Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1876-09-22
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 22 septembre 1876 22 septembre 1876
Description : 1876/09/22 (A6,N1747). 1876/09/22 (A6,N1747).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/04/2013
Sixième Année. — M lNr Prix du Numéro h Paris : la Centimes. — Départements : 20 Centimes
Vendredi S2 Sentcmbre 1870
E
RÉDACTION
l'adresser au Secrétaire de la Rédacttas
de 2 heures à minuit
53, Mme de I*ju £ >e«$®r
les lettres nm[ affranchie; mtmi r~l
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?AMS
Troî,s mois 13 fc-
§ix mois.,.,. 3$
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frois mots. 15 fl
Sis mois.32
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ADMINISTRATION
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Six mots. 25
Ha ar. aC
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Six mois. 82
Du m. tî
JOURNAL REPUBLICAIN CONSERVATEUR
4^®eû®bb®$®, chez MM. LAGRANGR» C ..t Or,
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Paris, 21 septembre 1876.
0 Le Journal officiel d'hier matin contient
une note relative aux réunions publiques.
Ils rappellent la législation éxistante, qui
assujettit ces régnions à une autorisation
préalable; on trouvera cette note plus loin.
La situation reste la même en Orient.
La suspension d'arme. est observée tant
bien que mal, mais le délai fixé doit expi-
rer à la fin de cette semaine, et on se de-
mande anxieusement si, à cette époque, les
puissances aurout pu se mettre d'accord
pour faire à la Porte des contre-proposi-
tions de paix. Cela est peu probable, car
les organes russes insistent plus que ja-
mais pour la conclusion d'un armistice ré-
gulier et de durée assez considérable, en
faisant remarquer que la situation actuelle
est trop incertaine pour permettre aux
négociations de paix de se poursuivre avec
de sérieuses chances de succès. D'ailleurs,
si nous en croyons une dépêche de Franc-
fort, qui concorde avec nog renieignements
particuliers, aucune proposition n'a encore
été faite à la Porte, et les puissances se sont
seulement mises d'accord sur la nécessité
de prolonger la suspension d'armes.
La même dépêche déclare que la nouvelle
donnée hier par le Daily-Telegraph, rela-
tivement à des propolttions faites par l'An-
gleterre, n'est fondée sur rien. Le Nord,
de son côté, tout en démentant que ces
propositions aient été faites, les passe ra-
pidement en revue. Cette partie de l'arti-
cle du Nord eàt intéressante en ce qu'elle
nous apprend que pour le Monteaegro,
tout au moins, la Russie ne se contentera
pasdustata quo antebellum, « Sans par-
ler, dit la feuille officieuse russe, des ré-
sultats matériels de la guerre, qui ont été
incontestablement favorables au Montene.
gro, la nécessité d'établir non pas une tran-
quillité éphémère, mais une paix durable,
devra peser d'un poids décisif sur les dé-
terminations de la diplomatie. Or, on con-
nait les conflits périodiques qui sont nés
de la configuration topographique de la
Mentagne-Noire, dont les habitants n'ont
aucun débouché pour l'échange de leurs
produits contre les denrées qu'ils ne peu-
vent retirer de leur propre pays, ni même
des pâturages en quantité suffisante pour
leurs troupeaux. Toute solution qui ne don-
nerait pas satisfaction à ce double besoin
serait essentiellement précaire, et ne mé-
riterait pas le nom de «paix durables
qu'on devra pouvoir appliquer, pour l'hon-
neur de l'Europe, aux arrangements par
lesquels elle mettra fin aux complications
actuelles. »
La question de paix ou de guerre va,
d'ailleurs, faire prochainement un pas en
avant, car on nous annonce que le retour
du général Ignatieff à Constantinople est
imminent. Le général aurait, dit-on, rf ça
de l'empereur de Russie des instructions
qui sont loin d'être conciliantes, et le czar
s'apprêterait à faire passer la Turquie sous
de véritables fourches caudines. Le sultan
consentira-t-il à baisser la tête? Là est
toute la question. On croit à Vienne q. e, si
dures que soient les conditions de la Russie,
la Turquie les subira. Nous sommes loin
d'en être convaincus.
On ne semble, d'ailleurs, pas se faire
d'illusions à Constantinople, s'il faut en
croire uné correspondance adressée à l'offi-
cieuse agence Havas et que cette dernière
publie avec une sorte de solennité. Après
s'être étendu asses longuement sur tous,
les conseils tenus à la Porte pour en arri-
ver à la confection du mémorandum que
l'on sait, le correspondant de l'agence
ajoute :
« Tout commandait à la Porte de faire
taire ses scrupules et de céder à la près.
sion du dehors. > Elle l'a donc fait à son
corps défendant et j'ajouterai, par acquit:
de conscience, car elle sait bien que quoi;
qu'elle fasse, elle ne désarmera pas la
Russie, qui s'apprête à lui chercher que-
relle sous n'importe quel prétexte, et que
ni les concessions du sultan ni les efforts
de conciliation, tentés avec plus ou moins
de bonne foi par les puissances, ne réuni-
ront pas à la détourner de ses projets belli-
queux.
» On a reçu l'autre jour ici la nouvelle
d'une concentration de troupes russes en
Bessarabie, et nous avons appris, depuis,
que tous les bâtiments-transports russes
de la mer Noire sont retenus à Olespa. Le
général Ignatieff a reculé, dit-on, indéfini-
ment l'époque de ion retour à Constantino-
pie, ce qui est encore un fort mauvais in-
dice. La guerre avec la Russie est, d'ail
leurs, ici, dans les prévisions générales, et
il n'y a pas que le gouvernement qui s'en
préoccupe. Le cabinet anglais annonce
lui même, par la bouche de lord Derby,
que la flotte britannique de la Méditerranée
qui devait aller hiverner à Lemnos, ou à
Mételin, continuera à garder son mouillage
de Besika. >
peut-on espérer au moins que la Russie
et l'Angleterre tomberont d'accord sur les
conditions de la paix ? c'est peu probable.
Cet accord, s'il avait dû se faire, serait
déjà fait, et rien alors ne serait de nature
à nous faire craindre des complications eu-
ropéennes. Au surplus, nous saurons pro.
chainement à quoi nous en tenir sur la
ligne politique que compte adopter le ca-
binet de Saint James. Ainsi que nous l'a-
vons annonëé, plusieurs meetings consi-
dérables ont été tenus lundi à Londres
pour protester contre les massacres dela
Bulgarie. L'un d'eux, présidé par le lord
maire, a décidé que les résolutions prises
seraient communiquées à lord Berby et à
lord Beaconsfield par une députation, à la
tête de laquelle se placerait le premier ma-
gistrat de la Cité.
Il est d'usage que le ministre réponde à
une semblable députation et explique les
vues du gouvernement. Nous n'espérons
pas savoir grand chose de lord Derby, qui
est beaucoup trop diplomate pour engager
le gouvernement et qui a d'ailleurs un pré-
texte tout trouvé, les négociations enta-
mées, pour garder le silence. Mais lord
Beaconsfield n'a pas encore eu le temps de
dépouiller assez complétement le M. Dis-
raëli que nous avons connu pour que nous
ne soyons pas en droit d'espérer de sa part
d'importantes révélations. Cela devient
d'autant plus indispensable que le rapport
officiel de M. Baring est publié et que les
scènes qu'il décrit surpassent en horreur
celles que l'on attribuait à l'imagination
des journalistes.
Le pronunciamiento de l'armée serbe et
la proclamation du prince Milan comme roi
de Serbie semblent avoir été un simple bal-
lon d'essai. Hais l'émotion produite a été
si vive à Vienne que l'on plaide les cir-
constances atténuantes. Le gouvernement
serbe déclare qu'il ne voit dans tout cela
qu'une démonstration sans importance,
qu'un mouvement d'effervescence causé
par la nouvelle du propositions de paix
présentées par la Turquie. La presse de
Saint-Pétersbourg appuie sur la même
note et morigène Je prince Milan, qui non
content de ses premières explications, dés-
avoue énergiquement la manifestation. Et
cependant le correspondant du Times à
Belgrade mande au journal de la Cité qu'il
a va les nouveaux billets de banque qui
l'on va prochainement émettre et que
portent en toutes lettres : « Royaume de
Sfirbie. »
En résumé, la ntuation est plus tendue
que jamais. Les puissances, désespérant de
se mettre d'accord sur les conditions de la
paix, te bornent à obtenir de la Porte la
conclasion d'un armistice, la Russie ayant
déclaré que s'il n'eet pas accordé, elle
rompra tes relations diplomatiques avec
la Turquie. Les puissances ne voient là
qu'une question de forme et s'uniisent
au cabinet de Saint Pétersbourg pour ob-
tenir l'armistice, tout en se réservant de
loi résister s'il posait à la paix des condi-
tions exagérées. Cette politique peut sem-
bler très-saga, et c'est celle cependant qui
a conduit l'Europe à la guerre en 1853.
t&OUïfcSES DE PARIS
Ctêtmre le i 9 sept" le 20 sept". Il. Butane
S 0 0
aoaptant 71 12 1,2 71 05 07 1 2
fincoor. 71 10 71 07 l 2 0212
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ft O/O
jowptKui 126 45 106 45
fis tcMr >• 6 47 1/2 106 50 02 112 .1..
PETITE BOURSE DU SOIS
Sans affaires.
+
0 notre Roi !
Saint Michel archange nous joue un
vilain tour. C'est sa fête le 29 septem-
bre. Et, comme il a craint que sa fête
ne passât inaperçue, il a suggéré à
« une réunion de catholiques » cette
idée, qu'ayant eu personnellement l'hon-
neur de présider à la naissance de
l'Enfant du miracle, il y avait là une
belle occasion de faire parvenir à M. le
comte de Chambord une adresse de
« ses très-humbles, tr.ès obéissants et
très-fidèles serviteurs et sujets. » Les
conservateurs devraient être désolés,
car voilà la politique qui gagne même
le Paradis.
L'adresse s'étale tout au long dans
le moniteur de la légitimité, l'Unton,
avec indication des personnes chez qui
les très-humbles, très-obéissants et
très-fidèles serviteurs et sujets (sujets
de qui ? du roi apparemment, car ce
n'est guère que d'un roi qu'on peut être
les sujets !) pourront aller déposer
leur signature. C'est un bouquet d'es-
pérances, exhalant un vieux parfum
d'antique foi monarchique, espoir un
peu fané que fit naître la venue au
monde du prince, espoir que laisse sur-
vivre son existence et qui ne se dessè-
che pas encore; il renferme bien aussi,
par ci, par là, quelques soucis, em-
blême des esprits qui ne sont point en-
core guéris € des aventures périlleuses
et criminelles » ; mais ces soucis, ha-
bilement disposés, sont étouffés sous
les roses, — ce qu'on comprend, d'ail-
leurs, puisqu'il s'agit de fêter un anni-
versaire.
Ce n'est pas nous, témoins attristés de
tant de destructions, qui croirons jamais
qu'on puisse rien édifier de solide sur la
terrain de la Révolution. Quelque espoir
que l'on fonde ou que l'on feigne de fon-
der sur un a nouvelle expérience, con-
damnée à la fois par non traditions et par
la raison,-nous savons que notre cher et
malheureux pays ne se sauvera que par
vous, Monseigneur, c'e«tà-dire par le
nrincioe que Vous représentez.
- Un jour la France, enfin dêaabulée, vien-
dra vous demander d'abriter sous les plis
de votre drapeau sa fortune, son honneur
et ses croyances l
En vain les fautes des couriervateurs et
les ruses de leurs adversaires ont mutti
plié le" obstacles au triomphe du droit. Un
tDy~r~tïx ¡( s+.i{l(¡ novs di, qu'à Y En font
du mir acle la Providence a dû aligner
une mission à la hauteur de sa naissance.
Sur la terre d'exil, Mooseigneur, 0 NOTRE
Rot ! votre auguste caractère a forcé l'ad-
miration de vos ennemis même.. A votre
attitude, à votre parole, le monde entier a
reconnu dame le chef de la Maison de Bour-
bon le gardien fidèle de l'antique honneur.
Vienne maintenant l'heure marquée par
Dieu pour votre règne, et par vous la
France retrouvera le lustre séculaire de sa
royale couronne.
En somme, nous ne voyons pas grand
mal à ce que MM. les royalistes pen-
sent de la sorte et fassent parvenir à
M. le comte de Chambord l'expression
discrète de leurs sentiments. Le prin-
pal inconvénient qui puisse résulter de
pareilles démarches, c'est de permettre
à l'héritier des Bourbons de supputer
mélancoliquement le chiffre de ceux qui
éprouvent le besoin de se déclarer ses
très-obéissants et très-fidèles sujets ; et
de cet inconvénient, nous aurions tort
de nous préoccuper outre mesure.
Mais ce qui nous paraît peut-être un
peu irrégulier, c'est la prétention de
rédiger une adresse à « 0 NOTRE ROI »
et de provoquer, avec publicité et dé
signation des. messieurs quêteurs, une
sorte de pétitionnement en faveur d'une
des dynasties qui aspirent à remplacer
le gouvernement existant. Ce qui sauve
l'irrégularité, c'est le ridicule. Cepen-
dant, comme nous ne l'avons nullement
provoqué,nous avons le droit d'en pro-
fiter sans remords.
Croyez-vous que le gouvernement de
Juillet, bien qu'il pût se croire le souffle
populaire èn poupe, puisqu'il avait été
poussé par lui au pouvoir, eût toléré
que les tenants de la légitimité diri-
geassent contre lui une note collective
de leurs regrets et de leurs espérances,
ou que les partisans de la dynastie de
Boulogne et de Strasbourg fassent pu-
bliquement invités à se compter ? Croyez-
vous que le gouvernement impérial,
malgré tous les millions de suffrages
dont il était si sûr, et l'amour du peu-
ple dont il ne doutait pas, eût permis
aux républicains de recruter, par la
voie de la presse, les noms de tous ceux
qui aspiraient à un régime de liberté ?
(J'est à dire qu'on frémit en pensant aux
courbatures que ces gouvernements
eussent doanées au ministère public et
à la gendarmerie, en pareille occur-
rence !
Il nous souvient encore qu'en 1873,
au moment où la monarchie faisait
grand bruit pour cacher le peu de beso-
gne qu'elle parvenait à faire, un jour-
nal, qui se prenait sérieusement pour
royaliste, disait : Qaanl le roi sera
entré à Paris, il faudra, dès le lende-
main, coffrer les agitateurs en vue (li-
sez : les républicains marquants) et
faire fermer boutique aux journaux de
désordre (lisez : organes républicains);
alors, la France, jouissant d'une tran
quillité sans mélange, pourra, tout à son
aise, acclamer son Roi. D'après ce jour-
nal-là, qui n'était pas l'Union, mais un
succédané folâtre ne l'Union, il ne pa-
raît pas que la royauté légitime non
plus eût laissé à la revendication répu-
blicaine une liberté illimitée.
Eh bien, la République est fondée, elle
est la loi, elle est le gouvernement du
pays. Gouvernement d'agitation, disent
les conservateurs. A coup sûr, ils cher-
chent à se donner raison, puisque les
voilà qui ne laissent plus passer un
saint sans tenter un appel à leurs par-
tisans, une sorte de plébiscite en cham-
bre. Où est l'agitation ! Quelles masses
cet appel émeut-il? Ils crient dans le
désert et c'est le néant qui leur répond.
Ce que les gouvernemeats prétendus
forts n'auraient jamais Toulu endurer,
la République, ce .gouvernement qu'ils
ne croient pas viable, le supporte sans
crainte. De ces assauts qui auraient
fait frémir la légitimité, l'orléanisme
ou l'empire, elle rit, et franchement. La
République serait-elle donc plus forte
que tous ces gouvernements forts ?
Pour nous, c'est la seule conclusion à
tirer de cette dernière escapade des
soi-disant conservateurs.
K PAUL LAVARGUB.
—— ♦—— —
Le Journal officiel publie la Bote sui-
vante :
Dan. nne réunion publique non autorisée,
tenue le 11 de oe moi", dans la salle du théâtre
Tivoli, il a été prononcé plusieurs discours
traitant de matières politiques et religieuses.
Nous croyons devoir rappeler à cette occasion
qae l'article la* de la loi du 6 jain 1868, qui
soumet h l'autorisation du préfat de police *
Paris et des préfets dans les départements
les réunions publiques ayant pour objet de
traiter de matières politiques ou religieuses,
est toujours en vigueur.
Si de nouvelles infractions à cet article
venaient à être constatées, des procès ver-
baux seraient immédiatement dressés et soi
vis de poursuites correctionnelles.
ANGLAIS ET ALLEMAND
Voici que la rentrée des classes ap-
proche, et que les questions qui inté-
ressent l'instruction secondaire vont
revenir sur le tapis.
Le hasard fit que je me trouvais l'au-
tre jour avec un des professeurs qui
sont chargés, dans nos lycées, de l'en-
seignement des langues vivantes, et
j'en pris occasion de lui demander des
nouvelles de nos classes d'anglais et
d'allemand.
J Avais été fort ému, à l'époque où
l'incident se produisit, d'une interpel-
lation que M. Journault, l'honorable dé-
puté de Seine-et Oise, avait cru devoir
adresser à M. le ministre de l'instruc
fkra publique. Il s'y était plaint, et en
termes fort vifs, du peu de résultats
qu'obtenait l'enseignement des langues
vivantes dans nos établissements d'ins-
truction secondaire et de la défaveur
dont il y était frappé.
Le ministre avait répondu par quel-
ques-unes de ces phrases banales dont
les chefs d'administration ne sont ja-
mais chiches. et qui sont la menue mon-
naie courante de l'approbation offi-
cielle.
Mais les ministres savent rarement
les vérités désagréables, et ils ne les
avouent jamais.
Je demandai donc ce qu'il fallait pen-
ser de ces accusations, et si, en effet,
nous étions encore aussi loin qu'on
voulait bien le dire sur ce point parti-
culier d'éducation de nos voisins d'ou-
tre-Manche et d'outre-Rhin.,
— IL y a bien a aire a ceia, me re-
pondit-il. Je sais qu'en effet dans le
le public on passe aisément condamna-
tion sur l'infériorité des élèves de vo-
tre nation dans l'étude des langues vi-
vantes. C'est votre coutume, à vous au-
tres Français, de prendre plaisir à vous
déprécier en vous comparant aux peu-
ples voisins. J'ai longtemps habité l'Al-
lemagne; j'ai professé en Angleterre,
je puis vous affirmer que l'enseigne-
ment da français n'y est pas sensible-
ment supérieur à ce qu'est chez vous
en ce moment celui de l'anglais et de
l'allemand.
Vous entendez parler sans cesse des
brillants résultats qu'obtiennent les pro-
fesseurs de français en Allemagne.
Mais non. mais non. t ils ne savent
pas tant que cela le français. Ils font
de votre langue en vrais Germains,avec
leurs têtes carrées et leurs esprits pe-
sants, une étude scientifique et philo-
logique, sans que les élèves arrivent à
l'écrire et surtout à le parler correcte-
ment. ,
Pour l'Angleterre, allez demander,
je vous prie, à M. Tarver de Eaton ou
à M. Gustave Masson de Harrow, s'ils
croient leurs élèves supérieurs aux vô
très, et vous verrez ce qu'ifs vous ré-
pondront. Ce qui vous trompe, c'est
qu'il vient chez vous beaucoup d;étran-
gers qui savent à peu près votre langue.
Ils ne l'ont pas apprise dans les col-
lèges. Ce sont en général des hommes
qui, au temps de leur enfance, ont été
élevés par des gouvernantes frarç^ises.
L'habitude commeoce à se répandre à
Paris, dans les familles aisées, d'avoir
des bonnes ou des gouvernantes alle-
mandes et anglaises : dans vingt ans,
les Français qui pourront voyager se-
ront, eux aussi, en possession de deux
ou trois langues, sans qu'on puisse trop
en reporter l'honneur à l'enseignement
des établissements d'instruction pu-
blique.
Je vous assure qu'en France, à Paris
au moins, l'enseignement des langues
vivantes a beaucoup gagné depuis dix
ans; il a encore des répugnances à
vaincre et des progrès à faire : mais
quoi qu'on dise, il est en fort bonne
voie.
Et tenez ! ajouta mon interlocuteur,
puisque vous vous intéressez à ces ques-
tions et que vous les traitez volontiers
dans le journal, il y a un point que je
souhaiterais de vous voir toucher, pour
appeler sur lui l'attention du public et
du ministre.
Vous savez que toutes les instructions
ministérielles, toutes- les recommanda-
tions des inspecteurs, tous les conseils
des proviseurs tendent à ramener notre
enseignement à l'utilité pratique. Nous
sommes tenus d'habituer progressive-
ment nos élèves à manier la langue
écrite sans le secours du dictionnaire
ou de la grammaire; nous les interro-
geons en anglais ou en allemand, et ils
doivent répondre dans la même langue.
Les élèves de quatrième pour l'an-
glais, de troisième ou tout au moins de
seconde pour l'allemand, qui présente
plus de difficultés et qui exige plus
d'études, arrivent pour la plupart à
écrire correctement une lettre familière
ou quelque récit très simple. Ils lisent
couramment la prose usuelle, et tradui-
sent à livre ouvert, soit l'allemand ou
l'anglais en français, soit le français
en anglais ou en allemand.
Tel est l'enseignement que nous don-
nons, tels sont les résultats auxquels
notre devoir est de tendre, et que notre
honneur est d'atteindre.
Tous les exercices des lycées ont, soit
dans les compositions, soit dans les
examens publics, des sanctions qui leur
sont appropriées:
Savez-vous quelle est la sanction de
notre enseignement? Au concours géné-
ral, au grand concours, comme vous
dites, on choisit presque toujours pour
sujet de composition, pour morceau à
traduire en français, un morceau de
*
haute poésie, une espèce d'énigme en
vers, qui embarrasserait plus d'un étu-
diant d'Oxford ou de Heidelberg, si l'ari-
dité du sujet ne le rebutait pas dès les
premières lignes. Pour sortir victorieux
d'une semblable épreuve, il ne suffit pas
de bien savoir l'allemand ou l'anglais.
Cette connaissance même n'est pas né-
cessaire. Il faut avant tout avoir l'ha-
bitude de la version grecque et latine.
, l f
Ce n'est pas le fort en langue vivante,
u'e&t le fjrt en version qui pt me t,8
camarades dans ce concours spécial.
Le thème est d'ordinaire un morceau
de philosophie et de morale, hérissé de
j
mots fauteur, dont le sens est parfois
obscur et qui n'a rien de commun avec
la langue usuelle que l'on nous recom-
mande avec raison d'enseigner dans les
lycées.
Aux examens écrits du baccalauréat,
la composition que l'on devrait deman-
der aux candidats. c'est un récit ou
tout au moins un thème. On a préféré
la version : pourquoi ? Tout le monde
sait qu'un élève d'intellierence moyenne,
muni d'un bon dictionnaire, peut, après
quelques mois de préparation artifi-
cielle, arriver à traduire tant bien oue
mal un texte, qui n'est pas' difficile.
La version ne prouve aucunement qu'il
sache rien de la langue.
Pour épreuve orale qu'exige t-on ?
quelques vers de Milton ou dq Shaker
peare, de Schiller ou de Gœfhe, qu'il
suffit d'avoir ressassés avec un répéti-
teur, peu de temps avant l'examen.
Est ce que cinq minutes de conversa-
tion avec l'examinateur n'en appren-
draient pas davantage sur le candidat ?
Sont-ce là des énrenves sérieuses ? Où
est. la sanction donnée à cette longue
suite d'années d'enseignement î Le jeu,
comme dit votre proverbe, n'en vaut
plus la chandelle.
Vous n'êtes pasmoins indulgents dans
les concours d'admission aux écoles du
gouvernement, et vous abaissez ainsi le
niveau des études. On nlnbtient que ce
que l'on demande, et encore faut il de-
mander beaucoup pour obtenir un peu.
Il y a donc, comme vous le voyez,
contradiction complète entre l'enseigne-
ment donné dans les classes et les épreu-
ves qui les couronnent.
— Mais à votre avis. demandai-je,
quel remède y aurait il à ce défaut que
vous reprochez à notre enseignement 1
Comment rétablir cet accord dont vous
parlez entra les études et les exa-
mens?
— Oh ! ce sont das réformes bien
simples, qui ne révolutionneraient rien
du tout, mais qui n'en seraient pas moins
utiles.
A dater du jour où se présenteront
au baccalauréat les é'èves qui auront
dû suivre le programme complet des
langues vivantes, depuis la huitième
jusqu'à la philosophie (neuf années d'é-
tudes, monsieur, neuf années d'études !),
c'est-à-dire vers 1878, l'usage des dic-
tionnaires et des grammaires pourrait
et devrait être proscrit au grandcon-
cours, ainsi que dans les examens
écrits du baccalauréat et des écoles du
gouvernement.
On laisserait de côté la version, qui ne
prouve rien.. Les candidats auraient à
traduire un tpxte français, ou à compo-
ser une narration, une description une
lettre familière. Les textes ou matières
seraient toujours faciles ; il suffirait
pour les traiter, de la langue usuelle,
de celle que parlent ou écrivent cou-
ramment les gens de bonne compa-
gnie.
Au grand concours, la version "serait
choisie chez les prosateurs modernes
(histoire, récits de voyages, descrip-
tions, lettres). Le thème serait remplacé
par une narration historique ou un ré-
cit familier dont le texte pourrait être
donné en français.
Si en échange des sacrifices que fait
l'Etat pour établir l'enseignement des
langues vivantes sur des bases plus
larges, il n'a pas le droit d'exiger de
notre jeunesse les sérieuses épreuves
que je réclame, autant vaudrait alors
supprimer des classes devenues à
peu près illusoires.
FRANCISQUE SARCEY.
7 :
LA GUERRE
Dépêches de sources diverses
Londres, 20 septembre.
Le rapport de M. Baring estime à 12.000 le
nombre des chrétiens maasaorâs et à 200 sen-
lement le nombre de Tares qui ont été tnés
par les insurgés. Le nombre total de villages
brûlés ept de 58.
M. Baring conclut en disant que cette ma-
nière- d'êtooffer un soulèvement est on ne
peut plus inhnmains, 60 innocents souffrant
pour un coupable.
Londres, 20 septembre, soir.
Un supplément de la Gazette officielle con-
tient le rapport de M. Baring sur les barba-
ries commises en Bulgarie.
Ce rapport, qui est très long, fait l'histo-
rique des mouvements insurrectionnels dans
cette région.
Il donne des détails sur les faits de pillage,
de violences commises sur les femmes et au-
tres barbaries, faits qui, d'après une lettre
de sir Henry Elliot jointe au rapport, justi-
fient complètement tonte l'indignation sonle-
vée à ce sujet, bien qne quelques incidents
racontés par les journaux aient été exagé-
rés.
Les détails donnés par le rapport sur les
massacres de Bat&k dépassent en horreur
tout oe qui a été pnblié jusqu'ici. Sur ce point
seul, il y a 5 000 victimes.
M. Baring demande qu'une punition exem-
plaire poit infligée à Mo ammed-Agba et à
Aohmet-Agha qui sont responsables des mas-
sacres de Batak, massacres pour lesquels
Achmet-Agha, a été décoré de l'ordre du Med-
jidié.
M. Baring insiste sur la nécessité de pren-
dre des mesures rigoureuses, énerglqnp., et
de faire justice impartiale pour rétablir la
tranquillité dans ces malheureux pisys.
Londres, 20 septembre.
Le Daily News publie une lettre de Garibal-
di adressée à son ami Arnold, dans laquelie
il dit qu'il ne voit d'autre solution à la oues
tion d'Orient que de foire repasser le Bos-
phore aux Turcs. Il croit qu'une confédéra-
tion des peuples libres de la p",ninsu(e des
Baikans serait aussi otile à l'Angleterre que
l'existence d un empire QUi Ferait continuel-
lement le centre d'insurrections toujours re-
nouvelées.
Vienne, 20 septembre.
La Correspondance politique publie la note
suivante, qui a un caractère offleienx :
« Le gouvernement serbe a fait déo!ara?
ici qu'il considère comma une démonstra-
tion dépourvue de toute. importance la pro-
clamation de Milan comme roi qe Serbie,
faiie par les troupes serbes ftons la première
impression des conditions de paix présentées
par la Porte. Le prince Milan et son gouver-
nement ont désavoué éuergiquement cette
manifestation, à laquelle il ne sera pas donné
d autre suite.
Francfort, 20 septembre.
Les propositions en vue de la paix, attri-
buées à l'Angleterre par le Daily Teiegraph,
sont inexactes. Ancune proposition n a été faite
jusqu'à ce moment. Les puissances sont seu-
lement d'accord Sur la nécessité de prolonger
la suspension d'arme.
La désapprobation unanime qu'a rencontrée
en Russie le toast de Tchernaïeff proiuit la
meilleure impression. On annonce de source
certaine, que le cabinet de Saint-Pétersbourg
admet la suspension d'armes comme un com-
mencement d'armistice, .t comme permettant
d'entamer utilement des négociations de
paix.
Constantinople, 20 septembre.
Les négociations se poursuivent active.
ment, et grâce à un échange rapide de télé-
grammes antre les «mbJnets, on espère abou-
tir à une solution prochaine.
Oa ne doute point, en tous cas, que la Tur-
quie ne consente À une prolongation de la
suspension d'armes si l'on ne s'est pas en-
tendu sur une résolution définitive avant le
24 septembre. -
Le Times publie les dépêches suivantes:
Belgrade, 18 septembre.
Une députation de l'armée, composée de
militaires de tous les rangs, est en ronte
pour Belgrade, où elle va saluer le prince
comme roi de Serbie. Ea c-i moment, le pu-
blic est divisé d'opinion sur cette affaire. Le
petit nombre, se composant de ceux qui per-
sistent encore a croire que le bien naîtra de
la continuation de la guerre, attache de l'im-
portance à la déclaration des soldats. Les
plus circonspects d'entre eux disent que,
bien qu'ilî considèrent que le mouvement a
été prématuré, la chose est fite, et qu'il faut
bien l'accepter.
Le grand nombre représentent le sujet
comme De comportant pas une attention sé-
riecte et comme un accès de loyauté après
dîner, do la nature de ceax qui ont en lieu A
chacun des repae pnbiics qui se sont donnés
en Serbie pendant ces dernières années. Il y
a lieu de craindre cependant que parmi les
moins nombreux de ces deux catégories, il
ne se trouve des gens qui sont en position de
changer l'aspect de cette fo la affaire en lui
faisant prendre on caractère inqniétant; et
malhenrsusement il y a encore assez de ce
monde-là qui peut influencer le cours des
événements pendant les quelques semaines
à venir. — Dans les régions élevées, la proba-
bilité d'un armistice se terminant par une
paix permanente est tournée ouvertement
en ridicule. — Les Russes qui se trouvent
ici prétendent avoir déjà vu le nouveau pa-
pier monnaie et qu'il porte sur sa face les
mots suivants : < Royaume de Serbie. >
Semlin, 19 septembre.
Le ministre de la guerre est parti de Bel-
grade pour aller h la rencontre de la dépu-
tatioa de l'armée qui vient pour saluer le
roi et l'a renvoyée sur la ligne de front.
M. Ristitch a adressé une protestation con-
tre les actes commis pir les Turcs depuis le
commencement de l'armistice, à tons les con-
suls qui se trouvent à Belgrade.
Berlin, 19 septembre.
L'armée serbe ayant totalement échoué dans
sa tentative de conquérir pt d'occuper le ter-
ritoire turc, on avait espéré que l'intérêt
slave se contenterait du maintien du statu quo,
La proclamation faite par le général Tcher-
naïeff du prince Milan comme roi de Serbie,
est appelée À frustrer cette attente. Si le
titre royal est réellement pris par le prince
Milan, le Turcs pourront bien, la chose est à
oraindre, rompre les négociation.
Des préparatifs considérables se font dans
la Pologne russe pour approvisionner un
grand nombre de troupes.
Raguse, 20 septembre.
Quoique la conclusion d'un armistioe formel
ne soit pas encore chose certaIne, les com-
mandants des troupes turques ont reçu l'or-
dre de suspendre lélt hostilités. Le lb de oe
mois, Dervisch-Tskelegich Pacha, avec six
mille hommes, obt sorti de Livno, près de
Celebitz, et s'eqt Dtti pendant cinq heures
avec le corps de Ialisch Terknlia. Les Tares
ont eu 80 morts et 20 blessés. Ayant la supé-
riorité du nombre, ils ont poursuivi leur mar-
che vers Grahovo, dévastant les villages et
massacrant la population inoffensive.
A Dalar, ils ont été repoussés par Despoto-
vitoh, qui leur a tué 60 hommes et leur a pris
deux drapeaux. Hier ils sont rentrés à Livno.
DERNIERE HEURE
L'Agence russe nous transmet la dépêche
suivante :
St-Péterabourg, 20 septembre, 6 h. s.
Le Journal de Saint Pétersbourg se moque
du factum publié par le journal la France, il
relève qu'à la date du 11 juin assignée au
pretendu traité l-s. deux chanceliers n'étaient
pas à Berlin. Il ajoute que tout démont ait
la mystification, jusqu'à la signature du
comte Adlerberg apposée pour copie con-
forme.
Des télégrammes privés annoncent que le
prince Milan et ses ministres n'acceptent pas
la motion de l'armée qui le proclame roi de
Serbie.
M. Ristich a remis aux consuls une note et
un rapport de Tchernaïeff à l'appui, dénon-
çant la rupture de l'armistice ppr les Turis,
qui se sont jetés su7 les Serbes, près Bo-
bovitch avec les forces d'iufanterio et d Rf-
u!'cf-;t!
De nouvelles ernaatés s'exercent contre les
Bulgares qui refusent de signer un manifeste
contenant des remerciements à la Porte pour
sa protection.
Vendredi S2 Sentcmbre 1870
E
RÉDACTION
l'adresser au Secrétaire de la Rédacttas
de 2 heures à minuit
53, Mme de I*ju £ >e«$®r
les lettres nm[ affranchie; mtmi r~l
ARPIHENERTG
?AMS
Troî,s mois 13 fc-
§ix mois.,.,. 3$
Un an..,,..»..,,..,.*.,. 50
.oÉPAR'rDDft
frois mots. 15 fl
Sis mois.32
Un an .,< 62
ADMINISTRATION
r 4dr«s»«r lettres et mandats t rÂdxmniaSMtfssfc
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Six mots. 25
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170'9 aou , 15 b,
Six mois. 82
Du m. tî
JOURNAL REPUBLICAIN CONSERVATEUR
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BU'LLET:INJ(i;:
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f -.-:. '- -:--z:--
Paris, 21 septembre 1876.
0 Le Journal officiel d'hier matin contient
une note relative aux réunions publiques.
Ils rappellent la législation éxistante, qui
assujettit ces régnions à une autorisation
préalable; on trouvera cette note plus loin.
La situation reste la même en Orient.
La suspension d'arme. est observée tant
bien que mal, mais le délai fixé doit expi-
rer à la fin de cette semaine, et on se de-
mande anxieusement si, à cette époque, les
puissances aurout pu se mettre d'accord
pour faire à la Porte des contre-proposi-
tions de paix. Cela est peu probable, car
les organes russes insistent plus que ja-
mais pour la conclusion d'un armistice ré-
gulier et de durée assez considérable, en
faisant remarquer que la situation actuelle
est trop incertaine pour permettre aux
négociations de paix de se poursuivre avec
de sérieuses chances de succès. D'ailleurs,
si nous en croyons une dépêche de Franc-
fort, qui concorde avec nog renieignements
particuliers, aucune proposition n'a encore
été faite à la Porte, et les puissances se sont
seulement mises d'accord sur la nécessité
de prolonger la suspension d'armes.
La même dépêche déclare que la nouvelle
donnée hier par le Daily-Telegraph, rela-
tivement à des propolttions faites par l'An-
gleterre, n'est fondée sur rien. Le Nord,
de son côté, tout en démentant que ces
propositions aient été faites, les passe ra-
pidement en revue. Cette partie de l'arti-
cle du Nord eàt intéressante en ce qu'elle
nous apprend que pour le Monteaegro,
tout au moins, la Russie ne se contentera
pasdustata quo antebellum, « Sans par-
ler, dit la feuille officieuse russe, des ré-
sultats matériels de la guerre, qui ont été
incontestablement favorables au Montene.
gro, la nécessité d'établir non pas une tran-
quillité éphémère, mais une paix durable,
devra peser d'un poids décisif sur les dé-
terminations de la diplomatie. Or, on con-
nait les conflits périodiques qui sont nés
de la configuration topographique de la
Mentagne-Noire, dont les habitants n'ont
aucun débouché pour l'échange de leurs
produits contre les denrées qu'ils ne peu-
vent retirer de leur propre pays, ni même
des pâturages en quantité suffisante pour
leurs troupeaux. Toute solution qui ne don-
nerait pas satisfaction à ce double besoin
serait essentiellement précaire, et ne mé-
riterait pas le nom de «paix durables
qu'on devra pouvoir appliquer, pour l'hon-
neur de l'Europe, aux arrangements par
lesquels elle mettra fin aux complications
actuelles. »
La question de paix ou de guerre va,
d'ailleurs, faire prochainement un pas en
avant, car on nous annonce que le retour
du général Ignatieff à Constantinople est
imminent. Le général aurait, dit-on, rf ça
de l'empereur de Russie des instructions
qui sont loin d'être conciliantes, et le czar
s'apprêterait à faire passer la Turquie sous
de véritables fourches caudines. Le sultan
consentira-t-il à baisser la tête? Là est
toute la question. On croit à Vienne q. e, si
dures que soient les conditions de la Russie,
la Turquie les subira. Nous sommes loin
d'en être convaincus.
On ne semble, d'ailleurs, pas se faire
d'illusions à Constantinople, s'il faut en
croire uné correspondance adressée à l'offi-
cieuse agence Havas et que cette dernière
publie avec une sorte de solennité. Après
s'être étendu asses longuement sur tous,
les conseils tenus à la Porte pour en arri-
ver à la confection du mémorandum que
l'on sait, le correspondant de l'agence
ajoute :
« Tout commandait à la Porte de faire
taire ses scrupules et de céder à la près.
sion du dehors. > Elle l'a donc fait à son
corps défendant et j'ajouterai, par acquit:
de conscience, car elle sait bien que quoi;
qu'elle fasse, elle ne désarmera pas la
Russie, qui s'apprête à lui chercher que-
relle sous n'importe quel prétexte, et que
ni les concessions du sultan ni les efforts
de conciliation, tentés avec plus ou moins
de bonne foi par les puissances, ne réuni-
ront pas à la détourner de ses projets belli-
queux.
» On a reçu l'autre jour ici la nouvelle
d'une concentration de troupes russes en
Bessarabie, et nous avons appris, depuis,
que tous les bâtiments-transports russes
de la mer Noire sont retenus à Olespa. Le
général Ignatieff a reculé, dit-on, indéfini-
ment l'époque de ion retour à Constantino-
pie, ce qui est encore un fort mauvais in-
dice. La guerre avec la Russie est, d'ail
leurs, ici, dans les prévisions générales, et
il n'y a pas que le gouvernement qui s'en
préoccupe. Le cabinet anglais annonce
lui même, par la bouche de lord Derby,
que la flotte britannique de la Méditerranée
qui devait aller hiverner à Lemnos, ou à
Mételin, continuera à garder son mouillage
de Besika. >
peut-on espérer au moins que la Russie
et l'Angleterre tomberont d'accord sur les
conditions de la paix ? c'est peu probable.
Cet accord, s'il avait dû se faire, serait
déjà fait, et rien alors ne serait de nature
à nous faire craindre des complications eu-
ropéennes. Au surplus, nous saurons pro.
chainement à quoi nous en tenir sur la
ligne politique que compte adopter le ca-
binet de Saint James. Ainsi que nous l'a-
vons annonëé, plusieurs meetings consi-
dérables ont été tenus lundi à Londres
pour protester contre les massacres dela
Bulgarie. L'un d'eux, présidé par le lord
maire, a décidé que les résolutions prises
seraient communiquées à lord Berby et à
lord Beaconsfield par une députation, à la
tête de laquelle se placerait le premier ma-
gistrat de la Cité.
Il est d'usage que le ministre réponde à
une semblable députation et explique les
vues du gouvernement. Nous n'espérons
pas savoir grand chose de lord Derby, qui
est beaucoup trop diplomate pour engager
le gouvernement et qui a d'ailleurs un pré-
texte tout trouvé, les négociations enta-
mées, pour garder le silence. Mais lord
Beaconsfield n'a pas encore eu le temps de
dépouiller assez complétement le M. Dis-
raëli que nous avons connu pour que nous
ne soyons pas en droit d'espérer de sa part
d'importantes révélations. Cela devient
d'autant plus indispensable que le rapport
officiel de M. Baring est publié et que les
scènes qu'il décrit surpassent en horreur
celles que l'on attribuait à l'imagination
des journalistes.
Le pronunciamiento de l'armée serbe et
la proclamation du prince Milan comme roi
de Serbie semblent avoir été un simple bal-
lon d'essai. Hais l'émotion produite a été
si vive à Vienne que l'on plaide les cir-
constances atténuantes. Le gouvernement
serbe déclare qu'il ne voit dans tout cela
qu'une démonstration sans importance,
qu'un mouvement d'effervescence causé
par la nouvelle du propositions de paix
présentées par la Turquie. La presse de
Saint-Pétersbourg appuie sur la même
note et morigène Je prince Milan, qui non
content de ses premières explications, dés-
avoue énergiquement la manifestation. Et
cependant le correspondant du Times à
Belgrade mande au journal de la Cité qu'il
a va les nouveaux billets de banque qui
l'on va prochainement émettre et que
portent en toutes lettres : « Royaume de
Sfirbie. »
En résumé, la ntuation est plus tendue
que jamais. Les puissances, désespérant de
se mettre d'accord sur les conditions de la
paix, te bornent à obtenir de la Porte la
conclasion d'un armistice, la Russie ayant
déclaré que s'il n'eet pas accordé, elle
rompra tes relations diplomatiques avec
la Turquie. Les puissances ne voient là
qu'une question de forme et s'uniisent
au cabinet de Saint Pétersbourg pour ob-
tenir l'armistice, tout en se réservant de
loi résister s'il posait à la paix des condi-
tions exagérées. Cette politique peut sem-
bler très-saga, et c'est celle cependant qui
a conduit l'Europe à la guerre en 1853.
t&OUïfcSES DE PARIS
Ctêtmre le i 9 sept" le 20 sept". Il. Butane
S 0 0
aoaptant 71 12 1,2 71 05 07 1 2
fincoor. 71 10 71 07 l 2 0212
4 I S ©/«►
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ft O/O
jowptKui 126 45 106 45
fis tcMr >• 6 47 1/2 106 50 02 112 .1..
PETITE BOURSE DU SOIS
Sans affaires.
+
0 notre Roi !
Saint Michel archange nous joue un
vilain tour. C'est sa fête le 29 septem-
bre. Et, comme il a craint que sa fête
ne passât inaperçue, il a suggéré à
« une réunion de catholiques » cette
idée, qu'ayant eu personnellement l'hon-
neur de présider à la naissance de
l'Enfant du miracle, il y avait là une
belle occasion de faire parvenir à M. le
comte de Chambord une adresse de
« ses très-humbles, tr.ès obéissants et
très-fidèles serviteurs et sujets. » Les
conservateurs devraient être désolés,
car voilà la politique qui gagne même
le Paradis.
L'adresse s'étale tout au long dans
le moniteur de la légitimité, l'Unton,
avec indication des personnes chez qui
les très-humbles, très-obéissants et
très-fidèles serviteurs et sujets (sujets
de qui ? du roi apparemment, car ce
n'est guère que d'un roi qu'on peut être
les sujets !) pourront aller déposer
leur signature. C'est un bouquet d'es-
pérances, exhalant un vieux parfum
d'antique foi monarchique, espoir un
peu fané que fit naître la venue au
monde du prince, espoir que laisse sur-
vivre son existence et qui ne se dessè-
che pas encore; il renferme bien aussi,
par ci, par là, quelques soucis, em-
blême des esprits qui ne sont point en-
core guéris € des aventures périlleuses
et criminelles » ; mais ces soucis, ha-
bilement disposés, sont étouffés sous
les roses, — ce qu'on comprend, d'ail-
leurs, puisqu'il s'agit de fêter un anni-
versaire.
Ce n'est pas nous, témoins attristés de
tant de destructions, qui croirons jamais
qu'on puisse rien édifier de solide sur la
terrain de la Révolution. Quelque espoir
que l'on fonde ou que l'on feigne de fon-
der sur un a nouvelle expérience, con-
damnée à la fois par non traditions et par
la raison,-nous savons que notre cher et
malheureux pays ne se sauvera que par
vous, Monseigneur, c'e«tà-dire par le
nrincioe que Vous représentez.
- Un jour la France, enfin dêaabulée, vien-
dra vous demander d'abriter sous les plis
de votre drapeau sa fortune, son honneur
et ses croyances l
En vain les fautes des couriervateurs et
les ruses de leurs adversaires ont mutti
plié le" obstacles au triomphe du droit. Un
tDy~r~tïx ¡( s+.i{l(¡ novs di, qu'à Y En font
du mir acle la Providence a dû aligner
une mission à la hauteur de sa naissance.
Sur la terre d'exil, Mooseigneur, 0 NOTRE
Rot ! votre auguste caractère a forcé l'ad-
miration de vos ennemis même.. A votre
attitude, à votre parole, le monde entier a
reconnu dame le chef de la Maison de Bour-
bon le gardien fidèle de l'antique honneur.
Vienne maintenant l'heure marquée par
Dieu pour votre règne, et par vous la
France retrouvera le lustre séculaire de sa
royale couronne.
En somme, nous ne voyons pas grand
mal à ce que MM. les royalistes pen-
sent de la sorte et fassent parvenir à
M. le comte de Chambord l'expression
discrète de leurs sentiments. Le prin-
pal inconvénient qui puisse résulter de
pareilles démarches, c'est de permettre
à l'héritier des Bourbons de supputer
mélancoliquement le chiffre de ceux qui
éprouvent le besoin de se déclarer ses
très-obéissants et très-fidèles sujets ; et
de cet inconvénient, nous aurions tort
de nous préoccuper outre mesure.
Mais ce qui nous paraît peut-être un
peu irrégulier, c'est la prétention de
rédiger une adresse à « 0 NOTRE ROI »
et de provoquer, avec publicité et dé
signation des. messieurs quêteurs, une
sorte de pétitionnement en faveur d'une
des dynasties qui aspirent à remplacer
le gouvernement existant. Ce qui sauve
l'irrégularité, c'est le ridicule. Cepen-
dant, comme nous ne l'avons nullement
provoqué,nous avons le droit d'en pro-
fiter sans remords.
Croyez-vous que le gouvernement de
Juillet, bien qu'il pût se croire le souffle
populaire èn poupe, puisqu'il avait été
poussé par lui au pouvoir, eût toléré
que les tenants de la légitimité diri-
geassent contre lui une note collective
de leurs regrets et de leurs espérances,
ou que les partisans de la dynastie de
Boulogne et de Strasbourg fassent pu-
bliquement invités à se compter ? Croyez-
vous que le gouvernement impérial,
malgré tous les millions de suffrages
dont il était si sûr, et l'amour du peu-
ple dont il ne doutait pas, eût permis
aux républicains de recruter, par la
voie de la presse, les noms de tous ceux
qui aspiraient à un régime de liberté ?
(J'est à dire qu'on frémit en pensant aux
courbatures que ces gouvernements
eussent doanées au ministère public et
à la gendarmerie, en pareille occur-
rence !
Il nous souvient encore qu'en 1873,
au moment où la monarchie faisait
grand bruit pour cacher le peu de beso-
gne qu'elle parvenait à faire, un jour-
nal, qui se prenait sérieusement pour
royaliste, disait : Qaanl le roi sera
entré à Paris, il faudra, dès le lende-
main, coffrer les agitateurs en vue (li-
sez : les républicains marquants) et
faire fermer boutique aux journaux de
désordre (lisez : organes républicains);
alors, la France, jouissant d'une tran
quillité sans mélange, pourra, tout à son
aise, acclamer son Roi. D'après ce jour-
nal-là, qui n'était pas l'Union, mais un
succédané folâtre ne l'Union, il ne pa-
raît pas que la royauté légitime non
plus eût laissé à la revendication répu-
blicaine une liberté illimitée.
Eh bien, la République est fondée, elle
est la loi, elle est le gouvernement du
pays. Gouvernement d'agitation, disent
les conservateurs. A coup sûr, ils cher-
chent à se donner raison, puisque les
voilà qui ne laissent plus passer un
saint sans tenter un appel à leurs par-
tisans, une sorte de plébiscite en cham-
bre. Où est l'agitation ! Quelles masses
cet appel émeut-il? Ils crient dans le
désert et c'est le néant qui leur répond.
Ce que les gouvernemeats prétendus
forts n'auraient jamais Toulu endurer,
la République, ce .gouvernement qu'ils
ne croient pas viable, le supporte sans
crainte. De ces assauts qui auraient
fait frémir la légitimité, l'orléanisme
ou l'empire, elle rit, et franchement. La
République serait-elle donc plus forte
que tous ces gouvernements forts ?
Pour nous, c'est la seule conclusion à
tirer de cette dernière escapade des
soi-disant conservateurs.
K PAUL LAVARGUB.
—— ♦—— —
Le Journal officiel publie la Bote sui-
vante :
Dan. nne réunion publique non autorisée,
tenue le 11 de oe moi", dans la salle du théâtre
Tivoli, il a été prononcé plusieurs discours
traitant de matières politiques et religieuses.
Nous croyons devoir rappeler à cette occasion
qae l'article la* de la loi du 6 jain 1868, qui
soumet h l'autorisation du préfat de police *
Paris et des préfets dans les départements
les réunions publiques ayant pour objet de
traiter de matières politiques ou religieuses,
est toujours en vigueur.
Si de nouvelles infractions à cet article
venaient à être constatées, des procès ver-
baux seraient immédiatement dressés et soi
vis de poursuites correctionnelles.
ANGLAIS ET ALLEMAND
Voici que la rentrée des classes ap-
proche, et que les questions qui inté-
ressent l'instruction secondaire vont
revenir sur le tapis.
Le hasard fit que je me trouvais l'au-
tre jour avec un des professeurs qui
sont chargés, dans nos lycées, de l'en-
seignement des langues vivantes, et
j'en pris occasion de lui demander des
nouvelles de nos classes d'anglais et
d'allemand.
J Avais été fort ému, à l'époque où
l'incident se produisit, d'une interpel-
lation que M. Journault, l'honorable dé-
puté de Seine-et Oise, avait cru devoir
adresser à M. le ministre de l'instruc
fkra publique. Il s'y était plaint, et en
termes fort vifs, du peu de résultats
qu'obtenait l'enseignement des langues
vivantes dans nos établissements d'ins-
truction secondaire et de la défaveur
dont il y était frappé.
Le ministre avait répondu par quel-
ques-unes de ces phrases banales dont
les chefs d'administration ne sont ja-
mais chiches. et qui sont la menue mon-
naie courante de l'approbation offi-
cielle.
Mais les ministres savent rarement
les vérités désagréables, et ils ne les
avouent jamais.
Je demandai donc ce qu'il fallait pen-
ser de ces accusations, et si, en effet,
nous étions encore aussi loin qu'on
voulait bien le dire sur ce point parti-
culier d'éducation de nos voisins d'ou-
tre-Manche et d'outre-Rhin.,
— IL y a bien a aire a ceia, me re-
pondit-il. Je sais qu'en effet dans le
le public on passe aisément condamna-
tion sur l'infériorité des élèves de vo-
tre nation dans l'étude des langues vi-
vantes. C'est votre coutume, à vous au-
tres Français, de prendre plaisir à vous
déprécier en vous comparant aux peu-
ples voisins. J'ai longtemps habité l'Al-
lemagne; j'ai professé en Angleterre,
je puis vous affirmer que l'enseigne-
ment da français n'y est pas sensible-
ment supérieur à ce qu'est chez vous
en ce moment celui de l'anglais et de
l'allemand.
Vous entendez parler sans cesse des
brillants résultats qu'obtiennent les pro-
fesseurs de français en Allemagne.
Mais non. mais non. t ils ne savent
pas tant que cela le français. Ils font
de votre langue en vrais Germains,avec
leurs têtes carrées et leurs esprits pe-
sants, une étude scientifique et philo-
logique, sans que les élèves arrivent à
l'écrire et surtout à le parler correcte-
ment. ,
Pour l'Angleterre, allez demander,
je vous prie, à M. Tarver de Eaton ou
à M. Gustave Masson de Harrow, s'ils
croient leurs élèves supérieurs aux vô
très, et vous verrez ce qu'ifs vous ré-
pondront. Ce qui vous trompe, c'est
qu'il vient chez vous beaucoup d;étran-
gers qui savent à peu près votre langue.
Ils ne l'ont pas apprise dans les col-
lèges. Ce sont en général des hommes
qui, au temps de leur enfance, ont été
élevés par des gouvernantes frarç^ises.
L'habitude commeoce à se répandre à
Paris, dans les familles aisées, d'avoir
des bonnes ou des gouvernantes alle-
mandes et anglaises : dans vingt ans,
les Français qui pourront voyager se-
ront, eux aussi, en possession de deux
ou trois langues, sans qu'on puisse trop
en reporter l'honneur à l'enseignement
des établissements d'instruction pu-
blique.
Je vous assure qu'en France, à Paris
au moins, l'enseignement des langues
vivantes a beaucoup gagné depuis dix
ans; il a encore des répugnances à
vaincre et des progrès à faire : mais
quoi qu'on dise, il est en fort bonne
voie.
Et tenez ! ajouta mon interlocuteur,
puisque vous vous intéressez à ces ques-
tions et que vous les traitez volontiers
dans le journal, il y a un point que je
souhaiterais de vous voir toucher, pour
appeler sur lui l'attention du public et
du ministre.
Vous savez que toutes les instructions
ministérielles, toutes- les recommanda-
tions des inspecteurs, tous les conseils
des proviseurs tendent à ramener notre
enseignement à l'utilité pratique. Nous
sommes tenus d'habituer progressive-
ment nos élèves à manier la langue
écrite sans le secours du dictionnaire
ou de la grammaire; nous les interro-
geons en anglais ou en allemand, et ils
doivent répondre dans la même langue.
Les élèves de quatrième pour l'an-
glais, de troisième ou tout au moins de
seconde pour l'allemand, qui présente
plus de difficultés et qui exige plus
d'études, arrivent pour la plupart à
écrire correctement une lettre familière
ou quelque récit très simple. Ils lisent
couramment la prose usuelle, et tradui-
sent à livre ouvert, soit l'allemand ou
l'anglais en français, soit le français
en anglais ou en allemand.
Tel est l'enseignement que nous don-
nons, tels sont les résultats auxquels
notre devoir est de tendre, et que notre
honneur est d'atteindre.
Tous les exercices des lycées ont, soit
dans les compositions, soit dans les
examens publics, des sanctions qui leur
sont appropriées:
Savez-vous quelle est la sanction de
notre enseignement? Au concours géné-
ral, au grand concours, comme vous
dites, on choisit presque toujours pour
sujet de composition, pour morceau à
traduire en français, un morceau de
*
haute poésie, une espèce d'énigme en
vers, qui embarrasserait plus d'un étu-
diant d'Oxford ou de Heidelberg, si l'ari-
dité du sujet ne le rebutait pas dès les
premières lignes. Pour sortir victorieux
d'une semblable épreuve, il ne suffit pas
de bien savoir l'allemand ou l'anglais.
Cette connaissance même n'est pas né-
cessaire. Il faut avant tout avoir l'ha-
bitude de la version grecque et latine.
, l f
Ce n'est pas le fort en langue vivante,
u'e&t le fjrt en version qui pt me t,8
camarades dans ce concours spécial.
Le thème est d'ordinaire un morceau
de philosophie et de morale, hérissé de
j
mots fauteur, dont le sens est parfois
obscur et qui n'a rien de commun avec
la langue usuelle que l'on nous recom-
mande avec raison d'enseigner dans les
lycées.
Aux examens écrits du baccalauréat,
la composition que l'on devrait deman-
der aux candidats. c'est un récit ou
tout au moins un thème. On a préféré
la version : pourquoi ? Tout le monde
sait qu'un élève d'intellierence moyenne,
muni d'un bon dictionnaire, peut, après
quelques mois de préparation artifi-
cielle, arriver à traduire tant bien oue
mal un texte, qui n'est pas' difficile.
La version ne prouve aucunement qu'il
sache rien de la langue.
Pour épreuve orale qu'exige t-on ?
quelques vers de Milton ou dq Shaker
peare, de Schiller ou de Gœfhe, qu'il
suffit d'avoir ressassés avec un répéti-
teur, peu de temps avant l'examen.
Est ce que cinq minutes de conversa-
tion avec l'examinateur n'en appren-
draient pas davantage sur le candidat ?
Sont-ce là des énrenves sérieuses ? Où
est. la sanction donnée à cette longue
suite d'années d'enseignement î Le jeu,
comme dit votre proverbe, n'en vaut
plus la chandelle.
Vous n'êtes pasmoins indulgents dans
les concours d'admission aux écoles du
gouvernement, et vous abaissez ainsi le
niveau des études. On nlnbtient que ce
que l'on demande, et encore faut il de-
mander beaucoup pour obtenir un peu.
Il y a donc, comme vous le voyez,
contradiction complète entre l'enseigne-
ment donné dans les classes et les épreu-
ves qui les couronnent.
— Mais à votre avis. demandai-je,
quel remède y aurait il à ce défaut que
vous reprochez à notre enseignement 1
Comment rétablir cet accord dont vous
parlez entra les études et les exa-
mens?
— Oh ! ce sont das réformes bien
simples, qui ne révolutionneraient rien
du tout, mais qui n'en seraient pas moins
utiles.
A dater du jour où se présenteront
au baccalauréat les é'èves qui auront
dû suivre le programme complet des
langues vivantes, depuis la huitième
jusqu'à la philosophie (neuf années d'é-
tudes, monsieur, neuf années d'études !),
c'est-à-dire vers 1878, l'usage des dic-
tionnaires et des grammaires pourrait
et devrait être proscrit au grandcon-
cours, ainsi que dans les examens
écrits du baccalauréat et des écoles du
gouvernement.
On laisserait de côté la version, qui ne
prouve rien.. Les candidats auraient à
traduire un tpxte français, ou à compo-
ser une narration, une description une
lettre familière. Les textes ou matières
seraient toujours faciles ; il suffirait
pour les traiter, de la langue usuelle,
de celle que parlent ou écrivent cou-
ramment les gens de bonne compa-
gnie.
Au grand concours, la version "serait
choisie chez les prosateurs modernes
(histoire, récits de voyages, descrip-
tions, lettres). Le thème serait remplacé
par une narration historique ou un ré-
cit familier dont le texte pourrait être
donné en français.
Si en échange des sacrifices que fait
l'Etat pour établir l'enseignement des
langues vivantes sur des bases plus
larges, il n'a pas le droit d'exiger de
notre jeunesse les sérieuses épreuves
que je réclame, autant vaudrait alors
supprimer des classes devenues à
peu près illusoires.
FRANCISQUE SARCEY.
7 :
LA GUERRE
Dépêches de sources diverses
Londres, 20 septembre.
Le rapport de M. Baring estime à 12.000 le
nombre des chrétiens maasaorâs et à 200 sen-
lement le nombre de Tares qui ont été tnés
par les insurgés. Le nombre total de villages
brûlés ept de 58.
M. Baring conclut en disant que cette ma-
nière- d'êtooffer un soulèvement est on ne
peut plus inhnmains, 60 innocents souffrant
pour un coupable.
Londres, 20 septembre, soir.
Un supplément de la Gazette officielle con-
tient le rapport de M. Baring sur les barba-
ries commises en Bulgarie.
Ce rapport, qui est très long, fait l'histo-
rique des mouvements insurrectionnels dans
cette région.
Il donne des détails sur les faits de pillage,
de violences commises sur les femmes et au-
tres barbaries, faits qui, d'après une lettre
de sir Henry Elliot jointe au rapport, justi-
fient complètement tonte l'indignation sonle-
vée à ce sujet, bien qne quelques incidents
racontés par les journaux aient été exagé-
rés.
Les détails donnés par le rapport sur les
massacres de Bat&k dépassent en horreur
tout oe qui a été pnblié jusqu'ici. Sur ce point
seul, il y a 5 000 victimes.
M. Baring demande qu'une punition exem-
plaire poit infligée à Mo ammed-Agba et à
Aohmet-Agha qui sont responsables des mas-
sacres de Batak, massacres pour lesquels
Achmet-Agha, a été décoré de l'ordre du Med-
jidié.
M. Baring insiste sur la nécessité de pren-
dre des mesures rigoureuses, énerglqnp., et
de faire justice impartiale pour rétablir la
tranquillité dans ces malheureux pisys.
Londres, 20 septembre.
Le Daily News publie une lettre de Garibal-
di adressée à son ami Arnold, dans laquelie
il dit qu'il ne voit d'autre solution à la oues
tion d'Orient que de foire repasser le Bos-
phore aux Turcs. Il croit qu'une confédéra-
tion des peuples libres de la p",ninsu(e des
Baikans serait aussi otile à l'Angleterre que
l'existence d un empire QUi Ferait continuel-
lement le centre d'insurrections toujours re-
nouvelées.
Vienne, 20 septembre.
La Correspondance politique publie la note
suivante, qui a un caractère offleienx :
« Le gouvernement serbe a fait déo!ara?
ici qu'il considère comma une démonstra-
tion dépourvue de toute. importance la pro-
clamation de Milan comme roi qe Serbie,
faiie par les troupes serbes ftons la première
impression des conditions de paix présentées
par la Porte. Le prince Milan et son gouver-
nement ont désavoué éuergiquement cette
manifestation, à laquelle il ne sera pas donné
d autre suite.
Francfort, 20 septembre.
Les propositions en vue de la paix, attri-
buées à l'Angleterre par le Daily Teiegraph,
sont inexactes. Ancune proposition n a été faite
jusqu'à ce moment. Les puissances sont seu-
lement d'accord Sur la nécessité de prolonger
la suspension d'arme.
La désapprobation unanime qu'a rencontrée
en Russie le toast de Tchernaïeff proiuit la
meilleure impression. On annonce de source
certaine, que le cabinet de Saint-Pétersbourg
admet la suspension d'armes comme un com-
mencement d'armistice, .t comme permettant
d'entamer utilement des négociations de
paix.
Constantinople, 20 septembre.
Les négociations se poursuivent active.
ment, et grâce à un échange rapide de télé-
grammes antre les «mbJnets, on espère abou-
tir à une solution prochaine.
Oa ne doute point, en tous cas, que la Tur-
quie ne consente À une prolongation de la
suspension d'armes si l'on ne s'est pas en-
tendu sur une résolution définitive avant le
24 septembre. -
Le Times publie les dépêches suivantes:
Belgrade, 18 septembre.
Une députation de l'armée, composée de
militaires de tous les rangs, est en ronte
pour Belgrade, où elle va saluer le prince
comme roi de Serbie. Ea c-i moment, le pu-
blic est divisé d'opinion sur cette affaire. Le
petit nombre, se composant de ceux qui per-
sistent encore a croire que le bien naîtra de
la continuation de la guerre, attache de l'im-
portance à la déclaration des soldats. Les
plus circonspects d'entre eux disent que,
bien qu'ilî considèrent que le mouvement a
été prématuré, la chose est fite, et qu'il faut
bien l'accepter.
Le grand nombre représentent le sujet
comme De comportant pas une attention sé-
riecte et comme un accès de loyauté après
dîner, do la nature de ceax qui ont en lieu A
chacun des repae pnbiics qui se sont donnés
en Serbie pendant ces dernières années. Il y
a lieu de craindre cependant que parmi les
moins nombreux de ces deux catégories, il
ne se trouve des gens qui sont en position de
changer l'aspect de cette fo la affaire en lui
faisant prendre on caractère inqniétant; et
malhenrsusement il y a encore assez de ce
monde-là qui peut influencer le cours des
événements pendant les quelques semaines
à venir. — Dans les régions élevées, la proba-
bilité d'un armistice se terminant par une
paix permanente est tournée ouvertement
en ridicule. — Les Russes qui se trouvent
ici prétendent avoir déjà vu le nouveau pa-
pier monnaie et qu'il porte sur sa face les
mots suivants : < Royaume de Serbie. >
Semlin, 19 septembre.
Le ministre de la guerre est parti de Bel-
grade pour aller h la rencontre de la dépu-
tatioa de l'armée qui vient pour saluer le
roi et l'a renvoyée sur la ligne de front.
M. Ristitch a adressé une protestation con-
tre les actes commis pir les Turcs depuis le
commencement de l'armistice, à tons les con-
suls qui se trouvent à Belgrade.
Berlin, 19 septembre.
L'armée serbe ayant totalement échoué dans
sa tentative de conquérir pt d'occuper le ter-
ritoire turc, on avait espéré que l'intérêt
slave se contenterait du maintien du statu quo,
La proclamation faite par le général Tcher-
naïeff du prince Milan comme roi de Serbie,
est appelée À frustrer cette attente. Si le
titre royal est réellement pris par le prince
Milan, le Turcs pourront bien, la chose est à
oraindre, rompre les négociation.
Des préparatifs considérables se font dans
la Pologne russe pour approvisionner un
grand nombre de troupes.
Raguse, 20 septembre.
Quoique la conclusion d'un armistioe formel
ne soit pas encore chose certaIne, les com-
mandants des troupes turques ont reçu l'or-
dre de suspendre lélt hostilités. Le lb de oe
mois, Dervisch-Tskelegich Pacha, avec six
mille hommes, obt sorti de Livno, près de
Celebitz, et s'eqt Dtti pendant cinq heures
avec le corps de Ialisch Terknlia. Les Tares
ont eu 80 morts et 20 blessés. Ayant la supé-
riorité du nombre, ils ont poursuivi leur mar-
che vers Grahovo, dévastant les villages et
massacrant la population inoffensive.
A Dalar, ils ont été repoussés par Despoto-
vitoh, qui leur a tué 60 hommes et leur a pris
deux drapeaux. Hier ils sont rentrés à Livno.
DERNIERE HEURE
L'Agence russe nous transmet la dépêche
suivante :
St-Péterabourg, 20 septembre, 6 h. s.
Le Journal de Saint Pétersbourg se moque
du factum publié par le journal la France, il
relève qu'à la date du 11 juin assignée au
pretendu traité l-s. deux chanceliers n'étaient
pas à Berlin. Il ajoute que tout démont ait
la mystification, jusqu'à la signature du
comte Adlerberg apposée pour copie con-
forme.
Des télégrammes privés annoncent que le
prince Milan et ses ministres n'acceptent pas
la motion de l'armée qui le proclame roi de
Serbie.
M. Ristich a remis aux consuls une note et
un rapport de Tchernaïeff à l'appui, dénon-
çant la rupture de l'armistice ppr les Turis,
qui se sont jetés su7 les Serbes, près Bo-
bovitch avec les forces d'iufanterio et d Rf-
u!'cf-;t!
De nouvelles ernaatés s'exercent contre les
Bulgares qui refusent de signer un manifeste
contenant des remerciements à la Porte pour
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