Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1873-12-19
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 19 décembre 1873 19 décembre 1873
Description : 1873/12/19 (A3,N764). 1873/12/19 (A3,N764).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/03/2013
3'Année. — N° 764.
PRIX DU NUMÉRO : PARIS 15 CENTIMES — DÉPARTEMENTS 20 CENTIMES.
Vendredi 49 Décembre 4873.
I F YTYE V
liCi AlA DlCiliLHi
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
RÉDACTION
-adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
li rue lirouet,
Les manuscrits non insérés ne seront pas rendwy*
ABONNEMENTS -f:
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DÉPARTEMENTSV-
Trois mois , .,
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advertising, agent, 13, Tavistockrow, CoventGarden.
JOURNÉE POLITIQUE
Parisi 48 décembr. 4875.
Chacun a sa faiblesse. Celle des politi-
ques du centre droit, c'est l'hypocrisie. Ils
ne prêchent et ne pratiquent que gou-
vernement personnel et despotisme, mais
ils n'entendent jamais prononcer ces
deux mots sans que toute leur vertu leur
monte aux joues. Ce sont des chats, comme
dit Boileau dans un hémistiche fameux,
mais ils ne souffrent point d'être appelés
chats et s'en indignent. Il est rare que la
pruderie soit si savamment exploitée. « Se
faire un front qui ne rougit jamais » c'est
l'enfance de l'art ; et le comble, au - con-
traire, le fin du fin, dans l'état de civilisa-
tion où nous sommes arrivés, c'est juste-
ment de savoir rougir à propos. — Quoi !
nous ne sommes pas des libéraux ? Mais
on nous calomnie ! mais où notre libéra-
lisme paraît avec tout son éolat, c'est jus-
tement dans le chagrin que nous cause l'o-
bligation où l'on nous a mis de maltraiter
la liberté ! — Il ne se laissait point voler,
dit Jean Hiroux ; je l'ai fait taire! Mais
c'était bien à contre-cœur, et personne au-
tant que moi n'a d'humanité. — Telle est
à peu près la façon dont les journaux du
centre droit raisonnent, et le Français se
distingue entre tous par une effronterie
particulière.
Ce journal a senti vivement le coup
assez rude que porte à son parti l'inter-
pellation Haentjens. —Qui? Nous, libéraux,
nous aurions des candidatures officielles ?
Et pour qui donc le bonapartisme ose-t-il
nous prendre ? — Là-dessus le Français
s'emporte en une diatribe contre l'empire,
contre « ses courtisans serviles, » contre
« les convoitises de ses favoris, » contre
a le scandale de sa pression électorale, »
contre « les préfets à poigne, » en un mot
contre « la détestable politique des candi-
datures officielles. » — Eh bien, vous,
que faites-vous donc ? Où tendez-vous par
votre loi des maires, votre loi sur la
presse, vos demandes d'épuration du person-
nel administratif, - épurer M. Ducros, M. de
Fournès et M. Guigues ! — par toutes
les combinaisons enfin de votre réforme
électorale ? Et pour ne parler que d'hier,
en quelles occupations vient-on de vous
surprendre dans Seine-et-Oise et dans le
Finistère?—Nous? dit encore le Français.
Ah! ce n'est plus la même chose. On peut
bien supposer sans doute, « suivant d'ail-
» leurs l'avis de beaucoup d'esprits fort
i libéraux, » que le gouvernement a « un
» certain droit et même un certain devoir
» d'intervention dans la lutte électorale. »
Mais en quoi cela paraît-il contraire à la
liberté, je vous prie? Ce « certain droit »
et ce « certain devoir, » recommandés par
des esprits «fort libéraux, »—quand c'est
nous qui les pratiquons, — sont l'essence
de la liberté même.
Le Français nous rappelle le conte fa-
cétieux de ce moine qui, le vendredi-
saint, voulait manger un dindonneau.
Baptizo te carpam ! Il le baptisa carpe, et
prit à témoin saint Ignace qu'il faisait
maigre. En doit-il coûter davantage de
baptiser libéral M. Baragnon ? Si le nom
du sous-secrétaire d'Etat de l'intérieur se
présente le premier sous notre plume, j
c'est que nous pensons encore à son
récent discours sur les bibliothèques po-
pulaires et la Ligue de l'enseignement.
Mais M. Baragnon n'est qu'un spécimen
pris au hasard parmi le ministère. Ils
BOnt tous libéraux, ce qui revient à
dire baptisés tels par le Français. Pour
nous, qui estimons que les noms ne font
rien aux choses, nous voudrions seulement 1
que l'on s'entendît un peu. Appelez-vous
libéraux, si le mot vous est agréable, mais
cédez-nous alors le nom de réactionnaires, !
afin d'éviter de fâcheuses confusions.
Ce ne sont après tout que termes de con-
vention, et peu importe qu'on décide que
ce qui s'est appelé blanc jusqu'à ce jour
sera nommé demain noir, et réciproque-
ment. Il suffit qu'on en soit instruit pour
que personne ne s'y trompe, et avec de
bonnes définitions on éclaircit tout. Ainsi
l'on inscrirait en regard de votre mot favori,
libéralisme : Système politique inauguré,
vers 1873, par les ennemis de la liberté;
il consiste à confisquer les droits delà nation,
sous prétexte qu'elle en pourrait user, et à
copier en les exagérant les divers procédés
dé compression de l'impérialisme, qu'on
affecte d'ailleurs de haïr et de mépriser.
Hier l'Assemblée a voté la fin du bud-
sret de l'agriculture et commencé le budglt
de la guerre. Entre temps, elle a entendu
la lecture du rapport sur la loi des maires,
œuvre de M. Clapier, homme disert, hom-
me d& langue bien pendue. C'est un docu-
ment a»inous parait terriblement réaction-
Baire (anrfen style), ou passionnément li-
béral (style nouveau). Il y faudra revenir
et l'étudier d'un esprit attentif et même
sérieux. Autre nouvelle : la commission des
Trentea travaillé. Ce n'est pas un vain
bruit. on n'a pas oublié d'ailleurs qu'hier
était un de ses jours. Elle en a deux: la
metcredi et le vendredi. On présume qu'elle
emploie en méditations tout le reste de la
semaine. Elle a donc travaillé. Naturelle-
ment il n'a pas été question £ es lois cons-
titutinnelles mais de la loi éi_ale,une
loi pressée. A la constitution du pays,
c'est la commission des Neuf, une petite
sous-commission qu'elle » engendrée, qui
eoosaere son temps et ses ertl.
Avons-nous dit que U sous comws»pn
des Neuf se livre aux recherches les plus
savantes ? Ce sont vraiment des gens con-
sciencieux, et qui connaissent la valeur du
précepte : Festina lentè ! Ils ont aussi
choisi leurs jours ; comme la grande com-
! mission, ils en ont pris deux : le mardi et
le samedi, à midi. Samedi dernier, ils se
sont fait un plan d'études. Ils ont résolu
d'appeler « successivement » devant eux
tous les membres de l'Assemblée que l'on
soupçonne d'avoir quelques idées en fait de
constitution. Après quoi ils étudieront tous
les écrits, projets et ouvrages quelconques
publiés en France par des écrivains qui
n'appartiennent point à l'Assemblée depuis
les temps les plus reculés jusqu'à nos jours ;
MM.d'AndelarreetPradié sont chargés d'en
dresser préalablement le catalogue. Cette
tâche accomplie, ils examineront les légis-
lations étrangères de tout les pays et de
toutes les époques; MM. Lefèvre-Pontalis,
Waddingtonet Laboûlaye doivent procéder
à un classement préparatoire. On remar-
quera que la sous-commission des Neuf a
été composéeà dessein d'hommes de tempé-
rament solide et, autant que possible, point
trop âgés ; il est désirable, en effet, que
l'œuvre une fois commencée ne change
pas de mains, si cela se peut, et que les
mêmes sous-commissaires aient le temps
d'achever ces travaux préliminaires avant
de mourir.
Eug.Liébkrt.
— ; —
Tous les journaux ont publié, comme
nous-mêmes, une note annonçant la
résolution prise par la gauche républi-
caine de voter le projet qui alloue
300,000 fr. au maréchal de Mac-Mahon
pour les fêtes que M. le président de la
République se propose de donner le mois
prochain à l'Elysée. On eroira sans peine
que nous applaudissons de tout notre
cœur à ce projet; il est grand temps
d'ouvrir les salons si l'on veut que les
ateliers ne demeurent pas indéfiniment
fermés.
Ah ! les belles promesses qu'on nous
avait faites ! Dès le lendemain de la pro-
rogation, la France devait se transformer
en pays de cocagne ; on nous avait affir-
mé que les affaires allaient reprendre
comme par enchantement, et même il
nous souvient que certain de nos con-
frères publiaient gravement dans leurs
journaux, dès le 20 novembre, que l'in-
dustrie et le commerce ne savaient plus
où donner de la tête, tant les commandes
affluaient de tous les points de France et
d'Europe !
On creit aisément ce qu'on désire ; à
coup sûr on ne voulait pas tromper le
public ; on pensait seulement être en
avance de quelques jours sur la réalité,
et l'on était bien aise de prévenir ainsi
les mécontentements qui auraient pu se
produire dans le pays à la suite d'un vote
qui, sous prétexte de définitif, ne faisait
que prolonger le provisoire.
Il en faut rabattre aujourd'hui. L'arrêt
subit des affaires déterminé par les me-
nées monarchiques dès les mois d'août
et septembre n'a point cessé depuis le
vote de la prorogation. Interrogez le
commerce de Paris, qui, l'an dernier à
cette époque, se déclarait pleinement sa-
tisfait ; interrogez les industries de luxe,
dont les affaires, pour le seul mois de
décembre, se chiffrent d'habitude par
centaines de millions, et l'on vous répon-
dra que les plus mauvaises années n'ont
jamais été comparables à celle-ci. Le
chômage est partout, et le chômage,
c'est la ruine pour les patrons, la misère
pour les ouvriers. Les magasins regor-
gent de marchandises mais il n'y a point
d'acheteurs; on ne fabrique plus, les
faillites sueeèdent aux faillites ; et dans
les faubourgs, on a faim.
Ceux mêmes qui nous annonçaient le
plus bruyamment au mois de novembre
le prochain retour de l'âge d'or seraient
obligés aujourd'hui d'avouer que la situa-
tion est affreuse : « Paris ne travaille
pas ou travaille fort peu, disait hier la
Presse ; et une épouvantable misère me-
nace la classe ouvrière. » Hélas ! si elle
n'en était que menacée !
Cependant, l'Assemblée nationale dé-
libère ; ses commissions fonctionnent
et viendront nous dire avant peu ce
qu'elles pensent de la loi sur les maires
et de la loi électorale ; on discutera ; les
orateurs du gouvernement ne manque-
ront point d'affirmer à la tribune que
l'intérêt public exige que les maires
soient choisis en dehors des conseils mu-
nicipaux etpar l'administration centrale ;
ils prouveront que l'ordre, le calme et
la prospérité du pays sont intéressés à
la suppression de deux ou trois mil-
lions d'électeurs ; et si quelque républi-
cain morose s'avise de vouloir prolonger
le débat, si un Grévy, un Jules Simon
entreprennent de demontrer que l'on
fait fausse route, et qu'au lieu de rendre
enfin à ce malheureux pays la sécurité
dont il a besoin pour travailler et pour
vivre, on ne fera qu'exciter de plus en
plus son irritation et ses défiances, il se
trouvera sûrement quelque Jaubert pour
leur répondre ; Hâtez-vous de nous lais-
ser voter ; grâce à vous déjà, la France
a failli attendre !
Oui, grâce à nous, grâce aux républi-
eains, la France a attendu quatre jours
la loi qui conférait pour sept ans le pou-
voir executif au maréchal de Mac-Manon;
et l France ne nous en veut pas, car
elle en est e&çope £ se demander ce qu'elle
y a gagné, sinô& 4e savoir désormais
qu'il lui faut s'armer de paJ,J.en.ce, pp'-,,:,
que l'Assemblée souveraine a décidé
qu'il ne serait point fait droit, avant sept
ans, au besoin de définitif tant de fois
exprimé par la nation.
Qu'on ne se méprenne pas, d'ailleurs,
sur nos intentions ! Nous ne voulons
point dire que la consolidation du pou-
voir aux mains du maréchal ait à ce point
mécontenté le pays. Dieu merci, la
France a suffisamment prouvé le 24 mai
qu'elle faisait bon marché des hommes,
pourvu qu'il ne fût point porté d'atteinte
aux institutions. Mais ce qu'elle voulait,
et ce qu'elle avait le droit de vouloir au
mois de novembre, c'était d'être enfin
débarrassée des appréhensions de tout
genre que légitime une forme de gou-
vernement dont l'acte , de naissance in-
dique, avec une prévoyance qui ne
trompe personne, les chances de modi-
fication.
Ne demandait-on pas, hier, pour se
venger des quatre dernières élections
républicaines, de supprimer tout d'abord
le titre de République ? On s'en est soi-
gneusement conservé le droit dans la
loi de prorogation, dans cette loi qui
devait assurer la stabilité du présent et
encourager la confiance dans l'avenir.
Gomment veut-on que le commerce re-
prenne, quand il se sait exposé tous les
jours aux caprices, aux accès de nerfs
d'une Assemblée omnipotente ?
Mais ce n'est peint le moment de dis-
cuter ; la crise est à l'état aigu ; il faut y
remédier sans retard, en attendant qu'on
serésigneày mettre fin, en renonçant une
bonne fois à la politique de parti pour
faire de la politique nationale, autant
dire républicaine. Que lé maréchal de
Mac-Mahon vienne donc au plus tôt
s'installer à Paris ; qu'il s'efforce de
ramener un peu de chaleur et de vie
dans ce grand cœur, dont on ne sent plus
les battements; et puissent les 300,000 fr.
qui vont lui être alloués se répandre
sur la capitale comme une rosée fertili-
sante !
E. SCHNERB.
————————— +. —————————
Le Petit Moniteur universel, journal
politique à cinq centimes, a joué un bout
de rôle dans l'élection de Seine-et Oise.
Rôle ingrat, je l'avoue, et qui ne peut
pas même être compté parmi les utilités,
puisqu'il n'a ni empêché, ni amorti la
chute du candidat réactionnaire. Il n'im-
porte à la République qu'une piteuse
contrefaçon du Petit Journal ait publié
le 10 décembre deux pages saugrenues
pour M. Lévesque contre M. Calmon, et
que ce faetum ait été répandu dans le
département à 100 ou 150,000 exem-
plaires.
Mais on nous affirme, et l'on doit
prochainement annoncer à la tribune de
l'Assemblée que le numéro électoral
du Petit Moniteur a été distribué par les
facteurs de l'administration des postes,
sans que le journal ou la bande portât la
moindre trace d'affranchissement. On n'y
remarquait même aucune empreinte
d'aucun timbre postal.N'en eût-on répan-
du que 100,000 exemplaires dans ces
conditions inusitées, l'Etat aurait perdu
une recette de 4,000 francs, à raison de
4 centimes par numéro. Attendons l'in-
terpellation.
—————— » ——————
COURRIER PARLEMENTAIRE
Versailles, 47 décembre 1875.
Fin du budget des Travaux publics : les
votes s'enchaînent, interrompus de ci, de
là, par une observation, et rapidement res-
soudés. Nous n'en parlerons point.
Ce n'est pas que toutes ces questions ne
soient intéressantes; bien au contraire,
elles le sont trop, c'est là leur défaut. Sur
chacune d'elles il pourrait être fait un et
même plusieurs volumes, et des plus ins-
tructifs; mais, présentées de la facon dont
elles le sont en ce moment pour disparaître
instantanément, elles perdent tout leur
charme. Vous connaissez cette manière de
servir certains grande dîners : le maître
d'hôtel présente, à bras tendu, de beaux
faisans, parés de leurs plumes, qui n'ap-
paraissent que quelques secondes durant,
— mais on les mange ensuite. On s'inté-
resserait fort peu aux faisans si l'on ne
devait pas faire plus intime connaissance
avec eux. C'est ce qui nous arrive pour ces
chapitres qui ne font que nous passer sous
le nez.
Les plus intéressants d'entre eux d'ail-
leurs sont ajournés, par exemple le cha-
pitre 44, « subventions aux compagnies de
chemins de fer. » Il est gros et complexe,
comprenant la question du prix des trans-
ports et bien d'autres encore.
On nous annonce, pour la fin de la
séance, quelque chose de plus intime et
de plus brûlant : le dépôt du rapport de
M. Clapier, présentant la nouvelle loi sur
les maires. On fait même circuler le bruit
incroyable que la droite a l'intention d'in-
terrompre la discussion du budget pour
happer au passage la loi sur les maires.
« Gloire, victoire, lauriers, guerriers, »
c'est M. Jean Brunet qui perpètre sur le
budget de la guerre son discours habituel.
Connaissant le discours de l'an dernier,
l'Asse#il}lée n'écoute pas celui dp cette
année,
« En place ! en place ! »
Ces cris, partis de la. droite, réveillent
l'attention, et l'on aperçoit à la tribune If
Ciapier et son papier. M, Clapier, ce se-
rait peu; le papier, c'est tout. La droite
demande la lecture immédiate du rapport;
elle a hâte de voir trépigner sur ses an-
ellnes convictions décentralisatrices., Plus
on a aimé, plus on hait.
Et M. Clapier lit son rapport au milieu
du silence de la droite, qui ne laisse pas
éclater ses transports, et des rires, applau-
dissements ironiques et interruptions
caustiques de la gauche, qui ne dissimule
pas sa facon de penser.
Il est vrai que M. le rapporteur dissi-
mule mal la sienne.
Tout le monde connaît déjà la loi : no-
mination des maires par le gouvernement
ou l'autorité préfectorale, choix de ces
maires fait au besoin en dehors du con-
seil municipal et même en dehors de la
commune (puisque, pour être maire, il
n'est pas besoin d'habiter dans la com-
mune, mais qu'il suffit d'y avoir une ins-
cription au rôle des quatre contributions),
enfin maintien des attributions de police
aux maires. Cette dernière partie repré-
sente la concession libérale. Il est vrai
que les maires devenant les hommes du
gouvernement, ce serait presque un pléo-
nasme politique de faire nommer les agents
de police par les préfets, qui tiennent déjà
entre leurs mains la nomination des
maires.
Les conclusions du rapport sont déjà
quelque peu extraordinaires, mais, à pre-
mière audition, elles disparaissent de-
vant les considérants qui leur font une
escorte d'honneur. Nous nous expli-
quons mal la nomination de M. Cla-
pier comme rapporteur d'un projet si
délicat : il fallait uâ homme qui pût glis-
ser sur le sujet, et M. Clapier n a jamais
su qu'appuyer, peser, écraser : il fallait un
casuiste, et l'on choisit un Saint-Jean-
Bouehe-d'Or, qui ne cherche pas à farder
la vérité (ce qu'il croit la vérité); il fallait
un rapport court, esquivant la difficulté à
force de brièveté, et l'on prend le rappor-
teur le plus prolixe, le plus verbeux de la
Chambre.
M. de Broglie se retournait sur le banc
des ministres comme sur un gril. Il y avait
de quoi, en effet, en entendant des passa-
ges comme le suivant soulignés par la
gauche.
« Si le maire est révoqué pour fait d'in-
dignité, il ne serait pas juste d'en rendre
le conseil municipal solidaire. » La Pa-
lisse lui-même, élevé à la dignité de ma-
gistrat requérant, n'eût rien trouvé de
mieux : « Messieurs, aurait-il plaidé dans
sa haute indulgence, je ne crois pas que
ce soit une raison, parce que ce maire a
fait banqueroute, pour que vous condam-
niez tout son conseil municipal. »
Et, en outre, M. Clapier écrit dans un
marseillais qui se rapproche du langage de
l'espèce bovine espagnole. Il dit : Quand
la nomination du maire appartiendra à un
pouvoir neutre. » Le pouvoir neutre,
c'est le pouvoir actuel! M. de Broglie
sent des épingles dans sa banquette. Et il
ne cesse de parler du maire en dedans ou
en dehors du conseil municipal. Nous
avionll déjà les règles d'escompte; grâce à
M. Clapier, nous avons maintenant le
maire en dedans et le maire en dehors.
Et M. le rapporteur réclame l'urgence.
Il n'ose pas demander absolument l'inter-
ruption de la discussion des lois des finan-
ces, mais il pose la fixation du jour avant
la discussion des nouveaux impôts.
La bataille s'engage sur l'urgence,
a Le moment n'est pas venu de répon-
dre à ce réquisitoire contre la France. »
C'est M. Brisson (de l'extrême gauche)
qui engage le feu, et qui l'engage avec
une véhémence dont vous pouvez juger
par le début. — Et l'orateur, réclamant
les trois lectures d'usage, s'écrie :
CI Si vous trouvez que cette loi n'a pas
besoin d'être étudiée mûrement, c'est qu'il
y a chez vous un parti pris. »
— Oui ! laisse échapper un membre de
la droite, plus franc que politique.
A quoi bon discuter contre le parti pris!
Et cependant M. Christophle (du centre
gauche), membre de la minorité de la
commission, tente encore un effort. Malgré
les cris des enragés de la droite qui ré-
clament la clôture, il parvient à faire en-
tendre que, le gouvernement ayant avancé
des généralités à propos de révocations de
maires, la commission a réclamé la com-
munication des dossiers à l'appui de ces
faits, et qu'il serait bon de voir au moins
ces dossiers.Cela, il le fait entendre ; mais
comprendre, allons donc !
L'urgence est votée par la droite contre
la gauche, quelques bonapartistes et mem-
bres de l'extrême droite s'abstenant.
Reste à fixer le jour de la discussion.
M. Bigot (du centre droit) est très-pressé,
comme ami de M. le duc de Broglie; au
besoin, il couperait en deux le budget des
dépenses et le budget des recettes pour'
opérer cette belle œuvre.
Nous pensions que M. de Lavergne, le
président de la commission dubudget, s'op-
posait à cette scission déplorable, mais il a
été circonvenu par ses amis de la droite, et
tout ce qu'il ose faire, c'est de déclarer
qu'il trouverait dangereuse toute autre ma-
nière de procéder que celle qui ne laisse-
rait pas voter le budget jusqu'aux anciens
impôts inclusivement.
C'est M Langlois, membre de la com-
mission du budget, qui porte à la tribune
le langage qu'aurait dû tenir M. de La-
vergne : « Il y a cent vingt millions d'im-
pôts nouveaux qui sont arrêtés en prin-
cipe; votez les avant tout, votez-les avant
le 1er janvier. Ils sont nécessaires au Tré-
sor, tellement nécessaires qu'ils ne sont
pas suffisants; chaque jour de jtet^rd re-
présente une pefe pour l'état. » Parbleu!
b trois cent soixante-cinquième partie de
cent cinquante millions] Avec une verve
endiablée et une droiture qui charme la
salle entière, M. Langlois plaide la cause
des finances obérées : « Enfin, vous savez
bien, — il faut le dire, — que nous tirons
le diable par la queue. » Un instant, jjious
croyons que cette logique lionne fi Ire va
triompher des partis-pris collet-monté.
4bJ bien, oui ! M. Clapier reparaît, et la
douce droite, revende de son bon mouve-
ment, refuse même d'admettre la proposi-
tion 4e M. Wilson, qai demande que la
commission 4u Mget s'entende due le
cas,. -
La discussion de la loi sur les maires
viendra donc après le vote du budget gé-
néral des recettes et avant le vote des
impôts nouveaux. Si le pays se plaint
il fera preuve vraiment d'un bien vilain
caractère : il paye pour être bien gouver-
né ; le cabinet pense à le gouverner avant
de songer à le faire payer.
PAUL LAFARGUE.
—————————
UNE VICTIME EXPIATOIRE
L'Electeur du Finistère, numéro du
15 décembre, publie, immédiatement
après les résultats du scrutin, la note
suivante :
« Un moment après que l'élection du
Finistère a dû être connue à Paris, l'on
recevait à Brest une dépêche annonçant
la mise en disponibilité, par retrait d'em-
ploi, de l'honorable M. Gestin, médecin
en chef de la marine, officier de la Lé-
gion d'honneur, conseiller général, glo-
rieusement mutilé sur les champs de ba-
taille, au service de la patrie, dans la
guerre contre la Prusse.. „
r
La rédaction de cette nouvelle, la
place qu'elle occupe dans le vaillant
journal breton, et jusqu'au caractère
inusité qui a servi à l'imprimer, tout
annonce un fait énorme, destiné à pro-
duire une violente émotion. On devine
à première vue qu'un journal franche-
ment conservateur n'a pas souligné
ainsi par pur capriee les rigueurs de
l'ordre moral contre M. Gestin. Nous
nous sommes donc informés, et voici ce
que nous avons appris.
M. Gestin, comme tous les médecins
de la marine, s'est élevé par le travail,
le mérite et le courage. C'est au con-
cours qu'il a gagné tous ses grades, sauf
un, le dernier. Il dirigeait le service mé-
dieal de l'armée de Bretagne, lorsqu'à
Yvrée-l'Evêque, pendant là bataille du
Mans, un éclat d'obus lui fracassa le
bras gauche. Cette rude faveur du sort
lui valut un avancement que peu d'hom-
mes achèteraient au même prix. Ses col-
lègues, ses élèves, ses malades, ses con-
citoyens s'accordent à lui rendre justice;
il est aimé et honoré de tous.
Mais il a commis un crime abomina-
ble. Conseiller général du Finistère, il a
accepté la présidence d'une réunion
électorale, non sans avoir demandé et
obtenu l'autorisation de son chef, le pré-
fet maritime. Qu'a-t-il dit, qu'a-t-il fait
dans cette réunion parfaitement légale ?
Rien que de bon, au dire des notables
habitants de Brest, des meilleurs citoyens,
des conservateurs les plus sages. Mais
on a senti le besoin d'immoler une vic-
time sans tache- sur la tombe de ce bon
M. Le Guen, enterré vif par le suffrage
universel. Le commissaire central a dé-
noncé M. Gestin comme un farouche
ennemi de l'ordre, de la famille et de la
propriété ; il lui a prêté un discours que
ni le maire, ni les autres assistants n'a- !
vaient entendu.
Le sous-préfet a fait chorus avec le
commissaire; le préfet maritime a ap-
puyé, les députés monarchistes du dé-
partement ont insisté, et ce pauvre mi-
nistre de la marine, un brave homme,
de peu de caractère, comme on sait, a
cru faire acte d'impartialité en admet-
tant un innocent au bénéfice des cir-
constances atténuantes. Ses collègues
voulaient jeter M. Gestin à la retraite;
il a fait commuer la peine en simple
retrait d'emploi.
Nous n'hésiterions pas à sacrifier l'ho-
norable médecin en chef de la marine,
malgré tous ses talents et ses services,
s'il était convaincu de propos subversifs
ou séditieux par un jugement en due
forme.
Il y a mieux, nous nous ferions scru-
! pule de protester contre le coup qui le
( trappe si nous savions qu'il fut simple-
ment traduit en justice. Mais notre con-
science, pas plus que l'opinion publique,
n'admettra jamais qu'on puisse être in-
nocent comme citoyen et coupable com-
me médecin en chef de la marine dans
un seul et même discours. Ou M. Ges-
tin s'est permis de développer coràm
populo des théories dangereuses, et il
fallait l'envoyer en police correctionnelle;
ou les accusations portées contre lui
sont de simples ragots de police, et il
ne fallait pas frapper un honnête homme
pour si peu.
ABOUT.
4
Le Times du 17 dit, à propos des élections de
dinanche :
« Le résultat des élections francaises est
de nature à jeter la panique parmi les
conservateurs français. Les candidats ré-
publicains ont été, non-seulement victo-
rieux, mais encore à une majorité si con-
sidérable qu'elle impose la conviction que
toute tentative de la part de la commission
des Trente pour manipuler le suffrage uni-
versel restera inefficace. Il n'y aurait pas
eu à s'étonner, — et, de fait, il eût été plus
conforme à non-e attente, — que les candi-
dats républicains eussent échoué dimanche
on que du mQinfi Ha n'eussent été élus qu'à
de faibles majorités. A la vérité, l'intrigue
pouy ramener le comte de Chambord a
abouti à un avortement ridicule. Mais la
nomination du maréchal de Mac-Mahon
cormut président pour un terme de sept
ans était une victoire des conservateurs,
victoire qui n'en était pas moins significative
pour avair été obtenue gràeè à la timidité
et à l'irrésolution du centre gauche.
Le vote sur cette question du terme de
sept ans était un acte de soumission de
la part de l'Assemblée, et son résultat im-
médiat était de fortifier le gouvernement
du moment. Il eût donc été permis de
prédire que les provinces, toujours anxieu-
ses de rester en bons termes avec le pou-
voir suprême, se seraient empressées de
soutenir les candidats conservateurs au
même titre qu'elles avaient soutenu les
protégés de l'empire dans ses jours de
gloire.
Le résultat est un complet démenti de
ces prévisons. Dans le Sud, dans l'Ouest,
dans le centre, les républicains sont les
élus du peuple. La Bretagne, non moins
que dans l'Ile-de-France, les candidats
conservateurs sont considérablement dis-
tancés, et l'agitation à Versailles parmi les
membres du ministère et des soutiens de
la droite parlementaire est, dit-on, ex-
trême. »
Le Times conclut ainsi :
L'établissement d'une République con-
servatrice devrait être le but de tous ceux
qui veulent soustraire la France aux mi-
sères d'une perpétuelle agitation organi-
que; mais le moyen pour cela ne saurait
être demandé ni à la manipulation du
suffrage universel, ni et encore moins à
une mesquine immixtion dans la nomina-
tion des maires et des agents de police de
village.
—— ♦
COMMISSION DES TRENTE
Séance du 47 décembre 1875
La séance est ouverte à midi et demi.
Président : M. Batbie. M. Tarteren, secré-
taire, rédige le procès-verbal.
M. CézauDe donne lecture du procès-ver-
bal de la dernière séance, qui est adopté.
R. Talion. — Le suffrage universel est en-
tré dans les mœurs, il répond au sentiment d'é-
galité qui anime tous les Français; toucher au
suffrage universel, c'est jeter dans le pays des
ferments d'irritation. On parle de représenter
les capacités; mais la capacité est, en politiqll.
le bon sens pratique, plutôt que l'instruction
dénuée d expérience. Les déclassés et les ambi-
tieux sont tous munis de diplômes, et cependant
c'est la partie la plus subversive de la nation
Le travail est plus intéressé que la capacité à
1 ordre et à la stabilité. Chacun est intéressé à
lordre : chacun a donc part au droit de vote.
On parle de faire voter les impôts par les censi-
taires qui le paient; mais remarquez que parmi
nos impôts il y a 1,800 millions qui sont les im-
pôts de consommation, lesquels sont payés par
tous les citoyens : tous les citoyens doivent
donc être représentés.
Parmi les patentés on compte 252,000 cabare-
tiers, c'est le double du nombre des ministres
des différents cultes : diminuez de moitié le
nombre des électeurs, vous doublez la prépon-
dérance des cabaretiers.
Je me rallie à la plupart des points du projet
de M. Dufaure : je ne demanderai que cette
fixité, cette honorabilité qui résultent des con-
ditions d'âge et de la durée du domicile. Je ne
verrai pas d'inconvénient à élever l'âge de l'é-
lectorat : cette élévation est rendue nécessaire
par la nouvelle loi militaire.
Je ne serais pas éloigné de répondre, d'accord'
avec M. Vache rot, que le suffrage universel
exige un gouvernement fort, énergique et d'une
définition exacte et précise. Sans exercer les
pratiques de l'empire, il est nécessaire que l'ac-
tilon du gouvernement se fasse sentir jusque
dans la dernière commune de France.
Enfin, il ne faut pas méconnaître l'influ
qui appartient au gouvernement sur l'r , ini*en
publique, c'est-à-dire sur la presse. Il v a Il une
loi nécessaire qui se rattache à la loi électo-
Une grande erreur a été de croire que le suf-
frage universel admettait la décentralisation, qui
n'est en réalité que la désagrégation de l'influence
gouvernementale.
M. Vingtain. - Examinons l'histoire du
suffrage universel. C'est en 1828 que le suffrage
universel a été établi et la canlidature offi-
cielle a fait son apparition en même temps. La
Constituante a été une assemblée très-remar-
quable. Mais il y a eu, le 10 décembre, une
élection qui a démenti complétement le résultat
des premières élections. Voilà donc une pre-
mière inconséquence du suffrage universel. L'As-
semblée législative représentait encore des ten-
dances contraires à celles da 40 décembre Se-
conde inconséquence. La' LlirriRlfttivA au a-.~
- - - Ut -.:1"1;1 V.1S—
persée par la force et le suffrage universel a rec-
tifié cet acte commis contre ses mandataires.
A la fia de l'empire, en 1870, les électeurs vo-
tèrent en masse le plébiscite, et en 1871 le*
mêmes électeurs nommèrent une assemblée dont
chaque membre se recommandait par cette qua-
lité d'être hostile a l'empire et au plébiscite.
Le suffrage est donc l'instabilité même tasta-
bilité bien inquiétante, si l'on remarque. que la
nationalité française est le résultat dVne nenZséal
constante poursuivie à travers les siècles par
rois.
M Vacherot a pensé qu'une deuxième As-
semblée serait la sauvegarde contre le suffrage
universel ; mais ne voyez-vous pas que lAs-
semblée issue du suffrage universel sera tout et
dissoudra la Constitution ?
Voie1 quel serait mon système -
La première question est de savoir si l'électo.
rat est un droit? Nulle part l'électorat n'est un
droit En Amérique et en Suisse l'électorat est
une fonction, Mais je reconnais qu'un pays éga-
litaire gqmme le nôtre, avec son service ebliga-
taure et ses gros impôts de consommation en-
traîne un certain droit pour chacun ; mais le
droit doit être proportionné aux intérêts
Par exemple est-il vrai que le suffrage uni-
versel actue l tienne compte des intérêts de la
commune 1 Il y a des conseils municipaux qui
sont composés de membres ne payant aucSun»
contribution ou qui se sont fait exonérer pour
cause de pauvreté. Dans ces communes l'impôt
est vote par ceux qui ne le paient pas et contre
ceux qui le paient. Les communes urbaines wt
un octroi dont chaque habitant est tributaî^-
mais dans le département et dans l'Etat « :
riverait & faire voter l'impôt par ceux qui me le
paient pas.
Je désire cependant conserver le Suffrage
universel tel qu'il est pratiqué dans les sociétés
anonymes, c)est-à-dire proponionnellement aux
intérêt. de chacun.
C'est pourquoi j'ai déposé un projet de loi
municipale dont le principe général peut s'ap-
pliguer 4 I)eat..
J'établirais deux listes :
1re liste. — Suffrage universel, deux ri*nng « de
domicile et 25 ans d'âge.
2° liste. - Comprendrait les électursde la.
de contribution foncière. ,
La t re liste élira le Sénat et par arrondisse.-
ment; mais le suffrage uaiveril ne pourrait
choisir que parmi li plus imposés du départe-
met dans ia prt~ tien de Un sur cent.
Dans 14»ure-et-Loir, il y a IW,000 électeurs t-t
quatre arrondissements; il y aurait quatre séna-
teurs à élIre dans les ,,OOO plus fort imposés.
P9.W les députés, je ferais élire par scrutin
PRIX DU NUMÉRO : PARIS 15 CENTIMES — DÉPARTEMENTS 20 CENTIMES.
Vendredi 49 Décembre 4873.
I F YTYE V
liCi AlA DlCiliLHi
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
RÉDACTION
-adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
li rue lirouet,
Les manuscrits non insérés ne seront pas rendwy*
ABONNEMENTS -f:
PARIS
Trois mois 13 fi*..
8ix mois 25
Un an. 50
DÉPARTEMENTSV-
Trois mois , .,
Six mois. J,
Un an 62 N
lininrM, chez MM. LAGRANGE, CERF et C*
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ADMINISTRATION
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
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Six mois 25
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advertising, agent, 13, Tavistockrow, CoventGarden.
JOURNÉE POLITIQUE
Parisi 48 décembr. 4875.
Chacun a sa faiblesse. Celle des politi-
ques du centre droit, c'est l'hypocrisie. Ils
ne prêchent et ne pratiquent que gou-
vernement personnel et despotisme, mais
ils n'entendent jamais prononcer ces
deux mots sans que toute leur vertu leur
monte aux joues. Ce sont des chats, comme
dit Boileau dans un hémistiche fameux,
mais ils ne souffrent point d'être appelés
chats et s'en indignent. Il est rare que la
pruderie soit si savamment exploitée. « Se
faire un front qui ne rougit jamais » c'est
l'enfance de l'art ; et le comble, au - con-
traire, le fin du fin, dans l'état de civilisa-
tion où nous sommes arrivés, c'est juste-
ment de savoir rougir à propos. — Quoi !
nous ne sommes pas des libéraux ? Mais
on nous calomnie ! mais où notre libéra-
lisme paraît avec tout son éolat, c'est jus-
tement dans le chagrin que nous cause l'o-
bligation où l'on nous a mis de maltraiter
la liberté ! — Il ne se laissait point voler,
dit Jean Hiroux ; je l'ai fait taire! Mais
c'était bien à contre-cœur, et personne au-
tant que moi n'a d'humanité. — Telle est
à peu près la façon dont les journaux du
centre droit raisonnent, et le Français se
distingue entre tous par une effronterie
particulière.
Ce journal a senti vivement le coup
assez rude que porte à son parti l'inter-
pellation Haentjens. —Qui? Nous, libéraux,
nous aurions des candidatures officielles ?
Et pour qui donc le bonapartisme ose-t-il
nous prendre ? — Là-dessus le Français
s'emporte en une diatribe contre l'empire,
contre « ses courtisans serviles, » contre
« les convoitises de ses favoris, » contre
a le scandale de sa pression électorale, »
contre « les préfets à poigne, » en un mot
contre « la détestable politique des candi-
datures officielles. » — Eh bien, vous,
que faites-vous donc ? Où tendez-vous par
votre loi des maires, votre loi sur la
presse, vos demandes d'épuration du person-
nel administratif, - épurer M. Ducros, M. de
Fournès et M. Guigues ! — par toutes
les combinaisons enfin de votre réforme
électorale ? Et pour ne parler que d'hier,
en quelles occupations vient-on de vous
surprendre dans Seine-et-Oise et dans le
Finistère?—Nous? dit encore le Français.
Ah! ce n'est plus la même chose. On peut
bien supposer sans doute, « suivant d'ail-
» leurs l'avis de beaucoup d'esprits fort
i libéraux, » que le gouvernement a « un
» certain droit et même un certain devoir
» d'intervention dans la lutte électorale. »
Mais en quoi cela paraît-il contraire à la
liberté, je vous prie? Ce « certain droit »
et ce « certain devoir, » recommandés par
des esprits «fort libéraux, »—quand c'est
nous qui les pratiquons, — sont l'essence
de la liberté même.
Le Français nous rappelle le conte fa-
cétieux de ce moine qui, le vendredi-
saint, voulait manger un dindonneau.
Baptizo te carpam ! Il le baptisa carpe, et
prit à témoin saint Ignace qu'il faisait
maigre. En doit-il coûter davantage de
baptiser libéral M. Baragnon ? Si le nom
du sous-secrétaire d'Etat de l'intérieur se
présente le premier sous notre plume, j
c'est que nous pensons encore à son
récent discours sur les bibliothèques po-
pulaires et la Ligue de l'enseignement.
Mais M. Baragnon n'est qu'un spécimen
pris au hasard parmi le ministère. Ils
BOnt tous libéraux, ce qui revient à
dire baptisés tels par le Français. Pour
nous, qui estimons que les noms ne font
rien aux choses, nous voudrions seulement 1
que l'on s'entendît un peu. Appelez-vous
libéraux, si le mot vous est agréable, mais
cédez-nous alors le nom de réactionnaires, !
afin d'éviter de fâcheuses confusions.
Ce ne sont après tout que termes de con-
vention, et peu importe qu'on décide que
ce qui s'est appelé blanc jusqu'à ce jour
sera nommé demain noir, et réciproque-
ment. Il suffit qu'on en soit instruit pour
que personne ne s'y trompe, et avec de
bonnes définitions on éclaircit tout. Ainsi
l'on inscrirait en regard de votre mot favori,
libéralisme : Système politique inauguré,
vers 1873, par les ennemis de la liberté;
il consiste à confisquer les droits delà nation,
sous prétexte qu'elle en pourrait user, et à
copier en les exagérant les divers procédés
dé compression de l'impérialisme, qu'on
affecte d'ailleurs de haïr et de mépriser.
Hier l'Assemblée a voté la fin du bud-
sret de l'agriculture et commencé le budglt
de la guerre. Entre temps, elle a entendu
la lecture du rapport sur la loi des maires,
œuvre de M. Clapier, homme disert, hom-
me d& langue bien pendue. C'est un docu-
ment a»inous parait terriblement réaction-
Baire (anrfen style), ou passionnément li-
béral (style nouveau). Il y faudra revenir
et l'étudier d'un esprit attentif et même
sérieux. Autre nouvelle : la commission des
Trentea travaillé. Ce n'est pas un vain
bruit. on n'a pas oublié d'ailleurs qu'hier
était un de ses jours. Elle en a deux: la
metcredi et le vendredi. On présume qu'elle
emploie en méditations tout le reste de la
semaine. Elle a donc travaillé. Naturelle-
ment il n'a pas été question £ es lois cons-
titutinnelles mais de la loi éi_ale,une
loi pressée. A la constitution du pays,
c'est la commission des Neuf, une petite
sous-commission qu'elle » engendrée, qui
eoosaere son temps et ses ertl.
Avons-nous dit que U sous comws»pn
des Neuf se livre aux recherches les plus
savantes ? Ce sont vraiment des gens con-
sciencieux, et qui connaissent la valeur du
précepte : Festina lentè ! Ils ont aussi
choisi leurs jours ; comme la grande com-
! mission, ils en ont pris deux : le mardi et
le samedi, à midi. Samedi dernier, ils se
sont fait un plan d'études. Ils ont résolu
d'appeler « successivement » devant eux
tous les membres de l'Assemblée que l'on
soupçonne d'avoir quelques idées en fait de
constitution. Après quoi ils étudieront tous
les écrits, projets et ouvrages quelconques
publiés en France par des écrivains qui
n'appartiennent point à l'Assemblée depuis
les temps les plus reculés jusqu'à nos jours ;
MM.d'AndelarreetPradié sont chargés d'en
dresser préalablement le catalogue. Cette
tâche accomplie, ils examineront les légis-
lations étrangères de tout les pays et de
toutes les époques; MM. Lefèvre-Pontalis,
Waddingtonet Laboûlaye doivent procéder
à un classement préparatoire. On remar-
quera que la sous-commission des Neuf a
été composéeà dessein d'hommes de tempé-
rament solide et, autant que possible, point
trop âgés ; il est désirable, en effet, que
l'œuvre une fois commencée ne change
pas de mains, si cela se peut, et que les
mêmes sous-commissaires aient le temps
d'achever ces travaux préliminaires avant
de mourir.
Eug.Liébkrt.
— ; —
Tous les journaux ont publié, comme
nous-mêmes, une note annonçant la
résolution prise par la gauche républi-
caine de voter le projet qui alloue
300,000 fr. au maréchal de Mac-Mahon
pour les fêtes que M. le président de la
République se propose de donner le mois
prochain à l'Elysée. On eroira sans peine
que nous applaudissons de tout notre
cœur à ce projet; il est grand temps
d'ouvrir les salons si l'on veut que les
ateliers ne demeurent pas indéfiniment
fermés.
Ah ! les belles promesses qu'on nous
avait faites ! Dès le lendemain de la pro-
rogation, la France devait se transformer
en pays de cocagne ; on nous avait affir-
mé que les affaires allaient reprendre
comme par enchantement, et même il
nous souvient que certain de nos con-
frères publiaient gravement dans leurs
journaux, dès le 20 novembre, que l'in-
dustrie et le commerce ne savaient plus
où donner de la tête, tant les commandes
affluaient de tous les points de France et
d'Europe !
On creit aisément ce qu'on désire ; à
coup sûr on ne voulait pas tromper le
public ; on pensait seulement être en
avance de quelques jours sur la réalité,
et l'on était bien aise de prévenir ainsi
les mécontentements qui auraient pu se
produire dans le pays à la suite d'un vote
qui, sous prétexte de définitif, ne faisait
que prolonger le provisoire.
Il en faut rabattre aujourd'hui. L'arrêt
subit des affaires déterminé par les me-
nées monarchiques dès les mois d'août
et septembre n'a point cessé depuis le
vote de la prorogation. Interrogez le
commerce de Paris, qui, l'an dernier à
cette époque, se déclarait pleinement sa-
tisfait ; interrogez les industries de luxe,
dont les affaires, pour le seul mois de
décembre, se chiffrent d'habitude par
centaines de millions, et l'on vous répon-
dra que les plus mauvaises années n'ont
jamais été comparables à celle-ci. Le
chômage est partout, et le chômage,
c'est la ruine pour les patrons, la misère
pour les ouvriers. Les magasins regor-
gent de marchandises mais il n'y a point
d'acheteurs; on ne fabrique plus, les
faillites sueeèdent aux faillites ; et dans
les faubourgs, on a faim.
Ceux mêmes qui nous annonçaient le
plus bruyamment au mois de novembre
le prochain retour de l'âge d'or seraient
obligés aujourd'hui d'avouer que la situa-
tion est affreuse : « Paris ne travaille
pas ou travaille fort peu, disait hier la
Presse ; et une épouvantable misère me-
nace la classe ouvrière. » Hélas ! si elle
n'en était que menacée !
Cependant, l'Assemblée nationale dé-
libère ; ses commissions fonctionnent
et viendront nous dire avant peu ce
qu'elles pensent de la loi sur les maires
et de la loi électorale ; on discutera ; les
orateurs du gouvernement ne manque-
ront point d'affirmer à la tribune que
l'intérêt public exige que les maires
soient choisis en dehors des conseils mu-
nicipaux etpar l'administration centrale ;
ils prouveront que l'ordre, le calme et
la prospérité du pays sont intéressés à
la suppression de deux ou trois mil-
lions d'électeurs ; et si quelque républi-
cain morose s'avise de vouloir prolonger
le débat, si un Grévy, un Jules Simon
entreprennent de demontrer que l'on
fait fausse route, et qu'au lieu de rendre
enfin à ce malheureux pays la sécurité
dont il a besoin pour travailler et pour
vivre, on ne fera qu'exciter de plus en
plus son irritation et ses défiances, il se
trouvera sûrement quelque Jaubert pour
leur répondre ; Hâtez-vous de nous lais-
ser voter ; grâce à vous déjà, la France
a failli attendre !
Oui, grâce à nous, grâce aux républi-
eains, la France a attendu quatre jours
la loi qui conférait pour sept ans le pou-
voir executif au maréchal de Mac-Manon;
et l France ne nous en veut pas, car
elle en est e&çope £ se demander ce qu'elle
y a gagné, sinô& 4e savoir désormais
qu'il lui faut s'armer de paJ,J.en.ce, pp'-,,:,
que l'Assemblée souveraine a décidé
qu'il ne serait point fait droit, avant sept
ans, au besoin de définitif tant de fois
exprimé par la nation.
Qu'on ne se méprenne pas, d'ailleurs,
sur nos intentions ! Nous ne voulons
point dire que la consolidation du pou-
voir aux mains du maréchal ait à ce point
mécontenté le pays. Dieu merci, la
France a suffisamment prouvé le 24 mai
qu'elle faisait bon marché des hommes,
pourvu qu'il ne fût point porté d'atteinte
aux institutions. Mais ce qu'elle voulait,
et ce qu'elle avait le droit de vouloir au
mois de novembre, c'était d'être enfin
débarrassée des appréhensions de tout
genre que légitime une forme de gou-
vernement dont l'acte , de naissance in-
dique, avec une prévoyance qui ne
trompe personne, les chances de modi-
fication.
Ne demandait-on pas, hier, pour se
venger des quatre dernières élections
républicaines, de supprimer tout d'abord
le titre de République ? On s'en est soi-
gneusement conservé le droit dans la
loi de prorogation, dans cette loi qui
devait assurer la stabilité du présent et
encourager la confiance dans l'avenir.
Gomment veut-on que le commerce re-
prenne, quand il se sait exposé tous les
jours aux caprices, aux accès de nerfs
d'une Assemblée omnipotente ?
Mais ce n'est peint le moment de dis-
cuter ; la crise est à l'état aigu ; il faut y
remédier sans retard, en attendant qu'on
serésigneày mettre fin, en renonçant une
bonne fois à la politique de parti pour
faire de la politique nationale, autant
dire républicaine. Que lé maréchal de
Mac-Mahon vienne donc au plus tôt
s'installer à Paris ; qu'il s'efforce de
ramener un peu de chaleur et de vie
dans ce grand cœur, dont on ne sent plus
les battements; et puissent les 300,000 fr.
qui vont lui être alloués se répandre
sur la capitale comme une rosée fertili-
sante !
E. SCHNERB.
————————— +. —————————
Le Petit Moniteur universel, journal
politique à cinq centimes, a joué un bout
de rôle dans l'élection de Seine-et Oise.
Rôle ingrat, je l'avoue, et qui ne peut
pas même être compté parmi les utilités,
puisqu'il n'a ni empêché, ni amorti la
chute du candidat réactionnaire. Il n'im-
porte à la République qu'une piteuse
contrefaçon du Petit Journal ait publié
le 10 décembre deux pages saugrenues
pour M. Lévesque contre M. Calmon, et
que ce faetum ait été répandu dans le
département à 100 ou 150,000 exem-
plaires.
Mais on nous affirme, et l'on doit
prochainement annoncer à la tribune de
l'Assemblée que le numéro électoral
du Petit Moniteur a été distribué par les
facteurs de l'administration des postes,
sans que le journal ou la bande portât la
moindre trace d'affranchissement. On n'y
remarquait même aucune empreinte
d'aucun timbre postal.N'en eût-on répan-
du que 100,000 exemplaires dans ces
conditions inusitées, l'Etat aurait perdu
une recette de 4,000 francs, à raison de
4 centimes par numéro. Attendons l'in-
terpellation.
—————— » ——————
COURRIER PARLEMENTAIRE
Versailles, 47 décembre 1875.
Fin du budget des Travaux publics : les
votes s'enchaînent, interrompus de ci, de
là, par une observation, et rapidement res-
soudés. Nous n'en parlerons point.
Ce n'est pas que toutes ces questions ne
soient intéressantes; bien au contraire,
elles le sont trop, c'est là leur défaut. Sur
chacune d'elles il pourrait être fait un et
même plusieurs volumes, et des plus ins-
tructifs; mais, présentées de la facon dont
elles le sont en ce moment pour disparaître
instantanément, elles perdent tout leur
charme. Vous connaissez cette manière de
servir certains grande dîners : le maître
d'hôtel présente, à bras tendu, de beaux
faisans, parés de leurs plumes, qui n'ap-
paraissent que quelques secondes durant,
— mais on les mange ensuite. On s'inté-
resserait fort peu aux faisans si l'on ne
devait pas faire plus intime connaissance
avec eux. C'est ce qui nous arrive pour ces
chapitres qui ne font que nous passer sous
le nez.
Les plus intéressants d'entre eux d'ail-
leurs sont ajournés, par exemple le cha-
pitre 44, « subventions aux compagnies de
chemins de fer. » Il est gros et complexe,
comprenant la question du prix des trans-
ports et bien d'autres encore.
On nous annonce, pour la fin de la
séance, quelque chose de plus intime et
de plus brûlant : le dépôt du rapport de
M. Clapier, présentant la nouvelle loi sur
les maires. On fait même circuler le bruit
incroyable que la droite a l'intention d'in-
terrompre la discussion du budget pour
happer au passage la loi sur les maires.
« Gloire, victoire, lauriers, guerriers, »
c'est M. Jean Brunet qui perpètre sur le
budget de la guerre son discours habituel.
Connaissant le discours de l'an dernier,
l'Asse#il}lée n'écoute pas celui dp cette
année,
« En place ! en place ! »
Ces cris, partis de la. droite, réveillent
l'attention, et l'on aperçoit à la tribune If
Ciapier et son papier. M, Clapier, ce se-
rait peu; le papier, c'est tout. La droite
demande la lecture immédiate du rapport;
elle a hâte de voir trépigner sur ses an-
ellnes convictions décentralisatrices., Plus
on a aimé, plus on hait.
Et M. Clapier lit son rapport au milieu
du silence de la droite, qui ne laisse pas
éclater ses transports, et des rires, applau-
dissements ironiques et interruptions
caustiques de la gauche, qui ne dissimule
pas sa facon de penser.
Il est vrai que M. le rapporteur dissi-
mule mal la sienne.
Tout le monde connaît déjà la loi : no-
mination des maires par le gouvernement
ou l'autorité préfectorale, choix de ces
maires fait au besoin en dehors du con-
seil municipal et même en dehors de la
commune (puisque, pour être maire, il
n'est pas besoin d'habiter dans la com-
mune, mais qu'il suffit d'y avoir une ins-
cription au rôle des quatre contributions),
enfin maintien des attributions de police
aux maires. Cette dernière partie repré-
sente la concession libérale. Il est vrai
que les maires devenant les hommes du
gouvernement, ce serait presque un pléo-
nasme politique de faire nommer les agents
de police par les préfets, qui tiennent déjà
entre leurs mains la nomination des
maires.
Les conclusions du rapport sont déjà
quelque peu extraordinaires, mais, à pre-
mière audition, elles disparaissent de-
vant les considérants qui leur font une
escorte d'honneur. Nous nous expli-
quons mal la nomination de M. Cla-
pier comme rapporteur d'un projet si
délicat : il fallait uâ homme qui pût glis-
ser sur le sujet, et M. Clapier n a jamais
su qu'appuyer, peser, écraser : il fallait un
casuiste, et l'on choisit un Saint-Jean-
Bouehe-d'Or, qui ne cherche pas à farder
la vérité (ce qu'il croit la vérité); il fallait
un rapport court, esquivant la difficulté à
force de brièveté, et l'on prend le rappor-
teur le plus prolixe, le plus verbeux de la
Chambre.
M. de Broglie se retournait sur le banc
des ministres comme sur un gril. Il y avait
de quoi, en effet, en entendant des passa-
ges comme le suivant soulignés par la
gauche.
« Si le maire est révoqué pour fait d'in-
dignité, il ne serait pas juste d'en rendre
le conseil municipal solidaire. » La Pa-
lisse lui-même, élevé à la dignité de ma-
gistrat requérant, n'eût rien trouvé de
mieux : « Messieurs, aurait-il plaidé dans
sa haute indulgence, je ne crois pas que
ce soit une raison, parce que ce maire a
fait banqueroute, pour que vous condam-
niez tout son conseil municipal. »
Et, en outre, M. Clapier écrit dans un
marseillais qui se rapproche du langage de
l'espèce bovine espagnole. Il dit : Quand
la nomination du maire appartiendra à un
pouvoir neutre. » Le pouvoir neutre,
c'est le pouvoir actuel! M. de Broglie
sent des épingles dans sa banquette. Et il
ne cesse de parler du maire en dedans ou
en dehors du conseil municipal. Nous
avionll déjà les règles d'escompte; grâce à
M. Clapier, nous avons maintenant le
maire en dedans et le maire en dehors.
Et M. le rapporteur réclame l'urgence.
Il n'ose pas demander absolument l'inter-
ruption de la discussion des lois des finan-
ces, mais il pose la fixation du jour avant
la discussion des nouveaux impôts.
La bataille s'engage sur l'urgence,
a Le moment n'est pas venu de répon-
dre à ce réquisitoire contre la France. »
C'est M. Brisson (de l'extrême gauche)
qui engage le feu, et qui l'engage avec
une véhémence dont vous pouvez juger
par le début. — Et l'orateur, réclamant
les trois lectures d'usage, s'écrie :
CI Si vous trouvez que cette loi n'a pas
besoin d'être étudiée mûrement, c'est qu'il
y a chez vous un parti pris. »
— Oui ! laisse échapper un membre de
la droite, plus franc que politique.
A quoi bon discuter contre le parti pris!
Et cependant M. Christophle (du centre
gauche), membre de la minorité de la
commission, tente encore un effort. Malgré
les cris des enragés de la droite qui ré-
clament la clôture, il parvient à faire en-
tendre que, le gouvernement ayant avancé
des généralités à propos de révocations de
maires, la commission a réclamé la com-
munication des dossiers à l'appui de ces
faits, et qu'il serait bon de voir au moins
ces dossiers.Cela, il le fait entendre ; mais
comprendre, allons donc !
L'urgence est votée par la droite contre
la gauche, quelques bonapartistes et mem-
bres de l'extrême droite s'abstenant.
Reste à fixer le jour de la discussion.
M. Bigot (du centre droit) est très-pressé,
comme ami de M. le duc de Broglie; au
besoin, il couperait en deux le budget des
dépenses et le budget des recettes pour'
opérer cette belle œuvre.
Nous pensions que M. de Lavergne, le
président de la commission dubudget, s'op-
posait à cette scission déplorable, mais il a
été circonvenu par ses amis de la droite, et
tout ce qu'il ose faire, c'est de déclarer
qu'il trouverait dangereuse toute autre ma-
nière de procéder que celle qui ne laisse-
rait pas voter le budget jusqu'aux anciens
impôts inclusivement.
C'est M Langlois, membre de la com-
mission du budget, qui porte à la tribune
le langage qu'aurait dû tenir M. de La-
vergne : « Il y a cent vingt millions d'im-
pôts nouveaux qui sont arrêtés en prin-
cipe; votez les avant tout, votez-les avant
le 1er janvier. Ils sont nécessaires au Tré-
sor, tellement nécessaires qu'ils ne sont
pas suffisants; chaque jour de jtet^rd re-
présente une pefe pour l'état. » Parbleu!
b trois cent soixante-cinquième partie de
cent cinquante millions] Avec une verve
endiablée et une droiture qui charme la
salle entière, M. Langlois plaide la cause
des finances obérées : « Enfin, vous savez
bien, — il faut le dire, — que nous tirons
le diable par la queue. » Un instant, jjious
croyons que cette logique lionne fi Ire va
triompher des partis-pris collet-monté.
4bJ bien, oui ! M. Clapier reparaît, et la
douce droite, revende de son bon mouve-
ment, refuse même d'admettre la proposi-
tion 4e M. Wilson, qai demande que la
commission 4u Mget s'entende due le
cas,. -
La discussion de la loi sur les maires
viendra donc après le vote du budget gé-
néral des recettes et avant le vote des
impôts nouveaux. Si le pays se plaint
il fera preuve vraiment d'un bien vilain
caractère : il paye pour être bien gouver-
né ; le cabinet pense à le gouverner avant
de songer à le faire payer.
PAUL LAFARGUE.
—————————
UNE VICTIME EXPIATOIRE
L'Electeur du Finistère, numéro du
15 décembre, publie, immédiatement
après les résultats du scrutin, la note
suivante :
« Un moment après que l'élection du
Finistère a dû être connue à Paris, l'on
recevait à Brest une dépêche annonçant
la mise en disponibilité, par retrait d'em-
ploi, de l'honorable M. Gestin, médecin
en chef de la marine, officier de la Lé-
gion d'honneur, conseiller général, glo-
rieusement mutilé sur les champs de ba-
taille, au service de la patrie, dans la
guerre contre la Prusse.. „
r
La rédaction de cette nouvelle, la
place qu'elle occupe dans le vaillant
journal breton, et jusqu'au caractère
inusité qui a servi à l'imprimer, tout
annonce un fait énorme, destiné à pro-
duire une violente émotion. On devine
à première vue qu'un journal franche-
ment conservateur n'a pas souligné
ainsi par pur capriee les rigueurs de
l'ordre moral contre M. Gestin. Nous
nous sommes donc informés, et voici ce
que nous avons appris.
M. Gestin, comme tous les médecins
de la marine, s'est élevé par le travail,
le mérite et le courage. C'est au con-
cours qu'il a gagné tous ses grades, sauf
un, le dernier. Il dirigeait le service mé-
dieal de l'armée de Bretagne, lorsqu'à
Yvrée-l'Evêque, pendant là bataille du
Mans, un éclat d'obus lui fracassa le
bras gauche. Cette rude faveur du sort
lui valut un avancement que peu d'hom-
mes achèteraient au même prix. Ses col-
lègues, ses élèves, ses malades, ses con-
citoyens s'accordent à lui rendre justice;
il est aimé et honoré de tous.
Mais il a commis un crime abomina-
ble. Conseiller général du Finistère, il a
accepté la présidence d'une réunion
électorale, non sans avoir demandé et
obtenu l'autorisation de son chef, le pré-
fet maritime. Qu'a-t-il dit, qu'a-t-il fait
dans cette réunion parfaitement légale ?
Rien que de bon, au dire des notables
habitants de Brest, des meilleurs citoyens,
des conservateurs les plus sages. Mais
on a senti le besoin d'immoler une vic-
time sans tache- sur la tombe de ce bon
M. Le Guen, enterré vif par le suffrage
universel. Le commissaire central a dé-
noncé M. Gestin comme un farouche
ennemi de l'ordre, de la famille et de la
propriété ; il lui a prêté un discours que
ni le maire, ni les autres assistants n'a- !
vaient entendu.
Le sous-préfet a fait chorus avec le
commissaire; le préfet maritime a ap-
puyé, les députés monarchistes du dé-
partement ont insisté, et ce pauvre mi-
nistre de la marine, un brave homme,
de peu de caractère, comme on sait, a
cru faire acte d'impartialité en admet-
tant un innocent au bénéfice des cir-
constances atténuantes. Ses collègues
voulaient jeter M. Gestin à la retraite;
il a fait commuer la peine en simple
retrait d'emploi.
Nous n'hésiterions pas à sacrifier l'ho-
norable médecin en chef de la marine,
malgré tous ses talents et ses services,
s'il était convaincu de propos subversifs
ou séditieux par un jugement en due
forme.
Il y a mieux, nous nous ferions scru-
! pule de protester contre le coup qui le
( trappe si nous savions qu'il fut simple-
ment traduit en justice. Mais notre con-
science, pas plus que l'opinion publique,
n'admettra jamais qu'on puisse être in-
nocent comme citoyen et coupable com-
me médecin en chef de la marine dans
un seul et même discours. Ou M. Ges-
tin s'est permis de développer coràm
populo des théories dangereuses, et il
fallait l'envoyer en police correctionnelle;
ou les accusations portées contre lui
sont de simples ragots de police, et il
ne fallait pas frapper un honnête homme
pour si peu.
ABOUT.
4
Le Times du 17 dit, à propos des élections de
dinanche :
« Le résultat des élections francaises est
de nature à jeter la panique parmi les
conservateurs français. Les candidats ré-
publicains ont été, non-seulement victo-
rieux, mais encore à une majorité si con-
sidérable qu'elle impose la conviction que
toute tentative de la part de la commission
des Trente pour manipuler le suffrage uni-
versel restera inefficace. Il n'y aurait pas
eu à s'étonner, — et, de fait, il eût été plus
conforme à non-e attente, — que les candi-
dats républicains eussent échoué dimanche
on que du mQinfi Ha n'eussent été élus qu'à
de faibles majorités. A la vérité, l'intrigue
pouy ramener le comte de Chambord a
abouti à un avortement ridicule. Mais la
nomination du maréchal de Mac-Mahon
cormut président pour un terme de sept
ans était une victoire des conservateurs,
victoire qui n'en était pas moins significative
pour avair été obtenue gràeè à la timidité
et à l'irrésolution du centre gauche.
Le vote sur cette question du terme de
sept ans était un acte de soumission de
la part de l'Assemblée, et son résultat im-
médiat était de fortifier le gouvernement
du moment. Il eût donc été permis de
prédire que les provinces, toujours anxieu-
ses de rester en bons termes avec le pou-
voir suprême, se seraient empressées de
soutenir les candidats conservateurs au
même titre qu'elles avaient soutenu les
protégés de l'empire dans ses jours de
gloire.
Le résultat est un complet démenti de
ces prévisons. Dans le Sud, dans l'Ouest,
dans le centre, les républicains sont les
élus du peuple. La Bretagne, non moins
que dans l'Ile-de-France, les candidats
conservateurs sont considérablement dis-
tancés, et l'agitation à Versailles parmi les
membres du ministère et des soutiens de
la droite parlementaire est, dit-on, ex-
trême. »
Le Times conclut ainsi :
L'établissement d'une République con-
servatrice devrait être le but de tous ceux
qui veulent soustraire la France aux mi-
sères d'une perpétuelle agitation organi-
que; mais le moyen pour cela ne saurait
être demandé ni à la manipulation du
suffrage universel, ni et encore moins à
une mesquine immixtion dans la nomina-
tion des maires et des agents de police de
village.
—— ♦
COMMISSION DES TRENTE
Séance du 47 décembre 1875
La séance est ouverte à midi et demi.
Président : M. Batbie. M. Tarteren, secré-
taire, rédige le procès-verbal.
M. CézauDe donne lecture du procès-ver-
bal de la dernière séance, qui est adopté.
R. Talion. — Le suffrage universel est en-
tré dans les mœurs, il répond au sentiment d'é-
galité qui anime tous les Français; toucher au
suffrage universel, c'est jeter dans le pays des
ferments d'irritation. On parle de représenter
les capacités; mais la capacité est, en politiqll.
le bon sens pratique, plutôt que l'instruction
dénuée d expérience. Les déclassés et les ambi-
tieux sont tous munis de diplômes, et cependant
c'est la partie la plus subversive de la nation
Le travail est plus intéressé que la capacité à
1 ordre et à la stabilité. Chacun est intéressé à
lordre : chacun a donc part au droit de vote.
On parle de faire voter les impôts par les censi-
taires qui le paient; mais remarquez que parmi
nos impôts il y a 1,800 millions qui sont les im-
pôts de consommation, lesquels sont payés par
tous les citoyens : tous les citoyens doivent
donc être représentés.
Parmi les patentés on compte 252,000 cabare-
tiers, c'est le double du nombre des ministres
des différents cultes : diminuez de moitié le
nombre des électeurs, vous doublez la prépon-
dérance des cabaretiers.
Je me rallie à la plupart des points du projet
de M. Dufaure : je ne demanderai que cette
fixité, cette honorabilité qui résultent des con-
ditions d'âge et de la durée du domicile. Je ne
verrai pas d'inconvénient à élever l'âge de l'é-
lectorat : cette élévation est rendue nécessaire
par la nouvelle loi militaire.
Je ne serais pas éloigné de répondre, d'accord'
avec M. Vache rot, que le suffrage universel
exige un gouvernement fort, énergique et d'une
définition exacte et précise. Sans exercer les
pratiques de l'empire, il est nécessaire que l'ac-
tilon du gouvernement se fasse sentir jusque
dans la dernière commune de France.
Enfin, il ne faut pas méconnaître l'influ
qui appartient au gouvernement sur l'r , ini*en
publique, c'est-à-dire sur la presse. Il v a Il une
loi nécessaire qui se rattache à la loi électo-
Une grande erreur a été de croire que le suf-
frage universel admettait la décentralisation, qui
n'est en réalité que la désagrégation de l'influence
gouvernementale.
M. Vingtain. - Examinons l'histoire du
suffrage universel. C'est en 1828 que le suffrage
universel a été établi et la canlidature offi-
cielle a fait son apparition en même temps. La
Constituante a été une assemblée très-remar-
quable. Mais il y a eu, le 10 décembre, une
élection qui a démenti complétement le résultat
des premières élections. Voilà donc une pre-
mière inconséquence du suffrage universel. L'As-
semblée législative représentait encore des ten-
dances contraires à celles da 40 décembre Se-
conde inconséquence. La' LlirriRlfttivA au a-.~
- - - Ut -.:1"1;1 V.1S—
persée par la force et le suffrage universel a rec-
tifié cet acte commis contre ses mandataires.
A la fia de l'empire, en 1870, les électeurs vo-
tèrent en masse le plébiscite, et en 1871 le*
mêmes électeurs nommèrent une assemblée dont
chaque membre se recommandait par cette qua-
lité d'être hostile a l'empire et au plébiscite.
Le suffrage est donc l'instabilité même tasta-
bilité bien inquiétante, si l'on remarque. que la
nationalité française est le résultat dVne nenZséal
constante poursuivie à travers les siècles par
rois.
M Vacherot a pensé qu'une deuxième As-
semblée serait la sauvegarde contre le suffrage
universel ; mais ne voyez-vous pas que lAs-
semblée issue du suffrage universel sera tout et
dissoudra la Constitution ?
Voie1 quel serait mon système -
La première question est de savoir si l'électo.
rat est un droit? Nulle part l'électorat n'est un
droit En Amérique et en Suisse l'électorat est
une fonction, Mais je reconnais qu'un pays éga-
litaire gqmme le nôtre, avec son service ebliga-
taure et ses gros impôts de consommation en-
traîne un certain droit pour chacun ; mais le
droit doit être proportionné aux intérêts
Par exemple est-il vrai que le suffrage uni-
versel actue l tienne compte des intérêts de la
commune 1 Il y a des conseils municipaux qui
sont composés de membres ne payant aucSun»
contribution ou qui se sont fait exonérer pour
cause de pauvreté. Dans ces communes l'impôt
est vote par ceux qui ne le paient pas et contre
ceux qui le paient. Les communes urbaines wt
un octroi dont chaque habitant est tributaî^-
mais dans le département et dans l'Etat « :
riverait & faire voter l'impôt par ceux qui me le
paient pas.
Je désire cependant conserver le Suffrage
universel tel qu'il est pratiqué dans les sociétés
anonymes, c)est-à-dire proponionnellement aux
intérêt. de chacun.
C'est pourquoi j'ai déposé un projet de loi
municipale dont le principe général peut s'ap-
pliguer 4 I)eat..
J'établirais deux listes :
1re liste. — Suffrage universel, deux ri*nng « de
domicile et 25 ans d'âge.
2° liste. - Comprendrait les électursde la.
de contribution foncière. ,
La t re liste élira le Sénat et par arrondisse.-
ment; mais le suffrage uaiveril ne pourrait
choisir que parmi li plus imposés du départe-
met dans ia prt~ tien de Un sur cent.
Dans 14»ure-et-Loir, il y a IW,000 électeurs t-t
quatre arrondissements; il y aurait quatre séna-
teurs à élIre dans les ,,OOO plus fort imposés.
P9.W les députés, je ferais élire par scrutin
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