Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1876-10-14
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 14 octobre 1876 14 octobre 1876
Description : 1876/10/14 (A6,N1769). 1876/10/14 (A6,N1769).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/04/2013
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Samedi M Oetobre MM
LE XIX SItCLK
JOURNAL REPUBLICAIN CONSERVATEUR
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N9 R4Re DE J^AS'AYCTS®» ffio
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Trois mois. Î8 fr.
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ADMINISTRATION
Adresser lettres et mandats & rAdmWsî?ste«<
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A partir du 1 er novembre
le XIXe SIÈCLE sera im-
primé én caractères neufs.
MM. les Souscripteurs dont
l'abonnement expire le fl5 oe-
tobre sont priés de le renou-
veler Immédiatement, s'ils ne
veulent point éprouver de re-
tard dans la réception du jour-
nal.
BULLETIN
Paris, 13 octobre 1876.
Le Journal officiel d'hier matin publie
le compte général de l'administration de la
justice criminelle en France pendant l'an-
née 1874.
On ne connait pas encore les conditions
dont la Porte accompagne sa proposition
d'armistice. D'après une dépêche du Times,
la Turquie exigerait que la Russie t'engage
à arrêter l'envoi de troupes de volontaires
en Serbie et en Bulgarie, et que la Serbie,
suspendant immédiatement les hostilités,
donne en outre d'autres garanties mili-
taires. Enfin les Turcs ne veulent prendre
rengagement de cet armistice qu'à l'égard
des puissances garantes et non directement
avec la Serbie. La Porte consent aussi à se
faire représenter à une conférence pourvu
qu'il soit stipulé qu'on ne s'occupera pas,
dans cette conférence, d'autres questions
que de l'affaire serbe, et des réformes d'a-
près le programme qu'elle a proposé.
Si ces conditions sont celles qu'impose,
en effet, la Turquie, il est bien difficile que
l'on arrive à un arrangement. Le Nord,
d'ailleurs, ne se fait pas d'illusions. Après
avoir récapitulé les raisons qui militent
contre l'adoption par la Serbie d'un armis.
tice de six mois ; après avoir fait remar-
quer que la Porte se garde bien d'indiquer
qu'elle accepte les propositions de paix
formulées par l'Angleterre, la feuille oill -
cieuae russe ajoute : « Tout cela fait paraî-
tre sous un jour bien peu satisfaisant les
propositions d'armistice que la Porte vient
de communiquer aux puissances. Nous
craignons fort que tous l'apparence d'une
concession, elles ne cachent le parti-pris
de résister aux réclamations légitimes et
modérées du concert européen. »
D'après les informatiens de la Nouvelle
Presse libre, la Turquie aurait l'intention
de remettre aux puissances garantes, par
l'entremise de ses ambassadeurs, un nou-
veau mémoire qui dépeindrait en détail la
situation actuelle de la Porte ottomane et
s'attacherait à justifier l'attitude du gou-
vernement turc vis-à-vis des propositions
de paix.
La presse autrichienne est vivement
mue des révélations faites par quelques
journaux allemands, relativement à un
traité d'alliance entre la Russie et l'Italie
dont nous avons parlé il y a quelques
jours. Elle se passionne surtout au sujet
des demandes de rectifications des frontiè-
res qu'ont soulevées plusieurs journaux
italiens.
Un organe semi-officiel de Vienne, la
Revue du lundi, conseille « aux broyants
politiques qui abondent présentement en
Italie » de réfléchir avant de lancer de
semblables idées dans la circulation, et
trouve que le moment est mal choisi pour
soulever la question d'une rectification de
frontières.
Le voyage du grand-duc héritier de
Russie à Livadia attire beaucoup l'atten.
tion. On fait de nouveau courir le bruit
d'une abdication de l'empereur de Russie.
♦
BOURSE DE PARIS
a ————
ClStartlell octob"* leIZoctob". Banane Mages*
S o/o
Comptant 71 65 71 42 1/2 22 1/2
Fineonr. 71 70 71 40 .f. 30
4 fl/SO/O
Oovptant 101 50 101 60 .1. 10
m o/o
Comptant 10625 106 10 .1. 15 ./,
nu tour. 106 42 12 106 32 1/2 10
PBTITB BOURSE DU SOI*
Emprunt 3 0/0.. 71 fr. 30, 25.
Emprunt 5 0/i. 106 fr. 20, 15, 22 1/2,
16 1/4.
6 0/0 turo 12 fr., 12 f. 10, 11 f. 95,
97 1/2.
Banque Ottomane. 375 fr.
RlYPtiea. 110 fr. 621/2.
+•—:
L'ARMISTICE
Les espérances exagérées qu'avait fait
naître la dépêche de Constantinople an-
nonçant la conclusion d'un armistice de
six mois ont été vite déçues. Le pre-
mier mouvement a été tout de surprise
et de contentement, puis la réflexion est
venue et on s'est demandé comment il
se faisait que la Porte accordât six mois
de trêve alors que les puissances ne lui
en demandaient qu'un. On s'est demandé
aussi quelles sont les conditions que le
gouvernement turc met à l'armistice,
conditions que le divan devait faire con-
naître immédiatement et qui, cependant,
ne nous sont pas encore parvenues.
Motifs et conditions sont faciles à
indiquer et résultent clairement de la
situation difficile dans laquelle se trouve
placée la Porte entre ses sujets et les
puissances. Epuisé déjà par l'insurrec-
tion de l'Herzégovine et de la Bosnie,
qu'il n'avait su ni vaincre ni apaiser par
des concessions opportunes, et qui eus-
sent été de nature à contenter les puis-
sances, le gouvernement turc a dû tout
à coup trouver les moyens de faire face
à la Serbie et au Monténégro. Dépourvu
de toutes ressources, obligé d'avoir re-
cours à des emprunts usuraires pour
assurer les besoins essentiels de ses ar-
mées, il a dû faire appel au fanatisme re-
ligieux pour se procurer des soldats.
L'appel a été entendu; mais le résultat
était facile à prévoir : ces mêmes fa-
natiques, à qui on s'est bien gardé
d'avouer, de laisser soupçonner même
que les armes ottomanes n'ont pas
toujours été victorieuses, ne veulent
entendre parler de paix qu'au prix de
la soumission complète, absolue, de la
Serbie et du Monténégro. Faire la paix
à toute autre condition, ce serait cer-
tainement risquer une révolution à Con-
stantinople.
En outre, l'hiver s'approche à grands
pas. Les soldats ottomans, mal vêtus,
mal nourris, venant pour la plupart de
régions plus chaudes, sont peu propres
à supporter les fatigues d'une campa-
gne d'hiver sous un climat aussi rude
que celui de la presqu'île des Balkans.
Où trouver, d'ailleurs, les fonds né-
cessaires pour subvenir aux dépenses
indispensables, qui augmenteront cer-
tainement pendant la mauvaise saison ?
Nous ne prétendons certes pas savoir
ce qui s'est passé au sein du grand con-
seil où a été décidée la proposition d'un
armistice de six mois, mais il est évident
que ces considérations ont dû peser
sur les déterminations de la Porte.
Un armistice de six mois, en effet, sup-
prime la campagne d'hiver et permet
à la Porte de renvoyer ses soldats dans
leurs foyers, pour les rappeler au prin-
temps s'il est nécessaire. Mais un ar-
mistice d'une aussi longue durée offre
surtout cet avantage de ne pas com-
promettre la Porte auprès de ses sujets.
La populace de Constantinople verra
les soldats regagner leurs provinces,
elle apprendra en même temps que les
troupes turques occupent Alexinatz, —
on dit que c'est là une condition que la
Porte mat à l'armistice, — elle croira
donc que la guerre est terminée et qu'elle
s'est achevée de façon à satisfaire l'or-
gueil musulman.
Le plan, il faut l'avouer, est habile-
ment conçu, car, en même temps qu'on
évite une commotion intérieure, on
semble aller au devant des désirs des
puissances, en leur offrant plus qu'elles
ne demandent. Peut-être même l'habi-
leté est-elle trop grande ; on y découvre
trop la finesse, la ruse du demi-sau-
vage ; puis, le manque d'invention est
manifeste. Il n'y a pas quinze jours, en
effet, la Porte usait déjà du même
moyen. Aux propositions de paix formu-
lées par l'Angleterre, elle répondait en
décrétant des réformes qui devaient
s'appliquer à tout l'empire ; elle avait
l'air de s'indigner qu'on pût lui prêter
la pensée de ne pas faire participer
tous ses sujets, quelle que soit leur re-
ligion, quelle que soit leur nationalité,
aux bienfaits dont elle désirait combler
les Bosniaques et les Herzégoviniens.
Mais elle refusait un protocole pour as-
surer ces bienfaits à ces derniers sous
la garantie de l'Europe. A quoi bon,
puisque tout l'empire devait être placé
sous le régime de l'égalité la plus par-
faite ? Los chrétiens ne sont-ils pas, au
même titre que les musulmans, les su-
jets bien-aimés du sultan ?
Les puissances n'ont pas voulu se
laisser prendre à ce piège grossier. Elles
savent trop, par une longue expérience,
ce qu'il faut penser des promesses de
la Porte. Et, cependant, cette dernière
n'a pas hésité à tendre le même piége
pour la conclusion d'un armistice. Elle
sera bien vite désabusée.
Comment admettre, en effet, que la
Serbie, dont les intérêts sont absolument
contraires à ceux de la Porte, consente
à accepter un armistice de six mois ?
Les paysans qui constituent la plus
grande partie de son armée sont en-
durcis aux rigueurs du climat et ont
par cela seul un avantage considérable
sur les Turcs. En outre, la Serbie n'a
qu'une armée active insignifiante et
ses forces militaires se composent pres-
que exclusivement de milices.
Le gouvernement serbe ne pourrait
donc pas maintenir pendant tout ce
temps ses troupes sous les armes ; il
devrait dissoudre la plus grande partie
de son armée et rappeler les hommes
sous les drapeaux au mois de mars ou
d'avril, si les hostilités devaient recom-
mencer. Il perdrait donc ainsi tout le
fruit du travail d'organisation militaire
qui, depuis le début de la guerre, a fait
des progrès sensibles. Peut-il, en outre,
laisser pendant tout ce temps une par-
tie, si petite qu'elle soit, de la princi-
pauté à la merci des troupes turques?
- Cela - n'est pas admissible.
Il y a donc tout lieu de croire que la
Serbie repoussera l'offre qui lui est faite
et aucune puissance ne saurait l'en
blâmer. La demande d'armistice pré-
sentée par l'Angleterre et à laquelle la
Turquie vient de répondre par une
échappatoire est-elle le dernier mot de
la diplomatie et allons-nous entrer dans
la période d'action, ainsi que le deman-
dait, il y a quelques jours, l'organe otli-
cieux de M. de Bismarck ï Peut-être.
Nous croyons cependant qu'on va es-
sayer de reprendre les négociations sur
de nouvelles bases. Mais il faut avouer
qu'il devient de jour plus difficile d'es-
pérer un arrangement pacifique, car
les cabinets les plus amis de la Porte
commencent à être terriblement fati-
gués des continuelle fins de non rece-
voir qu'elle oppose à toutes les propo-
sitions sérieuses.
E. BARBIER.
—
LEUR* RECONNAISSANCE
Ceci n'est qu'une toute petite histoire,
mais elle est d'hier et elle ne laisse pas
d'être piquante. C'est le correspondant
marseillais du Siècle qui nous l'apporte.
M. Thiers était à Marseille ces jours
derniers, et nos lecteurs ont vu quel ac-
cueil a fait sa ville natale au libérateur
du territoire. Il a reçu nombre de visi-
teurs parmi lesquels les personnages
officiels n'ont pas été les derniers. L'ar-
mée, la haute administration, le bar-
reau, la magistrature, ont franchi le
seuil de l'hôtel de Noailles, et le préfet,
retenu à Paris par le ministre de l'inté-
rieur, a délégué par dépêche un conseil-
ler de préfecture, M. Dedebat, pour re-
cevoir M. Thiers et le complimenter.
Un seul personnage s'est abstenu de
toute marque de politesse. Il n'a fait
aucune visite, envoyé aucune carte, dé-
légué aucun représentant. Ce person-
nage, c'est. M. Place, évêque de Mar-
seille.
Il y avait pourtant quelque raison par-
ticulière pour que le nom de M. Thiers
fût moins inconnu à M. Place qu'à tout
autre. M. Place a un frère, et ce frère
était, il y a peu d'années, consul de
France aux Etats Unis. Ce frère a fait
quelque bruit dans le monde, et l'on
sait, hélas ! quel bruit. L'histoire est
douloureuse, et nous n'avons nulle en-
vie d'en redire les tristes détails. L'an-
cien consul de France fut condamné à
plusieurs années de prison.
M. Thiers était alors président de la
République.
M. l'évêque de Marseille fit ce qu'un
bon frère fait en pareille occasion.
N'ayant pu sauver l'honneur de son
frère, il essaya du moins de lui épar-
gner l'expiation. Il alla trouver le pré-
sident de la République, intercéda, sol-
licita une grâce, et la grâce fut accor-
dée. L'ancien consul de France, au lieu
de tresser des chaussons de lisières
comme tant d'autres condamnés, fat
rendu à la liberté.
M. Thiers, passant à Marseille quatre
ans après, avait peut-être droit de la
part de M. Place à un remercîment ou
a une visite de politesse. Il s'y atten-
dait du moins, paraît-il, car on annonce
qu'il a remarqué cet oubli de mémoire
de l'évêché et l'a signalé à ses amis.
La Rochefoucauld a dit, et la prati-
que témoigne que beaucoup sont de son
avis, que l'ingratitude est l'indépen-
dance du cœur : il aurait pu ajouter
qu'il est tel cas, toutefois, où elle n'est
pas la plus grande des habiletés.
CHARLES BIGOT.
————— —————
LEUR PATRIOTISME
Un groupé de pèlerins nantais sont
allés récemment visiter le pape au Va-
tican, lui ont lu deux adresses et ont
écouté un discours de lui, Rien de
mieux assurément que ces échanges de
paroles flliales et paternelles entre fi.
dèles et souverain pontife ; mais voici
où notre contentement s'arrête.
L'adresse présentée à Pie IX, au
nom du clergé du diocèse de Nantes,
contient les paragraphes suivants :
En traversant cette ville suinte, nous avons
retrouvé la trace du sang de nos frères, versé
pour la défense des droits de l'Eglise et du vi-
caire de Jésus Christ; mais qu'il nous aoit per-
mis de le dire, le dévouement qui inspira leur
courage vit toujours ardent dans nos âmes.
Et celui-ci encore :
Chaque jour qui prolonge votre captivité avec
la violation permanente des droits du saint-
siège accroît cet amour qui domine en nos
&mes tous les amours de ce monde. Chaque
blasphèm, de vos ennemis, qui sont les nôtres,
le rend plus fort; chaque persécution le dilate
davantage.
Et cet autre également :
Nous croyons que l'injustice et la violence ne
peuvent être finalement victorieuses, et nous
portons en nos âmes l'invincible espoir que
tant de prières, unies aux vôtres et à la vertu
de vos sonffranes, obtiendront du divin Maî-
tre, pour 1 Eglise et pour Votre Sainteté, un
incomparable triomphe.
On ne niera pas, nous l'imaginons,
que c'est le gouvernement italien que
visent ces divers passages. Ceux qui
parlent ainsi d'un gouvernement ami de
la France sont des fonctionnaires de
notre pays, des gens qui émargent à
notre budget. Et quel moment choisis-
sent-ils pour tenir un pareil langage ?
Le moment où une situation politique de
la plus extrême gravité préoccupe
tous les esprits sérieux ; où il n'est pas
un bon citoyen qui veuille se hasarder
à prononcer ou à écrire une parole té.
méraire, où la France, accablée encore
du poids des désastres de 1870, sent
qu'elle n'a pas trop de toute sa pru-
dence pour se diriger au milieu des
complications européennes. C'est ce mo-
ment même que prennent des membres
du clergé nantais pour aller au Vati-
can provoquer l'Italie et assurer Pie IX
qu'il peut toujours compter sur l'épée
de la Bretagne.
Heureusement les Italiens sont gens
sensés que ne touchent guère les intem-
pérances de langue. A l'agression du
clergé nantais, l'Italie se borne à ré-
pondre avec sang-froid :
Nous serions curieux de savoir de quel
sang parle le chef des pèlerins bretons. Les
seules traoessde sang que nous connaissions
sont oelles laissées par les malheureux Ro-
mains qui ont succombé sous les coups des
mercenaires étrangers venus de tous les
coins du monde, la plupart gens sans aveu,
et dont le moins qu'on puisse dire, c'est qu'ils
ont fait le métier de gendarmes pour oppri-
mer un peuple qui les haïssait et qui avait le
droit de proclamer .bien haut que les étran-
gers devaient rester chez eux et qu'il voulait
être maître chez lui.
Et l'Italie dit encore :
Les pèlerins annoncent que le dévouement
qui inspira la courage de ces mercenaires vit
toujours ardent dans l'âme des Bretons. Nous
avons en trop haute estime ces nobles popu-
lations pour les défendre de cette calomnie.
Les dernières élections ont prouvé combien
les idées nouvelles ont pénétré dans les pro-
vinces les plus reculées de la Bretagne. On
pourrait dès lors demander à ces messieurs
qui leur a donné le mandat de parler au nom
des Bretons.
Et elle ajoute avec une calme ironie :
Il est vraiment plaisant d'entendre les pô
lerins parler de et captivité P, de 4 persécu-
tion >, de « délivrance, » dans une ville où
ils peuvent non-seulement prononcer au Va-
tican, mais aussi publier impunément dans
les journaux de Rome des discours qui sont
de véritables violations de nos lois.
L'Italie a raison de dédaigner et de
sourire. On est assez au courant au-
delà des monts des véritables senti-
ments de notre pays pour ne pas con-
fondre la France avec quelques centai-
nes de fanatiques disséminés ici et là
et prêts toujours à précipiter leur pays
dans les pires calamités sur le signe
d'un prêtre romain. Il nous est moins
facile, à nous autres, Français, de pren-
dre notre parti de ce fanatisme, nous
dont il compromet sans cesse la sécu-
rité.
Veuillot, Coquille, Poujoulat, Bes-
lay fils, vous qui nous célébrez sans
cesse le patriotisme clérical, vous qui
réclamez pour les vôtres le monopole
de l'amour de la patrie, dites-nous, s'il
vous plaît, ce que vous pensez de l'a-
dresse de ce clergé nantais qui fait
tout pour qu'une guerre européenne
éclatant, l'Italie elle-même soit notre
ennemie. -
CHARLES BIGOT.
+
La cour a rendu son arrêt dans l'affaire
du P. du Lac et det journaux la Tribune et
les Droits de l'Homme. Elle a confirmé le
jugement du tribunal de première ins-
tance, mais en fixant à deux cents francs
le prix de l'insertion ordonnée dans les
journaux. C'est le dernier point seulement
que nous voulons relever. Nous avons
maintes fois demandé que les tribunaux,
lorsqu'ils ordonnent l'insertion d'un juge-
ment par la presse, fixent en même temps
le prix de l'insertion. Des faite que nos lec-
teurs n'ont pas oubliés ont prouvé quels
abus peuvent se produire lorsque le prix
de cette insertion n'est pas fixé par la justice,
et nous voudrions voir devenir une règle
générale de la jurisprudence cette pratique
dont l'exemple d'hier n'est pas le premier.
L'insertion d'un jugement dans la presse
n'est pas seulement une publication faite
au profit de la partie gagnante ; elle est
aussi une véritable amende infligée à la
partie perdante ; et quand la justice croit
devoir infliger une amende, il n'est qu'équi-
table qu'elle en fixe le chiffre exactement.
C. B.
———————— ♦—
- Les - - Coups de -- - balai
«MM-IMMW
Lansade et Roussel me font l'effet
de Jean qui pleure et de Jean qui rit.
Lansade a le vin triste; il gémit sur sa
vigne ; il lance contre moi autant de
malédictions que j'ai déchaîné de phyl-
loxéras. C'est l'Héraclite de V Univers.
Roussel (sauf votre respect) est plus
gai. Il a plus de cœur à persifler,n'ayant
d'autre vigne que celle du Seigneur, et
ne craignant pas que je me venge de
ses railleries en métamorphosant les
insectes en vers.
Vous vous rappelez que l'autre jour
il avait comparé l'abbé Dabras à Po-
lyeucte, puis à Domange. Polyeucte,
c'était une concession à M. de Lansade,
qui est un propriétaire aussi distingué
que malheureux, et qui aime les compa-
raisons nobles. Domange, c'était pour
rester dans la note chère au journal
que rédige en chef l'auteur des Odeurs
de Paris et de Rome.
— M. l'abbé Debras, s'était écrié
Roussel, a bien voulu faire la besogne
de M. Domange. Est-on coupable pour
avoir témoigné d'un zèle aussi dévot ?
Et moi, j'avais répondu avec mon or-
dinaire bonhomie :
— Oui, Roussel, on est coupable
d'aller sur les brisées de M. Domange.
On lui fait tort en touchant à sa mar-
chandise, et il est juste que tout préju-
dice se paie.
C'est là-dessus qu'Auguste Roussel
(sauf votre respect), m'entreprend avec
la finesse d'ironie qui lui est habituelle.
Laissons la parole à Auguste Roussel :
M. Sarcey dit son mot sur le cas des im-
mondices étalées dans la rue. D'après son
avis, le coupable n'est pas celui qui les ré-
pand, mais celui qui se permettrait de les
enlever sans autorisation. A la bonne heure,
et nous avons du moins à reconnaître ici la
franchise d'un adversaire qui en a manqué
plus d'une fois. Nous nous étions toujours
doutés que M. Saroey nourrissait quelque
rancune contre les gens qui doivent tenir la
rue propre, et la raison en est simple : c'est
que s'ils faisaient convenablement leur beso-
gne, le XIXe Siècle tâterait souvent de leur
balai.
Vous vous trompez, Roussel ; ce n'est
pas moi qui ai jamais nourri la moindre
rancune contre les gens qui doivent
tenir la rue propre. Sachez, ami Rous-
sel, que vos railleries tombent sur un
autre que sur moi.
Et cet autre, voulez.vous que je vous
le nomme ?
Vous devriez le connaître, ami Rous-
sel ; car c'est votre patron. Oui, c'est
Louis Veuillot en personne, votre chef,
votre modèle, le grand, l'unique, l'in-
comparable Louis Veuillot.
Vous n'avez pas fait une étude assez
approfondie de ses ouvrages. Je vous
avouerai que je m'amuse quelquefois à
les lire, et je sais l'opinion qu'il pro-
fesse sur le balayage des grandes villes.
Vous n'avez qu'à ouvrir les Odeurs
de Paris à la page 433 ; vous verrez
avec quelle éloquente sympathie M.
Louis Veuillot s'extasie sur cette aima-
ble saleté qui était jadis un des char-
mes les plus enivrants de la Rome pa-
pale.
Il la préfère de beaucoup à la dégoû-
tante propreté qu'une méticuleuse po-
lice, soutenue d'une armée de balayeurs
immondes, entretient à Paris.
« Dans l'ancienne Rome, écrit-il, on
rencontrait parfois des épisodes à la
Téniers, qui sont moins fréquents, je
l'avoue, dans les rues de Paris. Mais
tout compte fait, un goujat dans cet état
de nature qui force à détourner les yeux
est moins salissant à voir qu'un ser-
gent de ville. Le goujat ne me force
qu'à prendre le large, le sergent de
ville me coupe le chemin. »
Vous le voyez, ami Roussel. Entre un
sergent de ville, un ignoble sergent de
ville, et ce pieux goujat, dans la
posture ci-dessus mentionnée, votre pa.
tron n'hésite pas : il préfère celui qui
ajoute un parfum aux odeurs de Rome.
C'est que, comme il le dit lui-même,
dans ce même chapitre, un peu plus
loin : « L'empire du monde appartient
aux peuples malpropres ;. les Mosco-
vites se flattent de prendre l'empire du
monde. Ce triomphe ne dépend pas de
leurs progrès dans la civilisation, mais
de la force et de la durée de leur goût
pour le suif et pour la chandelle. »
Et d'où vient que l'empire du monde
soit ainsi promis aux peuples malpropres?
M. Louis Veuillot en donne la rai-
son, qui est des plus topiques et des
plus concluantes :
« C'est que le corps humain est fait
de saleté et d'ordures. Dieu le tira de
la boue ; naturellement il ne peut trou-
ver de force que dans ses principes cons-
tituants. »
Il n'y a rien à répondre à cette lo-
gique. Elle est accablante.
Elle a encore cet avantage de nous
expliquer pourquoi les rédacteurs de
l'Univers sont de si robustes polé-
mistes.
C'est apparemment qu'ils gardent avec
soin leurs principes constituants, et
qu'ils y puisent une force toujours nou-
velle.
Le bienheureux Labre a gardé toute
sa vie, avec une constance héroïque,
ses principes constituants ; aussi, dans
ce siècle relâché,dans ce siècle de savon,
il a pu rendre à Dieu son corps tel qu'il
l'avait reçu, un composé de saleté et
d'ordures, et il a mérité par là de deve-
nir un des plus grands saints du para-
dis.
Jamais au XIXe Siècle nous n'attein-
drons à ce degré de perfection où
l'Univers aspire. Humilions-nous, mes
frères, et frappons-nous la poitrine.
Nous ne serons jamais des hommes
forts, ayant pris la déplorable habitude
de nous débarrasser tous les matins de
nos principes constituants.
FRANCISQUE SARCEY.
Nouvelles d'Orient
Raguse, 11 octobre, soir.
Le 8 octobre, le chef monténégrin Dako-
vitch a brûlé non seulement LiubiDje, mais
encore tous les village du district.
Les Tares ont perdu 1,400 hommes ; les
Monténégrins 132.
Moakhtar-Pacha, interrogé sur l'infraction
à la trêve qu'il a commise, a répondu que la
trêve ne lui avait pas été notifiée.
Daux soldats monténégrins blessés dans le
combat du 7, transportés à l'hôpital de Klo-
buk, ont été, dit-on, décapités.
Constantinople, 11 octobre soir.
Les conditions de l'armistice de six mois
accordé hier par la Porte, qui devaient être
communiquées cette après-midi aux puissan-
ces, ne le seront que ce soir.
Une commission constitués sous la prési-
dence de Midhat-Pacha fixera le règlement de
l'assemblée élective et du Sénat.
La duchesse d'Edimbourg a passé hier à
Constantinople, ce rendant à Malte.
Londrel, 12 octobre.
Le Times publie la dépêche suivante datée
de Berlin :
La Turquie a résolu d'accorder un armis-
tice de six mois, si la Russie s'engage à arrê-
ter l'envoi de troupes de volontaires en Ser-
bie et en Bulgarie, et si la Serbie, suspendant
immédiatement les hostilités, donne en outre
d'autres garanties militaires. Les Turcs ne
veulent prendre l'engagement de cet armis-
tice qu'à l'égard des puissances garantes et
non directement avec la Serbie. La Porte
consent aussi à se faire représenter à une
conférence pourvu qu'il soit stipulé qu'on ne
l'occupera pas, dans cette conférence, d'au-
tres questions que de l'affaire serbe et des ré.
formes d'après le programme qu'elle a pro- -
posé. Aucun représentant des Serbes et des
raïas ne devra y être admis.
La ville d'Odessa est remplie de troupes et
de volontaires ; de nombreux navires de
transports sont prêts dans les ports rosses
de la mer Noire pour l'envoi de troupes.
La Dailll-Telegraph publie la dépêche sui.
vante de Constantinople :
La Turquie propose d'occuper pendant l'ar-
mistice, mais seutementproformd, les parties
du territoire serbe déjà au pouvoir de ses ar-
mes ; elle retirerait le gros de l'armée, ne
laissant que quelques troupes sur les hau-
teurs, en face d'A!exinatz et de Deligrad, et
renvoyant le reste de l'armée à ses quartiers
d'hiver.
Le corps diplomatique à Constantinople
considère comme équitables les aemandes de
la Turquie.
Londres, 12 octobre, matin.
Cette nuit le Foreign-Office n'avait pas en-
core reçu la notification officielle attendue, et
le secret le plus grand a été gardé à Cons-
tantinople sur les conditions de l'armistice.
En conséquence, les conditions diverses in-
diquées de différentes sources comme étant
mises par la Turquie à l'offre d'un armistice
sont jusqu'à présent considérées comme dM
hypothèse., d'ailleurs faciles à déduira de la
situation réciproque des armées turco serbes.
Belgrade, Il octobre.
Le président du conseil, M. Steftcha, est
parti pour l'intérieur, à l'effet de surveiller
la distribution des secours aux familles qui
se sont réfugiées en Serbie et pour faire une
enquête sur l'état général du pays.
On organise en ce moment à Belgrade un
régiment de lanciers formé de volontaires al-
lemands.
Le colonel Byzantios, de l'armée grecque,
est retourné à Athènes, après avoir échoué
dans sa tentative pour former une légion
grecque à Belgrade.
Vienne, 12 octobre.
La Nouvelle Presse libre prétend que le czar
serait disposé à abdiquer sous certaines con-
ditions, et que le czarewitch aurait été ap-
pelé à Livacbia à ce sujet.
Le Tagblatt croit savoir que la Serbie re-
poussera l'armistice de six mois.
La Presse dit que la Porté suit dans la
question de l'armistice la même tactique que
dacs la question des réformes en allant au
delà des concessions demandées par les'puis-
sances.
Pesth, 12 ootobre.
Les journaux le Eon et YEllenor jugent les
propositions turques dans un sens pessimiste
et disent que'la Forte vent conduire les puis-
sances ad absurdum.
Baden-Baden, 12 octobre.
Le roi de Grèce est allé voir hier dans
l'après-midi l'empereur d'Allemagne, qui lui
a rendu sa visite. Le roi Georges a dîné chez
l'empereur et a pripâ neuf heures le thé chez
le grand-duc. Il est parti ce matin à 1 heure
10 minutes pour Rumpenheim.
Constantinople, 12 octobre.
Voici les conditions auxquelles la Porte
subordonne l'armistice :
1* Empêcher la réoccupation par les Serbes
des positions actuellement au pouvoir de
l'armée turque.
2S Interdire toute introduction d'armes et
de munitions dans les deux principautés.
3* Empêcher d'une manière efficace le pas-
sage des volontaires étrangers.
4' Empêcher tout secours de la part des
deux principautés aux provinces insurgées
limitrophes.
Belgrade, 12 octobre.
Le gouvernement serbe n'a pas encore été
avisé officiellement de l'armistice.
Vienne, 12 octobre, 4 h. 112 s.
Le Tagblatt prétend que toutes les grandes
puissances auraient déclaré absolument inac-
ceptable l'armistice de six mois accordé par
la Porte. (Cette nouvelle, dit notre corres-
pondant de Vienne, paraît dénuée de fonde-
ment, les conditions de l'armistice étant en-
core inconnues ici. à l'heure qu'il est.)
Le Tagblatt publie aussi un télégramme à
sensation de St-Pétersbourg, disant que le fait
de l'appel du ministre des finances par le czar
à Livadia semble se rattacher aux bruits de
guerre ; il serait en effet question, prétend
ce télégramme, d'un emprunt national de
deux cents millions de roubles.
Suivant une dépêche de Berlin publiée par
le Times, la Société de navigation austro-da-
nubienne s'est refusée à transporter à l'ave-
nir des volontaires russes en Serbie.
Le Morning Post annonce que la nouvelle
s'est répandue que l'Autriche vient de rou-
vrir le port de Klek aux bâtiments de la ma-
rine ottomane.
Le Daily Nevos publie les dépêches sui-
vantes :
Berlin. Il octobre.
L'acceptation par la Porte d'un armistice
est considéréepar la presse berlinoise comme
ne facilitant qu'imparfaitement la tâche de la
diplomatie. La Gazette nationale dit qu'il y a
une voie difficile et longue à parcourir entre
un armistice et la paix. La sincérité de la ré-
solution de la Porie est mise en doute, et la
Post a reçu de Constantinople un télégramme
d'après lequel les conditions de l'armistice
seraient que la Russie arrêtât l'affluence de
ses volontaires en Serbie, que dans le con-
grès prochain l'intégrité de la Turquie fût
présupposée et que les représentants des
Etats vassaux fussent exclas du congrès.
Vienne, 11 octobre.
La Porte n'a pas encore répondu à l'ironi-
que proposition que lui a faite la Roumanie
d'occuper la frontière orientale de la princi.
pauté avec des troupes tarques pour empê-
cher le passage des volontaires russes, la
Roumanie étant obligée par traité à s'opposer
à ce passage.
Dsligrad, 9 octobre.
Le docteur Marsden, chirurgien anglais, con-
firme l'exactitude des faits rapportés dans la
dépêche oùTchernaïeff raconte que les Turcs
ont fait mourir dans les supplices les pri.
sonniers serbes.
Trébigne, Il octobre.
Le combat de samedi a été un véritable
succès pour les Turcs, qui occupent mainte-
nant Dohellon, entre Grahovo et Niksitch.
Samedi M Oetobre MM
LE XIX SItCLK
JOURNAL REPUBLICAIN CONSERVATEUR
> RÉDACTION
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à - minuit
N9 R4Re DE J^AS'AYCTS®» ffio
99 lettres um affranchies lerw nflutm
ABOHRillEITS
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Trois mois. Î8 fr.
Six mois..*..»..»*.» 25
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Trois mois6^«.«, 16 tfr
Six mois. /Si \',
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ADMINISTRATION
Adresser lettres et mandats & rAdmWsî?ste«<
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Trois mois. i3 fr.
Six moia. 25
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Trois mois..».,,.; 16 tir.:
Six mois **' 12
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bilODeM, chez MM. LAGRANGE, CERF et. St
œ. JJIaM ais la 55®*LH*<»„ œ
A partir du 1 er novembre
le XIXe SIÈCLE sera im-
primé én caractères neufs.
MM. les Souscripteurs dont
l'abonnement expire le fl5 oe-
tobre sont priés de le renou-
veler Immédiatement, s'ils ne
veulent point éprouver de re-
tard dans la réception du jour-
nal.
BULLETIN
Paris, 13 octobre 1876.
Le Journal officiel d'hier matin publie
le compte général de l'administration de la
justice criminelle en France pendant l'an-
née 1874.
On ne connait pas encore les conditions
dont la Porte accompagne sa proposition
d'armistice. D'après une dépêche du Times,
la Turquie exigerait que la Russie t'engage
à arrêter l'envoi de troupes de volontaires
en Serbie et en Bulgarie, et que la Serbie,
suspendant immédiatement les hostilités,
donne en outre d'autres garanties mili-
taires. Enfin les Turcs ne veulent prendre
rengagement de cet armistice qu'à l'égard
des puissances garantes et non directement
avec la Serbie. La Porte consent aussi à se
faire représenter à une conférence pourvu
qu'il soit stipulé qu'on ne s'occupera pas,
dans cette conférence, d'autres questions
que de l'affaire serbe, et des réformes d'a-
près le programme qu'elle a proposé.
Si ces conditions sont celles qu'impose,
en effet, la Turquie, il est bien difficile que
l'on arrive à un arrangement. Le Nord,
d'ailleurs, ne se fait pas d'illusions. Après
avoir récapitulé les raisons qui militent
contre l'adoption par la Serbie d'un armis.
tice de six mois ; après avoir fait remar-
quer que la Porte se garde bien d'indiquer
qu'elle accepte les propositions de paix
formulées par l'Angleterre, la feuille oill -
cieuae russe ajoute : « Tout cela fait paraî-
tre sous un jour bien peu satisfaisant les
propositions d'armistice que la Porte vient
de communiquer aux puissances. Nous
craignons fort que tous l'apparence d'une
concession, elles ne cachent le parti-pris
de résister aux réclamations légitimes et
modérées du concert européen. »
D'après les informatiens de la Nouvelle
Presse libre, la Turquie aurait l'intention
de remettre aux puissances garantes, par
l'entremise de ses ambassadeurs, un nou-
veau mémoire qui dépeindrait en détail la
situation actuelle de la Porte ottomane et
s'attacherait à justifier l'attitude du gou-
vernement turc vis-à-vis des propositions
de paix.
La presse autrichienne est vivement
mue des révélations faites par quelques
journaux allemands, relativement à un
traité d'alliance entre la Russie et l'Italie
dont nous avons parlé il y a quelques
jours. Elle se passionne surtout au sujet
des demandes de rectifications des frontiè-
res qu'ont soulevées plusieurs journaux
italiens.
Un organe semi-officiel de Vienne, la
Revue du lundi, conseille « aux broyants
politiques qui abondent présentement en
Italie » de réfléchir avant de lancer de
semblables idées dans la circulation, et
trouve que le moment est mal choisi pour
soulever la question d'une rectification de
frontières.
Le voyage du grand-duc héritier de
Russie à Livadia attire beaucoup l'atten.
tion. On fait de nouveau courir le bruit
d'une abdication de l'empereur de Russie.
♦
BOURSE DE PARIS
a ————
ClStartlell octob"* leIZoctob". Banane Mages*
S o/o
Comptant 71 65 71 42 1/2 22 1/2
Fineonr. 71 70 71 40 .f. 30
4 fl/SO/O
Oovptant 101 50 101 60 .1. 10
m o/o
Comptant 10625 106 10 .1. 15 ./,
nu tour. 106 42 12 106 32 1/2 10
PBTITB BOURSE DU SOI*
Emprunt 3 0/0.. 71 fr. 30, 25.
Emprunt 5 0/i. 106 fr. 20, 15, 22 1/2,
16 1/4.
6 0/0 turo 12 fr., 12 f. 10, 11 f. 95,
97 1/2.
Banque Ottomane. 375 fr.
RlYPtiea. 110 fr. 621/2.
+•—:
L'ARMISTICE
Les espérances exagérées qu'avait fait
naître la dépêche de Constantinople an-
nonçant la conclusion d'un armistice de
six mois ont été vite déçues. Le pre-
mier mouvement a été tout de surprise
et de contentement, puis la réflexion est
venue et on s'est demandé comment il
se faisait que la Porte accordât six mois
de trêve alors que les puissances ne lui
en demandaient qu'un. On s'est demandé
aussi quelles sont les conditions que le
gouvernement turc met à l'armistice,
conditions que le divan devait faire con-
naître immédiatement et qui, cependant,
ne nous sont pas encore parvenues.
Motifs et conditions sont faciles à
indiquer et résultent clairement de la
situation difficile dans laquelle se trouve
placée la Porte entre ses sujets et les
puissances. Epuisé déjà par l'insurrec-
tion de l'Herzégovine et de la Bosnie,
qu'il n'avait su ni vaincre ni apaiser par
des concessions opportunes, et qui eus-
sent été de nature à contenter les puis-
sances, le gouvernement turc a dû tout
à coup trouver les moyens de faire face
à la Serbie et au Monténégro. Dépourvu
de toutes ressources, obligé d'avoir re-
cours à des emprunts usuraires pour
assurer les besoins essentiels de ses ar-
mées, il a dû faire appel au fanatisme re-
ligieux pour se procurer des soldats.
L'appel a été entendu; mais le résultat
était facile à prévoir : ces mêmes fa-
natiques, à qui on s'est bien gardé
d'avouer, de laisser soupçonner même
que les armes ottomanes n'ont pas
toujours été victorieuses, ne veulent
entendre parler de paix qu'au prix de
la soumission complète, absolue, de la
Serbie et du Monténégro. Faire la paix
à toute autre condition, ce serait cer-
tainement risquer une révolution à Con-
stantinople.
En outre, l'hiver s'approche à grands
pas. Les soldats ottomans, mal vêtus,
mal nourris, venant pour la plupart de
régions plus chaudes, sont peu propres
à supporter les fatigues d'une campa-
gne d'hiver sous un climat aussi rude
que celui de la presqu'île des Balkans.
Où trouver, d'ailleurs, les fonds né-
cessaires pour subvenir aux dépenses
indispensables, qui augmenteront cer-
tainement pendant la mauvaise saison ?
Nous ne prétendons certes pas savoir
ce qui s'est passé au sein du grand con-
seil où a été décidée la proposition d'un
armistice de six mois, mais il est évident
que ces considérations ont dû peser
sur les déterminations de la Porte.
Un armistice de six mois, en effet, sup-
prime la campagne d'hiver et permet
à la Porte de renvoyer ses soldats dans
leurs foyers, pour les rappeler au prin-
temps s'il est nécessaire. Mais un ar-
mistice d'une aussi longue durée offre
surtout cet avantage de ne pas com-
promettre la Porte auprès de ses sujets.
La populace de Constantinople verra
les soldats regagner leurs provinces,
elle apprendra en même temps que les
troupes turques occupent Alexinatz, —
on dit que c'est là une condition que la
Porte mat à l'armistice, — elle croira
donc que la guerre est terminée et qu'elle
s'est achevée de façon à satisfaire l'or-
gueil musulman.
Le plan, il faut l'avouer, est habile-
ment conçu, car, en même temps qu'on
évite une commotion intérieure, on
semble aller au devant des désirs des
puissances, en leur offrant plus qu'elles
ne demandent. Peut-être même l'habi-
leté est-elle trop grande ; on y découvre
trop la finesse, la ruse du demi-sau-
vage ; puis, le manque d'invention est
manifeste. Il n'y a pas quinze jours, en
effet, la Porte usait déjà du même
moyen. Aux propositions de paix formu-
lées par l'Angleterre, elle répondait en
décrétant des réformes qui devaient
s'appliquer à tout l'empire ; elle avait
l'air de s'indigner qu'on pût lui prêter
la pensée de ne pas faire participer
tous ses sujets, quelle que soit leur re-
ligion, quelle que soit leur nationalité,
aux bienfaits dont elle désirait combler
les Bosniaques et les Herzégoviniens.
Mais elle refusait un protocole pour as-
surer ces bienfaits à ces derniers sous
la garantie de l'Europe. A quoi bon,
puisque tout l'empire devait être placé
sous le régime de l'égalité la plus par-
faite ? Los chrétiens ne sont-ils pas, au
même titre que les musulmans, les su-
jets bien-aimés du sultan ?
Les puissances n'ont pas voulu se
laisser prendre à ce piège grossier. Elles
savent trop, par une longue expérience,
ce qu'il faut penser des promesses de
la Porte. Et, cependant, cette dernière
n'a pas hésité à tendre le même piége
pour la conclusion d'un armistice. Elle
sera bien vite désabusée.
Comment admettre, en effet, que la
Serbie, dont les intérêts sont absolument
contraires à ceux de la Porte, consente
à accepter un armistice de six mois ?
Les paysans qui constituent la plus
grande partie de son armée sont en-
durcis aux rigueurs du climat et ont
par cela seul un avantage considérable
sur les Turcs. En outre, la Serbie n'a
qu'une armée active insignifiante et
ses forces militaires se composent pres-
que exclusivement de milices.
Le gouvernement serbe ne pourrait
donc pas maintenir pendant tout ce
temps ses troupes sous les armes ; il
devrait dissoudre la plus grande partie
de son armée et rappeler les hommes
sous les drapeaux au mois de mars ou
d'avril, si les hostilités devaient recom-
mencer. Il perdrait donc ainsi tout le
fruit du travail d'organisation militaire
qui, depuis le début de la guerre, a fait
des progrès sensibles. Peut-il, en outre,
laisser pendant tout ce temps une par-
tie, si petite qu'elle soit, de la princi-
pauté à la merci des troupes turques?
- Cela - n'est pas admissible.
Il y a donc tout lieu de croire que la
Serbie repoussera l'offre qui lui est faite
et aucune puissance ne saurait l'en
blâmer. La demande d'armistice pré-
sentée par l'Angleterre et à laquelle la
Turquie vient de répondre par une
échappatoire est-elle le dernier mot de
la diplomatie et allons-nous entrer dans
la période d'action, ainsi que le deman-
dait, il y a quelques jours, l'organe otli-
cieux de M. de Bismarck ï Peut-être.
Nous croyons cependant qu'on va es-
sayer de reprendre les négociations sur
de nouvelles bases. Mais il faut avouer
qu'il devient de jour plus difficile d'es-
pérer un arrangement pacifique, car
les cabinets les plus amis de la Porte
commencent à être terriblement fati-
gués des continuelle fins de non rece-
voir qu'elle oppose à toutes les propo-
sitions sérieuses.
E. BARBIER.
—
LEUR* RECONNAISSANCE
Ceci n'est qu'une toute petite histoire,
mais elle est d'hier et elle ne laisse pas
d'être piquante. C'est le correspondant
marseillais du Siècle qui nous l'apporte.
M. Thiers était à Marseille ces jours
derniers, et nos lecteurs ont vu quel ac-
cueil a fait sa ville natale au libérateur
du territoire. Il a reçu nombre de visi-
teurs parmi lesquels les personnages
officiels n'ont pas été les derniers. L'ar-
mée, la haute administration, le bar-
reau, la magistrature, ont franchi le
seuil de l'hôtel de Noailles, et le préfet,
retenu à Paris par le ministre de l'inté-
rieur, a délégué par dépêche un conseil-
ler de préfecture, M. Dedebat, pour re-
cevoir M. Thiers et le complimenter.
Un seul personnage s'est abstenu de
toute marque de politesse. Il n'a fait
aucune visite, envoyé aucune carte, dé-
légué aucun représentant. Ce person-
nage, c'est. M. Place, évêque de Mar-
seille.
Il y avait pourtant quelque raison par-
ticulière pour que le nom de M. Thiers
fût moins inconnu à M. Place qu'à tout
autre. M. Place a un frère, et ce frère
était, il y a peu d'années, consul de
France aux Etats Unis. Ce frère a fait
quelque bruit dans le monde, et l'on
sait, hélas ! quel bruit. L'histoire est
douloureuse, et nous n'avons nulle en-
vie d'en redire les tristes détails. L'an-
cien consul de France fut condamné à
plusieurs années de prison.
M. Thiers était alors président de la
République.
M. l'évêque de Marseille fit ce qu'un
bon frère fait en pareille occasion.
N'ayant pu sauver l'honneur de son
frère, il essaya du moins de lui épar-
gner l'expiation. Il alla trouver le pré-
sident de la République, intercéda, sol-
licita une grâce, et la grâce fut accor-
dée. L'ancien consul de France, au lieu
de tresser des chaussons de lisières
comme tant d'autres condamnés, fat
rendu à la liberté.
M. Thiers, passant à Marseille quatre
ans après, avait peut-être droit de la
part de M. Place à un remercîment ou
a une visite de politesse. Il s'y atten-
dait du moins, paraît-il, car on annonce
qu'il a remarqué cet oubli de mémoire
de l'évêché et l'a signalé à ses amis.
La Rochefoucauld a dit, et la prati-
que témoigne que beaucoup sont de son
avis, que l'ingratitude est l'indépen-
dance du cœur : il aurait pu ajouter
qu'il est tel cas, toutefois, où elle n'est
pas la plus grande des habiletés.
CHARLES BIGOT.
————— —————
LEUR PATRIOTISME
Un groupé de pèlerins nantais sont
allés récemment visiter le pape au Va-
tican, lui ont lu deux adresses et ont
écouté un discours de lui, Rien de
mieux assurément que ces échanges de
paroles flliales et paternelles entre fi.
dèles et souverain pontife ; mais voici
où notre contentement s'arrête.
L'adresse présentée à Pie IX, au
nom du clergé du diocèse de Nantes,
contient les paragraphes suivants :
En traversant cette ville suinte, nous avons
retrouvé la trace du sang de nos frères, versé
pour la défense des droits de l'Eglise et du vi-
caire de Jésus Christ; mais qu'il nous aoit per-
mis de le dire, le dévouement qui inspira leur
courage vit toujours ardent dans nos âmes.
Et celui-ci encore :
Chaque jour qui prolonge votre captivité avec
la violation permanente des droits du saint-
siège accroît cet amour qui domine en nos
&mes tous les amours de ce monde. Chaque
blasphèm, de vos ennemis, qui sont les nôtres,
le rend plus fort; chaque persécution le dilate
davantage.
Et cet autre également :
Nous croyons que l'injustice et la violence ne
peuvent être finalement victorieuses, et nous
portons en nos âmes l'invincible espoir que
tant de prières, unies aux vôtres et à la vertu
de vos sonffranes, obtiendront du divin Maî-
tre, pour 1 Eglise et pour Votre Sainteté, un
incomparable triomphe.
On ne niera pas, nous l'imaginons,
que c'est le gouvernement italien que
visent ces divers passages. Ceux qui
parlent ainsi d'un gouvernement ami de
la France sont des fonctionnaires de
notre pays, des gens qui émargent à
notre budget. Et quel moment choisis-
sent-ils pour tenir un pareil langage ?
Le moment où une situation politique de
la plus extrême gravité préoccupe
tous les esprits sérieux ; où il n'est pas
un bon citoyen qui veuille se hasarder
à prononcer ou à écrire une parole té.
méraire, où la France, accablée encore
du poids des désastres de 1870, sent
qu'elle n'a pas trop de toute sa pru-
dence pour se diriger au milieu des
complications européennes. C'est ce mo-
ment même que prennent des membres
du clergé nantais pour aller au Vati-
can provoquer l'Italie et assurer Pie IX
qu'il peut toujours compter sur l'épée
de la Bretagne.
Heureusement les Italiens sont gens
sensés que ne touchent guère les intem-
pérances de langue. A l'agression du
clergé nantais, l'Italie se borne à ré-
pondre avec sang-froid :
Nous serions curieux de savoir de quel
sang parle le chef des pèlerins bretons. Les
seules traoessde sang que nous connaissions
sont oelles laissées par les malheureux Ro-
mains qui ont succombé sous les coups des
mercenaires étrangers venus de tous les
coins du monde, la plupart gens sans aveu,
et dont le moins qu'on puisse dire, c'est qu'ils
ont fait le métier de gendarmes pour oppri-
mer un peuple qui les haïssait et qui avait le
droit de proclamer .bien haut que les étran-
gers devaient rester chez eux et qu'il voulait
être maître chez lui.
Et l'Italie dit encore :
Les pèlerins annoncent que le dévouement
qui inspira la courage de ces mercenaires vit
toujours ardent dans l'âme des Bretons. Nous
avons en trop haute estime ces nobles popu-
lations pour les défendre de cette calomnie.
Les dernières élections ont prouvé combien
les idées nouvelles ont pénétré dans les pro-
vinces les plus reculées de la Bretagne. On
pourrait dès lors demander à ces messieurs
qui leur a donné le mandat de parler au nom
des Bretons.
Et elle ajoute avec une calme ironie :
Il est vraiment plaisant d'entendre les pô
lerins parler de et captivité P, de 4 persécu-
tion >, de « délivrance, » dans une ville où
ils peuvent non-seulement prononcer au Va-
tican, mais aussi publier impunément dans
les journaux de Rome des discours qui sont
de véritables violations de nos lois.
L'Italie a raison de dédaigner et de
sourire. On est assez au courant au-
delà des monts des véritables senti-
ments de notre pays pour ne pas con-
fondre la France avec quelques centai-
nes de fanatiques disséminés ici et là
et prêts toujours à précipiter leur pays
dans les pires calamités sur le signe
d'un prêtre romain. Il nous est moins
facile, à nous autres, Français, de pren-
dre notre parti de ce fanatisme, nous
dont il compromet sans cesse la sécu-
rité.
Veuillot, Coquille, Poujoulat, Bes-
lay fils, vous qui nous célébrez sans
cesse le patriotisme clérical, vous qui
réclamez pour les vôtres le monopole
de l'amour de la patrie, dites-nous, s'il
vous plaît, ce que vous pensez de l'a-
dresse de ce clergé nantais qui fait
tout pour qu'une guerre européenne
éclatant, l'Italie elle-même soit notre
ennemie. -
CHARLES BIGOT.
+
La cour a rendu son arrêt dans l'affaire
du P. du Lac et det journaux la Tribune et
les Droits de l'Homme. Elle a confirmé le
jugement du tribunal de première ins-
tance, mais en fixant à deux cents francs
le prix de l'insertion ordonnée dans les
journaux. C'est le dernier point seulement
que nous voulons relever. Nous avons
maintes fois demandé que les tribunaux,
lorsqu'ils ordonnent l'insertion d'un juge-
ment par la presse, fixent en même temps
le prix de l'insertion. Des faite que nos lec-
teurs n'ont pas oubliés ont prouvé quels
abus peuvent se produire lorsque le prix
de cette insertion n'est pas fixé par la justice,
et nous voudrions voir devenir une règle
générale de la jurisprudence cette pratique
dont l'exemple d'hier n'est pas le premier.
L'insertion d'un jugement dans la presse
n'est pas seulement une publication faite
au profit de la partie gagnante ; elle est
aussi une véritable amende infligée à la
partie perdante ; et quand la justice croit
devoir infliger une amende, il n'est qu'équi-
table qu'elle en fixe le chiffre exactement.
C. B.
———————— ♦—
- Les - - Coups de -- - balai
«MM-IMMW
Lansade et Roussel me font l'effet
de Jean qui pleure et de Jean qui rit.
Lansade a le vin triste; il gémit sur sa
vigne ; il lance contre moi autant de
malédictions que j'ai déchaîné de phyl-
loxéras. C'est l'Héraclite de V Univers.
Roussel (sauf votre respect) est plus
gai. Il a plus de cœur à persifler,n'ayant
d'autre vigne que celle du Seigneur, et
ne craignant pas que je me venge de
ses railleries en métamorphosant les
insectes en vers.
Vous vous rappelez que l'autre jour
il avait comparé l'abbé Dabras à Po-
lyeucte, puis à Domange. Polyeucte,
c'était une concession à M. de Lansade,
qui est un propriétaire aussi distingué
que malheureux, et qui aime les compa-
raisons nobles. Domange, c'était pour
rester dans la note chère au journal
que rédige en chef l'auteur des Odeurs
de Paris et de Rome.
— M. l'abbé Debras, s'était écrié
Roussel, a bien voulu faire la besogne
de M. Domange. Est-on coupable pour
avoir témoigné d'un zèle aussi dévot ?
Et moi, j'avais répondu avec mon or-
dinaire bonhomie :
— Oui, Roussel, on est coupable
d'aller sur les brisées de M. Domange.
On lui fait tort en touchant à sa mar-
chandise, et il est juste que tout préju-
dice se paie.
C'est là-dessus qu'Auguste Roussel
(sauf votre respect), m'entreprend avec
la finesse d'ironie qui lui est habituelle.
Laissons la parole à Auguste Roussel :
M. Sarcey dit son mot sur le cas des im-
mondices étalées dans la rue. D'après son
avis, le coupable n'est pas celui qui les ré-
pand, mais celui qui se permettrait de les
enlever sans autorisation. A la bonne heure,
et nous avons du moins à reconnaître ici la
franchise d'un adversaire qui en a manqué
plus d'une fois. Nous nous étions toujours
doutés que M. Saroey nourrissait quelque
rancune contre les gens qui doivent tenir la
rue propre, et la raison en est simple : c'est
que s'ils faisaient convenablement leur beso-
gne, le XIXe Siècle tâterait souvent de leur
balai.
Vous vous trompez, Roussel ; ce n'est
pas moi qui ai jamais nourri la moindre
rancune contre les gens qui doivent
tenir la rue propre. Sachez, ami Rous-
sel, que vos railleries tombent sur un
autre que sur moi.
Et cet autre, voulez.vous que je vous
le nomme ?
Vous devriez le connaître, ami Rous-
sel ; car c'est votre patron. Oui, c'est
Louis Veuillot en personne, votre chef,
votre modèle, le grand, l'unique, l'in-
comparable Louis Veuillot.
Vous n'avez pas fait une étude assez
approfondie de ses ouvrages. Je vous
avouerai que je m'amuse quelquefois à
les lire, et je sais l'opinion qu'il pro-
fesse sur le balayage des grandes villes.
Vous n'avez qu'à ouvrir les Odeurs
de Paris à la page 433 ; vous verrez
avec quelle éloquente sympathie M.
Louis Veuillot s'extasie sur cette aima-
ble saleté qui était jadis un des char-
mes les plus enivrants de la Rome pa-
pale.
Il la préfère de beaucoup à la dégoû-
tante propreté qu'une méticuleuse po-
lice, soutenue d'une armée de balayeurs
immondes, entretient à Paris.
« Dans l'ancienne Rome, écrit-il, on
rencontrait parfois des épisodes à la
Téniers, qui sont moins fréquents, je
l'avoue, dans les rues de Paris. Mais
tout compte fait, un goujat dans cet état
de nature qui force à détourner les yeux
est moins salissant à voir qu'un ser-
gent de ville. Le goujat ne me force
qu'à prendre le large, le sergent de
ville me coupe le chemin. »
Vous le voyez, ami Roussel. Entre un
sergent de ville, un ignoble sergent de
ville, et ce pieux goujat, dans la
posture ci-dessus mentionnée, votre pa.
tron n'hésite pas : il préfère celui qui
ajoute un parfum aux odeurs de Rome.
C'est que, comme il le dit lui-même,
dans ce même chapitre, un peu plus
loin : « L'empire du monde appartient
aux peuples malpropres ;. les Mosco-
vites se flattent de prendre l'empire du
monde. Ce triomphe ne dépend pas de
leurs progrès dans la civilisation, mais
de la force et de la durée de leur goût
pour le suif et pour la chandelle. »
Et d'où vient que l'empire du monde
soit ainsi promis aux peuples malpropres?
M. Louis Veuillot en donne la rai-
son, qui est des plus topiques et des
plus concluantes :
« C'est que le corps humain est fait
de saleté et d'ordures. Dieu le tira de
la boue ; naturellement il ne peut trou-
ver de force que dans ses principes cons-
tituants. »
Il n'y a rien à répondre à cette lo-
gique. Elle est accablante.
Elle a encore cet avantage de nous
expliquer pourquoi les rédacteurs de
l'Univers sont de si robustes polé-
mistes.
C'est apparemment qu'ils gardent avec
soin leurs principes constituants, et
qu'ils y puisent une force toujours nou-
velle.
Le bienheureux Labre a gardé toute
sa vie, avec une constance héroïque,
ses principes constituants ; aussi, dans
ce siècle relâché,dans ce siècle de savon,
il a pu rendre à Dieu son corps tel qu'il
l'avait reçu, un composé de saleté et
d'ordures, et il a mérité par là de deve-
nir un des plus grands saints du para-
dis.
Jamais au XIXe Siècle nous n'attein-
drons à ce degré de perfection où
l'Univers aspire. Humilions-nous, mes
frères, et frappons-nous la poitrine.
Nous ne serons jamais des hommes
forts, ayant pris la déplorable habitude
de nous débarrasser tous les matins de
nos principes constituants.
FRANCISQUE SARCEY.
Nouvelles d'Orient
Raguse, 11 octobre, soir.
Le 8 octobre, le chef monténégrin Dako-
vitch a brûlé non seulement LiubiDje, mais
encore tous les village du district.
Les Tares ont perdu 1,400 hommes ; les
Monténégrins 132.
Moakhtar-Pacha, interrogé sur l'infraction
à la trêve qu'il a commise, a répondu que la
trêve ne lui avait pas été notifiée.
Daux soldats monténégrins blessés dans le
combat du 7, transportés à l'hôpital de Klo-
buk, ont été, dit-on, décapités.
Constantinople, 11 octobre soir.
Les conditions de l'armistice de six mois
accordé hier par la Porte, qui devaient être
communiquées cette après-midi aux puissan-
ces, ne le seront que ce soir.
Une commission constitués sous la prési-
dence de Midhat-Pacha fixera le règlement de
l'assemblée élective et du Sénat.
La duchesse d'Edimbourg a passé hier à
Constantinople, ce rendant à Malte.
Londrel, 12 octobre.
Le Times publie la dépêche suivante datée
de Berlin :
La Turquie a résolu d'accorder un armis-
tice de six mois, si la Russie s'engage à arrê-
ter l'envoi de troupes de volontaires en Ser-
bie et en Bulgarie, et si la Serbie, suspendant
immédiatement les hostilités, donne en outre
d'autres garanties militaires. Les Turcs ne
veulent prendre l'engagement de cet armis-
tice qu'à l'égard des puissances garantes et
non directement avec la Serbie. La Porte
consent aussi à se faire représenter à une
conférence pourvu qu'il soit stipulé qu'on ne
l'occupera pas, dans cette conférence, d'au-
tres questions que de l'affaire serbe et des ré.
formes d'après le programme qu'elle a pro- -
posé. Aucun représentant des Serbes et des
raïas ne devra y être admis.
La ville d'Odessa est remplie de troupes et
de volontaires ; de nombreux navires de
transports sont prêts dans les ports rosses
de la mer Noire pour l'envoi de troupes.
La Dailll-Telegraph publie la dépêche sui.
vante de Constantinople :
La Turquie propose d'occuper pendant l'ar-
mistice, mais seutementproformd, les parties
du territoire serbe déjà au pouvoir de ses ar-
mes ; elle retirerait le gros de l'armée, ne
laissant que quelques troupes sur les hau-
teurs, en face d'A!exinatz et de Deligrad, et
renvoyant le reste de l'armée à ses quartiers
d'hiver.
Le corps diplomatique à Constantinople
considère comme équitables les aemandes de
la Turquie.
Londres, 12 octobre, matin.
Cette nuit le Foreign-Office n'avait pas en-
core reçu la notification officielle attendue, et
le secret le plus grand a été gardé à Cons-
tantinople sur les conditions de l'armistice.
En conséquence, les conditions diverses in-
diquées de différentes sources comme étant
mises par la Turquie à l'offre d'un armistice
sont jusqu'à présent considérées comme dM
hypothèse., d'ailleurs faciles à déduira de la
situation réciproque des armées turco serbes.
Belgrade, Il octobre.
Le président du conseil, M. Steftcha, est
parti pour l'intérieur, à l'effet de surveiller
la distribution des secours aux familles qui
se sont réfugiées en Serbie et pour faire une
enquête sur l'état général du pays.
On organise en ce moment à Belgrade un
régiment de lanciers formé de volontaires al-
lemands.
Le colonel Byzantios, de l'armée grecque,
est retourné à Athènes, après avoir échoué
dans sa tentative pour former une légion
grecque à Belgrade.
Vienne, 12 octobre.
La Nouvelle Presse libre prétend que le czar
serait disposé à abdiquer sous certaines con-
ditions, et que le czarewitch aurait été ap-
pelé à Livacbia à ce sujet.
Le Tagblatt croit savoir que la Serbie re-
poussera l'armistice de six mois.
La Presse dit que la Porté suit dans la
question de l'armistice la même tactique que
dacs la question des réformes en allant au
delà des concessions demandées par les'puis-
sances.
Pesth, 12 ootobre.
Les journaux le Eon et YEllenor jugent les
propositions turques dans un sens pessimiste
et disent que'la Forte vent conduire les puis-
sances ad absurdum.
Baden-Baden, 12 octobre.
Le roi de Grèce est allé voir hier dans
l'après-midi l'empereur d'Allemagne, qui lui
a rendu sa visite. Le roi Georges a dîné chez
l'empereur et a pripâ neuf heures le thé chez
le grand-duc. Il est parti ce matin à 1 heure
10 minutes pour Rumpenheim.
Constantinople, 12 octobre.
Voici les conditions auxquelles la Porte
subordonne l'armistice :
1* Empêcher la réoccupation par les Serbes
des positions actuellement au pouvoir de
l'armée turque.
2S Interdire toute introduction d'armes et
de munitions dans les deux principautés.
3* Empêcher d'une manière efficace le pas-
sage des volontaires étrangers.
4' Empêcher tout secours de la part des
deux principautés aux provinces insurgées
limitrophes.
Belgrade, 12 octobre.
Le gouvernement serbe n'a pas encore été
avisé officiellement de l'armistice.
Vienne, 12 octobre, 4 h. 112 s.
Le Tagblatt prétend que toutes les grandes
puissances auraient déclaré absolument inac-
ceptable l'armistice de six mois accordé par
la Porte. (Cette nouvelle, dit notre corres-
pondant de Vienne, paraît dénuée de fonde-
ment, les conditions de l'armistice étant en-
core inconnues ici. à l'heure qu'il est.)
Le Tagblatt publie aussi un télégramme à
sensation de St-Pétersbourg, disant que le fait
de l'appel du ministre des finances par le czar
à Livadia semble se rattacher aux bruits de
guerre ; il serait en effet question, prétend
ce télégramme, d'un emprunt national de
deux cents millions de roubles.
Suivant une dépêche de Berlin publiée par
le Times, la Société de navigation austro-da-
nubienne s'est refusée à transporter à l'ave-
nir des volontaires russes en Serbie.
Le Morning Post annonce que la nouvelle
s'est répandue que l'Autriche vient de rou-
vrir le port de Klek aux bâtiments de la ma-
rine ottomane.
Le Daily Nevos publie les dépêches sui-
vantes :
Berlin. Il octobre.
L'acceptation par la Porte d'un armistice
est considéréepar la presse berlinoise comme
ne facilitant qu'imparfaitement la tâche de la
diplomatie. La Gazette nationale dit qu'il y a
une voie difficile et longue à parcourir entre
un armistice et la paix. La sincérité de la ré-
solution de la Porie est mise en doute, et la
Post a reçu de Constantinople un télégramme
d'après lequel les conditions de l'armistice
seraient que la Russie arrêtât l'affluence de
ses volontaires en Serbie, que dans le con-
grès prochain l'intégrité de la Turquie fût
présupposée et que les représentants des
Etats vassaux fussent exclas du congrès.
Vienne, 11 octobre.
La Porte n'a pas encore répondu à l'ironi-
que proposition que lui a faite la Roumanie
d'occuper la frontière orientale de la princi.
pauté avec des troupes tarques pour empê-
cher le passage des volontaires russes, la
Roumanie étant obligée par traité à s'opposer
à ce passage.
Dsligrad, 9 octobre.
Le docteur Marsden, chirurgien anglais, con-
firme l'exactitude des faits rapportés dans la
dépêche oùTchernaïeff raconte que les Turcs
ont fait mourir dans les supplices les pri.
sonniers serbes.
Trébigne, Il octobre.
Le combat de samedi a été un véritable
succès pour les Turcs, qui occupent mainte-
nant Dohellon, entre Grahovo et Niksitch.
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