dépenses, telle est donc la tâche qui
nous incombe ; je compte, pour la remplir, sur
tout votre zèle et tout votre dévouement.
En recevant MM. Alphand, Bergar et Gri-
son, directeurs généraux de l'Exposition de
1889, M. le ministre s'est exprimé en ces
termes :
Messieurs les directeurs,
C'est mon honorable prédécesseur qui vous a
placés à la tête des grands services que vous diri-
gez ; je n'éprouve donc aucun emharras à vous
dire combien je m'applaudis du choix qu'il a fait.
Entre vos mains, l'Exposition ne court aucun
risque, et son succès est assuré. Je serai heu-
reux de collaborer avec vous, et mon approba-
tion est d'avance acquise à toutes les mesures
que vous croirez propres à en augmenter l'éclat.
Je n'y mets qu'une condition : c'est que nous ne
sortirons pas des crédits qui ont été votés par les
Chambres et que, sous aucun prétexte, je n'en-
tends dépasser. Sur ce point, vous me trouverez
inflexible.
Maintenant, puisque, j'en ai l'occasion, per-
mettez-moi d'en profiter pour démentir un bruit
qui court, depuis quelques jours, dans une frac-
tion de la presse parisienne.
On a prétendu que j'avais l'intention d'ajour-
ner l'Exposition. C'est inexact et rien dans mes
actes ni dans mes paroles n'autorise cette allé-
gation. Il convient, d'ailleurs, de rappeler que la
date à laquelle l'Exposition doit avoir lieu a été
fixée par une loi ; une loi nouvelle serait par
conséquent nécessaire pour la modifier, et au-
cun de mes collègues ni moi ne songeons à la
présenter.
Continuez donc, messieurs, les travaux que
vous avez si bien commencés ; continuez-les avec
plus d'activité encore, s'il est possible, car le
temps marche vite, et il faut que tout soit prêt
pour le 1er mai 1889, pour votre honneur, pour
l'honneur de la France et de la République.
Répondant au président du comité des arts
et manufactures, le vénérable M. Chevreul,
qui lui exprimait ses craintes de tomber en
enfance, M. le ministre lui a déclaré que non
seulement il n'avait pas à redouter one sem-
blable occurence, mais que la France était
fière de le compter parmi ses plus hautes il-
lustrations scientifiques.
Au président de la chambre de commerce
de Paris, l'honorable M. Poirrier, le ministre
a renouvelé l'assurance que l'Exposition uni-
verselle aurait bien lieu en i889.
Aux membres du conseil des prud'hommes
de Paris, M. Dautresme a annoncé qu'il ac-
ceptait le projet de loi de M. Lockroy, sauf
quelques points de détail.
*
* *
Dans la matinée également, M. Mazeau, mi-
nistre de la justice, recevait pour la première
fois l'administration centrale du ministère,
ainsi que les compagnies judiciaires.
Le garde- des sceaux avait à ses côtés les
directeurs et le personnel de son cabinet.
M. Jacquin, directeur des affaire criminelles
et des grâces, l'a assuré du dévouement de
tous au nouveau chef de la magistrature et
au gouvernement de la République.
M. Mazeau a remercié : « J'étais certain,
a-t-il dit, de trouver au ministère de la jus-
tice des collaborateurs dévoués à leurs fonc-
tions et respectueux des institutions républi-
caines. »
Le tribunal des conflits a été ensuite pré-
senté par M. Merville, vice-président.
Toute la cour de cassation a tanu à venir
saluer dans le nouveau garde des sceaux l'un
de ses anciens membres ; M. le premier pré-
sidât Barbier s'est fait l'interprète des senti-
ments de la cour.
M. Mazeau a rappelé que lui aussi, 11 ap-
partenait à la magistrature.
Puis ont été reçus successivement : la cour
d'appel, présentée par M. le premier prési-
dent Périvier ; le tribunal de première Ins-
tance, ayant à sa tête M. le président Aubé-
pin; les membres du tribunal de commerce ;
les juges de paix ; la chambre des notaires ;
les avoués près la cour d'appel de Paris et
près le tribunal civil de la Seine.
Citons encore : les délégués de l'Imprimerie
nationale; la compagnie des référendaires au
sceau; la chambre des commlssalres-prlsdurs
et celle des huissiers.
Le conseil de l'ordre des avocats au conseil
d'Etat et à la cour de cassation est venu,
après la réception officielle, présenter ses
félicitations à soa ancien président.
*
* *
Enfin, M. de Hérédla, ministre des travaux
publics, a reçu, dans l'après-midi, le person-
nel de l'administration centrale du ministère,
les membres des conseils des ponts et chaus-
sées et des m!nes, du comité consultatif et
du comité d'exploitation technique des che-
mins de fer.
Dans les diverses allocutions qu'il a pronon-
cées, M. de Hérédia s'est expliqué sur la né-
cessité absolue de donner une légitime satis-
faction à la volonté du pays et au programme
de la Chambre, en entrant franchement dans
la voie des réformes et des économies.
Le ministre des travaux publics recevait,
quelques instants après,les membres du con-
seil de l'école d'horlogerie de Paris, ainsi que
les membres de la chambre syndicale, qui
lui ont été présentés par leur président, M.
Rodanet.
M. de Hérédia, président d'honneur de cette
chambra, a constaté avec satisfaction les pro-
grès déjà réalisés. La création de la nouvelle
école d'horlogerie, dont M. Lockroy a posé
récemment la première pierre, va donner une
impulsion nouvelle à cette industrie.
M. le ministre a donné l'assurance qu'il con-
tinuerait à contribuer autant qu'il le pourrait
au développement de cette cBuvre, appelée à
rendre les plus grands services au moment
où la concurrence étrangère est de plus en
plus à craindre.
CHRONIQUE
'Voici l'époque des fêtes foraines dan.
les environs de Paris. Autour des gares,
de colossales affiches portent le nom
des villages de banlieue où elles sont
données ; et vraiment, en s'arrêtant,
machinalement, à lire le détail de ces
affiches, on demeure un peu étonné de
l'invraisemblable banalité des divertis-
sements annoncés, non moins que de la
facilité d'humeur du bon public qui se
dérange pour un spectacle qui est éter-
nellement le même. Car, il n'y a pas à
dire, si toutes les communes suburbai-
nes ont leur fête, c'est que cette so-
lennité, pourtant médiocre, attire la
(oule.
Que voit-on, cependant, après que,
dans les trains fantastiques du diman-
che, on s'est écrasé terriblement ? A la
station, deux ridicules mâts, grêles et
d'une hauteur démesurée, ornés de laids
trophées. Puis, après une longue course
sous le soleil brûlant, on se trouve en
face de quelques misérables baraques.
C'est l'immanquable «tir à la carabine »,
un manège de chevaux de bois, deux
ou trois loteries où l'on gagne, comme
disent les marchands forains, « un petit
cocotier », parfois un lamentable théâ-
tre où de tristes cabotins, qui ont couru
toutes les aventures, font la parade. Et
c'est tout. Vraiment, le peuple français
n'est pas difficile sur la nature de ses
plaisirs en plein air. Et, d'un bout à
l'autre du territoire, ce sont les mêmes
baraques, les mêmes tirs, les mêmes
feux d'artifice, le soir, commandés à
forfait ! Il y a aussi la débauche obligée
des cors de chasse, sonnant leurs fan-
fares éperdues, qui fait que les gens
tranquilles, venus pour chercher quel-
que repos à la campagne, pestent de
toutes leurs forces contre ce bruit ab-
surde.
Il n'y a jamais guère eu autant de
fêtes de tout genre qu'en cette époque-
ci, et jamais elles n'ont été plus dénuées
d'invention. Comment ne se trouve-t-il
personne (pour ne parler que des fêtes
foraines) qui ose imaginer quelque
chose d'original et de neuf? La puis-
sance de la tradition est-elle si forte,
qu'elle condamne irrémédiablement, et
à perpétuité, au tir, au manège de che-
vaux de bois, à la loterie ?
Comment ! quelques-unes de ces pe-
tites villes des environs de Paris ont
des décors charmants, pittoresques, qui
peuvent donner l'illusion d'un horizon
réel de campagne ; elles disposent de
bois, de cours d'eau, de jolies vallées,
et, ce décor, elles le laissent gâter par
l'établissement d'affreuses boutiques en
planches ! Toute cette routine n'est-elle
pas faite pour fâcher, à la fia ?
Chacun de ces villages a de vieilles
traditions, cependant, qui pourraient
inspirer l'évocation de jeux d'autrefois,
qui avaient une si large saveur de belle
LE XIX SIECLE
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ment expire le 15 juin sont priés
de le renouveler, s'ils ne veulent pas
éprouver de retard dans la réception du
journal.
BULLETIN
La plus grande partie de la séance d'hier
a été occupée par le double scrutin ou-
vert pour l'élection d'un vice-président et
d'un secrétaire, en remplacement de M.
Spuller et de M. Etienne. Une discussion
bruyante s'est engagée sur la validité du
premier vote. Finalement, M. Develle a
été proclamé vice-président par 189 voix
con!re 181 données à M. de Mahy, et M.
Horteur a été élu secrétaire par 200 voix
contre M. Lhérissé, qui en a obtenu 172.
Puis la Chambre a repris la suite de son
ordre du jour, c'est-à-dire la discussion de
la loi militaire ; mais une question préju-
dicielle a été posée par M. Mézières, qui
demandait qu'on discutât le titre 2 de la
loi relatif au rengagement des sous-offi-
ciers avant le titre 1er.
Le ministre de la guerre et le président
de la commission, l'honorable M. de Mahy,
ont combattu cette proposition qui a été
repoussée par 360 voix contre 183.
Les termes dans lesquels la presse an-
glaise apprécie la situation nouvelle en
Afghanistan indiquent que nous n'avons
point exagéré en affirmant que cette situa-
tion est mauvaise pour l'Angleterre. Le
Times publie sur Kerki, que les troupes
russes ont occupé, des renseignements
démontrant la très grande importance de
ce point stratégique. Kerki, gros village
dominant l'Oxus, sur la route de Bokhara
à Hérat, commande l'entrée du territoire
de Kodja-Saleh, objet des prétentions des
gouvernements russe et anglais. C'est sur
ce territoire en litige qu'a délibéré, jus-
qu'à ces derniers temps, la fameuse com-
mission de délimitation, qui semble des-
tinée à ne plus jamais se réunir, quoi-
qu'elle ne soit pas officiellement dissoute.
Les Russes, qui ont poussé jusqu'à
Merv leur ligne de chemin de fer, en pour-
suivent la construction dans la direction
de Hérat. En même temps, leurs agents
font une propagande très active dans tout
l'Afghanistan, et particulièrement dans la
capitale, en faveur du prince lskander-
Khan, fils du sultan Jean, qui fut gouver-
neur de Hérat en 1857. Ce prétendant pro-
tégé par la Russie jouit, paraît-il, d'une
popularité qui grandit à mesure que dé-
croit la fortune de l'émir Abdurrhaman.
Il faut que la position de celui-ci soit réel-
lement fort compromise, pour que les cor-
respondants des journaux anglais envi-
sagent déjà l'éventualité de sa déchéance.
Le sort de ce protégé de l'Angleterre ne
paraît pas, d'ailleurs, toucher énormé-
ment la presse de Londres, qui prend son
parti de cet événement avec beaucoup de
philosophie. Le Times ne va-t-il pas jus-
qu'à déclarer que si l'infortuné Abdurrha-
man est détrôné, ce ne sera pas un mal-
heur, au contraire. « La chute de ce prince,
loin d'être un événement regrettable, se-
rait ce que nous pourrions souhaiter de
mieux ». C'est par cette phrase, d'une froi-
deur toute britannique, que l'organe de la
Cité prononce d'avance l'oraison funèbre
de l'émir ami de l'Angleterre. On ne sau-
rait avec plus de désinvolture « lâcher »
ses amis dans le malheur.
Malgré tant de nouvelles peu rassurantes,
la presse anglaise n'abandonne pas l'idée
d'un arrangement. La diplomatie anglaise
a ses portefeuilles pleins de combinaisons
diversf's, destinées à satisfaire la Russie
dans toutes ses exigences, sans com-
promettre les intérêts de l'Angleterre; bien
plus, en consolidant sa situation.
L'optimisme voulu des journaux de
Londres se retrouve dans leurs apprécia-
tions sur l'autre grande question qui tou-
che directement l'Angleterre, nous voulons
parler de la convention égyptienne. D'a-
près le Daily News, les ambassadeurs d'Al-
lemagne et d'Autriche auraient félicité le
sultan de la « sagacité politique » dont il
a fait preuve en concluant l'accord anglo-
turc. Voiià qui réduit à néant les observa-
tions de la Russie et de la France. Cela suf-
fit pour que l'on déclare à Londres que
les puissances ont adhéré. Il ne pourrait,
du reste, en être autrement. La crainte
d'une réoccupation de l'Egypte par l'An-
gleterre , sous un prétexte fantaisiste,
n'est-elle pas puérile? « Est-ce que l'Angle-
terre a intérêt à réoccuper l'Egypte? Est-ce
qu'elle le veut ? »
Mais peut-être, en somme, cet optimisme
sur toute la ligne n'a-t-il pour raison que
le jubilé de la reine. Pendant que les hur-
rahs et les Gode save the Queen éclatent
sur le parcours du cortège royal, il serait
choquant au suprême degré de paraître
examiner les points noirs qui existent a
l'horizon de l'empire de la souveraine des
Indes.
On assure, à Constantinople, que le lan-
gage optimiste des journaux anglais, re-
lativement à la convention égyptienne,
n'est nullement en rapport avec la situa-
tion véritable ; car, indépendamment des
protestations française et russe, il y a la
protestation de l'opinion musulmane, qui
accuse les ministres d'avoir trahi la Tur-
quie en signant un acte d'abdication en
Egypte.
Il n'est pas impossible que le sultan,
poussé par l'opinion et par le clergé, re-
fuse de ratifier la convention. S'il la ra-
tifie, des désordres graves éclateront cer-
tainement , et peut-être Constantinople
sera-t-il de nouveau le théâtre de scènes
semblables à celles qui ont marqué la fin
tragique d'Abdul-Azis.
La question bulgare, après avoir passé
par des phases innombrables, se pose, à
l'heure présente, dans les termes suivants :
On assure que la proposition de substi-
tuer à la régence actuelle un régent uni-
que va - être soumise au tsar. Si le tsar l'ac-
cepte, les régents n'auront plus qu'à dé-
missionner et qu'à céder la place au pou-
voir que la Russie et la Porte auront dési-
gné d'un commun accord. Ce qu'il y a de
certain, c'est que la situation des régents
est devenue impossible. En désaccord pro-
fond avec les ministres, ils sont forcés de
convoquer la Sobranié. Ce sera, dans tous
les cas, la un de leur tyrannie.
.———————————
p~'npnnt~p~
IriFORMATIONS P ARTICULIBRES
Elections de conseillers généraux
Un certain nombre d'élections au conseil
général ont eu lieu dimanche dernier. Voici
les résultats qu'elles ont donnés :
Haute-Saône (canton de Grav)
----.-- -- VI
Inscrifs. 4.405
Votants. 3.045
MM. Signard, rép 1.839 voix Elu
Brugnon, cons. 1.179
IL s'agissait de remplacer M. Jobard, répu-
blicain, démissionnaire.
Vaucluse (canton de Mormoiron)
Inscrits. 3.103
Votants. 2.101
MM. Vialls, rép. 1.349 voix Elu
Franqllebalme. 747
En remplacement de M. Raspail, républi-
cain, démissionnaire.
Orne (canton de Gacé)
Inscrits..,. 2.006
Votants. 1.290
M. Dupebron, conserv 1.101 voix Elu
Sans concurrent.
En remplacement d'un conseiller général
conservateur.
La santé de M. Bihourd
Le ministre des affaires étrangères, quoi-
qu'ayaist reçu de bonnes nouvelles de M. Bi-
hourd, lui avait télégraphié ponr s'informer
plus précisément de sa santé et le prier de la
ménager en cas de besoin.
M. Bihourd a de nouveau répondu .que sa
santé était excellente.
L'unité indo-chinoise
MM. Etienne, sous-secrétaire d'Etat aux co-
lonies, et Dislère, conseiller d'Etat, ancien
directeur des colonies, ont eu. un long entre-
tien avec M. Flourens, ministre des affaires
étrangères, au sujet des conditions dans les-
quelles il serait possible de réaliser l'unité
indo-chinoise.
Le gouvernement est partisan du rattache-
ment. en principe. Il ne reste plus à discuter
que quelques questions de détail.
Le budget des postes et télégraphes
Par suite du rattachement des services du
ministère des postes et télégraphes au minis-
tère des finances, les crédits ouverts sur le
budget ordinaire de l'exercice 1887 au minis-
tère des postes et télégraphes, et qui s'élè-
vent à la somme totale de 138,779,483 fr. 88
centimes, sera transporté au ministère des
finances.
Mouvement dans la magistrature
coloniale
M. Rémy-Nérls, conseiller privé à la Marti-
nique, démissionnaire, est nommé conseiller
privé honoraire à la même cour.
MM. Dupré et Husson sont nommés con-
seillers privés titulaires à la Martinique.
MM. Thaly et Lapeyre sont nommés con-
seillers privés suppléants à la Martinique.
MM. Bioche, président de la chambre de
commerce de la Basse-Terre, et Léonard, an-
cien adjoint au maire de Pointe-à-Pitre, sont
nommés conseillers privés titulaires à la Gua-
deloupe.
MM. L'Amiral, négociant, membre du con-
seil municipal de la Basse-Terre, et Léger,
docteur-médecin à la Pointe-à-Pîtra, sont
nommés conseillers privés suppléants à la
Guadeloupe.
La neutralité que le gouvernement a
observée dans le vote de l'urgence sur
la loi militaire a donné lieu, dans la
presse, à de violentes polémiques qui
ne sont pas encore terminées. On lui
reproche d'avoir voulu, par cette abs-
tention, donner un gage à la Droite et
on lui fait un grief de n'avoir pas saisi
une occasion facile de réunir la majorité
qui s'offrait d'elle-même. Ces reproches
paraissent singulièrement exagérés. Le
ministre de la guerre avait, dès le pre-
mier jour, déclaré qu'il était prêt à ac-
cepter l'extension du service militaire
aux séminaristes, ce qui était la ques-
tion la plus importante au point de vue
de la Droite. Quant au second grief, il
est bien évident que l'intervention du
gouvernement n'aurait rien modifié aux
dispositions de la majorité. Elle pouvait
donc sembler inutile.
L'abstention du gouvernement peut
s'expliquer. Il a sans doute pensé que
la Chambre était meilleur juge que lui
dans la question de savoir si elle était
suffisamment éclairée ou si elle croyait
avoir besoin de procéder à une seconde
délibération. Peut-être même pourrait-
on dire qu'il a eu scrupule à engager
un simulacre de lutte pour une cause
gagnée d'avance et à triompher sans
résistance. Si telle avait été la pensée
du gouvernement, on ne saurait l'en
blâmer.
Quoi qu'il en soit, la majorité répu-
blicaine voulait l'urgence ; elle l'a votée
et il est bien certain que l'intervention
du gouvernement n'aurait pas déplacé
une seule voix. Or si cette intervention
est utile, c'est quand l'autorité de sa
parole peut déterminer un vote qui
semble douteux. Dans ce cas-là, son de-
voir est d'avoir une opinion, de la don-
ner et de ne rien négliger pour la faire
triompher.
Si l'on peut regretter que, dans le cas
qui nous occupe, le gouvernement n'ait
pas déclaré qu'il était partisan de l'ur-
gence, c'est seulement au point de vue
politique et parce qu'une telle déclara-
tion aurait sans doute eu pour effet de
rapprocher les fractions du parti répu-
blicain au lieu d'accentuer encore les
divisions qui existent entre elles.
Il ne faut cependant pas exagérer
l'importance de cet incident, ni porter
jugement définitif sur le cabinet' en un
s'appuyant sur ce seul fait. Le cabinet a
une mission spéciale qui lui est mar-
quée par les conditions mêmes qui ont
présidé à son avènement. Le débat qui
s'était engagé entre le précédent cabi-
net et la commission du budget était
d'ordre financier. La commission récla-
mait des économies que le gouverne-
ment ne voulait pas prendre l'engage-
ment ferme de réaliser, et une majorité
s'est formée pour soutenir les revendi-
cations de la commission.
C'est le caractère financier du conflit
engagé entre la commission du budget
et le gouvernement qui a désigné le
président de cette commission, M. Rou-
vier, au choix de M. le président de la
République comme chef du nouveau
cabinet. Le programme de ce cabinet
doit donc être, avant tout, de réaliser
les réformes que la commission du bud-
get exigeait de son prédécesseur, et la
partie principale de sa tâche doit être
la réforme administrative et la réforme
budgétaire, sur lesquelles M. Dautresme
insistait hier encore, en recevant le per-
sonnel de son ministère. L'acte essentiel
du gouvernement se trouvera résumé
dans le projet de budget qu'il doit dé-
poser prochainement sur le bureau de
la Chambre. C'est là qu'il faut l'attendre
pour le juger ; et si ce projet répond aux
intentions de la Chambre, s'il donne sa-
tisfaction à ses volontés réformatrices,
et aux désirs si souvent exprimés par
elle de réaliser de sérieuses économies
et de mettre plus de clarté dans nos fi-
nances, les incidents comme celui de
samedi dernier seront sans doute bien
vite et complètement oubliés.
QUESTIONS DU JOUR
L'élection de la Haute-Marne
La bataille du 12 juin dans la Haute-
Marne a été gagnée parles républicains,
mais à forces égales, après une cam-
pagne acharnée de quinze jours. C'est
un victorieux que nous saluons dans la
personne de M. Vitry, candidat républi-
cain élu; mais combien son succès a
coûté cher 1
Au premier tour, il n'y avait pas de
candidat conservateur qui se fût osten-
siblement déclaré : ni comité, ni pro-
gramme. M. Bourlon de Rouvres n'en
était pas moins désigné dans les entre-
tiens des conservateurs, sans que rien
fût organisé et sans que les journaux
fissent autre chose que mentionner sa
candidature possible. Au premier tour,
20,100 voix réactionnaires se décla-
rèrent pour le candidat monarchiste;
M. Vitry en avait eu 24,400, mais qui ne
pouvaient lui assurer le succès. Il y
eut donc ballottage.
Au second tour, l'un et l'autre can-
didat gagnèrent des voix dans la pro-
portion suivante :
Le républicain opportuniste passe de
24,400 voix à 28,500, soit une augmen-
tation de 4,000.
Le monarchiste arrive de 20,100 voix
à 27,400, ce qui fait 7,000 voix de plus.
C'est Lutzen, précurseur de Leipzig,
où les troupes étrangères et l'armée
française, égales en nombre, se batti-
rent avec une égale valeur. Le sort de
deux armées aussi braves, aussi fortes,
aussi disciplinées l'une que l'autre, n'est
qu'un jeu du destin. Tous les républi-
cains et tous les réactionnaires étant ac-
courus au vote du 12 juin, il s'est trouvé
que les réserves de la monarchie ont
été plus nombreuses que celles de la
République, sans toutefois la vaincre ;
mais cela n'a tenu qu'à un fil !
Pour nous, nous admirons tout ce
qu'il a fallu de patriotisme et de fer-
meté au suffrage universel, en ces der-
niers mois, pour disputer pied à pied le
terrain à l'armée réactionnaire. Nos an-
ciens se comportent comme la vieille
garde, ils sacrifieraient leur vie pour le
drapeau, le vrai, le seul, celui qui place
l'égalité entre la fraternité et la li-
berté. De clocher en clocher, disait
Bonaparte. Mais ils sont fatigués, et
s'ils ne reprennent courage, non seule-
ment l'extension, mais le maintien des
conquêtes démocratiques trouvera des
obstacles. J'admire d'autant plus les ba-
taillons serrés des patriotes, que les ré-
publteains de la première heure, tout en
comprenant le devoir, marchent moins
en avant, soit découragement, soit
vieillesse. C'est ainsi que nous voyons
les républicains de la Haute-Marne tom-
ber, nous ne dirons pas dans une em-
buscade, mais dans des agglomérations
d'ennemis aussi fortes qu'eux, qu'ils ne
pouvaient prévoir, qu'ils ont seulement
dispersées et qui n'ont songé qu'à se
concentrer après leur défaite.
Honneur aux patriotes! La Républi-
que a confiance en eux, surtout dans la
jeunesse, à ceux
Qui vont entrer dans la carrière
Quand leurs aînés n'y seront plus.
La génération actuelle est bonne ;
celle qui suivra sera plus hardie, moins
accessible à l'indifférence et aux crain-
tes, plus maîtresse d'elle-même et de
ses députés. Ce ne sont que des répu-
blicains qui sortiront de notre sang,
grâce à nos écoles ; je dirai même des
citoyens et des citoyennes. Qu'elle le
veuille ou non, il faudra que la réaction
en prenne son parti, et qu'elle croie
que la nation, à travers peut-être quel-
que Seize-Mai ou quelque dictature en
cas de guerre, se retrouvera toujours
sous le drapeau de la Convention, qui
fonda nos écoles et nos armées, après
un siècle de plus qu'il n'aurait fallu,
malgré des faiblesses passagères, qui
n'ont fait que renforcer la race. Nous
reverrons peut-être un Cavaignac ; nous
ne reverrons jamais ni Napoléons, ni
Orléans, ni Bourbons d'Espagne ou d'ail-
leurs. Etats-Unis? qui sait? Autre his-
toire, autre temps, autres mœurs. Mais
peut-être quelque chose d'analogue.
L'avenir est assuré pour la Révolution
française, mais on n'en discerne pas
visiblement la contournure. Quoi que ce
soit, la République est et sera.
C'est ce sentiment qui pousse les ré-
publicains découragés à voter quand
même. Ah ! qu'on les aiderait en suppri-
mant le scrutin de liste. Pour l'instant,
le rôle de la Chambre serait surtout de
les ménager, de cultiver ce patriotisme
fécond au lieu de le laisser sécher en sol
aride ; en un mot de faire son métier. Le
suffrage universel, tout courageux qu'il
sqit, est devenu aussi sensible, aussi
mil impressionné qu'un homme qui se
ferait arracher les dents. Croyez-ious
que ce qui s'est passé à la Chambre
dans le mois qui vient de s'écouler, ces
accès d'inconstance, pour ne pas être
plus sévère, croyez-vous que ces inci-
dents qui, dans les couloirs du Palais-
Bourbon, semblent frivoles, n'influen-
cent pas sérieusement le suffrage uni-
versel? M. Bourlon de Rouvres aurait-il
acquis 7,000 voix, et le candidat répu-
blicain 4,000 seulement, s'il n'y avait
pas eu de la contrariété chez les élec-
teurs de la Haute-Marne pour se voir si
mal payés de la discipline? Ils aiment à
chanter, danser et boire; mais ils ne
comprendront jamais qu'on joue avec
les ministres comme aux quilles ou à
la raquette.
EUG. LIÉBERT.
On lit dans la Justice :
M. Henry Fouquier, dans le XIX" Siècle, se
demande &i, en acceptant d'être les témoins
de M. Mayer dans son duel contre M. Arène,
MM. Lockroy et Clémenceau ont entendu se
rendre solidaires de la polémique de la Lan-
terne contre les Corses. M. Fouquier ignore
sans doute que M. Mayer, — qui n'était pas
l'auteur de l'article incriminé et ne l'avait
même pas lu, — répudiait les expression" vio-
lentes échappées à son collaborateur. Nous
devons également apprendre à M. Fouquier
que MM Lockroy, Clémenceau, Joseph Rei-
nach, MérllIon, commencèrent parréaigerun
procès-verbal où il était dit que les quatre
témoins, à l'unanimité, condamnaient comme
excessives et regrettables les expressions em-
ployées par le rédacteur de la Lanterne.
Ce procès-verbal ne fut pas publié parce
que l'attitude de M. Arène, —que nous n'a-
vons pas à juger ici, — rendit une rencontre
inévitable. Mais le seul fait que cette pièce
reçût la signature des quatre témoins suffit
à montrer que MM. Lockroy et Clémenceau ne
se regardaient pas comme solidaires de l'é-
crivain qui avait, à l'insu de M. Mayer lui-
même, adressé de graves injures à nos con-
ci oyens de la Corse.
VOYAGES DE VACANCES
ET COLONIES SCOLAIRES
Quand un papa veut stimuler le zèle
de son fils, il lui promet un petit voyage
en récompense de ses succès. Les cais-
ses des écoles de la Ville de Paris, sub-
ventionnées par le conseil municipal, se
sont inspirées des mêmes sentiments
quand elles ont organisé, il y a quel-
ques années, des voyages de vacances
au profit des meilleurs élèves des écoles
communales.
Sur ces entrefaites, M. Edmond Cot-
tinet, administrateur délégué de la
caisse du neuvième arrondissement,
conçut un projet bien différent et dont
nous avons déjà entretenu nos lecteurs.
Les voyages scolaires sont la récom-
pense des bons élèves. Ils sont agréa-
bles et instructifs pour ceux qui ont
bon pied, bon œil et sont déjà capa-
bles de voir, de comprendre et de rete-
nir ce qu'ils ont observé. Mais que de-
viennent, pendant ce temps, les pau-
vres enfants chétifs, malingres et mal
venus dont la débilité physique égale
et explique souvent la débilité morale ?
Ecoliers intermittents, apathiques, in-
dociles, ils tiennent pendant l'année la
queue de la classe, et, quand arrivent
les vacances, on les voit rôder sur les
quais ou le long des rues, maigres,
hâves, étiolés, en proie à toutes les
suggestions du désœuvrement et de
l'ennui, pendant que d'autres, au bord
de la mer ou dans la montagne, vont
faire provision de santé, de bonne hu-
meur et de vigueur morale.
Grâce à l'infatigable persévérance de
M. Cottinet, les Colonies scolaires fu-
rent fondées et firent leurs preuves.
C'est lui qui a attaché le grelot qui vient
de tinter au conseil municipal. On y a
débattu asez longuement, à la dernière
séance, les avantages des deux systèmes:
celui des voyages de vacances, qui con-
siste à récompenser les élèves les plus
méritants; celui des colonies, qui émane
d'un sentiment plus généreux et plus
profondément humain, car il va cher-
cher dans les bas-fonds des écoles ce
que le docteur Chassaing a justement
appelé « l'élite des anémiques », pour
leur rendre, avec la santé, la vigueur
morale qui en découle souvent. Mens
sana in cor pore sano.
On a fait remarquer, non sans raison
d'ailleurs, que les voyages scolaires
étaient coûteux et qu'un trop petit nom-
bre d'enfants se trouvait appelé à en
profiter. Ils ne sont, le plus souvent, que
des pérégrinations rapides, sans haltes
sérieuses, et par là fatigants pour des
enfants encore bien jeunes et quelque-
fois débiles. En outre, s'ils ont été ins-
titués en vue de compléter et de déve-
lopper l'instruction des jeunes voya-
geurs, ils manquent presque toujours le
but. Car il s'agit, ne l'oublions pas, des
écoles primaires, c'est-à-dire d'enfants
de onze à douze ans, dont l'intelligence
et les sens mêmes ne sont pas encore
suffisamment exercés pour comprendre
et goûter les merveilles de la nature ou
de l'industrie. On a contesté enfin que
la perspective des voyages scolaires fût
de nature à provoquer une vive émula-
tion dans les classes. Dès le début de
l'année, les enfants voient très bien que
deux ou trois d'entre eux sont d'avance
assurés de cette récompense et l'appât
de cette faveur les trouve indifférents
et découragés.
M. Gaufrès a rappelé avec beaucoup
d'à-propos le développement qu'avait
pris à l'étranger l'institution des colo-
nies scolaires. En Suisse, Zurich a
donné l'exemple et « l'Œuvre des trois
semaines » a envoyé, l'année dernière,
216 colons dans la montagne. Les autres
villes de la Suisse rivalisent avec Zurich de
générosité et de sollicitude. Eu Suède,
en Norvège, en Autriche, en Allema-
gne, des millions d'enfants sont mis tous
les ans « au vert », grâce aux subven-
ventions des corps administratifs ou
des sociétés particulières qui se sont
formées pour la protection du jeune âge.
Pouvons-nous rester en arrière alors
surtout qu'il est démontré que la mor-
talité des enfants est plus grande chez
nous que partout ailleurs?
Et ce n'est pas seulement la pédago-
gie qui est ici en cause : l'institution des
colonies scolaires soulève une véritable
question sociale. Un des plus fervents
adeptes de cette œuvre disait dernière-
ment à Leipzig : « Nous faisons, par les
colonies de vacances, une véritable
guerre à l'accroissement d'un proléta-
riat dégénéré au point de vue physique
et au point de vue intellectuel. Quand
les colonies de vacances auront existé
pendant vingt ans de suite dans nos
grandes villes, il y aura sûrement dans
les couches inférieures de la population
plus de force, plus de santé, plus de vi-
gueur naturelle et de gaieté. »
Aussi le conseil municipal, sans con-
damner les voyages de vacances, a-t-il
exprimé le vœu qu'ils fussent réduits et
le plus souvent transformés en prome-
nades ou excursions de courte durée. Il
a en outre chaleureusement recom-
mandé aux caisses des écoles l'institu-
tion des colonies scolaires.
L'Etat, de son côté, se propose d'en-
courager également des tentatives de
ce genre et va former un grand comité
chargé de donner à l'institution nais-
sante tout le développement qu'elle
comporte. Nous voudrions surtout que
les administrateurs des caisses des
écoles imitassent l'exemple de M. Cot-
tinet, qui est parvenu à intéresser à
cette œuvre ses concitoyens du IX0 ar-
rondissement. Aucune œuvre n'est plus
digne de stimuler le zèle et l'initiative
des particuliers, chez qui le fara da se
n'est guère en honneur, il faut bien le
dire. Le chiffre peu élevé des adhérents
à l'OEuvre des caisses scolaires, dit excel-
lemment M. Gaufrés, démontre que « si
nos idées démocratiques sont avancées,
nos mœurs le sont moins? » Une démo-
cratie comme la nôtre ne peut vivre
longtemps de paroles et de manifes-
tations. Elle a besoin d'aliments plus
substantiels, et il est grand temps d'y
mettre les mœurs en harmonie avec les
idées.
ANDRÉ BALZ.
RECEPTION DES MINISTRES
M. Dautresme, ministre du commerce et de
l'industrie, a reçu hier matin le personnel de
son administration.
Aux directeurs de l'administration centrale,
MM. Marie, Nicolas et Oilendorff, il a adressé
une allocution d'où nous extrayons le passage
suivant :
Il est certain que les impôts actuels pèsent
lourdement sur la production nationale et risque-
raient de la compromettre s'ils étaient augmentés.
De là, pour équilibrer le budget, la nécessité de
faire des économies. Les crédits qui sont alloués
au ministre du commerce et de l'industrie n'en
permettent pas de considérables ; j'espère cepen-
dant en obtenir quelques-unes si chacun de nous,
comme c'est son devoir, s'applique à être aussi
ménager des deniers publics que des siens pro-
pres. Simplifier notre système administratif et
réduire nos dépenses, telle est donc la tâche qui
nous incombe ; je compte, pour la remplir, sur
tout votre zèle et tout votre dévouement.
En recevant MM. Alphand, Bergar et Gri-
son, directeurs généraux de l'Exposition de
1889, M. le ministre s'est exprimé en ces
termes :
Messieurs les directeurs,
C'est mon honorable prédécesseur qui vous a
placés à la tête des grands services que vous diri-
gez ; je n'éprouve donc aucun emharras à vous
dire combien je m'applaudis du choix qu'il a fait.
Entre vos mains, l'Exposition ne court aucun
risque, et son succès est assuré. Je serai heu-
reux de collaborer avec vous, et mon approba-
tion est d'avance acquise à toutes les mesures
que vous croirez propres à en augmenter l'éclat.
Je n'y mets qu'une condition : c'est que nous ne
sortirons pas des crédits qui ont été votés par les
Chambres et que, sous aucun prétexte, je n'en-
tends dépasser. Sur ce point, vous me trouverez
inflexible.
Maintenant, puisque, j'en ai l'occasion, per-
mettez-moi d'en profiter pour démentir un bruit
qui court, depuis quelques jours, dans une frac-
tion de la presse parisienne.
On a prétendu que j'avais l'intention d'ajour-
ner l'Exposition. C'est inexact et rien dans mes
actes ni dans mes paroles n'autorise cette allé-
gation. Il convient, d'ailleurs, de rappeler que la
date à laquelle l'Exposition doit avoir lieu a été
fixée par une loi ; une loi nouvelle serait par
conséquent nécessaire pour la modifier, et au-
cun de mes collègues ni moi ne songeons à la
présenter.
Continuez donc, messieurs, les travaux que
vous avez si bien commencés ; continuez-les avec
plus d'activité encore, s'il est possible, car le
temps marche vite, et il faut que tout soit prêt
pour le 1er mai 1889, pour votre honneur, pour
l'honneur de la France et de la République.
Répondant au président du comité des arts
et manufactures, le vénérable M. Chevreul,
qui lui exprimait ses craintes de tomber en
enfance, M. le ministre lui a déclaré que non
seulement il n'avait pas à redouter one sem-
blable occurence, mais que la France était
fière de le compter parmi ses plus hautes il-
lustrations scientifiques.
Au président de la chambre de commerce
de Paris, l'honorable M. Poirrier, le ministre
a renouvelé l'assurance que l'Exposition uni-
verselle aurait bien lieu en i889.
Aux membres du conseil des prud'hommes
de Paris, M. Dautresme a annoncé qu'il ac-
ceptait le projet de loi de M. Lockroy, sauf
quelques points de détail.
*
* *
Dans la matinée également, M. Mazeau, mi-
nistre de la justice, recevait pour la première
fois l'administration centrale du ministère,
ainsi que les compagnies judiciaires.
Le garde- des sceaux avait à ses côtés les
directeurs et le personnel de son cabinet.
M. Jacquin, directeur des affaire criminelles
et des grâces, l'a assuré du dévouement de
tous au nouveau chef de la magistrature et
au gouvernement de la République.
M. Mazeau a remercié : « J'étais certain,
a-t-il dit, de trouver au ministère de la jus-
tice des collaborateurs dévoués à leurs fonc-
tions et respectueux des institutions républi-
caines. »
Le tribunal des conflits a été ensuite pré-
senté par M. Merville, vice-président.
Toute la cour de cassation a tanu à venir
saluer dans le nouveau garde des sceaux l'un
de ses anciens membres ; M. le premier pré-
sidât Barbier s'est fait l'interprète des senti-
ments de la cour.
M. Mazeau a rappelé que lui aussi, 11 ap-
partenait à la magistrature.
Puis ont été reçus successivement : la cour
d'appel, présentée par M. le premier prési-
dent Périvier ; le tribunal de première Ins-
tance, ayant à sa tête M. le président Aubé-
pin; les membres du tribunal de commerce ;
les juges de paix ; la chambre des notaires ;
les avoués près la cour d'appel de Paris et
près le tribunal civil de la Seine.
Citons encore : les délégués de l'Imprimerie
nationale; la compagnie des référendaires au
sceau; la chambre des commlssalres-prlsdurs
et celle des huissiers.
Le conseil de l'ordre des avocats au conseil
d'Etat et à la cour de cassation est venu,
après la réception officielle, présenter ses
félicitations à soa ancien président.
*
* *
Enfin, M. de Hérédla, ministre des travaux
publics, a reçu, dans l'après-midi, le person-
nel de l'administration centrale du ministère,
les membres des conseils des ponts et chaus-
sées et des m!nes, du comité consultatif et
du comité d'exploitation technique des che-
mins de fer.
Dans les diverses allocutions qu'il a pronon-
cées, M. de Hérédia s'est expliqué sur la né-
cessité absolue de donner une légitime satis-
faction à la volonté du pays et au programme
de la Chambre, en entrant franchement dans
la voie des réformes et des économies.
Le ministre des travaux publics recevait,
quelques instants après,les membres du con-
seil de l'école d'horlogerie de Paris, ainsi que
les membres de la chambre syndicale, qui
lui ont été présentés par leur président, M.
Rodanet.
M. de Hérédia, président d'honneur de cette
chambra, a constaté avec satisfaction les pro-
grès déjà réalisés. La création de la nouvelle
école d'horlogerie, dont M. Lockroy a posé
récemment la première pierre, va donner une
impulsion nouvelle à cette industrie.
M. le ministre a donné l'assurance qu'il con-
tinuerait à contribuer autant qu'il le pourrait
au développement de cette cBuvre, appelée à
rendre les plus grands services au moment
où la concurrence étrangère est de plus en
plus à craindre.
CHRONIQUE
'Voici l'époque des fêtes foraines dan.
les environs de Paris. Autour des gares,
de colossales affiches portent le nom
des villages de banlieue où elles sont
données ; et vraiment, en s'arrêtant,
machinalement, à lire le détail de ces
affiches, on demeure un peu étonné de
l'invraisemblable banalité des divertis-
sements annoncés, non moins que de la
facilité d'humeur du bon public qui se
dérange pour un spectacle qui est éter-
nellement le même. Car, il n'y a pas à
dire, si toutes les communes suburbai-
nes ont leur fête, c'est que cette so-
lennité, pourtant médiocre, attire la
(oule.
Que voit-on, cependant, après que,
dans les trains fantastiques du diman-
che, on s'est écrasé terriblement ? A la
station, deux ridicules mâts, grêles et
d'une hauteur démesurée, ornés de laids
trophées. Puis, après une longue course
sous le soleil brûlant, on se trouve en
face de quelques misérables baraques.
C'est l'immanquable «tir à la carabine »,
un manège de chevaux de bois, deux
ou trois loteries où l'on gagne, comme
disent les marchands forains, « un petit
cocotier », parfois un lamentable théâ-
tre où de tristes cabotins, qui ont couru
toutes les aventures, font la parade. Et
c'est tout. Vraiment, le peuple français
n'est pas difficile sur la nature de ses
plaisirs en plein air. Et, d'un bout à
l'autre du territoire, ce sont les mêmes
baraques, les mêmes tirs, les mêmes
feux d'artifice, le soir, commandés à
forfait ! Il y a aussi la débauche obligée
des cors de chasse, sonnant leurs fan-
fares éperdues, qui fait que les gens
tranquilles, venus pour chercher quel-
que repos à la campagne, pestent de
toutes leurs forces contre ce bruit ab-
surde.
Il n'y a jamais guère eu autant de
fêtes de tout genre qu'en cette époque-
ci, et jamais elles n'ont été plus dénuées
d'invention. Comment ne se trouve-t-il
personne (pour ne parler que des fêtes
foraines) qui ose imaginer quelque
chose d'original et de neuf? La puis-
sance de la tradition est-elle si forte,
qu'elle condamne irrémédiablement, et
à perpétuité, au tir, au manège de che-
vaux de bois, à la loterie ?
Comment ! quelques-unes de ces pe-
tites villes des environs de Paris ont
des décors charmants, pittoresques, qui
peuvent donner l'illusion d'un horizon
réel de campagne ; elles disposent de
bois, de cours d'eau, de jolies vallées,
et, ce décor, elles le laissent gâter par
l'établissement d'affreuses boutiques en
planches ! Toute cette routine n'est-elle
pas faite pour fâcher, à la fia ?
Chacun de ces villages a de vieilles
traditions, cependant, qui pourraient
inspirer l'évocation de jeux d'autrefois,
qui avaient une si large saveur de belle
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