Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1887-04-01
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32757974m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 01 avril 1887 01 avril 1887
Description : 1887/04/01 (A18,N5559). 1887/04/01 (A18,N5559).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7559643m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/04/2013
Dix-huitième alinéa. - N" S559
Prix du numéro : Paris et détnriements: 15 centimes
Vendredi 1" avril 18ST
JOURNAL RÉPUBLICAIN
REDACTION
9adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit ;
16, rue Cadet, IE3 -
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A.-EDOUARD PORTALIS
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Adresser les Lettres et Mandats à l'Administrateur
16; rue Cadet, a
,ii ^"i—r-n-a
EN VENTE A LONDRES
Et Abonnements pour l'Angleterre
Au bureau clil XIXe Sièolé
76, Finsbury Pavement, E. C.
RBGISSSURS D'ANXOlTov
MM. LAGRANGE, CERF ET C1»
6S place de la Bourse, e
BULLETIN
, La Chambre a repris hier la discussion
de la convention relative au service postal
de l'Australie et de l'Indo-Chine. M. Félix
Faure s'est élevé contre le chiffre de la
subvention allouée à la compagnie chargée
de ce service. Le député de la Seine-Infé-
rieure a peine à oublier qu'il représente
les intérêts du Havre. En revanche, M. An-
tide Boyer, député de Marseille, n'a pas
assez de louanges pour le ministre des
postes qui a signé la convention, et pour
la compagnie qui a l'heureuse fortune
d'abriter sa flotte dans les bassins de la
Joiiette.
Bordeaux réclame, par la bouche. de M.
Mérillon, une nouvelle ligne qui desservi-
rait la côte occidentale d'Afrique et aurait
pour point de départ Pauillac, l'avant-
port de Bordeaux. Il faut s'étonner que
Saint-Nazaire n'ait rien demandé. En re-
vanche, la colonie de l'Inde française a
fait entendre les plaintes les plus vives
par l'organe de M. Pierre Alype, son dé-
puté. A l'en croire, le nouvel itinéraire de
la ligne d'Australie ruine les ports de
l'Inde, Mahé, Karikal, l'île de la Réunion
et Obock, et, d'une façon générale, toutes
nos possessions françaises de l'oeéan In-
dien.
Il est difficile de contenter tout le
monde, Marseille et le Havre, Bordeaux et
le député de l'Inde.
Au fond, toutes ces critiques n'ont pas
grande portée : l'intérêt local le dispute à
l'intérêt général. M. le ministre des postes
démontre, par d'excellents arguments, que
la convention est avantageuse, qu'elle per-
mettra de soutenir la concurrence des
compagnies anglaises et allemandes et as-
surera la prépondérance de notre pavillon
dans l'océan Indien et dans le Pacifique.
La Chambre statuera définitivement sa-
medi.
Le Sénat a adopté les crédits supplémen-
taires, après une discussion toute platoni-
que sur les droits financiers du Sénat. La
question n'est pas nouvelle ; il semblait
qu'elle fût élucidée ; elle ne l'est pas, pa-
rait-il, au gré de M. Buffet et de M. Faye,
qui reprennent ce thème usé. Les crédits
* sont néanmoins votés par 215 voix con-
tre. 2. Opposition douce. -
La conclusion de la triple alliance entre
l'Allemagne, l'Autriche et l'Italie, a causé
quelque émoi en Europe ; on en redoute
d'autant plus les effets qu'on en connaît
plus mal les clauses secrètes.
Pour l'instant, les préoccupations sont
ailleurs. Il s'agit d'une autre alliance qui
a quelque difficulté à se nouer, ou, plus
exactement, à se renouer ; car, en réalité,
c'est le renouvellement d'un traité périmé
depuis hier, qui se négocie péniblement
sans aboutir aussitôt qu'on l'eût désiré à
Berlin.
Le chancelier a réussi, jusqu'à présent,
& maintenir l'harmonie entre l'Autriche et
la Russie en les emprisonnant dans un
traité d'alliance dont il a réglé toutes les
conditions. L'Autriche, liée déjà vis-à-vis
de l'Allemagne, est prête à accepter une
nouvelle alliance avec la Russie pour
complaire au chancelier aliemand, qui
joue le principal rôle dans cette association
à trois. Le malheur est que la Russie n'a
aucune hâte de prendre des engagements
qui gêneraient éventuellement sa liberté
d'action. La diplomatie allemande s'est em-
ployée activement à opérer un rapproche-
ment entre la Russie et l'Autriche; mais
ces tentatives n'ont pas eu grand succès.
A la vérité, le tsar et l'empereur d'Autri-
che se font de mutuelles démonstrations
d'amitié dans les circonstances solennel-
les ; mais il y a entre les deux peuples
une barrière presque aussi infranchissa-
ble qu'il y a de haine chez les Russes
contre les Allemands, — et ce n'est pas
peu dire.
Le bill irlandais a toute chance d'être
adopté par la Chambre des communes.
Après le discours de M. Chamberlain, le
vote était probable ; il est aujourd'hui
certain. Dans une réunion tenue hier à
Londres par les libéraux unionistes, lord
Hartington a engagé son parti à appuyer
le cabinet dans les circonstances difficiles
qu'il traverse. Il a, d'ailleurs, laissé entre-
voir que le gouvernement prendrait en con-
sidération, dans les bureaux, les objections
que quelques membres veulent présenter
au sujet de certaines clauses du projet de
bill sur la législation criminelle en Ir-
lande. •
M. Chamberlain a appuyé les vues de
lord Hartington.
La réunion a résolu de voter la pre-
mière lecture du bill.
Pauvre Irlande 1
LOUIS BBNRIQUB.
_————————— - ——————————
INFORMATIONS PAR TICULIBRES
Conseil des ministres
Les ministres ont tenu conseil hier, au mi-
nistère de l'intérieur, sous la présidence de
M. René Goblet.
La séance, qui a été très courte, a été con-
sacrée entièrement à l'expédition des affaires
courantes.
M. Goblet a rendu compte des incidents qui
se sont produits au conseil municipal de Pa-
ris, et s'est félicité de ce que cette assemblée,
à la différence du conseil municipal de Mar-
seille, ait fait preuve de respect de la léga-
lité, en écartant les vœux qui lui étaient sou-
mis au sujet de l'anniversaire du 18 Mars.
Les ministres ont ensuite examiné les di-
verses questions qui doivent être discutées et
résolues avant la séparation des Chambres
pour les vacances de Pâques.
A la Chambre, le gouvernement demandera
le vote du projet de loi portant application
d'une surtaxe de 10 francs sur les sucres raf-
finés.
Au Sénat, le vote des deux projets relatifs
au conseil général de la Seine et au aonsell
-municipal de Paris. »
Le conseil municipal de Saint-Ouen
A l'issue du conseil des ministres, M. Goblet
a reçu hier le préfet de la Seine, qui lui a
communiqué le texte de la délibération du
conseil municipal de Saint-Doen, par laquelle
cette assemblée déclare se solidariser avec le
conseil municipal de Marseille pour glorifier
l'insurrection du i8 mars.
; M. Goblet a décidé de faire signer samedi
au conseil des ministres un décret portant
dissolution du conseil municipal de Saint-
Ouen.
Les employés du ministère de la guerre
Le bruit court que tous les employés civils
du ministère de la guerre seraient remplacés
progressivement et sous peu par des mili-
taires en activité de service.
Les récidivistes et Diégo-Suarez
Une note publiée par plusieurs journaux
donnait à entendre que l'administration des
colonies se disposait à envoyer des récidi-
vistes à Diégo-Suarez, quand l'opposition du
ministre des affaires étrangères l'a obligée de
renoncer à ce projet.., •
Cette nouvelle est inexacte.
Il n'a jamais été question d'établir à Diégo-
Suarez un pénitencier. L'administration a
seulement prescrit d'étudier dans quelles
conditions la main-d'œuvre pénitentiaire pour-
rait y être temporairement utilisée pour
l'exécution de certains travaux publics.
Aucune décision n'a été prise à cet égard,
et il ne sera possible d'en prendre une que
quand l'organisation des chantiers temporai-
res prévus à l'article 4 du décret du 26 no-
vembre 1885 aura été réglée par décret
rendu en conseil d'Etat.
Le traité avec la Chine
D'après une dépêche de Shanghaï, les négo-
ciations conduites à Pékin par M. Constaus,
pour modifier le traité de commerce avec la
Chine, ont fait certains progrès.
On espère arriver à une entente.
UN VOTE DE BON AUGURE
Quelle est la question qui s'est posée
mercredi devant la Chambre et que
celle-ci a résolue à quatre-vingt-deux
voix de majorité ? Tel est le point sur
lequel il convient de ne laissser sub-
sister aucune des équivoques que l'on
pourrait être tenté, dans certains mi-
lieux, d'entretenir. La Chambre a-t-elle
voulu simplement accorder pour un
service public lin crédit reconnu indis- ,
pensable? On a beaucoup parlé de ce
crédit dans la presse; on en a moins
parlé à la tribune, et, en entendant le
président du conseil ou M. Clémenceau,
on ne se serait guère douté qu'il faisait
l'objet du débat. C'est qu'en réalité le
débat s'était complètement déplacé, et
il n'en pouvait être autrement. En ad-
mettant même que le crédit eût été
moins oublié qu'il ne l'a été, la Charn- !
bre ne pouvait accorder son vote sans
donner en même temps au gouverne-
ment un bill d'indemnité pour l'irrégu-
larité formellement reconnue par les
ministres qui l'avaient commise en en-
gageant des dépenses sans crédit. Or,
un bill d'indemnité ne va pas sans
qu'une déclaration de confiance y soit
implicitement attachée.
Mais cette déclaration de confiance
implicite n'a pas paru suffisante au gou-
vernement. Il a voulu quelque chose de
plus, et c'est pour obtenir un vote de
confiance bien net et bien indiscutable,
c'est Dour mettre la Chambre en de-
meurè de manifester son opillion sans
équivoque, qu'il a porté le débat sur le
-terrain où il l'a placé.
La Justice ne veut voir dans le débat
de mercredi et dans le vote de la Cham-
bre que le triompha de la bureaucratie
sur le pouvoir législatif. Elle devrait
être mieux au courant des choses. Elle
compte parmi ses rédacteurs assez de
députés pour qu'elle ne puisse ignorer
que le discours de M. Clémenceau n'a
guère porté sur la question bureaucra-
tique. M. Clémenceau a voulu dresser
le bilan du gouvernement, ou plutôt
son acte d'accusation ; il lui a reproché
de n'avoir pas réalisé les réformes qu'il
avait annoncées et d'avoir présenté des
projets qui ne lui donnaient pas satis-
faction; il lui a nettement signifié qu'il
n'avait pas sa confiance. Ceci ressem-
ble bien plutôt à un débat sur la poli-
tique générale du cabinet qu'à une dis-
cussion sur un crédit de médiocre im-
portance.
- Mais la Justice elle-même parait trou-
ver un peu étroites les limites dans les-
quelles elle prétend enfermer le sens
général de cette discussion. Elle en veut
tirer une moralité et elle soutient que la
Chambre, en statuant comme elle l'a
fait, s'est montrée résignée à abandon-
ner le programme de réformes qu'elle
s'était tracé. Elle prétend que la Cham-
bre est sur la pente où d'autres ont
glissé avant elle, qui, fatiguées de voir
« qu'à mesure qu'elles brisaient un ca-
binet, on leur offrait la même politique
sous d'autres noms», « se domesti-
quaient» et « aboutissaient à une faillite
politique ».
Nous ne croyons pas que les conclu-
sions de la Justice soient exactes, et
que le vote de la Chambre puisse être
interprété comme un symptôme de las-
situde et comme le présage d'une fail-
lite politique. Nous y voyons, au con-
traire, l'espérance d'une transformation
heureuse dans les habitudes et les sen-
timents d'une partie de la Chambre. Il
s'est trouvé dans le parti républicain un
certain nombre d'hommes, jusqu'ici peu
soucieux des nécessités gouvernemen-
tales qui, instruits par l'expérience, ont
compris que le meilleur moyen d'obte-
nir les réformes auxquelles ils tiennent
n'était pas d'user les gouvernements
en quelques semaines et de renverser
les cabinets les uns sur les autres. Ils
ont vu que le cabinet actuel était animé
du sincère désir d'accomplir certaines
réformes, et que ce cabinet était sur-
tout entravé dans sa marche réforma-
trice par l'incertitude où il était de sa-
voir s'il pouvait compter sur une majo-
rité pour le seconder dans cette entre-
prise. Ils ont voulu, en lui donnant leur
confiance, lui donner confiance en lui-
même, et lui montrer que cette Chambre
où, jusqu'ici, la majorité avait paru hé-
sitante, où elle avait été plutôt un
groupem., inconsistant toujours prêt
à se dissoudre, qu'une masse compacte,
renfermait les éléments d'une majorité
véritable, résolue à soutenir un gouver-
nement.
Voilà, suivant nous, ce que le scru-
tin de mercredi tend à prouver. Il y a
eu, dans l'Union des Gauches et dans
l'Extrême-Gauche une dislocation. D'un
côté, les hommes qui « comprennent la
nécessité de rester solidairement atta-
chés à l'idée » et qui croient servir
« l'idée » en joignant leurs bulletins à
ceux de la Droite qui combat « l'idée »,
et ceux qui, comme quelques opportu-
nistes, comprennent aussi peu les né-
cessités de stabilité gouvernementale
quand ils ne sont pas au pouvoir, qu'ils
- en sont partisans lorsqu'ils y sont. De
l'autre côté, ceux qui ont fini par
s'apercevoir que les rivalités de groupes
et la politique de coterie avaient pour
unique résultat l'impuissance et le pié-
tinement sur plaee. Ceux-ci se sont
trouvés avant-hier en majorité. Ils ont
donné leur confiance au cabinet dans
une circonstance bien définie. C'est
bien pour le cabinet et non pas seule-
ment pour les crédits qu'ils ont voté, de
même que les autres ont voté contre le
cabinet, sachant bien que s'ils étaient
en majorité, ils ouvraient une crise mi-
nistérielle. u , 1 ,:
* Après un vote aussi caractérisé, il pa-
raît difficile que ceux qui se sont sépa-
rés les uns des autres avant-hier puis-
sent se réunir de nouveau à la première
occasion, et il doit y avoir chez les vain-
cus de mercredi, contre ceux qui ont
aidé à leur défaite, des rancunes qui ne
sont pas près de s'effacer. De même, il
s'est établi entre ceux qui ont formé la
majorité des liens nouveaux, qui sem-
blent destinés à se resserrer.
Ce ne sont encore que des espérances
que nous pouvons concevoir de la
séance très politique de mercredi. Mais
ces espérances sont justifiées par de
bonnes raisons, dont tout le monde
peut contrôler la valeur, et si la situa-
tion nouvelle créée par ce vote est en-
core enveloppée de quelque obscurité,
il semble cependant qu'elle doive abou-
tir à des résultats fort différents de
ceux que le pessimisme de la Justice lui
fait prévoir.
L'ENSEIGNEMENT Mut
ET LA QUESTION DU LATIN
Doit-on ouvrir les portes des Facultés
aux jeunes gens qui n'ont point fait
d'études gréco-latines ? Voilà une ques-
tion qui ne se posait guère quand nous
sortions du collège, tous moulés dans
le même gaufrier classique. Le problème
est cependant en partie résolu, et de-
puis plusieurs années déjà. Un décret
du 28 juillet 1882 permet aux bacheliers
de l'enseignement spécial de se présen-
ter aux examens des licences ès scien-
ces. L'Université, la première, a donc
accordé ses sanctions les plus élevées
aux jeunes gens qui n'avaient fait ni
grec ni latin. Or, par une ridicule ano-
malie, avant les mesures libérales pri-
ses en juillet dernier par M. Goblet,
ces mêmes jeunes gens qui pouvaient
devenir docteur ès sciences, professeurs
de Faculté, recteurs ou inspecteurs gé-
néraux, n'avaient pas le droit d'aspirer
au surnumérariat des postes ou aux em-
plois de commis-expéditionnaire dans
le plus obscur de nos départements mi-
nistériels. -
Mais si la question est résolue par
l'affirmative pour les Facultés des scien-
ces, elle reste posée pour tous les au-
tres établissements d'enseignement su-
rieur. Deux académies, cependant, Caen
et Lyon,, sont sorties de la période d'é-
tudes et d'hésitations. Caen, sur l'ini-
tiative de son recteur, M. Edgar Zévort,
a organisé, depuis deux ans déjà, des
conférences en faveur des professeurs
de l'enseignement spécial qui se prépa-
rent à l'agrégation. Lyon a suivi et a
même poussé sa pointe un peu plus
loin : la Faculté a organisé, sous le titre
d'Enseignement pédagogique, une série
de cours et de conférences que peuvent
suivre avec fruit les candidats au pro-
fessorat et à la direction des écoles nor-
males, c'est-à-dire l'élite de l'enseigne-
ment primaire.
Un professeur de la Faculté de Lyon,
M. Bayet, vient, à ce sujet, de publier
une très remarquable étude sur le
rôle des Facultés des lettres et les de-
voirs nouveaux que leur imposent les
réformes récemment introduites dans
notre - enseignement secondaire. Les
idées de M. Bayet sont trop conformes
à celles que nous avons maintes fois
exprimées ici, pour que nous résistions
au désir de les faire connaitre à nos lec-
teurs.
M. Bayet se fait tout d'abord une idée
très large et très nette de l'enseigne-
ment supérieur. Ce n'est point seule-
ment, à ses yeux, la prolongation et le
perfectionnement de l'enseignement
classique tel qu'il se donne dans les col-
lèges. « J'estime, nous dit-il, que l'en-
seignement supérieur s'appelle de ce
nom parce qu'il est l'expression la plus
élevée, non pas d'un seul ordre d'en-
seignement, mais de tous. Il est uni à
tous par des liens étroits, il doit les pé-
nétrer tous de son influence, les faire
profiter de son activité, de ses recher-
ches. Là est son véritable avenir ».
Mais, objectent aussitôt les classi-
ques intransigeants, que deviendront les
études gréco-latines, si vous admettez
sur les bancs des Facultés des jeunes
gens qui n'ont point été dressés selon
la même formule? Pourquoi assurer des
avantages égaux à ceux qui n'ont point
une égale culture intellectuelle ?
— Eh 1 mon Dieu, serions-nous ten-
tés de leur répondre, à quoi bon vous
trémousser ainsi? Si les jeunes gens
que vous formez par le grec et le latin
ont, selon votre langage, une culture
supérieure, cette supériorité ne s'affir-
mera-t-elle pas surtout sur les bancs
des Facultés ? Laissez donc pousser plus
loin une expérience qui doit prouver
justement la précellence de vos métho-
des. Ne vous opposez pas à un rappro-
chement auquel, dans votre pensée,
vous n'avez rien à perdre et tout à ga-
gner :
C'est une ombre au tableau qui lui donne du
[lustre.
M. Bayet est convaincu, — et c'est
également notre avis, — que l'étude du
grec et du latin profitera la première
de la constitution définitive de l'ensei-
gnement classique français :
Si l'étude des langues mortes iété si ter-
riblement attaquée pendant ces dernières
années, c'est qu'on prétendait l'imposer
comme un pensum à toute la jeunesse fran-
çaise. Sauf de rares exceptions, — encore s'y
mêle-t-ll peut-être quelque goût de para-
doxe, - ceux qui ont vraiment appris le
grec et le latin ne songent pas à les condam-
ner ; mais combien en sort-il chaque année
de nos lycés et de nos collèges qui puissent
lire tout uniment un discours de Démos-
thène ou un livre de Tacite ? Les autres ont
pesté durant huit ans contre la contrainte
intellectuelle qu'on leur faisait subir ; plus
tard, ils raisonnent leur haine d'écolier, et,
comme de juste, ils la raisonnent mal; le
latin, qu'ils ont passé Si longtemps à ne pas
apprendre, ne leur a servi qu'à gagner des
retenues, donc le latin est mauvais, et il faut
le rayer de nos programmes.
Serait-il, en outre, bien habile de
fermer les Facultés à tous ceux qui se
réclament des humanités modernes pour
les réserver à un petit nombre d'initiés
soigneusement triés sur le volet des
lettres anciennes ? On ne manquera pas
alors de répéter, fait judicieusement
observer M. Bayet, que « le culte des
lettres anciennes rend l'esprit étroit,
qu'il le ferme à l'intelligence des inté-
rêts les plus évidents de l'enseignement
national. »
Et puis, suffit-il de maugréer contre
son temps et de s'enfermer dans ces
« temples sereins » dont parle le poète
pour arrêter le mouvement commencé ?
Nous n'avons pas cessé de le redire : il
est à souhaiter que le progrès s'accom-
plisse avec l'Université, mais il se ferait
au besoin sans elle et malgré elle. Ce
ne serait pas la première fois qu'on ver-
rait une institution puissante, par suite
de son attachement servile à une rou-
tine décorée du nom de tradition, vé-
géter dans l'oubli au milieu d'une so-
ciété qui lui rendrait dédain pour dé-
dain, et chercherait ailleurs un instru-
ment d'éducation mieux approprié à ses
tendances. « Il faut prendre parti, dit
M. Bayet, et si nous croyons que les ré-
formes qui réorganisent l'enseignement
spécial et l'enseignement primaire peu-
vent porter des fruits, il faut y aider
comme professeurs. Ou bien, préférons-
nous que le mouvement qui aura grandi
en dehors de nous se retourne plus
tard aveuglément contre nous? » Voilà
de bien sages paroles et nous les enre-
gistrons d'autant plus volontiers qu'elles
émanent d'un homme qui, par sa valeur
propre et la situation qu'il occupe dans
l'enseignement, ne peut être soupçonné
de vouloir porter la moindre atteinte
aux vieilles études classiques.
Il est une considération d'ordre pro-
fessionnel qui nous parait digne de
fixer l'attention des amis de l'enseigne-
ment public. Il y a, dans l'Université,
de petites querelles sur lesquelles nous
passons légèrement d'ordinaire, tant
elles sont puériles et font peu d'hon-
neur à l'esprit de ceux qui les avivent.
Nous voulons parler de ces mandarins
uniquement occupés à se disputer sur
le nombre et la couleur de leurs bou-
tons. D'où viennent ces sentiments de
dénigrement et de jalousie?
Elevés dans des écoles isolées, dit M. Bayet,
nous sommes habitués à regarder les autres
avec indifférence, sinon avec hostilité. Si, çà
et là, des relations s'étaient engagées, si on
se trouvait parfois côte à côte sur les mêmes
bancs, ces antipathies mesquines s'efface-
raient. Pour le plus grand bien du pays, il
faut y travaiUer ; 11 faut, par tous les moyens,
rapprocher les membres du corps enseignant,
leur montrer que leurs Intérêts sont com-
muns et qu'à des titres divers, ils sont les col-
laborateurs d'une même œuvre, l'instruction
nationale.
Et ce n'est pas seulement aux mem-
bres du corps enseignant que s'adres-
sent ces conseils, l'administration elle-
même pourrait en faire son profit. En
plus d'une circonstance, elle a contri-
bué sinon à faire naître ces défiances ré-
ciproques, du moins à les encourager.
Elle a fermé les yeux sur l'attitude et
le langage de recteurs maladroits ou de
proviseurs imbéciles, qui se faisaient un
jeu d'attiser ces rancunes et ne lui sa-
vaient d'ailleurs aucun gré de sa fai-
blesse.
Rien ne prouve mieux, enfin, la jus-
tesse des remarques de M. Bayet et
l'opportunité des mesures prises par la
Faculté de Lyon, que le succès qui a
suivi l'ouverture de ces cours et confé-
rences. Les auditeurs se sont montrés
nombreux et assidus et forment aujour-
d'hui une clientèle qui n'est pas infé-
rieure, par ses aptitudes et son zèle, aux
recrues ordinaires des Facultés. Lyon et
Caen ont donné un bon exemple que
nous recommandons aux autres acadé-
mies. Il ne saurait plaire, il est vrai, aux
gens difficiles qui trouvent toujours les
amphithéâtres trop garnis et craignent
que la quantité ne fasse tort à la qua-
lité. C'est un terrible avantage que de
n'avoir pas d'auditeurs, mais il est bon
de ne pas en abuser.
ANDRÉ BALZ.
LA VIE DE PARIS
La réception de M. Leconte de Lisle
par M. A. Dumas, à l'Académie, a tenu
tout ce qu'on en espérait. Et d'abord,
une assistance nombreuse et de premier
choix, si le tout-Paris peut passer pour
être vraiment tout Paris. Puis deux
discours, d'un intérêt inégal peut-être,
mais d'une haute valeur. Malheureuse-
ment, la salle des séances solennelles
est une salle exécrable pour l'acousti-
que, mal disposée de toutes façons, et
un auteur dramatique comme M. A. Du-
mas pourrait dire que rien n'y est pré-
paré ni possible pour une mise en scène
nécessaire. Aussi, n'a-t-on pas entendu
très bien les deux orateurs. Rien, d'ail-
leurs, n'égale la difficulté qu'il y a pour
des orateurs à parler d'une façon abs-
traite devant un public très divers d'opi-
nions, sans la passion des assemblées
politiques, et cependant plus suscepti-
ble qu'elles, et sans la tribune, les in-
terruptions, tout ce qui donne le mou-
vement et la vie à l'éloquence. En
somme, aller à l'Académie pour enten-
dre les orateurs, c'est une affaire de
mode ou de curiosité, plutôt mondaine
que littéraire, à moins que ce ne soit
un devoir professionnel. Car, on n'est
pas très bien à l'aise à l'Académie, et, si
les fauteuils en sont enviables, je n'en
dirai pas autant des banquettes.
-Le vrai plaisir que m'ont causé les
discours de M. Leconte de Lisle et de
M. A. Dumas, c'est celui de les lire
tranquillement, comme vous allez le
faire. Car ces discours ne sont pas
seulement de jolis, de beaux morceaux
de style : ils sont l'expression d'écoles
littéraires et philosophiques très diver-
ses, et, à chaque ligne, on y trouve de
ces mots ou de ces aperçus qui font ré-
fléchir, -ce qui est encore, en somme,
la grande joie de la lecture. M. Leconte
de Lisle, cependant, extrêmement pru-
dent dans son discours et préférant ne
pas aborder certains points de vue qui
lui sont propres que de les traiter en se
soumettant aux nécessités et aux con-
venances du lieu, n'a guère fait que ra-
conter, avec-une grande habileté, l'œu-
vre de son prédécesseur, sans se laisser
entrainer à étudier la nature et la qua-
lité de son génie. On pourrait dire que
là comme dans bien des pièces de vers
de son œuvre propre, il s'est volon-
tairement imposé de rester purement
descriptif. La critique, en un mot, qui
ne saurait porter sur la forme admira-
ble du poète, mais qui pouvait s'exer-
cer sur son esprit et sur son rôle, se
dissimule. M. Leconte de Lisle nous a
bien dit, en manière de préface, que
l'humanité avait toujours marché avec
et par les poètes, depuis Valimki —
que j'ignore un peu, hélas ! — jusqu'à
lui-même, qui parait d'ailleurs ne l'avoir
conduite à rien ; mais il n'a pas essayé
de nous dire ce que V. Hugo avait été
dans cette théorie de poètes directeurs
d'hommes?
Tout au contraire, le tempérament cri-
tique , affirmatif et batailleur de M.
A. Dumas éclate à chaque ligne de son
discours. La forme en est, comme celle
du discours de M. Leconte de Lisle, très
prudente et très académique, ce qui
n'est pas un mal : comme le disait un
académicien du siècle dernier, la pen-
sée, resserrée et même un peu gênée,
n'en jaillit que mieux d'une harangue,
comme l'eau dans les conduits qui
aboutissent au jet d'eau et à la cas-
cade. Le discours même de M. Dumas,
à première vue, a un petit air innocent.
C'est une prairie émaillée de fleurs.
Mais sous chaque fleur se cache un joli
petit serpent, que nous entendons sif-
fler et que quelques-uns sentent mor-
dre.
En réalité, M. A. Dumas a voulu, dans
ce discours, — un des plus curieux et
des plus remarquables que j'aie en-
tendus depuis longtemps, — dire deux
choses : la première, particulièrement à
l'adresse de M. Leconte de Lisle, c'est
que la philosophie triste et négative,
qui regarde la vie comme une chose
mauvaise, dont on peut à peine se con-
soler, soit par le mysticisme religieux,
soit par une sorte de mysticisme artis-
tique, qui se contente, en somme, de
simples formules comme le mysticisme
religieux lui-même, est une mauvaise
philosophie. Quand bien même le Nir-
vahna ou le pessimisme seraient le der-
nier mot de la sagesse, il y a, au-dessus
de la sagesse même, je ne sais quel ins-
tinct qui nous pousse à l'action en nous
parlant d'espérances, de ces espérances
qu'il faut aimer encore plus qu'il ne faut
en affirmer la réalité objective. La se-
conde, qui touche à V. Hugo, c'est que
le sentimentalisme qui se plaît à ces
espérances ne suffit pas, quand il reste
trop vague et trop indéterminé ; et que
le penseur moderne est forcé, suivant les
traces de la science, d'apporter un peu
plus de précision et de critique dans ses
opinions. La nature', en un mot, ne suf-
fit pas, soit qu'on s'y perde pour arriver
à rien, soit qu'on s'y mêle et qu'on s'y
confonde pour arriver à tout, par le
rêve seul. L'étude de l'homme s'impose,
et c'est encore le cœur humain qu'il
faut interroger par-dessus tout, quand
on est curieux du grand pourquoi des
choses.
Mais combien ces choses sont dites
avec un art délicat, incomparable par
places ! Net, un peu dur peut-être aye*
M. Leconte de Lisle, comme s'il fallait
un acier d'une trempe extraordinaire
pour entamer sa cuirasse, M. Dumas
agit autrement vis-à-vis de Victor Hugo.
Son admiration et son respect sont cer-
tains. Mais, cependant, il entre dans le
sentiment de réaction qui se produit
non contre le grand poète, mais contre
le peu de discernement de certains qui,
pour le trop louer, ont fini par le com-
promettre. Le poète, en lui, est su-
perbe et varié à l'infini, kaléidéoscope
où les lettrés et la foule même, — quoi-
que avec plus de réserve, — ne se lasse-
ront pas de sitôt d'appliquer un œil ravi.
Mais le penseur est d'ordre inférieur,
au moins en certains cas. Le poète de
l'art et de la nature est bien au-dessus,
chez V. Hugo, du poète de l'homme. Il
plonge dans les océans ou s'envole dans
les cieux plus aisément qu'il n'atteint
aux profondeurs du cœur humain. Et
comme M. Dumas dit cela, quand il ra-
conte que V. Hugo, parlant des grands
penseurs de tous les pays, oublie de
nous dire quel était le grand penseur
de la race française, sans nous avouer
qu'il se gardait lui-même cette place,
comme les constructeurs de cathé-
drales se réservent un tombeau sous le
maître-autel! M. Dumas de conteste pas
le génie de V. Hugo ; mais il prononce
le nom de Rabelais, de Molière, de Vol-
taire, — et cela suffit, — de même qu'il
prononce le nom de Lamartine et dé
Musset, comme s'il voulait nous dire
que le dieu de la poésie du siècle doit
être un dieu en trois personnes. Tout
eela est juste, élevé, charmant. Et je
n'en dis pas davantage, nul commen-
taire ne valant la lecture d'un tel mor-
ceau.
HENRY FOUQUIER.
UN INCIDENT A LA CHAMBRE
Sous ce titre, nous avons raconté, hier, l'in-
eident qui s'est produit au Palais-Bourbon,
entre deux députés. Nous avons dit que M.
Bouchez, procureur général près la cour de
la Seine, avait été, dans la soirée, saisi de l'af-
faire et que le procès-verbal de la séance lut
avait été remis.
Hier, M. Bouchez, M. Sarrien, garde des
sceaux, ont conféré à ce sujet, avant la séance,
avec M. Floquet, président de la Chambre.
Par les soins du procureur général, une
sorte d'information officieuse a été ouverte.
MM. de Douville-Maillefeu et Sans-Leroy, ainsi
que les témoins de la scène de mardi ont été
entendus. Cette information fournira à M.
Bouchez les éléments sur lesquels sera fon-
dée la demande en autorisation de poursuites
qu'il compte adresser à la Chambre.
Contrairement à ce qui a été rapporté par un •
certain nombre de nos confrères, le cas de
flagrant délit, qui aurait, dans les circonstan-
ces ordinaires, pour effet de suspendre les
prérogatives et l'immunité parlementaires,
ne peut pas, comme nous l'avons dit, être
invoqué dans l'incident d'avant-hier. Cela
est tellement vrai, que M. de Douville-Maille-
feu assistait hier à la séance de la Chambre.
L'affaire s'est passée dans l'intérieur du
Palais-Bourbon, dont l'accès est interdit, non
seulement à toute personne n'appartenant
pas soit au gouvernement, soit au Parlement,
mais aussi à tout officier de police, et où, par
suite, aucune constatation légale n'a pu être
faite par les agents de l'autorité.
En l'état, le parquet du procureur général
n'est légalement saisi de l'allaire que par la
lettre du bureau de la Chambre. Il n'y a donc
plus flagrant délit au moment où il est saisi.
C'est pour cela qu'il est nécessaire de solli-
citer de la Chambre. l'autorisation de pour-
suites Selon toutes probabilités, la demande
en autorisation s'appliquera également à M.
de Douville-Maillefeu et à M. Sans-Leroy, qui,
comme on le sait, a riposté par une gifle au
coup de son adversaire. De la sorte, il appar-
tiendra à l'instruction de délimiter les res-
ponsabilités et d'indiquer contre qui les pour-
suites seront officiellement exercées.
Ajoutons que, d'après ce qu'on disait hier
dans les couloirs, il se pourrait que la majo-
rité de la Chambre, invoquant les précédents
en matière d'autorisation de poursuites, refu-
sât l'autorisation, même dans le cas actuel.
*
* *
Hier dans l'après-midi, MM. Casimir-Perler
(Aube) et Godefroy Cavaignac ont adressé à
M. Sans-Leroy la lettre suivante : 1
«Paris, 31 mars.
» Cher collègue,
» Nous avons été priés par vous d'entrer ea
relation avec les témoins de M. de Donvillè-
Maillefeu.
» Nous avons conféré avec eux, hier mer-
credi, dans un des bureaux de la Chambre.
Vers la fin de l'entretien, les témoins de M.
de Douville-Maillefeu nous ont quittés pour
se rendre à l'appel de leur client. Ils sont re-
venus aussitôt nous dire que M. de Douville-
Maillefeu venait de leur retirer la mission
qu'il leur avait confiée.
» Nous n'avons e? qu'à prendre acte de
cette déclaration.
» Avisé par nous de cet Incident, vous nous
avez priés, estimant qu'une réparation voas
est due, de nous rendre auprès de M. de
Douville-Maillefeu, et de lui demander de
constituer à nouveau des témoins:
» M. de Douville-Maillefeu a reçu notre
visite ce matin jeudi, à neuf heures ; nous
l'avons prié de nous mettre à nouveau en
relation avec des témoins désignés par lui.
» M. de Douville-Maillefeu nous a répondu :
« La Chambre s'étant constituée juge de l'in-
» cident, m'ayant frappé seul d'une peine dls-
» ciplinaire grave et, le procureur général
» étant saisi, j'ai dû immédiatement, dans
» ces circonstances, prier mes témoins de
» cesser de s'occuper de cette affaire et je ne
» puis que persévérer dans cette décision. »
» Nous ne pouvons que vous transmettre
cette réponse, qui, dans les circonstances pré-
sentes, nous met dans l'impossibilité de pour-
suivre notre mission.
» Croyez, cher collègue, à nos sentiments
dévoués.
» CASIMIR-PERIER,
» GODBFROY CAVAIGNAC »
*
+ •*
M. Sans-Leroy a répondu à ses témoins'par
la lettre suivante :
)
Prix du numéro : Paris et détnriements: 15 centimes
Vendredi 1" avril 18ST
JOURNAL RÉPUBLICAIN
REDACTION
9adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit ;
16, rue Cadet, IE3 -
Directeur politique :
A.-EDOUARD PORTALIS
ABONNEMENTS
DÉPARTEMENTS
Trois moia t 6 »»
Six mois. 32 »»
ITn ~n. 68 »»
PARIS
Trois mois. 43 »»
Six mois 25 J).
Un an. 60 »n
Supplément p* l'Étranger (Europe) 1 fr. par trimestre
Les abonnera18 partent des 1er et 15 de chawe mois
ADMINISTRATION
Adresser les Lettres et Mandats à l'Administrateur
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,ii ^"i—r-n-a
EN VENTE A LONDRES
Et Abonnements pour l'Angleterre
Au bureau clil XIXe Sièolé
76, Finsbury Pavement, E. C.
RBGISSSURS D'ANXOlTov
MM. LAGRANGE, CERF ET C1»
6S place de la Bourse, e
BULLETIN
, La Chambre a repris hier la discussion
de la convention relative au service postal
de l'Australie et de l'Indo-Chine. M. Félix
Faure s'est élevé contre le chiffre de la
subvention allouée à la compagnie chargée
de ce service. Le député de la Seine-Infé-
rieure a peine à oublier qu'il représente
les intérêts du Havre. En revanche, M. An-
tide Boyer, député de Marseille, n'a pas
assez de louanges pour le ministre des
postes qui a signé la convention, et pour
la compagnie qui a l'heureuse fortune
d'abriter sa flotte dans les bassins de la
Joiiette.
Bordeaux réclame, par la bouche. de M.
Mérillon, une nouvelle ligne qui desservi-
rait la côte occidentale d'Afrique et aurait
pour point de départ Pauillac, l'avant-
port de Bordeaux. Il faut s'étonner que
Saint-Nazaire n'ait rien demandé. En re-
vanche, la colonie de l'Inde française a
fait entendre les plaintes les plus vives
par l'organe de M. Pierre Alype, son dé-
puté. A l'en croire, le nouvel itinéraire de
la ligne d'Australie ruine les ports de
l'Inde, Mahé, Karikal, l'île de la Réunion
et Obock, et, d'une façon générale, toutes
nos possessions françaises de l'oeéan In-
dien.
Il est difficile de contenter tout le
monde, Marseille et le Havre, Bordeaux et
le député de l'Inde.
Au fond, toutes ces critiques n'ont pas
grande portée : l'intérêt local le dispute à
l'intérêt général. M. le ministre des postes
démontre, par d'excellents arguments, que
la convention est avantageuse, qu'elle per-
mettra de soutenir la concurrence des
compagnies anglaises et allemandes et as-
surera la prépondérance de notre pavillon
dans l'océan Indien et dans le Pacifique.
La Chambre statuera définitivement sa-
medi.
Le Sénat a adopté les crédits supplémen-
taires, après une discussion toute platoni-
que sur les droits financiers du Sénat. La
question n'est pas nouvelle ; il semblait
qu'elle fût élucidée ; elle ne l'est pas, pa-
rait-il, au gré de M. Buffet et de M. Faye,
qui reprennent ce thème usé. Les crédits
* sont néanmoins votés par 215 voix con-
tre. 2. Opposition douce. -
La conclusion de la triple alliance entre
l'Allemagne, l'Autriche et l'Italie, a causé
quelque émoi en Europe ; on en redoute
d'autant plus les effets qu'on en connaît
plus mal les clauses secrètes.
Pour l'instant, les préoccupations sont
ailleurs. Il s'agit d'une autre alliance qui
a quelque difficulté à se nouer, ou, plus
exactement, à se renouer ; car, en réalité,
c'est le renouvellement d'un traité périmé
depuis hier, qui se négocie péniblement
sans aboutir aussitôt qu'on l'eût désiré à
Berlin.
Le chancelier a réussi, jusqu'à présent,
& maintenir l'harmonie entre l'Autriche et
la Russie en les emprisonnant dans un
traité d'alliance dont il a réglé toutes les
conditions. L'Autriche, liée déjà vis-à-vis
de l'Allemagne, est prête à accepter une
nouvelle alliance avec la Russie pour
complaire au chancelier aliemand, qui
joue le principal rôle dans cette association
à trois. Le malheur est que la Russie n'a
aucune hâte de prendre des engagements
qui gêneraient éventuellement sa liberté
d'action. La diplomatie allemande s'est em-
ployée activement à opérer un rapproche-
ment entre la Russie et l'Autriche; mais
ces tentatives n'ont pas eu grand succès.
A la vérité, le tsar et l'empereur d'Autri-
che se font de mutuelles démonstrations
d'amitié dans les circonstances solennel-
les ; mais il y a entre les deux peuples
une barrière presque aussi infranchissa-
ble qu'il y a de haine chez les Russes
contre les Allemands, — et ce n'est pas
peu dire.
Le bill irlandais a toute chance d'être
adopté par la Chambre des communes.
Après le discours de M. Chamberlain, le
vote était probable ; il est aujourd'hui
certain. Dans une réunion tenue hier à
Londres par les libéraux unionistes, lord
Hartington a engagé son parti à appuyer
le cabinet dans les circonstances difficiles
qu'il traverse. Il a, d'ailleurs, laissé entre-
voir que le gouvernement prendrait en con-
sidération, dans les bureaux, les objections
que quelques membres veulent présenter
au sujet de certaines clauses du projet de
bill sur la législation criminelle en Ir-
lande. •
M. Chamberlain a appuyé les vues de
lord Hartington.
La réunion a résolu de voter la pre-
mière lecture du bill.
Pauvre Irlande 1
LOUIS BBNRIQUB.
_————————— - ——————————
INFORMATIONS PAR TICULIBRES
Conseil des ministres
Les ministres ont tenu conseil hier, au mi-
nistère de l'intérieur, sous la présidence de
M. René Goblet.
La séance, qui a été très courte, a été con-
sacrée entièrement à l'expédition des affaires
courantes.
M. Goblet a rendu compte des incidents qui
se sont produits au conseil municipal de Pa-
ris, et s'est félicité de ce que cette assemblée,
à la différence du conseil municipal de Mar-
seille, ait fait preuve de respect de la léga-
lité, en écartant les vœux qui lui étaient sou-
mis au sujet de l'anniversaire du 18 Mars.
Les ministres ont ensuite examiné les di-
verses questions qui doivent être discutées et
résolues avant la séparation des Chambres
pour les vacances de Pâques.
A la Chambre, le gouvernement demandera
le vote du projet de loi portant application
d'une surtaxe de 10 francs sur les sucres raf-
finés.
Au Sénat, le vote des deux projets relatifs
au conseil général de la Seine et au aonsell
-municipal de Paris. »
Le conseil municipal de Saint-Ouen
A l'issue du conseil des ministres, M. Goblet
a reçu hier le préfet de la Seine, qui lui a
communiqué le texte de la délibération du
conseil municipal de Saint-Doen, par laquelle
cette assemblée déclare se solidariser avec le
conseil municipal de Marseille pour glorifier
l'insurrection du i8 mars.
; M. Goblet a décidé de faire signer samedi
au conseil des ministres un décret portant
dissolution du conseil municipal de Saint-
Ouen.
Les employés du ministère de la guerre
Le bruit court que tous les employés civils
du ministère de la guerre seraient remplacés
progressivement et sous peu par des mili-
taires en activité de service.
Les récidivistes et Diégo-Suarez
Une note publiée par plusieurs journaux
donnait à entendre que l'administration des
colonies se disposait à envoyer des récidi-
vistes à Diégo-Suarez, quand l'opposition du
ministre des affaires étrangères l'a obligée de
renoncer à ce projet.., •
Cette nouvelle est inexacte.
Il n'a jamais été question d'établir à Diégo-
Suarez un pénitencier. L'administration a
seulement prescrit d'étudier dans quelles
conditions la main-d'œuvre pénitentiaire pour-
rait y être temporairement utilisée pour
l'exécution de certains travaux publics.
Aucune décision n'a été prise à cet égard,
et il ne sera possible d'en prendre une que
quand l'organisation des chantiers temporai-
res prévus à l'article 4 du décret du 26 no-
vembre 1885 aura été réglée par décret
rendu en conseil d'Etat.
Le traité avec la Chine
D'après une dépêche de Shanghaï, les négo-
ciations conduites à Pékin par M. Constaus,
pour modifier le traité de commerce avec la
Chine, ont fait certains progrès.
On espère arriver à une entente.
UN VOTE DE BON AUGURE
Quelle est la question qui s'est posée
mercredi devant la Chambre et que
celle-ci a résolue à quatre-vingt-deux
voix de majorité ? Tel est le point sur
lequel il convient de ne laissser sub-
sister aucune des équivoques que l'on
pourrait être tenté, dans certains mi-
lieux, d'entretenir. La Chambre a-t-elle
voulu simplement accorder pour un
service public lin crédit reconnu indis- ,
pensable? On a beaucoup parlé de ce
crédit dans la presse; on en a moins
parlé à la tribune, et, en entendant le
président du conseil ou M. Clémenceau,
on ne se serait guère douté qu'il faisait
l'objet du débat. C'est qu'en réalité le
débat s'était complètement déplacé, et
il n'en pouvait être autrement. En ad-
mettant même que le crédit eût été
moins oublié qu'il ne l'a été, la Charn- !
bre ne pouvait accorder son vote sans
donner en même temps au gouverne-
ment un bill d'indemnité pour l'irrégu-
larité formellement reconnue par les
ministres qui l'avaient commise en en-
gageant des dépenses sans crédit. Or,
un bill d'indemnité ne va pas sans
qu'une déclaration de confiance y soit
implicitement attachée.
Mais cette déclaration de confiance
implicite n'a pas paru suffisante au gou-
vernement. Il a voulu quelque chose de
plus, et c'est pour obtenir un vote de
confiance bien net et bien indiscutable,
c'est Dour mettre la Chambre en de-
meurè de manifester son opillion sans
équivoque, qu'il a porté le débat sur le
-terrain où il l'a placé.
La Justice ne veut voir dans le débat
de mercredi et dans le vote de la Cham-
bre que le triompha de la bureaucratie
sur le pouvoir législatif. Elle devrait
être mieux au courant des choses. Elle
compte parmi ses rédacteurs assez de
députés pour qu'elle ne puisse ignorer
que le discours de M. Clémenceau n'a
guère porté sur la question bureaucra-
tique. M. Clémenceau a voulu dresser
le bilan du gouvernement, ou plutôt
son acte d'accusation ; il lui a reproché
de n'avoir pas réalisé les réformes qu'il
avait annoncées et d'avoir présenté des
projets qui ne lui donnaient pas satis-
faction; il lui a nettement signifié qu'il
n'avait pas sa confiance. Ceci ressem-
ble bien plutôt à un débat sur la poli-
tique générale du cabinet qu'à une dis-
cussion sur un crédit de médiocre im-
portance.
- Mais la Justice elle-même parait trou-
ver un peu étroites les limites dans les-
quelles elle prétend enfermer le sens
général de cette discussion. Elle en veut
tirer une moralité et elle soutient que la
Chambre, en statuant comme elle l'a
fait, s'est montrée résignée à abandon-
ner le programme de réformes qu'elle
s'était tracé. Elle prétend que la Cham-
bre est sur la pente où d'autres ont
glissé avant elle, qui, fatiguées de voir
« qu'à mesure qu'elles brisaient un ca-
binet, on leur offrait la même politique
sous d'autres noms», « se domesti-
quaient» et « aboutissaient à une faillite
politique ».
Nous ne croyons pas que les conclu-
sions de la Justice soient exactes, et
que le vote de la Chambre puisse être
interprété comme un symptôme de las-
situde et comme le présage d'une fail-
lite politique. Nous y voyons, au con-
traire, l'espérance d'une transformation
heureuse dans les habitudes et les sen-
timents d'une partie de la Chambre. Il
s'est trouvé dans le parti républicain un
certain nombre d'hommes, jusqu'ici peu
soucieux des nécessités gouvernemen-
tales qui, instruits par l'expérience, ont
compris que le meilleur moyen d'obte-
nir les réformes auxquelles ils tiennent
n'était pas d'user les gouvernements
en quelques semaines et de renverser
les cabinets les uns sur les autres. Ils
ont vu que le cabinet actuel était animé
du sincère désir d'accomplir certaines
réformes, et que ce cabinet était sur-
tout entravé dans sa marche réforma-
trice par l'incertitude où il était de sa-
voir s'il pouvait compter sur une majo-
rité pour le seconder dans cette entre-
prise. Ils ont voulu, en lui donnant leur
confiance, lui donner confiance en lui-
même, et lui montrer que cette Chambre
où, jusqu'ici, la majorité avait paru hé-
sitante, où elle avait été plutôt un
groupem., inconsistant toujours prêt
à se dissoudre, qu'une masse compacte,
renfermait les éléments d'une majorité
véritable, résolue à soutenir un gouver-
nement.
Voilà, suivant nous, ce que le scru-
tin de mercredi tend à prouver. Il y a
eu, dans l'Union des Gauches et dans
l'Extrême-Gauche une dislocation. D'un
côté, les hommes qui « comprennent la
nécessité de rester solidairement atta-
chés à l'idée » et qui croient servir
« l'idée » en joignant leurs bulletins à
ceux de la Droite qui combat « l'idée »,
et ceux qui, comme quelques opportu-
nistes, comprennent aussi peu les né-
cessités de stabilité gouvernementale
quand ils ne sont pas au pouvoir, qu'ils
- en sont partisans lorsqu'ils y sont. De
l'autre côté, ceux qui ont fini par
s'apercevoir que les rivalités de groupes
et la politique de coterie avaient pour
unique résultat l'impuissance et le pié-
tinement sur plaee. Ceux-ci se sont
trouvés avant-hier en majorité. Ils ont
donné leur confiance au cabinet dans
une circonstance bien définie. C'est
bien pour le cabinet et non pas seule-
ment pour les crédits qu'ils ont voté, de
même que les autres ont voté contre le
cabinet, sachant bien que s'ils étaient
en majorité, ils ouvraient une crise mi-
nistérielle. u , 1 ,:
* Après un vote aussi caractérisé, il pa-
raît difficile que ceux qui se sont sépa-
rés les uns des autres avant-hier puis-
sent se réunir de nouveau à la première
occasion, et il doit y avoir chez les vain-
cus de mercredi, contre ceux qui ont
aidé à leur défaite, des rancunes qui ne
sont pas près de s'effacer. De même, il
s'est établi entre ceux qui ont formé la
majorité des liens nouveaux, qui sem-
blent destinés à se resserrer.
Ce ne sont encore que des espérances
que nous pouvons concevoir de la
séance très politique de mercredi. Mais
ces espérances sont justifiées par de
bonnes raisons, dont tout le monde
peut contrôler la valeur, et si la situa-
tion nouvelle créée par ce vote est en-
core enveloppée de quelque obscurité,
il semble cependant qu'elle doive abou-
tir à des résultats fort différents de
ceux que le pessimisme de la Justice lui
fait prévoir.
L'ENSEIGNEMENT Mut
ET LA QUESTION DU LATIN
Doit-on ouvrir les portes des Facultés
aux jeunes gens qui n'ont point fait
d'études gréco-latines ? Voilà une ques-
tion qui ne se posait guère quand nous
sortions du collège, tous moulés dans
le même gaufrier classique. Le problème
est cependant en partie résolu, et de-
puis plusieurs années déjà. Un décret
du 28 juillet 1882 permet aux bacheliers
de l'enseignement spécial de se présen-
ter aux examens des licences ès scien-
ces. L'Université, la première, a donc
accordé ses sanctions les plus élevées
aux jeunes gens qui n'avaient fait ni
grec ni latin. Or, par une ridicule ano-
malie, avant les mesures libérales pri-
ses en juillet dernier par M. Goblet,
ces mêmes jeunes gens qui pouvaient
devenir docteur ès sciences, professeurs
de Faculté, recteurs ou inspecteurs gé-
néraux, n'avaient pas le droit d'aspirer
au surnumérariat des postes ou aux em-
plois de commis-expéditionnaire dans
le plus obscur de nos départements mi-
nistériels. -
Mais si la question est résolue par
l'affirmative pour les Facultés des scien-
ces, elle reste posée pour tous les au-
tres établissements d'enseignement su-
rieur. Deux académies, cependant, Caen
et Lyon,, sont sorties de la période d'é-
tudes et d'hésitations. Caen, sur l'ini-
tiative de son recteur, M. Edgar Zévort,
a organisé, depuis deux ans déjà, des
conférences en faveur des professeurs
de l'enseignement spécial qui se prépa-
rent à l'agrégation. Lyon a suivi et a
même poussé sa pointe un peu plus
loin : la Faculté a organisé, sous le titre
d'Enseignement pédagogique, une série
de cours et de conférences que peuvent
suivre avec fruit les candidats au pro-
fessorat et à la direction des écoles nor-
males, c'est-à-dire l'élite de l'enseigne-
ment primaire.
Un professeur de la Faculté de Lyon,
M. Bayet, vient, à ce sujet, de publier
une très remarquable étude sur le
rôle des Facultés des lettres et les de-
voirs nouveaux que leur imposent les
réformes récemment introduites dans
notre - enseignement secondaire. Les
idées de M. Bayet sont trop conformes
à celles que nous avons maintes fois
exprimées ici, pour que nous résistions
au désir de les faire connaitre à nos lec-
teurs.
M. Bayet se fait tout d'abord une idée
très large et très nette de l'enseigne-
ment supérieur. Ce n'est point seule-
ment, à ses yeux, la prolongation et le
perfectionnement de l'enseignement
classique tel qu'il se donne dans les col-
lèges. « J'estime, nous dit-il, que l'en-
seignement supérieur s'appelle de ce
nom parce qu'il est l'expression la plus
élevée, non pas d'un seul ordre d'en-
seignement, mais de tous. Il est uni à
tous par des liens étroits, il doit les pé-
nétrer tous de son influence, les faire
profiter de son activité, de ses recher-
ches. Là est son véritable avenir ».
Mais, objectent aussitôt les classi-
ques intransigeants, que deviendront les
études gréco-latines, si vous admettez
sur les bancs des Facultés des jeunes
gens qui n'ont point été dressés selon
la même formule? Pourquoi assurer des
avantages égaux à ceux qui n'ont point
une égale culture intellectuelle ?
— Eh 1 mon Dieu, serions-nous ten-
tés de leur répondre, à quoi bon vous
trémousser ainsi? Si les jeunes gens
que vous formez par le grec et le latin
ont, selon votre langage, une culture
supérieure, cette supériorité ne s'affir-
mera-t-elle pas surtout sur les bancs
des Facultés ? Laissez donc pousser plus
loin une expérience qui doit prouver
justement la précellence de vos métho-
des. Ne vous opposez pas à un rappro-
chement auquel, dans votre pensée,
vous n'avez rien à perdre et tout à ga-
gner :
C'est une ombre au tableau qui lui donne du
[lustre.
M. Bayet est convaincu, — et c'est
également notre avis, — que l'étude du
grec et du latin profitera la première
de la constitution définitive de l'ensei-
gnement classique français :
Si l'étude des langues mortes iété si ter-
riblement attaquée pendant ces dernières
années, c'est qu'on prétendait l'imposer
comme un pensum à toute la jeunesse fran-
çaise. Sauf de rares exceptions, — encore s'y
mêle-t-ll peut-être quelque goût de para-
doxe, - ceux qui ont vraiment appris le
grec et le latin ne songent pas à les condam-
ner ; mais combien en sort-il chaque année
de nos lycés et de nos collèges qui puissent
lire tout uniment un discours de Démos-
thène ou un livre de Tacite ? Les autres ont
pesté durant huit ans contre la contrainte
intellectuelle qu'on leur faisait subir ; plus
tard, ils raisonnent leur haine d'écolier, et,
comme de juste, ils la raisonnent mal; le
latin, qu'ils ont passé Si longtemps à ne pas
apprendre, ne leur a servi qu'à gagner des
retenues, donc le latin est mauvais, et il faut
le rayer de nos programmes.
Serait-il, en outre, bien habile de
fermer les Facultés à tous ceux qui se
réclament des humanités modernes pour
les réserver à un petit nombre d'initiés
soigneusement triés sur le volet des
lettres anciennes ? On ne manquera pas
alors de répéter, fait judicieusement
observer M. Bayet, que « le culte des
lettres anciennes rend l'esprit étroit,
qu'il le ferme à l'intelligence des inté-
rêts les plus évidents de l'enseignement
national. »
Et puis, suffit-il de maugréer contre
son temps et de s'enfermer dans ces
« temples sereins » dont parle le poète
pour arrêter le mouvement commencé ?
Nous n'avons pas cessé de le redire : il
est à souhaiter que le progrès s'accom-
plisse avec l'Université, mais il se ferait
au besoin sans elle et malgré elle. Ce
ne serait pas la première fois qu'on ver-
rait une institution puissante, par suite
de son attachement servile à une rou-
tine décorée du nom de tradition, vé-
géter dans l'oubli au milieu d'une so-
ciété qui lui rendrait dédain pour dé-
dain, et chercherait ailleurs un instru-
ment d'éducation mieux approprié à ses
tendances. « Il faut prendre parti, dit
M. Bayet, et si nous croyons que les ré-
formes qui réorganisent l'enseignement
spécial et l'enseignement primaire peu-
vent porter des fruits, il faut y aider
comme professeurs. Ou bien, préférons-
nous que le mouvement qui aura grandi
en dehors de nous se retourne plus
tard aveuglément contre nous? » Voilà
de bien sages paroles et nous les enre-
gistrons d'autant plus volontiers qu'elles
émanent d'un homme qui, par sa valeur
propre et la situation qu'il occupe dans
l'enseignement, ne peut être soupçonné
de vouloir porter la moindre atteinte
aux vieilles études classiques.
Il est une considération d'ordre pro-
fessionnel qui nous parait digne de
fixer l'attention des amis de l'enseigne-
ment public. Il y a, dans l'Université,
de petites querelles sur lesquelles nous
passons légèrement d'ordinaire, tant
elles sont puériles et font peu d'hon-
neur à l'esprit de ceux qui les avivent.
Nous voulons parler de ces mandarins
uniquement occupés à se disputer sur
le nombre et la couleur de leurs bou-
tons. D'où viennent ces sentiments de
dénigrement et de jalousie?
Elevés dans des écoles isolées, dit M. Bayet,
nous sommes habitués à regarder les autres
avec indifférence, sinon avec hostilité. Si, çà
et là, des relations s'étaient engagées, si on
se trouvait parfois côte à côte sur les mêmes
bancs, ces antipathies mesquines s'efface-
raient. Pour le plus grand bien du pays, il
faut y travaiUer ; 11 faut, par tous les moyens,
rapprocher les membres du corps enseignant,
leur montrer que leurs Intérêts sont com-
muns et qu'à des titres divers, ils sont les col-
laborateurs d'une même œuvre, l'instruction
nationale.
Et ce n'est pas seulement aux mem-
bres du corps enseignant que s'adres-
sent ces conseils, l'administration elle-
même pourrait en faire son profit. En
plus d'une circonstance, elle a contri-
bué sinon à faire naître ces défiances ré-
ciproques, du moins à les encourager.
Elle a fermé les yeux sur l'attitude et
le langage de recteurs maladroits ou de
proviseurs imbéciles, qui se faisaient un
jeu d'attiser ces rancunes et ne lui sa-
vaient d'ailleurs aucun gré de sa fai-
blesse.
Rien ne prouve mieux, enfin, la jus-
tesse des remarques de M. Bayet et
l'opportunité des mesures prises par la
Faculté de Lyon, que le succès qui a
suivi l'ouverture de ces cours et confé-
rences. Les auditeurs se sont montrés
nombreux et assidus et forment aujour-
d'hui une clientèle qui n'est pas infé-
rieure, par ses aptitudes et son zèle, aux
recrues ordinaires des Facultés. Lyon et
Caen ont donné un bon exemple que
nous recommandons aux autres acadé-
mies. Il ne saurait plaire, il est vrai, aux
gens difficiles qui trouvent toujours les
amphithéâtres trop garnis et craignent
que la quantité ne fasse tort à la qua-
lité. C'est un terrible avantage que de
n'avoir pas d'auditeurs, mais il est bon
de ne pas en abuser.
ANDRÉ BALZ.
LA VIE DE PARIS
La réception de M. Leconte de Lisle
par M. A. Dumas, à l'Académie, a tenu
tout ce qu'on en espérait. Et d'abord,
une assistance nombreuse et de premier
choix, si le tout-Paris peut passer pour
être vraiment tout Paris. Puis deux
discours, d'un intérêt inégal peut-être,
mais d'une haute valeur. Malheureuse-
ment, la salle des séances solennelles
est une salle exécrable pour l'acousti-
que, mal disposée de toutes façons, et
un auteur dramatique comme M. A. Du-
mas pourrait dire que rien n'y est pré-
paré ni possible pour une mise en scène
nécessaire. Aussi, n'a-t-on pas entendu
très bien les deux orateurs. Rien, d'ail-
leurs, n'égale la difficulté qu'il y a pour
des orateurs à parler d'une façon abs-
traite devant un public très divers d'opi-
nions, sans la passion des assemblées
politiques, et cependant plus suscepti-
ble qu'elles, et sans la tribune, les in-
terruptions, tout ce qui donne le mou-
vement et la vie à l'éloquence. En
somme, aller à l'Académie pour enten-
dre les orateurs, c'est une affaire de
mode ou de curiosité, plutôt mondaine
que littéraire, à moins que ce ne soit
un devoir professionnel. Car, on n'est
pas très bien à l'aise à l'Académie, et, si
les fauteuils en sont enviables, je n'en
dirai pas autant des banquettes.
-Le vrai plaisir que m'ont causé les
discours de M. Leconte de Lisle et de
M. A. Dumas, c'est celui de les lire
tranquillement, comme vous allez le
faire. Car ces discours ne sont pas
seulement de jolis, de beaux morceaux
de style : ils sont l'expression d'écoles
littéraires et philosophiques très diver-
ses, et, à chaque ligne, on y trouve de
ces mots ou de ces aperçus qui font ré-
fléchir, -ce qui est encore, en somme,
la grande joie de la lecture. M. Leconte
de Lisle, cependant, extrêmement pru-
dent dans son discours et préférant ne
pas aborder certains points de vue qui
lui sont propres que de les traiter en se
soumettant aux nécessités et aux con-
venances du lieu, n'a guère fait que ra-
conter, avec-une grande habileté, l'œu-
vre de son prédécesseur, sans se laisser
entrainer à étudier la nature et la qua-
lité de son génie. On pourrait dire que
là comme dans bien des pièces de vers
de son œuvre propre, il s'est volon-
tairement imposé de rester purement
descriptif. La critique, en un mot, qui
ne saurait porter sur la forme admira-
ble du poète, mais qui pouvait s'exer-
cer sur son esprit et sur son rôle, se
dissimule. M. Leconte de Lisle nous a
bien dit, en manière de préface, que
l'humanité avait toujours marché avec
et par les poètes, depuis Valimki —
que j'ignore un peu, hélas ! — jusqu'à
lui-même, qui parait d'ailleurs ne l'avoir
conduite à rien ; mais il n'a pas essayé
de nous dire ce que V. Hugo avait été
dans cette théorie de poètes directeurs
d'hommes?
Tout au contraire, le tempérament cri-
tique , affirmatif et batailleur de M.
A. Dumas éclate à chaque ligne de son
discours. La forme en est, comme celle
du discours de M. Leconte de Lisle, très
prudente et très académique, ce qui
n'est pas un mal : comme le disait un
académicien du siècle dernier, la pen-
sée, resserrée et même un peu gênée,
n'en jaillit que mieux d'une harangue,
comme l'eau dans les conduits qui
aboutissent au jet d'eau et à la cas-
cade. Le discours même de M. Dumas,
à première vue, a un petit air innocent.
C'est une prairie émaillée de fleurs.
Mais sous chaque fleur se cache un joli
petit serpent, que nous entendons sif-
fler et que quelques-uns sentent mor-
dre.
En réalité, M. A. Dumas a voulu, dans
ce discours, — un des plus curieux et
des plus remarquables que j'aie en-
tendus depuis longtemps, — dire deux
choses : la première, particulièrement à
l'adresse de M. Leconte de Lisle, c'est
que la philosophie triste et négative,
qui regarde la vie comme une chose
mauvaise, dont on peut à peine se con-
soler, soit par le mysticisme religieux,
soit par une sorte de mysticisme artis-
tique, qui se contente, en somme, de
simples formules comme le mysticisme
religieux lui-même, est une mauvaise
philosophie. Quand bien même le Nir-
vahna ou le pessimisme seraient le der-
nier mot de la sagesse, il y a, au-dessus
de la sagesse même, je ne sais quel ins-
tinct qui nous pousse à l'action en nous
parlant d'espérances, de ces espérances
qu'il faut aimer encore plus qu'il ne faut
en affirmer la réalité objective. La se-
conde, qui touche à V. Hugo, c'est que
le sentimentalisme qui se plaît à ces
espérances ne suffit pas, quand il reste
trop vague et trop indéterminé ; et que
le penseur moderne est forcé, suivant les
traces de la science, d'apporter un peu
plus de précision et de critique dans ses
opinions. La nature', en un mot, ne suf-
fit pas, soit qu'on s'y perde pour arriver
à rien, soit qu'on s'y mêle et qu'on s'y
confonde pour arriver à tout, par le
rêve seul. L'étude de l'homme s'impose,
et c'est encore le cœur humain qu'il
faut interroger par-dessus tout, quand
on est curieux du grand pourquoi des
choses.
Mais combien ces choses sont dites
avec un art délicat, incomparable par
places ! Net, un peu dur peut-être aye*
M. Leconte de Lisle, comme s'il fallait
un acier d'une trempe extraordinaire
pour entamer sa cuirasse, M. Dumas
agit autrement vis-à-vis de Victor Hugo.
Son admiration et son respect sont cer-
tains. Mais, cependant, il entre dans le
sentiment de réaction qui se produit
non contre le grand poète, mais contre
le peu de discernement de certains qui,
pour le trop louer, ont fini par le com-
promettre. Le poète, en lui, est su-
perbe et varié à l'infini, kaléidéoscope
où les lettrés et la foule même, — quoi-
que avec plus de réserve, — ne se lasse-
ront pas de sitôt d'appliquer un œil ravi.
Mais le penseur est d'ordre inférieur,
au moins en certains cas. Le poète de
l'art et de la nature est bien au-dessus,
chez V. Hugo, du poète de l'homme. Il
plonge dans les océans ou s'envole dans
les cieux plus aisément qu'il n'atteint
aux profondeurs du cœur humain. Et
comme M. Dumas dit cela, quand il ra-
conte que V. Hugo, parlant des grands
penseurs de tous les pays, oublie de
nous dire quel était le grand penseur
de la race française, sans nous avouer
qu'il se gardait lui-même cette place,
comme les constructeurs de cathé-
drales se réservent un tombeau sous le
maître-autel! M. Dumas de conteste pas
le génie de V. Hugo ; mais il prononce
le nom de Rabelais, de Molière, de Vol-
taire, — et cela suffit, — de même qu'il
prononce le nom de Lamartine et dé
Musset, comme s'il voulait nous dire
que le dieu de la poésie du siècle doit
être un dieu en trois personnes. Tout
eela est juste, élevé, charmant. Et je
n'en dis pas davantage, nul commen-
taire ne valant la lecture d'un tel mor-
ceau.
HENRY FOUQUIER.
UN INCIDENT A LA CHAMBRE
Sous ce titre, nous avons raconté, hier, l'in-
eident qui s'est produit au Palais-Bourbon,
entre deux députés. Nous avons dit que M.
Bouchez, procureur général près la cour de
la Seine, avait été, dans la soirée, saisi de l'af-
faire et que le procès-verbal de la séance lut
avait été remis.
Hier, M. Bouchez, M. Sarrien, garde des
sceaux, ont conféré à ce sujet, avant la séance,
avec M. Floquet, président de la Chambre.
Par les soins du procureur général, une
sorte d'information officieuse a été ouverte.
MM. de Douville-Maillefeu et Sans-Leroy, ainsi
que les témoins de la scène de mardi ont été
entendus. Cette information fournira à M.
Bouchez les éléments sur lesquels sera fon-
dée la demande en autorisation de poursuites
qu'il compte adresser à la Chambre.
Contrairement à ce qui a été rapporté par un •
certain nombre de nos confrères, le cas de
flagrant délit, qui aurait, dans les circonstan-
ces ordinaires, pour effet de suspendre les
prérogatives et l'immunité parlementaires,
ne peut pas, comme nous l'avons dit, être
invoqué dans l'incident d'avant-hier. Cela
est tellement vrai, que M. de Douville-Maille-
feu assistait hier à la séance de la Chambre.
L'affaire s'est passée dans l'intérieur du
Palais-Bourbon, dont l'accès est interdit, non
seulement à toute personne n'appartenant
pas soit au gouvernement, soit au Parlement,
mais aussi à tout officier de police, et où, par
suite, aucune constatation légale n'a pu être
faite par les agents de l'autorité.
En l'état, le parquet du procureur général
n'est légalement saisi de l'allaire que par la
lettre du bureau de la Chambre. Il n'y a donc
plus flagrant délit au moment où il est saisi.
C'est pour cela qu'il est nécessaire de solli-
citer de la Chambre. l'autorisation de pour-
suites Selon toutes probabilités, la demande
en autorisation s'appliquera également à M.
de Douville-Maillefeu et à M. Sans-Leroy, qui,
comme on le sait, a riposté par une gifle au
coup de son adversaire. De la sorte, il appar-
tiendra à l'instruction de délimiter les res-
ponsabilités et d'indiquer contre qui les pour-
suites seront officiellement exercées.
Ajoutons que, d'après ce qu'on disait hier
dans les couloirs, il se pourrait que la majo-
rité de la Chambre, invoquant les précédents
en matière d'autorisation de poursuites, refu-
sât l'autorisation, même dans le cas actuel.
*
* *
Hier dans l'après-midi, MM. Casimir-Perler
(Aube) et Godefroy Cavaignac ont adressé à
M. Sans-Leroy la lettre suivante : 1
«Paris, 31 mars.
» Cher collègue,
» Nous avons été priés par vous d'entrer ea
relation avec les témoins de M. de Donvillè-
Maillefeu.
» Nous avons conféré avec eux, hier mer-
credi, dans un des bureaux de la Chambre.
Vers la fin de l'entretien, les témoins de M.
de Douville-Maillefeu nous ont quittés pour
se rendre à l'appel de leur client. Ils sont re-
venus aussitôt nous dire que M. de Douville-
Maillefeu venait de leur retirer la mission
qu'il leur avait confiée.
» Nous n'avons e? qu'à prendre acte de
cette déclaration.
» Avisé par nous de cet Incident, vous nous
avez priés, estimant qu'une réparation voas
est due, de nous rendre auprès de M. de
Douville-Maillefeu, et de lui demander de
constituer à nouveau des témoins:
» M. de Douville-Maillefeu a reçu notre
visite ce matin jeudi, à neuf heures ; nous
l'avons prié de nous mettre à nouveau en
relation avec des témoins désignés par lui.
» M. de Douville-Maillefeu nous a répondu :
« La Chambre s'étant constituée juge de l'in-
» cident, m'ayant frappé seul d'une peine dls-
» ciplinaire grave et, le procureur général
» étant saisi, j'ai dû immédiatement, dans
» ces circonstances, prier mes témoins de
» cesser de s'occuper de cette affaire et je ne
» puis que persévérer dans cette décision. »
» Nous ne pouvons que vous transmettre
cette réponse, qui, dans les circonstances pré-
sentes, nous met dans l'impossibilité de pour-
suivre notre mission.
» Croyez, cher collègue, à nos sentiments
dévoués.
» CASIMIR-PERIER,
» GODBFROY CAVAIGNAC »
*
+ •*
M. Sans-Leroy a répondu à ses témoins'par
la lettre suivante :
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