Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1873-09-26
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 26 septembre 1873 26 septembre 1873
Description : 1873/09/26 (A3,N680). 1873/09/26 (A3,N680).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7558038x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/03/2013
3* Année. — N° 680.
PRIX DU NUMÉRO : PARIS 15 CENTIMES — DÉPARTEMENTS 20 CENTIMES.
Vendredi 26 Septembre 1873.
T hif j E QTt'fT li'
~t' t "* AiA oifiLLit
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adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
Mo rue Drouot,$
La manuscrits non insérés ne soroni pas rendus»
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DÉPARTKMWM
Trois mois. 16 Ir.
Six mois.h.U 82 *
Un an.61 "J
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
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On s'abonne à Londres, chez M. A. MAURICE général
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6, place de la Bonrse, a
On s'abonne à Londres, chez M. A. MAUBICB général
advertiaing. agent, 13, Tavistockrow, Covent Gardela,
MM. les Souscripteurs dont l'a-
bonnement expire le 30 septembre
sont priés de le renouveler immé-
diatement, s'ils ne veulent éprouver
de retard dans la réception du
journal. -----
Le8 abonnements pour l'AL..CE-
LOBBAlNE sont aeeepté8 an prix de
France.
On peut souscrire ehes ,. 1. M-
Itratrea.
JOURNÉE POLITIQUE
Paris, 25 septembre 4875
Tout le monde a lu hier la dépêche du
Times. Aujourd'hui les journaux, avec un
sérieux très-grand, sont occupés à en réta-
blir "des passages altérés par le télégraphe.
L'Agence Havas, en transmettant la tra-
duction du télégramme da Paris que le
Times avait publié, s'est mise en contra-
diction, sur certains points, avec le texte
du journal anglais. Pour l'affaire du dra-
peau, par exemple, comme les délégués
objectaient que l'Assemblée nationale ne
iénoncerait pas au drapeau tricolore, l'A-
gence Havas a mis dans la bouche du
comte de Chambord cette réponse : « Je le
sais, » tandis que le Times lui fait ré-
pondre : 1. Je l'ignore. » Ce qu'il y a de
plus curieux, c'est que l'Agence Havas
assure aujourd'hui qu'elle est allée « à la
source de l'expédition, » que c'est sa faus-
se traduction du texte anglais qui se
trouve être la version véritable, et que le
Times publiera demain un erratum pour
déclarer que l'Agence Havas a bien fait de
traduire par : Je le sais, les cinq mots : 1
do not know that.
Voilà donc où sont descendues présen-
tement les discussions politiques, et voilà
sur quoi l'on nous convie à raisonner
avec ardeur. Il paraît que les orléanistes
attachent à la version : Je le sais, beau-
coup d'importance. Au premier abord, ce :
Je le sais, semble un contre-sens; mais on
l'explique. Les monarchistes disent au
comte de Chambord : « Mais l'Assemblée
ne voudra jamais renoncer au drapeau
tricolore ! » El le prétendant répond : Je
le sais 1 c'est-à-dire : « Oui, parbleu! je le
sais bien, j'y vais songer encore, et je ferai
peut-être des concessions, puisque l'As-
semblée demeure inflexible. » S'il répond,
au contraire : Je n'en sais rien, c'est comme
s'il disait : « Je n'ai pas à m'en occuper;
c'est à elle de céder, je ne céderai rien. »
Enfin a-t-il dit : Je le sais, ou : Je ne le sais
pas? Nous verrons demain si le Times fait
la rectification annoncée par l'agence Ha-
vas. Dans tous les cas, ce qui subsiste,
c'est que la question du drapeau n'a pas
été réglée cette fois encore à Frohsdorfl et
que les délégués n'ont jusqu'iei rien ob-
tenu.
C'est à quoi le Français fait allusion dans
un article assez mélancolique, où il recom-
mande aux conservateurs le sang-froid, 'la
prudence, etc. « Jamais, dit-il, le sang-
froid, la prudence, la patience souvent si-
lencieuse n'oat été plus nécessaires. Des
points graves ont été éclaircis. D'autres ne
le sont pas encore et doivent l'être; car
depuis le 24 mai le règne des obscurités et
des équivoques est fini. C'est à ceux iqui
ont compétence et mission pour cette
œuvre de la continuer. » Ceci ne marque,
si nous ne nous trompons, qu'une con-
fiance assez tempérée dans le succès de la
grande entreprise. Une autre feuille, l'As-
wmblée nationale, veut bien cependant expli-
quer sur un ton d'oracle comment laroyautê
sera rétablie dans la première quinzaine
de novembre; elle n'indique, il est vrai, ni
le jour ni l'heure : « Il est aujourd'hui
convenu, écrit-elle, que la proclamation
pure et simple de la monarchie aura lieu
avaiàt tout, et que la constitution nouvelle
sera faite d'un commun accord entre le
roi et l'Assemblée. » Ce n'est pas, comme
on voit, plus difficile que cela. Mais le
centre droit ? Mais le drapeau, puisque
c'est toujours au drapeau qu'il faut en re-
venir? Dans les journaux légitimistes
purs, nous ne trouvons aucun indice d'une
future conciliation sur la grosse difficulté
du drapeau. La Gazette de France ne dit
rien ; elle. n'avait pas donné la dépê-
che du Times, elle se borne à la repro-
duire mais avec la version : Je n'en
sais rien, dont ne veulent point enten-
dre parler les orléanistes. L'Union, tou-
jours réservée, donne ainsi son avis :
« La plupart des journaux de Paris publient
une dépêche du Times, qui a produit une
certaine sensation dans les groupes poli-
tiques. Fidèles à la réserve que nous vou-
lons garder, nous nous sommes abstenus
de faire connaître cette dépêche. Ou ne
saurait trop se tenir en garde contre les
mille récits qui circulent. » M sis V Univers
est assez curieux à lire. Il publie la dépê-
che du Times, et, naturellement, avec la
version : Je n'en sais rien; puis il écrit :
Si l'on pèse bien tous les tertiaes de cette note,
on verra qu'elle ne donne, eu somme, sur au-
cun point rien de précis. D'aprèi nos propres
informations, ce défaut de précision reflète le
caractère des conversations que résume le
Times. Les députés n'avaient pas Efiandat de po-
ser des questions qui eussent été une sorte
d'ultimatum, mandat qu'ils n'auraient pas voulu
accepter d'ailleur, et que le roi, de son côté,
n'fut pas admis. Il y a eu échange d'idées; rien
p'a été précisé, et les, détails que l'on donne,
d'après des témoignages indirects, ne peuvent
être acceptés comme un procès-verbal.
Tout de suite après vient un article qui
a pour titre : le Dr termine par
cette phrase : « En résumé, quieonque veut
ou accepte Henri V voudra ou acceptera
son drapeau, et ceux qui tentent aujour-
d'hui de les séparer sont des farceurs qui
ne veulent ni du drapeau ni du roi. » Far-
ceurs ! oui, des farceurs, M. de Sugny et M.
Merveilleux-Duvignaux, puisqu'ils n'ont
été à Froshdorff que pour séparer le comte
de Chambord de son drapeau ! La cordiale
entente ! Et l'opinion du Journal de Paris ?
demanderez-vous. On ne la sait point, il se
garde bien de la faire voir. Il y a seulement
fort à parier que ce n'est pas celle de l'Uni-
vers. Au fond,l'on doit trouver que tout ce qui
se passe est assez ridicule. C'est un digne
prélude aux < grands débats » qu'on nous
promet pour la rentrée, de l'Assemblée. Le
public, tout en se lassant de l'imbroglio,
reconnaîtra du moins qu'il a quelques cô-
tés comiques.
EUG. LIÉBERT.
-————————— + :
L'agence Havas communique aux jour-
naux la note suivante :
En présence de la différence qui existe entre
la dépêche du Times que nous avons communi-
quée hier aux journaux et le texte publié par
ce journal, nous sommes allés à la source môme
de l'expédition, et nous avons été autorisés à
déclarer que ]etc!!¡X expédié d'ici porte bien :
Je le sais, et no'n'pàs : Je ne sais, et que le pa-
ragraphe relatif au drapeau est bien conforme à
celui que nous avons distribué hier aux jour-
naux.
Une rectification dans ce sens doit paraître
dans le Times de demain matin.
De même, notre télégramme avait bien rendu
le sens du passage relatif à l'acceptation d'une
Constitution : le télégramme publié par le Timçs
dit bien une Constitution quelconque; mais dans
la pensée de ceux qui ont communiqué cet en-
trètien au correspondant du Times, cette expres-
sion signifie simplement une Constitution qui
serait faite en dehors de l'action du comte de
Chambord. C'est pourquoi nous avons traduit,
au lieu de Constitution quelconque, Constitution
toute faite.
———————————— ————————————
Hier, c'était une dépêche du Ttmes,
aujourd'hui c'est une note de l'Assemblée
nationale. Dépêche et note ont un point
commun : le décousu des informations
qu'elles contiennent. Suivant le journal
anglais, M. le comte d6 Chambord au-
rait fait aux ambassadeurs qui sont al-
lés le trouver à Froshdorff des réponses
qui laissent toute solution en suspens';
d'après le journal français, tout serait
réglé définitivement. Il est vrai qup
l'Assemblée nationale ne dit mot du comte
de Chambord, et donne à penser que
les monarchistes, n'ayant pu s'entendre
avec lui, ont résolu de passer outre.
Voici la note en question :
Les chefs du parti conservateur dans là
Chambre sent parvenus à résoudre les princi-
pales difficultés et ont l'espoir le plus fondé
d'arriver, lorsque le moment sera venu, à une
entente définitive.
Ainsi, dès aujourd'hui, les membres qui
avaient
Ainsi, l'intention de demander au roi d'accup-
ter, ayant son retour en France, une constitu-
tion préalablement faite, ont renoncé à cette
prétention, et il est aujourd'hui convenu que la
proclamation pure et simple de la monarchie
aura lieu avant tout, et que la constitution nou-
velle et les lois qui devront en découler seront
faites d'un commun accord entra le roi et l'As-
semblée.
On ne doute pas que la majorité vote cette
solution.
Dans la seconds quinzaine d'octobre, les
membres des trois droites se réuniront pour
entendre les propositions qui leur seront faites
et pour désigner une députation de cinq mem-
bres chargée de se rendre à Frohsdorff.
D'après ce que l'on sait, la mission confiée à
cette députation a des chances certaines de
succès.
Les intérêts du pays exigeant une prompte
décision, la.proposition tendant au rétablisse-
ment de la monarchie sera soumise à l'Assem-
blée dans la première quinzaine du mois de no*
vembre prochain.
Jùsquesà quand serons-nous condam-
nés à entendre des inepties de cette for-
ce ? Les conservateurs sont d'accord,
mais ils ne le sont pas ; tel est le pre-
mier point. En effet ils ont résolu les
difficultés principales ; mais ils ont l'es-
poir d'arriver à résoudre les autres.
Second point : on a décidé de voter
avant tout la monarchie; mais on éprouve
le besoin de convoquer prochainement
les députés des trois droites pour leur
soumettre cette décision.
Troisième point : une députation sera
envoyée au comte de Chambord, et l'on
sait d'avance, bien qu'elle ne soit pas
encore nommée, bien qu'on ignore si les
gens qui la doivent choisir parviendront
à s'entendre, qu'elle a des chances cer-
taines de succès.
Il faut vraiment compter beaucoup sur
l'imbécillité publique pour oser lui ser-
vir de pareilles bourdes ; il faut surtout
être bien assuré qu'à défaut du droit on
a la force, pour avouer qu'on fera la,
monarchie coûte que coûte, sans savoir
si l'on aura un roi, puisque, la monar-
chie votée, il s'agira de s'entendre avec
l'élu sur une constitution; sans savoir
même si les gens qui auront voté le ren-
versement de la République réussiront
à se mettre d'accord sur les institutions
monarchiques à établir.
Mais bah ! si le comte de Chambord,
une fois le coup fait, ne se montre pas
plus accommodant, on aura toujours la
ressource d'offrir la couronne au comte
de Paris. C'est peut-être même ce qu'on
espère dans le parti orléaniste, qui de-
viendrait, vraisemblablement, le maître
de la situation le jour où un vote pur et
simple de l'Assemblée rétablirait la mo-
narchie sans eonditions d'aucune sorte.
D'eux seuls, en effet, dépendrait alors de
préparer une constitution acceptable ou
non pour le comte de Chambord; suivant
qu'ils se montreraient plus ou moins ré-
volutionnaires , c'est-à-dire plus ou
moins fidèles aux traditions de 1830, le
petit-fils de Charles X pourrait ou non
consentir à monter sur le trône.
Or, la famille d'Orléans n'est point
prêteuse, c'est là son moindre défaut, et
elle ne manquera certainement point de
se rappeler qu'un bon tiens vaut mieux
que deux tu l'auras. Le comte de Cham-
bord n'est pas vieux, et ce serait bien
long d'attendre son héritage !
Ou la note de l'Assemblée nationale
n'est que la conception d'un reporter en
gaîté, ou il faut y voir ce que nous ve-
nons de dire: un guet-apens orléaniste.
E. SCHNERB.
—; * —
On lit dans le Bien public :
On dit que le maréchal de Mac-Mahon,
pressenti au sujet de la prorogation des
pouvoirs, aurait décliné toute proposition
de ce genre. Le maréchal croit à la néces-
sité d'une solution, et il estime, dit-on,
qu'il ne serait pas digne de lui de se prê-
ter à une combinaison destinée à prolon-
ger un provisoire dont le (pays est las. Si
cela est exact, la situation est très-sim-
Elifiée, mais cette simplification nous sem-
le faite pour inspirer aux libéraux dé la
droite de salutaires réflexions. S'ils sejettent
les yeux fermés dans l'aventure de la restau-
ration, il n'y aura pas de portes de déga-
gement. Une fois lancés, si le vote est fa-
vorable, il faudra aller jusqu'au bout : c'est
un trébuchet ; qu'ils regardent bien avant
de toucher à l'appât.
— —♦ ———————————
Paray-le-Monial
(Notes de voyage)
J'ai voulu voir, j'ai vu, comme dit la
reine Athalie.
J'ai vu une jolie petite ville, encore
étonnée et comme ahurie de la fortune
et de la gloire qui sont tombées sur elle
un beau matin. A peine si les 3,500 ha-
bitants de cet honnête bourg ont eu le
temps de se reconnaître. Chaque train
leur amène encore une douzaine de pè-
lerins attardés, presque tous irlandais ou
bavarois, qui veulent voir le mur der-
rière lequel Jésus a révélé son cœur à
Marie Alacoque, et les platanes sous
lesquels cent députés légitimistes ont
défilé en procession.
Le premier habitant que je vois au
sortir de la gare est un vieil idiot, assis
dans une brouette ; il aboie comme un
chien en secouant sa tête comme un ours
blanc. Si Marie Alacoque le savait ! Il y a
là un joli miracle à faire. Les autres in-
digènes avec qui j'ai causé ne m'ont paru
ni fous ni bêtes ; il s'en faut ! Fort obli-
geants, toujours prêts à mettre le voya-
geur sur sa route : la première rue à
droite après le deuxième pont, mon bon
monsieur ! Mais fermés à triples verrous
sur les affaires de l'Eglise et de l'Etat.
« C'est bien au couvent de la Visita-
tion que se sont accomplis les miracles ?
— Il se pourrait.
— Vous devez le savoir ?
— On dit tant de choses !
— Mais les reliques de Marie Alaco-
que guérissent encore aujourd'hui toute
sorte de maladies incurables ?
— Je ne prétends pas le contraire.
— Vous avez vu de ceux que la bien-
heureuse a remis sur pied?
— Cela ne s'est pas rencontré.
— Connaissez-vous quelqu'un qui en
ait vu ?
— Je voudrais bien.
— Du moins vous avez entendu ra-
conter des miracles récents ?
— J'ai l'oreille un peu dure. »
Un sourire à la fois discret et malin,
souligne chaque réponse. Cette petite
bourgeoisie bien française, c'est-à-diré
profondément sceptique, ne veut pas êtré
ridicule ; mais la politesse et l'intérêt lui
conseillent de ne pas scandaliser les naïfs.
Chez un marchand de parapluies, j'a-
vise entre deux brochures édifiantes de
M. Eugène de Mirecourt un médaillon
de M. de Chambord. « Combien ce plâtre,
madame'?
— « C'est tant, monsieur.
— Vous savez ce qu'il représente ?
— Mon Dieu, pas plus que vous.
— C'est le roi, n'est-ce pas ?
— Nous avons des personnes qui l'ap-
pellent ainsi.
- Mais le roi de quel pays ?
- Dame ! On me l'a vendu comme le
roi de France, mais je ne le garantis pas
autrement.
— Mais la France est en Républi-
que 1
— Ça, c'est certain.
— On croit donc par ici que la Répu-
blique ne durera pas ?
— Comment le saurait-on dans une
ville de trois mille âmes, quand Paris
lui-même n'en sait rien ? »
Le couvent de la Visitation, où Marie
Alacoque eut la faveur de vivre et de
mourir hallucinée, est un grand édifice
du dix-septième siècle, annexé à une jolie
église du moyen-âge. Soixante nonnes y
vivaient strictement cloîtrées lorsque nos
députés eurent la fantaisie d'organiser le
grand pèlerinage de juin.
Des milliers de dévots furent admis
à parcourir en procession les cloîtres,
le bosquet de la première apparition, la
cellule de Marie Alacoque et l'infirmerie
où elle est morte. Les pèlerins anglais,
le 4 septembre, ont joui du même spec-
tacle; mais aujourd'hui les portes du
monastère sont refermées et personne
n'y entre plus. La population de Paray
iStait tôute portée pour jouir d'un spec-
tacle si rare ; elle ne semble pas en
avoir profité. Soit qu'elle eût assez à
faire chez elle, pour loger et nourrir
cette invasion de dévots, soit qu'elle fût
profondément indifférente aux mystères
du Sacré-Cœur, elle laissa le champ libre
aux visiteurs étrangers. L'invention de
Marie Alacoque a fait son chemin dans
le monde, sans effleurer le bon sens des
petits bourgeois et du peuple. Nul n'est
prophète en son pays. Elle n'a converti
sur place qu'un petit cénacle de hobe-
reaux légitimistes, vingt ou vingt-cinq
familles au plus. C'est le chef d'une de
ces maisons qui a concerté la grande
manifestation du pèlerinage avec les
députés de la droite cléricale ; le peuple
de la ville n'y est pour rien.
Ce n'est pas que les aubergistes et les
simples boutiquiers aient négligé une si
bonne aubaine ; ils ont gagné beaucoup
d'argent. Durant près de trois mois,
tous ceux qui disposaient d'une chambre
meublée ont gagné couramment dix
francs par jour; les lits se sont loués
cinq francs en moyenne. Les vivres ont
valu des prix exorbitants. Un homme
qui avait loué un terrain pour eent
francs et tendu une toile sur quatre pi-
quets a réalisé, de son aveu, 31,000 fr.
de bénéfice en vendant des petits pains
garnis de saucisse ou de jambon. La com-
pagnie de Paris-Lyon-Méditerranée a fait
un million de recettes, quoique le prix
des places fût réduit de 50 pour cent.
« Mais, disais-je à notre aubergiste,
tout le monde n'a pas profité de cette
occasion. Il y a bien des gens qui, par
goût, par nécessité, ou simplement par
fierté, n'ont pas cédé leur lit aux pèlerins
pour s'en aller dormir à l'écurie. Ceux-là
n'ont eu que l'ennui, le tapage, le trou-
ble de leurs habitudes, et la cherté.
— Oui, sans doute, mais ils n'ont pas
voulu se venger sur le pauvre monde,
et ceux que le pèlerinage agaçait le plus
se sont enfermés dignement chez eux.
Nos hôtes n'ont pas entendu une plai-
santerie, ils n'ont pas vu ricaner un seul
visage sur leur chemin. Il n'y a pas
beaucoup de dévots par ici, mais on est
de bonne compagnie.
- C'est fort heureux pour vous, car
les pèlerins reviendront, ils en enver-
ront d'autres, et s'il s'établissait un cou-
rant.
- Dieu nous en préserve ! Nous avons
fait d'excellentes affaires, mais c'est trop
de tracas, nous sommes sur les dents,
on n'en peut plus. Nous ne sommes ni
installés, ai outillés, ni trempés pour
cette besogne; il faudrait être de fer. »
Les bannières des pèlerins sont dépo-
sées dans la chapelle de Marie Alacoque,
autour du singulier autel qui s'élève sur
les reliques de la Bienheureuse. Elles
sont riches, très-riches, mais d'un goût
exécrable pour la plupart. La Belgique
en a fourni beaucoup, l'Espagne une,
et l'Angleterre deux ou trois : major è;
longinquo reverentia. Les reliques de Ma-!
rie Alacoque sont enfermées dans une:
poupée de cire grande comme natures
Cette poupée reçoit des lettres, j'en ai
vu cinq ou six à son adresse, et je ne'
doute point qu'elle n'ait su les lire sans
briser le cachet.
Elle reçoit aussi de l'argent, et elle
en fait un excellent usage. Elle achète
des maisons et elle y loge des jésuites,
en mémoire du R. P. de la Colombière,
qui fut son confesseur ici-bas. Depuis
le mois de juin, la Société de Jésus s'in-
stalle et s'arrondit à vue d'œil dans le
quartier de l'hôpital; avant deux ans,
s'il plaît à Dieu, elle aura les trois quarts
de la ville. Amen !
ABOUÏ.
— ♦ ——— —; —
Nous avons indiqué, hier, la Réforme
de Toulouse, comme étant le journal de
M. Duportal. Avant que notre confrère
M. E. Bresson, qui, sous le patronage des
membres les plus estimés de la gauche
républicaine, dirige si vaillamment la
Réforme, ait le temps de réclamer son
bien, nous nous empressons de réparer
notre erreur. La réparation demandée
n'aurait pu être, d'ailleurs, que courtoise,
et nous sommes heureux de l'occasion qui
nous est offerte de lutter de courtoisie avec
notre estimable confrère.
P. L.
: : —
On lit dans le Courrier de Paris
On commence à s'apercevoir, dans les cercles
républicains, que les fasionnistes sont beaucoup
plus à redouter qu'on n'avait lieu de le croire.
On parait reconnaître que leurs efforts sont
d'autant plus sérieux que les atermoiements
sont devenus à peu près impossibles, et que si
l'Assemblée ne rétablit pas promptement la
monarchie, c'en est fait de l'espérance de la
Maison de France.
On reconnaît, dès maintenant, que les efforts
des monarchistes n'ont qu'un seul et même
but : rallier à leurs projets les 50 ou 60 mem-
bres indécis des centres, dont la foi monarchi-
ques a été un peu ébranlée, mais qui, aujour-
d'hui, ne feront pas de grandes difficultés pour
revenir à la royauté, leur foi républicaine n'é-
tant pas des plus robustes.
On pense donc, dès maintenant, qu'en réu-
nissant les voix des républicains sur lesquelles
toute tentative de séduction serait oiseuse aux
15 ou 20 membres du parti de l'appel au peu-
ple, décidés à repousser Henri V, on trouvera
un total de » 340 députéi environ, sur 720, qui
s'opposeront au rétablissement de la monarchie.
C'est le Courrier de Paris, lui-même,
qui souligne les deux mots imprimis en
italiques. On ne saurait dire plus galam-
ment aux membres du centre gauche que
l'on espère bien ne point les trouver tous
inaccessibles aux séductions d'une pairie,
d'une ambassade, d'une préfecture ou d'un
bureau de tabac. Heureusement le Courrier
de Paris se vante; on le lui fera bien voir,
nous en avons la ferme assurance.
: +
LA MAISON MORTUAIRE
M. le comte de Chambord avait si bien
habitué les zélés négociateurs, qui jus-
qu'ici s'étaient adonnés à la tâche ingrate
de le raccommoder avec son peuple, à un
« non » plein d'une rogue majesté, que,
maintenant, rien que par une réponse éva-
sive ou simplement par un silence, il sa-
tisfait les plus difficiles et fait pousser des
cris de joie aux plus enthousiastes.
Une démangeaison à l'oreille repré-
sente une acceptation; un éternuement
équivaut à une constitution. Très-heureu-
sement il ne s'est pas encore mouché en
présence des ambassadeurs. on nous as-
surerait que le discours du trône est déjà
prononcé.
- C'est ce qui nous vaut, à chaque train
de corvée, retour de Frohsdorff, des bouf-
fées d'allégresse monarchique qui se tra-
duisent par un chant dont le rhythme varie
suivant le tempérament du musicien,
mais dont le refrain est toujours le même :
Hurah! la République est enterrée! ou
plutôt enfouie, car il ne faut jamais déna-
turer les paroles de ses adversaires.
N'ayant rien à dire et ne pouvant se
taire, les royalistes poussent des cris ; cela
est dans l'ordre naturel. Mais les cris
n'étourdissent que celui qui les pousse, et
il s'agit, ici, d'étourdir les autres ; il est
donc nécessaire de trouver autre chose.
Pas le plus petit fait à se mettre sous la
plume ! Et l'on a recours aux fictions. Le
fabliau remplace l'argument.
En voici un très-propret, très-gentil, dû
à la plume légère d'un écrivain monar-
chiste, qui a livré son article avec la con-
viction qu'il allait démontrer « à quel en-
fantillage de raisonnement en est réduit
le parti républicain. »
« Quelques heures avant le décès du
» maître, une maison mortuaire offre un
» aspect frappant. Elle a l'air sombre ; on
» entend des bruits singuliers ; les portes
» ne se ferment point d'une facon ordinai-
» re ; les visages sont atterrés ; les gens de
» service se parlent bas ; le prêtre passe
» avec sa figure morne ; les médecins con-
» sultent; les héritiers chuchottent dans
» un eoin ; il règne un va-et-vient conti-
» nuel. Chacun se prépare à l'événement,
» le commente, essaie de préjuger l'ave-
» nir. La France est en train d'assister à
» un spectacle de ce genre, à un spectacle
» qui l'intéresse vivement. Quelqu'un va
» mourir chez elle dont la clientèle, est
» très-affairée. Ce quelqu'un est la Répu-
» blique. »
N'est-ce pas que c'est très-gentillet et
qu'aussitôt cette lecture terminée, on se
dit : Ciel ! voilà qui a été écrit il y a quel-
ques heures déjà ; elle est morte !
Cependant l'idée pourrait bien venir à
quelque incrédule que notre confrère s'est
trom pé sur la scène qui se passait dans
cette maison qu'il a dépeinte, et de se la
figurer ainsi :
Sombre, en effet ; on y entend des bruits
singuliers ; les portes ne se ferment point
d'une façon ordinaire ; certaines sont
poussées sans bruit, tout doucement ; d'au-
tres sont remuées tout doucement aussi,
comme si l'on tentait de les fracturer. A
l'intérieur les visages sont graves, expri-
mant, en effet, une appréhension réelle ;
les habitants de la maison se parlent bas,
se consultent, chuchottent. A l'extérieur,
des gens, — au service de qui, de quoi?—
vont, viennent, tout doucement toujours,
faisant de petits voyages, s'approchant de
la maison, s'en éloignant pour aller cher-
cher au loin une sorte d'échelle, reve-
nant, toujours avec le moins de bruit pos-
sible. Chacun se prépare à l'événement, le
commente, essaie de préjuger l'avenir. La
France est en train d assister à un spec-
tacle de ce genre, à un spectacle qui l'in-
téresse vivement. Des gens vont tenter
d'enlever un dépôt que d'autres s'apprê-
tent à défendre parce qu'il leur a été con-
fié. Ce dépôt est la République. Des gens
avertis ont beau jeu à se défendre.
Ce n'est pas plus difficile que cela de
trouver des arguments politiques, quand
on va les chercher dans le domaine de
l'imagination. Mais nous ne voulons pas
faire porter contre nous l'accusation
a d'enfantillage de raisonnement », et nous
renonçons à notre fabliau républicain
pour discuter le fabliau monarchique, qui,
lui, est d'un sérieux à faire mourir de
rire.
Il paraît, toujours d'aprè3 le fabliau, que
les gens d'affaires de la moribonde, qui
sont les journalistes républicains, ont une
physionomie très-curieuse à observer : il
y en a qui gémissent, d'autres qui se
fâchent ; la plupart, affectant un air riant,
essaient de réconforter les -autres. Enfin,
symptôme grave de leur inquiétude, ils
ne font que parler de la bonne santé de
leur cliente.
Mais, parfait monarchiste que vous êtes,
les journaux républicains sont bien obli-
gés de parler, tous les jours, de la bonne
santé de la République, puisque tous les
jours, vous et les vôtres, vous annonces
qu'elle est morte !
Quant à ce qui est de la physionomie
qu'ont ces journaux, je voudrais bien voir
la mine que ferait le gentil conteur dont
nous parlons, s'il était abordé par un
quidam qui s'écrierait :
— Tiens, vous voilà ! On m'avait dit que
vous étiez mort.
— Vous voyez bien qu'il n'en est rien,
répondrait sans doute, en riant, le gentil
conteur. A vrai dire, je n'ai même pas
été malade.
Et le gentil conteur, continuant son che-
min, tomberait sur un second quidam, qui
s'arrêterait, stupéfait, pour dire :
- Comment! vous n'êtes pas mort?
- Mais, sapristi! je me porte comme le
pont Neuf !
Dix pas plus loin, troisième monar-
chiste :
- Ah bah! vous? Je croyais que le
petit Henri avait hérité de vous ; en m'a-
vait dit qu'il était si content, ce garçon!
— Ah çà, définitivement, ai-je l'air
d'un cadavre? Mais tâtez-moi donc ce cof-
fre-là !
Et si de la province arrivaient aux pa-
rents du gentil conteur des lettres de con-
doléance, des lettres pleines d'affliction
sur le trépas imaginaire, le faux mort fi-
nirait peut-être par se fâcher, après avoir
ri, et comme, au fond, ce ne doit pas être
un méchant garçon, il s'empresserait de
rassurer ses amis de province, en leur
donnant des nouvelles de sa santé, de sa
bonne santé.
Mais, à coup sûr, la mystification ne lui
semblerait pas d'un goût excellent.
Tout comme il ferait, font les journaux
républicains, qui tantôt sont désolés, tantôt
se fâchent, le plus souvent rient, mais
toujours rassurent leurs amis sur la valew
de la mystification monarchique. Car ce
nest qu'une mystification.
PAUL LAFARGUE.
- —
? M. THIERS EN SUISSE
A la suite d'une entrevue avec M. Thiers, le
rédacteur de la Patrie, de Genève, résume ainsi
ses impressions ;
Nous avons eu l'honneur, samedi der.
nier, d'être reçu par M. Thiers à Beau-
Rivage.
Quand cet homme d'Etat illustre parle,
on voudrait pouvoir sténographier toutes
ses paroles. Car M. Thiers est au plus
haut degré le vir bonus dicendi peritus de
Quintilien.
Nous n'essayerons pas de reproduire la
rapide conversation dans laquelle M.
Thiers a bien voulu nous accepter pour
partenaire.
Ce qu'il nous a dit, il l'avait déjà dit en
maintes circonstances.
Sa conviction ne peut varier parce qu'elle
est fondée sur le juste et le vrai et qu'elle
est marquée au coin d'une absolue siïrëô-
rité.
M. Thiers apprécie que la France est
facile à gouverner parce qu'elle est deve-
nue sage et que, pendant qu'il était aux
affaires, l'Assemblée de Versailles lui a
seule donné du mal. Si l'on considère que
M. Thiers représentait l'immense majorité-
de l'opinion publique, on en doit conclure
que le désaecord qui existait entre l'As-
semblée et le président de la République
continue à subsister entre le parlement et
le pays, — avec M. Thiers, c'est-à-dire
avec le modérateur, en moins. Mais, Dieu
merci ! le pays est sage et patient. On doit
attendre les meilleurs résultats d'une si-
tuation dominée par la sagesse et la pa-
tience.
Restaurer une dynastie, c'est bâtir sur
le sable mouvant. Si la lumière s'est faite
chez M. Thiers, dont les habitudes d'esprit
avaient été sans cesse au service de la mo-
narchie, il ne faut pas désespérer de voir
s'ouvrir le chemin de Damas à tous ceux
qui voudront associer le désintéressement
à l'absence de parti pris et à la sincérité.
L'impression dominante qui subsiste d'une
visite à M. Thiers, c'est une confiance se-
reine dans l'avenir, un avenir moins éloi-
gné que l'on ne croit généralemént.
LEFFUSION
« La République est morte ! crient les
monarchistes. Il est certain que tous ne
demandent qu'à l'étrangler; seulement
? c'est le cordon qui leur manque pour ee
faire. Chacun a bien sa petite ficelle par-
ticulière, mais voyez ce qui se passe lors-
qu'il s'agit de tresser la corde finale !
C'est à un des plus chauds défenseurs
du Cabinet actuel que nous empruntons
les derniers renseignements sur l'effusion
des partisans.
Les journaux conservateurs ne s'ont pas d'ac-
cord entre eux, et même dans chaque journal
conservateur il n'est pas difficile d'observer en
ce moment, d'un jour à l'autre, ou le même
jour, entre une colonne et l'autre, des contra-
dictions dont nos ennemis triomphent. Espé-
rons que leur joie sera de courte durée ! Les
conservateurs, croyons-nous, sauront dans peu
de temps a quoi s'en tenir, quelle attitude adop-
ter, quelle voie suivre, et ils y marcheront d'un
pas ferme qui confondra les révolutionnaires.
En attendant ( et il importe que cette attente
ne se prolonge pas, sous peine de devenir mor-
telle), nous sommes divisés comme si nous al-
lions périr. Non-seulement il y a division entre
les journaux monarchiques, mais entre les ré-
dacteurs du même journal monarchique.
- Tudieu ! l'ami, quelles eniambéess
vous faites !
— Pas vrai, m'sieu, que je marche fer-
me ?
- Je crois bien. Et où allez-vous?
- Ah ! dame, pour ça, je n'en sais rien.
C'est ce qu on peut appeler une politi-
que d agrément.
— » -
Le prince de Bismarck n'est pas encore
arrivé à Berlin, où le roi d'Italie assi..
toujours à nombre de fêtes.. Les nouve
politiques font d'ailleurs absolument dé-
faut. Nous croyons seulement devoir citer
l'extrait suivant d'une correspondance de
là Gazette de Magdebourg :
Le comte d'Arnim est reparti hier pour Pai.
ris; il se rend, dit-on, à son poste -par suite
d'un ordre spécial de l'empereur. Ntre iOU
nement a appris, en effet, que le maréchal Mao-
Mahon attribuait à l'alliance défensive de l'AL--
lemagne, de l'Autriche et de l'Italie un carac-
tère militaire, et pensait qu'une convention eu
règle allait donner une forme fixe et précise à
cette alliance. O. connaît les voies détournées
par lesquelles ces bruits alarmants sont parve-
nus jusqu'au dqc de Magenta. Les ultramotf-
tains de France et d'Allemagne prétendent coite-
naîtr exactement les cas dans lesquels l'am.
défensive des trois puissances deviendrait maté
alliance offensive. Il est donc on ne peut plug
naturel que le comte d'Arnim ait reçu l'ordre
de se rendre sans retard à son poste pour
PRIX DU NUMÉRO : PARIS 15 CENTIMES — DÉPARTEMENTS 20 CENTIMES.
Vendredi 26 Septembre 1873.
T hif j E QTt'fT li'
~t' t "* AiA oifiLLit
RÉDACTION
adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
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La manuscrits non insérés ne soroni pas rendus»
ABONNEMENTS
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Un an. 50
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Six mois. 25
Un an 59
DÉPARTKMWM
Trois mois. 16 Ir.
Six mois.h.U 82 *
Un an.61 "J
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
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Annonces, chez MM. LAGRANGE, CERF et C'
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On s'abonne à Londres, chez M. A. MAURICE général
ad vertising, agent, 13, Tavistockrow.Govent Garden.
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6, place de la Bonrse, a
On s'abonne à Londres, chez M. A. MAUBICB général
advertiaing. agent, 13, Tavistockrow, Covent Gardela,
MM. les Souscripteurs dont l'a-
bonnement expire le 30 septembre
sont priés de le renouveler immé-
diatement, s'ils ne veulent éprouver
de retard dans la réception du
journal. -----
Le8 abonnements pour l'AL..CE-
LOBBAlNE sont aeeepté8 an prix de
France.
On peut souscrire ehes ,. 1. M-
Itratrea.
JOURNÉE POLITIQUE
Paris, 25 septembre 4875
Tout le monde a lu hier la dépêche du
Times. Aujourd'hui les journaux, avec un
sérieux très-grand, sont occupés à en réta-
blir "des passages altérés par le télégraphe.
L'Agence Havas, en transmettant la tra-
duction du télégramme da Paris que le
Times avait publié, s'est mise en contra-
diction, sur certains points, avec le texte
du journal anglais. Pour l'affaire du dra-
peau, par exemple, comme les délégués
objectaient que l'Assemblée nationale ne
iénoncerait pas au drapeau tricolore, l'A-
gence Havas a mis dans la bouche du
comte de Chambord cette réponse : « Je le
sais, » tandis que le Times lui fait ré-
pondre : 1. Je l'ignore. » Ce qu'il y a de
plus curieux, c'est que l'Agence Havas
assure aujourd'hui qu'elle est allée « à la
source de l'expédition, » que c'est sa faus-
se traduction du texte anglais qui se
trouve être la version véritable, et que le
Times publiera demain un erratum pour
déclarer que l'Agence Havas a bien fait de
traduire par : Je le sais, les cinq mots : 1
do not know that.
Voilà donc où sont descendues présen-
tement les discussions politiques, et voilà
sur quoi l'on nous convie à raisonner
avec ardeur. Il paraît que les orléanistes
attachent à la version : Je le sais, beau-
coup d'importance. Au premier abord, ce :
Je le sais, semble un contre-sens; mais on
l'explique. Les monarchistes disent au
comte de Chambord : « Mais l'Assemblée
ne voudra jamais renoncer au drapeau
tricolore ! » El le prétendant répond : Je
le sais 1 c'est-à-dire : « Oui, parbleu! je le
sais bien, j'y vais songer encore, et je ferai
peut-être des concessions, puisque l'As-
semblée demeure inflexible. » S'il répond,
au contraire : Je n'en sais rien, c'est comme
s'il disait : « Je n'ai pas à m'en occuper;
c'est à elle de céder, je ne céderai rien. »
Enfin a-t-il dit : Je le sais, ou : Je ne le sais
pas? Nous verrons demain si le Times fait
la rectification annoncée par l'agence Ha-
vas. Dans tous les cas, ce qui subsiste,
c'est que la question du drapeau n'a pas
été réglée cette fois encore à Frohsdorfl et
que les délégués n'ont jusqu'iei rien ob-
tenu.
C'est à quoi le Français fait allusion dans
un article assez mélancolique, où il recom-
mande aux conservateurs le sang-froid, 'la
prudence, etc. « Jamais, dit-il, le sang-
froid, la prudence, la patience souvent si-
lencieuse n'oat été plus nécessaires. Des
points graves ont été éclaircis. D'autres ne
le sont pas encore et doivent l'être; car
depuis le 24 mai le règne des obscurités et
des équivoques est fini. C'est à ceux iqui
ont compétence et mission pour cette
œuvre de la continuer. » Ceci ne marque,
si nous ne nous trompons, qu'une con-
fiance assez tempérée dans le succès de la
grande entreprise. Une autre feuille, l'As-
wmblée nationale, veut bien cependant expli-
quer sur un ton d'oracle comment laroyautê
sera rétablie dans la première quinzaine
de novembre; elle n'indique, il est vrai, ni
le jour ni l'heure : « Il est aujourd'hui
convenu, écrit-elle, que la proclamation
pure et simple de la monarchie aura lieu
avaiàt tout, et que la constitution nouvelle
sera faite d'un commun accord entre le
roi et l'Assemblée. » Ce n'est pas, comme
on voit, plus difficile que cela. Mais le
centre droit ? Mais le drapeau, puisque
c'est toujours au drapeau qu'il faut en re-
venir? Dans les journaux légitimistes
purs, nous ne trouvons aucun indice d'une
future conciliation sur la grosse difficulté
du drapeau. La Gazette de France ne dit
rien ; elle. n'avait pas donné la dépê-
che du Times, elle se borne à la repro-
duire mais avec la version : Je n'en
sais rien, dont ne veulent point enten-
dre parler les orléanistes. L'Union, tou-
jours réservée, donne ainsi son avis :
« La plupart des journaux de Paris publient
une dépêche du Times, qui a produit une
certaine sensation dans les groupes poli-
tiques. Fidèles à la réserve que nous vou-
lons garder, nous nous sommes abstenus
de faire connaître cette dépêche. Ou ne
saurait trop se tenir en garde contre les
mille récits qui circulent. » M sis V Univers
est assez curieux à lire. Il publie la dépê-
che du Times, et, naturellement, avec la
version : Je n'en sais rien; puis il écrit :
Si l'on pèse bien tous les tertiaes de cette note,
on verra qu'elle ne donne, eu somme, sur au-
cun point rien de précis. D'aprèi nos propres
informations, ce défaut de précision reflète le
caractère des conversations que résume le
Times. Les députés n'avaient pas Efiandat de po-
ser des questions qui eussent été une sorte
d'ultimatum, mandat qu'ils n'auraient pas voulu
accepter d'ailleur, et que le roi, de son côté,
n'fut pas admis. Il y a eu échange d'idées; rien
p'a été précisé, et les, détails que l'on donne,
d'après des témoignages indirects, ne peuvent
être acceptés comme un procès-verbal.
Tout de suite après vient un article qui
a pour titre : le Dr termine par
cette phrase : « En résumé, quieonque veut
ou accepte Henri V voudra ou acceptera
son drapeau, et ceux qui tentent aujour-
d'hui de les séparer sont des farceurs qui
ne veulent ni du drapeau ni du roi. » Far-
ceurs ! oui, des farceurs, M. de Sugny et M.
Merveilleux-Duvignaux, puisqu'ils n'ont
été à Froshdorff que pour séparer le comte
de Chambord de son drapeau ! La cordiale
entente ! Et l'opinion du Journal de Paris ?
demanderez-vous. On ne la sait point, il se
garde bien de la faire voir. Il y a seulement
fort à parier que ce n'est pas celle de l'Uni-
vers. Au fond,l'on doit trouver que tout ce qui
se passe est assez ridicule. C'est un digne
prélude aux < grands débats » qu'on nous
promet pour la rentrée, de l'Assemblée. Le
public, tout en se lassant de l'imbroglio,
reconnaîtra du moins qu'il a quelques cô-
tés comiques.
EUG. LIÉBERT.
-————————— + :
L'agence Havas communique aux jour-
naux la note suivante :
En présence de la différence qui existe entre
la dépêche du Times que nous avons communi-
quée hier aux journaux et le texte publié par
ce journal, nous sommes allés à la source môme
de l'expédition, et nous avons été autorisés à
déclarer que ]etc!!¡X expédié d'ici porte bien :
Je le sais, et no'n'pàs : Je ne sais, et que le pa-
ragraphe relatif au drapeau est bien conforme à
celui que nous avons distribué hier aux jour-
naux.
Une rectification dans ce sens doit paraître
dans le Times de demain matin.
De même, notre télégramme avait bien rendu
le sens du passage relatif à l'acceptation d'une
Constitution : le télégramme publié par le Timçs
dit bien une Constitution quelconque; mais dans
la pensée de ceux qui ont communiqué cet en-
trètien au correspondant du Times, cette expres-
sion signifie simplement une Constitution qui
serait faite en dehors de l'action du comte de
Chambord. C'est pourquoi nous avons traduit,
au lieu de Constitution quelconque, Constitution
toute faite.
———————————— ————————————
Hier, c'était une dépêche du Ttmes,
aujourd'hui c'est une note de l'Assemblée
nationale. Dépêche et note ont un point
commun : le décousu des informations
qu'elles contiennent. Suivant le journal
anglais, M. le comte d6 Chambord au-
rait fait aux ambassadeurs qui sont al-
lés le trouver à Froshdorff des réponses
qui laissent toute solution en suspens';
d'après le journal français, tout serait
réglé définitivement. Il est vrai qup
l'Assemblée nationale ne dit mot du comte
de Chambord, et donne à penser que
les monarchistes, n'ayant pu s'entendre
avec lui, ont résolu de passer outre.
Voici la note en question :
Les chefs du parti conservateur dans là
Chambre sent parvenus à résoudre les princi-
pales difficultés et ont l'espoir le plus fondé
d'arriver, lorsque le moment sera venu, à une
entente définitive.
Ainsi, dès aujourd'hui, les membres qui
avaient
Ainsi, l'intention de demander au roi d'accup-
ter, ayant son retour en France, une constitu-
tion préalablement faite, ont renoncé à cette
prétention, et il est aujourd'hui convenu que la
proclamation pure et simple de la monarchie
aura lieu avant tout, et que la constitution nou-
velle et les lois qui devront en découler seront
faites d'un commun accord entra le roi et l'As-
semblée.
On ne doute pas que la majorité vote cette
solution.
Dans la seconds quinzaine d'octobre, les
membres des trois droites se réuniront pour
entendre les propositions qui leur seront faites
et pour désigner une députation de cinq mem-
bres chargée de se rendre à Frohsdorff.
D'après ce que l'on sait, la mission confiée à
cette députation a des chances certaines de
succès.
Les intérêts du pays exigeant une prompte
décision, la.proposition tendant au rétablisse-
ment de la monarchie sera soumise à l'Assem-
blée dans la première quinzaine du mois de no*
vembre prochain.
Jùsquesà quand serons-nous condam-
nés à entendre des inepties de cette for-
ce ? Les conservateurs sont d'accord,
mais ils ne le sont pas ; tel est le pre-
mier point. En effet ils ont résolu les
difficultés principales ; mais ils ont l'es-
poir d'arriver à résoudre les autres.
Second point : on a décidé de voter
avant tout la monarchie; mais on éprouve
le besoin de convoquer prochainement
les députés des trois droites pour leur
soumettre cette décision.
Troisième point : une députation sera
envoyée au comte de Chambord, et l'on
sait d'avance, bien qu'elle ne soit pas
encore nommée, bien qu'on ignore si les
gens qui la doivent choisir parviendront
à s'entendre, qu'elle a des chances cer-
taines de succès.
Il faut vraiment compter beaucoup sur
l'imbécillité publique pour oser lui ser-
vir de pareilles bourdes ; il faut surtout
être bien assuré qu'à défaut du droit on
a la force, pour avouer qu'on fera la,
monarchie coûte que coûte, sans savoir
si l'on aura un roi, puisque, la monar-
chie votée, il s'agira de s'entendre avec
l'élu sur une constitution; sans savoir
même si les gens qui auront voté le ren-
versement de la République réussiront
à se mettre d'accord sur les institutions
monarchiques à établir.
Mais bah ! si le comte de Chambord,
une fois le coup fait, ne se montre pas
plus accommodant, on aura toujours la
ressource d'offrir la couronne au comte
de Paris. C'est peut-être même ce qu'on
espère dans le parti orléaniste, qui de-
viendrait, vraisemblablement, le maître
de la situation le jour où un vote pur et
simple de l'Assemblée rétablirait la mo-
narchie sans eonditions d'aucune sorte.
D'eux seuls, en effet, dépendrait alors de
préparer une constitution acceptable ou
non pour le comte de Chambord; suivant
qu'ils se montreraient plus ou moins ré-
volutionnaires , c'est-à-dire plus ou
moins fidèles aux traditions de 1830, le
petit-fils de Charles X pourrait ou non
consentir à monter sur le trône.
Or, la famille d'Orléans n'est point
prêteuse, c'est là son moindre défaut, et
elle ne manquera certainement point de
se rappeler qu'un bon tiens vaut mieux
que deux tu l'auras. Le comte de Cham-
bord n'est pas vieux, et ce serait bien
long d'attendre son héritage !
Ou la note de l'Assemblée nationale
n'est que la conception d'un reporter en
gaîté, ou il faut y voir ce que nous ve-
nons de dire: un guet-apens orléaniste.
E. SCHNERB.
—; * —
On lit dans le Bien public :
On dit que le maréchal de Mac-Mahon,
pressenti au sujet de la prorogation des
pouvoirs, aurait décliné toute proposition
de ce genre. Le maréchal croit à la néces-
sité d'une solution, et il estime, dit-on,
qu'il ne serait pas digne de lui de se prê-
ter à une combinaison destinée à prolon-
ger un provisoire dont le (pays est las. Si
cela est exact, la situation est très-sim-
Elifiée, mais cette simplification nous sem-
le faite pour inspirer aux libéraux dé la
droite de salutaires réflexions. S'ils sejettent
les yeux fermés dans l'aventure de la restau-
ration, il n'y aura pas de portes de déga-
gement. Une fois lancés, si le vote est fa-
vorable, il faudra aller jusqu'au bout : c'est
un trébuchet ; qu'ils regardent bien avant
de toucher à l'appât.
— —♦ ———————————
Paray-le-Monial
(Notes de voyage)
J'ai voulu voir, j'ai vu, comme dit la
reine Athalie.
J'ai vu une jolie petite ville, encore
étonnée et comme ahurie de la fortune
et de la gloire qui sont tombées sur elle
un beau matin. A peine si les 3,500 ha-
bitants de cet honnête bourg ont eu le
temps de se reconnaître. Chaque train
leur amène encore une douzaine de pè-
lerins attardés, presque tous irlandais ou
bavarois, qui veulent voir le mur der-
rière lequel Jésus a révélé son cœur à
Marie Alacoque, et les platanes sous
lesquels cent députés légitimistes ont
défilé en procession.
Le premier habitant que je vois au
sortir de la gare est un vieil idiot, assis
dans une brouette ; il aboie comme un
chien en secouant sa tête comme un ours
blanc. Si Marie Alacoque le savait ! Il y a
là un joli miracle à faire. Les autres in-
digènes avec qui j'ai causé ne m'ont paru
ni fous ni bêtes ; il s'en faut ! Fort obli-
geants, toujours prêts à mettre le voya-
geur sur sa route : la première rue à
droite après le deuxième pont, mon bon
monsieur ! Mais fermés à triples verrous
sur les affaires de l'Eglise et de l'Etat.
« C'est bien au couvent de la Visita-
tion que se sont accomplis les miracles ?
— Il se pourrait.
— Vous devez le savoir ?
— On dit tant de choses !
— Mais les reliques de Marie Alaco-
que guérissent encore aujourd'hui toute
sorte de maladies incurables ?
— Je ne prétends pas le contraire.
— Vous avez vu de ceux que la bien-
heureuse a remis sur pied?
— Cela ne s'est pas rencontré.
— Connaissez-vous quelqu'un qui en
ait vu ?
— Je voudrais bien.
— Du moins vous avez entendu ra-
conter des miracles récents ?
— J'ai l'oreille un peu dure. »
Un sourire à la fois discret et malin,
souligne chaque réponse. Cette petite
bourgeoisie bien française, c'est-à-diré
profondément sceptique, ne veut pas êtré
ridicule ; mais la politesse et l'intérêt lui
conseillent de ne pas scandaliser les naïfs.
Chez un marchand de parapluies, j'a-
vise entre deux brochures édifiantes de
M. Eugène de Mirecourt un médaillon
de M. de Chambord. « Combien ce plâtre,
madame'?
— « C'est tant, monsieur.
— Vous savez ce qu'il représente ?
— Mon Dieu, pas plus que vous.
— C'est le roi, n'est-ce pas ?
— Nous avons des personnes qui l'ap-
pellent ainsi.
- Mais le roi de quel pays ?
- Dame ! On me l'a vendu comme le
roi de France, mais je ne le garantis pas
autrement.
— Mais la France est en Républi-
que 1
— Ça, c'est certain.
— On croit donc par ici que la Répu-
blique ne durera pas ?
— Comment le saurait-on dans une
ville de trois mille âmes, quand Paris
lui-même n'en sait rien ? »
Le couvent de la Visitation, où Marie
Alacoque eut la faveur de vivre et de
mourir hallucinée, est un grand édifice
du dix-septième siècle, annexé à une jolie
église du moyen-âge. Soixante nonnes y
vivaient strictement cloîtrées lorsque nos
députés eurent la fantaisie d'organiser le
grand pèlerinage de juin.
Des milliers de dévots furent admis
à parcourir en procession les cloîtres,
le bosquet de la première apparition, la
cellule de Marie Alacoque et l'infirmerie
où elle est morte. Les pèlerins anglais,
le 4 septembre, ont joui du même spec-
tacle; mais aujourd'hui les portes du
monastère sont refermées et personne
n'y entre plus. La population de Paray
iStait tôute portée pour jouir d'un spec-
tacle si rare ; elle ne semble pas en
avoir profité. Soit qu'elle eût assez à
faire chez elle, pour loger et nourrir
cette invasion de dévots, soit qu'elle fût
profondément indifférente aux mystères
du Sacré-Cœur, elle laissa le champ libre
aux visiteurs étrangers. L'invention de
Marie Alacoque a fait son chemin dans
le monde, sans effleurer le bon sens des
petits bourgeois et du peuple. Nul n'est
prophète en son pays. Elle n'a converti
sur place qu'un petit cénacle de hobe-
reaux légitimistes, vingt ou vingt-cinq
familles au plus. C'est le chef d'une de
ces maisons qui a concerté la grande
manifestation du pèlerinage avec les
députés de la droite cléricale ; le peuple
de la ville n'y est pour rien.
Ce n'est pas que les aubergistes et les
simples boutiquiers aient négligé une si
bonne aubaine ; ils ont gagné beaucoup
d'argent. Durant près de trois mois,
tous ceux qui disposaient d'une chambre
meublée ont gagné couramment dix
francs par jour; les lits se sont loués
cinq francs en moyenne. Les vivres ont
valu des prix exorbitants. Un homme
qui avait loué un terrain pour eent
francs et tendu une toile sur quatre pi-
quets a réalisé, de son aveu, 31,000 fr.
de bénéfice en vendant des petits pains
garnis de saucisse ou de jambon. La com-
pagnie de Paris-Lyon-Méditerranée a fait
un million de recettes, quoique le prix
des places fût réduit de 50 pour cent.
« Mais, disais-je à notre aubergiste,
tout le monde n'a pas profité de cette
occasion. Il y a bien des gens qui, par
goût, par nécessité, ou simplement par
fierté, n'ont pas cédé leur lit aux pèlerins
pour s'en aller dormir à l'écurie. Ceux-là
n'ont eu que l'ennui, le tapage, le trou-
ble de leurs habitudes, et la cherté.
— Oui, sans doute, mais ils n'ont pas
voulu se venger sur le pauvre monde,
et ceux que le pèlerinage agaçait le plus
se sont enfermés dignement chez eux.
Nos hôtes n'ont pas entendu une plai-
santerie, ils n'ont pas vu ricaner un seul
visage sur leur chemin. Il n'y a pas
beaucoup de dévots par ici, mais on est
de bonne compagnie.
- C'est fort heureux pour vous, car
les pèlerins reviendront, ils en enver-
ront d'autres, et s'il s'établissait un cou-
rant.
- Dieu nous en préserve ! Nous avons
fait d'excellentes affaires, mais c'est trop
de tracas, nous sommes sur les dents,
on n'en peut plus. Nous ne sommes ni
installés, ai outillés, ni trempés pour
cette besogne; il faudrait être de fer. »
Les bannières des pèlerins sont dépo-
sées dans la chapelle de Marie Alacoque,
autour du singulier autel qui s'élève sur
les reliques de la Bienheureuse. Elles
sont riches, très-riches, mais d'un goût
exécrable pour la plupart. La Belgique
en a fourni beaucoup, l'Espagne une,
et l'Angleterre deux ou trois : major è;
longinquo reverentia. Les reliques de Ma-!
rie Alacoque sont enfermées dans une:
poupée de cire grande comme natures
Cette poupée reçoit des lettres, j'en ai
vu cinq ou six à son adresse, et je ne'
doute point qu'elle n'ait su les lire sans
briser le cachet.
Elle reçoit aussi de l'argent, et elle
en fait un excellent usage. Elle achète
des maisons et elle y loge des jésuites,
en mémoire du R. P. de la Colombière,
qui fut son confesseur ici-bas. Depuis
le mois de juin, la Société de Jésus s'in-
stalle et s'arrondit à vue d'œil dans le
quartier de l'hôpital; avant deux ans,
s'il plaît à Dieu, elle aura les trois quarts
de la ville. Amen !
ABOUÏ.
— ♦ ——— —; —
Nous avons indiqué, hier, la Réforme
de Toulouse, comme étant le journal de
M. Duportal. Avant que notre confrère
M. E. Bresson, qui, sous le patronage des
membres les plus estimés de la gauche
républicaine, dirige si vaillamment la
Réforme, ait le temps de réclamer son
bien, nous nous empressons de réparer
notre erreur. La réparation demandée
n'aurait pu être, d'ailleurs, que courtoise,
et nous sommes heureux de l'occasion qui
nous est offerte de lutter de courtoisie avec
notre estimable confrère.
P. L.
: : —
On lit dans le Courrier de Paris
On commence à s'apercevoir, dans les cercles
républicains, que les fasionnistes sont beaucoup
plus à redouter qu'on n'avait lieu de le croire.
On parait reconnaître que leurs efforts sont
d'autant plus sérieux que les atermoiements
sont devenus à peu près impossibles, et que si
l'Assemblée ne rétablit pas promptement la
monarchie, c'en est fait de l'espérance de la
Maison de France.
On reconnaît, dès maintenant, que les efforts
des monarchistes n'ont qu'un seul et même
but : rallier à leurs projets les 50 ou 60 mem-
bres indécis des centres, dont la foi monarchi-
ques a été un peu ébranlée, mais qui, aujour-
d'hui, ne feront pas de grandes difficultés pour
revenir à la royauté, leur foi républicaine n'é-
tant pas des plus robustes.
On pense donc, dès maintenant, qu'en réu-
nissant les voix des républicains sur lesquelles
toute tentative de séduction serait oiseuse aux
15 ou 20 membres du parti de l'appel au peu-
ple, décidés à repousser Henri V, on trouvera
un total de » 340 députéi environ, sur 720, qui
s'opposeront au rétablissement de la monarchie.
C'est le Courrier de Paris, lui-même,
qui souligne les deux mots imprimis en
italiques. On ne saurait dire plus galam-
ment aux membres du centre gauche que
l'on espère bien ne point les trouver tous
inaccessibles aux séductions d'une pairie,
d'une ambassade, d'une préfecture ou d'un
bureau de tabac. Heureusement le Courrier
de Paris se vante; on le lui fera bien voir,
nous en avons la ferme assurance.
: +
LA MAISON MORTUAIRE
M. le comte de Chambord avait si bien
habitué les zélés négociateurs, qui jus-
qu'ici s'étaient adonnés à la tâche ingrate
de le raccommoder avec son peuple, à un
« non » plein d'une rogue majesté, que,
maintenant, rien que par une réponse éva-
sive ou simplement par un silence, il sa-
tisfait les plus difficiles et fait pousser des
cris de joie aux plus enthousiastes.
Une démangeaison à l'oreille repré-
sente une acceptation; un éternuement
équivaut à une constitution. Très-heureu-
sement il ne s'est pas encore mouché en
présence des ambassadeurs. on nous as-
surerait que le discours du trône est déjà
prononcé.
- C'est ce qui nous vaut, à chaque train
de corvée, retour de Frohsdorff, des bouf-
fées d'allégresse monarchique qui se tra-
duisent par un chant dont le rhythme varie
suivant le tempérament du musicien,
mais dont le refrain est toujours le même :
Hurah! la République est enterrée! ou
plutôt enfouie, car il ne faut jamais déna-
turer les paroles de ses adversaires.
N'ayant rien à dire et ne pouvant se
taire, les royalistes poussent des cris ; cela
est dans l'ordre naturel. Mais les cris
n'étourdissent que celui qui les pousse, et
il s'agit, ici, d'étourdir les autres ; il est
donc nécessaire de trouver autre chose.
Pas le plus petit fait à se mettre sous la
plume ! Et l'on a recours aux fictions. Le
fabliau remplace l'argument.
En voici un très-propret, très-gentil, dû
à la plume légère d'un écrivain monar-
chiste, qui a livré son article avec la con-
viction qu'il allait démontrer « à quel en-
fantillage de raisonnement en est réduit
le parti républicain. »
« Quelques heures avant le décès du
» maître, une maison mortuaire offre un
» aspect frappant. Elle a l'air sombre ; on
» entend des bruits singuliers ; les portes
» ne se ferment point d'une facon ordinai-
» re ; les visages sont atterrés ; les gens de
» service se parlent bas ; le prêtre passe
» avec sa figure morne ; les médecins con-
» sultent; les héritiers chuchottent dans
» un eoin ; il règne un va-et-vient conti-
» nuel. Chacun se prépare à l'événement,
» le commente, essaie de préjuger l'ave-
» nir. La France est en train d'assister à
» un spectacle de ce genre, à un spectacle
» qui l'intéresse vivement. Quelqu'un va
» mourir chez elle dont la clientèle, est
» très-affairée. Ce quelqu'un est la Répu-
» blique. »
N'est-ce pas que c'est très-gentillet et
qu'aussitôt cette lecture terminée, on se
dit : Ciel ! voilà qui a été écrit il y a quel-
ques heures déjà ; elle est morte !
Cependant l'idée pourrait bien venir à
quelque incrédule que notre confrère s'est
trom pé sur la scène qui se passait dans
cette maison qu'il a dépeinte, et de se la
figurer ainsi :
Sombre, en effet ; on y entend des bruits
singuliers ; les portes ne se ferment point
d'une façon ordinaire ; certaines sont
poussées sans bruit, tout doucement ; d'au-
tres sont remuées tout doucement aussi,
comme si l'on tentait de les fracturer. A
l'intérieur les visages sont graves, expri-
mant, en effet, une appréhension réelle ;
les habitants de la maison se parlent bas,
se consultent, chuchottent. A l'extérieur,
des gens, — au service de qui, de quoi?—
vont, viennent, tout doucement toujours,
faisant de petits voyages, s'approchant de
la maison, s'en éloignant pour aller cher-
cher au loin une sorte d'échelle, reve-
nant, toujours avec le moins de bruit pos-
sible. Chacun se prépare à l'événement, le
commente, essaie de préjuger l'avenir. La
France est en train d assister à un spec-
tacle de ce genre, à un spectacle qui l'in-
téresse vivement. Des gens vont tenter
d'enlever un dépôt que d'autres s'apprê-
tent à défendre parce qu'il leur a été con-
fié. Ce dépôt est la République. Des gens
avertis ont beau jeu à se défendre.
Ce n'est pas plus difficile que cela de
trouver des arguments politiques, quand
on va les chercher dans le domaine de
l'imagination. Mais nous ne voulons pas
faire porter contre nous l'accusation
a d'enfantillage de raisonnement », et nous
renonçons à notre fabliau républicain
pour discuter le fabliau monarchique, qui,
lui, est d'un sérieux à faire mourir de
rire.
Il paraît, toujours d'aprè3 le fabliau, que
les gens d'affaires de la moribonde, qui
sont les journalistes républicains, ont une
physionomie très-curieuse à observer : il
y en a qui gémissent, d'autres qui se
fâchent ; la plupart, affectant un air riant,
essaient de réconforter les -autres. Enfin,
symptôme grave de leur inquiétude, ils
ne font que parler de la bonne santé de
leur cliente.
Mais, parfait monarchiste que vous êtes,
les journaux républicains sont bien obli-
gés de parler, tous les jours, de la bonne
santé de la République, puisque tous les
jours, vous et les vôtres, vous annonces
qu'elle est morte !
Quant à ce qui est de la physionomie
qu'ont ces journaux, je voudrais bien voir
la mine que ferait le gentil conteur dont
nous parlons, s'il était abordé par un
quidam qui s'écrierait :
— Tiens, vous voilà ! On m'avait dit que
vous étiez mort.
— Vous voyez bien qu'il n'en est rien,
répondrait sans doute, en riant, le gentil
conteur. A vrai dire, je n'ai même pas
été malade.
Et le gentil conteur, continuant son che-
min, tomberait sur un second quidam, qui
s'arrêterait, stupéfait, pour dire :
- Comment! vous n'êtes pas mort?
- Mais, sapristi! je me porte comme le
pont Neuf !
Dix pas plus loin, troisième monar-
chiste :
- Ah bah! vous? Je croyais que le
petit Henri avait hérité de vous ; en m'a-
vait dit qu'il était si content, ce garçon!
— Ah çà, définitivement, ai-je l'air
d'un cadavre? Mais tâtez-moi donc ce cof-
fre-là !
Et si de la province arrivaient aux pa-
rents du gentil conteur des lettres de con-
doléance, des lettres pleines d'affliction
sur le trépas imaginaire, le faux mort fi-
nirait peut-être par se fâcher, après avoir
ri, et comme, au fond, ce ne doit pas être
un méchant garçon, il s'empresserait de
rassurer ses amis de province, en leur
donnant des nouvelles de sa santé, de sa
bonne santé.
Mais, à coup sûr, la mystification ne lui
semblerait pas d'un goût excellent.
Tout comme il ferait, font les journaux
républicains, qui tantôt sont désolés, tantôt
se fâchent, le plus souvent rient, mais
toujours rassurent leurs amis sur la valew
de la mystification monarchique. Car ce
nest qu'une mystification.
PAUL LAFARGUE.
- —
? M. THIERS EN SUISSE
A la suite d'une entrevue avec M. Thiers, le
rédacteur de la Patrie, de Genève, résume ainsi
ses impressions ;
Nous avons eu l'honneur, samedi der.
nier, d'être reçu par M. Thiers à Beau-
Rivage.
Quand cet homme d'Etat illustre parle,
on voudrait pouvoir sténographier toutes
ses paroles. Car M. Thiers est au plus
haut degré le vir bonus dicendi peritus de
Quintilien.
Nous n'essayerons pas de reproduire la
rapide conversation dans laquelle M.
Thiers a bien voulu nous accepter pour
partenaire.
Ce qu'il nous a dit, il l'avait déjà dit en
maintes circonstances.
Sa conviction ne peut varier parce qu'elle
est fondée sur le juste et le vrai et qu'elle
est marquée au coin d'une absolue siïrëô-
rité.
M. Thiers apprécie que la France est
facile à gouverner parce qu'elle est deve-
nue sage et que, pendant qu'il était aux
affaires, l'Assemblée de Versailles lui a
seule donné du mal. Si l'on considère que
M. Thiers représentait l'immense majorité-
de l'opinion publique, on en doit conclure
que le désaecord qui existait entre l'As-
semblée et le président de la République
continue à subsister entre le parlement et
le pays, — avec M. Thiers, c'est-à-dire
avec le modérateur, en moins. Mais, Dieu
merci ! le pays est sage et patient. On doit
attendre les meilleurs résultats d'une si-
tuation dominée par la sagesse et la pa-
tience.
Restaurer une dynastie, c'est bâtir sur
le sable mouvant. Si la lumière s'est faite
chez M. Thiers, dont les habitudes d'esprit
avaient été sans cesse au service de la mo-
narchie, il ne faut pas désespérer de voir
s'ouvrir le chemin de Damas à tous ceux
qui voudront associer le désintéressement
à l'absence de parti pris et à la sincérité.
L'impression dominante qui subsiste d'une
visite à M. Thiers, c'est une confiance se-
reine dans l'avenir, un avenir moins éloi-
gné que l'on ne croit généralemént.
LEFFUSION
« La République est morte ! crient les
monarchistes. Il est certain que tous ne
demandent qu'à l'étrangler; seulement
? c'est le cordon qui leur manque pour ee
faire. Chacun a bien sa petite ficelle par-
ticulière, mais voyez ce qui se passe lors-
qu'il s'agit de tresser la corde finale !
C'est à un des plus chauds défenseurs
du Cabinet actuel que nous empruntons
les derniers renseignements sur l'effusion
des partisans.
Les journaux conservateurs ne s'ont pas d'ac-
cord entre eux, et même dans chaque journal
conservateur il n'est pas difficile d'observer en
ce moment, d'un jour à l'autre, ou le même
jour, entre une colonne et l'autre, des contra-
dictions dont nos ennemis triomphent. Espé-
rons que leur joie sera de courte durée ! Les
conservateurs, croyons-nous, sauront dans peu
de temps a quoi s'en tenir, quelle attitude adop-
ter, quelle voie suivre, et ils y marcheront d'un
pas ferme qui confondra les révolutionnaires.
En attendant ( et il importe que cette attente
ne se prolonge pas, sous peine de devenir mor-
telle), nous sommes divisés comme si nous al-
lions périr. Non-seulement il y a division entre
les journaux monarchiques, mais entre les ré-
dacteurs du même journal monarchique.
- Tudieu ! l'ami, quelles eniambéess
vous faites !
— Pas vrai, m'sieu, que je marche fer-
me ?
- Je crois bien. Et où allez-vous?
- Ah ! dame, pour ça, je n'en sais rien.
C'est ce qu on peut appeler une politi-
que d agrément.
— » -
Le prince de Bismarck n'est pas encore
arrivé à Berlin, où le roi d'Italie assi..
toujours à nombre de fêtes.. Les nouve
politiques font d'ailleurs absolument dé-
faut. Nous croyons seulement devoir citer
l'extrait suivant d'une correspondance de
là Gazette de Magdebourg :
Le comte d'Arnim est reparti hier pour Pai.
ris; il se rend, dit-on, à son poste -par suite
d'un ordre spécial de l'empereur. Ntre iOU
nement a appris, en effet, que le maréchal Mao-
Mahon attribuait à l'alliance défensive de l'AL--
lemagne, de l'Autriche et de l'Italie un carac-
tère militaire, et pensait qu'une convention eu
règle allait donner une forme fixe et précise à
cette alliance. O. connaît les voies détournées
par lesquelles ces bruits alarmants sont parve-
nus jusqu'au dqc de Magenta. Les ultramotf-
tains de France et d'Allemagne prétendent coite-
naîtr exactement les cas dans lesquels l'am.
défensive des trois puissances deviendrait maté
alliance offensive. Il est donc on ne peut plug
naturel que le comte d'Arnim ait reçu l'ordre
de se rendre sans retard à son poste pour
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