Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1873-12-29
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
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Description : 29 décembre 1873 29 décembre 1873
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/03/2013
8* Année. — N° 774.
Pau *)c NUMÉRO : PARIS 45 CENTIMES — DÉPARTEMENTS 20 CENTIMES.
Lundi 29 Décembre 1873.
LE XIX' SIÈCLE
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
RËDACTION
adresser au Secrétaire de la Rédaction
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JOURNÉE POLITIQUE
Paris, 28 décembre 4873.
À l'Assemblée, la discussion financière
continue toujours. En même temps, les
commissions travaillent avec une certaine
activité. La commission de décentralisation
s'est réunie, et aussi la sous-commission
des Neuf, cette fraction de la commission
des Trente, qui est chargée de recherches
préparatoires sur les questions constitu-
tionnelles. La veille, la commission des
Trente elle-même avait siégé ; on a dû
lire le compte rendu que nous avons donné
de sa séance. Il semble qu'elle ait été tou-
chée de certaines GritLlues; elle a. mani-
festé, du moins, le désir d'en finir assez
vite avec la loi électorale. M. Grivart y a
réfuté, dans un discours presque mordant,
les utopies de ses amis politiques, MM.
Vingtain, Pradié, de, Meaux, etc., etc.
C'est un curieux morceau que ce discours
de M. Grivart; mais ce qu'il y a de plus
curieux, c'est que les Trente ont été ame-
nés insensiblement à écouter avec faveur
les propositions de M. Laboulaye et de M.
Dufaure, deux conservateurs, à la vérité,
mais deux conservateurs républicains. Il
paraît acquis que le projet Dufaure, ce
projet déposé la veille de la révolution du
24 mai, servira de texte aux prochaines
délibérations des Trente.
La commission a bien fait, puisqu'elle
risquait Bans cela de se perdre absolument
dans les nuages.- Nous aurions des réser-
ves à faire sur le projet Dufaure ; il se
peut bien d'ailleurs que certains amende.
ments réactionnaires y soient apportés par
la majorité de la commission. Mais n'est-
il pas intéressant de mesurer le chemin
parcouru ? Nous avions naguère le spec-
tacle de gens qui voulaient tout pourfen-
dre sous la conduite du grand capitaine
Batbie ; et les voilà qui rompent jusqu'à
se retrouver en face des projets du gouver-
nement de M. Thiers, ce complice du radi-
calisme, qu'ils avaient renversé avec des
cris de fureur et d'horreur. Que restera-t-il
de leurs entreprises contre le suffrage uni-
versel ? Autant sans doute que de leurs
tentatives de restauration de la royauté.
Echec partout ! Le pays seul souffre parce
qu'il est agité et troublé. Mais malgré tant
de coups, la République et le suffrage uni-
versel se portent encore assçz bien, et même
beaucoup mieux que leurs débiles ennemis.
Peu de nouvelles de l'étranger. La plu-
part des parlements européens sont en
vacances. Un décret de Berlin a convoqué,
pour le 1er février, les électeurs du Haut -
Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle. Il
s'agit des élections au Reichstag allemand.
Nous en reparlerons. Jusqu'ici nous ne
savons pas quelle conduite ont résolu de
tenir nos concitoyens. Rappelons seule-
ment pour mémoire que, dans. ces trois
départements, toute la presse est à la solde
ou à la merci de la Prusse ; et certains
journaux, qui affectent des allures patrioti-
ques et françaises, sont ceux précisément
dont on doit le plu.s .se défier.
EUG. LIÉBERT.
,.-
Après le 24 mai, quand le célèbre M.
Boulé promena le balai de combat dans
les préfectures, un certain 'nombre de
préfets réussirent à se réfugier du côté
du manche. Cette fois, avec M. le duc de
Broglie, il leur a fallu, comme on dit,
sauter le pas. M. Doniol, préfet de
Meurthe-et-Moselle, figure au nombre
des victimes. Il est remplacé par M. de
Chambon, qui avait l'honneur incompa-
rable d'exercer ses fonctions sous l'œil
même du maître, à Versailles, départe-
ment de Seine-et-Oise. On l'envoie dans
ce qui nous reste de Lorraine. C'est une
disgrâce. Mais aussi pourquoi a-t-ii laissé
nommer M. Calmon à la place de M. Lé-
vesque?
Nous ne félicitens certes pas les Lor-
rains en général et les Naneéens en par-
ticulier du cadeau que leur fait le gou-
vernement; mais nous ne pouvons noij
plus les plaindre bien vivement de là
perte qu'ils font dans la perspnne dé M,
Doniol. Notre intention, du reste, était
de laisser M. Doniol boucler ses malles
et quitter l'administration sans lui tfaire
le moindre bout de conduite. Mais il
tient, paraît-il, à ce que son départ soit
remarqué. Voici, en effet, la lettre qu'il
vient d'adressër aux journaux fle son dé-
partement, sans en excepter le Progrès
de l'Est :
Nancy, le 26 décembre 1873. -
Monsieur le rédacteur en chef,
Je vous prie de vouloir bien être mon inter-
prète auprès des habitants de Meurthe-et-Mo-
selle Envoyé au milieu d'eux dans des circons-
tances cruelles, ils m'avaient fait un accueil
plein d'empressement. Je leur étais très attache
et je les quitte avec regret. Qu'il me soit per-
mis de les remercier du concours dont ils ont
entouré mon administration et des bons tenu
ments qu'ils avaient pour elle.
Autant qu'il était en moi, je donnais l'exem-
ple de l'assiduité et du dévouement ; peut-être
en garderont-ils le souvenir.
Je tâchais aussi, en ce temps de passi^on, de
donner l'exemple de la modération et de la
droiture politique, seules propres à établir en-
fin dans notre, paya un gouvernement conser-
vateur digne de ce nom et digne de. la Répu-
blique.
Agrées, monsieur le rédacteur en chef, l'as-
son amant, i
surance de ma considération très-distin-
guée,
Henry Doniol,
Correspondant de l'Académie des
sciences morales et politiques de
l'institut, ancien préfet de Meur-
the-et-Moselle.
Pas plus qu'une femme, un préfet qui
tombe ne doit être insulté ; mais puis-
que M. DonioF semble en appeler à
l'opinion publique, puisqu'il semble au-
jourd'hui prendre à témoin la presse
républicaine de la défaveur qui le frap-
pe, il mérite, en effet, qu'elle s'occupe
de lui.
Oui, M. Doniol est victime d'une injus-
tice ; oui, le gouvernement de combat
fait preuve d'une ingratitude noire en le
rendant à la vie privée, car il ne trou-
vera point de serviteur plus dévoué. M.
Doniol était préfet du temps où la France
était gouverné par cet exécrable vieil-
lard qu'on mit à la porte le 24 mai ; M.
Doniol garda sa préfecture. Il reçut la
fameuse circulaire Pascal, et les instruc-
tions de M. le ministre de l'intérieur
concernant les mesures à prendre pour
s'opposer aux manifestations qu'on sa-
vait être préparées dans les villes de
l'Est dans le but de fêter le départ des
Prussiens et- d'acclamer le libérateur
du territoire; M. Doniol garda sa préfec-
ture. -
Nous nous trouvions à Nancy le jour
où la garnison allemande en sortit, et
nous pouvons rendre ce témoignage à
M. le préfet qu'il ne tint pas à lui de
donner satisfaction au gouvernement de
Versailles, Tout ce qu'il put faire pour
empêcher l'explosion du sentiment pa-
triotique, pour comprimer les élans de
reconnaissance de la population nan-
céenne à l'égard de M. Thiers, il le fit,
et même un peu au-delà. Les jour-
naux de l'ordre moral invectivaient
les citoyens qui, chaque jour, sous
un soleil de plomb, se rendaient au
chemin de fer, espérant voir arriver les
troupes françaises qu'ils n'avaient plus
revues depuis trois ans, et M. le préfet
sévissait sur les journaux républicains,
qui ne faisaient entendre que des paroles
de sagesse et de patriotisme. Le Journal
de la M'eurth et des Vosges, journal de la
préfecture, injuriait le Progrès de l'Est,
journal républicain, et M. le préfet inter-
disait la vente sur la voie publique au
Progrès de VEst. -
Le gouvernement de combat n'a point
tenu compte de tant de zèle ; il a des-
titué M. Doniol. C'est injuste, mais, en
vérité, M. Doniol ne peut demander aux
républicains de s'apitoyer sur son sort.
Au lendemain de sa révocation il s'avise
de parler de République/lui qui voyait
dans ce mot, il y a six mois, une exci-
tation à la haine des citoyens les uns
contre les autres. C'est trop montrer le
bout de l'oreille. N'ayant point réussi
avec les conservateurs, il veut se pré-
parer une rentrée dans le parti répu-
blicain. Il est bien tard ; les occasions
ne lui ont point manqué de prouver son
dévouaient aux principes libéraux; il les a
soigneusement évitées ; nous le regret-
tons pour lui et pour nous. Toutefois un.
bon procédé èn vaut -un autre, et puis-
qu'avant de quitter ses fonctions il a
bien voulu faire une politesse à la presse
républicaine, celle-ci lui doit, en retour,
un conseil, un peu tardif, à la vérité,
mais dont pourront profiter les préfets
actuels qui se sentent dans le même cas.
Le conseil n'est point neuf : il dit qu'il
ne faut pas courir deux lièvres à la fois,
sous peine de revenir bredouille. C'est
ce qui arrive à M. Doniol.
E. SCHNERB.
1
-,-'--"'- ~~r" -
LÀ PROPAGANDE BONAPARTISTE
J.
t.
De plusieurs départements on nous si-
gnale une singulière recrudescence de la
propagande bonapartiste. Le parti impéria-
liste en sera pour ses frais ; mais il sem-
blerait que ses insuccès l'enhardissent au
lieu de le décourager.
Citons aujourd'hui, comme exemple, ce
qui se passe dans la Marne, d'après le ré-
cit de l'Indépendant rémois :
Le bonapartisme se remet à travailler nos
campagnes. Ses émissaires parcourent nos vil-
lages ; il a ses commis-voyageurs qui s'intro-
duisent chez nos fermiers et nos vignerons, dis-
tribuent, EOUS forme de photographies ou de
gravures d'Epinal, des portraits du prince impé-
rial et font signer des pétitions pour l'appel au
peuple.
A Pévy, à' Prouilly, sous le patronage de
Mme X., notabilité bonapartiste ici bien,
connue, on a fait signer à quelques femmes
une adresse destinée à l'ex-impératrice. Oh
n'osait point s'adresser aux hommes.
A Ecueil, à Sacy, on a essayé de faire signer
une-pétition pour l'appel au peuple; on savait
même obtenu une vingtaine de signatures,
lorsque, sur les représentations d'un citoyen
éclairé et courageux, les signataires eux mêmes
ont réclamé que la pétition fût brûlée.
Des maires de village ont reçu et nous ont
fait remettre des portraits-cartes du prince im-
périal, entouré de eeô devises : Suffrage un-i-
versel. Souveraineté nationale. l'out pour le peu
pie et par le peuple.
D'autres portraits, du format des timbres-
poste, te distribuent clandestinement à foi-
son. ', -
I~M les -villages de la" côte de Reims, mais
surtout Verzv et Vezenay, ont été, dans cas
derniers temps, énergiquement travailles pap la
propagande bonapartiste. On en connaît le pria.
cioal agent. L'autorité préfectorale est sans
doute mieux que nous encore au courant de ses
faits et gestes. Les racoleurs de signatures ne
reculent devant aucun argument : s'ils ont
affaire à un père de famille qui jouit de quelque
aisance, ils lui disent que Napoléon IV, dès
qu'il sera sur le trône, abolira le service mili-
taire obligatoire et rendra à tous ceux qui pour-
ront en profiter la faculté de racheter leurs
enfants.
Et c'est dans un département trois ans
occupé qu'on se flatte de racoler des parti-
sans à une dynastie dont lesfautes ont été
expiées si cruellement par le pays 1
Les moyens sont d'ailleurs les mêmes
qu'en 1849 et 1850. L'imagariei est active-
ment employée pour la propagande. Parmi
les feuilles d'images qui sont distribuées
à profusion, on nous en cite une, sortie
de la maiioa Pellerin, d'Epieal, dont les
vignettes coloriées ont chacune une lé-
gende dans le goût, des suivantes :
Au retour des troupes d'Italie, l'empereur
victorieux place le prince impérial sur son che-
val. Napoléon 1er, du haut de la eblonne, sem-
bIe bénir sa race.
Le prince impérial fait sa première commu-
nion dans la chapelle des Tuileries, après avoir
reçu l'instruction Religieuse de l'abbé DegueWy,
le saint otage.
Le prince impérial reçoit courageusement, au-
près de son père, le baptême du feu.
Le prince impérial, devant la foule des Fraa-
çais venus pour sa fête en Angleterre, salue le
drapteau tricolôre et s'écrie : Tout 'pour le peu-
ple et par le peuple !
Il y en a pour tout le monde, comme
on voit, pour le soldat, pour le prêtre,
pour l'ouvrier, etc.
Nous ne redoutons pas l'effet de piéges
si grossiers, mais nous nous étonnons que
le gouvernement, si sévère pour la propa-
gande républicaine, ait tant de tolérance
pour le colportage impérialiste.
Qu'est-ce que cette prorogation tant van-
tée qui devait, pour sept ans, mettre la
République à l'abri des intrigues des par-
tis ?
Le pouvoir septennal du.jnaréchal Mac-
Mfihon n'est-il donc qu'une simple plai-
santerie ? - Pourquoi nous a-t on dit.
alors qu'il le fallait prendre au sérieux?
Et s'il faut le prendre au sérieux, que si-
gnifie cette complaisance pour les manœu-
vres'bonaparthtes qui s'exécutent partout
et au grand jour ?
COURRIER fARLEfflEUTÂIRE
Versailles, 27 décembre 4875.
Nous avions déjà eu des budgets à la va-
peur ; nous inaugurons l'ère des bugets à
l'électricité. Foin de la vapeur, cette vieille
arriérée, qui parcourt tout au plus quatre-
vingt kilomètres à l'heure, et vive l'élec-
tricité qui fait facilement ses mille lieues
en quelques secondes !
Lundi soir- au plus tard, il est néces-
saire, absolument nécessaire, d'avoir ter-
miné le vote des impôts anciens; par
conséquent, il nous faut avoir fait, en
deux séances, le tour complet d'un bud-
get des recettes. Un budget des recet-
tes, voyez-vous bien ce que cela est ? C'est
ce qui se-transporte à toutes les frontières,
ce qui court après les postes, arrête les
fiacres, pèse les sucres, goûte les alcools,
compte les portes et fenêtres, barre le che-
min à la fraude dans les étroits défilés des
montagnes et pénètre jusqu'au fond des
bourgades les plus reculées. Le budget des
recettes, c'est ce qui permet awpays, cet
enfant prodigue, ce fils de famille endetté,
de vivre et de faire encore le beau.
Une heure avant le terme ordinaire on
commençait la séance, cela est bien; mais,
si on l'avait commencée ma mois plus tôt,
cela eût été mieux. Une heure permettra
de faire; un mois eût permis de savoir ce
que l'on faisait. Et nous sommes absolu-
ment de l'avis de M. Hervé de Saisy, qui
propose que la discussion des lois budgé-
taires commence au plus tard le 1er novem-
bre de chaque année.
On vote, on vote, on vote. Nous ne sui-
vroas pas nos législateurs dans leur course
folle, pour cette bonne raison que, lorsque
l'étincelle électrique s'arrête un instant
« pour embrancher, » nous nous aperce-
vons que nous sommes régulièrement de
plusieurs stations ou articles en retard.
De temps à autre, un courageux faiseur
d'amendements se présente, mais timide-
ment; il n'ose pas s'implanter à la tribune,
les hlirrahs. de l'Assemblée le balayent.
Et les sucres se mêlent aux voitures, et
les billards se mélangent aux alcools, avec
une pointe de patriotisme par-ci par-là.
On est écrasé, ahuri, abruti sous les flots
de cette mixture sans nom; pour donner
une idée de ce budget, il faudrait êtra Ed-
gard Ppë.
Tantôt apparaît M. Chesneloug, rappor-
teur, qui, d'un ton doucereux, répond aux
faiseurs d'amendements : « C'est vrai, cela
est juste sans doute; mais on verra une
autre fois, ne dérangez pas notre budget
pour cette année, nous sommes pressés. »
Et tantôt surgit le sous-secrétaire d'Etat,
M. Lefébure, qui risque ses réponses ; —
pardon, sa réponse, car c'est toujours la
même qui s'applique à tous les cas. Le pro-
cédé employé à la date présente rappelle
un souvenir doux au cœur de tous les
pères et grands pères, de famille de l'As-
aemblée : ils songent au compliment ap-
pris par le petit enfant pour tous les pa-
rents indistinctement.
La petite affaire commence ainsi :
Messieurs les députés,
0 mes- biens chers collègues,
Et se termine:,
« Pour bien vous. contenter erç cette
heureuse anaée. »
C'est très-gentil. Parfois, de sa place,
le vieux M. Magne souffle le jeune M. Le-
fébure. Cette entente ministérielle a quel- ,
que chose de patriarcal.
M. Wolowski ne parvient, pas à faire
baisser, de dix à cinq centimes, le prix de
la carte 'postale; mais M. Ganivet obtient
qu'on diminue le tarif d'expédition des
imprimés, de facon à mettre ce tarif en
rapport awc celui des nations voisines
(Suisse et Belgique).
Ua instant, nous avons été menacés
d'une séance de dimanche; mais M. To-
lain, toujours pratique a laissé entendre
qu'il s'accommoderait aisément de la vertu
pourvu que ceux qui la prônent en don-
nassent l'exemple, et il a réclamé l'appel
nominal. Nous n'avons pas de séance
dimanche.
D'ailleurs, il ne reste plus que les nou-
veaux impôts à voter. Une séance de qua-
tre heures a suffi pour enlever, sauf trois
ou quatre chapitres réservés, le budget
complet des recettes. — Ce n'est pas un
tour dç force si extraordinaire ! nous trou-
vons bien moyen d'en rendre compte en
cent lignes. 1
PAUL LAFAitGuE.
; » -
François-Victor Hugo
M. François-Victor Hugo, ainsi que
nous l'avons annoncé, est mort avant-hier,
emporté par la maladie dont il souffrait
depuis plus d'un an, et qui ne laissait que
bien peu d'espoir à ses amis.
Né en 1828, Fran cois- Victor entrait, en
octobre 1839, au lycée Charlemagne, où il
commença ses études, avec nos amis Sar-
cey et About.
Ea 1848, il débutaït dans le journalisme
ea prenant une part active à la rédaction
de l'Evénement. Il était chargé de la poli-
tique extérieure. Un article de journal
publié un an avant le coup d'Etat lui va-
lut neuf mois de détention à la Concierge-
rie. A peine sorti de prisoB) il dut accom-
pagner son père en efcil, et il y resta dix-
huit ans.
Il publia en 1857 une étude sur Pl le de
Jersey, sfs monuments, son histoire ou la
Normandie inconnue, et la même année il
donna pour la première fois une traduc-
tion des Sonnets de Shakespeare. Ce fut
alors qu'il entreprit de traduire le grand
poète. Il se mit à l'œuvre avec passion.
Le premier volume parut en 1860 et le
dernier, en 1864. Sa joie fut grands fluand
il eut terminé. Il avait conscience d. avoir
fait une œuvre durable. Sa traduc-
tion est de beaucoup, en effet, la meilleure
qui ait été faite. Il s'était promis de ne
pas revenir en France tant que l'empire
existerait, et il se tint parole. Il fut un
des fondateurs du Rappel et envoya de
Bruxelles des articles qui furent très-ap-
préciés. On peut relire ces pages remar-
quables ; on n'y trouvera pas un mot qui
soit blessant, car c'était un des côtés les
plus singuliers de son esprit : sa jeunesse
s'est écoulée dans l'exil et son caractère
n'en fut pas aigri.
Il était vraiment bon et simplement
bon. Tous ceux qui l'approchaient étaient
frappés de cette affabilité extrême et de
cette douceur de caractère qui étaient le
fond de sa nature. Que de fois on l'a vu,
alors que les passions politiques entraî-
naient quelques-uns de ses amis, les em-
pêcher de commettre des fautes et rectifier
leur jugement ! On avait confiance en lui
parce qu'on le savait indulgent et juste.
La mort l'a enlevé à l'affection de sa fa-
mille et de ses amis à l'âge de la force,
au moment où, rentré en France, il s'ap-
prêtait à jouir de la vie, lui qui aimait
tant son pays et qui, si longtemps, en
avait été éloigné.
Que dirons-nous de la douleur du grand
poëte, qui voit ainsi disparaître tous ceux
qu'il a aimés? Ce fut d'abord sa fille Léo-
poldine, dont la fin tragique est présente à
tous les esprits. Ce fut,, il y a deux ans,
son fils Charles. Et maintenant le dernier
s'en va. Il faut avoir la foi ardente de M.
Victor Hugo pour supporter avec un cou-
rage indomptable des coups si terribles et
si souvent répétés. Il serrait hier dans ses
bras les deux petits enfants de son fils
Charles et, leur montrant la corps de leur
oncle, leur parlait, comme s'ils pouvaient
le comprendre, de l'immortalité de l'âme.
M. Victor Hugo a perdues «niants.
Mais il conserve ces deux petits êtres
qui lui rappellent ceux qui ne sont plus.
Il lui reste aussi Mme Charles Hugo,dont
il a. pu apprécier le grand cœur pendant la
maladie de François-Victor. Cette pauvre
jeune femme 1 déjà si, éprouvée, s'était
installée au chevet de son beau-frère et
elle l'a entouré jusqu'à sa mort des soins
les plus tendres et les plus dévoués.,
RAYMOND.
,.-_u_----- -----
KOUVELLES DÏSPÀGIE
Nous avions, hier, raison de dire qu'il
était contraire à toute probabilité que Mo-
riones se fût embarqué avec ses troupes
en destination de Santander, et qu'il devait
avoir plutôt pour objectif Bilbao. Un télé-
gramme du commandant en chef de l'ar-
mée du Nord annonce, en effet, qu'il a
débarqué avec ses 12,000 hommes et ses
14 pièces d'artillerie à Santong, à sept ou
huit lieues en decà de Santander.
Santona est à * trois ou quatre heures
de mer de Portugalette, entrée de la rade
de Bilbao, et à deux épes terrestres de
cette dernière place. Ajoutons, point es-
sentiel, que l'une et l'autre voie sont entiè-
rement libres. - ,
S'il est vrai, comme le disent certaines
dépêches, que Moriones ait été poussé à
ce mouvement par la difficulté de nourrir
son armée dans le Guipuzcoa, on peut dire
qu'à quelque chose malheur est bon.,
Outre l'avantage de pouvoir prendre les
carlistes à revers et les rejeter sur les Py-
rénées, l'armée républicaine aura celui de
rester en communication directe et conti-
nue avec les provinces non insurgées, ce
qui assure la régularité de ses approvision-
nements. , .,
Le Guipuzcoa n'eat pas d'ailleurs aban-
donné par les troupes républicaines. Lo-
ma reste avec s trois mille hommes
dans Us parages de Saint-Sébastien, où il
sera toujours à temps de se mettre en sûreté
si le gros de l'armée carliste avait la vel-
léité de profiler de son isolement pour fon-
dre en masse sur lui.
Pour le moment, les carlistes se bor-
hent à recommencer leurs tentatives contre
la ville de Telosa, devant laquelle ils sont
en train d'ouvrir une tranchée.
Rien de nouveau en Catalogue.
De Carthagène, il n'arrive guère aujour-
d'hui qu'une seconde édition de nos nou-
velles d'hier.
Les troupes républicaines déploient une
grande activité à construire" des routes
couvertes, des tranchées et des batteries.
On ae-sure que des agents sont arrivés à
Carthagène dans le but de peser sur les in-
surgés pour leur faire continuer leur ré-
sistance.
On mande de Madrid, 26 décembre :
Le conseil des ministres s'est réuni ce matin,
il s'est occupé des nouvelles du Nord et des
questions financières.
MM. Castelar et Salmeren ont eu une confé-
rence à cinq heures, ce soir.
Les craintes que l'on avait de désordres à Sé-
ville ont complètement disparu..
La Gazette publie un avis de M. le ministre
des finances invitant les porteurs de coupons
de toutes les classes de la dette intérieure paya-
ble par semestres à déposer; les courons cor-
respondant au second semestre de 1873, pour
servir aux versements de l'emprunt et pour
leur paiement en espèces, quand la situation du
Trésor le permettra.
Un télégramme de la Havane annonce que
le tribunal maritime espagnol a déclaré le
Virginius de bonne prise.
——————————— e ----,---'-'-.L.--.
M. le comte Rampon a adressé la lettre
suivante au rédacteur en chef du Journal
de l'Ardèche :
Monsieur, '-
Je viens de lire dans le Journal de l'Ardèeh6
votre article non signé, intitulé : « Changement
des préfets. »
Comme vous, je regrette eés mutations si fré-
quentes et si nuisibles à la bonne administra-
tion de notre département.
En parlant de moi, vous ajoutez à mon nom :
chef officiel du parti radical dans l'Ardèche.
Je n'ai qu'un mot à dire pour vous répondre.
Depuis que j'ai eu l'honneur de vous voir à Pa-
ris, lorsque vous veniez m'annoncer que vous
preniez la direction d'un journal centre gauche
à Privas, je n'ai pas ehangé d'opinion.
Je veux toujours la République conservatrice,
modérée, ouverte à tous, reposant sur le res-
pect de la religion, de la famille, de la propriété,
de l'ordre et de la loi.
Cemme je tiens à ce que l'on sache que j'ai
toujours les mêmes Opinions, je vous prie de
vouloir bien insérer ma lettre dans votre plus
prochain numéro.
Recevez, monsieur, l'expression de mes sen-
timents distingués.
, Comte RAMPON,
Député de l'Ardèche.
r_ +
INFORMATIONS
- On a distribué hier à l'Assemblée :
1° Une proposition de loi de MM. Des-
tremx, Rampon, Dupin, Hervé de Saisy,
de Valfons et Rouveure, tendant à modi-
fier le décret du 16 décembre 1871, en fa-
veur des médaillés militaires qui ne re-
çoivent pas l'allocation qui est attachée à
la médaille militaire ;
2° Quatre nouveaux amendements au
budget, dont un, signé par des mem-
bres de la gauche, tend à élever les droits
de mutation après décès, et l'autre M.
Martial Dalpit, proposant de ramener la
taxe des lettres à 20 et à 10 centimes.
>.i
On a annoncé que la formalité des pas-
se-ports venait d'être supprimée entre la
France et la Suisse. Cette nouvelle est
erronée. Ce qui est seulement exact, c'est
qu'on espère à Berne que le due Décazes
sera favorablement disposé à - faire droit
sur ce point aux. demandes du gouverne-
ment fédéral. La Suisse désire être traitée
comme la Belgique et l'Angleterre; elle
fait observer que les sujets de ces deux
puissances sont admis en France sans au-
tre formalité que la déclaration de leur
nationalité, et elle ajoute qu'elle est d'au-
tant mieux fondée à obtenir le même trai-
tement qu'elle a acheté sous l'empire la
suppression des passe-ports par urne com-
pênsation pécuniaire. Le prix des permis
de séjour pour les Français résidant en
Suisse fut considérablement abaissé à la
suite d'une convention conclue en 1864,
qui promettait en échange une prochaine
abrogation des passe-ports. Ces raisons
ont dû être exposées au -duc Decazes par
M. Kern.
On lit dans le Moniteur de L'Algérie :
Nous tenons de source certaine qu'à la
nouvelle du remplacement de M. Mahias,
préfet d'Oran, lçs délégués au conseil su-
périeur du département d'Oran se sont
rendus tous chez le gouverneur général
pour lui manifester leurs regrets et lui ex-
primer le vœu devoir rapporter cette me-
sure, qui prive leur département d'un ad-
ministrateur laborieux, au courant des af-
faires du pays, et dont les services ont été
appréciés par la population.
Oa ne prévoit pas, pour le moment, de
nouvelles modifications préfectorales. M.
de Dalmas continuera à gérer provisoire-
ment la préfecture du Puy-de-Dôme.
Le personnel da ministère de l'intérieur
doit être reçu mercredi, par le ministre, à
l'hôtel de la place Beanveau, à Paris.
C'est aujourd'hui que^paraît au Journal
officiel la première partie du mouvement
sous préfectoral.
Le transfert de Bazaine à l'île Sainte-
Marguerite n'a donné lieu 'à aucun incident
digne d'être noté.
Une foule assez considérable se pressait
sur la plage d'Antibes pour voir le con-
damné; quelques cris ont été poussés sur
son passage.
L'attentat commis sur l'ex-préfet d'Al-
ger se réduirait, si l'on en croit .un indi-
vidu arrêté, à une manifestation en l'hon-
neur de la fête de Noël.
Voici les détails que le Journal de Paris
a reçus sur cette affaire :
Mercredi, à neuf heures du soir, l'an-
cien préfet d'Alger passait en voiture avec
sa famille auprès d'une maison isolée sur
le bord de la route, entre l'Aima et la
Maison-Carrée.
La voiture a essuyé un coup de feu.
La gendarmerie s'est transportée surlei
lieux, et a procédé à l'arrestation d'un Ita-
lien, qui a reconnu avoir tiré le coup de
pistolet, mais a déclaré n'avoir voulu que
célébrer de cette façon la fête de Noël.
Le gérant et l'imprimeur du Corsaire
sont assignés pour mercredi prochain, 31
décembre, devant la 8e chambre du tribut
nal correctionnel, sous l'inculpation d'a-
voir, en publiant le journal le Corsaire,
interdit par l'autorité militaire, contre-
venu aux dispositions de l'article 20 du dé-
cret du- 17 février 1852.
Le conseil d'Etat a presque terminé l'é-
tude la de loi organique qui lui a été cou-
mise par le gouvernement.
Le conseil, pour ne pas per4re de temps
et marcher de front avec la commission des
lois constitutionnelles, a détaché la partie
qui traite de l'électorat. Il admet en prin-
cipe la majorité électorale à 2i ans.
Le conseil des ministres s'est réuni hier
matin. Il est inexact qu'il ait été donné
lecture du projet de loi sur la presse dans
l'un des derniers conseils.
t -. :
Les réceptions du 1er janvier à l'hôtel
de la présidence commenceront à midi; le
corps diplomatique sera reçu à une heure
et demie. Comme les années précédentes,
il n'y aura pas de discours. On pense que
les réceptions seront terminées à trois
heures. <
— ———————
COURRIER DE LA BOURSE
»
Après des oscillations en sens divers,
l'emprunt clôture 10 centimes plus bas
qu'hier, 93 45. Ce ne sont point là des va-
riations dont il faille s'exagérer l'impor-
tance.
Un certain nombre de petites primes
avaient été achetées pour aujourd'hui ;
ceux des spéculateurs qui les avaient réu-
nies entre leurs -mains ont, au début,
fait un effort en hausse sur le ferme : on a
coté un instant 93 65. ,.
Les vendeurs de primes, se voyant expo-
sés à des rachats de ferme, fort dange-
reux pour eux dans un moment où le
marché s'est de beaucoup rétréci, ont, à
leur tour, profité de la sensibilité des
cours. Ils se sont mis à offrir du ferme,
les petites primes ont été abandonnées et
l'incident s'est trouvé clos par une légère
réaction de 10 centimes.
En dehors de cette discussion des cours
de l'emprunt, la journée a été assez, cal-
me.
Les actions de nos chemins, celles de
nos institutions de crédit, ent témoigné
d'une suffisante fermeté.
Sur la Banque de France ùne hausse- ée
20 francs s'est produite, de 4,370 à 4,390 ;
on a remarqué quelques achats au comp-
tant, aussitôt la cote en liquidation s'est
améliorée. Pas de variations sensibles ni
de bien actives négociations sur la Ban-
que de Paris à 1,076 25; le Crédit Foncier
à 817 50, le Crédit Mobilier à 320. Au
surplus il semble que, sur ces diverses
valeurs, les positions en spéculation ont
successivement diminué d'importance.
Acheteurs et vendeurs ont, en majeure
partie, compensé réciproquement leurs
positions aux cours peu agités cotés de-
puis le commencement du mois. La sta-
gnation a fatigué bien des patiences.
Les valeurs cotées sous l'influence des
marchés étrangers ont pris une attitude
différente selon les places qui leur don-
nent le ton.
Les ootes allemandes se montrent fer-
mes, les actions des Chemins autrichiens,
des
mes, Chemins lombards, du Foncier d'Au-
triche ont conservé leurs cours d'hier
avec une certaine nuance de hausse.
Par contre le& fonds étrangers, au su-
jet desquels la spéculation prénd ses inspi-
rations à Londres, ont tous plus ou moins
rétrogradé. Les Consolidés sont arrivés en
baisse de 118 010, les correspondances an-
noncent que le Stoek -Exchange, dont la li-
quidation commence aujourd'hui, éprouve
des difficultés- comme cherté des reports;
l'ensemble de la cote anglaise est en baisse.
Par suite le Péruvien est offert chez nous
de 63 1x4 à 62 15116, le Turc 5 OiO de 46.70
à 46.15, l'Espagnol extérieur de 17 118 à
17 1116.
Bien que la discours de, M. Minghetti
ait fait pressentir, une recrudescence des
formalités imposées aux porteurs français
de rente italienne pour toucher leurs cou-
pons à Paris, on avait eipéré, vu le silence
gardé depuis lors, que ces nouvelles me-
sures ne seraient appliquées, au plus tôt,
qu'en juillet prochain.
L'annonce officielle du payement est
venue dissiper ces illusions; non-seulemenl
la production des titres est exigée, mais
le possesseur devra se présenter devant
un commissaire italien à l'effet de prêter
serment que les coupons et les titres pré-
sentés n'appartiennent, ni directement, ni
indirectement, à un sujet italien. Combien
de temps faudra-t-il pour opérer le paye-
ment d un seul semestre dans de pareilles
Pau *)c NUMÉRO : PARIS 45 CENTIMES — DÉPARTEMENTS 20 CENTIMES.
Lundi 29 Décembre 1873.
LE XIX' SIÈCLE
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
RËDACTION
adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
29 rue làromot, 2
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advertising, agent, 13, Tavistockrow, Covent Gardes.
JOURNÉE POLITIQUE
Paris, 28 décembre 4873.
À l'Assemblée, la discussion financière
continue toujours. En même temps, les
commissions travaillent avec une certaine
activité. La commission de décentralisation
s'est réunie, et aussi la sous-commission
des Neuf, cette fraction de la commission
des Trente, qui est chargée de recherches
préparatoires sur les questions constitu-
tionnelles. La veille, la commission des
Trente elle-même avait siégé ; on a dû
lire le compte rendu que nous avons donné
de sa séance. Il semble qu'elle ait été tou-
chée de certaines GritLlues; elle a. mani-
festé, du moins, le désir d'en finir assez
vite avec la loi électorale. M. Grivart y a
réfuté, dans un discours presque mordant,
les utopies de ses amis politiques, MM.
Vingtain, Pradié, de, Meaux, etc., etc.
C'est un curieux morceau que ce discours
de M. Grivart; mais ce qu'il y a de plus
curieux, c'est que les Trente ont été ame-
nés insensiblement à écouter avec faveur
les propositions de M. Laboulaye et de M.
Dufaure, deux conservateurs, à la vérité,
mais deux conservateurs républicains. Il
paraît acquis que le projet Dufaure, ce
projet déposé la veille de la révolution du
24 mai, servira de texte aux prochaines
délibérations des Trente.
La commission a bien fait, puisqu'elle
risquait Bans cela de se perdre absolument
dans les nuages.- Nous aurions des réser-
ves à faire sur le projet Dufaure ; il se
peut bien d'ailleurs que certains amende.
ments réactionnaires y soient apportés par
la majorité de la commission. Mais n'est-
il pas intéressant de mesurer le chemin
parcouru ? Nous avions naguère le spec-
tacle de gens qui voulaient tout pourfen-
dre sous la conduite du grand capitaine
Batbie ; et les voilà qui rompent jusqu'à
se retrouver en face des projets du gouver-
nement de M. Thiers, ce complice du radi-
calisme, qu'ils avaient renversé avec des
cris de fureur et d'horreur. Que restera-t-il
de leurs entreprises contre le suffrage uni-
versel ? Autant sans doute que de leurs
tentatives de restauration de la royauté.
Echec partout ! Le pays seul souffre parce
qu'il est agité et troublé. Mais malgré tant
de coups, la République et le suffrage uni-
versel se portent encore assçz bien, et même
beaucoup mieux que leurs débiles ennemis.
Peu de nouvelles de l'étranger. La plu-
part des parlements européens sont en
vacances. Un décret de Berlin a convoqué,
pour le 1er février, les électeurs du Haut -
Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle. Il
s'agit des élections au Reichstag allemand.
Nous en reparlerons. Jusqu'ici nous ne
savons pas quelle conduite ont résolu de
tenir nos concitoyens. Rappelons seule-
ment pour mémoire que, dans. ces trois
départements, toute la presse est à la solde
ou à la merci de la Prusse ; et certains
journaux, qui affectent des allures patrioti-
ques et françaises, sont ceux précisément
dont on doit le plu.s .se défier.
EUG. LIÉBERT.
,.-
Après le 24 mai, quand le célèbre M.
Boulé promena le balai de combat dans
les préfectures, un certain 'nombre de
préfets réussirent à se réfugier du côté
du manche. Cette fois, avec M. le duc de
Broglie, il leur a fallu, comme on dit,
sauter le pas. M. Doniol, préfet de
Meurthe-et-Moselle, figure au nombre
des victimes. Il est remplacé par M. de
Chambon, qui avait l'honneur incompa-
rable d'exercer ses fonctions sous l'œil
même du maître, à Versailles, départe-
ment de Seine-et-Oise. On l'envoie dans
ce qui nous reste de Lorraine. C'est une
disgrâce. Mais aussi pourquoi a-t-ii laissé
nommer M. Calmon à la place de M. Lé-
vesque?
Nous ne félicitens certes pas les Lor-
rains en général et les Naneéens en par-
ticulier du cadeau que leur fait le gou-
vernement; mais nous ne pouvons noij
plus les plaindre bien vivement de là
perte qu'ils font dans la perspnne dé M,
Doniol. Notre intention, du reste, était
de laisser M. Doniol boucler ses malles
et quitter l'administration sans lui tfaire
le moindre bout de conduite. Mais il
tient, paraît-il, à ce que son départ soit
remarqué. Voici, en effet, la lettre qu'il
vient d'adressër aux journaux fle son dé-
partement, sans en excepter le Progrès
de l'Est :
Nancy, le 26 décembre 1873. -
Monsieur le rédacteur en chef,
Je vous prie de vouloir bien être mon inter-
prète auprès des habitants de Meurthe-et-Mo-
selle Envoyé au milieu d'eux dans des circons-
tances cruelles, ils m'avaient fait un accueil
plein d'empressement. Je leur étais très attache
et je les quitte avec regret. Qu'il me soit per-
mis de les remercier du concours dont ils ont
entouré mon administration et des bons tenu
ments qu'ils avaient pour elle.
Autant qu'il était en moi, je donnais l'exem-
ple de l'assiduité et du dévouement ; peut-être
en garderont-ils le souvenir.
Je tâchais aussi, en ce temps de passi^on, de
donner l'exemple de la modération et de la
droiture politique, seules propres à établir en-
fin dans notre, paya un gouvernement conser-
vateur digne de ce nom et digne de. la Répu-
blique.
Agrées, monsieur le rédacteur en chef, l'as-
son amant, i
surance de ma considération très-distin-
guée,
Henry Doniol,
Correspondant de l'Académie des
sciences morales et politiques de
l'institut, ancien préfet de Meur-
the-et-Moselle.
Pas plus qu'une femme, un préfet qui
tombe ne doit être insulté ; mais puis-
que M. DonioF semble en appeler à
l'opinion publique, puisqu'il semble au-
jourd'hui prendre à témoin la presse
républicaine de la défaveur qui le frap-
pe, il mérite, en effet, qu'elle s'occupe
de lui.
Oui, M. Doniol est victime d'une injus-
tice ; oui, le gouvernement de combat
fait preuve d'une ingratitude noire en le
rendant à la vie privée, car il ne trou-
vera point de serviteur plus dévoué. M.
Doniol était préfet du temps où la France
était gouverné par cet exécrable vieil-
lard qu'on mit à la porte le 24 mai ; M.
Doniol garda sa préfecture. Il reçut la
fameuse circulaire Pascal, et les instruc-
tions de M. le ministre de l'intérieur
concernant les mesures à prendre pour
s'opposer aux manifestations qu'on sa-
vait être préparées dans les villes de
l'Est dans le but de fêter le départ des
Prussiens et- d'acclamer le libérateur
du territoire; M. Doniol garda sa préfec-
ture. -
Nous nous trouvions à Nancy le jour
où la garnison allemande en sortit, et
nous pouvons rendre ce témoignage à
M. le préfet qu'il ne tint pas à lui de
donner satisfaction au gouvernement de
Versailles, Tout ce qu'il put faire pour
empêcher l'explosion du sentiment pa-
triotique, pour comprimer les élans de
reconnaissance de la population nan-
céenne à l'égard de M. Thiers, il le fit,
et même un peu au-delà. Les jour-
naux de l'ordre moral invectivaient
les citoyens qui, chaque jour, sous
un soleil de plomb, se rendaient au
chemin de fer, espérant voir arriver les
troupes françaises qu'ils n'avaient plus
revues depuis trois ans, et M. le préfet
sévissait sur les journaux républicains,
qui ne faisaient entendre que des paroles
de sagesse et de patriotisme. Le Journal
de la M'eurth et des Vosges, journal de la
préfecture, injuriait le Progrès de l'Est,
journal républicain, et M. le préfet inter-
disait la vente sur la voie publique au
Progrès de VEst. -
Le gouvernement de combat n'a point
tenu compte de tant de zèle ; il a des-
titué M. Doniol. C'est injuste, mais, en
vérité, M. Doniol ne peut demander aux
républicains de s'apitoyer sur son sort.
Au lendemain de sa révocation il s'avise
de parler de République/lui qui voyait
dans ce mot, il y a six mois, une exci-
tation à la haine des citoyens les uns
contre les autres. C'est trop montrer le
bout de l'oreille. N'ayant point réussi
avec les conservateurs, il veut se pré-
parer une rentrée dans le parti répu-
blicain. Il est bien tard ; les occasions
ne lui ont point manqué de prouver son
dévouaient aux principes libéraux; il les a
soigneusement évitées ; nous le regret-
tons pour lui et pour nous. Toutefois un.
bon procédé èn vaut -un autre, et puis-
qu'avant de quitter ses fonctions il a
bien voulu faire une politesse à la presse
républicaine, celle-ci lui doit, en retour,
un conseil, un peu tardif, à la vérité,
mais dont pourront profiter les préfets
actuels qui se sentent dans le même cas.
Le conseil n'est point neuf : il dit qu'il
ne faut pas courir deux lièvres à la fois,
sous peine de revenir bredouille. C'est
ce qui arrive à M. Doniol.
E. SCHNERB.
1
-,-'--"'- ~~r" -
LÀ PROPAGANDE BONAPARTISTE
J.
t.
De plusieurs départements on nous si-
gnale une singulière recrudescence de la
propagande bonapartiste. Le parti impéria-
liste en sera pour ses frais ; mais il sem-
blerait que ses insuccès l'enhardissent au
lieu de le décourager.
Citons aujourd'hui, comme exemple, ce
qui se passe dans la Marne, d'après le ré-
cit de l'Indépendant rémois :
Le bonapartisme se remet à travailler nos
campagnes. Ses émissaires parcourent nos vil-
lages ; il a ses commis-voyageurs qui s'intro-
duisent chez nos fermiers et nos vignerons, dis-
tribuent, EOUS forme de photographies ou de
gravures d'Epinal, des portraits du prince impé-
rial et font signer des pétitions pour l'appel au
peuple.
A Pévy, à' Prouilly, sous le patronage de
Mme X., notabilité bonapartiste ici bien,
connue, on a fait signer à quelques femmes
une adresse destinée à l'ex-impératrice. Oh
n'osait point s'adresser aux hommes.
A Ecueil, à Sacy, on a essayé de faire signer
une-pétition pour l'appel au peuple; on savait
même obtenu une vingtaine de signatures,
lorsque, sur les représentations d'un citoyen
éclairé et courageux, les signataires eux mêmes
ont réclamé que la pétition fût brûlée.
Des maires de village ont reçu et nous ont
fait remettre des portraits-cartes du prince im-
périal, entouré de eeô devises : Suffrage un-i-
versel. Souveraineté nationale. l'out pour le peu
pie et par le peuple.
D'autres portraits, du format des timbres-
poste, te distribuent clandestinement à foi-
son. ', -
I~M les -villages de la" côte de Reims, mais
surtout Verzv et Vezenay, ont été, dans cas
derniers temps, énergiquement travailles pap la
propagande bonapartiste. On en connaît le pria.
cioal agent. L'autorité préfectorale est sans
doute mieux que nous encore au courant de ses
faits et gestes. Les racoleurs de signatures ne
reculent devant aucun argument : s'ils ont
affaire à un père de famille qui jouit de quelque
aisance, ils lui disent que Napoléon IV, dès
qu'il sera sur le trône, abolira le service mili-
taire obligatoire et rendra à tous ceux qui pour-
ront en profiter la faculté de racheter leurs
enfants.
Et c'est dans un département trois ans
occupé qu'on se flatte de racoler des parti-
sans à une dynastie dont lesfautes ont été
expiées si cruellement par le pays 1
Les moyens sont d'ailleurs les mêmes
qu'en 1849 et 1850. L'imagariei est active-
ment employée pour la propagande. Parmi
les feuilles d'images qui sont distribuées
à profusion, on nous en cite une, sortie
de la maiioa Pellerin, d'Epieal, dont les
vignettes coloriées ont chacune une lé-
gende dans le goût, des suivantes :
Au retour des troupes d'Italie, l'empereur
victorieux place le prince impérial sur son che-
val. Napoléon 1er, du haut de la eblonne, sem-
bIe bénir sa race.
Le prince impérial fait sa première commu-
nion dans la chapelle des Tuileries, après avoir
reçu l'instruction Religieuse de l'abbé DegueWy,
le saint otage.
Le prince impérial reçoit courageusement, au-
près de son père, le baptême du feu.
Le prince impérial, devant la foule des Fraa-
çais venus pour sa fête en Angleterre, salue le
drapteau tricolôre et s'écrie : Tout 'pour le peu-
ple et par le peuple !
Il y en a pour tout le monde, comme
on voit, pour le soldat, pour le prêtre,
pour l'ouvrier, etc.
Nous ne redoutons pas l'effet de piéges
si grossiers, mais nous nous étonnons que
le gouvernement, si sévère pour la propa-
gande républicaine, ait tant de tolérance
pour le colportage impérialiste.
Qu'est-ce que cette prorogation tant van-
tée qui devait, pour sept ans, mettre la
République à l'abri des intrigues des par-
tis ?
Le pouvoir septennal du.jnaréchal Mac-
Mfihon n'est-il donc qu'une simple plai-
santerie ? - Pourquoi nous a-t on dit.
alors qu'il le fallait prendre au sérieux?
Et s'il faut le prendre au sérieux, que si-
gnifie cette complaisance pour les manœu-
vres'bonaparthtes qui s'exécutent partout
et au grand jour ?
COURRIER fARLEfflEUTÂIRE
Versailles, 27 décembre 4875.
Nous avions déjà eu des budgets à la va-
peur ; nous inaugurons l'ère des bugets à
l'électricité. Foin de la vapeur, cette vieille
arriérée, qui parcourt tout au plus quatre-
vingt kilomètres à l'heure, et vive l'élec-
tricité qui fait facilement ses mille lieues
en quelques secondes !
Lundi soir- au plus tard, il est néces-
saire, absolument nécessaire, d'avoir ter-
miné le vote des impôts anciens; par
conséquent, il nous faut avoir fait, en
deux séances, le tour complet d'un bud-
get des recettes. Un budget des recet-
tes, voyez-vous bien ce que cela est ? C'est
ce qui se-transporte à toutes les frontières,
ce qui court après les postes, arrête les
fiacres, pèse les sucres, goûte les alcools,
compte les portes et fenêtres, barre le che-
min à la fraude dans les étroits défilés des
montagnes et pénètre jusqu'au fond des
bourgades les plus reculées. Le budget des
recettes, c'est ce qui permet awpays, cet
enfant prodigue, ce fils de famille endetté,
de vivre et de faire encore le beau.
Une heure avant le terme ordinaire on
commençait la séance, cela est bien; mais,
si on l'avait commencée ma mois plus tôt,
cela eût été mieux. Une heure permettra
de faire; un mois eût permis de savoir ce
que l'on faisait. Et nous sommes absolu-
ment de l'avis de M. Hervé de Saisy, qui
propose que la discussion des lois budgé-
taires commence au plus tard le 1er novem-
bre de chaque année.
On vote, on vote, on vote. Nous ne sui-
vroas pas nos législateurs dans leur course
folle, pour cette bonne raison que, lorsque
l'étincelle électrique s'arrête un instant
« pour embrancher, » nous nous aperce-
vons que nous sommes régulièrement de
plusieurs stations ou articles en retard.
De temps à autre, un courageux faiseur
d'amendements se présente, mais timide-
ment; il n'ose pas s'implanter à la tribune,
les hlirrahs. de l'Assemblée le balayent.
Et les sucres se mêlent aux voitures, et
les billards se mélangent aux alcools, avec
une pointe de patriotisme par-ci par-là.
On est écrasé, ahuri, abruti sous les flots
de cette mixture sans nom; pour donner
une idée de ce budget, il faudrait êtra Ed-
gard Ppë.
Tantôt apparaît M. Chesneloug, rappor-
teur, qui, d'un ton doucereux, répond aux
faiseurs d'amendements : « C'est vrai, cela
est juste sans doute; mais on verra une
autre fois, ne dérangez pas notre budget
pour cette année, nous sommes pressés. »
Et tantôt surgit le sous-secrétaire d'Etat,
M. Lefébure, qui risque ses réponses ; —
pardon, sa réponse, car c'est toujours la
même qui s'applique à tous les cas. Le pro-
cédé employé à la date présente rappelle
un souvenir doux au cœur de tous les
pères et grands pères, de famille de l'As-
aemblée : ils songent au compliment ap-
pris par le petit enfant pour tous les pa-
rents indistinctement.
La petite affaire commence ainsi :
Messieurs les députés,
0 mes- biens chers collègues,
Et se termine:,
« Pour bien vous. contenter erç cette
heureuse anaée. »
C'est très-gentil. Parfois, de sa place,
le vieux M. Magne souffle le jeune M. Le-
fébure. Cette entente ministérielle a quel- ,
que chose de patriarcal.
M. Wolowski ne parvient, pas à faire
baisser, de dix à cinq centimes, le prix de
la carte 'postale; mais M. Ganivet obtient
qu'on diminue le tarif d'expédition des
imprimés, de facon à mettre ce tarif en
rapport awc celui des nations voisines
(Suisse et Belgique).
Ua instant, nous avons été menacés
d'une séance de dimanche; mais M. To-
lain, toujours pratique a laissé entendre
qu'il s'accommoderait aisément de la vertu
pourvu que ceux qui la prônent en don-
nassent l'exemple, et il a réclamé l'appel
nominal. Nous n'avons pas de séance
dimanche.
D'ailleurs, il ne reste plus que les nou-
veaux impôts à voter. Une séance de qua-
tre heures a suffi pour enlever, sauf trois
ou quatre chapitres réservés, le budget
complet des recettes. — Ce n'est pas un
tour dç force si extraordinaire ! nous trou-
vons bien moyen d'en rendre compte en
cent lignes. 1
PAUL LAFAitGuE.
; » -
François-Victor Hugo
M. François-Victor Hugo, ainsi que
nous l'avons annoncé, est mort avant-hier,
emporté par la maladie dont il souffrait
depuis plus d'un an, et qui ne laissait que
bien peu d'espoir à ses amis.
Né en 1828, Fran cois- Victor entrait, en
octobre 1839, au lycée Charlemagne, où il
commença ses études, avec nos amis Sar-
cey et About.
Ea 1848, il débutaït dans le journalisme
ea prenant une part active à la rédaction
de l'Evénement. Il était chargé de la poli-
tique extérieure. Un article de journal
publié un an avant le coup d'Etat lui va-
lut neuf mois de détention à la Concierge-
rie. A peine sorti de prisoB) il dut accom-
pagner son père en efcil, et il y resta dix-
huit ans.
Il publia en 1857 une étude sur Pl le de
Jersey, sfs monuments, son histoire ou la
Normandie inconnue, et la même année il
donna pour la première fois une traduc-
tion des Sonnets de Shakespeare. Ce fut
alors qu'il entreprit de traduire le grand
poète. Il se mit à l'œuvre avec passion.
Le premier volume parut en 1860 et le
dernier, en 1864. Sa joie fut grands fluand
il eut terminé. Il avait conscience d. avoir
fait une œuvre durable. Sa traduc-
tion est de beaucoup, en effet, la meilleure
qui ait été faite. Il s'était promis de ne
pas revenir en France tant que l'empire
existerait, et il se tint parole. Il fut un
des fondateurs du Rappel et envoya de
Bruxelles des articles qui furent très-ap-
préciés. On peut relire ces pages remar-
quables ; on n'y trouvera pas un mot qui
soit blessant, car c'était un des côtés les
plus singuliers de son esprit : sa jeunesse
s'est écoulée dans l'exil et son caractère
n'en fut pas aigri.
Il était vraiment bon et simplement
bon. Tous ceux qui l'approchaient étaient
frappés de cette affabilité extrême et de
cette douceur de caractère qui étaient le
fond de sa nature. Que de fois on l'a vu,
alors que les passions politiques entraî-
naient quelques-uns de ses amis, les em-
pêcher de commettre des fautes et rectifier
leur jugement ! On avait confiance en lui
parce qu'on le savait indulgent et juste.
La mort l'a enlevé à l'affection de sa fa-
mille et de ses amis à l'âge de la force,
au moment où, rentré en France, il s'ap-
prêtait à jouir de la vie, lui qui aimait
tant son pays et qui, si longtemps, en
avait été éloigné.
Que dirons-nous de la douleur du grand
poëte, qui voit ainsi disparaître tous ceux
qu'il a aimés? Ce fut d'abord sa fille Léo-
poldine, dont la fin tragique est présente à
tous les esprits. Ce fut,, il y a deux ans,
son fils Charles. Et maintenant le dernier
s'en va. Il faut avoir la foi ardente de M.
Victor Hugo pour supporter avec un cou-
rage indomptable des coups si terribles et
si souvent répétés. Il serrait hier dans ses
bras les deux petits enfants de son fils
Charles et, leur montrant la corps de leur
oncle, leur parlait, comme s'ils pouvaient
le comprendre, de l'immortalité de l'âme.
M. Victor Hugo a perdues «niants.
Mais il conserve ces deux petits êtres
qui lui rappellent ceux qui ne sont plus.
Il lui reste aussi Mme Charles Hugo,dont
il a. pu apprécier le grand cœur pendant la
maladie de François-Victor. Cette pauvre
jeune femme 1 déjà si, éprouvée, s'était
installée au chevet de son beau-frère et
elle l'a entouré jusqu'à sa mort des soins
les plus tendres et les plus dévoués.,
RAYMOND.
,.-_u_----- -----
KOUVELLES DÏSPÀGIE
Nous avions, hier, raison de dire qu'il
était contraire à toute probabilité que Mo-
riones se fût embarqué avec ses troupes
en destination de Santander, et qu'il devait
avoir plutôt pour objectif Bilbao. Un télé-
gramme du commandant en chef de l'ar-
mée du Nord annonce, en effet, qu'il a
débarqué avec ses 12,000 hommes et ses
14 pièces d'artillerie à Santong, à sept ou
huit lieues en decà de Santander.
Santona est à * trois ou quatre heures
de mer de Portugalette, entrée de la rade
de Bilbao, et à deux épes terrestres de
cette dernière place. Ajoutons, point es-
sentiel, que l'une et l'autre voie sont entiè-
rement libres. - ,
S'il est vrai, comme le disent certaines
dépêches, que Moriones ait été poussé à
ce mouvement par la difficulté de nourrir
son armée dans le Guipuzcoa, on peut dire
qu'à quelque chose malheur est bon.,
Outre l'avantage de pouvoir prendre les
carlistes à revers et les rejeter sur les Py-
rénées, l'armée républicaine aura celui de
rester en communication directe et conti-
nue avec les provinces non insurgées, ce
qui assure la régularité de ses approvision-
nements. , .,
Le Guipuzcoa n'eat pas d'ailleurs aban-
donné par les troupes républicaines. Lo-
ma reste avec s trois mille hommes
dans Us parages de Saint-Sébastien, où il
sera toujours à temps de se mettre en sûreté
si le gros de l'armée carliste avait la vel-
léité de profiler de son isolement pour fon-
dre en masse sur lui.
Pour le moment, les carlistes se bor-
hent à recommencer leurs tentatives contre
la ville de Telosa, devant laquelle ils sont
en train d'ouvrir une tranchée.
Rien de nouveau en Catalogue.
De Carthagène, il n'arrive guère aujour-
d'hui qu'une seconde édition de nos nou-
velles d'hier.
Les troupes républicaines déploient une
grande activité à construire" des routes
couvertes, des tranchées et des batteries.
On ae-sure que des agents sont arrivés à
Carthagène dans le but de peser sur les in-
surgés pour leur faire continuer leur ré-
sistance.
On mande de Madrid, 26 décembre :
Le conseil des ministres s'est réuni ce matin,
il s'est occupé des nouvelles du Nord et des
questions financières.
MM. Castelar et Salmeren ont eu une confé-
rence à cinq heures, ce soir.
Les craintes que l'on avait de désordres à Sé-
ville ont complètement disparu..
La Gazette publie un avis de M. le ministre
des finances invitant les porteurs de coupons
de toutes les classes de la dette intérieure paya-
ble par semestres à déposer; les courons cor-
respondant au second semestre de 1873, pour
servir aux versements de l'emprunt et pour
leur paiement en espèces, quand la situation du
Trésor le permettra.
Un télégramme de la Havane annonce que
le tribunal maritime espagnol a déclaré le
Virginius de bonne prise.
——————————— e ----,---'-'-.L.--.
M. le comte Rampon a adressé la lettre
suivante au rédacteur en chef du Journal
de l'Ardèche :
Monsieur, '-
Je viens de lire dans le Journal de l'Ardèeh6
votre article non signé, intitulé : « Changement
des préfets. »
Comme vous, je regrette eés mutations si fré-
quentes et si nuisibles à la bonne administra-
tion de notre département.
En parlant de moi, vous ajoutez à mon nom :
chef officiel du parti radical dans l'Ardèche.
Je n'ai qu'un mot à dire pour vous répondre.
Depuis que j'ai eu l'honneur de vous voir à Pa-
ris, lorsque vous veniez m'annoncer que vous
preniez la direction d'un journal centre gauche
à Privas, je n'ai pas ehangé d'opinion.
Je veux toujours la République conservatrice,
modérée, ouverte à tous, reposant sur le res-
pect de la religion, de la famille, de la propriété,
de l'ordre et de la loi.
Cemme je tiens à ce que l'on sache que j'ai
toujours les mêmes Opinions, je vous prie de
vouloir bien insérer ma lettre dans votre plus
prochain numéro.
Recevez, monsieur, l'expression de mes sen-
timents distingués.
, Comte RAMPON,
Député de l'Ardèche.
r_ +
INFORMATIONS
- On a distribué hier à l'Assemblée :
1° Une proposition de loi de MM. Des-
tremx, Rampon, Dupin, Hervé de Saisy,
de Valfons et Rouveure, tendant à modi-
fier le décret du 16 décembre 1871, en fa-
veur des médaillés militaires qui ne re-
çoivent pas l'allocation qui est attachée à
la médaille militaire ;
2° Quatre nouveaux amendements au
budget, dont un, signé par des mem-
bres de la gauche, tend à élever les droits
de mutation après décès, et l'autre M.
Martial Dalpit, proposant de ramener la
taxe des lettres à 20 et à 10 centimes.
>.i
On a annoncé que la formalité des pas-
se-ports venait d'être supprimée entre la
France et la Suisse. Cette nouvelle est
erronée. Ce qui est seulement exact, c'est
qu'on espère à Berne que le due Décazes
sera favorablement disposé à - faire droit
sur ce point aux. demandes du gouverne-
ment fédéral. La Suisse désire être traitée
comme la Belgique et l'Angleterre; elle
fait observer que les sujets de ces deux
puissances sont admis en France sans au-
tre formalité que la déclaration de leur
nationalité, et elle ajoute qu'elle est d'au-
tant mieux fondée à obtenir le même trai-
tement qu'elle a acheté sous l'empire la
suppression des passe-ports par urne com-
pênsation pécuniaire. Le prix des permis
de séjour pour les Français résidant en
Suisse fut considérablement abaissé à la
suite d'une convention conclue en 1864,
qui promettait en échange une prochaine
abrogation des passe-ports. Ces raisons
ont dû être exposées au -duc Decazes par
M. Kern.
On lit dans le Moniteur de L'Algérie :
Nous tenons de source certaine qu'à la
nouvelle du remplacement de M. Mahias,
préfet d'Oran, lçs délégués au conseil su-
périeur du département d'Oran se sont
rendus tous chez le gouverneur général
pour lui manifester leurs regrets et lui ex-
primer le vœu devoir rapporter cette me-
sure, qui prive leur département d'un ad-
ministrateur laborieux, au courant des af-
faires du pays, et dont les services ont été
appréciés par la population.
Oa ne prévoit pas, pour le moment, de
nouvelles modifications préfectorales. M.
de Dalmas continuera à gérer provisoire-
ment la préfecture du Puy-de-Dôme.
Le personnel da ministère de l'intérieur
doit être reçu mercredi, par le ministre, à
l'hôtel de la place Beanveau, à Paris.
C'est aujourd'hui que^paraît au Journal
officiel la première partie du mouvement
sous préfectoral.
Le transfert de Bazaine à l'île Sainte-
Marguerite n'a donné lieu 'à aucun incident
digne d'être noté.
Une foule assez considérable se pressait
sur la plage d'Antibes pour voir le con-
damné; quelques cris ont été poussés sur
son passage.
L'attentat commis sur l'ex-préfet d'Al-
ger se réduirait, si l'on en croit .un indi-
vidu arrêté, à une manifestation en l'hon-
neur de la fête de Noël.
Voici les détails que le Journal de Paris
a reçus sur cette affaire :
Mercredi, à neuf heures du soir, l'an-
cien préfet d'Alger passait en voiture avec
sa famille auprès d'une maison isolée sur
le bord de la route, entre l'Aima et la
Maison-Carrée.
La voiture a essuyé un coup de feu.
La gendarmerie s'est transportée surlei
lieux, et a procédé à l'arrestation d'un Ita-
lien, qui a reconnu avoir tiré le coup de
pistolet, mais a déclaré n'avoir voulu que
célébrer de cette façon la fête de Noël.
Le gérant et l'imprimeur du Corsaire
sont assignés pour mercredi prochain, 31
décembre, devant la 8e chambre du tribut
nal correctionnel, sous l'inculpation d'a-
voir, en publiant le journal le Corsaire,
interdit par l'autorité militaire, contre-
venu aux dispositions de l'article 20 du dé-
cret du- 17 février 1852.
Le conseil d'Etat a presque terminé l'é-
tude la de loi organique qui lui a été cou-
mise par le gouvernement.
Le conseil, pour ne pas per4re de temps
et marcher de front avec la commission des
lois constitutionnelles, a détaché la partie
qui traite de l'électorat. Il admet en prin-
cipe la majorité électorale à 2i ans.
Le conseil des ministres s'est réuni hier
matin. Il est inexact qu'il ait été donné
lecture du projet de loi sur la presse dans
l'un des derniers conseils.
t -. :
Les réceptions du 1er janvier à l'hôtel
de la présidence commenceront à midi; le
corps diplomatique sera reçu à une heure
et demie. Comme les années précédentes,
il n'y aura pas de discours. On pense que
les réceptions seront terminées à trois
heures. <
— ———————
COURRIER DE LA BOURSE
»
Après des oscillations en sens divers,
l'emprunt clôture 10 centimes plus bas
qu'hier, 93 45. Ce ne sont point là des va-
riations dont il faille s'exagérer l'impor-
tance.
Un certain nombre de petites primes
avaient été achetées pour aujourd'hui ;
ceux des spéculateurs qui les avaient réu-
nies entre leurs -mains ont, au début,
fait un effort en hausse sur le ferme : on a
coté un instant 93 65. ,.
Les vendeurs de primes, se voyant expo-
sés à des rachats de ferme, fort dange-
reux pour eux dans un moment où le
marché s'est de beaucoup rétréci, ont, à
leur tour, profité de la sensibilité des
cours. Ils se sont mis à offrir du ferme,
les petites primes ont été abandonnées et
l'incident s'est trouvé clos par une légère
réaction de 10 centimes.
En dehors de cette discussion des cours
de l'emprunt, la journée a été assez, cal-
me.
Les actions de nos chemins, celles de
nos institutions de crédit, ent témoigné
d'une suffisante fermeté.
Sur la Banque de France ùne hausse- ée
20 francs s'est produite, de 4,370 à 4,390 ;
on a remarqué quelques achats au comp-
tant, aussitôt la cote en liquidation s'est
améliorée. Pas de variations sensibles ni
de bien actives négociations sur la Ban-
que de Paris à 1,076 25; le Crédit Foncier
à 817 50, le Crédit Mobilier à 320. Au
surplus il semble que, sur ces diverses
valeurs, les positions en spéculation ont
successivement diminué d'importance.
Acheteurs et vendeurs ont, en majeure
partie, compensé réciproquement leurs
positions aux cours peu agités cotés de-
puis le commencement du mois. La sta-
gnation a fatigué bien des patiences.
Les valeurs cotées sous l'influence des
marchés étrangers ont pris une attitude
différente selon les places qui leur don-
nent le ton.
Les ootes allemandes se montrent fer-
mes, les actions des Chemins autrichiens,
des
mes, Chemins lombards, du Foncier d'Au-
triche ont conservé leurs cours d'hier
avec une certaine nuance de hausse.
Par contre le& fonds étrangers, au su-
jet desquels la spéculation prénd ses inspi-
rations à Londres, ont tous plus ou moins
rétrogradé. Les Consolidés sont arrivés en
baisse de 118 010, les correspondances an-
noncent que le Stoek -Exchange, dont la li-
quidation commence aujourd'hui, éprouve
des difficultés- comme cherté des reports;
l'ensemble de la cote anglaise est en baisse.
Par suite le Péruvien est offert chez nous
de 63 1x4 à 62 15116, le Turc 5 OiO de 46.70
à 46.15, l'Espagnol extérieur de 17 118 à
17 1116.
Bien que la discours de, M. Minghetti
ait fait pressentir, une recrudescence des
formalités imposées aux porteurs français
de rente italienne pour toucher leurs cou-
pons à Paris, on avait eipéré, vu le silence
gardé depuis lors, que ces nouvelles me-
sures ne seraient appliquées, au plus tôt,
qu'en juillet prochain.
L'annonce officielle du payement est
venue dissiper ces illusions; non-seulemenl
la production des titres est exigée, mais
le possesseur devra se présenter devant
un commissaire italien à l'effet de prêter
serment que les coupons et les titres pré-
sentés n'appartiennent, ni directement, ni
indirectement, à un sujet italien. Combien
de temps faudra-t-il pour opérer le paye-
ment d un seul semestre dans de pareilles
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