Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1873-10-18
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 18 octobre 1873 18 octobre 1873
Description : 1873/10/18 (A3,N702). 1873/10/18 (A3,N702).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/03/2013
3. Année. - NI 702. PAIX DU NUMÉRO ; PARIS 15 CENTIMES — DÉPARTEMENTS 20 CENTIMES.
Samedi 18 Octobre 1873.
JOURNAL LlC CONSERVATEUR : : 0 :
RÉDACTION il
-&dresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à. minuit
S» rue Droaflt. 8
L v manuscrits non insérés tao. seront pas rendus.
ABOILNEMElia
PARIS
Troia mois 13 fr.
Six mois .è. 25
Un an 50
DÉPÁRTE¥EN'
Trois mois.
Six mois. 1
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AURODeH, chez MM. LAGRANGB, CERF & C%
G, place de la llourve, o
On s'abonne à Londres, chex M. A. Mâ.uRiaKgénérai
ad vftrtUiug, agent, 13, Tavistockrow, Covent Garden.
ADMINISTRATION
Adrteser lettres et mandats à l'Administrateur
le rue Drouot* 2
III kttres non affranchies seront rtfnsim
ABOHNEHtHTS
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Trois mois..; « 13 fr.
Six mois. 25
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DÉPARmanf*
Trois mois.* » 16 tr.
Six mois 32
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Annonces, chez MM. LAGRANGE, CERF et G*
W, place de la Bonne, 0
en s'abonne & Londres. cJau If. A. MATTBIOK général
advertiting, agent, 11, Tavistockrow, Covent Garda..
JOURNÉE POLITIQUE,
Paris, 47 octobre 4873.
MM. Chesnelong et Lucien Brun sont
revenus de Salzbourg, rapportant au « Co-
mité d'études » fusionniste le dernier mot
de M. le comte de Chambord. Sur l'annonce
de leur retour, beaucoup de bruits ont
couru à -la Bourse : le prétendant accepte-
rait le drapeau tricolore, il maintiendrait
le suffrage universel, etc. Nous nous
expliquons dans un autre article sur la foi
qu'il convient d'ajouter à ces nouvelles.
L'Union n'en dit rien ; la Gazsttede France
publie une note qui ne brille guère que
par les réticences. C'est d'ailleurs aujour-
d'hui que MM. Brui: et Chesnelong doi-
vent rendre compte à leurs collègues de
leur ambassade.
En attendant, il semble de plus en plus
probable que les treize élections qui restent
à faire auront lieu très-prochainement. Ce
ne seraient pas seulement les électeurs de
l'Aube qui seraient convoqués pour le 9 no-
vembre, mais ceux de la plupart des autres
collèges, si ce n'est de tous. Tel serait, à
ce qu'on assure, l'avis personnel du prési-
dent de la République. Le maréchal de
Mac-Mahen considère, et avec grand sens,
cette question des élections partielles comme
une question d'honneur et de loyauté.
C'est l'impression qu'ont emportée de l'en-
trevue qu'ils ont eue avec lui les députés
de Seine-et-Oise qui lui sont venus de-
mander, comme on l'a vu, que la repré-
sentation de leur département fût complé-
tée dans le plus bref délai. 1
Le maréchU a répondu, selon son habi-
tude, que la question était trop impor-
tante pour que lui seul pût la trancher,
que le conseil des ministres la devait ré-
soudre; mais il a ajouté qu'il comprenait
la gravité de leur requête, qu'il en rete-
nait les motifs et qu'elle serait examinée
avec tout l'intérêt dont elle est digne. Il
est, en effet, évident que si la Chambre doit
se prononcer, aibsi qu'on persiste à le dire,
sur une proposition de rétablissement de la
monarchie, il ne faut pas quun seul
aiége y soit vide et que le pays,
par exemple, après un vote monarchique
Illevè à une majorité de deux OH trois
voix, puisse dire : a Si la représentation
nationale n'avait pas été incomplète le jour
de ce vote solennel, les choses se seraient
autrement passées, et le roi ne doit sa
couronne qu'à une fraude. » Question de
loyauté, dit le maréchal Mac-Mahon.
Question de prudence, question de respon-
sabilité bien terrible, devrait se dire aussi
le conseil des ministres.
Nous aurions été bien surpris que le
Français ne nous reprochât pas d'être
vendus à M. de Bismarck (M. Thiers, pa-
raît-il, se serait aussi vendu en même
temps que nous), parce que nous avons
donné de la lettre de l'empereur d'Aile-
^irgaa à Pie IX une appréciation impar-
tiale. De la part du Français, le reproche
nous est très-indifférent, et nos sentiments
& l'égard de FAllemagae sont assez connus
pour que nous n'ayons pas à les justifier;
mais ce qui nous .touche, c'est de voir
à quels excès de polémique l'esprit de
parti peut entrahtèr.Vonsne voulez point de
la monarchie? C'est que vous êtes Prus-
siens, s'écrient les royalistes. Vous n'ad-
mettez point le triomphe de l'ultramonta-
uisme et le règne du Syllabus ? Prussiens,
vous êtes Prussiens, vous dis-je I. Il n'y a
là, nous semble-t-il, que de quoi hausser
les épaules ; il est difficile, pourtant, de ne
pas s'en chagriner, car ces grossièretés
marquent trop bien le degré-d'exaltation et
de haine contre leur patrie où beaucoup
die rpyalistes en sont venus.
» A les en croire, ils seront restés bientôt
les seuls bons citoyens, les seuls vrais
Français qu'il y ait en France. Tout
le reste, les électeurs de MM. Reymond,
Turigny, Girod-Pouzol et de Rémusat
gont des traîtres, des agents déguisés
de l'Allemagne. Ah! qu'on pourrait ré-
pliquer durement à ces preneurs de la
monarchie légitime ! et que certains sou-
venirs du commencement de ce siècle se-
raient ici rappelés à propos, - sans
parler du reste! Mais nou3 aimons
mieux nous rappeler que noua avons
'Wu en 1870 et 1871, les Fiançais de
tous les partie sans distinction d opi-
nions et de croyances, défendre avec
on égal désespoir la patrie commune.
Voilà. les seuls souvenirs qu'il nous cop-
vienne d'invoquer, et ce n'est pas noua
qui traiterons jamais de Prussiens nos
compatriotes, fussent-ils rédacteurs du
Français. Ce journal fera bien d imiter
inotre réserve, -
Eve. LIÉInmT.
----. ——————- -.
La Gazette de France publie la note sui-
vante :
Nos lecteurs ont sans doute remarqué la
réserva absolue que la Gazette de France
a cru devoir garder jusqu'à ce jour au su-
jet dea conférence? qui avaient lieu à l'ef-
fet de déterminer Je terrain cfur lequ&l la
question monarchique serait engagée de-
faut l'Assemblé nationale.
Nous pouvons annoncer aujourd'hui que
M. Chesnelong, député, qui s'était rendu
auprès de Mgr le oomte de Chatnboid, est
rentré ce matin à Paris. La commission
nommée par les bureaux des quatre réu-
nions parlementaires entendra M. Ches-
nelong ; à son tour, là commission pré-
sentera son rapport aux bureaux des quatre
réunions, qui sont convoquées pour après-
demain samedi.
De nombreuses versions vont sans nul
doute circuler encore à propos de ces der-
niers incidents; nous engageons nos amis
à se tenir en garde contre toutes les ru-
meurs, et à attendre comme nous le résul-
tat final avec une entière confiance.
Quoi qu'il en soit, le Soir prétend avoir des
renseignements très-précis, très-exacts sur les
négociations de Salzbourg.
Ces renseignements prouvent d'ailleurs que
la situation n'a pas changé. Le comte de Cham-
bord, ainsi que nous l'avions prévu, ne veut
faire aucune concession. Il faut d'abord qu'on le
proclame roi sans conditions, sans réserves, et
après, oh ! alors, on nous promet une constitu-
tion. Quant au drapeau, il n'en est pas question.
Voici d'ailleurs les informations du Soir :
Le comte de Chambord, inébranlable sur
son principe, tient à ce que l'Assemblée
lui offre la monarchie sans conditions ;
Les délégués de l'Assemblée ne veulent
pas abandonner les droits et prérogatives
de la Chambre, et désirent qu'elle seule
fasse la constitution de la monarchie nou-
velle, dont un article réglera la question
du drapeau.
En présence de ces deux volontés arr ê.
tées, comment tourner la difficulté?
Un député de la droite, récemment en-
voyé à Salzbourg, aurait réussi à aplanir
ce terrain. 4
Il aurait dit au comte de Chambord :
— a Vous' désirez, monseigneur, rester
fidèle à votre principe, à vos paroles, à
vos écrits précédents, et, par conséquent,
vous désirez que la royauté vous soit don-
née sans conditions.
» Nous désirons, nous, représentants du
peuple français, n'amoindrir en rien le
prestige de la royauté ; mais nous ne sau-
rions faire abandon des droits modernes
du pays ;
» Voici comment tout obstacle pourrait
disparaître :
» L'Assemblée, en proclamant la mo-
narchie, n'ajouterait aucune restriction,
aucune réserve à ce mot de monarchie. La
couronne vous serait ainsi offerte sans
conditions aucunes, et acceptée par vous
sans que vous ayez fait la moindre conces-
sion à vos principes. Le prestige royal de-
meurera tout entier.
» Mais, immédiatement, pour remercier
le pays et lui donner la satisfaction à la-
quelle il a droit, le roi, en acceptant la
couronne, chargera la Chambre de rédi-
ger une constitution, base nouvelle des
relations politiques entre la France et le
roi. »
On prétend que le comte de Chambord
a approuvé cette idée, et qu'une communi-
cation sera faite dans ce sens à la réunion
de la droite qui aura lieu, ainsi que nous
l'avens dit il y a quatre jours déjà, le 18
de ce mois, c'est-à dire samedi prochain*
Ces négociations ont été conduites par
MM. Lucien Brun et Chesnelong.
Les événements sont proches.
♦ , ,
Grandes nouvelles !
Efforçons-nous de contenir notre émo-
tion : MM. Lucien Brun et Chesnelong
sont dans nos murs,, et la Bourse a
monté de 60 centimes !
L'Assemblée nationale nage dans la joie
et annonce que les deux illustres com-
mis-voyageurs rapportent d'importantes
concessions de M. le comte de Chambord
sur la question du drapeau.
La Gazette de France est plus réservée.
« De nombreuses versions, dit-elle, vont
sans doute circuler à propos de ces der-
niers incidents; nous engageons, nos
amis à se tenir en garde contre toutes,
les rumeurs,.et à attendre comme nous
le résultat final avec une entière con-
fiance. »
L'Union ne dit mot. Serait-elle moins
confiante que-la Gazette ou mieux ren-
seignée que Y Assemblée nationale 7
D'autre part, le Courrier de Paris re-
çoit de Salzbourg, 16 octobre, 8 heures
25 minutes du matin, — on ne saurait
mettre trop de points sur les i en matière
si grave, — une dépêche ainsi conçue :
« Comte accepte constitution de 1814.
Suffrage universel avec modification.
Cinq ans de domicile. Drapeau tricolore
avec fleur de lys sur blanc. Toutes ces
concessions seront faites immédiatement
après que l'Assemblée aurait voté la mo-
narchie. »
Voilà, fidèlement résumées, les gran-
des nouvelles de la journée d'hier. Est-ce
vrai? Est-ce faux? C'est vraisemblable,
et cela suffit pour que nous accordions
quelques minutes d'examen aux impor-
tantes concessions de M. le comte.
Importantes en effet, très-importantes,
à son point de vue, puisqu'elles infligent
le plus éclatant démonti à tout ce qu'il
a dit, à tout ce qu'il a écrit, à tout ce
qu'il a juré.
Le comté de Chambord accepte la
constitution de 1814, avec le suffrage
universel modifié. C'est apparemment
des mains de l'Assemblée nationale qu'il
consent à recevoir le pacte constitution-
nel, ce qui, bon gré, mal gré, fera
d'Henri V non point le successeur de
Charles %, mais le successeur de Louis?
Philippé
Or le comte de Chambord a écrit le 27
janvier 1871 : « Rien n'ébranlera mes
résolutions, rien ne lassera ma patience,
et personne, sous aucun prétexte, n'ob-
tiendra de moi que je consente à devenir
le roi légitime de la Révolution. »
Le eoffilo (ip Chambord accepte le dra-
peau tricolore à le çfculg condition qu'il
soit fleurdelisé.
Or le comte de Chambord a écrit le
5 juillet 1871 : « Non, je ne laisserai pas
arracher de mes mains l'étendard
d'Henri IV, de François Ier et de Jeanne
d'Arc. Je l'ai reçu comme un dépôt* sacré
du vieux roi mon aïeul. il a flotté sur
mon berceau, je veux qu'il ombrage ma
tombe. Français ! Henri V ne peut aban-
donner le drapeau blanc d'Henri IV.. »
Enfin, il y a quelques mois, à peine,
M. le comte de Chambord répondait sé-
vèrement à l'évêque d'Orléans, qui s'é-
tait permis de lui conseiller une aposta-
sie comme un sacrifice nécessaire aux
vœux du pays : « Croyez-le bien, la
France n'a pas à ce point perdu le senti-
ment de l'honneur; elle ne comprend pas
plus le chef de la maison de Bourbon
reniant l'étendard d'Alger qu'elle n'eût
compris l'évêque d'Orléans se résignant
à siéger, à l'Académie française, en com-
pagnie de sceptiques et d'athées. »
Le comte de Chambord disait vrai : la
France n'a pas à ce point perdu le senti-
ment de l'honneur. Mais il est, à l'heure
actuelle, un Français qui n'a pas le droit
d'en dire autant. Et voilà pourquoi nous
considérons, et je pays considérera, en
effet, comme tres-importantes, les con-
cessions que MM. Lucien Brun et Ches-
nelong ont, dit-on, obtenues de M, le
comte. h"
Que si nous examinons ces conces-
sions au point de vue général, elles
nous paraissent infiniment moinssérieu-
ses. Les conseillers généraux et muni-
cipaux qui écrivaient, ces jours derniers,
aux représentants de la Seine, ont par-
faitement caractérisé la situation qu'on
voudrait nous offrir aujourd'hui, quand
ils ont dit : On accepte des chartes d'a-
bord ; plus tard on signe des Ordonnan-
ces. La charte de 1814, octroyée et non
soumise à l'approbation du pays, fût-
elle cent fois plus libérale qu'elle ne
l'est, offrît-elle, ce qui ne serait point dif-
ficile, cent fois plus de garanties qu'elle
n'en offre, ne nous dirait encore rien
qui vaille. « On respecte un moulin, on
vole une province » ; on respecte une
charte et l'on fait, très-légalement en ap-
parence, usage de l'article 14 pour la
réduire à néant.
On nous parle toujours de la tradition
monarchique, la voilà !
En ce qui concerne l'acceptation par le
prince du suffrage universel modifié,
nous aimons à croire que les bruits en
circulation ne sont que pures plaisante-
ries. Exiger cinq ans de domicile pour
l'électeur, c'est dire aux trois cinquiè-
mes des Français: Vous voterez quand les
poules auront des dents. Qui donc, en
France, est assuré d'un séjour de cinq
ans, à poste fixe, dans une localité ? Les
fonctionnaires eux-mêmes seraient exclus
du scrutin. Il n'est pas un professeur de
l'Université, pas un employé des télégra-
phes, des contributions, de la régie, des
postes, il n'est pas un ingénieur de
l'Etal, pas un employé de la Banque qui
puisse espérer jamais son inscription
sur les listes électorales; et quant a .la
« vile multitude, » en grande partie
composée de nomades intermittents qui
vont un peu partout où l'ouvrage les
appelle, ils redeviennent, comme devant,
taillables et gouvernables à merci. Voilà
ce que M. le comtd de Chambord appelle
accepter le suffrage universel !
Rappelons, en terminant, que toutes
ces mirifiques concessions rapportées
de Froshdorff par le derflier train, M. de
Chambord les fera quand l'Assemblée
nationale aura été bien sage et l'aura,
sans conditions, proclamé roi de France.
Et après, va-t'en voir s'ils viennent !
Du drapeau, enfin, nous n'en parlons
pas. L'armée n'a point besoin de connaî-
tre notre opinion à ce sujet ; mais nous
trouvons bien hardis ceux qui songent
à lui imposer l'obligation d'arlequiner
ses étendards !
E. SCHNERB.
: ; «—i
On écrit de Rome au Journal des Débats,
le 13 octobre :
Il est ici question d'un incident qui, dans les
circonstances Actuelles, ne serait pas sans gra-
vité
Vous savez que le congé de M. Foufnier
expirait en octobre, et on s'attendait en Italie
au retour du ministre français.
Il paraît que M. Fournier est allô trouver le
duc de Broglie pour lui demander l'autorisation
de retourner à Rome.
Le ministre lui aurait répondu en l'invitant à
prolonger la durée de son congé.
Le gouvernement italien aurait considéré
cette mesure comme un acte non d'hostilité,
mais de mauvais vouloir, et il aurait invité
M. Nigra à réclamer de ton côté un congé. Il
est donc probable que M. Nigra ne tardera pas
à retourner en Italie.
Si la détermination de M. de Broglie a ppur
cause la personne da M. Fournier, comme il y &
lieu de le croire, il ent été infiniment préféra-
ble de nommer un autre ambassadeur.
Les Italiens ont assez de bon sens pour com-
prendre qu'un gouvernement a le droit de choi
sir les agents qui lui conviennpnt.
Les bons rapports entre la France et l'Italie
ne tiennent point à une individualité, tandis
que l'absence prolongée du ministre de France
peut être considérée comme upe mesure peu
bienveillante.
os renseignements, ajoutent les Débats,
nous permettent de confirmer la npuvelle
que nous envoie notre correspoIldallt. M.
le ministre d Italie, ayant été autorisé par
son gouvernement à prendre un congé,
vient de quitter Paria,
Toutefois, nous lisons aux « dernières
nouvelles » de la Correspondance Ilavas :
Le ministre d'Italie, M. Nigra, est parti
avant-hur en congé, selon son habitude de
chaque année. Il est inexact que son départ ait
été motivé p.r¡.r jjrç incident quelconque survenu
avec le 'gouvernement fraugap. ^QUS rayons, au
contraire, que cé diplomate a annoncé, en par-
tant, que son absence ne se prolongerait pas au-
delà du retour de l'Assemblée.
Quant à nous, nous pouvonsaffirmer
que la prolongation du congé de M. Four-
nier n'est pas un fait indifférent.
L'Agence Havas dément le bruit de son
remplacement. Il est parfaitement exact
qu'en ce moment M. de Broglie et ses col-
lègues ne veulent pas le remplacer ; mais
dès la rentrée, s'ils peuvent obtenir un
vote de la Chambre favorable à leur poli-
tique, ils lui expliqueront qué sa mission
est terminée ; s'ils ne le font pas en ce
moment, c'est par crainte d'augmenter la
difficulté qu'ils éprouvent déjà à gouver-
ner ; mais il désirent qu'il ne rejoigne pas
Son poste avant de connaître la décision
de la Chambre.
: : ; 4
LE MOYEN DE ÁRVENIR
A Monsieur l'administrateur général des
chemins de fer de l'Ouest.
Monsieur l'administrateur,
fi y a quinze jours environ, je trouvai
da ru-al dévot, fort & la mode en
ce moment, le Pèlerin, une anecdote qui
me parut très-curieuse et très-caracté-
ristique ; je la cueillis précieusement et
la racontai aux lecteurs du XIX" Siècle.
Il s'agissait d'un chef de gare qui
avait eu la galanterie d'attendre à la sta-
tion un convoi de pèlerins, et d'offrir un
bouquet à chacune des dames qui le com-
posaient.
J'avais eu grand soin de retrancher de
l'histoire et le nom de la gare et celui
du ehevalier courtois qui s'était donné le
plaisir de faire une politesse qui n'est
pas trop dans les règlements des chemins
de fer.
Il parait, monsieur, que ce chef de
gare appartenait à votre administration,
et qu'à la suite de. la publicité donnée
par moi à son aventure, vous l'avez des-
titué de ses fonctions ; car voici la let-
tre que je reçois :
« Monsieur,
» L'employé dont vous avez parlé
dans votre articlevestun père de famille;
il a trois enfants ; le voilà sans place et
sans pain. Son avenir est perdu ; que
deviendront ses pauvres enfants? Si c'est
là ce que vous appelez le moyen de par-
venir 1 »
Ces derniers mots font allusion à quel-
ques-unes des réflexions que m'avait
inspirées l'acte de galanterie attribué par
le Pèlerin au chef de gare en question.
Le Pèlerin avait demandé pour lui, en
termes fort nets, de l'avancement à ses
supérieurs. « Nous espérons bien, avait-
il dit — je cite textuellement — que cet
aimable et dévotchef de gare sera récom-
pensé de son attention obligeante et
qu'il obtiendra, de ses chefs, l'avance-
ment qu'il mérite. »
Et moi, partant de ce très-petit fait,
dont je reconnaissais d'ailleurs l'im-
portance fort mince, je m'étais livré à
quelques considérations générales, qui
passaient dans mon idée par-dessus la
tête de cet humble et malheureux chef
de gare. Elles s'appliquaient à. tous les
intrigants qui se sentiraient disposés à
chercher, d'après cet exemple, leur avan-
cement moins dans la fidélité à remplir
leurs devoirs que dans une certaine os-
tation de dévouement aux intérêts
d'un parti. Où irons-nous, me deman-
dais-je, si dans les fonctions publiques
on récompense moins le mérite et les
services rendus que les flatteries hypo-
crites ; * s'il faut, pour arriver, montrer
que l'on est un nomme bien pensant
plutôt qu'un employé capable ?
J'en reviens là : ces réflexions, que je
crois fort justes, ne visaient pas direc-
tement ce pauvre diable de chef de
gare, qui, après tout, n'était coupable
que d'une galanterie un peu insolite. ,
Il peut se faire, monsieur l'adminis-
trateur, que mon article ne soit pour
rien dans la destitution dont il vient
d'être frappé. Vos ôccupations ne vous
ont sans doute pas permis de le lire, et
il est probable que vous n'avez été in-
formé de cette dérogation aux règle-
ments que par voie hiérarchique.
Cependant, je vous prie, monsieur
l'administrateur, de voir la situation où
vous me placez. On croira difficilement
que le journal n'ait pas de façon ou d'au-
tre pesé sur votre détermination, et j'au-
rai.sur la conscience le chagrin d'une
famille réduite à la mendicité.
Vous avez voulu faire un exemple, et
je ne crois pas que VQUS aye? eu tort. Il
est bon d'avoir lait comprendre à votre
personnel, par un acte vigoureux et qui
fasse impression sur les esprits, que vous
n'entendez pas obéir aux injonctions
d'un parti ou même subir ses recom-
mandations; que se procurer, par des
moyens peu avouables, l'estampille de
sa protection, o'est s'exposer au contraire
à encourir votre colère ; que vous êtes
fermement décidé à récompenser les
bons services et non les platos déféren-
ces pour la faction pltramontaine.
Mais enfin, monsieur l'administrateur,
l'exemple est fait à cette heure, et j'es-
père qu'il portera ses fruits. Ne vous se-
rait-il pas possible de tendre la main à
ce malheureux père de famille, à qui
vient d'ôlre infligée une si rude leçon, de
le replacer dans un autre postey de ren-
dre le pain à sa famille, et de m'ôter jus-
qu'à l'ombre cTua regret i * '*
Je voas en aurais personnellement une
grande obligation, et je vous prie, mon-
sieur l'administrateur, d'agréer l'assu-
rance de ma considération la plus dis-
tinguée.
FRANCISQUE SARCEY.
♦ —
Il y a eu mercredi réunion des députés
de l'Union républicaine.
Entre autres questions, on s'y est préoc-
cupé de la réponse à faire à la lettre que
nous avons publiée et par laquelle un
grand nombre de conseillers généraux et
de conseillers municipaux de la Seine in -
vitaient la députation du département à
déclarer qu'ils s'opposeraient énergique-
ment à toute restauration monarchique.
La réunion a décidé à l'unanimité qu'elle
ferait une réponse collective.
On lit dans l'Ordre:
La réunion de l'appel au peuple a tenu
hier sa séance. Elle n'a pas cru devoir
prendre de délibération immédiate et s'est
ajournée à la dernière semaine d'octobre.
Les circonstances qui se sont produites
depuis le 10 octobre et les renseignements
qu elle a recueillis ont en effet donné à la
réunion la conviction que les projets de
restauration monarchique étaient au moins
indéfiniment ajournés.
M. Bamberger, député de Meurthe-et-Moselle,
nous adresse la lettre suivante :
Passy, 16 octobre 1873.
Monsieur le rédacteur,
Le XIX" Siècle publie des fragments ré-
trospectifs de lettres, de discours, de pro-
fessions de foi émanant de représentants
monarchistes, mais pleins de protestations
en faveur de la République.
Vous croyez peut-être que ces. messieurs,
pris en flagrant délit de contradiction,
vont courber la tête ? qu'ils rougiront de
leurs palinodies ? Ah ! monsieur, que
vous le connaissez peu, le représentant
des vieilles idées ! Que vous êtes peu au
courant de l'effronterie dont il est capa-
ble ! Illi robur et œs triplex. Lui, rougir
d'avoir acclamé la République il y a trente
mois, et de saluer aujourd'hui les premiers
rayons de l'astre royal ? allons donc 1
Mais ils le reconnaîtront dix fois pour
une : Oui, la République était nécessaire;
à elle d'endosser la responsabilité des me-
sures rigoureuses ; à elle de conclure la
paix (et quelle paix !) ; à elle de dompter
la Commune ; à elle de saigner la France
aux quatre membres ; à elle d'essuyer les
plâtres !
Il m'est souvenance qu'à Versailles, et
vers la fin du mois de mai 1871, un mem-
bre du centre droit, l'un des fondateurs,
notez ce fait, de la réunion Féray, me di-
sait : « La République seule était capable
» de mener à bonne fin la victoire du
a parti de l'ordre sur les insurgés. » Et
presque tous tenaient ce langage : « Il
» entre dans nos vues de garder la Ré-
» publique pendant deux ans à peu près;
» la place est mauvaise, la République la
» nettoiera. »
Vingt fois, je le répète, j'ai entendu ce
langage. Nous autres, gens naïfs, nous
sommes dès lors mal venus de reprocher à
nos adversaires un jeu dont ils se vantent
au contraire parce qu'ils le croient habile.
Il est bon de le crier bien haut : l'adhésion
à la République de MM. tels et tels a été
un acte d'opportunité et proclamé par eux
une mesure transitoire. Aujourd'hui que
les marrons sont tirés du feu, qu'ils sont
là, appétissants et rôtis à point, de quel
droit nous autres républicains irions-nous
apposer aux réactionnaires une opinion
qui, de leur aveu, n'a été qu'une manœuvre
habile?
Que le pays le sache donc : dès 1871,
MM. les cléricaux et monarchistes de tou-
tes nuances ont entendu disposer à leur
heure des destinées de la France. Il est
vrai que la France n'entend pas de cette
oreille; ce qu'on lui a donné, elle veut le
garder, et elle fait bien; indè irœ.
Oui, la République seule pouvait sans
hésiter attaquer avec vigueur l'insurrec-
tion de 1871; en effet, un monarque com-
battant la Commune eût paru défendre sa
cause à lui ; la République, être imper-
sonnel, défendait la cause de tous.
Oui, la République seule pouvait impo-
ser à la France qu'elle personnifiait les
terribles sacrifices qui devaient assurer sa
libération.
C'est donc bien la République seule qui
a sauvé la France, et c'est pourquoi la
France bien renseignée se déclare aujour-
d'hui tout entière pour elle.
Recevez, monsieur le rédacteur, l'expres-
sion de mes sentiments les plus dévoués,
Ed. BAMBERGER.
— ————————
LES DÉPUTÉS DE PARIS
■ —'
A M. Hérold, membre du conseil général de
la Seine.
Paris, le 16 octobre 1873.
Monsieur,
J'avais répondu d'avancer la lettre col-
lective que vous m'avez fait l'honneur de
m'adresser. Mes votes, mes paroles, de
récentes déclarations sur la fusion, tout de
ma part vous assure de ma ferme décision
de voter pour la République contre la
Monarchie. L'insolence factieuse avec la-
quelle certains organes de la presse roya-
liste ont traité les récentes manifestations
du suffrage universel, ne tirant d'autre
conclusion dlis dernières élections que la
nécessité de se débarrasser au plus tôt de
la souveraineté nationale, montre que
l'ordre est autant intéressé que la liberté
au maintien loyal de la République.
Recevi z, monsieur, l'assurance de mej
sentiments les plus distingués,
V y-'. - E. DE PRESSENSÉ,
; Député de la Seiue,
A M. Béclard, membre du conseil général
de la Seine. -
Nanterre, 14 octobre 1873»
Cher monsieur,
J'ai été envoyé à l'Assemblée pour main-
tenir et fonder définitivement la Républi-
que, seul gouvernement capable de fermer
l'ère des révolutions et le seul pouvant se
prêter à tous les progrès sans secousse
violente. Je ne faillirai pas plus à mon de-
voir et à mes convictions que je n'y ai
failli jusqu'à ce jour, et je repousserai par
mon vote toute tentative de restauration
monarchique quelconque.
Telle est ma réponse à la lettre que vous
et vos honorables collègues avez bien voalti
m'adresser.
Agréez, cher monsieur, l'expression, de
mes sentiments les plus dévoués.
Paul MORIN,
Député de la Seine.
Paris, 16 octobre 1873.
M. Hérold, vice-président du conseil
municipal de Paris.
En recevant la lettre collective que vous
m'avez fait l'honneur de m'adresser, je
m'étais flatté que ce n'était pas de moi que
ses auteurs attendaient une réponse. J'y
avais vu simplement une invitation à
m'entremettre auprès de ceux de mes col-
lègues de l'Assemblée nationale dont les
dispositions à l'égard des projets de res-
tauration monarchique, qui s'agitent de-
puis quelques mois, peuvent être douteu-
ses. Spontanément j'avais déjà tâché d'agir
dans ce sens au moyen de deux lettres
adressées les 18 et 28 septembre der-
nier, à chacun de mes collègues, mais
écrites plus particulièrement à l'intention
de ceux d'entre eux qui ont passé aux roya*
listes sans passion personnelle et unique.
ment par appréhension du radicalisme. Je
me croyais donc dispensé de vous répon*
dre lorsque, hier même, au sujet de ces
lettres, il m'est venu de province une ré-
ponse où se trouvent des compliments'tels
que ceux-ci :
« Vos critiques équivoques cachent un
» partisan du Syllabus; — au moyen de
» subterfuges déloyaux, vous cherchez à
» conserver un pied dans les antichambres'
» de tous les partis, etc. »
J'ai compris alors que, malgré quelques
apparences contraires, les fautes commises
par une partie des républicains ne les
avaient pas éclairés tous sur le danger de
leurs prétentions étroites et exclusives et
que, tout en adoptant ces jours-ci le dra-
peau que j'ai défendu, avec vous, contre
eux au 27 avril, ils restaient disposés à
m'excommunier dans leurs grands journaux
et à me bafouer dans lés petits, comme à
l'époque où je soutenais que pour être res-
pectée de tous et avoir longue vie, la Ré-
publique se trouverait mieux du parrai-
nage de M. de Rémusat que de celui de
M. Barodet.
Sans discuter de nouveau ce point, qui
est pour moi d'une évidence à crever les
yeux, je cesse néanmoins de croire que je
suis dispensé de déclarer que je ne songe
nullement à renier les opinions de toute
ma vie et que je ne voterai avec les roya-
listes que lorsqu'ils voteront pour la Répu-
blique. Je désire d'ailleurs ardemment que
cette dernière éventualité se réalise- tout
invraisemblable qu'elle paraît;—car, enne-
mi des partis exclusifs, je rêve une Répu-
blique ouverte à tout le monde et n'ayant
d'intolérances qu'à l'égard du désordre. -
Veuillez agréer, monsieur, l'assurance de
mes sentiments les plus distingués pour
vous et les autres signataires de la lettre à
laquelle je réponds.
PÏRNOLET,
député de la Seine.
—♦ ;
UN DÉlOUEIEIT INATTENDU
Le succès des candidats républicains,
aux élections du 12 octobre, a exaspéré les
conspirateurs du parti monarchique. Jour-
nalistes de sacristie et journalistes d'anti-
chambre royale, porte-clés et chambellans
en perspective, futurs officiers de la garde-
robe, ministres sifflés par le suffrage uni-
versel, députés menacés d'être rendus aux
douceurs de la vie privée, inventent, col-
portent, accumulent contre les candidats
élus et la démocratie républicaine les in-
sultes les plus grossières, les insinuations
les plus basses, les outrages les plus for-
cenés. Leur dépit et leur haine coulent et
se répandent comme un fleuve de fiel et de
boue; Partisans du pétrole, disciples de
Vermersch, ccmplicesdes Prussiens, marmi tons
* la vieille Adolphine (ceci est du Veuilles •
en état de grâce), insectes rongeurs, hom.
mes déshonorés, telles sont, entre beau-
coup d'autres, les qualifications que pro-
diguent aux républicains des gens qui
croient défendre la religion et restaurer
l'ordre moral en mêlant les pieuses calom-
nies de Basile aux invectives furibondes du
Pere-Duchene. Trestaillon, à la veille de
manquer d'ouvrage, accuse M. de Rémusat
de troubler le pays ; au premier jour, le
journal de M. Beslay fils Faccusera d'avoir
présidé la Commune !
U faut dédaigneusement laisse? passer
ce Hot diujures impuissantes, La-force diJ
la démoctie se révèle chaque jour assez
grande pour qu'elle ait le droit de mépri-
ser l'astuce ou la colère des factions mo-
narchiques aux abois. En les voyant cons-
puées par le suffrage universel et réduites
malgré les nouveaux préfets, les nouveaux
sous-préfets, les nouveaux agents de toute
espèce à de pauvres minorité, on serait
presque disposé à les prendre en commi--
sération If leur a stfftv de se montreT
d'étaler leurs espéras, de laisser vair-
leurs cri-minels desseins, pour qu'aussitôt
la conscience du pays se soulevât de dô-
goût e.t d'horreur. Gulliver a brisé les
liens dans lesquels l'avaient eatortiUô les -
lilliputiens de la monarchie.
Mais le succès des récentes élections n'a.
pas en seulement pour résultat de rendra
Samedi 18 Octobre 1873.
JOURNAL LlC CONSERVATEUR : : 0 :
RÉDACTION il
-&dresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à. minuit
S» rue Droaflt. 8
L v manuscrits non insérés tao. seront pas rendus.
ABOILNEMElia
PARIS
Troia mois 13 fr.
Six mois .è. 25
Un an 50
DÉPÁRTE¥EN'
Trois mois.
Six mois. 1
Un an .[«
r
AURODeH, chez MM. LAGRANGB, CERF & C%
G, place de la llourve, o
On s'abonne à Londres, chex M. A. Mâ.uRiaKgénérai
ad vftrtUiug, agent, 13, Tavistockrow, Covent Garden.
ADMINISTRATION
Adrteser lettres et mandats à l'Administrateur
le rue Drouot* 2
III kttres non affranchies seront rtfnsim
ABOHNEHtHTS
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Trois mois..; « 13 fr.
Six mois. 25
Un an .i., » 50
DÉPARmanf*
Trois mois.* » 16 tr.
Six mois 32
Un &D. 61
Annonces, chez MM. LAGRANGE, CERF et G*
W, place de la Bonne, 0
en s'abonne & Londres. cJau If. A. MATTBIOK général
advertiting, agent, 11, Tavistockrow, Covent Garda..
JOURNÉE POLITIQUE,
Paris, 47 octobre 4873.
MM. Chesnelong et Lucien Brun sont
revenus de Salzbourg, rapportant au « Co-
mité d'études » fusionniste le dernier mot
de M. le comte de Chambord. Sur l'annonce
de leur retour, beaucoup de bruits ont
couru à -la Bourse : le prétendant accepte-
rait le drapeau tricolore, il maintiendrait
le suffrage universel, etc. Nous nous
expliquons dans un autre article sur la foi
qu'il convient d'ajouter à ces nouvelles.
L'Union n'en dit rien ; la Gazsttede France
publie une note qui ne brille guère que
par les réticences. C'est d'ailleurs aujour-
d'hui que MM. Brui: et Chesnelong doi-
vent rendre compte à leurs collègues de
leur ambassade.
En attendant, il semble de plus en plus
probable que les treize élections qui restent
à faire auront lieu très-prochainement. Ce
ne seraient pas seulement les électeurs de
l'Aube qui seraient convoqués pour le 9 no-
vembre, mais ceux de la plupart des autres
collèges, si ce n'est de tous. Tel serait, à
ce qu'on assure, l'avis personnel du prési-
dent de la République. Le maréchal de
Mac-Mahen considère, et avec grand sens,
cette question des élections partielles comme
une question d'honneur et de loyauté.
C'est l'impression qu'ont emportée de l'en-
trevue qu'ils ont eue avec lui les députés
de Seine-et-Oise qui lui sont venus de-
mander, comme on l'a vu, que la repré-
sentation de leur département fût complé-
tée dans le plus bref délai. 1
Le maréchU a répondu, selon son habi-
tude, que la question était trop impor-
tante pour que lui seul pût la trancher,
que le conseil des ministres la devait ré-
soudre; mais il a ajouté qu'il comprenait
la gravité de leur requête, qu'il en rete-
nait les motifs et qu'elle serait examinée
avec tout l'intérêt dont elle est digne. Il
est, en effet, évident que si la Chambre doit
se prononcer, aibsi qu'on persiste à le dire,
sur une proposition de rétablissement de la
monarchie, il ne faut pas quun seul
aiége y soit vide et que le pays,
par exemple, après un vote monarchique
Illevè à une majorité de deux OH trois
voix, puisse dire : a Si la représentation
nationale n'avait pas été incomplète le jour
de ce vote solennel, les choses se seraient
autrement passées, et le roi ne doit sa
couronne qu'à une fraude. » Question de
loyauté, dit le maréchal Mac-Mahon.
Question de prudence, question de respon-
sabilité bien terrible, devrait se dire aussi
le conseil des ministres.
Nous aurions été bien surpris que le
Français ne nous reprochât pas d'être
vendus à M. de Bismarck (M. Thiers, pa-
raît-il, se serait aussi vendu en même
temps que nous), parce que nous avons
donné de la lettre de l'empereur d'Aile-
^irgaa à Pie IX une appréciation impar-
tiale. De la part du Français, le reproche
nous est très-indifférent, et nos sentiments
& l'égard de FAllemagae sont assez connus
pour que nous n'ayons pas à les justifier;
mais ce qui nous .touche, c'est de voir
à quels excès de polémique l'esprit de
parti peut entrahtèr.Vonsne voulez point de
la monarchie? C'est que vous êtes Prus-
siens, s'écrient les royalistes. Vous n'ad-
mettez point le triomphe de l'ultramonta-
uisme et le règne du Syllabus ? Prussiens,
vous êtes Prussiens, vous dis-je I. Il n'y a
là, nous semble-t-il, que de quoi hausser
les épaules ; il est difficile, pourtant, de ne
pas s'en chagriner, car ces grossièretés
marquent trop bien le degré-d'exaltation et
de haine contre leur patrie où beaucoup
die rpyalistes en sont venus.
» A les en croire, ils seront restés bientôt
les seuls bons citoyens, les seuls vrais
Français qu'il y ait en France. Tout
le reste, les électeurs de MM. Reymond,
Turigny, Girod-Pouzol et de Rémusat
gont des traîtres, des agents déguisés
de l'Allemagne. Ah! qu'on pourrait ré-
pliquer durement à ces preneurs de la
monarchie légitime ! et que certains sou-
venirs du commencement de ce siècle se-
raient ici rappelés à propos, - sans
parler du reste! Mais nou3 aimons
mieux nous rappeler que noua avons
'Wu en 1870 et 1871, les Fiançais de
tous les partie sans distinction d opi-
nions et de croyances, défendre avec
on égal désespoir la patrie commune.
Voilà. les seuls souvenirs qu'il nous cop-
vienne d'invoquer, et ce n'est pas noua
qui traiterons jamais de Prussiens nos
compatriotes, fussent-ils rédacteurs du
Français. Ce journal fera bien d imiter
inotre réserve, -
Eve. LIÉInmT.
----. ——————- -.
La Gazette de France publie la note sui-
vante :
Nos lecteurs ont sans doute remarqué la
réserva absolue que la Gazette de France
a cru devoir garder jusqu'à ce jour au su-
jet dea conférence? qui avaient lieu à l'ef-
fet de déterminer Je terrain cfur lequ&l la
question monarchique serait engagée de-
faut l'Assemblé nationale.
Nous pouvons annoncer aujourd'hui que
M. Chesnelong, député, qui s'était rendu
auprès de Mgr le oomte de Chatnboid, est
rentré ce matin à Paris. La commission
nommée par les bureaux des quatre réu-
nions parlementaires entendra M. Ches-
nelong ; à son tour, là commission pré-
sentera son rapport aux bureaux des quatre
réunions, qui sont convoquées pour après-
demain samedi.
De nombreuses versions vont sans nul
doute circuler encore à propos de ces der-
niers incidents; nous engageons nos amis
à se tenir en garde contre toutes les ru-
meurs, et à attendre comme nous le résul-
tat final avec une entière confiance.
Quoi qu'il en soit, le Soir prétend avoir des
renseignements très-précis, très-exacts sur les
négociations de Salzbourg.
Ces renseignements prouvent d'ailleurs que
la situation n'a pas changé. Le comte de Cham-
bord, ainsi que nous l'avions prévu, ne veut
faire aucune concession. Il faut d'abord qu'on le
proclame roi sans conditions, sans réserves, et
après, oh ! alors, on nous promet une constitu-
tion. Quant au drapeau, il n'en est pas question.
Voici d'ailleurs les informations du Soir :
Le comte de Chambord, inébranlable sur
son principe, tient à ce que l'Assemblée
lui offre la monarchie sans conditions ;
Les délégués de l'Assemblée ne veulent
pas abandonner les droits et prérogatives
de la Chambre, et désirent qu'elle seule
fasse la constitution de la monarchie nou-
velle, dont un article réglera la question
du drapeau.
En présence de ces deux volontés arr ê.
tées, comment tourner la difficulté?
Un député de la droite, récemment en-
voyé à Salzbourg, aurait réussi à aplanir
ce terrain. 4
Il aurait dit au comte de Chambord :
— a Vous' désirez, monseigneur, rester
fidèle à votre principe, à vos paroles, à
vos écrits précédents, et, par conséquent,
vous désirez que la royauté vous soit don-
née sans conditions.
» Nous désirons, nous, représentants du
peuple français, n'amoindrir en rien le
prestige de la royauté ; mais nous ne sau-
rions faire abandon des droits modernes
du pays ;
» Voici comment tout obstacle pourrait
disparaître :
» L'Assemblée, en proclamant la mo-
narchie, n'ajouterait aucune restriction,
aucune réserve à ce mot de monarchie. La
couronne vous serait ainsi offerte sans
conditions aucunes, et acceptée par vous
sans que vous ayez fait la moindre conces-
sion à vos principes. Le prestige royal de-
meurera tout entier.
» Mais, immédiatement, pour remercier
le pays et lui donner la satisfaction à la-
quelle il a droit, le roi, en acceptant la
couronne, chargera la Chambre de rédi-
ger une constitution, base nouvelle des
relations politiques entre la France et le
roi. »
On prétend que le comte de Chambord
a approuvé cette idée, et qu'une communi-
cation sera faite dans ce sens à la réunion
de la droite qui aura lieu, ainsi que nous
l'avens dit il y a quatre jours déjà, le 18
de ce mois, c'est-à dire samedi prochain*
Ces négociations ont été conduites par
MM. Lucien Brun et Chesnelong.
Les événements sont proches.
♦ , ,
Grandes nouvelles !
Efforçons-nous de contenir notre émo-
tion : MM. Lucien Brun et Chesnelong
sont dans nos murs,, et la Bourse a
monté de 60 centimes !
L'Assemblée nationale nage dans la joie
et annonce que les deux illustres com-
mis-voyageurs rapportent d'importantes
concessions de M. le comte de Chambord
sur la question du drapeau.
La Gazette de France est plus réservée.
« De nombreuses versions, dit-elle, vont
sans doute circuler à propos de ces der-
niers incidents; nous engageons, nos
amis à se tenir en garde contre toutes,
les rumeurs,.et à attendre comme nous
le résultat final avec une entière con-
fiance. »
L'Union ne dit mot. Serait-elle moins
confiante que-la Gazette ou mieux ren-
seignée que Y Assemblée nationale 7
D'autre part, le Courrier de Paris re-
çoit de Salzbourg, 16 octobre, 8 heures
25 minutes du matin, — on ne saurait
mettre trop de points sur les i en matière
si grave, — une dépêche ainsi conçue :
« Comte accepte constitution de 1814.
Suffrage universel avec modification.
Cinq ans de domicile. Drapeau tricolore
avec fleur de lys sur blanc. Toutes ces
concessions seront faites immédiatement
après que l'Assemblée aurait voté la mo-
narchie. »
Voilà, fidèlement résumées, les gran-
des nouvelles de la journée d'hier. Est-ce
vrai? Est-ce faux? C'est vraisemblable,
et cela suffit pour que nous accordions
quelques minutes d'examen aux impor-
tantes concessions de M. le comte.
Importantes en effet, très-importantes,
à son point de vue, puisqu'elles infligent
le plus éclatant démonti à tout ce qu'il
a dit, à tout ce qu'il a écrit, à tout ce
qu'il a juré.
Le comté de Chambord accepte la
constitution de 1814, avec le suffrage
universel modifié. C'est apparemment
des mains de l'Assemblée nationale qu'il
consent à recevoir le pacte constitution-
nel, ce qui, bon gré, mal gré, fera
d'Henri V non point le successeur de
Charles %, mais le successeur de Louis?
Philippé
Or le comte de Chambord a écrit le 27
janvier 1871 : « Rien n'ébranlera mes
résolutions, rien ne lassera ma patience,
et personne, sous aucun prétexte, n'ob-
tiendra de moi que je consente à devenir
le roi légitime de la Révolution. »
Le eoffilo (ip Chambord accepte le dra-
peau tricolore à le çfculg condition qu'il
soit fleurdelisé.
Or le comte de Chambord a écrit le
5 juillet 1871 : « Non, je ne laisserai pas
arracher de mes mains l'étendard
d'Henri IV, de François Ier et de Jeanne
d'Arc. Je l'ai reçu comme un dépôt* sacré
du vieux roi mon aïeul. il a flotté sur
mon berceau, je veux qu'il ombrage ma
tombe. Français ! Henri V ne peut aban-
donner le drapeau blanc d'Henri IV.. »
Enfin, il y a quelques mois, à peine,
M. le comte de Chambord répondait sé-
vèrement à l'évêque d'Orléans, qui s'é-
tait permis de lui conseiller une aposta-
sie comme un sacrifice nécessaire aux
vœux du pays : « Croyez-le bien, la
France n'a pas à ce point perdu le senti-
ment de l'honneur; elle ne comprend pas
plus le chef de la maison de Bourbon
reniant l'étendard d'Alger qu'elle n'eût
compris l'évêque d'Orléans se résignant
à siéger, à l'Académie française, en com-
pagnie de sceptiques et d'athées. »
Le comte de Chambord disait vrai : la
France n'a pas à ce point perdu le senti-
ment de l'honneur. Mais il est, à l'heure
actuelle, un Français qui n'a pas le droit
d'en dire autant. Et voilà pourquoi nous
considérons, et je pays considérera, en
effet, comme tres-importantes, les con-
cessions que MM. Lucien Brun et Ches-
nelong ont, dit-on, obtenues de M, le
comte. h"
Que si nous examinons ces conces-
sions au point de vue général, elles
nous paraissent infiniment moinssérieu-
ses. Les conseillers généraux et muni-
cipaux qui écrivaient, ces jours derniers,
aux représentants de la Seine, ont par-
faitement caractérisé la situation qu'on
voudrait nous offrir aujourd'hui, quand
ils ont dit : On accepte des chartes d'a-
bord ; plus tard on signe des Ordonnan-
ces. La charte de 1814, octroyée et non
soumise à l'approbation du pays, fût-
elle cent fois plus libérale qu'elle ne
l'est, offrît-elle, ce qui ne serait point dif-
ficile, cent fois plus de garanties qu'elle
n'en offre, ne nous dirait encore rien
qui vaille. « On respecte un moulin, on
vole une province » ; on respecte une
charte et l'on fait, très-légalement en ap-
parence, usage de l'article 14 pour la
réduire à néant.
On nous parle toujours de la tradition
monarchique, la voilà !
En ce qui concerne l'acceptation par le
prince du suffrage universel modifié,
nous aimons à croire que les bruits en
circulation ne sont que pures plaisante-
ries. Exiger cinq ans de domicile pour
l'électeur, c'est dire aux trois cinquiè-
mes des Français: Vous voterez quand les
poules auront des dents. Qui donc, en
France, est assuré d'un séjour de cinq
ans, à poste fixe, dans une localité ? Les
fonctionnaires eux-mêmes seraient exclus
du scrutin. Il n'est pas un professeur de
l'Université, pas un employé des télégra-
phes, des contributions, de la régie, des
postes, il n'est pas un ingénieur de
l'Etal, pas un employé de la Banque qui
puisse espérer jamais son inscription
sur les listes électorales; et quant a .la
« vile multitude, » en grande partie
composée de nomades intermittents qui
vont un peu partout où l'ouvrage les
appelle, ils redeviennent, comme devant,
taillables et gouvernables à merci. Voilà
ce que M. le comtd de Chambord appelle
accepter le suffrage universel !
Rappelons, en terminant, que toutes
ces mirifiques concessions rapportées
de Froshdorff par le derflier train, M. de
Chambord les fera quand l'Assemblée
nationale aura été bien sage et l'aura,
sans conditions, proclamé roi de France.
Et après, va-t'en voir s'ils viennent !
Du drapeau, enfin, nous n'en parlons
pas. L'armée n'a point besoin de connaî-
tre notre opinion à ce sujet ; mais nous
trouvons bien hardis ceux qui songent
à lui imposer l'obligation d'arlequiner
ses étendards !
E. SCHNERB.
: ; «—i
On écrit de Rome au Journal des Débats,
le 13 octobre :
Il est ici question d'un incident qui, dans les
circonstances Actuelles, ne serait pas sans gra-
vité
Vous savez que le congé de M. Foufnier
expirait en octobre, et on s'attendait en Italie
au retour du ministre français.
Il paraît que M. Fournier est allô trouver le
duc de Broglie pour lui demander l'autorisation
de retourner à Rome.
Le ministre lui aurait répondu en l'invitant à
prolonger la durée de son congé.
Le gouvernement italien aurait considéré
cette mesure comme un acte non d'hostilité,
mais de mauvais vouloir, et il aurait invité
M. Nigra à réclamer de ton côté un congé. Il
est donc probable que M. Nigra ne tardera pas
à retourner en Italie.
Si la détermination de M. de Broglie a ppur
cause la personne da M. Fournier, comme il y &
lieu de le croire, il ent été infiniment préféra-
ble de nommer un autre ambassadeur.
Les Italiens ont assez de bon sens pour com-
prendre qu'un gouvernement a le droit de choi
sir les agents qui lui conviennpnt.
Les bons rapports entre la France et l'Italie
ne tiennent point à une individualité, tandis
que l'absence prolongée du ministre de France
peut être considérée comme upe mesure peu
bienveillante.
os renseignements, ajoutent les Débats,
nous permettent de confirmer la npuvelle
que nous envoie notre correspoIldallt. M.
le ministre d Italie, ayant été autorisé par
son gouvernement à prendre un congé,
vient de quitter Paria,
Toutefois, nous lisons aux « dernières
nouvelles » de la Correspondance Ilavas :
Le ministre d'Italie, M. Nigra, est parti
avant-hur en congé, selon son habitude de
chaque année. Il est inexact que son départ ait
été motivé p.r¡.r jjrç incident quelconque survenu
avec le 'gouvernement fraugap. ^QUS rayons, au
contraire, que cé diplomate a annoncé, en par-
tant, que son absence ne se prolongerait pas au-
delà du retour de l'Assemblée.
Quant à nous, nous pouvonsaffirmer
que la prolongation du congé de M. Four-
nier n'est pas un fait indifférent.
L'Agence Havas dément le bruit de son
remplacement. Il est parfaitement exact
qu'en ce moment M. de Broglie et ses col-
lègues ne veulent pas le remplacer ; mais
dès la rentrée, s'ils peuvent obtenir un
vote de la Chambre favorable à leur poli-
tique, ils lui expliqueront qué sa mission
est terminée ; s'ils ne le font pas en ce
moment, c'est par crainte d'augmenter la
difficulté qu'ils éprouvent déjà à gouver-
ner ; mais il désirent qu'il ne rejoigne pas
Son poste avant de connaître la décision
de la Chambre.
: : ; 4
LE MOYEN DE ÁRVENIR
A Monsieur l'administrateur général des
chemins de fer de l'Ouest.
Monsieur l'administrateur,
fi y a quinze jours environ, je trouvai
da ru-al dévot, fort & la mode en
ce moment, le Pèlerin, une anecdote qui
me parut très-curieuse et très-caracté-
ristique ; je la cueillis précieusement et
la racontai aux lecteurs du XIX" Siècle.
Il s'agissait d'un chef de gare qui
avait eu la galanterie d'attendre à la sta-
tion un convoi de pèlerins, et d'offrir un
bouquet à chacune des dames qui le com-
posaient.
J'avais eu grand soin de retrancher de
l'histoire et le nom de la gare et celui
du ehevalier courtois qui s'était donné le
plaisir de faire une politesse qui n'est
pas trop dans les règlements des chemins
de fer.
Il parait, monsieur, que ce chef de
gare appartenait à votre administration,
et qu'à la suite de. la publicité donnée
par moi à son aventure, vous l'avez des-
titué de ses fonctions ; car voici la let-
tre que je reçois :
« Monsieur,
» L'employé dont vous avez parlé
dans votre articlevestun père de famille;
il a trois enfants ; le voilà sans place et
sans pain. Son avenir est perdu ; que
deviendront ses pauvres enfants? Si c'est
là ce que vous appelez le moyen de par-
venir 1 »
Ces derniers mots font allusion à quel-
ques-unes des réflexions que m'avait
inspirées l'acte de galanterie attribué par
le Pèlerin au chef de gare en question.
Le Pèlerin avait demandé pour lui, en
termes fort nets, de l'avancement à ses
supérieurs. « Nous espérons bien, avait-
il dit — je cite textuellement — que cet
aimable et dévotchef de gare sera récom-
pensé de son attention obligeante et
qu'il obtiendra, de ses chefs, l'avance-
ment qu'il mérite. »
Et moi, partant de ce très-petit fait,
dont je reconnaissais d'ailleurs l'im-
portance fort mince, je m'étais livré à
quelques considérations générales, qui
passaient dans mon idée par-dessus la
tête de cet humble et malheureux chef
de gare. Elles s'appliquaient à. tous les
intrigants qui se sentiraient disposés à
chercher, d'après cet exemple, leur avan-
cement moins dans la fidélité à remplir
leurs devoirs que dans une certaine os-
tation de dévouement aux intérêts
d'un parti. Où irons-nous, me deman-
dais-je, si dans les fonctions publiques
on récompense moins le mérite et les
services rendus que les flatteries hypo-
crites ; * s'il faut, pour arriver, montrer
que l'on est un nomme bien pensant
plutôt qu'un employé capable ?
J'en reviens là : ces réflexions, que je
crois fort justes, ne visaient pas direc-
tement ce pauvre diable de chef de
gare, qui, après tout, n'était coupable
que d'une galanterie un peu insolite. ,
Il peut se faire, monsieur l'adminis-
trateur, que mon article ne soit pour
rien dans la destitution dont il vient
d'être frappé. Vos ôccupations ne vous
ont sans doute pas permis de le lire, et
il est probable que vous n'avez été in-
formé de cette dérogation aux règle-
ments que par voie hiérarchique.
Cependant, je vous prie, monsieur
l'administrateur, de voir la situation où
vous me placez. On croira difficilement
que le journal n'ait pas de façon ou d'au-
tre pesé sur votre détermination, et j'au-
rai.sur la conscience le chagrin d'une
famille réduite à la mendicité.
Vous avez voulu faire un exemple, et
je ne crois pas que VQUS aye? eu tort. Il
est bon d'avoir lait comprendre à votre
personnel, par un acte vigoureux et qui
fasse impression sur les esprits, que vous
n'entendez pas obéir aux injonctions
d'un parti ou même subir ses recom-
mandations; que se procurer, par des
moyens peu avouables, l'estampille de
sa protection, o'est s'exposer au contraire
à encourir votre colère ; que vous êtes
fermement décidé à récompenser les
bons services et non les platos déféren-
ces pour la faction pltramontaine.
Mais enfin, monsieur l'administrateur,
l'exemple est fait à cette heure, et j'es-
père qu'il portera ses fruits. Ne vous se-
rait-il pas possible de tendre la main à
ce malheureux père de famille, à qui
vient d'ôlre infligée une si rude leçon, de
le replacer dans un autre postey de ren-
dre le pain à sa famille, et de m'ôter jus-
qu'à l'ombre cTua regret i * '*
Je voas en aurais personnellement une
grande obligation, et je vous prie, mon-
sieur l'administrateur, d'agréer l'assu-
rance de ma considération la plus dis-
tinguée.
FRANCISQUE SARCEY.
♦ —
Il y a eu mercredi réunion des députés
de l'Union républicaine.
Entre autres questions, on s'y est préoc-
cupé de la réponse à faire à la lettre que
nous avons publiée et par laquelle un
grand nombre de conseillers généraux et
de conseillers municipaux de la Seine in -
vitaient la députation du département à
déclarer qu'ils s'opposeraient énergique-
ment à toute restauration monarchique.
La réunion a décidé à l'unanimité qu'elle
ferait une réponse collective.
On lit dans l'Ordre:
La réunion de l'appel au peuple a tenu
hier sa séance. Elle n'a pas cru devoir
prendre de délibération immédiate et s'est
ajournée à la dernière semaine d'octobre.
Les circonstances qui se sont produites
depuis le 10 octobre et les renseignements
qu elle a recueillis ont en effet donné à la
réunion la conviction que les projets de
restauration monarchique étaient au moins
indéfiniment ajournés.
M. Bamberger, député de Meurthe-et-Moselle,
nous adresse la lettre suivante :
Passy, 16 octobre 1873.
Monsieur le rédacteur,
Le XIX" Siècle publie des fragments ré-
trospectifs de lettres, de discours, de pro-
fessions de foi émanant de représentants
monarchistes, mais pleins de protestations
en faveur de la République.
Vous croyez peut-être que ces. messieurs,
pris en flagrant délit de contradiction,
vont courber la tête ? qu'ils rougiront de
leurs palinodies ? Ah ! monsieur, que
vous le connaissez peu, le représentant
des vieilles idées ! Que vous êtes peu au
courant de l'effronterie dont il est capa-
ble ! Illi robur et œs triplex. Lui, rougir
d'avoir acclamé la République il y a trente
mois, et de saluer aujourd'hui les premiers
rayons de l'astre royal ? allons donc 1
Mais ils le reconnaîtront dix fois pour
une : Oui, la République était nécessaire;
à elle d'endosser la responsabilité des me-
sures rigoureuses ; à elle de conclure la
paix (et quelle paix !) ; à elle de dompter
la Commune ; à elle de saigner la France
aux quatre membres ; à elle d'essuyer les
plâtres !
Il m'est souvenance qu'à Versailles, et
vers la fin du mois de mai 1871, un mem-
bre du centre droit, l'un des fondateurs,
notez ce fait, de la réunion Féray, me di-
sait : « La République seule était capable
» de mener à bonne fin la victoire du
a parti de l'ordre sur les insurgés. » Et
presque tous tenaient ce langage : « Il
» entre dans nos vues de garder la Ré-
» publique pendant deux ans à peu près;
» la place est mauvaise, la République la
» nettoiera. »
Vingt fois, je le répète, j'ai entendu ce
langage. Nous autres, gens naïfs, nous
sommes dès lors mal venus de reprocher à
nos adversaires un jeu dont ils se vantent
au contraire parce qu'ils le croient habile.
Il est bon de le crier bien haut : l'adhésion
à la République de MM. tels et tels a été
un acte d'opportunité et proclamé par eux
une mesure transitoire. Aujourd'hui que
les marrons sont tirés du feu, qu'ils sont
là, appétissants et rôtis à point, de quel
droit nous autres républicains irions-nous
apposer aux réactionnaires une opinion
qui, de leur aveu, n'a été qu'une manœuvre
habile?
Que le pays le sache donc : dès 1871,
MM. les cléricaux et monarchistes de tou-
tes nuances ont entendu disposer à leur
heure des destinées de la France. Il est
vrai que la France n'entend pas de cette
oreille; ce qu'on lui a donné, elle veut le
garder, et elle fait bien; indè irœ.
Oui, la République seule pouvait sans
hésiter attaquer avec vigueur l'insurrec-
tion de 1871; en effet, un monarque com-
battant la Commune eût paru défendre sa
cause à lui ; la République, être imper-
sonnel, défendait la cause de tous.
Oui, la République seule pouvait impo-
ser à la France qu'elle personnifiait les
terribles sacrifices qui devaient assurer sa
libération.
C'est donc bien la République seule qui
a sauvé la France, et c'est pourquoi la
France bien renseignée se déclare aujour-
d'hui tout entière pour elle.
Recevez, monsieur le rédacteur, l'expres-
sion de mes sentiments les plus dévoués,
Ed. BAMBERGER.
— ————————
LES DÉPUTÉS DE PARIS
■ —'
A M. Hérold, membre du conseil général de
la Seine.
Paris, le 16 octobre 1873.
Monsieur,
J'avais répondu d'avancer la lettre col-
lective que vous m'avez fait l'honneur de
m'adresser. Mes votes, mes paroles, de
récentes déclarations sur la fusion, tout de
ma part vous assure de ma ferme décision
de voter pour la République contre la
Monarchie. L'insolence factieuse avec la-
quelle certains organes de la presse roya-
liste ont traité les récentes manifestations
du suffrage universel, ne tirant d'autre
conclusion dlis dernières élections que la
nécessité de se débarrasser au plus tôt de
la souveraineté nationale, montre que
l'ordre est autant intéressé que la liberté
au maintien loyal de la République.
Recevi z, monsieur, l'assurance de mej
sentiments les plus distingués,
V y-'. - E. DE PRESSENSÉ,
; Député de la Seiue,
A M. Béclard, membre du conseil général
de la Seine. -
Nanterre, 14 octobre 1873»
Cher monsieur,
J'ai été envoyé à l'Assemblée pour main-
tenir et fonder définitivement la Républi-
que, seul gouvernement capable de fermer
l'ère des révolutions et le seul pouvant se
prêter à tous les progrès sans secousse
violente. Je ne faillirai pas plus à mon de-
voir et à mes convictions que je n'y ai
failli jusqu'à ce jour, et je repousserai par
mon vote toute tentative de restauration
monarchique quelconque.
Telle est ma réponse à la lettre que vous
et vos honorables collègues avez bien voalti
m'adresser.
Agréez, cher monsieur, l'expression, de
mes sentiments les plus dévoués.
Paul MORIN,
Député de la Seine.
Paris, 16 octobre 1873.
M. Hérold, vice-président du conseil
municipal de Paris.
En recevant la lettre collective que vous
m'avez fait l'honneur de m'adresser, je
m'étais flatté que ce n'était pas de moi que
ses auteurs attendaient une réponse. J'y
avais vu simplement une invitation à
m'entremettre auprès de ceux de mes col-
lègues de l'Assemblée nationale dont les
dispositions à l'égard des projets de res-
tauration monarchique, qui s'agitent de-
puis quelques mois, peuvent être douteu-
ses. Spontanément j'avais déjà tâché d'agir
dans ce sens au moyen de deux lettres
adressées les 18 et 28 septembre der-
nier, à chacun de mes collègues, mais
écrites plus particulièrement à l'intention
de ceux d'entre eux qui ont passé aux roya*
listes sans passion personnelle et unique.
ment par appréhension du radicalisme. Je
me croyais donc dispensé de vous répon*
dre lorsque, hier même, au sujet de ces
lettres, il m'est venu de province une ré-
ponse où se trouvent des compliments'tels
que ceux-ci :
« Vos critiques équivoques cachent un
» partisan du Syllabus; — au moyen de
» subterfuges déloyaux, vous cherchez à
» conserver un pied dans les antichambres'
» de tous les partis, etc. »
J'ai compris alors que, malgré quelques
apparences contraires, les fautes commises
par une partie des républicains ne les
avaient pas éclairés tous sur le danger de
leurs prétentions étroites et exclusives et
que, tout en adoptant ces jours-ci le dra-
peau que j'ai défendu, avec vous, contre
eux au 27 avril, ils restaient disposés à
m'excommunier dans leurs grands journaux
et à me bafouer dans lés petits, comme à
l'époque où je soutenais que pour être res-
pectée de tous et avoir longue vie, la Ré-
publique se trouverait mieux du parrai-
nage de M. de Rémusat que de celui de
M. Barodet.
Sans discuter de nouveau ce point, qui
est pour moi d'une évidence à crever les
yeux, je cesse néanmoins de croire que je
suis dispensé de déclarer que je ne songe
nullement à renier les opinions de toute
ma vie et que je ne voterai avec les roya-
listes que lorsqu'ils voteront pour la Répu-
blique. Je désire d'ailleurs ardemment que
cette dernière éventualité se réalise- tout
invraisemblable qu'elle paraît;—car, enne-
mi des partis exclusifs, je rêve une Répu-
blique ouverte à tout le monde et n'ayant
d'intolérances qu'à l'égard du désordre. -
Veuillez agréer, monsieur, l'assurance de
mes sentiments les plus distingués pour
vous et les autres signataires de la lettre à
laquelle je réponds.
PÏRNOLET,
député de la Seine.
—♦ ;
UN DÉlOUEIEIT INATTENDU
Le succès des candidats républicains,
aux élections du 12 octobre, a exaspéré les
conspirateurs du parti monarchique. Jour-
nalistes de sacristie et journalistes d'anti-
chambre royale, porte-clés et chambellans
en perspective, futurs officiers de la garde-
robe, ministres sifflés par le suffrage uni-
versel, députés menacés d'être rendus aux
douceurs de la vie privée, inventent, col-
portent, accumulent contre les candidats
élus et la démocratie républicaine les in-
sultes les plus grossières, les insinuations
les plus basses, les outrages les plus for-
cenés. Leur dépit et leur haine coulent et
se répandent comme un fleuve de fiel et de
boue; Partisans du pétrole, disciples de
Vermersch, ccmplicesdes Prussiens, marmi tons
* la vieille Adolphine (ceci est du Veuilles •
en état de grâce), insectes rongeurs, hom.
mes déshonorés, telles sont, entre beau-
coup d'autres, les qualifications que pro-
diguent aux républicains des gens qui
croient défendre la religion et restaurer
l'ordre moral en mêlant les pieuses calom-
nies de Basile aux invectives furibondes du
Pere-Duchene. Trestaillon, à la veille de
manquer d'ouvrage, accuse M. de Rémusat
de troubler le pays ; au premier jour, le
journal de M. Beslay fils Faccusera d'avoir
présidé la Commune !
U faut dédaigneusement laisse? passer
ce Hot diujures impuissantes, La-force diJ
la démoctie se révèle chaque jour assez
grande pour qu'elle ait le droit de mépri-
ser l'astuce ou la colère des factions mo-
narchiques aux abois. En les voyant cons-
puées par le suffrage universel et réduites
malgré les nouveaux préfets, les nouveaux
sous-préfets, les nouveaux agents de toute
espèce à de pauvres minorité, on serait
presque disposé à les prendre en commi--
sération If leur a stfftv de se montreT
d'étaler leurs espéras, de laisser vair-
leurs cri-minels desseins, pour qu'aussitôt
la conscience du pays se soulevât de dô-
goût e.t d'horreur. Gulliver a brisé les
liens dans lesquels l'avaient eatortiUô les -
lilliputiens de la monarchie.
Mais le succès des récentes élections n'a.
pas en seulement pour résultat de rendra
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