Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1873-10-26
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32757974m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 68249 Nombre total de vues : 68249
Description : 26 octobre 1873 26 octobre 1873
Description : 1873/10/26 (A3,N710). 1873/10/26 (A3,N710).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75580682
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/03/2013
3e AJWée" - N° 710. PRIX DU NUMÉRO : PARIS 15 CENTIMES — DÉPARTEMENTS 20 CENTIMES.
Dimanche 26 Octobre 1873.
1
ï E,
i: JL iu
F -. ,~ ,-
.-.. fi ..-."
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
REDACTION -_-::=::
"adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
2, rue Drouot, *
L., manuscrits non insérés ne seront pas rendUl.
ABONNEMENTS
PARIS
Trois mois 13 Ite.
Six mois 25
Un &D..,. 50
DÉPART 1
,
Trois mois. *36 fil
Six mois
* ; e- 1 ;7..1~ 6 2
Un an.T.A'62
/} >
Annonces, chez MM. LAGRANGE, CERF et Í#
0, place de la Bonne, 8
On s'abonne à Londres, chez M. A. MAURICE général
advertising, agent, 13, Tavistockrow, Gouent Garden.
ADMINISTRATION
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
to rue Drouot* *
Iet lettres non affranchies ssront refait*
ABONNEMENTS
PARIS
Trois mois 13 fr.
Six mois. 25
Un (m.,. 50
DÉPARTKMBnri t\
Trois mois.;.* » 16 flr.
Six mon. 12
Un an.69
- t
Annonces, chez MM. LAGRANGE, CERF et O*
0. place de la Etonne, 8
On s'abonne à Londres, chez M. A. MAURICÈ général-
ndvertising, agent, 13, Tavistockrow, CoventGardea»
Déclaration du Centre gauche :
« Le centre gauche reste uni
dans la conviction que la Républi-
que conservatrice est la plus sûre
garantie de l'ordre comme de la
liberté, et .que la restauration mo-
narchique dont il est question ne
serait pour la France qu'une cause
de nouvelles révolutions. »
Réponse du Centre gauche au
Centre droit :
« Nous ne pouvons pas douter
que dans les conditions où la mo-
narchie est imposée j elle serait
considérée par le pays comme une
revanche de 1789, ce qu'elle serait
d'ailleurs en réalité. Dans ces con-
ditions, le centre gauche ne peut
accepter de communications offi-
cielles qui ressembleraient à des
négociations qu'il ne veut pas
entamer. »
■— *
J'DUR NE POLITIQUE
Paris, 25 octobre 1873.
Il n'est question dans les journaux,
comme dans les conversations du public,
que de la journée d'avant-hier, des décla-
rations du centre gauche et de la confusion
du parti royaliste. Les feuilles qui s'étaient
engagées dans le complot de restauration,
ne gavent plus comment dissimuler la perte
de leurs espérances. Quelques-unes croient
s'en tirer par un redoublement d'effron-
terie. Le Français est du nombre.
Les royalistes n'ont pas osé demander à
la commission de permanence la convo-
cation anticipée de l'Assemblée. Le Fran-
çais insinue qu'ils n'y songeaient point,
qu'ils auraient eupeur d'avoir l'air de vou-
loir précipiter les choses. Fausse explication,
puisque, dans les réunions de la droite et
du centre droit, on s'était prononcé la
veille pour la convocation anticipée. Si les
royalistes y ont renoncé après qu'ils ont
pu, mieux connaître les dispositions du
centre gauche, c'est qu'ils ont recula et
leur panique était, du reste bien justifiée
par l'événement.
,Les royalistes voulaient imposer à la
France,la monarchie sans discussion ; ils
annonçaient la réunion de la Chambre pour
le 27, le vote de la monarchie pour le 28,
et l'entrée triomphale de M. le comte do
Chambord à Paris devait avoir lieu le ler lao-
vembre. Entre le 27 et le 28, où donc
aurait pu prendre place un débat qu'ils
étaient bien décidés à étouffer ? Et le Fran-
çais retourne aujourd'hui contre nous là
trop juste accusation qu'avaient méritée
ses amis ! Les républicains prétendent,
dit-il, refuser la délibération et la lumière.
Cela est faux. Les amis du Français pro-
duiront en faveur de la monarchie autant
d'argumenta qu'il leur conviendra ; et s'ils
ne disent rien, c'est qu'ils se feront justice
à eux-mêmes et qu'ils sentiront qu'ils n'ont
'« -,
Les royalistes avaient fait retrancher dit
P~ë~
doSalzbourg toutes les garanties annon-
cées pour le suffrage universel et la liberté
d^a presse ; ces deux mots de suffrage ]
universel et de liberté de la presse, inscrits
d abord, dans unetliste trompeuse que pu-
blia le Journal de Parts, oat été biffés par-
les Sucions royalistes du 22 octobre (voir
les procès-verbaux officiels). Tout le monde
a pu constater cét escamotage. Le Français,
cépçnâant, faisant atix rlteIÍiD'res du centre
gauche une peinture de l'idéale royauté
qu'ils ont perdue j « met ees a v c-,: r
sabres au défi de relever une seule des
conquêtes de la société moderne qui
nt trouve sa conçécratioa et dans le
teste et dans la forme - même de l'acte
mis en discussion. » Le suffrage universel
etrla liberté delà presse, pour ne pasd'autre chose, ne comptent donc pas au
nombre des conquêtes de la société mo
derne? Et le même Français, dans le .mê-
me article, ose affirmer que c'est du côte.
de #a rr.onarcbie aristocratique et ultra-
moutaine que sont les idées-libérales, plus
libérales que les principes de 1789. A mer-
veille, et demain nous apprendrons sans
doute que, fi ces pauvres émigrés qu'on
calomniait ont jadis combattu la frADce,
c'était pour la soustraire au despotisme dé
la Révolution. -
Tout est de cette fjrce dans la polémi-
qae du Français ; nous le disons sans èpi-
gramme: il faut être, en effet, bien
« fort » pour berner ainsi ses contempo-
rains. Oa ne sait si le Français blesse da-'
vantage la conscience publique et le sens
commun; il s'attaque, du reste, avec une
égale vaiil mee, à l'un et à l'autre. Sa mo-
narchie n'en est pas moins perdue, et sm
roi restera en Autriche ; nous voyons qu'il
s'y trouve bien, 'et il y est assurément beau-
coup mieux qu'en Fran6.Déjà (ce qui 8;t un
bien clair indice), on commence à ne plus
nous parler, comme en lo faisait tant ces-
derniers jour s,de République ouroyauté-y non,
ce n'est plus ainsi, depuis hier, que la ques-
tion se poe, et voici que Ton a repris la
vieille formule de l'ordre contre l'anarchie,
la société contre le socialisme. Nous y reve-
nons donc, à c,,s agréables épouvantails? Or-
dre contre anarchie, oui, sans doritê; mais
reste à savoir si c'est la monarchie qui re-
présente l'ordre et si quelque chose nous
mènerait plus vite aux révolutions les plus
lamentables que la restauration de M.
le comte de Chambord.
EUG. LrÉBERT.
- m»
Plus les événements sont proches,
plus il importe de voir clair dans les
projets de nos adversaires et de percer
à jour leurs manœuvres. La tâche, il
est vrai, n'est point aussi malaisée qu'on
le pourrait croire ; il suffit de lire atten-
tivement les journaux de la coalition
henriquinquiste, en ayant grand soin de
tenir compte de leurs nuanees respecti-
ves. Les royalistes de droite et les
royalistes de gauche ont beau faire;
ils laissent à chaque instant passer
un bout d'oreille, et s'ils s'entendent,
ce n'est assurément que sur l'intérêt
qu'ils ont à se débarrasser au plus tôt
de la République, sauf à s'entre-dévorer
plus tard au sujet de l'organisation de la
monarchie.
On a pu remarquer, par exemple, que
les organes de l'extrême droite se sont
bien gardés d'ouvrir leurs colontiêe-à la
résolution acceptée par le centre droit pour
être soumise à VAssemblée nationale le jour
de sa rentrée. Cette fameuse résolution
est évidemment considérée par les ultras
comme impliquant, au moins en pen-
sée, la reconnaissance des principes
généraux de 1789; et à ce titre ils ne
sauraient s'y associer dans aucune me-
sure. Ils demeurent convaincus, d'ail-
leurs, que leur prince n'a jamais fait
pareillçsxoncessions ; et prenant modèle
sur leur maître, ils se taisent, sans tou-
tefois protester contre un langage jugé
nécessaire au triomphe de la cause roya-
liste. « Le roi n'a fait aucune concession,
disait à Lyon ces jours derniers M. Lucien
Brun; il n'a rien dit en réalité, mais il
ne nous a pas défendu de parler dans
l'intérêt de la cause. »
La situation est donc bien nette ; les
royalistes purs, les outranciers du dra-
peau blanc, les irréconciliables de la
Révolution demeurent loyalement an-
kylosés dans leur fidélité au passé ; mais
ils protestent d'autant moins contre les
velléités de libéralisme affichées par les
royalistes marrons qu'ils n'y croient pas
er. savent tout le parti qu'ils en peuvent
tirer.
Gomment croire, en effet, à la sincé-
rité de gens qui noient dans un amal-
game de mots tout surpris de se trouver
ensemble, comme monarchie héréditaire,
traditionnelle et constitutionnelle, une poi-
gnée d'expressions tirées, au hasard, du
vocabulaire de la Révolution ? Il est en-
tendu, on le crie par-dessus les toits,
que si les conservateurs monarchistes se
coalisent, c'est pour lutter contre la Ré-
volution ; or, leur première parole est
pour affirmer qu'une fois au pouvoir ils
reconnaîtront tout justement les princi-
pales conquêtes de 1789.
De quand datent, s'il vous plaît, l'éga-
lité de tous les citoyens devant la loi,
leur admissibilité à tous les emplois ci-
vils et militaires, la liberté religieuse,
l'égale protection accordée à tous les
cultes, le vote annuel de l'impôt par les
représentants du pays ? De quand datent
enfin ces garanties qu'on notis promet
de maintenir et qui constituent le droit
public actuel des Français ? De quand,
si ce n'est de 1789, si ce n'est de cette
bi eaaiHiéigLRto*
lution que vous avez juré d'extermi-
ner ? t" -.
Il ne suffit point de s'affubler de vête-
ments d'emprunt pour tromper les gens;
encore faut-il se donner la peine d'ac-
commoder son ramage à son plumage-;
or, lés rpyalistes se déguisent en libéraux
d ment, le vocabulaire de la Révolution !
Peut-être auraient ils un assez beau suc-
cès le mardi gras ; mais nous n'y som-
mes pae< encore ; et, en attendant, ils
jouent, sansrs'ea douter, les comiques
sérieux; -T:'• • ;
..,o; E. SCHNERB.
• ,— + ■
VIRVITE AD CENTRE GAUCHE
Yoici comment les monarchistes trai-
taient le centre gauche, il y a quel-
que temps, dans leur feuille semi-offi-
cielle. C'est VAssemblée nationale qui parle,
numéro du 13 septembre :
Si les solutions politiques se font quelquefois
attendre, c'est qu'elles s'arrêtent dévalisâtes
çonvictioas e ronees, mais sincères, nuis, *és,
mais incossctentfs des embarras qu'elles créent:
Les hommes atteints de ces convictions înno-
gemment malfaisantes font l'office des :curieux.
inoffensifs, des èatiœuds dans les jours d'émeute.1
Ils font obstacle comme un troupeau suiy, upe.
grande route. On s'arrête de peur dYcrascrîdTn-
nocentes bètes.
{tf'St (sans comparaison blessante, malgré la
parIté d'aveuglement sur leur destinée) un obsta-
cle de cette nature que forment les républicains
honnêtes et molérés qui rêvent encore la Ré-
publique conservatrice. Il est grard temps enfin
que ce troupeau de. rêveurs se rangs sur ies
bas-côtés d)a route pour laisser passer la solu-
tion, qui est pressée, car h France l'attend.
En ce temps-là, les députés du centre
gauche étaient des animaux, sinon nui-
sibles, du moins gênants; on leur faisait
lagrâce de ne les point écraser, mais on
ne se ., privait pas de leur sangler les
jambes à coups de fouet : RaDgz-vous,
tas de brutes, et place au Roil
Mais ce troupeau de bêtes innocentes
r ne s'étant pas rangé du tout et s'obsti-
nant même à barrer la route, les mous-
quetaires du cortége royal changent de
ton. M. d'Audiffret Pasquier, dans la der-
nière réunion du centre droit, opine
qu'il serait opportun de les prendre par
la douceur : oyez le procès-verbal offi-
ciel de la séance de mercredi dernier!
Le duc-président se propose d'enguir-
lander les bœufs de la Republique con-
servatrice :
M. le président croit devoir rappeler aux
membres au centre droit qu'il compte dans le
sein du centre gauche des collègues conserva-
teurs, comme ceux dont plusieurs affirmeat pu-
bliquement qu'ils sont au moins en théorie par-
tisans de la monarchie constitutionnelle.
Devant cette communauté de sentiments, ne
devons-nous pas croire que, s'il s'est produit
des divergences, elles sont dues surtout à des
malentendus ou tout au moins à un défaut
d'entente, et n'y aurait-il pas à la fois un man-
que de procédés et un grave inconvénient poli-
tifue à tenir plus longtemps nos collègues du
centre gauche dans l'ignorance des détails des
propositions que nous comptons soumettre à
l'Assemblée et dont ils ne pourront prendre
connaissance sans y trouver une satisfaction
pour tous leurs principes et une réponse à tous
leurs scrupules f (Très-bien 1 très-bien! Vive
approbation.)
ap Sur la proposition de plusieurs membres, la
réunion délègue aux membres de son bureau.le
soin de se concerter suivant la forme qu'ils -
jugeront opportune avec leurs collègues du cen-
tre gauche. v
Bons sentiments ! Sagesse très-louable,
encore qu'un peu tardive. Le malheur est
que le troupeau du centre gauche a ru-
miné le cas de M. de Chambord et ne
l'a point digéré. Le roy de MM. Chesner
long et Lucien Brun n'a qu'à se présen-
ter; ces animaux paisibles, si spirituel-
lement définis par les plaisants de 1-Ms-
semblée nationale, jurent de l'accueillir à
coups de cornes.
Ceci change la thèse, et je parie qu'a-
vant quarante-huit heures, messieurs de
la Restauration, après avoir noblement
dédaigné, puis. tendrement caressé le
centre gauche, le déclareront mûr à point
pour la boucherie. .1 :,
A.
———————— —: : ——
Nous croyons être en mesure d'affir-
mer qu'hier soir, un des principaux
personnages du centre droit, parlant à la
personne d'un des jeunes leaders du
centre gauche, avouait sincèrement que
la droite était folle, que leis meneurs du
centre droit étaient des ambitieux sans
scrupule, que la France était révoltée à
l'avance contre la monarchie, et que les
hommes d'honneur et de jugement se
rallieraient tous en fin de. compte à la
République conservatrice.
Ce causeur, qui n'est pas le premier
venu, et qui a joué un rôle important
avant le 24 mai, n'hésitait pas à déclarer
que parmi les prétendus complices de
la restauration il connaissait une centaine
de représentants aussi indécis que lui-
même, c'est-à-dire aussi prêts à se dé-
cider dans le bon sens. m.
ÀBÔOT," -
-————————— ♦ r —-
M. DROUtN
La présence de M. Drouin à la dernière
réunion du centre gauche et son adhé-
sion motivée au vote de ses collègues
semblent avoir stupéfié les journaux de
J&. coRSpim~oH~mQ9a~hique~.- n& n'a-
vions pas l'honneur de connaître person-
nellemant ce vaillant député de larSeie;
mais depuis :tant d'années qu'on le cite
comme un type de probité nous avions
contracté l'habitude de le croire inca-
pable d'une défection.
i,AEr soin qu'il a pris d'interroger l'un
après l'autre les grands négociants de
P^ris, ses principaux électeurs, le loyal1
empressement avec, lequel il s'est rangé
à leur avis ne nous étonnent pas, mais
nous consolent en nous prouvant que,
dans ce désarroi des consciences, Paris
aura toujours de. nobles représentants à
èpptaûdirç : de dignes candidats à. ren-
r Assemblées.1
, ABOUT..
ix
u ; J
L'intimidation est une des armes fa-
vorites de MM. les fusionnistes. La peur,
pour qui sait en jouer, est un des meil-
leurs instruments de succès à la disposi-
tion des faiseurs de coups d'Etat, restau-
rateurs de trônes et coureurs d'aventu-
res généralement quelconques. Deman-
dez à l'empire ! c est par la peur qu'il
s'est établi, par la peur qu'il s'est main-
tenu. Ses élèves lui font honneur ; ils
l'ont prouvé le 24 mai, et comptent le
prouver encore le 5 novembre.
Voilà pourquoi nous voyons les jour-
naux royalistes revenir depuis quelques
jours avec tant d'insistance sur le lan-
gage qu'aurait tenu le maréchal Mac-
Mahon aux députés qui lui demandaient
si, dans le cas d'un échec de la droite, il
consentirait à garder le pouvoir. « Les
conservateurs m'ont élu, aurait répondu
M. le président, je tomberai avec les
conservateurs. » Et, partant de là, les
monarchistes, Menant des airs affolés,
supplient à mains jointes les députés hé-
sitants de considérer l'horrible situation
qui serait fait au pays, s'il se trouvait
tout à coup privé de son rêve, la monar-
chie, et de son protecteur, le maréchal
Mac-Mahon.
Monarchie ou anarchie : tels sont
les deux termes du problème que
le sphynx donne à résoudre aux braves
gens qui, tout en inclinant du côté de la
monarchie, répugnent à s'associer aux
menées ténébreuses qui la préparent.
On les trompe, qu'ils le sachent bien !
S'il est vrai qu'en cas - d'insuccès des
projets monarchiques, la France doive
être livrée en proie à l'anarchie, de quel
front osez-vous penser seulement à
donner suite à ces projets ! Sont-ce des
Français, ceux qui prétendent jouer sur
un coup de dés le sortde leur pays ? Sont-
ce des gens de cœurqui proposent de ris-
quer une partie ayant pour enjeu, d'un
côté la fortune d'un prince, de l'autre
la vie de la France?
Cette réponse, nous en avons la fer-
me assurance, est déjà venue frapper en
plein visage plus d'un négociateur fusion-
niste. Dieu merci ! dans l'Assemblée ac-
tuelle, comme dans toute Assemblée
française, la majorité appartient et ap-
partiendra toujours aux patriotes.
E. SCHNERB.
LES DÉPUTÉS DE PARIS
Sur les 43 députés de la Seine :
37 se sont prononcés pour la .Répu-
blique ;
2 pour la monarchie.
On attend encore les réponses de :
MM.Louvet.
Moreau.
Lefébure. .: -
Jean Brunet.
A M. Hérold, vice-président du conseil muni-
cipal de Paris.
Paris, le 23 octobre 1873.
Mon cher ami,
Je trouva votre lettre à mon retour de
la campagne et je m'empresse d'y ré-
pondre.
Vous avez bien raison de penser que ce
serait me faire injure que de me supposer
la moindre hésitation quand il s'agit de
voter la République ou la monarchie. Nul
ne sait mieux que vous que mon choix est
fait depuis longtemps.
J'étais du nombre des députés républi-
cains qui, avec M. Thiers, ont reconnu le
pouvoir constitnant cl e l'Assemblée, convain-
cus qu'elle ne pouvait constituer que la Ré-
publique, avec l'assentiment manifeste du
pays. Quant à faire la monarchie, eussé-je
la conviction que c'est le salut de la Fran-
ce, je ne croirais pas pouvoir prendre la
responsabilité de sauver le pays malgré
lui.
Tout à vous.
E. VACHEROT,
Député de la Seine.
+ ————————
GAUCHE RÉPUBLICAINE
Séance du 24 octobre.
r Extrait du, procès-verbal.
M. Jules Simon croit obéir au senti-
ment de tous ses collègues en exprimant
la patriotique satisfaction que lui causent
-le ré&olutions du centre gauche.
Sans doute la fidélité de ce groupe à la
République était certaine : mais la fermeté
de son attitude coupe court aux avances
intéressées du centre droit et achève de *
.on.>,Ax-a.L W1e.,.Je..faW:i-{ie..
monarchie sont condamnés à l isolement;
même dans l'Assemblée. Par là le centre
gauche à rendu à la France un service
qu'elle n'o'nbliera pas.
La gauche républicaine accueille ces pa-
roles par des applaudissements unanimes
et charge son bureau de- transmettre au
centre gauche lés plus chatetâreuses féîi-
GitâtÎ0B8.
"*
A monsieur Edmond About, rédacteur
e-n. chef du XIX' Siècle.
22 octobre 1873.
Mon cher ami, ,
Nous touchons à la crise finale, et il,
est grand temps qu'une solution inter-
vienne.
Je suis non-seulement effrayé des ré-
sultats probables que pourrait avoir une
restauration monarchique telle que la
rêvent ces messieurs de la droite, mais
je le suis encore de l'état où le minis-
tère du 24 mai a mis la France.
Vous ne vous en doutez pas à Paris.
Il faut voir la province et les cam-
pagnes.
Certes, à l'époque où M. Thiers a
quitt6 le pouvoir la France avait le plus
grand désir de sortir de cet état anémique
où on la maintenait malgré, elle.
Jtfais enfin, quelle que fût la décision
qu'on eût prise à ce moment, les partis
s'y fussent conformés avec une sorte de
docilité ; ils eussent accepté la loi du
parti qui aurait eu la majorité, et la pé-
riode d'apaisement eût été de courte
durée.
En est-il de même aujourd'hui?
Le temps qui vient de s'écouler depuis
le 24 mai laissera des traces profondes.
Ce sera, selon moi, la plus lourde des
responsabilités que l'histoire fera peser
sur ce ministère, que cette surexcitation
à laquelle il a amené le pays.
Sa partialité envers la parti royaliste,
les injures dont il a laissé abreuver l'ad-
versaire, le parti républicain (l'injustice
avec laquelle il a fermé la bouche à ceux
qui voulaient répondre doublant encore
la force de l'injure,) tout a eu ce résultat
que, sans s'en rendre compte, je l'espère,
le ministère, plus qu'aucun des jour-
naux qu'il a supprimés sous le prétexte
d'excitation à la haine des citoyens les
uns contre les autres, le ministère, dis-je,
plus que n'importe qui, a commis cette
faute.
Je suis effrayé du développement de
l'antagonisme des partis depuis le 24
mai.
Combien faudra-t-il de temps pour
ramener la paix dans les esprits, je
l'ignore.
Tout excès amène la réaction, et je
crains toutes les réactions.
Un autre résultat que je redoute au-
tant que cette surexcitation haineuse,
c'est cette tendance du pouvoir civil à
s'abriter derrière l'autorité militaire.
Les généraux ont pris l'habitude de
faire de la politique dans leurs comman-
dements. Le commandant de l'état de
siège, qui ne devait avoir légalement
d'autre préoccupation que le maintien
de l'ordre, est devenu un homme poli-
tique, au service d'un parti.
Un général vient par un acte publie de
se proclamer le défenseur du comte de
Chambord.
C'est une chose pernicieuse que cette
influence politique qu'on veut faire ac-
quérir aux commandants militaires, et
si on continue ainsi, nos dix-huit grands
commandants ne feront pas de l'organi-
sation militaire, ils seront des proconsuls.
Ou allons-nous, je l'ignore ; mais je
trouve que mon pays change à vue
d'oeil.
Je crois que, si la République sort
triomphante de cette épreuve, il faudra
une main énergique et profondément
honnête pour diriger ses destinées et
comprimer les passions que ces quelques
mois ont excitées.
Et si, par un malheur inouï, c'était la
monarchie, qu'arriverait-il?
On peut, au nom de la nation, au
nom du pays, en invoquant le secours de
tous ceux qui aiment leur patrie avec
désintéressement, au nom de la Répu-
blique dans la véritable acception du
mot, ramener le calme et la paix ; nous
en avons eu des preuves.
Mais tout monarque, quel que soit son
nom, qui tentera cette aventure, sera
toujours suspecté ; il sera toujours accu-
sé de travailler pro domo sud, pour sa
conservation personnelle ; et le mal ira
grandissant.
Ce souverain sombrera et finira par
laisser la place, après une révolution
dont nul ne peut calculer la durée et
l'intensité, soit à un audacieux, soit à un
intrigant, qui n'aura d'autre ressource
que de mettre, pendant vingt ou vingt-
cinq ans, au pays une camisole de for-
ce, en s'aidant de l'armée ou, ce qui se-
rait plus triste encore, de l'étranger.
C'est avec une profonde appréhension
que j'entrevois toutes ces choses, et il
faut que la passion politique ait bien
aveuglénosministres pour qu'ils ne voient
pas les choses à ce point de vue et qu'ils
ne soient pas, ainsi que moi, effrayés du
sort de la France si on renverse la Ré-
publique au profit d'un roi.
Amitié dévouée et sincère.
MARGAINE,
député de la Marne.
On nous affirme qu'à l'issue de la réu-
nion du centre gauche, M. Gaston Mitfr-
chell, qui se croit tout permis depuis que
M. de Broglie l'a décoré de ses faveurs,
a osé interpeller M. André, député de la
Seine, et lui reprocher son attitude.
— Comment ! lui a-t-il dit, votre candi-
dature a été soutenue par la presse conser-
vatrice et vous votez avec nos ennemis 1
nous ne vous avons pas nommé pour faire
la République !
M. André a dû relever, comme il le mé-
ritait, ce propos malsonnant. Il faut être
hardi pour reprocher à un député de voter
suivant le vote de ses électeurs, quand laur
opinion s'est manifestée aussi nettement
que celle des électeurs de la Saine.
Quant à nous, nous poserons à M. Mitt-
chell une simple question : Pour parler
au nom d'un groupe d'élfctaurs aussi pe-
tit qu'il soit, a-t-il pris soin d'abord de se
faire naturaliser Francais ?
Un prélat terrible
Est-ce que par hasard il n'avait pas
reçu le mot d'ordre ? Ou a-t-il mange la
consigne? Il est intempérant comme un
beau diable, ce Bossuet de troisième
ordre qui catéchise à coups de gaule le
diocèse d'Orléans. Dupanloup bras de
fer, Dupanloup langue de feu, Dupanloup
vrai foudre de plume a jeté sa houlette
au travers des toiles d'araignée que MM.
Lucien Brun et Cbesnelong ourdissaient
laborieusement. Cet habile homme a
commis, par excès de zèle, une mala-
dresse irréparable.
Comment ! On l'avertit que la nation
et l'Assemblée elle-même ont pris l'alar-
me ; que M. de Chambord, déjà impo-
pulaire en soi, est devenu suspect à tous
les bons esprits par son éducation cléri-
cale, ses fréquentations de sacristie, les
engagements qu'il a pris envers le tem-
porel du pape, les gages qu'il a donnés
à l'intolérance et l'appui manifeste que
lui prête la société de Jésus. Les politi-
ques de la bande ont fait' savoir à M.
Dupanloup comme aux autres affiliés que
l'effet des pèlerinages n'a pas été heu-*
reux, que ces manifestations tapageuses
ont alarmé la bourgeoisie, qu'il importe
de calmer, de rassurer la France de Vol-
taire et de Rousseau. Un journal bien
; pensant a pris soin de désenfroquer
le prétendant en rappelant au pays
que nos rois ont su tenir tête à
l'Eglise, que Louis XIV était un
gallican forcené, et qu'il provoqua en
1682 la déclaration des évêques ; que
Philippe-le-Bel envoya un soufflet au
pape Boniface VIII. Et c'est juste au mo-
ment où quelques milliers de nigauds
sont peut-être tentés de croire au libéra-
lisme tout neuf du comte de Chambord,;
que M. Dupanloup, proprio motu, publia
un pronunciamiento royaliste 1 Il ne
comprend pas que la France repoussera
sur la seule étiquette le prétendant de
M. Dupanloup 1
Que des simples d'esprit se rencon-
trent par cas fortuit dans la nation la
plus spirituelle de l'Europe, je ne le
nierai point. Je confesse qu'il peut exig4
ter ou végéter parmi nous une mignon"
ne minorité, assez jeune, sans distinc-
tion d'âge, pour accepter les notes d'un
avocat et le carnet d'un charcutier re-
traité comme chapitres d'Evangile. La
cuisine des restaurateurs était sur le
point de s'accommoder à la douce, pour
la consommation de quelques innocents,
dans l'arrière-boutique de M. Chesne-
long, quand la trompette de M. Dupan-
loup a fait tourner toutes les sauces.
Ecoutez, bonnes gens, la trompette de
M. Dupanloup !
« Il y a toujours Dieu, puissance;
bonté, sagesse infinie 1 Toujours il peut,
il veut, il sait nous sauver ! » La trinité
s'impose aux orateurs sacrés : les verbes,
les substantifs et les adjectifs eux-mêmes
se débitent chez eux trois par trois. Le
Dieu de M. Dupanloup était un peu dis-
crédité, semble-t-il, par les sottises et
les violences de ses ministres. « On dou-
tait de lui. On ne prononçait plus 'son
saint nom. On blasphémait sa justice. On
n'entendait plus parler de sa puissance. »
Le besoin d'un bon coup tonnerre se
faisait vivement sentir. « Oh ! alors, teut
à coup, il se- révèle, il se montre, il se
déclare! » (Trois par trois.) « Il juge les
rois et les peuples. » Inutile de dire que
peuples sont condamnés d'avance, com-
me journalistes en police correctionnelle,
sous la présidence de feu Delesvaux.
« Il amoncelle les ruines. » Merci de
nous ! « Il brise, il écrase les plus fortes
têtes. » Bonté divine ! « Et les nations
éperdues se prosternent, le front dans
la poussière ! » Pas encore, monsieur
Dupanloup !
« Mais alors aussi », dit l'évêque, le
belliqueux évêque d'Orléans, « il les vi-
site dans sa miséricorde. » Sa miséricorde
consiste à leur donner un roi qu'elles
n'ont jamais demandé, et dont elles se
défendaient comme de la peste. « Il fait
lever la lumière de l'Orient sur leur téte.»
Ce n'est pas du soleil qu'il s'agit : fi
donc ! on le connaît, et nous l'ayons tous
vu se lever à l'Orient depuis un certain
nombre d'années. La lumière de M. Du-
panloup est celle qui se lève pour dé-
jeuner et se couche, après souper, au
château de Frohsdorf. « Il leur envoie un
éclair de sa providence, » nommé Lucien
Brun, où Chesnelong. « Il aplanit les
obstacles, il rapproche les cœurs, et des
-choses réputées impossibles )) ,i& fusion,
par exemple, « s'accomplissent tout à
coup comme d'elles-mêmes, et ceux qui
dans leur détressé » certains membres
de-la-dtôite et du centre droit criblés de
dettes, «levaient les mains vers lui.
sentent soudain qu'ils n'ont pas prie
vainement. »
« Lui,oiTà qui seul appartiennent la
sagesse universelle et la force invinci-
ble, il change, quand il le faut, les
temps et les âges; il rajeunit les siècles
passés, les nations-vieillies. Il fait les
temps nouveaux, les-grands siècles, les
grandes époques, les grands hommes ; »
bien malin s'il fait un grand homme
de M. le comte de Chambord ! « et c'est
ici un des plus -beaux, des plus éton-
nants spectacles qu'il puisse donner à
la terre, lorsque, dans les puissantes in-
dustries de sa droite, » l'extrême droite,
la droite et le centre droit apparemment,
« il saisit les chefs des nations ou les
princes de l'intelligence humaine, et,
s'atlachant à ces natures d'élite, comme
pour les féconder par une création nou-
velle, il opère souverainement dans leurs
âmes des transformations inattendues,
et les lance tout à coup dans les voies de
la foi, à la recherche et à l'œuvre du
salut des peuples !
» Autrefois, quand la République ro-
maine périssait dans les déchirements
des discordes civiles, le poëte de Rome
adressait à ses dieux cette prière pour
un siècle arrivé au penchant de sa
ruine 1
Di Patrii Judigotes.
Ilunc saltem everso juvencm suoeurrere saeclo
Ne prohibete 1. »
Bien rugi, vieux lion de séminaire!
Nous sommes trop classiques pour chi-
caner une citation d'un poète profane
qui empiète, on ne sait pourquoi, sur
les Pères de l'Eglise. C'est même avec
une satisfaction pédantesque que nous
voyons un évêque catholique invoquer
les dieux indigènes à l'appui d'un jeune
homme de 53 ans accomplis.
Mais l'académicien démissionnaire aura
Dimanche 26 Octobre 1873.
1
ï E,
i: JL iu
F -. ,~ ,-
.-.. fi ..-."
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
REDACTION -_-::=::
"adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
2, rue Drouot, *
L., manuscrits non insérés ne seront pas rendUl.
ABONNEMENTS
PARIS
Trois mois 13 Ite.
Six mois 25
Un &D..,. 50
DÉPART 1
,
Trois mois. *36 fil
Six mois
* ; e- 1 ;7..1~ 6 2
Un an.T.A'62
/} >
Annonces, chez MM. LAGRANGE, CERF et Í#
0, place de la Bonne, 8
On s'abonne à Londres, chez M. A. MAURICE général
advertising, agent, 13, Tavistockrow, Gouent Garden.
ADMINISTRATION
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
to rue Drouot* *
Iet lettres non affranchies ssront refait*
ABONNEMENTS
PARIS
Trois mois 13 fr.
Six mois. 25
Un (m.,. 50
DÉPARTKMBnri t\
Trois mois.;.* » 16 flr.
Six mon. 12
Un an.69
- t
Annonces, chez MM. LAGRANGE, CERF et O*
0. place de la Etonne, 8
On s'abonne à Londres, chez M. A. MAURICÈ général-
ndvertising, agent, 13, Tavistockrow, CoventGardea»
Déclaration du Centre gauche :
« Le centre gauche reste uni
dans la conviction que la Républi-
que conservatrice est la plus sûre
garantie de l'ordre comme de la
liberté, et .que la restauration mo-
narchique dont il est question ne
serait pour la France qu'une cause
de nouvelles révolutions. »
Réponse du Centre gauche au
Centre droit :
« Nous ne pouvons pas douter
que dans les conditions où la mo-
narchie est imposée j elle serait
considérée par le pays comme une
revanche de 1789, ce qu'elle serait
d'ailleurs en réalité. Dans ces con-
ditions, le centre gauche ne peut
accepter de communications offi-
cielles qui ressembleraient à des
négociations qu'il ne veut pas
entamer. »
■— *
J'DUR NE POLITIQUE
Paris, 25 octobre 1873.
Il n'est question dans les journaux,
comme dans les conversations du public,
que de la journée d'avant-hier, des décla-
rations du centre gauche et de la confusion
du parti royaliste. Les feuilles qui s'étaient
engagées dans le complot de restauration,
ne gavent plus comment dissimuler la perte
de leurs espérances. Quelques-unes croient
s'en tirer par un redoublement d'effron-
terie. Le Français est du nombre.
Les royalistes n'ont pas osé demander à
la commission de permanence la convo-
cation anticipée de l'Assemblée. Le Fran-
çais insinue qu'ils n'y songeaient point,
qu'ils auraient eupeur d'avoir l'air de vou-
loir précipiter les choses. Fausse explication,
puisque, dans les réunions de la droite et
du centre droit, on s'était prononcé la
veille pour la convocation anticipée. Si les
royalistes y ont renoncé après qu'ils ont
pu, mieux connaître les dispositions du
centre gauche, c'est qu'ils ont recula et
leur panique était, du reste bien justifiée
par l'événement.
,Les royalistes voulaient imposer à la
France,la monarchie sans discussion ; ils
annonçaient la réunion de la Chambre pour
le 27, le vote de la monarchie pour le 28,
et l'entrée triomphale de M. le comte do
Chambord à Paris devait avoir lieu le ler lao-
vembre. Entre le 27 et le 28, où donc
aurait pu prendre place un débat qu'ils
étaient bien décidés à étouffer ? Et le Fran-
çais retourne aujourd'hui contre nous là
trop juste accusation qu'avaient méritée
ses amis ! Les républicains prétendent,
dit-il, refuser la délibération et la lumière.
Cela est faux. Les amis du Français pro-
duiront en faveur de la monarchie autant
d'argumenta qu'il leur conviendra ; et s'ils
ne disent rien, c'est qu'ils se feront justice
à eux-mêmes et qu'ils sentiront qu'ils n'ont
'« -,
Les royalistes avaient fait retrancher dit
P~ë~
doSalzbourg toutes les garanties annon-
cées pour le suffrage universel et la liberté
d^a presse ; ces deux mots de suffrage ]
universel et de liberté de la presse, inscrits
d abord, dans unetliste trompeuse que pu-
blia le Journal de Parts, oat été biffés par-
les Sucions royalistes du 22 octobre (voir
les procès-verbaux officiels). Tout le monde
a pu constater cét escamotage. Le Français,
cépçnâant, faisant atix rlteIÍiD'res du centre
gauche une peinture de l'idéale royauté
qu'ils ont perdue j « met ees a v c-,: r
sabres au défi de relever une seule des
conquêtes de la société moderne qui
nt trouve sa conçécratioa et dans le
teste et dans la forme - même de l'acte
mis en discussion. » Le suffrage universel
etrla liberté delà presse, pour ne pas
nombre des conquêtes de la société mo
derne? Et le même Français, dans le .mê-
me article, ose affirmer que c'est du côte.
de #a rr.onarcbie aristocratique et ultra-
moutaine que sont les idées-libérales, plus
libérales que les principes de 1789. A mer-
veille, et demain nous apprendrons sans
doute que, fi ces pauvres émigrés qu'on
calomniait ont jadis combattu la frADce,
c'était pour la soustraire au despotisme dé
la Révolution. -
Tout est de cette fjrce dans la polémi-
qae du Français ; nous le disons sans èpi-
gramme: il faut être, en effet, bien
« fort » pour berner ainsi ses contempo-
rains. Oa ne sait si le Français blesse da-'
vantage la conscience publique et le sens
commun; il s'attaque, du reste, avec une
égale vaiil mee, à l'un et à l'autre. Sa mo-
narchie n'en est pas moins perdue, et sm
roi restera en Autriche ; nous voyons qu'il
s'y trouve bien, 'et il y est assurément beau-
coup mieux qu'en Fran6.Déjà (ce qui 8;t un
bien clair indice), on commence à ne plus
nous parler, comme en lo faisait tant ces-
derniers jour s,de République ouroyauté-y non,
ce n'est plus ainsi, depuis hier, que la ques-
tion se poe, et voici que Ton a repris la
vieille formule de l'ordre contre l'anarchie,
la société contre le socialisme. Nous y reve-
nons donc, à c,,s agréables épouvantails? Or-
dre contre anarchie, oui, sans doritê; mais
reste à savoir si c'est la monarchie qui re-
présente l'ordre et si quelque chose nous
mènerait plus vite aux révolutions les plus
lamentables que la restauration de M.
le comte de Chambord.
EUG. LrÉBERT.
- m»
Plus les événements sont proches,
plus il importe de voir clair dans les
projets de nos adversaires et de percer
à jour leurs manœuvres. La tâche, il
est vrai, n'est point aussi malaisée qu'on
le pourrait croire ; il suffit de lire atten-
tivement les journaux de la coalition
henriquinquiste, en ayant grand soin de
tenir compte de leurs nuanees respecti-
ves. Les royalistes de droite et les
royalistes de gauche ont beau faire;
ils laissent à chaque instant passer
un bout d'oreille, et s'ils s'entendent,
ce n'est assurément que sur l'intérêt
qu'ils ont à se débarrasser au plus tôt
de la République, sauf à s'entre-dévorer
plus tard au sujet de l'organisation de la
monarchie.
On a pu remarquer, par exemple, que
les organes de l'extrême droite se sont
bien gardés d'ouvrir leurs colontiêe-à la
résolution acceptée par le centre droit pour
être soumise à VAssemblée nationale le jour
de sa rentrée. Cette fameuse résolution
est évidemment considérée par les ultras
comme impliquant, au moins en pen-
sée, la reconnaissance des principes
généraux de 1789; et à ce titre ils ne
sauraient s'y associer dans aucune me-
sure. Ils demeurent convaincus, d'ail-
leurs, que leur prince n'a jamais fait
pareillçsxoncessions ; et prenant modèle
sur leur maître, ils se taisent, sans tou-
tefois protester contre un langage jugé
nécessaire au triomphe de la cause roya-
liste. « Le roi n'a fait aucune concession,
disait à Lyon ces jours derniers M. Lucien
Brun; il n'a rien dit en réalité, mais il
ne nous a pas défendu de parler dans
l'intérêt de la cause. »
La situation est donc bien nette ; les
royalistes purs, les outranciers du dra-
peau blanc, les irréconciliables de la
Révolution demeurent loyalement an-
kylosés dans leur fidélité au passé ; mais
ils protestent d'autant moins contre les
velléités de libéralisme affichées par les
royalistes marrons qu'ils n'y croient pas
er. savent tout le parti qu'ils en peuvent
tirer.
Gomment croire, en effet, à la sincé-
rité de gens qui noient dans un amal-
game de mots tout surpris de se trouver
ensemble, comme monarchie héréditaire,
traditionnelle et constitutionnelle, une poi-
gnée d'expressions tirées, au hasard, du
vocabulaire de la Révolution ? Il est en-
tendu, on le crie par-dessus les toits,
que si les conservateurs monarchistes se
coalisent, c'est pour lutter contre la Ré-
volution ; or, leur première parole est
pour affirmer qu'une fois au pouvoir ils
reconnaîtront tout justement les princi-
pales conquêtes de 1789.
De quand datent, s'il vous plaît, l'éga-
lité de tous les citoyens devant la loi,
leur admissibilité à tous les emplois ci-
vils et militaires, la liberté religieuse,
l'égale protection accordée à tous les
cultes, le vote annuel de l'impôt par les
représentants du pays ? De quand datent
enfin ces garanties qu'on notis promet
de maintenir et qui constituent le droit
public actuel des Français ? De quand,
si ce n'est de 1789, si ce n'est de cette
bi eaaiHiéigLRto*
lution que vous avez juré d'extermi-
ner ? t" -.
Il ne suffit point de s'affubler de vête-
ments d'emprunt pour tromper les gens;
encore faut-il se donner la peine d'ac-
commoder son ramage à son plumage-;
or, lés rpyalistes se déguisent en libéraux
d
Peut-être auraient ils un assez beau suc-
cès le mardi gras ; mais nous n'y som-
mes pae< encore ; et, en attendant, ils
jouent, sansrs'ea douter, les comiques
sérieux; -T:'• • ;
..,o; E. SCHNERB.
• ,— + ■
VIRVITE AD CENTRE GAUCHE
Yoici comment les monarchistes trai-
taient le centre gauche, il y a quel-
que temps, dans leur feuille semi-offi-
cielle. C'est VAssemblée nationale qui parle,
numéro du 13 septembre :
Si les solutions politiques se font quelquefois
attendre, c'est qu'elles s'arrêtent dévalisâtes
çonvictioas e ronees, mais sincères, nuis, *és,
mais incossctentfs des embarras qu'elles créent:
Les hommes atteints de ces convictions înno-
gemment malfaisantes font l'office des :curieux.
inoffensifs, des èatiœuds dans les jours d'émeute.1
Ils font obstacle comme un troupeau suiy, upe.
grande route. On s'arrête de peur dYcrascrîdTn-
nocentes bètes.
{tf'St (sans comparaison blessante, malgré la
parIté d'aveuglement sur leur destinée) un obsta-
cle de cette nature que forment les républicains
honnêtes et molérés qui rêvent encore la Ré-
publique conservatrice. Il est grard temps enfin
que ce troupeau de. rêveurs se rangs sur ies
bas-côtés d)a route pour laisser passer la solu-
tion, qui est pressée, car h France l'attend.
En ce temps-là, les députés du centre
gauche étaient des animaux, sinon nui-
sibles, du moins gênants; on leur faisait
lagrâce de ne les point écraser, mais on
ne se ., privait pas de leur sangler les
jambes à coups de fouet : RaDgz-vous,
tas de brutes, et place au Roil
Mais ce troupeau de bêtes innocentes
r ne s'étant pas rangé du tout et s'obsti-
nant même à barrer la route, les mous-
quetaires du cortége royal changent de
ton. M. d'Audiffret Pasquier, dans la der-
nière réunion du centre droit, opine
qu'il serait opportun de les prendre par
la douceur : oyez le procès-verbal offi-
ciel de la séance de mercredi dernier!
Le duc-président se propose d'enguir-
lander les bœufs de la Republique con-
servatrice :
M. le président croit devoir rappeler aux
membres au centre droit qu'il compte dans le
sein du centre gauche des collègues conserva-
teurs, comme ceux dont plusieurs affirmeat pu-
bliquement qu'ils sont au moins en théorie par-
tisans de la monarchie constitutionnelle.
Devant cette communauté de sentiments, ne
devons-nous pas croire que, s'il s'est produit
des divergences, elles sont dues surtout à des
malentendus ou tout au moins à un défaut
d'entente, et n'y aurait-il pas à la fois un man-
que de procédés et un grave inconvénient poli-
tifue à tenir plus longtemps nos collègues du
centre gauche dans l'ignorance des détails des
propositions que nous comptons soumettre à
l'Assemblée et dont ils ne pourront prendre
connaissance sans y trouver une satisfaction
pour tous leurs principes et une réponse à tous
leurs scrupules f (Très-bien 1 très-bien! Vive
approbation.)
ap Sur la proposition de plusieurs membres, la
réunion délègue aux membres de son bureau.le
soin de se concerter suivant la forme qu'ils -
jugeront opportune avec leurs collègues du cen-
tre gauche. v
Bons sentiments ! Sagesse très-louable,
encore qu'un peu tardive. Le malheur est
que le troupeau du centre gauche a ru-
miné le cas de M. de Chambord et ne
l'a point digéré. Le roy de MM. Chesner
long et Lucien Brun n'a qu'à se présen-
ter; ces animaux paisibles, si spirituel-
lement définis par les plaisants de 1-Ms-
semblée nationale, jurent de l'accueillir à
coups de cornes.
Ceci change la thèse, et je parie qu'a-
vant quarante-huit heures, messieurs de
la Restauration, après avoir noblement
dédaigné, puis. tendrement caressé le
centre gauche, le déclareront mûr à point
pour la boucherie. .1 :,
A.
———————— —: : ——
Nous croyons être en mesure d'affir-
mer qu'hier soir, un des principaux
personnages du centre droit, parlant à la
personne d'un des jeunes leaders du
centre gauche, avouait sincèrement que
la droite était folle, que leis meneurs du
centre droit étaient des ambitieux sans
scrupule, que la France était révoltée à
l'avance contre la monarchie, et que les
hommes d'honneur et de jugement se
rallieraient tous en fin de. compte à la
République conservatrice.
Ce causeur, qui n'est pas le premier
venu, et qui a joué un rôle important
avant le 24 mai, n'hésitait pas à déclarer
que parmi les prétendus complices de
la restauration il connaissait une centaine
de représentants aussi indécis que lui-
même, c'est-à-dire aussi prêts à se dé-
cider dans le bon sens. m.
ÀBÔOT," -
-————————— ♦ r —-
M. DROUtN
La présence de M. Drouin à la dernière
réunion du centre gauche et son adhé-
sion motivée au vote de ses collègues
semblent avoir stupéfié les journaux de
J&. coRSpim~oH~mQ9a~hique~.- n& n'a-
vions pas l'honneur de connaître person-
nellemant ce vaillant député de larSeie;
mais depuis :tant d'années qu'on le cite
comme un type de probité nous avions
contracté l'habitude de le croire inca-
pable d'une défection.
i,AEr soin qu'il a pris d'interroger l'un
après l'autre les grands négociants de
P^ris, ses principaux électeurs, le loyal1
empressement avec, lequel il s'est rangé
à leur avis ne nous étonnent pas, mais
nous consolent en nous prouvant que,
dans ce désarroi des consciences, Paris
aura toujours de. nobles représentants à
èpptaûdirç : de dignes candidats à. ren-
r Assemblées.1
, ABOUT..
ix
u ; J
L'intimidation est une des armes fa-
vorites de MM. les fusionnistes. La peur,
pour qui sait en jouer, est un des meil-
leurs instruments de succès à la disposi-
tion des faiseurs de coups d'Etat, restau-
rateurs de trônes et coureurs d'aventu-
res généralement quelconques. Deman-
dez à l'empire ! c est par la peur qu'il
s'est établi, par la peur qu'il s'est main-
tenu. Ses élèves lui font honneur ; ils
l'ont prouvé le 24 mai, et comptent le
prouver encore le 5 novembre.
Voilà pourquoi nous voyons les jour-
naux royalistes revenir depuis quelques
jours avec tant d'insistance sur le lan-
gage qu'aurait tenu le maréchal Mac-
Mahon aux députés qui lui demandaient
si, dans le cas d'un échec de la droite, il
consentirait à garder le pouvoir. « Les
conservateurs m'ont élu, aurait répondu
M. le président, je tomberai avec les
conservateurs. » Et, partant de là, les
monarchistes, Menant des airs affolés,
supplient à mains jointes les députés hé-
sitants de considérer l'horrible situation
qui serait fait au pays, s'il se trouvait
tout à coup privé de son rêve, la monar-
chie, et de son protecteur, le maréchal
Mac-Mahon.
Monarchie ou anarchie : tels sont
les deux termes du problème que
le sphynx donne à résoudre aux braves
gens qui, tout en inclinant du côté de la
monarchie, répugnent à s'associer aux
menées ténébreuses qui la préparent.
On les trompe, qu'ils le sachent bien !
S'il est vrai qu'en cas - d'insuccès des
projets monarchiques, la France doive
être livrée en proie à l'anarchie, de quel
front osez-vous penser seulement à
donner suite à ces projets ! Sont-ce des
Français, ceux qui prétendent jouer sur
un coup de dés le sortde leur pays ? Sont-
ce des gens de cœurqui proposent de ris-
quer une partie ayant pour enjeu, d'un
côté la fortune d'un prince, de l'autre
la vie de la France?
Cette réponse, nous en avons la fer-
me assurance, est déjà venue frapper en
plein visage plus d'un négociateur fusion-
niste. Dieu merci ! dans l'Assemblée ac-
tuelle, comme dans toute Assemblée
française, la majorité appartient et ap-
partiendra toujours aux patriotes.
E. SCHNERB.
LES DÉPUTÉS DE PARIS
Sur les 43 députés de la Seine :
37 se sont prononcés pour la .Répu-
blique ;
2 pour la monarchie.
On attend encore les réponses de :
MM.Louvet.
Moreau.
Lefébure. .: -
Jean Brunet.
A M. Hérold, vice-président du conseil muni-
cipal de Paris.
Paris, le 23 octobre 1873.
Mon cher ami,
Je trouva votre lettre à mon retour de
la campagne et je m'empresse d'y ré-
pondre.
Vous avez bien raison de penser que ce
serait me faire injure que de me supposer
la moindre hésitation quand il s'agit de
voter la République ou la monarchie. Nul
ne sait mieux que vous que mon choix est
fait depuis longtemps.
J'étais du nombre des députés républi-
cains qui, avec M. Thiers, ont reconnu le
pouvoir constitnant cl e l'Assemblée, convain-
cus qu'elle ne pouvait constituer que la Ré-
publique, avec l'assentiment manifeste du
pays. Quant à faire la monarchie, eussé-je
la conviction que c'est le salut de la Fran-
ce, je ne croirais pas pouvoir prendre la
responsabilité de sauver le pays malgré
lui.
Tout à vous.
E. VACHEROT,
Député de la Seine.
+ ————————
GAUCHE RÉPUBLICAINE
Séance du 24 octobre.
r Extrait du, procès-verbal.
M. Jules Simon croit obéir au senti-
ment de tous ses collègues en exprimant
la patriotique satisfaction que lui causent
-le ré&olutions du centre gauche.
Sans doute la fidélité de ce groupe à la
République était certaine : mais la fermeté
de son attitude coupe court aux avances
intéressées du centre droit et achève de *
.on.>,Ax-a.L W1e.,.Je..faW:i-{ie..
monarchie sont condamnés à l isolement;
même dans l'Assemblée. Par là le centre
gauche à rendu à la France un service
qu'elle n'o'nbliera pas.
La gauche républicaine accueille ces pa-
roles par des applaudissements unanimes
et charge son bureau de- transmettre au
centre gauche lés plus chatetâreuses féîi-
GitâtÎ0B8.
"*
A monsieur Edmond About, rédacteur
e-n. chef du XIX' Siècle.
22 octobre 1873.
Mon cher ami, ,
Nous touchons à la crise finale, et il,
est grand temps qu'une solution inter-
vienne.
Je suis non-seulement effrayé des ré-
sultats probables que pourrait avoir une
restauration monarchique telle que la
rêvent ces messieurs de la droite, mais
je le suis encore de l'état où le minis-
tère du 24 mai a mis la France.
Vous ne vous en doutez pas à Paris.
Il faut voir la province et les cam-
pagnes.
Certes, à l'époque où M. Thiers a
quitt6 le pouvoir la France avait le plus
grand désir de sortir de cet état anémique
où on la maintenait malgré, elle.
Jtfais enfin, quelle que fût la décision
qu'on eût prise à ce moment, les partis
s'y fussent conformés avec une sorte de
docilité ; ils eussent accepté la loi du
parti qui aurait eu la majorité, et la pé-
riode d'apaisement eût été de courte
durée.
En est-il de même aujourd'hui?
Le temps qui vient de s'écouler depuis
le 24 mai laissera des traces profondes.
Ce sera, selon moi, la plus lourde des
responsabilités que l'histoire fera peser
sur ce ministère, que cette surexcitation
à laquelle il a amené le pays.
Sa partialité envers la parti royaliste,
les injures dont il a laissé abreuver l'ad-
versaire, le parti républicain (l'injustice
avec laquelle il a fermé la bouche à ceux
qui voulaient répondre doublant encore
la force de l'injure,) tout a eu ce résultat
que, sans s'en rendre compte, je l'espère,
le ministère, plus qu'aucun des jour-
naux qu'il a supprimés sous le prétexte
d'excitation à la haine des citoyens les
uns contre les autres, le ministère, dis-je,
plus que n'importe qui, a commis cette
faute.
Je suis effrayé du développement de
l'antagonisme des partis depuis le 24
mai.
Combien faudra-t-il de temps pour
ramener la paix dans les esprits, je
l'ignore.
Tout excès amène la réaction, et je
crains toutes les réactions.
Un autre résultat que je redoute au-
tant que cette surexcitation haineuse,
c'est cette tendance du pouvoir civil à
s'abriter derrière l'autorité militaire.
Les généraux ont pris l'habitude de
faire de la politique dans leurs comman-
dements. Le commandant de l'état de
siège, qui ne devait avoir légalement
d'autre préoccupation que le maintien
de l'ordre, est devenu un homme poli-
tique, au service d'un parti.
Un général vient par un acte publie de
se proclamer le défenseur du comte de
Chambord.
C'est une chose pernicieuse que cette
influence politique qu'on veut faire ac-
quérir aux commandants militaires, et
si on continue ainsi, nos dix-huit grands
commandants ne feront pas de l'organi-
sation militaire, ils seront des proconsuls.
Ou allons-nous, je l'ignore ; mais je
trouve que mon pays change à vue
d'oeil.
Je crois que, si la République sort
triomphante de cette épreuve, il faudra
une main énergique et profondément
honnête pour diriger ses destinées et
comprimer les passions que ces quelques
mois ont excitées.
Et si, par un malheur inouï, c'était la
monarchie, qu'arriverait-il?
On peut, au nom de la nation, au
nom du pays, en invoquant le secours de
tous ceux qui aiment leur patrie avec
désintéressement, au nom de la Répu-
blique dans la véritable acception du
mot, ramener le calme et la paix ; nous
en avons eu des preuves.
Mais tout monarque, quel que soit son
nom, qui tentera cette aventure, sera
toujours suspecté ; il sera toujours accu-
sé de travailler pro domo sud, pour sa
conservation personnelle ; et le mal ira
grandissant.
Ce souverain sombrera et finira par
laisser la place, après une révolution
dont nul ne peut calculer la durée et
l'intensité, soit à un audacieux, soit à un
intrigant, qui n'aura d'autre ressource
que de mettre, pendant vingt ou vingt-
cinq ans, au pays une camisole de for-
ce, en s'aidant de l'armée ou, ce qui se-
rait plus triste encore, de l'étranger.
C'est avec une profonde appréhension
que j'entrevois toutes ces choses, et il
faut que la passion politique ait bien
aveuglénosministres pour qu'ils ne voient
pas les choses à ce point de vue et qu'ils
ne soient pas, ainsi que moi, effrayés du
sort de la France si on renverse la Ré-
publique au profit d'un roi.
Amitié dévouée et sincère.
MARGAINE,
député de la Marne.
On nous affirme qu'à l'issue de la réu-
nion du centre gauche, M. Gaston Mitfr-
chell, qui se croit tout permis depuis que
M. de Broglie l'a décoré de ses faveurs,
a osé interpeller M. André, député de la
Seine, et lui reprocher son attitude.
— Comment ! lui a-t-il dit, votre candi-
dature a été soutenue par la presse conser-
vatrice et vous votez avec nos ennemis 1
nous ne vous avons pas nommé pour faire
la République !
M. André a dû relever, comme il le mé-
ritait, ce propos malsonnant. Il faut être
hardi pour reprocher à un député de voter
suivant le vote de ses électeurs, quand laur
opinion s'est manifestée aussi nettement
que celle des électeurs de la Saine.
Quant à nous, nous poserons à M. Mitt-
chell une simple question : Pour parler
au nom d'un groupe d'élfctaurs aussi pe-
tit qu'il soit, a-t-il pris soin d'abord de se
faire naturaliser Francais ?
Un prélat terrible
Est-ce que par hasard il n'avait pas
reçu le mot d'ordre ? Ou a-t-il mange la
consigne? Il est intempérant comme un
beau diable, ce Bossuet de troisième
ordre qui catéchise à coups de gaule le
diocèse d'Orléans. Dupanloup bras de
fer, Dupanloup langue de feu, Dupanloup
vrai foudre de plume a jeté sa houlette
au travers des toiles d'araignée que MM.
Lucien Brun et Cbesnelong ourdissaient
laborieusement. Cet habile homme a
commis, par excès de zèle, une mala-
dresse irréparable.
Comment ! On l'avertit que la nation
et l'Assemblée elle-même ont pris l'alar-
me ; que M. de Chambord, déjà impo-
pulaire en soi, est devenu suspect à tous
les bons esprits par son éducation cléri-
cale, ses fréquentations de sacristie, les
engagements qu'il a pris envers le tem-
porel du pape, les gages qu'il a donnés
à l'intolérance et l'appui manifeste que
lui prête la société de Jésus. Les politi-
ques de la bande ont fait' savoir à M.
Dupanloup comme aux autres affiliés que
l'effet des pèlerinages n'a pas été heu-*
reux, que ces manifestations tapageuses
ont alarmé la bourgeoisie, qu'il importe
de calmer, de rassurer la France de Vol-
taire et de Rousseau. Un journal bien
; pensant a pris soin de désenfroquer
le prétendant en rappelant au pays
que nos rois ont su tenir tête à
l'Eglise, que Louis XIV était un
gallican forcené, et qu'il provoqua en
1682 la déclaration des évêques ; que
Philippe-le-Bel envoya un soufflet au
pape Boniface VIII. Et c'est juste au mo-
ment où quelques milliers de nigauds
sont peut-être tentés de croire au libéra-
lisme tout neuf du comte de Chambord,;
que M. Dupanloup, proprio motu, publia
un pronunciamiento royaliste 1 Il ne
comprend pas que la France repoussera
sur la seule étiquette le prétendant de
M. Dupanloup 1
Que des simples d'esprit se rencon-
trent par cas fortuit dans la nation la
plus spirituelle de l'Europe, je ne le
nierai point. Je confesse qu'il peut exig4
ter ou végéter parmi nous une mignon"
ne minorité, assez jeune, sans distinc-
tion d'âge, pour accepter les notes d'un
avocat et le carnet d'un charcutier re-
traité comme chapitres d'Evangile. La
cuisine des restaurateurs était sur le
point de s'accommoder à la douce, pour
la consommation de quelques innocents,
dans l'arrière-boutique de M. Chesne-
long, quand la trompette de M. Dupan-
loup a fait tourner toutes les sauces.
Ecoutez, bonnes gens, la trompette de
M. Dupanloup !
« Il y a toujours Dieu, puissance;
bonté, sagesse infinie 1 Toujours il peut,
il veut, il sait nous sauver ! » La trinité
s'impose aux orateurs sacrés : les verbes,
les substantifs et les adjectifs eux-mêmes
se débitent chez eux trois par trois. Le
Dieu de M. Dupanloup était un peu dis-
crédité, semble-t-il, par les sottises et
les violences de ses ministres. « On dou-
tait de lui. On ne prononçait plus 'son
saint nom. On blasphémait sa justice. On
n'entendait plus parler de sa puissance. »
Le besoin d'un bon coup tonnerre se
faisait vivement sentir. « Oh ! alors, teut
à coup, il se- révèle, il se montre, il se
déclare! » (Trois par trois.) « Il juge les
rois et les peuples. » Inutile de dire que
peuples sont condamnés d'avance, com-
me journalistes en police correctionnelle,
sous la présidence de feu Delesvaux.
« Il amoncelle les ruines. » Merci de
nous ! « Il brise, il écrase les plus fortes
têtes. » Bonté divine ! « Et les nations
éperdues se prosternent, le front dans
la poussière ! » Pas encore, monsieur
Dupanloup !
« Mais alors aussi », dit l'évêque, le
belliqueux évêque d'Orléans, « il les vi-
site dans sa miséricorde. » Sa miséricorde
consiste à leur donner un roi qu'elles
n'ont jamais demandé, et dont elles se
défendaient comme de la peste. « Il fait
lever la lumière de l'Orient sur leur téte.»
Ce n'est pas du soleil qu'il s'agit : fi
donc ! on le connaît, et nous l'ayons tous
vu se lever à l'Orient depuis un certain
nombre d'années. La lumière de M. Du-
panloup est celle qui se lève pour dé-
jeuner et se couche, après souper, au
château de Frohsdorf. « Il leur envoie un
éclair de sa providence, » nommé Lucien
Brun, où Chesnelong. « Il aplanit les
obstacles, il rapproche les cœurs, et des
-choses réputées impossibles )) ,i& fusion,
par exemple, « s'accomplissent tout à
coup comme d'elles-mêmes, et ceux qui
dans leur détressé » certains membres
de-la-dtôite et du centre droit criblés de
dettes, «levaient les mains vers lui.
sentent soudain qu'ils n'ont pas prie
vainement. »
« Lui,oiTà qui seul appartiennent la
sagesse universelle et la force invinci-
ble, il change, quand il le faut, les
temps et les âges; il rajeunit les siècles
passés, les nations-vieillies. Il fait les
temps nouveaux, les-grands siècles, les
grandes époques, les grands hommes ; »
bien malin s'il fait un grand homme
de M. le comte de Chambord ! « et c'est
ici un des plus -beaux, des plus éton-
nants spectacles qu'il puisse donner à
la terre, lorsque, dans les puissantes in-
dustries de sa droite, » l'extrême droite,
la droite et le centre droit apparemment,
« il saisit les chefs des nations ou les
princes de l'intelligence humaine, et,
s'atlachant à ces natures d'élite, comme
pour les féconder par une création nou-
velle, il opère souverainement dans leurs
âmes des transformations inattendues,
et les lance tout à coup dans les voies de
la foi, à la recherche et à l'œuvre du
salut des peuples !
» Autrefois, quand la République ro-
maine périssait dans les déchirements
des discordes civiles, le poëte de Rome
adressait à ses dieux cette prière pour
un siècle arrivé au penchant de sa
ruine 1
Di Patrii Judigotes.
Ilunc saltem everso juvencm suoeurrere saeclo
Ne prohibete 1. »
Bien rugi, vieux lion de séminaire!
Nous sommes trop classiques pour chi-
caner une citation d'un poète profane
qui empiète, on ne sait pourquoi, sur
les Pères de l'Eglise. C'est même avec
une satisfaction pédantesque que nous
voyons un évêque catholique invoquer
les dieux indigènes à l'appui d'un jeune
homme de 53 ans accomplis.
Mais l'académicien démissionnaire aura
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.53%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.53%.
- Auteurs similaires Bibliographie de la presse française politique et d'information générale Bibliographie de la presse française politique et d'information générale /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "BIPFPIG00"Bibliothèque Francophone Numérique Bibliothèque Francophone Numérique /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "RfnEns0"
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k75580682/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k75580682/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k75580682/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k75580682/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k75580682
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k75580682
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k75580682/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest