Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1887-04-03
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 03 avril 1887 03 avril 1887
Description : 1887/04/03 (A18,N5561). 1887/04/03 (A18,N5561).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/04/2013
Dix-huitième aaaêSi — N. 5561
Prix du numéro : Paris et déptertemeats : 15 centimes
Dimanche 5 avril 4S87
JOURNAL RÉPUBLICAIN
REDACTION
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MM. LAGRANGE, CERF ET J®1»
6, place de la Bourse, e -
BULLETIN
La Chambre a adopté hier le projet de
loi portant ratification de la convention
passée entre le ministre des postes et la
Compagnie des Messageries maritimes.'
Les adversaires du projet ont tenté un der-
nter effort pour faire repousser ia conven-
tion. Le Havre, représenté par M. Félix
Faure, a plaidé la cause de l'île de la Réu-
nion, qui se trouve lésée par le nouvel
itinéraire imposé à la Compagnie conces-
sionnaire.
Bordeaux insiste, par l'organe de M. Mé-
dItOD, pour le maintien obligatoire d'un
-service commercial avec la Plata. La
Chambre ne se laisse séduire ni par M.
Félix Faure, ni par M. Mérillon, ni par
M. Hanotaux, qui demandait que la du-
rée du contrat fût réduite de quinze à huit
années. A une très forte majorité la con-
vention est ratifiée,
Le véritable intérêt de la séance a été
dans la décision prise au sujet de la com-
mission du budget. M. le ministre des
:finances avait demandé à la Chambre de
procéder à l'élection de la commission
avant les vacances parlementaires. M. Rou-
vier, président de l'ancienne commission,
a proposé que cette élection eût lieu au
scrutin de liste et qu'une part équitable
fût faite à la minorité conservatrice dans
le choix des commissaires.
M. Madier de Monjau a combattu cette
motion, qu'il juge dangereuse et contraire
aux principes du régime parlementaire.
Domination des majorités, exclusion des
minorités, telle est la règle en vertu de
laquelle les représentants du peuple sont
élus. La Chambre élue selon ce principe
manque de logique si elle procède autre-
ment quand elle délègue ses pouvoirs.
Le discours de M. Madier de Montjau
fournit à M. Jolibols le prétexte qu'il cher-
chait pour affirmer les prétentions de la
Droite conservatrice. Il demande pour ses
amis, dans la commission du budget, une
représentation proportionnelle à leurs for-
ces numériques dans la Chambre. Les di-
vers groupes ont été fort divisés, on s'en
souvient, quand la question a été exami-
née dans les bureaux Au scrutin d'hier,
les mêmes dissentiments se sont produits;
peu s'en est fallu que Il proposition de M.
Rouvier nefût écartée *Elle ne l'a emporté
que de 25 voix. C'est peu, mais suffisant.
Il faut, en somme, ss féliciter de ce résul-
tat.
Un nouvel attentat vient d'être commis
contre le tsar, à Gatschina, résidence ac-
tuelle de la famille impériale. C'est un of-
ficier de la garnison qui s'est rendu cou-
pable de cette tentative criminelle. Par
un heureux hasard, le tsar a échappé au
danger qui le menaçait. L'opinion publi-
que sera unanime, dans tous les pays ci-
vilisés, à flétrir cette seconde agression,
qui se produit a si peu de distance de la
première. Mais les avis diffèrent sur les
conséquences que peut avoir ce triste in-
cident. En Autriche et en Allemagne, on
paraît redouter que l'attentat de Gatschi-
nia n'influence la politique extérieure du
cabinet russe.
On rappelle que c'est à la suite d'un in-
cident de cette nature que le tsar Alexan-
dre II, en 1876, déclara la guerre à la Tur-
quie. Est-il invraisemblable qu'Alexan-
dre III cherche à son tour, dans une nou-
velle guerre en Orient, une diversion aux
menées des nihilistes ? Cette opinion peut
se soutenir.
Toutefois, nous avons des raisons de
penser que le tsar, si irrité qu'il puisse-
être des progrès du nihilisme dans tou-
tes les classes de là société russe, persis-
tera dans la politique sage et prudente
qu'il a adoptée. Encore une fois, il fera
preuve de modération en épargnant à
l'Europe les horreurs d'une guerre dont il
est trop facile de prévoir les terribles con-
séquences.
Louis HENIUQUB.
INFORMATIONS mimiMES
Conseil des ministres
Le conseil des ministres s'est réuni hier
matin à l'Elysée, sous la présidence de M.
Grévy.
La séance, qui a été très courte, a été con-
sacrée exclusivement à l'expédition des affai-
res courantes. ',
Le conseil a décidé qu'il y avait lieu de
demander à la Chambre de nommer la nou-
velle commission du budget avant sa sépara-
tion, afin qu'elle puisse travailler pendant les
vacances de Pâqoes.
Le ministre de l'intérieur a fait signer un
décret portant dissolution du conseil munici-
pal de Saint-Ouen (Seine), qui a pris, à l'oc-
casion de la dissolution du conseil municipal
de Marseille et de l'anniversaire de la Com-
mune, la délibération que l'on sait.
Le ministre de la guerre a fait signer un
décret par lequel M. le colonel d'artillerie de
Saint-Germain est nommé général de bri-
gade.
Les ministres de l'instruction publique, des
travaux publics et des postes et télégraphes
ont fait savoir qu'ils partiraient le 8 avril
pour l'Algérie et la Tunisie.
La réforme pénale
La eommission extra-parlementaire char-
gée de préparer la réforme du Code pénal
s'est réunie au ministère de la justice. Après
une allocution de M. le garde des sceaux, nne
sous-commission a été nommée, que prési-
dera M. Ribot et qui se compose de MM.
Bouchez, procureur général à la cour de
Paris ; Chauffour, conseiller d'Etat ; Herbette,
directeur de l'administration pénitentiaire ;
Jacquin, directeur des affaires criminelles ;
Léveillé, professeur à l'Ecole de droit ; Merlin,
sénateur ; Tanon, conseiller à la cour de cas-
sation. La sous-commission s'occupera
d'abord de la revision du système des peines.
M. Le Myre de Vilers
Sur le désir de M. Flourens, ministre des
affaires étrangères, M. Le Mvre de Vilers,
résident général de France à Madagascar,
qui avait l'intention de rentrer en France et
de prendre un repos bien gagné, ne prendra
qu'au mois de novembre le congé qu'il a
demandé.
L'Exposition de 1889
Voici les bureaux des comités do l'Exposi-
tion universplle qui ont été élus dans la
séance du 29 mars, dans les classes 6, 7, 8,
9, 10, il, 12, 15, 16, 17 et 27:
Présidents : MM. Mézières, Zévort, Gréard.
Delalain, Laroche-Joubert, Rossigneux, A.
Davoine, Faye, vice-amiral Cloué, A. Thomas,
Emile Muller.
Vice-présidents : MM. Buisson, Camille Sée,
Cauvet, Alary, Choquet, Lechevalier-Chey-
nard, Georges Lévy, Laussedat, Bouquet do
la Grye, Gaud, Genest.
Rapporteurs : MM. Maillé, Jacquemard, An-
got, René Fouret, Gratiot, Germain Bapst,
L00n Vidal, Manceron, Maunoir, Dumoulin
d, Frédilly, Ser.
Secrétaires : MM. Chariot, Gay, Delorme,
J. Hetzel, Fortin (Charles), Bouasse-Lebel,
Autrau, Teisserenc de Bort, Callandreau,
Blondel, Beau.
Une heure a suffi hier, à la Chambre,
pour prendre trois bonnes résolutions.
Elle a décidé, en effet : 1° Qu'elle éli-
rait la commission du buget demain
lundi; 2° qu'elle la nommerait au scru-
tin de liste en faisant une part à la
Droite; 3° que les rapports de la com-
mission devraient être déposés avant le
1er juillet. La première et la dernière de
ces résolutions montrent que la Cham-
bre est animée d'un sincère désir de ne
pas s'exposer, cette année, à des aven-
tures pareilles à celles qui ont marqué
la discussion du budget de 1887 et d'em-
pêcher les retards, qui depuis longtemps
se produisent chaque année, de se re-
nouveler.
La commission qui va être nommée
demain pourra se mettre immédiate-
ment à l'œuvre, et les rapporteurs spé-
ciaux pourront profiter des vacances
parlementaires pour avancer leur tra-
vail. Si la Chambre est saisie des rap-
port le 10r juillet, elle ne pourra peut-
être pas terminer la discussion du bud-
get dans la session ordinaire. Elle aura
du moins le loisir de l'avancer suffisam-
ment pour être en mesure de l'achever
au commencement de la session d'au-
tomne, et le Sénat aura, à son tour, un
délai suffisant pour procéder à un exa-
men sérieux de notre situation finan-
cière.
Quant à la nomination de la com-
mission au scrutin de liste, nous avons
déjà fait connaître notre sentiment sur
ce point. Des choix arrêtés à l'avance,
sans qu'il y ait à tenir compte de la
répartition des députés entre les bu-
reaux, nous paraissent l'emporter, sur
la méthode ordinaire, de toute la supério-
rité que la raison peut revendiquer sur
le hasard. L'admission de membres de
la Droite dans la commission est une
mesure libérale que la Chambre a eu
raison d'adopter. Puisque les droitiers
ont la prétention de représenter trois
millions d'électeurs, il est juste qu'ils
aient part au contrôle que la commis- j
sisn du budget exerce sur les finances
publiques, et puisque, d'autre part, ils
ne cessent de crier au gaspillage et au
désordre financier, il n'est pas mau-
vais de les associer, pour une part, à la
responsabilité qu'ils rejettent si allè-
gremenf et avec une apparence de
raison — sur les seuls républicains.
Nous nous étonnons que ces motifs
n'aient pas été compris de tout le monde
et que M. Madier de Montjau, par exem-
ple, soit monté à la tribune pour défen-
dre, avec une exagération manifeste, la
théorie de la domination exclusive de la
majorité. Que les majorités doivent
l'emporter sur les minorités, ce n'est
pas un principe, c'est un fait évident.
Il n'implique pas, cependant, l'anéantis-
sement des minorités. Celles-ci ont le
droit de se faire entendre et de soutenir
leurs opinions.
La représentation de la Droite dans
la commission du budget n'a donc pas
les inconvénients que l'on a voulu lui
attribuer. Elle ne les aurait que dans le
cas où, la représentation des divers
groupes de gauche et de droite étant
proportionnelle à leur importance nu-
mérique , la commission se trouverait
composée de telle manière que la Droite
pourrait détenminer la majorité et où,
par conséquent, au lieu d'être simple-
ment admise à exercer un contrôle lé-
gitime, elle deviendrait prépondérante.
C'est pour cette raison que le principe
de la proportionnalité ne nous paraît pas
devoir être admis.
La majorité est, en définitive, maî-
tresse de l'élection: elle peut faire à la
minorité la part qu'elle juge convena-
ble. Cette part doit être équitable, c'est-
à-dire qu'il ne serait pas assez, sur
trente-trois sièges, d'en réserver un ou
deux à la Droite ; mais quatre ou cinq
nous semblent bien suffisants, et la
Droite elle-même, sachant qu'il ne dé-
pend que de la majorité de l'exclure
complètement de la commission, ne
doit pas montrer des exigences trop
grandes, lesquelles ne pourraient avoir
d'autre conséquence que de faire reve-
nir le parti républicain sur les inten-
tions conciliantes qu'il vient de mani-
fester.
QUESTIONS DU JOUR
ANTOINE
Nous ne protesterons pas contre une
décision au bas de laquelle tout le
monde lit, sans l'avoir vue, la signature
de M. de Bismarck. Mais nous saluons
de tout notre cœur, et plus que jamais,
le vaillant député de Metz, dans cet exilé
que l'on chasse du territoire qu'il repré-
sente en même temps que de son pays
natal. Et nous remarquerons cependant
que, depuis son entrée dans le Reichs-
tag, où il n'a pas encore pris la parole,
le député Antoine n'a rien fait pour
prêter le flanc à la vengeance. Sa con-
duite, son langage ont été les mêmes
qu'ils n'ont pas cessé d'être depuis
quinze ans, depuis 1872, l'année où il
débuta da$s la vie publique en entrant
au conseil municipal de Metz. Il avança
, rapidement dans l'estime de ses conci-
toyens ; il fut donc élu député en 1882,
réélu en 1884, élu enfin pour la troisième
fois en 1887, malgré la rage que l'ad-
ministration prussienne fit contre lui.
Voilà son histoire, et voilà sans doute
pourquoi on ne lui pardonne, à Berlin,
ni sa popularité ni son courage.
C'est pourtant son droit d'être député.
J'irai plus loin : c'est son droit, — son
droit d'annexé, — d'être protestataire.
Le traité de Francfort a engagé la
France et le gouvernement français
envers l'Allemagne ; il n'a pu lier ni les
cœurs ni les consciences des Alsaciens
et Lorrains qui ont refusé d'opter et qui
ont dit : « Nous restons et nous protes-
tons, parce que nous avons été livrés
par la force. » Aujourd'hui encore, à
moins qu'un décret impérial n'enlève
tout droit de vote à l'Alsace-Lorraine,
il n'y a nul moyen, pour les Allemands,
d'empêcher les annexés de protester
par la voie légale, du moment qu'on
leur a laissé des conseils municipaux,
une Délégation et des sièges au Reichs-
tag. Autant de votes, autant de plébis-
cites. Et ce seraient encore des plébis-
cistes de protestation, quand même les
candidats n'écriraient aucune profession
de foi et ne prononceraient aucun dis-
cours. On saurait toujours ce qu'ils sont.
Si c'est par vengeance, sous l'impul-
sion de vieux ressentiments et de haines
centenaires, que l'Allemagne traite ainsi
les provinces que lui ont livrées ses vic-
toires, alors nous n'avons point de ré-
flexions à émettre : c'est un fait à en-
registrer dans la série des horreurs
historiquei. Mais si l'Allemagne veut
germaniser sa conquête, comme elle
s'en vante, elle devrait au moins s'ap-
pliquer à tenir compte de ce que les
Alsaciens-Lorrains ont dans l'âme. A-t-
elle oublié, pour ne pas remonter plus
haut, ce qui se passa. sur son territoire
voici un peu moins de cent ans ? Lors-
que Napoléon partagea le Palatinat et
fit la part belle à la France, les Alle-
mands annexés n'éprouvèrent-ils ni dé-
chirement, ni désespoir, ni rage?
L'Allemagne s'est vengée du traité de
Lunéville en nous prenant, par les pré-
liminaires de Versailles et par le traité
de Francfort, tout ce qu'elle a voulu, à
titre de revanche et de représailles.
Soit ! Mais il faut bien qu'elle se dise
qu'elle a pris quelque chose de trop : la
Lorraine et l'Alsace, et qu'elle ne les
germanisera pas plus que nous n'avons
francisé le palatinat rhénan. L'une et
l'autre épreuve, celle de 1801 et celle de
1871, sont devenues la réciproque con-
damnation de la politique de conquête.
Ces leçons ont servi au dernier vaincu ;
mais serviront-elles au dernier vain-
queur? Non, quant au temps présent.
Et pour le futur congrès international
de la paix, il ne se dessine encore, au
bout d'un horizon lointain, que dans une
brumeuse perspective. Il ne reste donc
maintenant aux populations annexées
que le droit suprême de protester au
nom de l'humanité et de la patrie, seul
moyen qu'elles aient de préparer des
temps meilleurs. pour le vingtième
siècle peut-être. Ainsi feront-elles, en
dépit des expulsions. Le député pros-
crit aura sa légende, qui restera gravée
dans tous les cœurs.
EUG. LIÉBERT.
Le Sénat a opposé aux projets relatifs à
la séparation du conseil général de la
Seine du conseil municipal de Paris et
aux élections municipales parisiennes la
force d'inertie. Le rapport sur le premier
de ces projets est prêt ; il a été déposé
hier. Il suffirait que le Sénat en ordonnât
la lecture pour qu'il fût inséré aujourd'hui
à l'Officiel et que la discussion pût s'en-
gager demain. La lecture n'a pas été de-
mandée ; rien n'a été fait pour abréger les
lenteurs de la procédure ordinaire : il en
résulte que le projet ne pourra pas venir
en discussion avant les vacances. C'est un
enterrement silencieux.
Quant à la commission chargée d'exami-
ner le projet concernant la substitution du
scrutin de liste par arrondissement au
scrutin de quartier, elle n'a même pas
eherché à faire discuter le projet dont elle-
est saisie. Elle a commencé par déclarer
qu'il y avait connexité entre le mode élec-
tectoral et la disjonction des conseils, et
par décider qu'elle n'examinerait la ques-
tion qui lui est soumise qu'après que le
Sénat aurait statué sur celle de la sépara-
tion. Celle-ci étant enterrée, l'autre se
trouve, du même coup, ajournée indéfini-
ment.
La connexité des deux affaires n'est ce-
pendant pas à ce point étroite que la ques-
tion électorale ne puisse être réglée toute
seule. Oa aurait pu soutenir que, dans les
oonditions actuelles, le conseil général de
la Seine n'étant que le conseil municipal
auquel viennent s'ajouter huit représen-
tants des cantons suburbains, il n'y avait
pas lieu d'augmenter de seize le nombre
des conseillers municipaux. On pouvait
du moins décider que les conseillers muni-
cipaux seraient élus au scrutin de liste par
arrondissement et que la durée de leur
mandat serait de quatre ans, comme celle
de tous les conseillers municipaux de
France. Le Sénat avait prisjadis l'initiative
d'une réforme électorale de ce genre pour
Paris. Il avait estimé, alors, que le scrutin
de liste par arrondissement présentait des
avantages certains sur le mode actuel. Les
avantages qu'il avait prévus à cette époque
ne sont pas moins certains à l'heure pré-
sente. Pourquoidonc le Sénat se donre-t-il
aujourd'hui le tort de reculer devant une
mesure qui avait, il y a quelques années,
ses sympathies?
Quoi qu'il en soit, les prochaines élec-
tions municipales vont être faites suivant
la loi actuelle. Les conseillers municipaux
qui vont être élus suivant un mode d'élec-
tion condamné, sous la menace d'une pro-
chaine dissolution du conseil, n'obtien-
dront qu'an mandat en quelque sorte ca-
duc, et, d'autre part, la question d'organi-
sation muniii pale ne se trouvant pas en-
gagée aujourd'hui, il est à craindre que la
réforme d'ensemble ne se trouve ajournée
indéfiniment. Entre oeux qui, voulant
tout, protestaient contre la réforme par-
tielle, et ceux qui ne veulent rien, ce ne
sont peut-être pas les premiers qui ont le
plus à se féliciter de la résolution du
Sénat.
Les réclamations des Étudiants
Le rétablissement des droits d'ins-
cription dans les Facultés de l'Etat a
mis en émoi un certain nombre d'étu-
diants, qui se sont réunis, avant-hier,
salle Jussieu, pour protester contre
cette mesure. Il n'y a point de bonnes
réunions, au quartier latin, sans quelques
fumisteries. On y a entendu, comme
toujours, des cris étranges et des pro-
positions incohérentes, qui tranchent
joyeusement sur la monotonie de cette
fin de carême. Que ceux qui n'ont pas
eu vingt ans jettent la pierre à cette jeu-
nesse ! Il nous semble, au contraire, que
leur assemblée a été plus sérieuse et
plus sage qu'elle n'en avait l'air. D'a-
bord on ne s'y est point injurié, on ne
s'y est point colleté, on n'a point dû re-
courir au procureur général, retenu dans
les couloirs de la Chambre. Nos étu-
diants ont heureusement dérogé, en
cette occasion, aux traditions du régime
parlementaire. Ils ont même écarté avec
un certain ensemble toutes les motions
excentriques ou violentes.
Messieurs les anarchistes avaient été
priés poliment de rester chez eux. On n'a
pas oublié sur la rive gauche l'enterrement
de Jules Vallès. Un ami du « chambaro »
a proposé d'aller faire un monôme gi-
gantesque devant le ministère des finan-
ces et de « conspuer Dauphin ». Un au-
tre a parlé d'une grève générale qui dé-
sorganiserait les services des hôpitaux.
Mais il a paru qu'on devait laisser la
première manifestation aux jeunes po-
taches en quête d'un jour de congé sup-
plémentaire, et la seconde avait pour
premier inconvénient de faire payer aux
malades d'abord et aux étudiants en-
suite les pots qu'ils n'avaient point cas-
sés.
Le bon sens a bien vite repris le des-
sus. On s'est prononcé pour une péti-
tion « monstre » à la Chambre des dé-
putés. Un comité a été nommé pour la
rédiger et exposer la situation des jeu-
nes gens qui, par le rétablissement des
frais d'inscription, pourraient être con-
traints d'abandonner leurs études. Les
étudiants sont ainsi entrés dans la voie lé-
gale, la seule bonne. La carrière est
ouverte à la libre discussion et par con-
séquent à l'entente.
Est-il nécessaire d'admettre tout d'a-
bord comme un axiome la gratuité ab-
solue de l'enseignement supérieur? Cha-
cune proposition, au contraire, n'aurait,
il nous semble, plus grand besoin d'être
démontrée. On est parvenu à grand'-
peine, après une lutte opiniâtre, à faire
pénétrer ce principe dans l'enseigne-
ment primaire. Mais on n'en est pas en-
core arrivé à demander qu'il soit appli-
qué à l'enseignement secondaire. L'ins-
truction dans les lycées et les collèges
n'est pas donnée gratuitement.Et cepen..
dant, par l'institution des bourses et les
dégrèvements de frais d'études, on ou-
vre largement la porte de ces établisse-
ments aux enfants dont les familles sont
hors d'état de payer. Ne voit-on pas ce-
pendant qu'avant de décréter la gra-
tuité intégrale dans l'enseignement su-
périeur, il faudrait commencer par
l'établir dans l'enseignement secon-
daire ? Or, le budget s'écroulerait bien-
tôt sous une pareille charge.
Ce qu'il est juste de souhaiter, c'est
que, dans l'enseignement supérieur,
les jeunes gens soient mis à même,
comme dans l'enseignement secondaire,
de pousser leurs études aussi loin que
possible, sans que la situation précaire
de leurs familles ou les exigences de
l'Etat opposent un obstacle insur-
montable à leurs légitimes ambitions.
Eh bien ! c'est précisément ce que se
sont proposé les auteurs du projet qui
rétablit les droits d'inscription
Une première catégorie d'étudiants
est d'abord mise à part et exemptée de
tous frais d'études et de bibliothèque.
Elle comprend les maîtres répétiteurs
et les boursiers de l'Université. Sur le
nombre des étudiants qui restent alors
astreints au payement des droits, un
dixième pourra en être également dis-
pensé, sur la désignation du doyen ou
du directeur, après avis du conseil de
la Faculté ou de l'Ecole. On crée donc,
en définitive, une bourse sur dix ins-
criptions, en faveur des jeunes gens
méritants et peu fortunés. Cette bourse
sera en même temps un encouragement
au zèle et au travail, car elle pourra
être retirée à quiconque s'en montre-
rait indigne. Très sage précaution, en
somme, car dans l'enseignement supé-
rieur, comme dans l'enseignement se-
condaire, il n'y a pas lieu d'encourager
les flâneurs et les étudiants pour rire.
Un seul point reste donc en discus-
sion : Le nombre de bourses accordé
par le décret répondra-t-il à tous les
besoins ? Il a paru suffisant aux mem-
bres du conseil de l'instruction publi-
que, où les professeurs de l'enseigne-
ment supérieur se trouvent en majorité.
Il paraît également suffisant à M.
Brouardel, doyen de la Faculté de mé-
decine, et à M. Beudant, doyen de la
Faculté de droit. Les étudiants ne con-
testeront point la compétence ni la
portée de ces affirmations.
Mais nous leur accorderons volontiers
que tous les chiffres arrêtés à l'avance
ont quelque chose d'arbitraire. Il est
possible qu'on soit amené, ici, à rester
au-dessous du dixième des étudiants à
exonérer,là, à s'élever un peu au-dessus.
Toutes les controverses à cet égard
seraient aujourd'hui prématurées. L'ex-
périence seule pourra fournir des
données certaines.
Nous voudrions seulement qu'on fût
bien fixé, dès maintenant, sur deux
points : l'un, que la gratuité absolue de
l'enseignement supérieur n'est ni logi-
que ni équitable. L'idéal n'est point que
personne ne paye, mais que ceux-là
seulement soient dispensés de payer qui
n'en ont pas les moyens. L'autre point,
c'est que, si le chiffre des exemptions
actuellement accordées est reconnu in-
suffisant, il y soit pourvu au plus tôt
par l'adoption d'un plus large système
de dégrèvements. A cet égard, on peut
compter aussi bien sur les conseils uni-
versitaires que sur le Parlement et les
ministres Rien ne sera fait pour porter
atteinte à l'esprit démocratique qui
anime toute notre législation scolaire.
ANDRÉ BALZ.
COURRIER PARISIEN
Le tueur de femmes de la rue Moni-
taigne a le privilège de retenir l'atten-
tion publique. Chaque Parisien , en ou-
vrant son journal, porte aussitôt les
yeux sur la rubrique du triple assassi-
nat et cherche impatiemment quel nou-
veau détail ajoute à la certitude de la
culpabilité de Pranzini. Ce bandit de-
meure immuable dans ses dénégations :
rien ne le trouble dans ses mensonges,
ni l'évidence des faits ni l'accumulation
des preuves. Il semble qu'aussitôt ar-
rêté il ait repris tout son sang-froid, sa
puissance de bête féroce, la plénitude
de sa ruse. Devinerait-il que son audace
dans le mensonge peut jeter un doute
dans l'esprit de ses juges, et donner le
change à l'opinion publique? En réalité,
le doute subsiste, grâce à cette attitude,
dans l'esprit de nombre de gens, et j'en-
tends répéter tous les jours, à ce propos,
qu'on ne saurait condamner à mort un
accusé qui n'avoue pas.
Le plus clair, dans cette affaire, est la
niaiserie lamentable de la police. A
quels pauvres hères est confié le soin
de veiller sur nos biens et nos person-
nes, la recherche des malfaiteurs. La
maladresse des gardiens de la grande
ville serait risible si elle n'était pas
aussi inquiétante. Sur le lieu du triple
meurtre, ont été laissées une ceinture et
une manchette portant le nom deGeiss-
ler. Les assassins, pas plus que les par-
ticuliers, n'ont accoutumé d'écrire leur
nom sur leur linge. Au lieu d'éventer
le piège grossier de cet oubli volon-
taire, le chef de la Sûreté, malin comme
Gribouille, accueille cette « carte de
visite de l'assassin », laissée à son in-
tention. Il se lance sur cette piste, et
comme Geissler est un nom très ré-
pandu, on ne tarde pas à signaler dans
un garni le passage d'un individu de ce
nom, disparu la veille. Plus de doute,
ce garçon coiffeur, photographe ou
peintre est le coupable; son signale-
ment, aussi précis que sa profession, est
télégraphié dans toutes les directions.
Cependant, dans les papiers de Marie
Regnault se trouve la carte d'un certain
Pranzini. Aussitôt un agent, — d'au-
cuns prétendent M. Taylor lui-même,—
se rend au domicile désigné, cause avec
ce Pranzini et le quitte sans avoir conçu
le moindre soupçon. Or, il eût suffi de
regarder ses mains et les coupures en-
core saignantes Dour l'arrêter sur-le-
champ. Mais ce n'était point Geissler, et
le chef de la police et ses aides n'a-
vaient que du Geissler dans la cervelle.
Ce n'est pas tout : un policier de la
vieille école eût pris des renseigne-
ments sérieux sur ce client et, tout en
lui faisant bonne mine, eût attaché un
agent secret à chacun de ses pas. Ainsi
l'on aurait surpris toutes les démar-
ches de Pranzini, on aurait saisi ayant
l'expédition la boîte à bijoux, on eût
arrêté l'homme en temps utile. C'était
l'enfance du métier; mais cet art enfan-
tin manque au grand enfant chargé de
la police de sûreté et il n'est d'égal à
sa naïveté que son acharnement sur
une fausse piste. Il lui faut son Geiss-
ler, il n'en veut pas démordre et il fait
filer pendant trois jours M. R. G.,
un Parisien connu, très galant homme,
dont la maîtresse était en correspon-
dance amicale avec Marie Regnault. Le
quatrième jour, M. R. G., qui ne se
doute de rien, est mandé rue Montai-
gne par le juge d'instruction. Tout
étonné, il se rend à cette convocation.
Que devient-il, en entendant M. Guillot
l'interpeller ainsi : — Eh bien ! Gaston,
que faisiez-vous dans la nuit de mer-
credi à jeudi? Cette question, la vue
de la chambre, du lit inondés de sang,
frappent M. G. de stupeur; il explique
la méprise d'une voix entrecoupée et H
garde de cette scène une impression
d'horreur qui durera.
Pranzini a quitté Paris tranquillement,
et si, à Marseille, il n'eût pas perdu la
notion du sens commun, le triple assas-
sinat de la rue Montaigne restait impuni
comme les précédents des rues Cau-
nartin, Bergère et Condorcet. La police
parisienne était içapuissante et bouf-
fonne. Mais une sorte de délire partieu-»
lier aux criminels s'est emparé de
Pranzini, et, stupidement, il se dénonce
aux recherches en offrant de vendre une
montre d'aspect particulier signalée
par tous les journaux, et dans une mai-
son dont les tenanciers sont notoire-
ment atfiliés à la police. Il est arrêté.
D'abord, à Paris, on refuse de croire à
la culpabilité de cet individu; M. Taylor
montre de la mauvaise humeur et ne
met aucun zèle à seconder son collègue
de Marseille. Mme Sabattier, la maî-
tresse de Pranzini, lui crée un alibi,
soutient qu'il ne l'a point quittée la nuit
du meurtre, sans que le juge insiste
pour lui arracher la vérité. Enfin, quand
elle s'est décidée à parler, lorsque les
preuyes s'ajoutent aux indices pour ac-
cabler l'assassin, lorsque le ridicule de
la fable Geissler éclate, le chef de la
Sûreté et le juge d'instruction trouvent
cette admirable excuse : c'est la presse
qui a causé tout le mal; les journaux ont
entravé l'action de la police et les pro-
grès de l'enquête. Ils n'hésitent point à
communiquer cette affirmation auda-
cieuse pour cacher leurs fautes et leur
confusion.
Or l'enquête intelligente, habile, me-
née par les reporters des journaux, ac-
cuse hautement l'incapacité de la po-
lice. Ce sont nos confrères qui ont fourni
à l'instruction les plus préeieux élé-
ments. On ignorait encore quel était
Pranzini, qu'un journal du matin recons-
tituait toute la vie, étalait les antécé-
dents, racontait les menées suspecter
de l'homme de Marseille, l'avant-veille
du triple meurtre, et établissait ainsi la
culpabilité sur des documents irréfraga-
bles. La police était distancée par un
reporter et le juge priait le journaliste
de bien vouloir lui apporter ses rensei-
gn ements. Et à une seconde invitation du
même genre, notre confrère répondait
fièrement qu'il tenait à honneur de ren-
seigner ses lecteurs, mais se refusait à
faire œuvre d'agent de police. Aider à
la découverte de la vérité et se mêjer
personnellement aux recherches jie
sont point traits de même nature. Ainsi
tombent, à l'examen de fait, les insinua-
tions désobligeantes pour la presse.
contraire, son rôle est utile, efficace, puis*
qu'elle signale à des millions de lec-
teurs les détails caractéristiques d'un
assassin et provoque les révélations et
les témoignages.
J'irai plus loin : je crois nos reporters
bien supérieurs aux agents ordinaires
dans la découverte des mobiles d'un
crime et de la personnalité d'un assas-
sin. Ils se passionnent à leur tâche, ils
joignent à la connaissance spéciale du
milieu parisien un esprit idductif tout
plein de subtilité et de ressource. Le
policier de profession est habitué aux.
recherches dans les bas-fonds de la
société parisienne, il sait les caba-
rets borgnes où se réunissent les
malfaiteurs, il suit instinctivement les
récidivistes, il a des intelligences dans
les repaires et la population dès
garnis suspects ; aussi les mauvais
coups de ce public-là lui sont fami-
liers et il en trouve sans peine \ert
auteurs: à des marques certaines il Mé-
connaît son criminel. Mais si le meur-
trier est en dehors de l'action ordinaire
de la police, s'il est d'apparences bour-
geoises, sans casier judiciaire, sans
fréquentation oblique, les agents sont
déroutés ; ils n'ont plus aucun point de
repère, ils errent, à droite, à gauche,
presque toujours sur une faussse piste.
HErfty BAUER.
LE PARLEMENT
stANCE DE LA CHAMBRE
Demande en autorisation de poursuites
L'incident regrettable que nous avons ra-
conté ces jours-ci a été porté hier devant la
Chambre. Voici, d'après le compte rendu ana-
lytique, les observations échangées à ce sujet
par MM. Floquet, président de la Chambre,
Emmanuel Arène et Paul de Cassagnac :
M. le président. — J'ai reçu de M. le garda
des sceaux une demande de poursuites contre
deux membres de la Chambre.
Cette demande sera imprimée, distribue et
renvoyée à l'examen des bureaux.
M. Èramannei Arène. — Je demande la dis-
cussion immédiate. Il s'agit, vous le savez, d'une
très regrettable affaire à laquelle le bureau de la
Chambre s'est vu contraint par le règlement de
donner la suite qu'elle a reçue.
Tout le monde en connaît les détails, il n'est
besoin d'aucun supplément d'information. Dans
ces conditions, je pense qu'il y a tout intérêt à en
finir le plus tôt possible avec ce très fâcheux in-
cident. (Très bien! très bien! sur divers bancs.)
M. Paul de Cassagnac. — J'ai le regret de ne
pas partager la manière de voir de M. Arène. Je
me permettrai de dire, sans modestie, que J'ai
quelque autorité en la matière, puisque par deux
fois les procureurs généraux, parmi lesquels se
trouvait l'intéressant ministre actuel des finances,
M. Dauphin, ont déposé contre moi des demandes
en autorisation de poursuites, que la Chambre a
accordées.
Dans ces occasions, et plus récemment encore,
la Chambre a toujours suivi la même procure;
je désire qu'elle l'a suive encore, car j'y vois une
garantie de notre droit, de notre liberté. La
Chambre a toujours voulu que les demandes en
autorisation de poursuites fussent renvoyées aux
bureaux pour la nomination d'une commission.
Pourquoi? Pour s'assurer des garanties. Il peut
arriver qu'un délit soit commis par un député et
donner lieu contre lui, de la part de la Chambre,
à un certain entraînement de colère. Or, il n'est
pas admissibla qu'un député, couvert de l'immu-
nité parlementaire, soit poursuivi par suite d'un
entraînement passionné de l'Assemblée. (Très
bien! très bion!)
Je demande qu'il ne soit pas fait pour M. de
Douville-Maillefeu une exception. Il a eu tort ou
raison, je n'ai pas à le juger; je n'ai d'autre préoc-
cupation que le souci de notre liberté, de notre
indépendance. Je demande donc à la Chambre
de conserver l'ancienne procédure qu'elle a tou-
jours suivie et qui est la bonne. (Très bien ! très
bien !)
M. le président. — J'ai, confor méœent au c~-
glement, annoncé que la demande en aaronSa*
Prix du numéro : Paris et déptertemeats : 15 centimes
Dimanche 5 avril 4S87
JOURNAL RÉPUBLICAIN
REDACTION
esser au Secrétaire de la Rédaction
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RÉGISSEURS. D'ANNOlVov -
MM. LAGRANGE, CERF ET J®1»
6, place de la Bourse, e -
BULLETIN
La Chambre a adopté hier le projet de
loi portant ratification de la convention
passée entre le ministre des postes et la
Compagnie des Messageries maritimes.'
Les adversaires du projet ont tenté un der-
nter effort pour faire repousser ia conven-
tion. Le Havre, représenté par M. Félix
Faure, a plaidé la cause de l'île de la Réu-
nion, qui se trouve lésée par le nouvel
itinéraire imposé à la Compagnie conces-
sionnaire.
Bordeaux insiste, par l'organe de M. Mé-
dItOD, pour le maintien obligatoire d'un
-service commercial avec la Plata. La
Chambre ne se laisse séduire ni par M.
Félix Faure, ni par M. Mérillon, ni par
M. Hanotaux, qui demandait que la du-
rée du contrat fût réduite de quinze à huit
années. A une très forte majorité la con-
vention est ratifiée,
Le véritable intérêt de la séance a été
dans la décision prise au sujet de la com-
mission du budget. M. le ministre des
:finances avait demandé à la Chambre de
procéder à l'élection de la commission
avant les vacances parlementaires. M. Rou-
vier, président de l'ancienne commission,
a proposé que cette élection eût lieu au
scrutin de liste et qu'une part équitable
fût faite à la minorité conservatrice dans
le choix des commissaires.
M. Madier de Monjau a combattu cette
motion, qu'il juge dangereuse et contraire
aux principes du régime parlementaire.
Domination des majorités, exclusion des
minorités, telle est la règle en vertu de
laquelle les représentants du peuple sont
élus. La Chambre élue selon ce principe
manque de logique si elle procède autre-
ment quand elle délègue ses pouvoirs.
Le discours de M. Madier de Montjau
fournit à M. Jolibols le prétexte qu'il cher-
chait pour affirmer les prétentions de la
Droite conservatrice. Il demande pour ses
amis, dans la commission du budget, une
représentation proportionnelle à leurs for-
ces numériques dans la Chambre. Les di-
vers groupes ont été fort divisés, on s'en
souvient, quand la question a été exami-
née dans les bureaux Au scrutin d'hier,
les mêmes dissentiments se sont produits;
peu s'en est fallu que Il proposition de M.
Rouvier nefût écartée *Elle ne l'a emporté
que de 25 voix. C'est peu, mais suffisant.
Il faut, en somme, ss féliciter de ce résul-
tat.
Un nouvel attentat vient d'être commis
contre le tsar, à Gatschina, résidence ac-
tuelle de la famille impériale. C'est un of-
ficier de la garnison qui s'est rendu cou-
pable de cette tentative criminelle. Par
un heureux hasard, le tsar a échappé au
danger qui le menaçait. L'opinion publi-
que sera unanime, dans tous les pays ci-
vilisés, à flétrir cette seconde agression,
qui se produit a si peu de distance de la
première. Mais les avis diffèrent sur les
conséquences que peut avoir ce triste in-
cident. En Autriche et en Allemagne, on
paraît redouter que l'attentat de Gatschi-
nia n'influence la politique extérieure du
cabinet russe.
On rappelle que c'est à la suite d'un in-
cident de cette nature que le tsar Alexan-
dre II, en 1876, déclara la guerre à la Tur-
quie. Est-il invraisemblable qu'Alexan-
dre III cherche à son tour, dans une nou-
velle guerre en Orient, une diversion aux
menées des nihilistes ? Cette opinion peut
se soutenir.
Toutefois, nous avons des raisons de
penser que le tsar, si irrité qu'il puisse-
être des progrès du nihilisme dans tou-
tes les classes de là société russe, persis-
tera dans la politique sage et prudente
qu'il a adoptée. Encore une fois, il fera
preuve de modération en épargnant à
l'Europe les horreurs d'une guerre dont il
est trop facile de prévoir les terribles con-
séquences.
Louis HENIUQUB.
INFORMATIONS mimiMES
Conseil des ministres
Le conseil des ministres s'est réuni hier
matin à l'Elysée, sous la présidence de M.
Grévy.
La séance, qui a été très courte, a été con-
sacrée exclusivement à l'expédition des affai-
res courantes. ',
Le conseil a décidé qu'il y avait lieu de
demander à la Chambre de nommer la nou-
velle commission du budget avant sa sépara-
tion, afin qu'elle puisse travailler pendant les
vacances de Pâqoes.
Le ministre de l'intérieur a fait signer un
décret portant dissolution du conseil munici-
pal de Saint-Ouen (Seine), qui a pris, à l'oc-
casion de la dissolution du conseil municipal
de Marseille et de l'anniversaire de la Com-
mune, la délibération que l'on sait.
Le ministre de la guerre a fait signer un
décret par lequel M. le colonel d'artillerie de
Saint-Germain est nommé général de bri-
gade.
Les ministres de l'instruction publique, des
travaux publics et des postes et télégraphes
ont fait savoir qu'ils partiraient le 8 avril
pour l'Algérie et la Tunisie.
La réforme pénale
La eommission extra-parlementaire char-
gée de préparer la réforme du Code pénal
s'est réunie au ministère de la justice. Après
une allocution de M. le garde des sceaux, nne
sous-commission a été nommée, que prési-
dera M. Ribot et qui se compose de MM.
Bouchez, procureur général à la cour de
Paris ; Chauffour, conseiller d'Etat ; Herbette,
directeur de l'administration pénitentiaire ;
Jacquin, directeur des affaires criminelles ;
Léveillé, professeur à l'Ecole de droit ; Merlin,
sénateur ; Tanon, conseiller à la cour de cas-
sation. La sous-commission s'occupera
d'abord de la revision du système des peines.
M. Le Myre de Vilers
Sur le désir de M. Flourens, ministre des
affaires étrangères, M. Le Mvre de Vilers,
résident général de France à Madagascar,
qui avait l'intention de rentrer en France et
de prendre un repos bien gagné, ne prendra
qu'au mois de novembre le congé qu'il a
demandé.
L'Exposition de 1889
Voici les bureaux des comités do l'Exposi-
tion universplle qui ont été élus dans la
séance du 29 mars, dans les classes 6, 7, 8,
9, 10, il, 12, 15, 16, 17 et 27:
Présidents : MM. Mézières, Zévort, Gréard.
Delalain, Laroche-Joubert, Rossigneux, A.
Davoine, Faye, vice-amiral Cloué, A. Thomas,
Emile Muller.
Vice-présidents : MM. Buisson, Camille Sée,
Cauvet, Alary, Choquet, Lechevalier-Chey-
nard, Georges Lévy, Laussedat, Bouquet do
la Grye, Gaud, Genest.
Rapporteurs : MM. Maillé, Jacquemard, An-
got, René Fouret, Gratiot, Germain Bapst,
L00n Vidal, Manceron, Maunoir, Dumoulin
d, Frédilly, Ser.
Secrétaires : MM. Chariot, Gay, Delorme,
J. Hetzel, Fortin (Charles), Bouasse-Lebel,
Autrau, Teisserenc de Bort, Callandreau,
Blondel, Beau.
Une heure a suffi hier, à la Chambre,
pour prendre trois bonnes résolutions.
Elle a décidé, en effet : 1° Qu'elle éli-
rait la commission du buget demain
lundi; 2° qu'elle la nommerait au scru-
tin de liste en faisant une part à la
Droite; 3° que les rapports de la com-
mission devraient être déposés avant le
1er juillet. La première et la dernière de
ces résolutions montrent que la Cham-
bre est animée d'un sincère désir de ne
pas s'exposer, cette année, à des aven-
tures pareilles à celles qui ont marqué
la discussion du budget de 1887 et d'em-
pêcher les retards, qui depuis longtemps
se produisent chaque année, de se re-
nouveler.
La commission qui va être nommée
demain pourra se mettre immédiate-
ment à l'œuvre, et les rapporteurs spé-
ciaux pourront profiter des vacances
parlementaires pour avancer leur tra-
vail. Si la Chambre est saisie des rap-
port le 10r juillet, elle ne pourra peut-
être pas terminer la discussion du bud-
get dans la session ordinaire. Elle aura
du moins le loisir de l'avancer suffisam-
ment pour être en mesure de l'achever
au commencement de la session d'au-
tomne, et le Sénat aura, à son tour, un
délai suffisant pour procéder à un exa-
men sérieux de notre situation finan-
cière.
Quant à la nomination de la com-
mission au scrutin de liste, nous avons
déjà fait connaître notre sentiment sur
ce point. Des choix arrêtés à l'avance,
sans qu'il y ait à tenir compte de la
répartition des députés entre les bu-
reaux, nous paraissent l'emporter, sur
la méthode ordinaire, de toute la supério-
rité que la raison peut revendiquer sur
le hasard. L'admission de membres de
la Droite dans la commission est une
mesure libérale que la Chambre a eu
raison d'adopter. Puisque les droitiers
ont la prétention de représenter trois
millions d'électeurs, il est juste qu'ils
aient part au contrôle que la commis- j
sisn du budget exerce sur les finances
publiques, et puisque, d'autre part, ils
ne cessent de crier au gaspillage et au
désordre financier, il n'est pas mau-
vais de les associer, pour une part, à la
responsabilité qu'ils rejettent si allè-
gremenf et avec une apparence de
raison — sur les seuls républicains.
Nous nous étonnons que ces motifs
n'aient pas été compris de tout le monde
et que M. Madier de Montjau, par exem-
ple, soit monté à la tribune pour défen-
dre, avec une exagération manifeste, la
théorie de la domination exclusive de la
majorité. Que les majorités doivent
l'emporter sur les minorités, ce n'est
pas un principe, c'est un fait évident.
Il n'implique pas, cependant, l'anéantis-
sement des minorités. Celles-ci ont le
droit de se faire entendre et de soutenir
leurs opinions.
La représentation de la Droite dans
la commission du budget n'a donc pas
les inconvénients que l'on a voulu lui
attribuer. Elle ne les aurait que dans le
cas où, la représentation des divers
groupes de gauche et de droite étant
proportionnelle à leur importance nu-
mérique , la commission se trouverait
composée de telle manière que la Droite
pourrait détenminer la majorité et où,
par conséquent, au lieu d'être simple-
ment admise à exercer un contrôle lé-
gitime, elle deviendrait prépondérante.
C'est pour cette raison que le principe
de la proportionnalité ne nous paraît pas
devoir être admis.
La majorité est, en définitive, maî-
tresse de l'élection: elle peut faire à la
minorité la part qu'elle juge convena-
ble. Cette part doit être équitable, c'est-
à-dire qu'il ne serait pas assez, sur
trente-trois sièges, d'en réserver un ou
deux à la Droite ; mais quatre ou cinq
nous semblent bien suffisants, et la
Droite elle-même, sachant qu'il ne dé-
pend que de la majorité de l'exclure
complètement de la commission, ne
doit pas montrer des exigences trop
grandes, lesquelles ne pourraient avoir
d'autre conséquence que de faire reve-
nir le parti républicain sur les inten-
tions conciliantes qu'il vient de mani-
fester.
QUESTIONS DU JOUR
ANTOINE
Nous ne protesterons pas contre une
décision au bas de laquelle tout le
monde lit, sans l'avoir vue, la signature
de M. de Bismarck. Mais nous saluons
de tout notre cœur, et plus que jamais,
le vaillant député de Metz, dans cet exilé
que l'on chasse du territoire qu'il repré-
sente en même temps que de son pays
natal. Et nous remarquerons cependant
que, depuis son entrée dans le Reichs-
tag, où il n'a pas encore pris la parole,
le député Antoine n'a rien fait pour
prêter le flanc à la vengeance. Sa con-
duite, son langage ont été les mêmes
qu'ils n'ont pas cessé d'être depuis
quinze ans, depuis 1872, l'année où il
débuta da$s la vie publique en entrant
au conseil municipal de Metz. Il avança
, rapidement dans l'estime de ses conci-
toyens ; il fut donc élu député en 1882,
réélu en 1884, élu enfin pour la troisième
fois en 1887, malgré la rage que l'ad-
ministration prussienne fit contre lui.
Voilà son histoire, et voilà sans doute
pourquoi on ne lui pardonne, à Berlin,
ni sa popularité ni son courage.
C'est pourtant son droit d'être député.
J'irai plus loin : c'est son droit, — son
droit d'annexé, — d'être protestataire.
Le traité de Francfort a engagé la
France et le gouvernement français
envers l'Allemagne ; il n'a pu lier ni les
cœurs ni les consciences des Alsaciens
et Lorrains qui ont refusé d'opter et qui
ont dit : « Nous restons et nous protes-
tons, parce que nous avons été livrés
par la force. » Aujourd'hui encore, à
moins qu'un décret impérial n'enlève
tout droit de vote à l'Alsace-Lorraine,
il n'y a nul moyen, pour les Allemands,
d'empêcher les annexés de protester
par la voie légale, du moment qu'on
leur a laissé des conseils municipaux,
une Délégation et des sièges au Reichs-
tag. Autant de votes, autant de plébis-
cites. Et ce seraient encore des plébis-
cistes de protestation, quand même les
candidats n'écriraient aucune profession
de foi et ne prononceraient aucun dis-
cours. On saurait toujours ce qu'ils sont.
Si c'est par vengeance, sous l'impul-
sion de vieux ressentiments et de haines
centenaires, que l'Allemagne traite ainsi
les provinces que lui ont livrées ses vic-
toires, alors nous n'avons point de ré-
flexions à émettre : c'est un fait à en-
registrer dans la série des horreurs
historiquei. Mais si l'Allemagne veut
germaniser sa conquête, comme elle
s'en vante, elle devrait au moins s'ap-
pliquer à tenir compte de ce que les
Alsaciens-Lorrains ont dans l'âme. A-t-
elle oublié, pour ne pas remonter plus
haut, ce qui se passa. sur son territoire
voici un peu moins de cent ans ? Lors-
que Napoléon partagea le Palatinat et
fit la part belle à la France, les Alle-
mands annexés n'éprouvèrent-ils ni dé-
chirement, ni désespoir, ni rage?
L'Allemagne s'est vengée du traité de
Lunéville en nous prenant, par les pré-
liminaires de Versailles et par le traité
de Francfort, tout ce qu'elle a voulu, à
titre de revanche et de représailles.
Soit ! Mais il faut bien qu'elle se dise
qu'elle a pris quelque chose de trop : la
Lorraine et l'Alsace, et qu'elle ne les
germanisera pas plus que nous n'avons
francisé le palatinat rhénan. L'une et
l'autre épreuve, celle de 1801 et celle de
1871, sont devenues la réciproque con-
damnation de la politique de conquête.
Ces leçons ont servi au dernier vaincu ;
mais serviront-elles au dernier vain-
queur? Non, quant au temps présent.
Et pour le futur congrès international
de la paix, il ne se dessine encore, au
bout d'un horizon lointain, que dans une
brumeuse perspective. Il ne reste donc
maintenant aux populations annexées
que le droit suprême de protester au
nom de l'humanité et de la patrie, seul
moyen qu'elles aient de préparer des
temps meilleurs. pour le vingtième
siècle peut-être. Ainsi feront-elles, en
dépit des expulsions. Le député pros-
crit aura sa légende, qui restera gravée
dans tous les cœurs.
EUG. LIÉBERT.
Le Sénat a opposé aux projets relatifs à
la séparation du conseil général de la
Seine du conseil municipal de Paris et
aux élections municipales parisiennes la
force d'inertie. Le rapport sur le premier
de ces projets est prêt ; il a été déposé
hier. Il suffirait que le Sénat en ordonnât
la lecture pour qu'il fût inséré aujourd'hui
à l'Officiel et que la discussion pût s'en-
gager demain. La lecture n'a pas été de-
mandée ; rien n'a été fait pour abréger les
lenteurs de la procédure ordinaire : il en
résulte que le projet ne pourra pas venir
en discussion avant les vacances. C'est un
enterrement silencieux.
Quant à la commission chargée d'exami-
ner le projet concernant la substitution du
scrutin de liste par arrondissement au
scrutin de quartier, elle n'a même pas
eherché à faire discuter le projet dont elle-
est saisie. Elle a commencé par déclarer
qu'il y avait connexité entre le mode élec-
tectoral et la disjonction des conseils, et
par décider qu'elle n'examinerait la ques-
tion qui lui est soumise qu'après que le
Sénat aurait statué sur celle de la sépara-
tion. Celle-ci étant enterrée, l'autre se
trouve, du même coup, ajournée indéfini-
ment.
La connexité des deux affaires n'est ce-
pendant pas à ce point étroite que la ques-
tion électorale ne puisse être réglée toute
seule. Oa aurait pu soutenir que, dans les
oonditions actuelles, le conseil général de
la Seine n'étant que le conseil municipal
auquel viennent s'ajouter huit représen-
tants des cantons suburbains, il n'y avait
pas lieu d'augmenter de seize le nombre
des conseillers municipaux. On pouvait
du moins décider que les conseillers muni-
cipaux seraient élus au scrutin de liste par
arrondissement et que la durée de leur
mandat serait de quatre ans, comme celle
de tous les conseillers municipaux de
France. Le Sénat avait prisjadis l'initiative
d'une réforme électorale de ce genre pour
Paris. Il avait estimé, alors, que le scrutin
de liste par arrondissement présentait des
avantages certains sur le mode actuel. Les
avantages qu'il avait prévus à cette époque
ne sont pas moins certains à l'heure pré-
sente. Pourquoidonc le Sénat se donre-t-il
aujourd'hui le tort de reculer devant une
mesure qui avait, il y a quelques années,
ses sympathies?
Quoi qu'il en soit, les prochaines élec-
tions municipales vont être faites suivant
la loi actuelle. Les conseillers municipaux
qui vont être élus suivant un mode d'élec-
tion condamné, sous la menace d'une pro-
chaine dissolution du conseil, n'obtien-
dront qu'an mandat en quelque sorte ca-
duc, et, d'autre part, la question d'organi-
sation muniii pale ne se trouvant pas en-
gagée aujourd'hui, il est à craindre que la
réforme d'ensemble ne se trouve ajournée
indéfiniment. Entre oeux qui, voulant
tout, protestaient contre la réforme par-
tielle, et ceux qui ne veulent rien, ce ne
sont peut-être pas les premiers qui ont le
plus à se féliciter de la résolution du
Sénat.
Les réclamations des Étudiants
Le rétablissement des droits d'ins-
cription dans les Facultés de l'Etat a
mis en émoi un certain nombre d'étu-
diants, qui se sont réunis, avant-hier,
salle Jussieu, pour protester contre
cette mesure. Il n'y a point de bonnes
réunions, au quartier latin, sans quelques
fumisteries. On y a entendu, comme
toujours, des cris étranges et des pro-
positions incohérentes, qui tranchent
joyeusement sur la monotonie de cette
fin de carême. Que ceux qui n'ont pas
eu vingt ans jettent la pierre à cette jeu-
nesse ! Il nous semble, au contraire, que
leur assemblée a été plus sérieuse et
plus sage qu'elle n'en avait l'air. D'a-
bord on ne s'y est point injurié, on ne
s'y est point colleté, on n'a point dû re-
courir au procureur général, retenu dans
les couloirs de la Chambre. Nos étu-
diants ont heureusement dérogé, en
cette occasion, aux traditions du régime
parlementaire. Ils ont même écarté avec
un certain ensemble toutes les motions
excentriques ou violentes.
Messieurs les anarchistes avaient été
priés poliment de rester chez eux. On n'a
pas oublié sur la rive gauche l'enterrement
de Jules Vallès. Un ami du « chambaro »
a proposé d'aller faire un monôme gi-
gantesque devant le ministère des finan-
ces et de « conspuer Dauphin ». Un au-
tre a parlé d'une grève générale qui dé-
sorganiserait les services des hôpitaux.
Mais il a paru qu'on devait laisser la
première manifestation aux jeunes po-
taches en quête d'un jour de congé sup-
plémentaire, et la seconde avait pour
premier inconvénient de faire payer aux
malades d'abord et aux étudiants en-
suite les pots qu'ils n'avaient point cas-
sés.
Le bon sens a bien vite repris le des-
sus. On s'est prononcé pour une péti-
tion « monstre » à la Chambre des dé-
putés. Un comité a été nommé pour la
rédiger et exposer la situation des jeu-
nes gens qui, par le rétablissement des
frais d'inscription, pourraient être con-
traints d'abandonner leurs études. Les
étudiants sont ainsi entrés dans la voie lé-
gale, la seule bonne. La carrière est
ouverte à la libre discussion et par con-
séquent à l'entente.
Est-il nécessaire d'admettre tout d'a-
bord comme un axiome la gratuité ab-
solue de l'enseignement supérieur? Cha-
cune proposition, au contraire, n'aurait,
il nous semble, plus grand besoin d'être
démontrée. On est parvenu à grand'-
peine, après une lutte opiniâtre, à faire
pénétrer ce principe dans l'enseigne-
ment primaire. Mais on n'en est pas en-
core arrivé à demander qu'il soit appli-
qué à l'enseignement secondaire. L'ins-
truction dans les lycées et les collèges
n'est pas donnée gratuitement.Et cepen..
dant, par l'institution des bourses et les
dégrèvements de frais d'études, on ou-
vre largement la porte de ces établisse-
ments aux enfants dont les familles sont
hors d'état de payer. Ne voit-on pas ce-
pendant qu'avant de décréter la gra-
tuité intégrale dans l'enseignement su-
périeur, il faudrait commencer par
l'établir dans l'enseignement secon-
daire ? Or, le budget s'écroulerait bien-
tôt sous une pareille charge.
Ce qu'il est juste de souhaiter, c'est
que, dans l'enseignement supérieur,
les jeunes gens soient mis à même,
comme dans l'enseignement secondaire,
de pousser leurs études aussi loin que
possible, sans que la situation précaire
de leurs familles ou les exigences de
l'Etat opposent un obstacle insur-
montable à leurs légitimes ambitions.
Eh bien ! c'est précisément ce que se
sont proposé les auteurs du projet qui
rétablit les droits d'inscription
Une première catégorie d'étudiants
est d'abord mise à part et exemptée de
tous frais d'études et de bibliothèque.
Elle comprend les maîtres répétiteurs
et les boursiers de l'Université. Sur le
nombre des étudiants qui restent alors
astreints au payement des droits, un
dixième pourra en être également dis-
pensé, sur la désignation du doyen ou
du directeur, après avis du conseil de
la Faculté ou de l'Ecole. On crée donc,
en définitive, une bourse sur dix ins-
criptions, en faveur des jeunes gens
méritants et peu fortunés. Cette bourse
sera en même temps un encouragement
au zèle et au travail, car elle pourra
être retirée à quiconque s'en montre-
rait indigne. Très sage précaution, en
somme, car dans l'enseignement supé-
rieur, comme dans l'enseignement se-
condaire, il n'y a pas lieu d'encourager
les flâneurs et les étudiants pour rire.
Un seul point reste donc en discus-
sion : Le nombre de bourses accordé
par le décret répondra-t-il à tous les
besoins ? Il a paru suffisant aux mem-
bres du conseil de l'instruction publi-
que, où les professeurs de l'enseigne-
ment supérieur se trouvent en majorité.
Il paraît également suffisant à M.
Brouardel, doyen de la Faculté de mé-
decine, et à M. Beudant, doyen de la
Faculté de droit. Les étudiants ne con-
testeront point la compétence ni la
portée de ces affirmations.
Mais nous leur accorderons volontiers
que tous les chiffres arrêtés à l'avance
ont quelque chose d'arbitraire. Il est
possible qu'on soit amené, ici, à rester
au-dessous du dixième des étudiants à
exonérer,là, à s'élever un peu au-dessus.
Toutes les controverses à cet égard
seraient aujourd'hui prématurées. L'ex-
périence seule pourra fournir des
données certaines.
Nous voudrions seulement qu'on fût
bien fixé, dès maintenant, sur deux
points : l'un, que la gratuité absolue de
l'enseignement supérieur n'est ni logi-
que ni équitable. L'idéal n'est point que
personne ne paye, mais que ceux-là
seulement soient dispensés de payer qui
n'en ont pas les moyens. L'autre point,
c'est que, si le chiffre des exemptions
actuellement accordées est reconnu in-
suffisant, il y soit pourvu au plus tôt
par l'adoption d'un plus large système
de dégrèvements. A cet égard, on peut
compter aussi bien sur les conseils uni-
versitaires que sur le Parlement et les
ministres Rien ne sera fait pour porter
atteinte à l'esprit démocratique qui
anime toute notre législation scolaire.
ANDRÉ BALZ.
COURRIER PARISIEN
Le tueur de femmes de la rue Moni-
taigne a le privilège de retenir l'atten-
tion publique. Chaque Parisien , en ou-
vrant son journal, porte aussitôt les
yeux sur la rubrique du triple assassi-
nat et cherche impatiemment quel nou-
veau détail ajoute à la certitude de la
culpabilité de Pranzini. Ce bandit de-
meure immuable dans ses dénégations :
rien ne le trouble dans ses mensonges,
ni l'évidence des faits ni l'accumulation
des preuves. Il semble qu'aussitôt ar-
rêté il ait repris tout son sang-froid, sa
puissance de bête féroce, la plénitude
de sa ruse. Devinerait-il que son audace
dans le mensonge peut jeter un doute
dans l'esprit de ses juges, et donner le
change à l'opinion publique? En réalité,
le doute subsiste, grâce à cette attitude,
dans l'esprit de nombre de gens, et j'en-
tends répéter tous les jours, à ce propos,
qu'on ne saurait condamner à mort un
accusé qui n'avoue pas.
Le plus clair, dans cette affaire, est la
niaiserie lamentable de la police. A
quels pauvres hères est confié le soin
de veiller sur nos biens et nos person-
nes, la recherche des malfaiteurs. La
maladresse des gardiens de la grande
ville serait risible si elle n'était pas
aussi inquiétante. Sur le lieu du triple
meurtre, ont été laissées une ceinture et
une manchette portant le nom deGeiss-
ler. Les assassins, pas plus que les par-
ticuliers, n'ont accoutumé d'écrire leur
nom sur leur linge. Au lieu d'éventer
le piège grossier de cet oubli volon-
taire, le chef de la Sûreté, malin comme
Gribouille, accueille cette « carte de
visite de l'assassin », laissée à son in-
tention. Il se lance sur cette piste, et
comme Geissler est un nom très ré-
pandu, on ne tarde pas à signaler dans
un garni le passage d'un individu de ce
nom, disparu la veille. Plus de doute,
ce garçon coiffeur, photographe ou
peintre est le coupable; son signale-
ment, aussi précis que sa profession, est
télégraphié dans toutes les directions.
Cependant, dans les papiers de Marie
Regnault se trouve la carte d'un certain
Pranzini. Aussitôt un agent, — d'au-
cuns prétendent M. Taylor lui-même,—
se rend au domicile désigné, cause avec
ce Pranzini et le quitte sans avoir conçu
le moindre soupçon. Or, il eût suffi de
regarder ses mains et les coupures en-
core saignantes Dour l'arrêter sur-le-
champ. Mais ce n'était point Geissler, et
le chef de la police et ses aides n'a-
vaient que du Geissler dans la cervelle.
Ce n'est pas tout : un policier de la
vieille école eût pris des renseigne-
ments sérieux sur ce client et, tout en
lui faisant bonne mine, eût attaché un
agent secret à chacun de ses pas. Ainsi
l'on aurait surpris toutes les démar-
ches de Pranzini, on aurait saisi ayant
l'expédition la boîte à bijoux, on eût
arrêté l'homme en temps utile. C'était
l'enfance du métier; mais cet art enfan-
tin manque au grand enfant chargé de
la police de sûreté et il n'est d'égal à
sa naïveté que son acharnement sur
une fausse piste. Il lui faut son Geiss-
ler, il n'en veut pas démordre et il fait
filer pendant trois jours M. R. G.,
un Parisien connu, très galant homme,
dont la maîtresse était en correspon-
dance amicale avec Marie Regnault. Le
quatrième jour, M. R. G., qui ne se
doute de rien, est mandé rue Montai-
gne par le juge d'instruction. Tout
étonné, il se rend à cette convocation.
Que devient-il, en entendant M. Guillot
l'interpeller ainsi : — Eh bien ! Gaston,
que faisiez-vous dans la nuit de mer-
credi à jeudi? Cette question, la vue
de la chambre, du lit inondés de sang,
frappent M. G. de stupeur; il explique
la méprise d'une voix entrecoupée et H
garde de cette scène une impression
d'horreur qui durera.
Pranzini a quitté Paris tranquillement,
et si, à Marseille, il n'eût pas perdu la
notion du sens commun, le triple assas-
sinat de la rue Montaigne restait impuni
comme les précédents des rues Cau-
nartin, Bergère et Condorcet. La police
parisienne était içapuissante et bouf-
fonne. Mais une sorte de délire partieu-»
lier aux criminels s'est emparé de
Pranzini, et, stupidement, il se dénonce
aux recherches en offrant de vendre une
montre d'aspect particulier signalée
par tous les journaux, et dans une mai-
son dont les tenanciers sont notoire-
ment atfiliés à la police. Il est arrêté.
D'abord, à Paris, on refuse de croire à
la culpabilité de cet individu; M. Taylor
montre de la mauvaise humeur et ne
met aucun zèle à seconder son collègue
de Marseille. Mme Sabattier, la maî-
tresse de Pranzini, lui crée un alibi,
soutient qu'il ne l'a point quittée la nuit
du meurtre, sans que le juge insiste
pour lui arracher la vérité. Enfin, quand
elle s'est décidée à parler, lorsque les
preuyes s'ajoutent aux indices pour ac-
cabler l'assassin, lorsque le ridicule de
la fable Geissler éclate, le chef de la
Sûreté et le juge d'instruction trouvent
cette admirable excuse : c'est la presse
qui a causé tout le mal; les journaux ont
entravé l'action de la police et les pro-
grès de l'enquête. Ils n'hésitent point à
communiquer cette affirmation auda-
cieuse pour cacher leurs fautes et leur
confusion.
Or l'enquête intelligente, habile, me-
née par les reporters des journaux, ac-
cuse hautement l'incapacité de la po-
lice. Ce sont nos confrères qui ont fourni
à l'instruction les plus préeieux élé-
ments. On ignorait encore quel était
Pranzini, qu'un journal du matin recons-
tituait toute la vie, étalait les antécé-
dents, racontait les menées suspecter
de l'homme de Marseille, l'avant-veille
du triple meurtre, et établissait ainsi la
culpabilité sur des documents irréfraga-
bles. La police était distancée par un
reporter et le juge priait le journaliste
de bien vouloir lui apporter ses rensei-
gn ements. Et à une seconde invitation du
même genre, notre confrère répondait
fièrement qu'il tenait à honneur de ren-
seigner ses lecteurs, mais se refusait à
faire œuvre d'agent de police. Aider à
la découverte de la vérité et se mêjer
personnellement aux recherches jie
sont point traits de même nature. Ainsi
tombent, à l'examen de fait, les insinua-
tions désobligeantes pour la presse.
contraire, son rôle est utile, efficace, puis*
qu'elle signale à des millions de lec-
teurs les détails caractéristiques d'un
assassin et provoque les révélations et
les témoignages.
J'irai plus loin : je crois nos reporters
bien supérieurs aux agents ordinaires
dans la découverte des mobiles d'un
crime et de la personnalité d'un assas-
sin. Ils se passionnent à leur tâche, ils
joignent à la connaissance spéciale du
milieu parisien un esprit idductif tout
plein de subtilité et de ressource. Le
policier de profession est habitué aux.
recherches dans les bas-fonds de la
société parisienne, il sait les caba-
rets borgnes où se réunissent les
malfaiteurs, il suit instinctivement les
récidivistes, il a des intelligences dans
les repaires et la population dès
garnis suspects ; aussi les mauvais
coups de ce public-là lui sont fami-
liers et il en trouve sans peine \ert
auteurs: à des marques certaines il Mé-
connaît son criminel. Mais si le meur-
trier est en dehors de l'action ordinaire
de la police, s'il est d'apparences bour-
geoises, sans casier judiciaire, sans
fréquentation oblique, les agents sont
déroutés ; ils n'ont plus aucun point de
repère, ils errent, à droite, à gauche,
presque toujours sur une faussse piste.
HErfty BAUER.
LE PARLEMENT
stANCE DE LA CHAMBRE
Demande en autorisation de poursuites
L'incident regrettable que nous avons ra-
conté ces jours-ci a été porté hier devant la
Chambre. Voici, d'après le compte rendu ana-
lytique, les observations échangées à ce sujet
par MM. Floquet, président de la Chambre,
Emmanuel Arène et Paul de Cassagnac :
M. le président. — J'ai reçu de M. le garda
des sceaux une demande de poursuites contre
deux membres de la Chambre.
Cette demande sera imprimée, distribue et
renvoyée à l'examen des bureaux.
M. Èramannei Arène. — Je demande la dis-
cussion immédiate. Il s'agit, vous le savez, d'une
très regrettable affaire à laquelle le bureau de la
Chambre s'est vu contraint par le règlement de
donner la suite qu'elle a reçue.
Tout le monde en connaît les détails, il n'est
besoin d'aucun supplément d'information. Dans
ces conditions, je pense qu'il y a tout intérêt à en
finir le plus tôt possible avec ce très fâcheux in-
cident. (Très bien! très bien! sur divers bancs.)
M. Paul de Cassagnac. — J'ai le regret de ne
pas partager la manière de voir de M. Arène. Je
me permettrai de dire, sans modestie, que J'ai
quelque autorité en la matière, puisque par deux
fois les procureurs généraux, parmi lesquels se
trouvait l'intéressant ministre actuel des finances,
M. Dauphin, ont déposé contre moi des demandes
en autorisation de poursuites, que la Chambre a
accordées.
Dans ces occasions, et plus récemment encore,
la Chambre a toujours suivi la même procure;
je désire qu'elle l'a suive encore, car j'y vois une
garantie de notre droit, de notre liberté. La
Chambre a toujours voulu que les demandes en
autorisation de poursuites fussent renvoyées aux
bureaux pour la nomination d'une commission.
Pourquoi? Pour s'assurer des garanties. Il peut
arriver qu'un délit soit commis par un député et
donner lieu contre lui, de la part de la Chambre,
à un certain entraînement de colère. Or, il n'est
pas admissibla qu'un député, couvert de l'immu-
nité parlementaire, soit poursuivi par suite d'un
entraînement passionné de l'Assemblée. (Très
bien! très bion!)
Je demande qu'il ne soit pas fait pour M. de
Douville-Maillefeu une exception. Il a eu tort ou
raison, je n'ai pas à le juger; je n'ai d'autre préoc-
cupation que le souci de notre liberté, de notre
indépendance. Je demande donc à la Chambre
de conserver l'ancienne procédure qu'elle a tou-
jours suivie et qui est la bonne. (Très bien ! très
bien !)
M. le président. — J'ai, confor méœent au c~-
glement, annoncé que la demande en aaronSa*
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