Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1876-02-17
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 17 février 1876 17 février 1876
Description : 1876/02/17 (A6,N1532). 1876/02/17 (A6,N1532).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/03/2013
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Jeudi 17 Pérrler 18T9
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JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
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Rédacteur en chef'Gérant : £ ABOUÏ)
AnnODcetI, chez MM. LAGRANGE, CERF et G1*
6, place de la Bonne, 8
Imp. A. CHAix M C", rue Bergère, MO, à Paril
XV1
BULLETIN"
Paris y 16 février fiRT6
Aprèg la fièvre des réunions publiques,
a commencé ce qu'on a si plaisamment ap-
pelé sous l'empire la « période de recueil-
lement. » On peut dire qu'elle eat déjà ou-
verte depuis quelques jeurs à Paris. Un
travail de classement et d'élimination s'est
opéré de lui-même. Un assez grand nom-
bre de candidatures dont les chances n'ap-
paraissaient point comme suffisamment sé-
rieuses se sont effacées. D'autres se sont af-
firmées et confirmées, et l'idée générale
qu'on peut se faire, d'après ces données,
des dispositions du corps électoral parisien,
est assez satisfaisante.On reconnaît, à n'en
pas douter, que la population de Paris est
beaucoup plus éloignée que ses ennemis ne
voudraient le faire croire des idées exagé-
rées et des programmes utopiques. Elle
marchera d'un pas ferme dans la voie que
les chefs autorisés de la démocratie ent
tracée avec tant d'intelligence àu cours dé
la dernière législature, celle du progrès pa-
cifique, régulier, légal et logique. Il con-
vient que la province le sache, s'en per-
suade, et ne se laisse pu égarer par les
fantômes que la réaction crée à plaisir
pour l'intimider et profiter de ses terreurs.
Dans les départements, le travail nous
semble moins avancé et la situation moins
nette. Mais un fait nous frappe qui est
pour inspirer confiance. On sait que les
candidats s'efforcent toujours d'accommo-
der du mieux qu'ils peuvent leurs profes-
sions de foi aux dispositions Apposées du
corps électoral. Or, l'immense majorité des
candidats se réclame de la constitution de
1875 et fait profession de la maintenir si
elle est attaquée, de ne la réviser que pour
en développer les principes, si la révision
en est jugée opportune. Il y a là un péril
et un symptôme, wpéril serait de se trom-
per sur les vrais sentiments d'un candidat
en le jugeant sur une circulaire de circon-
stance. Les populations des provinces qui
connaissent tout de leurs candidats, passé
et présent, dehors spécieux et dispositions
secrètes, éviteront aisément ce danger.
Quant au symptôme, il est excellent ; il
montre d'une manière éclatante que, de
l'aveu même des hommes du passé, la
France est presque unanime à accepter
l'ordre de choses nouveau et à en souhai-
ter la prolongation.
L'Espagne a fait parvenir aux puissan-
ces européennes un mémorandum relatif
à la question cubaine. Nos lecteur-s trou-
veront plus loin un résumé de ce document,
que nos informations particulières sur Cu-
ba, si détaillées et si précises, leur permet-
tront de contrôler. Nous appelons égale-
ment leur attention sur les nouvelles d'Es-
pagne, qui présentent comme de plus en
plus favorable au parti du gouvernement
l'état des affaires militaires $ l'intérieur
de la Péninsule.
C'est sous ces auspices, relativement
heureux, que va s'ouvrir la session légis-
lative en Espagne. On sait que ce n'est pas
du Parlement que viendront pour le gou-
vernement les grandes difficultés. Une im-
portante majorité ministérielle, un parti
constitutionnel encore, mais progressiste,
dirigé par M. Sagasta : telle se présente la
composition des Cortès. Il n'y a rien là qui
doive effrayer le gouvernenfceat, ni l'entra-
ver. Souhaitons qu'il en profite pour me-
ner à bien l'entreprise que M. Canovas del
CastiHo formulait récemment ces ter-
mes : assurer la paix, relever le crédit.
-«a. —
C'est à n'y pas croire. LQ Français
n'a pas trouvé de place dans son der-
nier numéro ,our la plus petite injure
ou la moindre calomnie à l'adresse de
M. Thiers ! Que se passe-t-iif Est-ce
que M. Daguin, pris de remords, bien
qu'un peu sur le tard, serait intervenu
pour imposer silence à ses gens ? Ou
bien la rédaction du Français aurait-
elle imprudemment gaspillé dans un
seul article sa provision d'invectives et
de calomnies ? Le fait est que l'infortuné
M. Daguin semble abandonné à son mal-
heureux sort. Quelques feuilles soumi-
ses prononcent encore son nom, mais:
timidement ; et les électeurs courraient
risque de l'avoir oublié d'ici à diman-
che, s'il ne se rappelait à leur souve-
nir par une lettre-circulaire où il fait
appel à la générosité d'un chacun pour
subvenir àjses frais d'élection.
« Vous reconnaîtrez, dit-il, que les
ressources financières sont un des élé-
ments d'influence les plus efficaces. »
Et cela est signé Daguin, sur une
feuille de papier portant cette indica-
tion : comité central de l'union conser-
vatrice de France. Donc, aux yeux des
« conservateurs », l'argent est le nerf
de la guerre et aussi de cette sincérité
électorale si chère aux Chabaud-La-
tour, aux Buffet et autres libéraux de
même farine. On s'en doutait déjà bien
un peu, mais on est fort aise d'en re-
cueillir l'aveu si clairement iormulé.
Allons ! messieurs, du courage à la po-
che, fournissez à l'honorable M. Daguin
des arguments métalliques pour l'aider
à convaincre les électeurs que M.
Thiers est un sinistre vieillard, et qu'il
faut lui préférer un homme qui a eu
l'insigne honneur de servir de boite aux
lettres au maréchal de Mac-Mahon, un
jour qu'il avait une communication à
faire a la France.
Pauvres gens ! Quelle sorte d'in-
[ flu^^Ç/éspèrent-iîs donc obtenir à
pièces de cent sous? Dans
quel monde, dans quels nuages plutôt
vivent-ils pour croire qu'en plein Paris
les ressources financières sont un des
éléments d'influenee-électorale les plus-
efficaces ? Car, enfin, nous ne supposons
pas que cette quête à domicile ait uni-
quement pour but de récolter le prix de
20 mille circulaires et de 3 mille affiches.
Cela est bon pour « les nouvelles cou-
ches, » pour les républicains qui, par
principe, veulent mettre la candidature
à la portée de tout le monde. Le Fran-
çais, qui sait tout, devrait bien nous
donner une explication de cette phrase
sur l'efficacité des « ressources finan-
cières » en matière électorale.
Par la même occasion, nous serions
bien aises d'apprendre pour quel motif
j ledit Français s'abstient soigneuse-
ment d'annoncer que les électeurs du
quartier Rochechouart ont pris la réso-
lution de voter à bulletins blanes. Il est
toujours désagréable de s'infliger à soi-
même un démenti; mais enfin quand
on s'est permis d'affirmer que les véri-
tables patrons de la candidature de M.
Thiers étaient les républicains intran-
sigeants, la morale, sinon l'ordre mo-
ral, exige qu'on fasse amende honora-
ble, alors qu'on est publiquement con-
vaincu d'avoir altéré la vérité.
Et puisque nous tenons le Français,
pourquoi ne lui transmettrions-nous
pas une question que nous avons en-
tendu maintes fois formuler autour de
nous? Comment se fait-il, disent les
gens sensés, que le comité central pré-
sidé par M. Changarnier sur la scène.
et par M. Buffet dans la coulisse, n'ait
songé à produire une candidature dite
« conservatrice » que dans le quartier
où, tout justement, se présente le plus
conservateur des candidats républi-
cains ?
Le comité Changarnier et les jour-
naux de M. Buffet ont fourni quelques
explications ; ils ont prétendu que M.
Thiers était un ennemi de l'ordre, de la
religion, de la famille, de la propriété
et de la constitution qui assure pour
quatre ans encore à M. le maréchal de
Mac-Mahon la présidence de la Répu-
blique. Ils ont dit que M. Thiers vivait
sur le pied de la plus parfaite intimité
avec la démagogie, et qu'enfin M.
Thiers et le péril social ne faisaient
qu'un.
Soit, M. Thiers est l'antechrist en per-
sonne. Mais puisque le général Chan-
garnier avait juré de livrer bataille au
monstre, que n'a-t-il choisi quelque ar-
rondissement mieux situé que le IXe? S'il
avait si fort à cœur de se mesurer avec
« l'hydre de l'anarchie, > que n'a t-il
dirigé ses batteries vers un de ces
arrondissements, comme le XXXII ou
le XX. ? La tâche avait de quoi tenter
son courage, et M. Allain-Targé ou M.
Gambetta n'eussent pas été fâchés, j'i-
magine, de croiser le fer avec ce vieux
brave ! Mais aller choisir le IX" arron-
dissement ! Et, sous prétexte de con-
servation sociale, combattre la candi-
dature d'un homme à qui la France est
redevable des deux actes de conserva-
tion les plus Relatants que l'histoire ait
à enregistrer : la défaire de l'insurrec-
tion de 187i et rétablissement de la
République !
Voilà ce que se disent, dans le 98 ar-
rondissement , un nombre immense
d'électeurs qui trouvent le général
Changarnier et son lieutenant M. Da-
guin, bien audacieux de prétendre leur
indiquer la meilleure méthode de con-
servation sociale. Or, en attendant
qu'on leur fournisse des explications,,
ils essaient de s'en donner à eux-mê-
mes, et ils pensent : Ce qu'on poursuit
en M. Thiers, ce que les Chaflgarhier,
les Daguin et les Buffet combattent
dans la personne du plus illustre des
conservateurs français, c'est l'homme
qui a fondé la République en France,
qui a indiqué aux républicains la meil-
leure marche à suivte pour arriver à la
réalisation de leurs espérances ; qui,
le premier,, leur a révélé la supériorité
de la politique de résultats sur la po-
litique de rêveries, et qui a présidé à
la transformation du parti républicain,
véritable parti de songe-creux jusqu'en
ces dernières années, en un parti de
gouvernement.
Et cela n'est point si mal raisonné,
n'est-ce pas, messieurs du comité central ?
Nous né parlons pas du général Cbn-
garnier, qui, décidément, ne pardon-
nera jamais à M. Thiers de ne l'avoir
pas fait maréchal ; ni de M. Daguin,
qui lui en voudra toujours d'être son
obligé; nous parlons des autres, de ces
bons citoyens, de,ces vaillants patriotes
guidés par M. Buffet, qui veillent au
salut de la société et à l'honneur du
pays en s'associant par toute la France
a la faction bonapartiste, et en se li-
guant contre M. Thiers dans le neu-
vième arrondissement de Paris.
E. SOHNERB,
—— -♦>——
a République française lestciiée m
police correctionnelle. Elle .sera jugée
le 18 février, c'e&tà.dire 1-avant-veille
des élections générales, et si M. Buffet
obtient la condamnation qu'iLdomande,
l'agence Havas .en>tirerà parti, on -peut
s'en rapporter à son zèle. Nous avons
relu l'article incriminé, et, -après un
sévère examen, nous y avons Delewé
deux xmi trois mots qui n'appartiennent
peut-être pas à la langue parlementaire.
Toutefois, les ministres en entendaient
bien d'autres, aux plus mauvais jours
de la Restauration, sans mettre la
Justice en campagne. Il faut croire que
les hommes de portefeuille sont devenue-
plus susceptibles avec le temps.
Sont-ils devenus plus logiques et plus
équitables On pourrait en douter. Car
enfin, s'il y a de nos jours un citoyen
qui combatte le bon combat avec un
infatigable courage contre les violents
et les fous de la démagogie, c'est M.
Gambetta, l'inspirateur et le principal
rédacteur de la République française.
A Belleville comme à Marseille, dans
le Nord comme dans le Vaucluse. il
poursuit les intransigeants et leur dis-
pute pied à pied le terrain électoral.
Jamais homme d'Etat n'a dépensé plus
d'éloquence au service du bon sens et
do la saine politique.
Mais peut-être M. le président du
conseil eraint-il moins les petits Na-
quets qui s'escriment à déconsidérer
la République que le grand orateur qui
rallie au gouvernement « les hommes
modérés de tous les partis ».
— ♦
M. Alexandre Lavalley
Nous apprenons avec une vive satisfac-
tion que M. Alexandre Lavalley pose sa
candidature dans l'arrondissement de Li-
sieux, comme député républicain conser-
vateur. Grand propriétaire dans cet ar-
rondissement, ingénieur des plus éinnt,
distingué par la part prépondérante qu'il
a prise aux plus grande travaux de ce siè-
cle, notamment au percement de l'isthme
de Suez et à la traversée des Pyrénées, ad-
ministrateur délégué de la Corppagnie du
tunnel sous-marin, esprit libéral et ferme,
nul ne nous paraît plus propre que M. La-
valley à réunir fe "uffrages d'un arrondis-
sement industriel comme celui de Lisieux.
Il a pour concurrents MM. Target et Col-
feert-Chabannais. Quoique sa candidature
ne se soit produite qu'au dernier moment,
nous compton8 eur la patriotisme deI! élec-
teurs pour lui donner une imposante ma-
jorité.
Voici la profession de foi de M. la-
valley :
Je me rends à l'invitation d'an grand nom-
bre d'électeurs qui m'ont offert la candida-
ture républicaine dans notre arrondissement.
Je viens vous demaader de m'honorsr de vos
suffrages.
L'Assemblée nuAioaale, élue en 1871, a rem-
pli sa tâche.
Après avoir tenté une restaurationmonar- 1
clique dont elle a reconnu elle-même l'im-
possibilité, elle a dû voter la constitution ré-
publicaine du 25 février, qui est désormais
la loi fondamentale du pays, à laquelle tous
les Français doivent obéir.
Plein d@ respect pour le président de la
République, M. le maréchal de Mac-Mahon,
ma règle de conduite sera, si j'ai l'honneur
d'être votre représentant, de joindre tous pies
efforts à ceux des députés qui voudront mai h-
ténir la constitution avtc les améliorations
que le temps pourra indiquer. ':
Je latterai de toutes mes forces contre ceux
qui essaieront de U détruire,et nous livrer de
nouveau au hasard des révolutions.
Originaire de ce département, auquel me
rattachent de nombreux liens de parenté,
propriétaire dans l'arrondissement de Li-
sieux, j'ai pp étudier les besoins de son gfi-
culture,
Ingénieur, j'ai pris part à d'importants
travaux publics, à des constructions de toute
nature ; j'ai appris à quelles conditions peut
prospérer et crorre l'industrie qui occupe
une ai grande place dans ce pays.
Je serais hepreux de mettre au service de
cette Contrée et du pays l'expérience que j'ai
pu acquérir, et BOI dévouement entier.
Signé : A. LAVALLEY. J
ttntra M. de êoibert, bonapartiste dé-
claré, et M. Target, le Blûcher do 24 mai,
les républicains de l'arrondissement de Li-
sieux se seraient trouvés fort en peine.
Ils ne pouvaient voter pour l'homme de
l'appel au peuple, mais il ne leur répugnait
guère moins de donner leurs voix à celui
qui a àéjà obtenu un poste diplomatique
pour prix du mouyemeat tournant qui a
renversé M. Thiers. L'intervention de M.
Alexandre Lavalley arrange tout : on n'é-
lira ni le bonapartiste ni le beau-frère de
M. Buffet ; on votera pour l'homme émi-
nçât, le travailleur infatigable qui, au
sortir de l'Ecole polytechnique, en 1842,
donnait sa démission et entrait comme ou-
vrier dans les ateliers d'un cûnsiruôteur
anglais; qui fondait eu 1846, avec M.
Gouin, un établissement admiré de l'Eu-
rope entière ; ét qui, depuis ce jour, n'a
pas cesié de dévouer sa vie aux gran-
des œuvres du progrès. Les chemins de
fer de la France, de l'Italie, de l'Autri-
che, de la Russie, de l'Espagne, attestent
sa prodigieuse acti vité. Mais son plus beau
titre de gloire est le percement de l'isthme
de Suez, conçu par M. de Lesseps, entre-
pris et exécuté par Alexandre Lavalley.
Si le spirituel et vaillant diplomate qui
figure à bon droit parmi les grands hom-
mes du siècle a pu leul obtenir les fir-
mans, dompter les résistances, grouper les
capitaux, l'œuvre aurait pu rester long-
temps à l'état de projet sans l'admirable
coopération de deux modestes et puissants
génies, fraternellement unis, MM. Laval-
lev et Borel.
Pour un travail sans précédents, il a
fallu créer de toutes pièces des engins
nouveaux que je monde n'avait jamais
vus. La drague long couloir et l'éléva-
teur, deux machines inventées et .cons- ,1
truites par, M. et pon ami regretté,
ont résolu le plus grand problème de l'in-
dustrie-moierne et rendu un immense ser-
vice à la civilisation.
iIM. A. Lavalley s'apprête à faire mieux
encore ; c'est à lui que les premiers sous-
erip.tttUf.l (du tunnel sous-marin entre la
France et l'Angleterre ont confié le succès
de lei^Lr gigantesque entreprise.
La société des ingénieurs civils l'a élu
président en 1875 ; il est le président de
l'association fondée pour la réforme de
l'énséignement secondaire sous le nom
d'Ecole Monge. Partout où l'on occupe
du. progrès, partout où l'on travaille à la
régénération de la France, vous trouverez
le nom honoré et la sympathique personne
de M. Alexandre Lavalley.
*■ ,-- -."- .., :
« L'état de l'atmosphère plaide victo-
rieusement la cause de M. le baron Hauss-
mann », s'écrie le journal le mieux infor-
mé et le plus sérieux de Paris, et là-des-
sus, il dépeint les fondrières dans lesquel-
les la ville de Paris barbote depuis quel-
ques jours. Ce n'est pas sous l'administra-
tion du baron que se serait vue pareille
chose ! etc.
Le candidat de la boue, cela est bien
trouvé. La parole est à la boue ; la boue
à nos souliers écrit notre devoir. Précieuse
boue ! Si la boue n'existait pas, il faudrait
l'inventer. Les électeurs sont invités à lire
attentivement la réclame électorale que
l'état de l'atmosphère étale si complaisam-
ment sous leurs pieds. Mais, franchement,
s'ils comptent sur la nomination de M.
Haussmann pour nous tirer du gâchis l
F.
La période des réunions publiques
électorales est fermée. Nous serions in-
justes envers notre pays si nous ne si-
gnalions le spectacle admirable que la
France a offert pendant quinze jours.
Sur lifts les points du territoire, le
parti constitutionnel républicain, qui
comprend sans conteste l'immense ma-
jorité de là nation, a fait assaut de
bon sens politique et de patriotisme.
Ainsi se réalisera la parole du premier
président de la République : Au plus
sage ! Nos correspondants de province
nous écrivent : Aujourd'hui nous sen-
tons vraiment que l'avenir nous appar-
tient, que nous n'avons plus rien à re-
douter des compétitions bonapartistes,
monarchistes ou cléricales, enfin que le
gouvernement du pays est à nous.
C'est maintenant par des articles de
journaux, par des distributions de
feuilles volantes et de brochures, que
les hommes des anciens partis ten-
teront, en ces derniers jours, de sollici-
ter les électeurs. Dans ce genre de pro-
pagande, les impérialistes se montrent
naturellement les plus hardis, et le Co-
mité national conservateur (comité Doll-
fus) pousse déjà l'audace jusqu'à en-
voyer des circulaires aux gardes-cham-
pêtres de France, dont il « réclame le
concours. » Ceci, sans préjudice des li-
belle? calomniateurs et factieux tirés à
grand nombre et expédiés dans les 86
départements, sans aucune protestation
de l'honorable M. Buffet. Mais les publi-
cistes de ee parti, comme les monar-
chistes et les cléricaux, en seront pour
leurs frais de papier, d'encre et d'élo-
quence. La réponse du pays n'en sera,
pour eux, que plus écrasante. Et ce
n'est pas plus à l'empire qu'à la cause
de la monarchie, légitime ou non légi-
time, que profiteront les cinq jours de
retraite où nous sommes entrés depuis
hier.
La situation électorale est excel-
lente; il n'y a qu'une voix pour le pro-
clamer. Dans tous les départements où
les républicains l'ont emporté lors de
l'élection du Sénat, le 30 janvier, ils
l'emporteront encore, à plus forte rai-
son, dimanche. Et il s'en trouve bien
peu parmi les autres où le suffrage uni-
versel ne soit pas résolu à réparer les
îrreurs, les surprises où s'est laissé en-
traîner le corps électoral spécial du
énat; consulté pour la première fois.
Une des particularités de la période
que nous traversons, la plus remarqua-
ble et la plus heureuse, c'est que nous
Rivons vu s'établir deux courants bien
distincts, qui se réunissent pour abou-
ir simultanément à un but commun.
Courant de modération dans Paris,
comme dans la plupart des villes ; cou-
uaut démocratique et véritabîcjuent
républicain dans les campagnes. Ici,,
lion a compris que l'avenir des institu-
tions dépendait de l'esprit de mesure et
de sagesse, et que, si l'on allait trop
mte, on risquerait encore de tout gâ-
tjgr. Là, on d'est rendu compte de la
nécessité d'apporter un ferme appui à
la République, si l'on désirait garantir
aux seules institutions possibles au-
jourd'hui la stabilité. Plus d'impruden-
ces, plus de puérils éclats dans les
villes; et, dans les campagnes, plus
d'hésitations, plus de folles frayeurs ni
(te préjugés. Ceux-Jà ont ralenti, ceux-
ci accéléré leur marche. Si bien qu'à
l'heure où nous voici, c'est à peu près
u même pas que les uns et les autres
achèvent cette dernière étape des élec-
tions générales. On sait ce qu'on veut,
on connaît le but où l'on tend, et l'on
s'y dirige sûrement, franchement, sans
se laisser détourner de la route.
Résultats inespérés, presque merveil-
leux. Nous n'emploierons pas de grands
mots pour les expliquer. Il y a une
raison, qui est terre-à-terre et qui nous
suffit, car nous la trouvons excellente ;
c'est que, dans tous les rangs du peu-
ple français, chacun a interrogé ses
intérêts réels, qui disent à quelles
conditions le travail, l'industrie, le
commerce, l'agriculture jouiront enfin
de la sécurité.
Depuis le 30 janvier, nous avons un
Sénat où la majorité est acquise à l'o-
pinion constitutionnelle et républicaine.
Dans la Chambre que nous allons nom-
mer le 20, la majorité constitutionnelle
et républicaine, en ne se rapportant
qu'aux prévisions les moins exagérées,
sera l'une des plus considérables que
l'on ait vues jusqu'à présent dans les
Assemblées librement élues. -Repré-
sentés par des groupes infimes, les
anciens partis y laisseront la France
en repos, et la question de gouverne-
ment, sous une forme ou sous une au-
tre, n'y sera plus continuellement po-
sée. Tout en tenant de moins longues
sessions que l'Assemblée nationale
précédente, la Chambre aura donc plus
de loisir pour l'examen des graves
questions que n'a pu régler une As-
semblée entichée de réaction et sou-
vent égarée en disputes vaines.
Les réformes économiques pourront
bientôt être abordées. il sera possible
de compléter notre réorganisation mili-
taire, en la corrigeant dans ses parties
défectueuses. Il faudra définir à nou-
veau les rapports de l'Etat et des Egli-
ses, pour mettre un obstacle aux enva-
hissements du cléricalisme, qui s'in-
quiète aujourd'hui bien moins de reli-
gion que de politique, et qui prétend
imposer des lois (quelles lois !) à la
société, qu'il espère asservir. Il sera
important surtout, — et ce sera la
tâche la plus urgente de la Chambre
nouvelle, — d'organiser dans toute
l'étendue du pays l'enseignement pri-
maire obligatoire et laïque. C'est la
réforme essentielle, et- l'on verra, au
bout de dix ans, quelles générations in-
telligentes et patriotiques, Quelle France
nouvelle elle aura créée. Nous ne fai-
sons qu'indiquer en courant quelques-
uns des points du programme que les
élus du 20 février ne manqueront point
de mettre à leur ordre du jour. A quoi
bon insister? Voilà l'avenir pacifique et
fécond sur lequel sont fixés dès mainte-
nant les yeux de la France. Si nous
choisissions des ennemis de la consti-
tution républicaine, nous accomplirions
notre suicide. Avec les représentants
républicains que nous élirons, c'est en-
fin l'ère du salut qui va commencer.
EUG. LIÉBERT.
C'EST TOUJOURS LA MÈIIE CHOSE
Vous vous rappelez les vers tout
pleins de mysticisme érotique que j'ai
cités dans un de mes derniers articles.
Une bonne âme m'écrit là-dessus que je
me fais le jeu beau en allant fèuiller
dans de vieux bouquins hors d'usagé
quelques passages ridicules, qui ne peu-
vent scandaliser personne par l'excel-
lente raison que personne ne les lit
plus.
Qu'on ne les lise plus , à la bonne
heure, et je n'y contredis point. Mais
je puis assurer que les ouvrages où se
trouvent ces fadaises surannées se ré-
impriment et se débitent encore de nos
jours. Ce sont des livres de piété. Ils
ont reçu jadis l'approbation d'estima-
bles évêques, dont la dévotion n'était
sans doute, pas fort sensée. Et depuis
lors, aucune révision n'a été faite.
Mais croit-on que le même esprit de
sensualisme mystique qui a inspiré les
inepties maladives de Marie Alacoque
et les dévotes effusions du père Surin
ait disparu de l'Eglise catholique? Il
s'exprime peut-être en meilleur fran-
çais ; il est toujours le même.
Voici les vers que la Semaine reli-
gieuse du diocèse de Nantes, dans son
numéro du 4 juin 1875, donne à chan-
ter aux jeunes communiantes, sans dire
sur quel air :
Il va venir ! encor quelques instants d'attente,
Et son cœur adoré battra contre mon coeur ;
Quelques instants encore, et sa voix ravissante
Viendra me pénétrer de son charme vainqueur,
De ma félicité comment peindre l'ivresse ?
Comment mon faible cœur la peut-il contenir ?
0 miracle d'amour ! prodige de tendresse,
Il va venir !
Quel est cet il dont l'attente inspire
ces transports de désir et d'amour?
C'est Jésus. Mais une jeune fille qui pen-
serait à son amant parlerait-elle d'un
autre style ? ne s'écrierait elle pas :
Venez, mon bien-aimé ! Voyez, déjà l'aurore
A doré nos coteaux de ses feux les plus doux ;
Je languis de désir ; pourquoi tarder encore
A visiter un cœur qui ne bat que pour vous ?
Mais silence!. à mes vœux il daigne condescendre :
Sa présence à mon cœur se fait déjà sentir ;
Que tout autour de moi se taise pour l'entendre ;
Il va venir.
Le divin amant vient enfin, et tout
aussitôt la jeune catéchumène entonne
un nouveau cantique d'actions de
grâces :
Il est à moi, celui que le ciel même,
Que l'univers ne saurait contenir.
Il est à moi ; je l'embrasse, je l'aime,
Rien ici bas ne peut nous désunir.
Il est à moi ! que désirer encore ?
Le possédant, j'ai le ciel ici-bas.
Félicité que l'ange même ignore!
Il m'est uni, je le serre en mes bras.
Ces strophes sont sans aucun doute
d'un séraphisme moins idiot que n'é-
taient les citations que j'avais données
l'autre jour. Mais c'est le même genr
de littérature, renouvelé du Cantique
des cantiques, ce Cantique des canti-
ques, dont l'autorité ecclésiastique a fait
un poème pieux, et qui n'était qu'un
drame amoureux, quelque chose com-
me la Psyché de Molière et de Corneille.
Je parlais hier de l'enseignement lit-
téraire donné à la plupart de nos jeu-
nes filles. Songez que toutes ces sot-
tises (prose ou vers) y entrent pour
une bonne part. Songez que les livres
dits de piété sont presque tous infectés
de ce mysticisme dangereux et bête;
songez qu'il n'y est question que de mi-
racles, d'apparitions, d'histoires à dor-
mir debout, écrites dans une langue
tout à la fois emphatique et puérile.
Depuis un an, il ne se passe guère de
jour où je ne lise quelqu'un delces vou-
lumes que patronne le clergé, sans
parler des innombrables feuilles qu'il
répand à profusion dans les écoles. Je
suis épouvanté et navré de cet excès de
bêtis; et ce qu'il y a de pis, c'est de
la bêtise voulue, préméditée. Il est clair
que les malheureux qui rédigent ces
niaiseries ne sont pas si imbéciles qu'ils
affectent de le paraître.- Il y a chez
eux un" parti pris d'énerver l'intelli-
genee de ceux pour qui ils écrivent.
J'ai là sous les yeux un numéro d'un
journal pieux, dont assurément vous
ne soupçonnez pas l'existence; c'est
l'Echo de Sainte-Philomène, qui entre
en 1876 dans sa cinquième année. Vous
fussiez-vous doutés que sainte Philo-
mène eût un écho ? quel peut bien être
l'écho de sainte Philomène ? et cette
Philomène elle-même, quelle est-elle?
C'est, dit ce journal, la thaumaturge
du XIX Siècle. Savez-vous bien ce que
veut dire au juste « thaumaturge? » le
mot signifie proprement faiseuse de mi-
racles. Ainsi voilà qui est entendu la
fonction de Philomène, c'est de faire
des miracles. Elle est la thaumaturge
du dix-neuvième siècle, comme Mlle
Lenormant en a été la devineresse,
comme M. Alexis en est ou en fut le
magnétiseur.
Il paraît que cette Philomène est
morte à treize ans, et l'on fait remar-
quer, comme une grande merveille,
qu'elle est morte vierge. Si c'est pour
cela qu'on l'a canonisée! Elle a main-
tenant une église qui est consacrée à
son culte particulier. Ce culte date de
1835. A cette époque-là, deux époux
chrétiens, affligés de ne pas avoir d'en-
fants, reçurent des mains d'une dévote
un petit morceau d'os détaché du corps
de la sainte ; l'efficacité de cette reli-
que fut si merveilleuse que, l'année
suivante, le ménage eut une fille. On la
nomma Philomène, en l'honneur de la
sainte, qui avait accompli ce prodige
inconcevable de rendre le courage à
un mari ou la fécondité à sa femme.
« À partir de ce moment, dit la no-
tice, la chapelle de sainte Philomène
devint de plus en plus un but de pèle-
rinage, et les grâces signalées obtenues
dans le nouveau sanctuaire par les
nombreux pèlerins qui venaient y por-
ter leurs prières et leur vœux attestè-
rent de plus en plus que sainte Philo-
mène se complaisait à y être honorée.
Je le demande à une mère de famille
qui reçoit ce journal ou tout autre de
ce genre :
Quelle est l'idée juste que ses en-
fants y cueilleront jamais? Quel sujet
de réflexion y trouveront-ils ?
Qu'y pourront-ils bien apprendre de
vrai et de sensé?
Quel fruit en tireront-ils pour l'a-
vancement de leur esprit, et j'ose mê-
me leur dire pour la morale de leur con-
duite ?
Il m'est tombé parfois sous la main
de ces journaux de modes qui traînent
sur la table du salon. C'est de bien
pauvre littérature que celle qui dort
sous ces couvertures multicolores, Elle
est pourtant moins abêtissante que
celle des feuilles soi-disant dévotes.
Le point par où ces deux genres de
journaux se rapprochent le mieux en-
core, c'est que si l'on trouve dans les
journaux de modes les adresses des
bonnes faiseuses, on rencontre aussi
dans les Echos de Sainte-Philomène
des mentions ainsi conçues (je copie tex-
tuellement) :
« Nos lecteurs trouveront chez Mlle
Anna Brochot, rue ., no ., des cor-
dons et des chapelets bénits ayant-
touché aux reliques de la thauma-
turge. »
L'acier que l'on frotte contre un ai-
mant s'aimante lui-même. Ainsi des
chapelets qui ont touché un os de la
sainte. Ils s'imprègnent de la même
vertu miraculeuse.
Combien coûtent-ils ?
Quand je vois toutes ces misères de
l'esprit clérical, j'ai bien envie de chan-
ter, moi aussi, mais dans d'autres in-
tentions et dans un autre esprit que ces
messieurs, le fameux cantique du Sa-
cré- Coeur :
Pitié,mon Dieu ! pour tant d'hommes stupides,
Vous outrageant, sans savoir ce qu'il font!
Est-il bien vrai qu'ils n'en sachent
rien?
FRANCISQUE SARCEY.
Jeudi 17 Pérrler 18T9
r- RÉDACTION
S'adresser air Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
58 9 rue de LafayéUe. Ii.
( Les lettres non affranchies serom rqwéa
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JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
Annonce*, chez MM. LAGRANGB, CERF et Çj>*
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Rédacteur en chef'Gérant : £ ABOUÏ)
AnnODcetI, chez MM. LAGRANGE, CERF et G1*
6, place de la Bonne, 8
Imp. A. CHAix M C", rue Bergère, MO, à Paril
XV1
BULLETIN"
Paris y 16 février fiRT6
Aprèg la fièvre des réunions publiques,
a commencé ce qu'on a si plaisamment ap-
pelé sous l'empire la « période de recueil-
lement. » On peut dire qu'elle eat déjà ou-
verte depuis quelques jeurs à Paris. Un
travail de classement et d'élimination s'est
opéré de lui-même. Un assez grand nom-
bre de candidatures dont les chances n'ap-
paraissaient point comme suffisamment sé-
rieuses se sont effacées. D'autres se sont af-
firmées et confirmées, et l'idée générale
qu'on peut se faire, d'après ces données,
des dispositions du corps électoral parisien,
est assez satisfaisante.On reconnaît, à n'en
pas douter, que la population de Paris est
beaucoup plus éloignée que ses ennemis ne
voudraient le faire croire des idées exagé-
rées et des programmes utopiques. Elle
marchera d'un pas ferme dans la voie que
les chefs autorisés de la démocratie ent
tracée avec tant d'intelligence àu cours dé
la dernière législature, celle du progrès pa-
cifique, régulier, légal et logique. Il con-
vient que la province le sache, s'en per-
suade, et ne se laisse pu égarer par les
fantômes que la réaction crée à plaisir
pour l'intimider et profiter de ses terreurs.
Dans les départements, le travail nous
semble moins avancé et la situation moins
nette. Mais un fait nous frappe qui est
pour inspirer confiance. On sait que les
candidats s'efforcent toujours d'accommo-
der du mieux qu'ils peuvent leurs profes-
sions de foi aux dispositions Apposées du
corps électoral. Or, l'immense majorité des
candidats se réclame de la constitution de
1875 et fait profession de la maintenir si
elle est attaquée, de ne la réviser que pour
en développer les principes, si la révision
en est jugée opportune. Il y a là un péril
et un symptôme, wpéril serait de se trom-
per sur les vrais sentiments d'un candidat
en le jugeant sur une circulaire de circon-
stance. Les populations des provinces qui
connaissent tout de leurs candidats, passé
et présent, dehors spécieux et dispositions
secrètes, éviteront aisément ce danger.
Quant au symptôme, il est excellent ; il
montre d'une manière éclatante que, de
l'aveu même des hommes du passé, la
France est presque unanime à accepter
l'ordre de choses nouveau et à en souhai-
ter la prolongation.
L'Espagne a fait parvenir aux puissan-
ces européennes un mémorandum relatif
à la question cubaine. Nos lecteur-s trou-
veront plus loin un résumé de ce document,
que nos informations particulières sur Cu-
ba, si détaillées et si précises, leur permet-
tront de contrôler. Nous appelons égale-
ment leur attention sur les nouvelles d'Es-
pagne, qui présentent comme de plus en
plus favorable au parti du gouvernement
l'état des affaires militaires $ l'intérieur
de la Péninsule.
C'est sous ces auspices, relativement
heureux, que va s'ouvrir la session légis-
lative en Espagne. On sait que ce n'est pas
du Parlement que viendront pour le gou-
vernement les grandes difficultés. Une im-
portante majorité ministérielle, un parti
constitutionnel encore, mais progressiste,
dirigé par M. Sagasta : telle se présente la
composition des Cortès. Il n'y a rien là qui
doive effrayer le gouvernenfceat, ni l'entra-
ver. Souhaitons qu'il en profite pour me-
ner à bien l'entreprise que M. Canovas del
CastiHo formulait récemment ces ter-
mes : assurer la paix, relever le crédit.
-«a. —
C'est à n'y pas croire. LQ Français
n'a pas trouvé de place dans son der-
nier numéro ,our la plus petite injure
ou la moindre calomnie à l'adresse de
M. Thiers ! Que se passe-t-iif Est-ce
que M. Daguin, pris de remords, bien
qu'un peu sur le tard, serait intervenu
pour imposer silence à ses gens ? Ou
bien la rédaction du Français aurait-
elle imprudemment gaspillé dans un
seul article sa provision d'invectives et
de calomnies ? Le fait est que l'infortuné
M. Daguin semble abandonné à son mal-
heureux sort. Quelques feuilles soumi-
ses prononcent encore son nom, mais:
timidement ; et les électeurs courraient
risque de l'avoir oublié d'ici à diman-
che, s'il ne se rappelait à leur souve-
nir par une lettre-circulaire où il fait
appel à la générosité d'un chacun pour
subvenir àjses frais d'élection.
« Vous reconnaîtrez, dit-il, que les
ressources financières sont un des élé-
ments d'influence les plus efficaces. »
Et cela est signé Daguin, sur une
feuille de papier portant cette indica-
tion : comité central de l'union conser-
vatrice de France. Donc, aux yeux des
« conservateurs », l'argent est le nerf
de la guerre et aussi de cette sincérité
électorale si chère aux Chabaud-La-
tour, aux Buffet et autres libéraux de
même farine. On s'en doutait déjà bien
un peu, mais on est fort aise d'en re-
cueillir l'aveu si clairement iormulé.
Allons ! messieurs, du courage à la po-
che, fournissez à l'honorable M. Daguin
des arguments métalliques pour l'aider
à convaincre les électeurs que M.
Thiers est un sinistre vieillard, et qu'il
faut lui préférer un homme qui a eu
l'insigne honneur de servir de boite aux
lettres au maréchal de Mac-Mahon, un
jour qu'il avait une communication à
faire a la France.
Pauvres gens ! Quelle sorte d'in-
[ flu^^Ç/éspèrent-iîs donc obtenir à
pièces de cent sous? Dans
quel monde, dans quels nuages plutôt
vivent-ils pour croire qu'en plein Paris
les ressources financières sont un des
éléments d'influenee-électorale les plus-
efficaces ? Car, enfin, nous ne supposons
pas que cette quête à domicile ait uni-
quement pour but de récolter le prix de
20 mille circulaires et de 3 mille affiches.
Cela est bon pour « les nouvelles cou-
ches, » pour les républicains qui, par
principe, veulent mettre la candidature
à la portée de tout le monde. Le Fran-
çais, qui sait tout, devrait bien nous
donner une explication de cette phrase
sur l'efficacité des « ressources finan-
cières » en matière électorale.
Par la même occasion, nous serions
bien aises d'apprendre pour quel motif
j ledit Français s'abstient soigneuse-
ment d'annoncer que les électeurs du
quartier Rochechouart ont pris la réso-
lution de voter à bulletins blanes. Il est
toujours désagréable de s'infliger à soi-
même un démenti; mais enfin quand
on s'est permis d'affirmer que les véri-
tables patrons de la candidature de M.
Thiers étaient les républicains intran-
sigeants, la morale, sinon l'ordre mo-
ral, exige qu'on fasse amende honora-
ble, alors qu'on est publiquement con-
vaincu d'avoir altéré la vérité.
Et puisque nous tenons le Français,
pourquoi ne lui transmettrions-nous
pas une question que nous avons en-
tendu maintes fois formuler autour de
nous? Comment se fait-il, disent les
gens sensés, que le comité central pré-
sidé par M. Changarnier sur la scène.
et par M. Buffet dans la coulisse, n'ait
songé à produire une candidature dite
« conservatrice » que dans le quartier
où, tout justement, se présente le plus
conservateur des candidats républi-
cains ?
Le comité Changarnier et les jour-
naux de M. Buffet ont fourni quelques
explications ; ils ont prétendu que M.
Thiers était un ennemi de l'ordre, de la
religion, de la famille, de la propriété
et de la constitution qui assure pour
quatre ans encore à M. le maréchal de
Mac-Mahon la présidence de la Répu-
blique. Ils ont dit que M. Thiers vivait
sur le pied de la plus parfaite intimité
avec la démagogie, et qu'enfin M.
Thiers et le péril social ne faisaient
qu'un.
Soit, M. Thiers est l'antechrist en per-
sonne. Mais puisque le général Chan-
garnier avait juré de livrer bataille au
monstre, que n'a-t-il choisi quelque ar-
rondissement mieux situé que le IXe? S'il
avait si fort à cœur de se mesurer avec
« l'hydre de l'anarchie, > que n'a t-il
dirigé ses batteries vers un de ces
arrondissements, comme le XXXII ou
le XX. ? La tâche avait de quoi tenter
son courage, et M. Allain-Targé ou M.
Gambetta n'eussent pas été fâchés, j'i-
magine, de croiser le fer avec ce vieux
brave ! Mais aller choisir le IX" arron-
dissement ! Et, sous prétexte de con-
servation sociale, combattre la candi-
dature d'un homme à qui la France est
redevable des deux actes de conserva-
tion les plus Relatants que l'histoire ait
à enregistrer : la défaire de l'insurrec-
tion de 187i et rétablissement de la
République !
Voilà ce que se disent, dans le 98 ar-
rondissement , un nombre immense
d'électeurs qui trouvent le général
Changarnier et son lieutenant M. Da-
guin, bien audacieux de prétendre leur
indiquer la meilleure méthode de con-
servation sociale. Or, en attendant
qu'on leur fournisse des explications,,
ils essaient de s'en donner à eux-mê-
mes, et ils pensent : Ce qu'on poursuit
en M. Thiers, ce que les Chaflgarhier,
les Daguin et les Buffet combattent
dans la personne du plus illustre des
conservateurs français, c'est l'homme
qui a fondé la République en France,
qui a indiqué aux républicains la meil-
leure marche à suivte pour arriver à la
réalisation de leurs espérances ; qui,
le premier,, leur a révélé la supériorité
de la politique de résultats sur la po-
litique de rêveries, et qui a présidé à
la transformation du parti républicain,
véritable parti de songe-creux jusqu'en
ces dernières années, en un parti de
gouvernement.
Et cela n'est point si mal raisonné,
n'est-ce pas, messieurs du comité central ?
Nous né parlons pas du général Cbn-
garnier, qui, décidément, ne pardon-
nera jamais à M. Thiers de ne l'avoir
pas fait maréchal ; ni de M. Daguin,
qui lui en voudra toujours d'être son
obligé; nous parlons des autres, de ces
bons citoyens, de,ces vaillants patriotes
guidés par M. Buffet, qui veillent au
salut de la société et à l'honneur du
pays en s'associant par toute la France
a la faction bonapartiste, et en se li-
guant contre M. Thiers dans le neu-
vième arrondissement de Paris.
E. SOHNERB,
—— -♦>——
a République française lestciiée m
police correctionnelle. Elle .sera jugée
le 18 février, c'e&tà.dire 1-avant-veille
des élections générales, et si M. Buffet
obtient la condamnation qu'iLdomande,
l'agence Havas .en>tirerà parti, on -peut
s'en rapporter à son zèle. Nous avons
relu l'article incriminé, et, -après un
sévère examen, nous y avons Delewé
deux xmi trois mots qui n'appartiennent
peut-être pas à la langue parlementaire.
Toutefois, les ministres en entendaient
bien d'autres, aux plus mauvais jours
de la Restauration, sans mettre la
Justice en campagne. Il faut croire que
les hommes de portefeuille sont devenue-
plus susceptibles avec le temps.
Sont-ils devenus plus logiques et plus
équitables On pourrait en douter. Car
enfin, s'il y a de nos jours un citoyen
qui combatte le bon combat avec un
infatigable courage contre les violents
et les fous de la démagogie, c'est M.
Gambetta, l'inspirateur et le principal
rédacteur de la République française.
A Belleville comme à Marseille, dans
le Nord comme dans le Vaucluse. il
poursuit les intransigeants et leur dis-
pute pied à pied le terrain électoral.
Jamais homme d'Etat n'a dépensé plus
d'éloquence au service du bon sens et
do la saine politique.
Mais peut-être M. le président du
conseil eraint-il moins les petits Na-
quets qui s'escriment à déconsidérer
la République que le grand orateur qui
rallie au gouvernement « les hommes
modérés de tous les partis ».
— ♦
M. Alexandre Lavalley
Nous apprenons avec une vive satisfac-
tion que M. Alexandre Lavalley pose sa
candidature dans l'arrondissement de Li-
sieux, comme député républicain conser-
vateur. Grand propriétaire dans cet ar-
rondissement, ingénieur des plus éinnt,
distingué par la part prépondérante qu'il
a prise aux plus grande travaux de ce siè-
cle, notamment au percement de l'isthme
de Suez et à la traversée des Pyrénées, ad-
ministrateur délégué de la Corppagnie du
tunnel sous-marin, esprit libéral et ferme,
nul ne nous paraît plus propre que M. La-
valley à réunir fe "uffrages d'un arrondis-
sement industriel comme celui de Lisieux.
Il a pour concurrents MM. Target et Col-
feert-Chabannais. Quoique sa candidature
ne se soit produite qu'au dernier moment,
nous compton8 eur la patriotisme deI! élec-
teurs pour lui donner une imposante ma-
jorité.
Voici la profession de foi de M. la-
valley :
Je me rends à l'invitation d'an grand nom-
bre d'électeurs qui m'ont offert la candida-
ture républicaine dans notre arrondissement.
Je viens vous demaader de m'honorsr de vos
suffrages.
L'Assemblée nuAioaale, élue en 1871, a rem-
pli sa tâche.
Après avoir tenté une restaurationmonar- 1
clique dont elle a reconnu elle-même l'im-
possibilité, elle a dû voter la constitution ré-
publicaine du 25 février, qui est désormais
la loi fondamentale du pays, à laquelle tous
les Français doivent obéir.
Plein d@ respect pour le président de la
République, M. le maréchal de Mac-Mahon,
ma règle de conduite sera, si j'ai l'honneur
d'être votre représentant, de joindre tous pies
efforts à ceux des députés qui voudront mai h-
ténir la constitution avtc les améliorations
que le temps pourra indiquer. ':
Je latterai de toutes mes forces contre ceux
qui essaieront de U détruire,et nous livrer de
nouveau au hasard des révolutions.
Originaire de ce département, auquel me
rattachent de nombreux liens de parenté,
propriétaire dans l'arrondissement de Li-
sieux, j'ai pp étudier les besoins de son gfi-
culture,
Ingénieur, j'ai pris part à d'importants
travaux publics, à des constructions de toute
nature ; j'ai appris à quelles conditions peut
prospérer et crorre l'industrie qui occupe
une ai grande place dans ce pays.
Je serais hepreux de mettre au service de
cette Contrée et du pays l'expérience que j'ai
pu acquérir, et BOI dévouement entier.
Signé : A. LAVALLEY. J
ttntra M. de êoibert, bonapartiste dé-
claré, et M. Target, le Blûcher do 24 mai,
les républicains de l'arrondissement de Li-
sieux se seraient trouvés fort en peine.
Ils ne pouvaient voter pour l'homme de
l'appel au peuple, mais il ne leur répugnait
guère moins de donner leurs voix à celui
qui a àéjà obtenu un poste diplomatique
pour prix du mouyemeat tournant qui a
renversé M. Thiers. L'intervention de M.
Alexandre Lavalley arrange tout : on n'é-
lira ni le bonapartiste ni le beau-frère de
M. Buffet ; on votera pour l'homme émi-
nçât, le travailleur infatigable qui, au
sortir de l'Ecole polytechnique, en 1842,
donnait sa démission et entrait comme ou-
vrier dans les ateliers d'un cûnsiruôteur
anglais; qui fondait eu 1846, avec M.
Gouin, un établissement admiré de l'Eu-
rope entière ; ét qui, depuis ce jour, n'a
pas cesié de dévouer sa vie aux gran-
des œuvres du progrès. Les chemins de
fer de la France, de l'Italie, de l'Autri-
che, de la Russie, de l'Espagne, attestent
sa prodigieuse acti vité. Mais son plus beau
titre de gloire est le percement de l'isthme
de Suez, conçu par M. de Lesseps, entre-
pris et exécuté par Alexandre Lavalley.
Si le spirituel et vaillant diplomate qui
figure à bon droit parmi les grands hom-
mes du siècle a pu leul obtenir les fir-
mans, dompter les résistances, grouper les
capitaux, l'œuvre aurait pu rester long-
temps à l'état de projet sans l'admirable
coopération de deux modestes et puissants
génies, fraternellement unis, MM. Laval-
lev et Borel.
Pour un travail sans précédents, il a
fallu créer de toutes pièces des engins
nouveaux que je monde n'avait jamais
vus. La drague long couloir et l'éléva-
teur, deux machines inventées et .cons- ,1
truites par, M. et pon ami regretté,
ont résolu le plus grand problème de l'in-
dustrie-moierne et rendu un immense ser-
vice à la civilisation.
iIM. A. Lavalley s'apprête à faire mieux
encore ; c'est à lui que les premiers sous-
erip.tttUf.l (du tunnel sous-marin entre la
France et l'Angleterre ont confié le succès
de lei^Lr gigantesque entreprise.
La société des ingénieurs civils l'a élu
président en 1875 ; il est le président de
l'association fondée pour la réforme de
l'énséignement secondaire sous le nom
d'Ecole Monge. Partout où l'on occupe
du. progrès, partout où l'on travaille à la
régénération de la France, vous trouverez
le nom honoré et la sympathique personne
de M. Alexandre Lavalley.
*■ ,-- -."- .., :
« L'état de l'atmosphère plaide victo-
rieusement la cause de M. le baron Hauss-
mann », s'écrie le journal le mieux infor-
mé et le plus sérieux de Paris, et là-des-
sus, il dépeint les fondrières dans lesquel-
les la ville de Paris barbote depuis quel-
ques jours. Ce n'est pas sous l'administra-
tion du baron que se serait vue pareille
chose ! etc.
Le candidat de la boue, cela est bien
trouvé. La parole est à la boue ; la boue
à nos souliers écrit notre devoir. Précieuse
boue ! Si la boue n'existait pas, il faudrait
l'inventer. Les électeurs sont invités à lire
attentivement la réclame électorale que
l'état de l'atmosphère étale si complaisam-
ment sous leurs pieds. Mais, franchement,
s'ils comptent sur la nomination de M.
Haussmann pour nous tirer du gâchis l
F.
La période des réunions publiques
électorales est fermée. Nous serions in-
justes envers notre pays si nous ne si-
gnalions le spectacle admirable que la
France a offert pendant quinze jours.
Sur lifts les points du territoire, le
parti constitutionnel républicain, qui
comprend sans conteste l'immense ma-
jorité de là nation, a fait assaut de
bon sens politique et de patriotisme.
Ainsi se réalisera la parole du premier
président de la République : Au plus
sage ! Nos correspondants de province
nous écrivent : Aujourd'hui nous sen-
tons vraiment que l'avenir nous appar-
tient, que nous n'avons plus rien à re-
douter des compétitions bonapartistes,
monarchistes ou cléricales, enfin que le
gouvernement du pays est à nous.
C'est maintenant par des articles de
journaux, par des distributions de
feuilles volantes et de brochures, que
les hommes des anciens partis ten-
teront, en ces derniers jours, de sollici-
ter les électeurs. Dans ce genre de pro-
pagande, les impérialistes se montrent
naturellement les plus hardis, et le Co-
mité national conservateur (comité Doll-
fus) pousse déjà l'audace jusqu'à en-
voyer des circulaires aux gardes-cham-
pêtres de France, dont il « réclame le
concours. » Ceci, sans préjudice des li-
belle? calomniateurs et factieux tirés à
grand nombre et expédiés dans les 86
départements, sans aucune protestation
de l'honorable M. Buffet. Mais les publi-
cistes de ee parti, comme les monar-
chistes et les cléricaux, en seront pour
leurs frais de papier, d'encre et d'élo-
quence. La réponse du pays n'en sera,
pour eux, que plus écrasante. Et ce
n'est pas plus à l'empire qu'à la cause
de la monarchie, légitime ou non légi-
time, que profiteront les cinq jours de
retraite où nous sommes entrés depuis
hier.
La situation électorale est excel-
lente; il n'y a qu'une voix pour le pro-
clamer. Dans tous les départements où
les républicains l'ont emporté lors de
l'élection du Sénat, le 30 janvier, ils
l'emporteront encore, à plus forte rai-
son, dimanche. Et il s'en trouve bien
peu parmi les autres où le suffrage uni-
versel ne soit pas résolu à réparer les
îrreurs, les surprises où s'est laissé en-
traîner le corps électoral spécial du
énat; consulté pour la première fois.
Une des particularités de la période
que nous traversons, la plus remarqua-
ble et la plus heureuse, c'est que nous
Rivons vu s'établir deux courants bien
distincts, qui se réunissent pour abou-
ir simultanément à un but commun.
Courant de modération dans Paris,
comme dans la plupart des villes ; cou-
uaut démocratique et véritabîcjuent
républicain dans les campagnes. Ici,,
lion a compris que l'avenir des institu-
tions dépendait de l'esprit de mesure et
de sagesse, et que, si l'on allait trop
mte, on risquerait encore de tout gâ-
tjgr. Là, on d'est rendu compte de la
nécessité d'apporter un ferme appui à
la République, si l'on désirait garantir
aux seules institutions possibles au-
jourd'hui la stabilité. Plus d'impruden-
ces, plus de puérils éclats dans les
villes; et, dans les campagnes, plus
d'hésitations, plus de folles frayeurs ni
(te préjugés. Ceux-Jà ont ralenti, ceux-
ci accéléré leur marche. Si bien qu'à
l'heure où nous voici, c'est à peu près
u même pas que les uns et les autres
achèvent cette dernière étape des élec-
tions générales. On sait ce qu'on veut,
on connaît le but où l'on tend, et l'on
s'y dirige sûrement, franchement, sans
se laisser détourner de la route.
Résultats inespérés, presque merveil-
leux. Nous n'emploierons pas de grands
mots pour les expliquer. Il y a une
raison, qui est terre-à-terre et qui nous
suffit, car nous la trouvons excellente ;
c'est que, dans tous les rangs du peu-
ple français, chacun a interrogé ses
intérêts réels, qui disent à quelles
conditions le travail, l'industrie, le
commerce, l'agriculture jouiront enfin
de la sécurité.
Depuis le 30 janvier, nous avons un
Sénat où la majorité est acquise à l'o-
pinion constitutionnelle et républicaine.
Dans la Chambre que nous allons nom-
mer le 20, la majorité constitutionnelle
et républicaine, en ne se rapportant
qu'aux prévisions les moins exagérées,
sera l'une des plus considérables que
l'on ait vues jusqu'à présent dans les
Assemblées librement élues. -Repré-
sentés par des groupes infimes, les
anciens partis y laisseront la France
en repos, et la question de gouverne-
ment, sous une forme ou sous une au-
tre, n'y sera plus continuellement po-
sée. Tout en tenant de moins longues
sessions que l'Assemblée nationale
précédente, la Chambre aura donc plus
de loisir pour l'examen des graves
questions que n'a pu régler une As-
semblée entichée de réaction et sou-
vent égarée en disputes vaines.
Les réformes économiques pourront
bientôt être abordées. il sera possible
de compléter notre réorganisation mili-
taire, en la corrigeant dans ses parties
défectueuses. Il faudra définir à nou-
veau les rapports de l'Etat et des Egli-
ses, pour mettre un obstacle aux enva-
hissements du cléricalisme, qui s'in-
quiète aujourd'hui bien moins de reli-
gion que de politique, et qui prétend
imposer des lois (quelles lois !) à la
société, qu'il espère asservir. Il sera
important surtout, — et ce sera la
tâche la plus urgente de la Chambre
nouvelle, — d'organiser dans toute
l'étendue du pays l'enseignement pri-
maire obligatoire et laïque. C'est la
réforme essentielle, et- l'on verra, au
bout de dix ans, quelles générations in-
telligentes et patriotiques, Quelle France
nouvelle elle aura créée. Nous ne fai-
sons qu'indiquer en courant quelques-
uns des points du programme que les
élus du 20 février ne manqueront point
de mettre à leur ordre du jour. A quoi
bon insister? Voilà l'avenir pacifique et
fécond sur lequel sont fixés dès mainte-
nant les yeux de la France. Si nous
choisissions des ennemis de la consti-
tution républicaine, nous accomplirions
notre suicide. Avec les représentants
républicains que nous élirons, c'est en-
fin l'ère du salut qui va commencer.
EUG. LIÉBERT.
C'EST TOUJOURS LA MÈIIE CHOSE
Vous vous rappelez les vers tout
pleins de mysticisme érotique que j'ai
cités dans un de mes derniers articles.
Une bonne âme m'écrit là-dessus que je
me fais le jeu beau en allant fèuiller
dans de vieux bouquins hors d'usagé
quelques passages ridicules, qui ne peu-
vent scandaliser personne par l'excel-
lente raison que personne ne les lit
plus.
Qu'on ne les lise plus , à la bonne
heure, et je n'y contredis point. Mais
je puis assurer que les ouvrages où se
trouvent ces fadaises surannées se ré-
impriment et se débitent encore de nos
jours. Ce sont des livres de piété. Ils
ont reçu jadis l'approbation d'estima-
bles évêques, dont la dévotion n'était
sans doute, pas fort sensée. Et depuis
lors, aucune révision n'a été faite.
Mais croit-on que le même esprit de
sensualisme mystique qui a inspiré les
inepties maladives de Marie Alacoque
et les dévotes effusions du père Surin
ait disparu de l'Eglise catholique? Il
s'exprime peut-être en meilleur fran-
çais ; il est toujours le même.
Voici les vers que la Semaine reli-
gieuse du diocèse de Nantes, dans son
numéro du 4 juin 1875, donne à chan-
ter aux jeunes communiantes, sans dire
sur quel air :
Il va venir ! encor quelques instants d'attente,
Et son cœur adoré battra contre mon coeur ;
Quelques instants encore, et sa voix ravissante
Viendra me pénétrer de son charme vainqueur,
De ma félicité comment peindre l'ivresse ?
Comment mon faible cœur la peut-il contenir ?
0 miracle d'amour ! prodige de tendresse,
Il va venir !
Quel est cet il dont l'attente inspire
ces transports de désir et d'amour?
C'est Jésus. Mais une jeune fille qui pen-
serait à son amant parlerait-elle d'un
autre style ? ne s'écrierait elle pas :
Venez, mon bien-aimé ! Voyez, déjà l'aurore
A doré nos coteaux de ses feux les plus doux ;
Je languis de désir ; pourquoi tarder encore
A visiter un cœur qui ne bat que pour vous ?
Mais silence!. à mes vœux il daigne condescendre :
Sa présence à mon cœur se fait déjà sentir ;
Que tout autour de moi se taise pour l'entendre ;
Il va venir.
Le divin amant vient enfin, et tout
aussitôt la jeune catéchumène entonne
un nouveau cantique d'actions de
grâces :
Il est à moi, celui que le ciel même,
Que l'univers ne saurait contenir.
Il est à moi ; je l'embrasse, je l'aime,
Rien ici bas ne peut nous désunir.
Il est à moi ! que désirer encore ?
Le possédant, j'ai le ciel ici-bas.
Félicité que l'ange même ignore!
Il m'est uni, je le serre en mes bras.
Ces strophes sont sans aucun doute
d'un séraphisme moins idiot que n'é-
taient les citations que j'avais données
l'autre jour. Mais c'est le même genr
de littérature, renouvelé du Cantique
des cantiques, ce Cantique des canti-
ques, dont l'autorité ecclésiastique a fait
un poème pieux, et qui n'était qu'un
drame amoureux, quelque chose com-
me la Psyché de Molière et de Corneille.
Je parlais hier de l'enseignement lit-
téraire donné à la plupart de nos jeu-
nes filles. Songez que toutes ces sot-
tises (prose ou vers) y entrent pour
une bonne part. Songez que les livres
dits de piété sont presque tous infectés
de ce mysticisme dangereux et bête;
songez qu'il n'y est question que de mi-
racles, d'apparitions, d'histoires à dor-
mir debout, écrites dans une langue
tout à la fois emphatique et puérile.
Depuis un an, il ne se passe guère de
jour où je ne lise quelqu'un delces vou-
lumes que patronne le clergé, sans
parler des innombrables feuilles qu'il
répand à profusion dans les écoles. Je
suis épouvanté et navré de cet excès de
bêtis; et ce qu'il y a de pis, c'est de
la bêtise voulue, préméditée. Il est clair
que les malheureux qui rédigent ces
niaiseries ne sont pas si imbéciles qu'ils
affectent de le paraître.- Il y a chez
eux un" parti pris d'énerver l'intelli-
genee de ceux pour qui ils écrivent.
J'ai là sous les yeux un numéro d'un
journal pieux, dont assurément vous
ne soupçonnez pas l'existence; c'est
l'Echo de Sainte-Philomène, qui entre
en 1876 dans sa cinquième année. Vous
fussiez-vous doutés que sainte Philo-
mène eût un écho ? quel peut bien être
l'écho de sainte Philomène ? et cette
Philomène elle-même, quelle est-elle?
C'est, dit ce journal, la thaumaturge
du XIX Siècle. Savez-vous bien ce que
veut dire au juste « thaumaturge? » le
mot signifie proprement faiseuse de mi-
racles. Ainsi voilà qui est entendu la
fonction de Philomène, c'est de faire
des miracles. Elle est la thaumaturge
du dix-neuvième siècle, comme Mlle
Lenormant en a été la devineresse,
comme M. Alexis en est ou en fut le
magnétiseur.
Il paraît que cette Philomène est
morte à treize ans, et l'on fait remar-
quer, comme une grande merveille,
qu'elle est morte vierge. Si c'est pour
cela qu'on l'a canonisée! Elle a main-
tenant une église qui est consacrée à
son culte particulier. Ce culte date de
1835. A cette époque-là, deux époux
chrétiens, affligés de ne pas avoir d'en-
fants, reçurent des mains d'une dévote
un petit morceau d'os détaché du corps
de la sainte ; l'efficacité de cette reli-
que fut si merveilleuse que, l'année
suivante, le ménage eut une fille. On la
nomma Philomène, en l'honneur de la
sainte, qui avait accompli ce prodige
inconcevable de rendre le courage à
un mari ou la fécondité à sa femme.
« À partir de ce moment, dit la no-
tice, la chapelle de sainte Philomène
devint de plus en plus un but de pèle-
rinage, et les grâces signalées obtenues
dans le nouveau sanctuaire par les
nombreux pèlerins qui venaient y por-
ter leurs prières et leur vœux attestè-
rent de plus en plus que sainte Philo-
mène se complaisait à y être honorée.
Je le demande à une mère de famille
qui reçoit ce journal ou tout autre de
ce genre :
Quelle est l'idée juste que ses en-
fants y cueilleront jamais? Quel sujet
de réflexion y trouveront-ils ?
Qu'y pourront-ils bien apprendre de
vrai et de sensé?
Quel fruit en tireront-ils pour l'a-
vancement de leur esprit, et j'ose mê-
me leur dire pour la morale de leur con-
duite ?
Il m'est tombé parfois sous la main
de ces journaux de modes qui traînent
sur la table du salon. C'est de bien
pauvre littérature que celle qui dort
sous ces couvertures multicolores, Elle
est pourtant moins abêtissante que
celle des feuilles soi-disant dévotes.
Le point par où ces deux genres de
journaux se rapprochent le mieux en-
core, c'est que si l'on trouve dans les
journaux de modes les adresses des
bonnes faiseuses, on rencontre aussi
dans les Echos de Sainte-Philomène
des mentions ainsi conçues (je copie tex-
tuellement) :
« Nos lecteurs trouveront chez Mlle
Anna Brochot, rue ., no ., des cor-
dons et des chapelets bénits ayant-
touché aux reliques de la thauma-
turge. »
L'acier que l'on frotte contre un ai-
mant s'aimante lui-même. Ainsi des
chapelets qui ont touché un os de la
sainte. Ils s'imprègnent de la même
vertu miraculeuse.
Combien coûtent-ils ?
Quand je vois toutes ces misères de
l'esprit clérical, j'ai bien envie de chan-
ter, moi aussi, mais dans d'autres in-
tentions et dans un autre esprit que ces
messieurs, le fameux cantique du Sa-
cré- Coeur :
Pitié,mon Dieu ! pour tant d'hommes stupides,
Vous outrageant, sans savoir ce qu'il font!
Est-il bien vrai qu'ils n'en sachent
rien?
FRANCISQUE SARCEY.
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